Compte rendu

Commission
des affaires européenne
s

I. Table ronde sur les suites du rapport de M. Mario DRAGHI relatif aux moyens de renforcer la compétitivité européenne avec M. Elie COHEN, directeur de recherche au CNRS et Mme Nadine LEVRATTO, directrice de recherche au CNRS

II.  Nomination de rapporteurs


 

Mercredi
20 novembre 2024

16 heures

Compte rendu n o 7

Présidence de
M. Pieyre-Alexandre Anglade,
Président
 

 


 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 20 novembre 2024

Présidence de M. Pieyre-Alexandre Anglade, Président de la Commission,
 

La séance est ouverte à 16 heures.

 

I.                  Table ronde sur les suites du rapport de M. Mario DRAGHI relatif aux moyens de renforcer la compétitivité européenne avec M. Elie COHEN, directeur de recherche au CNRS et Mme Nadine LEVRATTO, directrice de recherche au CNRS

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Mes chers collègues, nous avons le plaisir de pouvoir échanger avec sur un sujet extrêmement important qui engage les conditions de notre prospérité, de notre indépendance et de la préservation de notre modèle social : il s’agit de la compétitivité européenne. Celle-ci a été le thème d’un rapport remis par M. Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne et ancien président du Conseil de la République italienne, à la présidente de la Commission européenne Mme von der Leyen. Je remercie nos deux intervenants d’être à nos côtés pour en débattre : M. Elie Cohen, directeur de recherche au centre national de la recherche scientifique (CNRS) et Mme Nadine Levratto, également directrice de recherche au CNRS. M. Jean Pisani‑Ferry, qui devait se joindre à nous, a été empêché.

Le rapport Draghi servira de fondement à notre discussion. Celui-ci dresse un constat à la fois sévère et réaliste de la situation de notre continent vieillissant, en défi d’innovation et en faiblesse d’investissement dans la recherche et le développement. Le continent européen y est décrit comme pâtissant d’un marché intérieur fragmenté et encadré par des réglementations jugées excessives au détriment de la compétitivité de nos industries et entreprises. A cela s’ajoute un marché de capitaux trop restreint et incapable d’assurer le financement des entreprises, lesquelles reposent ainsi très largement sur les établissements bancaires. Le rapport Draghi souligne le manque d’universités d’excellence sur notre continent générant ainsi des pénuries de compétences et la fuite de certains cerveaux. Le prix de l’énergie sur notre continent est deux à trois fois plus élevé que chez nos partenaires et compétiteurs américains, ce qui entrave la compétitivité de nos entreprises.

Ce rapport contient des recommandations très précises pour chacune des thématiques évoquées. Elles rejoignent un certain nombre de constats qui ont été faits par la France, le président de la République, et d’autres chefs d’État et de gouvernement. On peut citer : la création d’une agence européenne pour soutenir les projets technologiques de rupture ; le lancement d’une dette commune afin de mieux orienter l’épargne vers l’investissement d’avenir ; l’accélération du développement de nouvelles technologies, et notamment dans l’énergie et le nucléaire ; la mise en place d’une union de l’énergie ; l’assouplissement des règles en matière de concurrence pour favoriser l’émergence de champions européens.

Sur tous ces sujets, ma conviction est que sans une action décisive de la part des Européens pour investir dans les industries d’avenir, l’Europe risque d’être fragilisée, voire reléguée, dans la prochaine décennie. L’Union risque d’être effacée si nous ne revoyons pas notre modèle de croissance, et si nous n’élaborons pas une stratégie industrielle globale. En somme, si nous voulons rester dans la course avec les États-Unis et la Chine, et résister au choc Trump, alors il nous faut apprendre à grandir par nous-mêmes en faisant des choix politiques et d’investissement réfléchis à vingt-sept.

Le risque existant est celui d’une forme de division des Européens dans leur attitude face au président américain. C’est par l’union que nous serons capables de relever les défis devant nous.

Mais avant les interventions des orateurs de groupe, je donne la parole à Éric Coquerel, président de la commission des finances.

M. Éric Coquerel, président de la commission des finances. Je regrette l’absence de M. Pisani-Ferry que je cite fréquemment pour l’estimation des budgets nécessaires pour répondre à la crise écologique ! Il est clair que le rapport Draghi est un document qui fera date, ne serait-ce que du fait de son auteur qui a eu un rôle éminent dans la constitution de la politique économique européenne. Par conséquent, ses critiques prennent d’autant plus d’importance. Il évoque une « lente agonie » de l’économie européenne qui impliquera une dégradation des conditions de vie de la population, une aggravation de la crise environnementale, et un décrochage de l’Europe face à l’économie mondiale et notamment face aux États-Unis. Il y a là un message d’alerte que je partage.

Cependant, notre analyse ne repose pas sur les mêmes prémisses : j’estime que nous vivons l’échec des politiques de compétitivité qui font de la dette l’alpha et l’oméga de toute politique économique, et globalement, des politiques de l’offre où chaque État européen souhaite attirer des capitaux en espérant un investissement et des emplois subséquents. Je constate, et c’est vrai en France et ailleurs, que ces politiques nous mènent vers les difficultés énumérées par M. Draghi. Ces politiques sont en France responsables de la non résolution de la dette financière et de la dette écologique, la seconde étant la plus importante à mon avis. Il y a donc un double échec évident.

Je m’inscris en désaccord avec certaines recommandations de M. Draghi. À mon sens, la relance d’une politique économique européenne nécessiterait une rupture avec le modèle libre-échangiste, et un modèle plus protectionniste.

Concernant la bifurcation écologique, le constat dressé par M. Draghi est celui de l’incapacité de nos économies à investir pour endiguer les crises environnementales et la montée du réchauffement climatique. La première proposition de M. Draghi est d’investir massivement dans la transition écologique à hauteur de 750 à 800 Mds d’euros. Cette contribution doit être rendue possible par la mobilisation de l’épargne des ménages européens et par les acteurs publics. La recommandation de M. Draghi rejoint en ce sens le rapport « Les incidences économiques de l’action pour le climat » de Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, qui soulignaient la nécessité du partage de l’investissement.

La proposition de financement par l’emprunt commun européen faite dans le rapport Draghi est intéressante car elle remet en cause la logique de diabolisation de la dette financière. Les réactions rétives de l’Allemagne à cet égard ne sont que peu surprenantes, bien que la récente crise politique que subit le pays soulève justement la question de l’opportunité de considérer la dette comme l’alpha et l’oméga de toute politique monétariste. Cependant, je ne considère pas que l’émission d’une dette commune soit la solution la plus adaptée. Deux possibilités semblent se dégager à mon sens.

La première consisterait à sortir la dette des marchés financiers. Il serait envisageable que la Banque centrale européenne (BCE) use de prérogatives similaires à celles employées lors de la crise de la Covid-19, à savoir l’achat de titre émis par elle-même et mis à disposition des banques centrales européennes nationales. Cela permettrait aux banques centrales de mobiliser la dette pour la bifurcation écologique, en évitant la pression des marchés.

La seconde option porte sur la non-application des critères de convergence édictés par le traité de Maastricht aux investissements en matière écologique. De la sorte, les politiques publiques sur le sujet ne seraient pas freinées par ces critères.

