Compte rendu

Commission
des affaires culturelles
et de l’éducation

 Examen de la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative aux violences commises dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité (n° 166) (M. Erwan Balanant, rapporteur)              2

 Informations relatives à la commission...................14

– Présences en réunion..............................15

 

 

 

 

 


Mercredi
2 octobre 2024

Séance de 16 heures

Compte rendu n° 2

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de Mme Fatiha Keloua Hachi,
Présidente

 


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La séance est ouverte à seize heures.

(Présidence de Mme Fatiha Keloua Hachi, présidente)

 

La commission examine la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative aux violences commises dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité (n° 166) (M. Erwan Balanant, rapporteur).

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. L’ordre du jour appelle l’examen de la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative aux violences commises dans le secteur du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité. M. Erwan Balanant a été désigné rapporteur de cette proposition de résolution qui est inscrite à l’ordre du jour de la séance du 9 octobre.

En application de l’article 140, alinéa 1er, du règlement, il appartient à notre commission de se prononcer sur l’opportunité de créer une nouvelle commission d’enquête sur ce sujet, les travaux de la précédente, créée en mai dernier, ayant été interrompus par la dissolution de l’Assemblée. Je tiens d’ailleurs à saluer le travail de son initiatrice et rapporteure, Francesca Pasquini.

Il nous revient de vérifier si les conditions requises pour la création de la commission d’enquête sont réunies et de nous exprimer sur son opportunité.

M. Erwan Balanant, rapporteur. C’est une grande satisfaction de défendre devant vous cette proposition de résolution.

Chacun connaît le contexte et les raisons justifiant cette demande de création. Il y a quelques mois à peine, l’Assemblée nationale avait décidé à l’unanimité de créer une commission d’enquête qui recouvrait le même périmètre et que j’avais l’honneur de présider. Sa rapporteure, Francesca Pasquini, avait fait preuve d’un engagement remarquable et fourni un travail considérable, et je ne peux que regretter son absence de cette enceinte aujourd’hui. Nous avions déjà mené vingt-trois auditions lorsque la dissolution de l’Assemblée nationale a mis brutalement fin à nos travaux. Nous en avons tous ressenti de la frustration, mais ce n’était rien comparé au désarroi des nombreuses victimes qui avaient accueilli la création de cette commission d’enquête avec espoir, parfois même avec soulagement. Nous voici donc réunis pour renouer le fil qui s’est rompu le 9 juin.

Au moment de franchir la première étape, j’adresse mes plus vifs remerciements à Mme la présidente de l’Assemblée nationale, qui a œuvré pour faire inscrire très rapidement cette proposition de résolution à l’ordre du jour de l’Assemblée, et je tiens à vous remercier, madame la présidente, d’avoir fait de même dans notre commission. Je connais votre implication dans ce combat et n’oublie pas que vous étiez vice-présidente de la précédente commission d’enquête.

Dès lors qu’il n’y a aucun droit de suite entre les travaux de contrôle de la XVIe législature et ceux de la XVIIe, nous sommes appelés à créer une nouvelle commission d’enquête. Cela suppose, tout d’abord, que nous nous prononcions sur la recevabilité juridique de la proposition de résolution. Trois conditions sont requises.

Les propositions de résolution tendant à la création de commissions d’enquête « doivent déterminer avec précision […] les faits qui donnent lieu à enquête ». Cette condition apparaît satisfaite, puisque la commission d’enquête serait chargée non seulement « d’évaluer la situation des mineurs évoluant dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité » et « de faire un état des lieux des violences commises sur des majeurs » dans ces secteurs, mais aussi « d’identifier les mécanismes et les défaillances qui permettent ces éventuels abus et violences et d’établir les responsabilités de chaque acteur en la matière ».

La deuxième condition mérite d’être examinée attentivement, compte tenu de la situation inédite créée par la dissolution. En effet, selon les termes du règlement de l’Assemblée nationale et de l’ordonnance n° 58‑1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, une proposition de résolution n’est recevable que si une commission d’enquête n’a pas eu lieu sur le même sujet et achevé ses travaux dans l’année qui précède – j’insiste sur cette condition de l’achèvement des travaux.

En tout état de cause, le cas particulier que constitue un changement de législature n’est mentionné dans aucun des deux textes. Or il s’agit là d’un élément décisif : les choix d’une nouvelle assemblée en matière de contrôle et d’évaluation ne sauraient être liés par ceux de l’assemblée précédente. En effet, conformément à l’article 3, alinéa 1er, de la Constitution, la souveraineté nationale s’est exprimée à l’occasion des dernières élections législatives et il appartient aux représentants du peuple nouvellement élus de décider quels travaux d’évaluation et de contrôle mener.

