Kosovo
Question de :
M. Claude Jacquot
Vosges (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 10 juin 1998
M. le président. La parole est à M. Claude Jacquot.
M. Claude Jacquot. Monsieur le ministre des affaires étrangères, je souhaite, de façon pressante, attirer votre attention sur la dégradation de la situation au Kosovo. Des milliers de personnes fuient depuis quelques jours les lieux des combats qui opposent les soldats venus de Serbie à ceux de l'armée de libération du Kosovo. Cette situation interpelle la communauté internationale, l'Europe et bien sûr la France. Que faire pour aider les Albanais et les Monténégrins qui doivent accueillir de façon décente les flots de réfugiés qui traversent leurs frontières ? Que faire pour empêcher une dérive dommageable aux populations et porteuse d'instabilité dans les Balkans et en Europe ?
L'Union européenne a adopté hier des sanctions économiques. Vendredi prochain, le groupe de contact se réunira à Londres pour faire des propositions à caractère diplomatique et militaire aux Nations unies. Vous devez participer demain, à Paris, à une rencontre du groupe préparatoire. Quelles sont les propositions que compte faire la France afin de trouver la voie permettant d'éviter au Kosovo la répétition tragique du drame bosniaque ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, depuis quelques jours nous assistons effectivement à une escalade de la violence au Kosovo, violence de la répression, violence des actions armées - donc, dans les deux sens - qui entraîne le déplacement d'environ 45 000 personnes à l'intérieur du Kosovo et le départ de près de 10 000 réfugiés soit vers l'Albanie, soit vers la Macédoine. Malheureusement, on s'attend, dans les jours qui viennent, au départ de 10 000 à 20 000 personnes supplémentaires.
Notre action est très clairement menée et exprimée dans le cadre du groupe de contact depuis le début du mois de mars. Aujourd'hui, la situation s'aggrave. Nous avons lancé un appel pressant et très ferme à l'arrêt immédiat de la répression et de tous les actes de violence. Nous avons décidé, au niveau européen, de rétablir le gel des investissements, qui avait été levé à la demande des Américains après la percée relative qu'avait obtenue M. Holbrooke.
Par ailleurs, nous avons maintenu le gel des avoirs et la suspension des visas pour tout responsable yougoslave engagé dans des opérations de répression. Je vous rappelle qu'un embargo sur les armes a été voté aux Nations unies, mais qu'il n'a naturellement pas d'efficacité immédiate puisque des armes sont déjà sur place.
Il s'agit maintenant de savoir jusqu'où il faut aller et nous sommes tout à fait déterminés à arrêter cet engrenage. Il y a plusieurs semaines, nous avons demandé - la France a été en pointe sur ce plan -, conformément à la déclaration que j'avais faite à ce sujet, que l'OTAN examine toutes les options, tous les scénarios, toutes les réponses possibles. Nous avons confirmé cette demande il y a quelques jours. L'OTAN nous a répondu que les études en question ne seraient terminées que fin juin. C'est trop tard. J'ai fait redemander hier par notre représentant qu'elles soient menées à terme cette semaine, qui est une semaine décisive, car une rencontre préparatoire doit intervenir demain à Paris et le groupe de contact doit se réunir vendredi à Londres.
Dans le même temps, la France soutient un projet de résolution du Conseil de sécurité, qui va exactement dans le sens de ce que nous demandons. Au titre du chapitre VII, cette résolution autoriserait, le cas échéant, l'emploi de la force. J'ai déjà déclaré que nous y étions favorables, mais nous sommes encore en train d'en discuter les termes exacts avec les Britanniques.
Voilà où nous en sommes. Ne doutez pas un instant de notre détermination à enrayer cette évolution et à rechercher la solution politique qui permette aux Yougoslaves et aux habitants du Kosovo de cohabiter au moins dans la paix. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Claude Jacquot
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 10 juin 1998