M. Elie Cohen, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Premièrement, le rapport Draghi établit un diagnostic documenté de l’état de l’Europe par rapport à ses concurrents, notamment étasuniens et chinois. Celui-ci est particulièrement saisissant car il démontre que l’Europe n’a cessé de rattraper les États-Unis pendant près de trente ans, tant en termes de produit intérieur brut par habitant (PIB par hab.) qu’en termes de productivité et de croissance. Cependant, l’Europe a décroché au cours des dix dernières années, et ce massivement. Il explique ce décrochage, source de perte de prospérité pour l’Europe et d’appauvrissement relatif de sa population, par un fossé en matière de gain de productivité, lui-même expliqué par un affaiblissement de l’effort de recherche et d’innovation.

Le diagnostic de M. Draghi est illustré par un certain nombre de données sur la croissance et la productivité, dont certaines attestent que les grandes entreprises européennes d’il y a trente ans demeurent les mêmes de nos jours. À l’inverse, les entreprises dominantes aux États-Unis il y a trente ans n’en représentent plus aucune aujourd’hui. Cela résume parfaitement le basculement qu’ont su réaliser les Américains d’une économie fondée sur l’automobile, la chimie, et la mécanique – ce qu’est restée l’Europe – à une économie du numérique. Ce diagnostic est donc d’une sévérité extrême.

Deuxièmement, M. Draghi fait la critique de l’idéologie communautaire, ce qui me surprend personnellement. Globalement, selon cette idéologie, l’intensification de la concurrence favorise l’adaptabilité des entreprises, ce qui, en retour, augmente leur part de marché, leurs marges et leurs investissements en recherche et innovation. Or, Mario Draghi fait le constat que la conclusion de cette logique n'a pas été vraie : le modèle spontané de la spécialisation économique vertueuse n’a pas fonctionné. Selon lui, l’échec de cette logique découle de la réalisation seulement partielle de l’intégration à vingt-sept, et de l’absence de centralisation des politiques. Ceci explique le changement de paradigme des propositions du rapport, et la prononciation de mots obscènes : une politique industrielle, les « champions européens », etc. Pour les Français, qui se sont battus sur ces sujets pendant des décennies, il s’agit là d’une musique agréable à entendre.

Troisièmement, M. Draghi recommande une série de mesures pour l’action. Il estime que pour répondre aux défis mentionnés dans le rapport il faut changer de paradigme en considérant que les institutions européennes, dans leur configuration actuelle, ne sont pas capables de répondre aux défis. Il parle ainsi de fédéralisme budgétaire, de l’établissement d’une dette commune, de la communautarisation de certaines politiques et d’un transfert de compétences accru.

Voici la structure générale du rapport de M. Draghi, je vais désormais tenter de détailler davantage.

D’après Mario Draghi, il n’y a pas de miracle : les politiques menées au niveau communautaire ont été trop faibles pour provoquer la rupture nécessaire, s’adapter à la dynamique technologique et industrielle, et répondre aux enjeux de coûts. Face à son décrochage industriel, l'Europe a souvent pratiqué « l'exorcisme ». Périodiquement, environ tous les dix ans, l'Europe constate son échec à saisir des opportunités majeures : les nouvelles technologies, l'écologie, le numérique, etc. Systématiquement, l’Europe décide de faire de cette faiblesse une force. Cela se traduit par des objectifs ambitieux, parfois démesurés, comme devenir la première puissance mondiale dans le domaine du numérique après avoir échoué sur internet ou la téléphonie mobile, ou encore devenir un leader de la transition écologique. Pour Mario Draghi, la politique de « l'exorcisme » et du volontarisme débridé ne peut pas être la solution. Il appelle à une réponse sérieuse et structurée si l’Europe veut réellement relever ces défis.

D’une part, un effort massif d'investissement, mobilisant à la fois les États et le secteur privé, est essentiel. En dénonçant le placement systématique de l’épargne accumulée en Europe à l’étranger, notamment aux États-Unis, Mario Draghi insiste sur l’urgence d'achever le marché des capitaux européens et de prendre des mesures incitatives pour investir l’épargne européenne au sein de l’Union.

D’autre part, Mario Draghi recommande la mutualisation des politiques d'investissement, via la création d'une agence européenne dédiée. Entre les lignes, Mario Draghi s’inspire du modèle américain de l'innovation, le seul qu'il estime fonctionner de manière vertueuse grâce à son articulation autour de trois écosystèmes.

Premièrement, l’écosystème de la recherche et de l'innovation est alimenté par la recherche publique, les grandes universités et les fondations de recherche : en d’autres termes, par tout un système capable de produire de l'innovation de rupture et fondé sur une forte interaction entre la recherche publique et privée.

Deuxièmement, l’écosystème du financement intègre à la fois des banques, des fonds de pension, des investisseurs en private equity, qui interagissent avec l'écosystème de l'innovation. D’après Mario Draghi, il ne suffit pas d’avoir une capacité de recherche de pointe : il faut disposer d’un écosystème du financement de la recherche, de l'innovation et de leur transfert vers les entreprises.

Troisièmement, les éléments précédents sont inefficaces sans l'écosystème de la gouvernance, illustré par le modèle de la Darpa (Defense Advanced Research Projects Agency) américaine. Il repose sur la capacité du centre politique, soit la présidence des États-Unis et son conseiller scientifique, de financer des programmes de recherche et d’assurer le transfert de leurs résultats vers l'industrie.

Le développement des vaccins contre le Covid-19 est un cas d’étude pour illustrer le fonctionnement des écosystèmes américains. Ce ne sont pas les grandes entreprises pharmaceutiques qui ont mené l'innovation, mais plusieurs start-up, situées aux États-Unis, en Allemagne et dans d'autres pays, qui ont pris le risque d'investir dans l'ARN messager. En 2020, désirant se procurer un vaccin en trois mois, Donald Trump avait immédiatement distribué les douze milliards de dollars jugés nécessaires par son conseiller scientifique, Moncef Slaoui, aux entreprises françaises, américaines, allemandes, leaders dans la recherche d’un vaccin contre le Covid. À titre de comparaison, la demande de financement de quarante millions d’euros déposée auprès du ministère des Finances par le laboratoire français Valneva n'a jamais abouti.

Face au deuxième obstacle présenté par Moncef Slaoui, tenant à l’incapacité des entreprises de développer les infrastructures nécessaires pour produire le vaccin mis au point, Donald Trump a immédiatement mobilisé l’armée américaine pour installer le matériel nécessaire et lancer les chaînes de production.

Cet exemple illustre l’imbrication des trois écosystèmes de la recherche et de l’innovation, du financement et de la gouvernance. Mario Draghi affirme que l’Europe doit s’inspirer du modèle américain, dont la forte capacité de mobilisation lui octroie une force de frappe considérable.

Mario Draghi dénonce la fragmentation du marché unique européen, fragilisé par vingt-sept politiques nationales différentes, promouvant chacune leurs champions nationaux. Il plaide donc pour l’achèvement du marché unique européen, notamment sur le plan financier. Il défend également le bannissement de la règle européenne du juste retour, incompatible avec des ambitions de politiques industrielles et de promotion des recherches de rupture.

D’après Mario Draghi, seul le développement de nouveaux moyens tels que la mutualisation de la dette, la création d’un nouvel organisme d'intervention dédié à la recherche et l’innovation, la fin du juste retour et l'accélération de l'intégration européenne avec le marché unifié des capitaux permettra à l’Union européenne d’enfin passer à la deuxième phase de sa politique industrielle.