Du reste, il est permis de considérer que l’ordonnance de 1958 n’avait pas pour objet d’entraver la capacité d’enquête du Parlement, mais de l’encadrer pour éviter les dérives. En l’espèce, il s’agissait d’empêcher une assemblée de consacrer un temps indéterminé à un même sujet ou d’y revenir trop régulièrement, au risque d’empiéter sur les compétences de l’une des commissions permanentes, voire de contourner l’article 43, alinéa 1er, de la Constitution qui limite le nombre de ces commissions à huit.

Pour ces raisons, je vous invite à considérer que la deuxième condition est satisfaite et qu’il est possible de créer une nouvelle commission d’enquête sur les faits qui nous intéressent.

Enfin, une proposition de résolution ne peut être mise en discussion si le garde des sceaux fait connaître que des poursuites judiciaires sont en cours sur les faits ayant motivé son dépôt. Interrogé par la présidente de l’Assemblée nationale, ce dernier lui a fait savoir, dans un courrier du 1er octobre, que le périmètre envisagé pour la commission d’enquête était susceptible de recouvrir pour partie celui d’une information judiciaire en cours. L’existence de contentieux portés devant les juridictions n’est pas un obstacle absolu, mais la commission d’enquête devra veiller tout au long de ses travaux à ne pas étendre ses investigations à des faits qui font l’objet de procédures judiciaires. Dès lors, et sous cette réserve, les conditions de recevabilité juridique de la proposition de résolution apparaissent remplies.

Étant donné que la création de cette commission d’enquête ne s’inscrit pas dans le cadre d’un droit de tirage, il nous revient de nous prononcer également sur son opportunité. Je ne vous surprendrai pas en affirmant qu’il est non seulement opportun, mais nécessaire de créer cette commission d’enquête. L’Assemblée nationale en avait d’ailleurs décidé ainsi par deux fois, en commission puis en séance publique, il y a quelques mois. Vous me permettrez néanmoins, comme l’exige ma fonction de rapporteur, d’argumenter de nouveau en faveur de cette démarche.

Les révélations de l’actrice Judith Godrèche, à la fin de l’année 2023, ont provoqué une véritable onde de choc dans le monde de la culture. Auditionnée en mars 2024 par la délégation aux droits des enfants et par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, elle a dénoncé la léthargie du monde du cinéma face à de multiples dérives qui ne cessent de se reproduire.

Quelques semaines plus tard, le quotidien Le Monde a relaté les conditions préoccupantes dans lesquelles s’était tenu le casting de jeunes mineurs pour le film CE2 du réalisateur Jacques Doillon. Ayant été amené à voir les images des essais réalisés lors de ces castings, je puis vous dire qu’elles sont tout simplement révoltantes. Cela nous a conduits, avec Perrine Goulet et Véronique Riotton, à effectuer un signalement auprès de la procureure de la République de Paris sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale.

De tels dysfonctionnements n’ont rien de nouveau, hélas. Je pense à Maria Schneider, livrée à la brutalité de Marlon Brando et de Bernardo Bertolucci lors du tournage du Dernier Tango à Paris ; elle raconta son calvaire mais ne récolta que l’indifférence. Je pense à Noémie Kocher, qui réussit à faire condamner pour agression sexuelle le réalisateur Jean-Claude Brisseau, en 2006, sans que celui-ci arrête de tourner pour autant et de bénéficier de subventions du CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée). Je pense à Adèle Haenel. Je pense à Aurélien Wiik, l’une des figures de proue du mouvement #MeTooGarçons. Je pense à Flavie Flament, qui dénonça en 2016 le viol qu’elle avait subi, adolescente, de la part d’un photographe. Je pense aux victimes de Patrick Poivre d’Arvor. Je pense aux nombreuses accusations de violences sexistes et sexuelles qui se sont fait jour au sein des conservatoires, des orchestres ou des chœurs d’enfants et d’adolescents. Ces révélations ne sont pas récentes ; il faut agir.

Les agissements auxquels nous entendons mettre un terme ne se limitent pas au milieu du cinéma, d’où la pertinence d’inclure dans le champ de l’enquête les secteurs de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité. De même, il ne s’agit pas seulement de violences sexistes et sexuelles : nous devrons nous interroger également sur les ressorts des violences physiques, psychologiques et même économiques.

Si les violences en tout genre ne se cantonnent pas au monde de la culture et des médias, tant s’en faut, ces domaines n’en semblent pas moins constituer un terreau privilégié pour leur développement, ce qui justifie que nous nous efforcions de mettre au jour les mécanismes facilitant leur apparition, voire les encourageant dans certains contextes précis. Comme le soulignait Francesca Pasquini, « l’art ne saurait être le paravent d’un système conduisant à des abus et des violences ».

