Lutte contre les ligues et groupuscules d'extrême droite
Question de :
M. Stéphane Peu
Seine-Saint-Denis (2e circonscription) - Gauche Démocrate et Républicaine
M. Stéphane Peu alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la multiplication des attaques et provocations générées par des réseaux d'activistes d'extrême droite violents. Dernier évènement en date, dimanche 16 février 2025, un jeune militant de la CGT a été hospitalisé après avoir été poignardé par un groupe d'une vingtaine d'individus qualifiés d'ultradroite par le parquet de Paris. Cagoulés et munis de tessons de bouteilles, ces individus ont fait irruption à la porte de l'Association culturelle des travailleurs immigrés de Turquie (Actit) à Paris alors qu'elle accueillait les membre de l'association Young Struggle pour une projection du film Z, de Costa-Gavras. Loin d'être un acte isolé, cet évènement s'inscrit, au contraire, dans une longue série d'agressions et de provocations véhiculant une idéologie haineuse et menaçant l'ordre public que M. le député avait déjà souligné dans une précédente question écrite déposée en décembre 2022 et signalée en mars 2023 sans obtenir de réponse (QE n° 4269 - XVIe législature). Face au retour en force de ces ligues violentes et racistes, M. le député souhaite, d'une part, connaître les mesures prises depuis décembre 2022, date de la première question écrite, pour dissoudre ces mouvements et veiller à ce qu'ils ne se reconstituent pas et, d'autre part, obtenir un bilan chiffré sur cette même période.
Réponse publiée le 15 juillet 2025
Les associations ou groupements de fait, quelle que soit leur mouvance, qui provoquent à la haine, à la discrimination ou à la violence font l'objet d'une attention constante de la part du ministère de l'intérieur.Une action volontariste est menée pour lutter contre toute atteinte à l'ordre public. Ces groupes font ainsi, de longue date, l'objet d'un suivi par les services de renseignement en particulier la direction nationale du renseignement territorial - DNRT - et les services d'investigation comme la direction nationale de la police judiciaire - DNPJ. Ces services ont été renforcés avec la création d'une brigade d'enquête spécialisée dans la lutte contre les extrémismes violents au sein de la sous-direction anti-terroriste de la DNPJ, en 2021. La gendarmerie nationale y contribue au travers de la sous-direction de l'anticipation opérationnelle (SDAO) qui dispose d'une section spécialisée dans le suivi des contestations violentes, y compris d'individus radicalisés d'ultradroite. L'action de la SDAO s'entend dans le cadre de la comitologie relative à la lutte contre les extrémismes violents. La loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur a expressément prévu, dans son rapport annexé, une lutte renforcée contre les groupuscules extrémistes violents (extrême-gauche, anarchisme, écologie radicale, extrême-droite, etc.) ou les contestations sociales violentes. Chaque fait commis susceptible de constituer une infraction est signalé à l'autorité judiciaire. Toute atteinte aux valeurs et aux lois de notre République, qu'elle soit celle d'un individu ou portée par une organisation, doit en effet faire l'objet de signalements et lorsque les conditions de droit sont réunies, d'interpellations en flagrant délit, en vue d'un déferrement à l'autorité judiciaire. Au-delà des poursuites judiciaires, des mesures administratives sont prises pour prévenir les troubles à l'ordre public, y compris la dissolution administrative du groupe violent lorsque les critères définis par la loi sont réunis. La liberté d'association est toutefois érigée au rang des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971), tandis que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantit les libertés d'expression (article 10) et de réunion (article 11). Ce n'est donc qu'à titre exceptionnel que le Président de la République peut procéder, par décret en conseil des ministres, à la dissolution administrative d'une association ou d'un groupement de fait sur l'un des motifs prévus à l'article L. 212-1 du code précité. La décision de dissolution, immédiatement exécutoire, a démontré son efficacité ces dernières années. Partie intégrante du dispositif mis en œuvre par les autorités publiques pour lutter contre la diffusion d'une idéologie radicale, elle entraîne une désorganisation des mouvances ciblées et réduit l'intensité et la visibilité de leur activité voire entraîne la cessation des actions violentes commises. En outre, la mesure de dissolution interdit et pénalise tout maintien ou reconstitution de cette association ou de ce groupement. Ainsi, l'article 431-15 du code pénal punit de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait de participer au maintien ou à la reconstitution, ouverte ou déguisée, d'une association ou d'un groupement dissous en application de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. Tout maintien ou reconstitution d'une entité dissoute fait l'objet d'un signalement systématique, du ministre de l'intérieur, sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale à l'autorité judiciaire. Les services du ministère de l'intérieur demeurent vigilants quant aux activités des groupuscules susceptibles de troubler l'ordre public et des procédures sont engagées dès lors que les critères définis par la loi sont réunis tout comme ils sont vigilants à ce que ces groupuscules ne se reconstituent pas. Au total, depuis 2017, 44 associations ou groupements de fait ont été dissous. En 2023, 2024 et 2025, neuf associations (Civitas, La Citadelle, Les Remparts, La Traboule et Top Sport Rhône) ou groupements de fait (Bordeaux nationaliste, Division Martel,GUD Paris, Lyon Populaire) d'ultra-droite ont fait l'objet d'une dissolution eu égard à leurs agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens, à leur exaltation de la collaboration ou enfin du fait de provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence. Plusieurs de ces groupements sont par ailleurs, sur signalement de l'autorité administrative à l'autorité judiciaire sous le coup de poursuites pour reconstitution ou ont été condamnés pour ce motif.
Auteur : M. Stéphane Peu
Type de question : Question écrite
Rubrique : Ordre public
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 4 mars 2025
Réponse publiée le 15 juillet 2025