Il souligne que l’Union européenne a déjà amorcé ce processus au cours de la décennie passée, en multipliant les initiatives. Les PIIECS (projets importants d’intérêt européen commun) sont des politiques sectorielles pour lesquelles les règles de concurrence ont certes été assouplies, mais toujours avec un retard notable. Mario Draghi insiste sur la nécessité de prendre pleinement au sérieux les PIIECS et de les transformer en véritables leviers de compétitivité industrielle. Cela exige non seulement une mise en œuvre ambitieuse, mais également l'allocation de moyens financiers et stratégiques beaucoup plus importants pour assurer leur efficacité et leur impact à long terme.

Lors d'une réunion avec le président de la République, j'avais évoqué les PIIECS en les comparant aux stratégies des États-Unis et de la Chine. Un point encourageant est ressorti : nos secteurs prioritaires sont similaires aux leurs. Que ce soit le numérique, le cloud souverain, les batteries, la mobilité ou les énergies nouvelles, nous ciblons les mêmes filières stratégiques.

La Commission européenne a d’ailleurs pris des mesures importantes en relâchant les contraintes de concurrence qui freinaient jusqu'ici la collaboration entre entreprises. Désormais, celles participant aux PIIECS peuvent coopérer, finaliser des projets communs et lever des financements collectifs. Cependant, un écart majeur persiste : les ressources financières. Là où l'Europe alloue un euro, les États-Unis ou la Chine en investissent dix.

Un exemple frappant concerne les télécoms : la Chine finance un programme ambitieux de 6G, incluant une constellation de satellites entièrement soutenue par son gouvernement. En Europe, la 6G n’est même pas à l’ordre du jour : les États membres débattent encore des mesures nécessaires pour encourager le déploiement de la 5G, qui permettra potentiellement la transition vers la 6G. Cet exemple illustre un blocage structurel. Les institutions européennes restent conçues pour promouvoir la concurrence, non pour faire émerger de nouvelles spécialisations stratégiques.

Tant que l’Union européenne n'acceptera pas que ses institutions visent en priorité la souveraineté et la prospérité, et tant qu’elle ne mobilisera pas les moyens nécessaires – via un véritable fédéralisme budgétaire et des institutions intégrées – elle continuera à manquer des opportunités décisives, tout en espérant être leader lors de la prochaine révolution.

Mme Nadine Levratto, directrice de recherche au CNRS. Après la lecture élogieuse et brillante d’Élie Cohen, du rapport Draghi, au prisme de l’économie politique, j’en ferai une présentation plus technique et institutionnelle pour en analyser les rouages et les causalités. Premier constat, unanimement partagé, on observe, depuis plus d’une dizaine d’années, un décrochage de la croissance ainsi que du PIB européen vis-à-vis des États-Unis. Deuxième constat, la menace chinoise s’intensifie. Troisièmement, on constate également la faiblesse du secteur des technologies propres, du numérique ainsi que des difficultés dans le secteur de la santé. Quant au déficit commercial, il devient préoccupant.

Première interrogation : pourquoi se référer uniquement aux États-Unis et non à un groupe de pays dont la dynamique et le développement avancé sont plus proches de l’Europe, tels que la Corée du Sud ou le Japon, pour établir ces constats ? Ne serait-ce pas davantage les États-Unis qui décrochent, par le haut, à l’image de la croissance industrielle allemande longtemps restée atypique en Europe sans signifier pour autant un décrochage des autres pays industriels ? Pourquoi n’avoir pas mis en miroir certains éléments sociaux ou sanitaires tels que l’espérance de vie en Europe, supérieure de 5 points, le taux de suicide ainsi que le taux de mortalité infantile, inférieurs en Europe à ceux observés aux États-Unis ? Certes, la corrélation entre l’indice de développement humain (IDH) et le PIB est difficile à mesurer dans une étude macroéconomique. Toutefois les travaux de grands économistes appellent à la considérer. Si le classement des États-Unis se dégrade quand on considère l’IDH par rapport au PIB par habitant, c’est en raison de l’absence ou des faiblesses du modèle social américain. Certaines affirmations du rapport Draghi telles que l’absence d’une politique climatique sans politique industrielle paraissent discutables. Depuis le COVID, on observe des efforts de convergence pour concilier ces deux politiques comme je l’ai précisé dans un article récemment publié. Ce qui interroge dans ce rapport, c’est l’absence quasi-totale de bilan des réformes nombreuses et profondes auxquelles l’Union européenne a procédé – même si cela n’aurait pas remis en cause le constat dressé de ce décrochage.

Concernant les propositions, le rapport fait des propositions nombreuses, riches et innovantes. Certaines d’entre elles sont connues, et ont déjà fait l’objet de tentatives de mise en place, telles que le déficit de start-up à combler, le financement de l’innovation, jugé de manière récurrente insuffisant, la faiblesse des investissements en R&D notamment privé, l’appel à la création d’universités d’élite. D’autres plus innovantes, concernant l’engagement écologique et la bifurcation des économies européennes font apparaître un lien, restrictif, entre décarbonation de l’industrie et compétitivité. Le rapport met l’accent sur l’énergie sans considérer l’importance des intrants dans les processus de production alors que la question des limites planétaires est mise en avant par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) concernant les changements des politiques publiques.

Le projet d’emprunt européen, qui est une idée intéressante, a déjà été expérimenté au moment du COVID sans que pour autant les conséquences en termes de remboursement aient été résolues. Le rapport ne précise pas comment les modalités envisagées pourraient être compatibles avec la gouvernance et le fonctionnement des règles actuelles. Ainsi selon quelles modalités les entreprises, aujourd’hui concurrentes, pourraient-elles être conduites à coopérer ? Réponse difficile d’autant que les pays mettent en place des politiques d’attractivité des entreprises, déclinées à l’échelle régionale. Les écarts en termes de spécialisation se mesurent, comme l’ont démontré les enquêtes d’Andre Rodriguez-Pose à la London School of Economics (LSE) ou Philippe Mc Cann à l’université de Birmingham, en tensions et en géographie des mécontentements au sein de l’Union européenne. Comment passer de logiques de concurrence à des logiques de coopération ?

Autre interrogation forte : comment les modifications des traités appelant à une extension du principe de majorité qualifiée pourraient être réalisées alors même que l’unanimité est requise pour les mettre en œuvre ? Ces tensions, fortes, s’incarnent dans le non papier signé par les vingt États membres qui retient uniquement les propositions relatives à la simplification sans faire référence à la nouvelle facilité communautaire faisant clairement apparaître le clivage entre États frugaux et États dépensiers.

Comment les mesures innovantes peuvent-elles être préférées par les signataires de ce non papier dont l’Espagne, la France ou l’Italie ? Qu’est-ce qui va permettre d’adopter les plus grandes innovations proposées par le rapport Draghi ?