Les premières auditions menées par la précédente commission d’enquête nous avaient permis de mettre en évidence le caractère systématique de certaines dérives. Elles avaient aussi poursuivi et amplifié le mouvement de libération de la parole, en offrant aux victimes et à l’ensemble des personnes travaillant dans les secteurs visés un espace d’expression bienveillant. Des premières pistes de solutions avaient également commencé à se faire jour. Il est donc impératif que nous poursuivions ce travail afin d’émettre des recommandations et des propositions d’évolutions législatives.

Pendant trop longtemps nous n’avons pas su, collectivement, écouter les témoignages, prendre la mesure des violences commises, notamment sexistes et sexuelles. Nous avons beau jeu, aujourd’hui, de dénoncer l’omerta qui existe notamment dans le monde du cinéma : nous avons tous notre part de responsabilité. Le temps est venu d’agir et de faire savoir à toutes les victimes de violences physiques, psychologiques, sexistes et sexuelles que nous les écoutons et que nous sommes prêts à travailler pour offrir un monde plus sûr. Il y va de la protection des enfants, des acteurs, des techniciens, des journalistes, des mannequins, des musiciens contre toutes les formes d’abus.

Pour toutes ces raisons, chers collègues, je vous invite avec force à adopter la proposition de résolution.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. La parole est aux orateurs des groupes.

Mme Caroline Parmentier (RN). Le 14 mars 2024, la délégation aux droits des enfants, dont je suis membre, entendait l’actrice Judith Godrèche, qui a porté plainte contre les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon pour viol sur mineure. Elle avait 14 ans au moment des faits.

Judith Godrèche a été directement victime de la « familia grande » du cinéma, qui s’est protégée et continue de se protéger. Avec les réalisateurs qu’elle a dénoncés, elle a probablement vécu la pire époque : celle issue du libertarisme post-soixante-huitard, qui ne souffrait aucune barrière ni interdit, très bien décrite dans le livre de Camille Kouchner La Familia grande ; celle qui pétitionnait dans les années 1970, en une de Libération, pour défendre des pédophiles poursuivis par la justice, ou dans Le Monde, en 1977, pour défendre les relations sexuelles entre les adultes et les enfants. C’est un extrait d’un documentaire très complaisant sur Benoît Jacquot, réalisé par Gérard Miller, aujourd’hui mis en cause par des dizaines de femmes pour violences sexuelles, qui l’a décidée à prendre la parole.

Le cinéma va-t-il devoir déboulonner ses films cultes, ses monuments, ses psys fétiches ? Judith Godrèche nous a clairement alertés, lors de cette audition, sur les risques que les mineurs continuent à encourir dans l’industrie du cinéma, aussi bien dans le cadre des castings que des tournages. Il n’y a, selon elle, aucun garde-fou pour protéger les enfants et les mineurs qui se présentent pour un rôle et peuvent devenir le jouet d’un véritable système de prédation. Elle a évoqué devant notre délégation des abus physiques, psychologiques et psychiques. Demander à une future actrice ou à un futur acteur en herbe de raconter sa vie sexuelle, de livrer son intimité à un jury d’observateurs, c’est déjà un abus caractérisé. La protection des enfants qui évoluent dans le milieu artistique ne doit pas échapper à la loi.

Si nous sommes favorables à cette proposition de résolution – j’en avais déposé une très semblable sous la précédente législature –, je souhaite appeler l’attention du rapporteur sur le risque d’un trop vaste périmètre. Nos amendements d’appel visent à obtenir des précisions à ce sujet. Cette nouvelle législature et tout spécialement cette commission d’enquête nous permettent d’œuvrer collectivement, sans sectarisme, dans l’intérêt général. Soyons à la hauteur de l’enjeu et de l’attente des Français.

M. Andy Kerbrat (LFI-NFP). En préambule, je tiens à remercier Mme Francesca Pasquini pour son travail. Elle ne pourra pas participer à cette commission d’enquête, pourtant fruit de ses efforts et de son engagement féministe. Je me réjouis, monsieur Balanant, que vous ayez repris cette proposition de résolution, qui est aussi la vôtre. Ce faisant, vous illustrez bien la saine détermination construite par les mouvements #MeToo successifs. Nous ne pouvons plus regarder ailleurs quand les victimes parlent. J’espère que l’époque où les hommes politiques pouvaient dire qu’un prédateur sexuel rend fière la France est derrière nous.

Judith Godrèche, Aurélien Wiik et tant d’autres ont permis que la parole se libère dans ce qu’on appelle la grande famille du monde de l’art – une famille comme les autres, puisque c’est dans le cercle intime que se déroulent la majorité des viols et des agressions sexuelles. Je les remercie car j’ai pu sortir du silence grâce à eux.