Ce que j’appellerai, « l’illusion de la simplification », qui irrigue l’ensemble du rapport, a également attiré mon attention. La proposition de décarboner l’industrie européenne, mentionnée à plusieurs reprises, pour faire de l’Union européenne le leader de l’industrie verte, emporte le consensus. Toutefois, la méthode proposée reposant uniquement sur la simplification des processus de développement industriels, d’installation ou de procédures administrative n’est pas sans soulever des inquiétudes, car les deux principaux dispositifs visés, sont la CSDR (Corporate Sustainability Reporting Directive) et la CS3D (Corporate Sustainability Due Diligence Directive). Or ces deux directives imposent aux entreprises soit une certaine forme de vigilance sur la chaîne d’activités pour la CS3D, soit une forme de transparence de l’information concernant les dommages environnementaux dont les entreprises pourraient être à l’origine. Le rapport s’interroge sur la manière d’alléger ce fardeau, ce qui revient à présupposer qu’il en est un, alors même que ces textes ont déjà été transposés dans le droit national des États membres. Les solutions proposées consistent soit à relever les seuils de définition des PME, soit à créer une nouvelle catégorie comptable pour les petites et moyennes capitalisations boursières afin de les soumettre aux mêmes règles que les PME ou à les extraire du droit national pour les faire entrer dans un méta-droit européen. Certes, certaines régulations peuvent être considérées comme excessives telles l’Artificial Intelligence Act qui protège, néanmoins, de certaines dérives comme le crédit social à la chinoise ou la discrimination automatique des curriculum vitae. Toutefois le rapport s’attaque à des régulations très vastes, qui sont relatives à des politiques économiques de transition, telles que le devoir de vigilance, la taxonomie verte ou la règlementation REACH qui règlemente l’enregistrement, l’évaluation ainsi que l’autorisation de substances chimiques. La minoration de l’environnement portée par le rapport Draghi me semble inquiétante. En effet, rappeler la décarbonation asymétrique et l’incohérence des politiques européennes entre en contradiction avec l’appel à alléger les contraintes des deux directives préalablement mentionnées. Aucune preuve empirique ne démontre que leur transposition serait une entrave à la compétitivité et à la croissance, leur coût réel demeurant inconnu. En outre, le découplage entre croissance et décarbonation semble difficile à atteindre sans prendre en compte les limites planétaires. Aussi faut-il s’interroger sur les entraves à la croissance autres que celles dues à l’énergie et s’inquiéter des risques de régression dans la mise en œuvre du Green Deal européen de janvier 2020.

M. Pieyre-Alexandre Anglade, président. Nous en venons aux orateurs de groupe.

MLaurent Mazaury (LIOT). Le rapport sur la compétitivité européenne est très complet. Il montre toute la connaissance de M. Draghi issue de son expérience de l’Europe, de son fonctionnement et de son efficacité. Il montre également les axes d’amélioration possibles. Le rapport balaye tous les pistes, tous les axes et envisage toutes les réformes. Il a ainsi les qualités de ses défauts puis chacun, quelles que soient ses affiliations partisanes, peut y trouver des éléments qui lui conviennent. Cette approche à la découpe met en risque le projet européen mais également ses indispensables réformes. Sur le point spécifique de la défense sur lequel nous avons voulu concentrer notre attention, il appelle à la construction d’une industrie de défense plus européenne et moins dépendante des États-Unis avec un nouveau modèle de gouvernance de la politique industrielle de défense. Or, ceci suppose une politique commune de défense et une diplomatie européenne ce qui semble de moins en moins aisé à mettre en place. Cela est dû à l’accroissement du nombre de pays membres ayant des politiques étrangères souvent divergentes et parfois même opposées. Cela pose la question du passage à la majorité qualifiée afin de contourner le veto d’un seul État membre. Pour avoir une industrie de défense unique il est nécessaire de disposer d’une défense unique et donc une stratégie unique. Nous en sommes loin voire nous continuons à nous en éloigner. Par conséquent, pensez-vous que le passage à la majorité qualifiée proposé par le rapport Draghi peut être fonctionnel pour les projets de défense ainsi que pour l’expression diplomatique de l’Europe unifiée ? Nous en voyons ainsi toutes les limites actuellement avec le vote sur le projet d’accord commercial entre l’Union et le Mercosur.

M. Elie Cohen. Il faut absolument écarter l’idée que les politiques étrangère et de défense puissent être décidées à la majorité qualifiée. Ça ne se fera jamais. Par contre, il est possible d’avancer dans la création d’une industrie européenne de défense intégrée. Après tout, depuis des décennies nous avons appris à coopérer sur des grands programmes européens. Et c’est avec ces programmes que nous avons pu nous doter d’une industrie de l’aéronautique qui tient la dragée haute aux États-Unis. Nous le voyons en ce moment même avec la crise de Boeing. Si nous disposions d’une agence européenne en propre sur le sujet, si nous disposions de crédits et si nous soutenions un ensemble de programmes communs, il n’y a aucune raison de penser que nous ne pourrions pas refaire ce que nous avons fait par le passé. Essayons plutôt de techniser les projets de défense et d’armements, construisons de nouveaux programmes et engageons-nous tous ensemble à soutenir les géants des uns et des autres sans jouer la rivalité nationale.

Mme Nadine Levratto. Airbus est un programme commun. Nous constatons les difficultés actuelles avec l’exemple des Polonais qui achètent de l’armement américain. Par ailleurs, le char franco-allemand ne devrait pas voir le jour à court ou moyen terme. Le temps de retour sur investissement en matière de recherche et d’investissement étant relativement long, nous devrons attendre des années pour voir les fruits de cette politique.

M. Guillaume Bigot (RN). Le rapport Draghi ne dissimule rien du décrochement du continent européen en matière de compétitivité. Il souligne que l’un des éléments décisifs dans la compétitivité est le prix de l’énergie. Comment expliquer alors que le rapport Draghi esquive cette question centrale du marché européen de l’électricité ? Ce marché est une usine à gaz qui tend à augmenter artificiellement le prix de l’électricité. L’Espagne et le Portugal s’en sont retirés et affichent désormais un prix du mégawatt inférieur de 60 % à ce qui se pratique dans le reste de l’Union. En matière de compétitivité et d’énergie, l’Europe est au bord du gouffre mais le rapport préconise un grand bond en avant européiste. N’est-ce pas paradoxal ?

Mme Nadine Levratto. Sur l’électricité le décrochage est récent. Pendant de nombreuses années, ce n’était pas le cas. C’est la crise russe qui a provoqué cette hausse du prix du gaz. L’intensité énergétique du PIB industriel n’a cessé de diminuer au cours des trente à quarante dernières années pour se dégager des coûts de production. Des interconnexions des réseaux sont nécessaires pour avoir un réseau stable. Cela est d’autant plus vrai depuis que nous introduisons une part d’énergies renouvelables de plus en plus importante dans notre mix énergétique.

M. Elie Cohen. Le rapport ne dit pas que le décrochage européen des dix dernières années est dû au prix de l’énergie. Le décrochage s’est produit alors que le prix de l’électricité n’était pas un paramètre en cause. C’est le décrochage en termes de productivité qui est à la base du décrochage en termes de compétitivité et à la base de l’appauvrissement relatif des Européens. Et ce décrochage a des conséquences en matière d’innovation et de recherche et développement. Draghi confirme ce que de nombreuses études ont démontré.

M. Jean Laussucq (EPR). Le rapport Draghi dresse un bilan mitigé en matière de compétitivité européenne, vous l’avez souligné. Nous avons compris que l’Europe apparaît en retard en matière de développement et de démographie. Le rapport propose des pistes de travail dont trois me semblent indispensables : finaliser le marché unique en levant les barrières restantes dans le numérique et dans l’énergie, lever les freins administratifs bloquant les investissements à l’innovation, et enfin adapter la formation professionnelle aux nouveaux besoins industriels, y compris dans l’industrie verte. L’Europe est par ailleurs un vieux continent qui pourrait perdre jusqu’à 2 millions de travailleurs chaque année jusqu’en 2040. Il convient donc d’adapter les compétences des travailleurs aux besoins des nouvelles technologies. Aussi, à la lecture de ce rapport, pensez-vous que l’Europe telle qu’elle est construite d’un point de vue juridique et institutionnel est capable de mettre en pratique les préconisations du rapport ? À défaut, quelles seraient les évolutions à envisager à court et moyen terme ? Et d’autre part, voyez-vous l’élection de Donald Trump comme étant susceptible d’accélérer la réforme de la compétitivité européenne ?

M. Elie Cohen. L’Europe dans sa forme actuelle n’est pas capable de répondre aux préconisations du rapport Draghi. Celui-ci souligne qu’il existe des manques en matière numérique et financière. Par ailleurs, même en allant plus loin dans les initiatives cela ne suffirait pas car il faut aller plus loin dans le volontarisme sectoriel. La question des PIIEC est posée. Il faut des organismes intégrés, des moyens plus importants ou encore rompre avec la règle du consensus à vingt-sept États membres. C’est un vrai changement de cap. Au cours des dernières années, il y a eu des avancées notables avec la levée d’une dette commune et le financement commun des vaccins contre le Covid sans conflit entre pays. Il est donc possible de continuer à avancer dans cette direction. L’autre lecture possible est de considérer que tant que nous aurons des stratégies différentes entre pays et une lecture géopolitique divergente, nous ne pourrons pas mettre un terme à ces différences. Soit nous continuons à adopter des politiques du type de celle suivie durant le Covid, soit nous effectuons un grand saut fédéral.

Mme Nadine Levratto. La question des conséquences de l’élection de Donald Trump est difficile à analyser. On n’a pas d’idée claire de la manière dont il va appliquer le programme qu’il a présenté pendant la campagne. Pour l’instant il est difficile de faire des paris sur la réaction politique de l’Union européenne face à ce changement aux États-Unis.

Mme Marietta Karamanli (SOC). Je voulais revenir sur deux sujets mentionnés dans le rapport Draghi : la place faite à la recherche et l’innovation (R&I) au centre de la compétitivité de l’Union européenne et la question du financement. Le rapport Draghi note que les dépenses publiques consacrées à la R&I manquent d’ampleur et ne sont pas suffisamment axées sur l’innovation de rupture. Il fait aussi la comparaison avec les États‑Unis, où la majorité des dépenses publiques de R&I sont effectuées au niveau fédéral tandis qu’au sein de l’Union européenne, la majorité des dépenses sont le fait des États membres : seul 1/10ème des dépenses est effectué au niveau de l’Union malgré les retombées importantes des investissements publics.

Ma première question porte sur la recherche. Dans un rapport présenté devant cette commission avec Sabine Thillaye nous avions regretté que les plans européens et nationaux soient trop fragmentés conduisant à un manque de visibilité. Avez-vous des préconisations pour améliorer l’efficacité de ce qui existe ?

Ma seconde question porte sur le financement. En tant que rapporteure sur le pacte de stabilité et de croissance, j’avais suggéré que les seuils puissent être différenciés selon la nature des investissements comme la transition énergétique, la défense et la recherche. Que pensez-vous des moyens à privilégier pour concilier la coordination budgétaire entre États et les investissements pour l’avenir ?

M. Elie Cohen. Il y a un élément auquel on n’accorde pas suffisamment d’importance : c’est l’emboîtement des différents PIIEC nationaux et européens. Si on a choisi les mêmes secteurs et filières technologiques – par exemple les batteries, le cloud souverain, les nano processeurs – et si on constate qu’il y a des programmes nationaux et un grand programme européen, pourquoi alors ne pas systématiser l’emboîtement des programmes nationaux dans le programme européen ? Je vois là une piste intéressante qui commence à être explorée mais il faut aller plus loin. Après tout, il n’était pas acquis qu’on se mettrait d’accord aux niveaux national et européen pour soutenir les mêmes secteurs et se donner les mêmes objectifs d’autosuffisance.

Ceci étant, les débuts de stratégies coopératives européennes dans ces domaines sont un peu inquiétants. S’agissant de la stratégie batteries par exemple, des alliances européennes entre énergéticiens et industriels de l’automobile se sont nouées. On a décidé de bâtir des usines communes et d’acheter de la technologie chinoise. Or on constate que la première grande usine en Suède ne démarre pas ou alors avec des dysfonctionnements majeurs. Car on est en train de découvrir qu’on n’a pas simplement décroché en matière de recherche et d’innovation, mais aussi en matière de génie industriel : on ne sait plus fabriquer correctement des objets industriels. Le fait qu’on soit allé en Chine pour acheter la technologie et qu’une fois importée en Suède, la technologie ne fonctionne pas et qu’on soit obligé de faire appel à des entreprises chinoises pour nous aider à faire du manufacturing… ça fait réfléchir.

Mme Nadine Levratto. Il y a également le volet recherche à mentionner. Aux États-Unis, les universités sont très largement financées par les États et pas par le gouvernement fédéral, ce qui tend à rapprocher la situation de ce que l’on a en Europe où ce sont les États qui financent les universités. Par ailleurs, en Europe, plusieurs pays sont dotés de grands centres de recherches pluridisciplinaires nationaux à dimension européenne voire mondiale : le Max Planck Institute en Allemagne, le CNR en Italie, le CNRS et l’INRAE en France.

La structure de la recherche, qui reposait sur des subventions d’Etat, a fortement muté ces dernières années avec l’Europe de la recherche (ERC) qui fonctionne sur la base d’appels à projets. La direction prise actuellement repose sur deux niveaux : les laboratoires et universités d’élites d’un côté et les universités d’enseignement de l’autre. Ce système a des vertus mais crée une charge administrative importante pour les laboratoires de recherche et entraîne une forme de « recherche empêchée ». Une réforme de l’attribution des crédits de recherche à l’échelle européenne serait bienvenue pour diminuer les coûts de fonctionnement et accroître les moyens accordés à la recherche en tant que telle.

Mme Sabine Thillaye (Dem). L’Europe doit être plus réactive, changer de logiciel et accroître les financements en termes d’innovation et de recherche. Mais nous sommes aussi des sociétés vieillissantes qui n’aiment plus la prise de risque, contrairement aux États-Unis. Le principe de précaution est trop facilement invoqué, particulièrement en France. Cela freine l’innovation.

Les réactions de nombreux États membres aux recommandations du rapport Draghi sur le volet du financement sont éloquentes. Certains se prononcent pour de nouvelles ressources propres mais il y a des divergences sur la stratégie à adopter entre plus d’investissements privés ou plus d’investissements publics. Or, le temps presse. D’après vous, de combien de temps disposons-nous pour réagir avant de décrocher complètement ?

Mme Nadine Levratto. Tout dépend pour quoi faire : dans certains secteurs nous pouvons raccrocher plus rapidement que dans d’autres. Pour les secteurs qui nécessitent des investissements en recherche fondamentale et qui ont des temps de gestation des technologies longs, même si on prenait la décision de passer à des politiques publiques européennes unifiées dès le mois prochain, il faudrait plusieurs années pour que ces politiques produisent leurs effets.

Par ailleurs, la corrélation entre âge et goût du risque n’est pas parfaitement établie. Ce qu’on constate, c’est que la prise de risque aux États-Unis est le fait d’une minorité de citoyens ou d’institutions. De plus, la capacité à prendre des risques peut être fortement facilitée par l’existence de filets de sécurité. L’appétence pour le risque – pouvant passer par des modalités de financement comme l’equity finance ou par des business angels – et l’existence de protections pour les entrepreneurs et les citoyens doivent être envisagées de manière simultanée. La difficulté à laquelle nous sommes confrontés est qu’on ne peut pas agir sur un segment isolé du reste : il faut penser système. Là est toute la complexité de l’élaboration de ces nouvelles politiques publiques.

M. Elie Cohen. En tant que chercheurs nous nous sommes posé la question : qu’est-ce qui favorise la recherche et l’innovation de rupture ? Contrairement à ce qu’on aurait pu imaginer, ce ne sont pas les jeunes en rupture de ban qui sont les plus grands innovateurs, ce sont bien souvent les enfants d’élites traditionnelles – avec des parents et des grands-parents professeurs, ou chefs d’entreprise – qui ont le plus grand potentiel d’innovateur.

La liaison que vous établissez entre vieillissement et innovation n’est pas véritablement fondée. D’abord, parce que même dans des pays vieillissants, il y a des jeunes. Et ce ne sont pas ces jeunes qui réalisent les innovations de rupture : regardez l’exemple du vaccin à ARN messager pour le Covid. Le Français dont on a beaucoup parlé qui en était à l’origine dirigeait une entreprise française avant d’aller aux États-Unis où il a rencontré des financiers qui l’ont aidé à porter son projet.

Les chinois ont décidé de lancer il y a neuf ans le programme « Made in 2025 » pour être leaders dans un certain nombre de secteurs (intelligence artificielle, numérique, énergies renouvelables). Au bout de neuf ans, ils ont atteint leurs objectifs. Pour favoriser l’innovation et endiguer le décrochage de l’Europe, il faut nous donner des objectifs de long terme avec des financements adéquats et nous y tenir. Par exemple, je ne considère pas qu’aujourd’hui la bataille de la 6G soit perdue mais je ne vois pas de plan européen en faveur de la 6G. Si on ne s’y met pas, on ne risque pas d’y arriver !

M. Matthieu Marchio (RN). Le rapport Draghi nous montre les faiblesses de la défense de l’Europe. Face à la crise ukrainienne, les nations européennes ont révélé leurs sous-investissements chroniques et la dépendance excessive aux armements non-européens notamment américains. Cette situation de fragmentation nous coûte, affaiblit notre compétitivité et limite notre capacité à agir face aux défis sécuritaires croissants. Le Rassemblement national soutient une Europe des nations capable de produire nos propres armements pour garantir notre autonomie stratégique. Nous pensons qu’il est urgent de mieux coordonner les efforts des nations en Europe, notamment en encourageant les projets conjoints et de coopération entre les gouvernements et industries et en de donnant la priorité aux solutions européennes dans les achats de défense. Cela doit se faire en préservant les intérêts nationaux, surtout pour un pays comme la France qui a su bâtir une industrie de défense puissante qui constitue un pilier de notre souveraineté et de notre politique étrangère.

Ce rapport propose également de centraliser la politique de défense à la Commission européenne avec la création d’un commissaire à la défense : nous nous y opposons car la défense doit relever de la compétence exclusive des États membres comme tout élément de souveraineté indispensable.

M. David Amiel (EPR). Je m’interroge sur la temporalité et la priorisation des mesures envisagées. Nous constatons une difficulté particulière dans les prochains mois marquée par la mâchoire d’acier entre, d’une part, les surcapacités chinoises et, d’autre part, le choc économique engendré par l’élection de Donald Trump. Outre les mesures commerciales largement évoquées, il convient également de prendre en compte l’impact des réformes fiscales, de déréglementation, qu’il s’agisse des domaines de l’intelligence artificielle ou de l’énergie. Nous sommes confrontés à une double problématique. Au niveau des États membres, une phase de consolidation budgétaire s’impose pour des raisons compréhensibles liées au cycle économique interne. Cette période post-crise vise en effet à reconstituer des marges de manœuvre. Cependant, elle est décalée par rapport aux dynamiques des autres grandes puissances.

Au niveau de l’Union, de nombreuses pistes mentionnées dans le rapport Draghi, bien qu’indispensables, sont des sucres lents – ils produiront des effets différés. Par exemple, la réforme des marchés de capitaux, essentielle, générera des bénéfices qui ne seront pas immédiats. Ma question est donc la suivante : parmi l’ensemble des mesures étudiées jusqu’à présent, quelles sont celles qui, selon vous, devraient être mises en œuvre prioritairement dès 2025 afin de répondre efficacement à cette conjoncture internationale ?

M. Elie Cohen. Permettez-moi de répondre en prenant l’exemple de l’intelligence artificielle. Le rapport Draghi souligne que, dans ce domaine, les dynamiques ont été fondamentalement différentes selon les régions du monde. Aux États-Unis, la recherche a été stimulée par le développement de stratégies de recherche concurrentes ; en Chine, par une volonté obsessionnelle de rattrapage ; tandis qu’en Europe, l’approche a principalement consisté à limiter, encadrer, prévenir les effets de l’intelligence artificielle en multipliant les réglementations. Draghi insiste sur la nécessité de rompre avec cette représentation de la superpuissance normative si nous souhaitons véritablement compter dans le domaine de l’intelligence artificielle. À cet égard, je me permets de nuancer les propos de Nadine Levratto : si l’on ne s’attaque pas aux réglementations et, plus encore, à leur prolifération, il est peu probable que l’Europe parvienne à jouer un rôle significatif dans ce secteur stratégique. Cela étant dit, peut-être faut-il renoncer à cette ambition et laisser ce terrain aux Américains et aux Chinois.

Mme Nadine Levratto. Pour répondre à votre question, il me semble que les politiques d'innovation radicale doivent elles-mêmes être fondées sur une approche véritablement innovante. Chercher à reproduire en Europe les technologies développées aux États-Unis dans une logique de rattrapage ne constitue pas, à proprement parler, une démarche novatrice. La véritable interrogation est la suivante : comment tirer parti de nos spécificités, quelle différenciation proposer, et quelle complémentarité développer vis-à-vis des innovations et des technologies émergentes dans les deux grands blocs que sont la Chine et les États-Unis ? Sur ce point, le rapport Draghi reste relativement discret. En suivant une logique déterministe, il considère que le modèle à imiter, le système à rattraper, est celui des États-Unis, avec pour objectif de rivaliser avec eux, voire de les surpasser. Cette approche néglige toutefois des pans entiers, comme la question environnementale, qui sera pourtant inévitablement centrale. Les coûts des dommages environnementaux, tant en Europe qu’aux États-Unis, imposeront de trouver des solutions innovantes dans ce domaine. Si je devais établir une priorité, ce serait donc de réfléchir à une stratégie différenciée, capable de répondre aux besoins non pris en charge par nos principaux concurrents.

M. Karim Benbrahim (SOC). Le rapport Draghi met en lumière deux enjeux majeurs : l’investissement massif dans la transition écologique et le financement de ces investissements. Il est indéniable que la dette écologique alimente la dette financière. Ne pas investir dans la transition écologique engendre des coûts élevés : le coût de la réparation des dommages causés par les catastrophes environnementales, celui de l’adaptation aux conséquences du dérèglement climatique, ainsi que le coût d’un rattrapage futur. À ces coûts financiers viendront s’ajouter les coûts de la perte de compétence et donc de la perte de notre indépendance et notre souveraineté. Nous avons instauré un pacte de stabilité financière pour limiter le risque que le comportement budgétaire d’un pays vienne déstabiliser le reste de l’Union européenne. Cependant n pays qui négligerait d’investir dans la transition écologique ne pourrait-il pas, à terme, représenter une menace encore plus grande pour la stabilité de l’Union, y compris sur le plan financier ? Aussi, que pensez-vous de l’idée de soustraire certains investissements des critères du Pacte de stabilité ? Plus encore, ne devrions-nous pas envisager la création d’un "Pacte de stabilité écologique" ? Quelles pistes en ce sens devraient être selon vous explorées ?

M. Elie Cohen. Le rapport de mon collègue Pisani-Ferry, que vous avez largement évoqué, souligne une évidence : la transition écologique et énergétique requiert des investissements massifs. Ces investissements auront un coût important, ce qui nous impose de repenser nos arbitrages en matière d’investissement et de consommation. Lorsque qu’une usine encore productive est démantelée pour être remplacée par une usine plus propre, cela revient à détruire un capital productif existant pour en créer un nouveau. En matière d’allocation des investissements, ce choix implique de sacrifier quelque chose qui fonctionne aujourd’hui pour le remplacer par quelque chose de plus vert, mais aussi plus coûteux. De même, il n’est pas possible de maintenir les mêmes niveaux de consommation si les équilibres entre investissement et consommation sont modifiés. En conséquence, il est nécessaire de réaliser cette transition écologique mais il faut avoir conscience de ses conséquences sur les investissements et sur la consommation.

Mme Nadine Levratto. En effet, mais il est tout à fait envisageable, comme cela a été proposé au sein du Parlement européen, de « démaastrichtiser » les investissements liés à la transition écologique, c’est-à-dire de les exclure des critères de Maastricht afin de faciliter leurs financements. Cette démarche est techniquement et institutionnellement réalisable, mais elle ne semble pas recueillir l’adhésion de certains pays. La difficulté majeure réside dans la nature même de ces investissements. Contrairement à ceux qui visent la croissance économique immédiate, les investissements verts présentent des temps de retour beaucoup plus longs, ce qui les rend moins attrayants. La question pour les politiques publiques est donc la suivante : comment faciliter les arbitrages et les engagements vers des investissements plus verts par rapport à des investissements qui génèrent davantage d’externalités négatives ? Le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) est à ce titre intéressant. Ce dispositif pourrait contribuer à rééquilibrer les arbitrages en rendant les investissements bruns moins profitables et en renforçant l’attractivité des investissements verts.

M. Alexandre Sabatou (RN). Le rapport Draghi dresse le constat d’une Europe enfermée dans ses contradictions vertes et qui se désespère des conditions économiques déplorables qu’elle a elle-même créées. L’abandon du moteur thermique à l’horizon 2035, la course aux énergies décarbonées et enfin les normes et les processus de décision excessivement lourds plongent notre industrie automobile dans une lente agonie. En parallèle, nous n’avons pas su développer des alternatives crédibles à l’électricité ou à l’hydrogène pour accompagner cette transformation. Le résultat est sans appel : une industrie prise de court, incapable de rivaliser avec la Chine, dont les véhicules électriques envahissent désormais nos marchés. Pire, à Méru dans ma circonscription de l’Oise, l’entreprise Forvia prévoit de licencier ses équipes de recherche et développement après avoir bénéficié de plus de 200 millions d’euros d’aides européennes. Après la production, c’est désormais la R&D qui est délocalisée en Chine. Que va-t-il nous rester ? Sardou chantait qu’en France il n’y avait pas de café, pas de coton, pas d’essence mais qu’on avait des idées. C’est visiblement un peu moins vrai ! Selon vous, quelles mesures concrètes devrions-nous prendre à l’échelle française ou communautaire pour stopper cette hémorragie, avant que l’Europe ne perde la totalité de son industrie automobile ?

M. Elie Cohen. Il est important d’adopter une réponse nuancée. Le choix de la transition vers l’électrique dans le secteur automobile a été une décision collective, prise au niveau européen, et relève d’une responsabilité publique assumée. Cependant, cette orientation stratégique n’impliquait pas nécessairement que l’industrie automobile européenne se concentre exclusivement sur la production de gros SUV électriques. La capacité à développer des petits véhicules électriques, comme cela a été réalisé en Chine, aurait pu constituer une alternative plus abordable et adaptée aux attentes du marché. Avec le soutien des subventions publiques, ces petits véhicules électriques auraient pu rencontrer un plus grand succès auprès des consommateurs européens. Cela met en lumière un problème de responsabilité et de stratégie au sein de l’industrie automobile elle-même. Toute la responsabilité n’incombe pas uniquement à l’État et aux institutions européennes.

Mme Nadine Levratto. Le développement du véhicule électrique en Chine s’est effectué grâce à des exigences du gouvernement chinois extrêmement strictes par rapport aux constructeurs. Ces exigences portaient en particulier sur le poids des véhicules, qui devait être régulièrement réduit de manière à rendre cette industrie plus compétitive. C’est bien la preuve que la règle peut stimuler l’innovation.

Mme Liliana Tanguy (EPR). Selon vous, est-ce que le rapport Draghi se fonde sur la théorie des avantages comparatifs de David Ricardo ? Comme cela a été dit, il faut que chaque nation se spécialise dans les secteurs où elle a un avantage compétitif. Comment encourager l’émergence de champions européens afin de concurrencer les États-Unis et la Chine, quand on constate des intérêts divergents entre les États membres ? Nous en avons une illustration en ce moment avec la négociation de l’accord du Mercosur où visiblement nous n’arrivons pas à ce que les États se mettent d’accord sur une politique commerciale commune. Cela peut être transposé à la politique industrielle.

M. Elie Cohen. Le rapport Draghi souligne que la logique des dynamiques de marché, avec un État en retrait, n’a pas produit des spécialisations optimales. Si l’on veut privilégier certaines spécialisations, pour des raisons écologiques, de souveraineté ou de prospérité territoriale, alors il faut accepter que la main visible de l’État, notamment de l’État européen, soit nécessaire pour orienter des spécialisations correspondant davantage à cette vision politique.

Mme Nadine Levratto. Sur la théorie des avantages comparatifs de Ricardo, il en existe plusieurs versions et je vous renverrais aux travaux sur ses grandes limites qui ont été réalisées par mon collègue Gilles Raveaud.

M. Fabrice Leggeri (député européen). Le décrochage de l’Union européenne est dû au manque d’innovation. Il est daté par le rapport Draghi d’il y a 10 ans. Il compare l’Union aux États-Unis : n’y a-t-il pas des raisons culturelles qui font que cette comparaison n’est pas pertinente ? Les États-Unis sont en effet une nation tandis que l’Union européenne n’en est pas une.

Notre décrochage économique ne résulte-t-il pas également de la bureaucratie et d'un esprit normatif excessif, que nous connaissons bien en France, mais qui est amplifié par le rôle de la Commission européenne ? La véritable solution ne serait-elle pas de veiller à ce que la Commission se concentre sur l'aide à la coopération là où elle est nécessaire, tout en garantissant que ces coopérations entre nations souveraines soient librement consenties ?

M. Elie Cohen. Une dynamique vertueuse a fonctionné pendant trente ans : les États-Unis innovaient, nous faisions davantage de l’innovation par imitation, puis nous avons mobilisé des moyens dans la recherche. Ma question est simple : pourquoi ce qui a fonctionné pendant 30 ans a cessé de fonctionner au cours des dix dernières années ? Pourquoi faudrait-il décréter que l’Europe est incapable de rester dans la course technologique ? Il y a un certain nombre de mauvais plis qui ont été pris et qu’on essaye de corriger ici ou là. Regardez les rapports de France Stratégie sur la recherche et l’innovation : ils montrent un décrochage de la France, notamment en matière d’effort financier pour la recherche et d’investissement avec un sous-investissement dans les universités Pourtant, aucune décision n’a jamais affirmé que nous devions renoncer à nos efforts de recherche et d’innovation. Nous avons pris un mauvais pli, et il est maintenant temps de le redresser.

Mme Céline Calvez (EPR). Le rapport Draghi souligne l’importance d’un investissement massif pour que l’Europe se positionne dans le domaine des technologies de pointe. M. Cohen, vous appelez à ce que l’Europe se positionne moins comme une « superpuissance normative ». Ne serait-ce pas un risque pour la propriété intellectuelle, qui est un des biens les plus précieux en Europe ?

Mme Levratto, vous appelez à ne pas dupliquer les champs d’innovation mais à trouver le domaine qui permettrait à l’Europe de créer des innovations de rupture. Que pensez-vous de la capacité européenne à développer des intelligences artificielles qui répondent à la nécessité de réduire leur empreinte environnementale ?

Enfin, je pense que l’intelligence artificielle nous permettrait de relever un défi essentiel, celui de la productivité. N’aurions-nous pas intérêt à former tous les citoyens à l’utilisation de l’intelligence artificielle dans leur travail et dans leur vie quotidienne ?

 Mme Nadine Levratto. La capacité à développer des intelligences artificielles plus sobres fait l’objet de travaux en cours : plusieurs chercheurs de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) développent des méta-IA. Ces méta-IA permettraient d’arbitrer entre les meilleures intelligences artificielles qui pourraient, sans utiliser d’énergie, répondre à des problèmes qui ne nécessitent pas des calculs nouveaux mais simplement l’utilisation de calculs précédemment stockés. Cette idée est actuellement en réflexion et de nombreux progrès sont à noter dans ce domaine, par exemple avec le développement de l’intelligence artificielle Mistral qui propose une alternative à Chat-GPT.

Concernant la formation des citoyens, je reconnais que le développement des compétences liées à l’usage de l’intelligence artificielle ne sont pas encore une priorité des autorités publiques. De grands efforts de la part de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur seront nécessaires pour permettre la formation des citoyens à ces nouveaux outils.

 Mme Sylvie Josserand (RN). Pour rétablir la compétitivité de l’Union européenne, le rapport Draghi préconise des investissements à hauteur de 750 à 800 milliards d’euros par an, sans que la durée de ce financement ne soit précisée. Pour assurer ce financement, le rapport propose non seulement un financement bancaire par un nouvel emprunt mutualisé mais aussi de privilégier le financement par les marchés en drainant l’épargne et les capacités de financements privés à travers l’optimisation de l’union des marchés de capitaux.

Or, l’union des marchés de capitaux n’a jamais été finalisée faute de consensus des pays européens, notamment en raison des risques de volatilité et de spéculation. Comment articuler la mutualisation de la dette avec l’union des marchés de capitaux ? Quelle pourraient être les garanties offertes pour la sécurisation des capitaux privés ?

 M. Elie Cohen. Au fond, vous posez une question de « tuyauterie financière ». Elle peut être conçue de différentes manières, notamment via la mise en place d’un produit d’épargne spécifique destiné à l’industrie. Ce produit d’épargne serait à la fois un placement sécurisé et dédié au domaine de l’industrie.

Je ne crois pas que la difficulté soit d’ordre technique, ni que le marché de capitaux générerait nécessairement une titrisation excessive comme en 2008. Il me semble qu’il n’y a aucune fatalité à cela. M. Draghi, en qualité d’ex-directeur de la banque centrale italienne, est bien placé pour le savoir. Il ne propose pas une généralisation des méthodes de titrisation comme c’est le cas aux États Unis. Je suis convaincu que l’on peut véritablement dédier des produits financiers spécifiques et adaptés pour mobiliser l’épargne européenne et la mettre au service de la réindustrialisation de l’Union européenne.

 Mme Nadine Levratto. La juxtaposition de différents circuits de financements permettrait d’atteindre cet objectif de mitigation des risques en particulier pour les épargnants qui souhaiteraient placer leur épargne dans le développement de leur innovation ou de l’industrie. Tout le monde ne peut pas intervenir sur les marchés de capitaux de manière directe : l’intermédiation financière permet en ce sens de réduire les risques.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Mme Levratto et M. Cohen, nous vous remercions vivement pour le temps pris à répondre aux questions des membres de la commission.

 

II.              Nomination de rapporteurs

La Commission a nommé sur proposition de M. le président Pieyre-Alexandre Anglade :

– MM. Benoit Biteau et Julien Dive, rapporteurs d’information : État des lieux des plans stratégiques nationaux en matière agricole ;

– M. Maxime Michelet et Mme Michèle Tabarot, rapporteurs d’information : L’Union européenne face à la guerre en Ukraine ;

– MM. David Amiel et Karim Benbrahim, rapporteurs d’information :  L’Union européenne face au défi du financement de la transition énergétique ;

– M. Michel Herbillon et Mme Anna Pic, rapporteurs d’information :  L’avenir de la base industrielle et technologique de défense ;

– M. Damien Girard et Mme Liliana Tanguy, rapporteurs d’information : La politique commune de la pêche, bilan et perspectives ;

La séance est levée à 18 heures.


Membres présents ou excusés

 

Présents. – M. David Amiel, M. Pieyre-Alexandre Anglade, M. Karim Benbrahim, M. Guillaume Bigot, Mme Manon Bouquin, Mme Céline Calvez, M. Damien Girard, Mme Sylvie Josserand, Mme Marietta Karamanli, M. Jean Laussucq, Mme Constance Le Grip, M. Matthieu Marchio, M. Laurent Mazaury, M. Alexandre Sabatou, Mme Liliana Tanguy, Mme Sabine Thillaye

Excusé. - M. Benoît Biteau, M. Charles Sitzenstuhl

Assistaient également à la réunion. - M. Éric Coquerel, M. Jérôme Legavre, M. Emmanuel Maurel, M. Charles Rodwell, M. Éric Woerth

Et M. Fabrice Leggeri, membre du Parlement européen

 

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