Cette commission d’enquête contribuera à mettre sous le feu des projecteurs ces actes criminels qui sont commis dans les couloirs et les coulisses de nos institutions culturelles. Notre responsabilité est d’être à l’écoute des propositions que feront les chercheurs, les associations et les victimes : c’est leur monde, ils en connaissent les failles et les besoins. Comme les autres travailleurs, les artistes savent mieux que personne comment améliorer leurs propres conditions de travail, tout en conservant la qualité du résultat de leur effort.

Notre responsabilité sera également de ne pas laisser cette commission d’enquête devenir lettre morte une fois achevée. L’austère obsession de certains pour la réduction des dépenses publiques ne doit pas la rendre vaine. Soyons clairs : il faut des moyens pour établir des dispositifs protecteurs, pas de l’inflation pénale ni des numéros verts. Ce n’est pas contre des monstres que nous luttons, mais contre une omerta, contre la violente domination masculine, contre l’acceptation de comportements criminels justifiés par le culte du génie masculin et une haine des femmes culturellement construite par le regard des hommes. Il n’est plus possible que les femmes soient à ce point réduites à l’état d’objets, que la notoriété d’un homme ou que la réalisation d’une œuvre vaille plus que leur vie.

Dans La Fille de 15 ans comme dans La Désenchantée, c’est toujours le même récit : celui de la femme tentatrice qui a voulu être violée, qu’elle soit une enfant, une grand-mère, une jeune femme ou une mère. Il y a tout un art, toute une culture construite par le regard des hommes qui justifie le viol et l’encourage en le présentant comme une forme de subversion grandiose. Avec cette commission d’enquête, nous sommes invités à enrayer les machines qui produisent et diffusent la culture du viol dans notre société. Nous le voyons encore avec le procès de Mazan, où défilent tous ces hommes ordinaires qui se sont fait filmer en train de commettre leurs sévices sur le corps inerte d’une femme. Le problème, c’est bien tous les hommes.

Des pays comme l’Allemagne ou le Canada entourent les actrices et les enfants acteurs d’un référent qui les protège. Aux États-Unis, les contrats sont très précis au sujet de la nudité, afin d’éviter que le consentement des actrices et des acteurs soit bafoué au milieu d’un tournage où le réalisateur est roi. Il y a tant d’autres exemples. Le chantier qui s’ouvre devant nous est immense. Il est temps que l’exception culturelle française ne soit plus une exception sexiste.

Mme Céline Hervieu (SOC). « On n’a pas le droit en principe […]. Une fille comme elle, comme cette Judith, qui avait en effet 15 ans, et moi 40, en principe je n’avais pas le droit […]. Mais ça, alors, elle n’en avait rien à foutre. Même, elle, ça l’excitait beaucoup […]. Faire du cinéma est une sorte de couverture […] pour des mœurs de ce type-là. » Ces mots sont ceux du cinéaste Benoît Jacquot, évoquant la relation qu’il a entretenue avec Judith Godrèche après leur rencontre en 1986 sur le tournage du film Les Mendiants.

Le 23 février dernier, quinze jours après le dépôt de sa plainte pour viols avec violences sur mineur de 15 ans contre Benoît Jacquot, Judith Godrèche prenait la parole lors de la cérémonie des César pour dénoncer l’omerta autour des violences sexuelles dans l’industrie du cinéma. Sept ans après le début du mouvement #MeToo, son témoignage a suscité une onde de choc dans le milieu du cinéma français. Quelques semaines plus tard, la proposition de résolution de la députée Francesca Pasquini tendant à la création d’une commission d’enquête était adoptée à l’unanimité.

La dissolution de l’Assemblée nationale a brutalement interrompu les travaux de cette commission d’enquête. Son rétablissement est urgent et je salue à cet égard le travail de ma collègue socialiste Céline Thiébault-Martinez, qui a elle aussi déposé une proposition de résolution en ce sens. Nous devons continuer nos travaux sur la protection de ces jeunes filles, jeunes garçons, actrices et acteurs, techniciens et techniciennes, de toutes les personnes qui travaillent dans le cinéma et plus largement dans le milieu artistique. Ces violences ne se cantonnent pas à la seule industrie du cinéma. Elles ont également cours dans d’autres secteurs, comme le théâtre ou la mode, pour ne citer qu’eux.

Travailler dans l’art ou le cinéma est un rêve pour nombre d’entre nous. Or certains manipulent ces rêves. Ils les tordent, les utilisent, pratiquent l’abus de pouvoir et la domination, s’en prenant à des enfants parfois très jeunes. Ces violences sexistes et sexuelles laissent des marques indélébiles sur le corps, mais aussi sur l’appareil psychique, créant des traumatismes importants. Elles entament l’estime de soi, marquent du sceau de la honte et de la culpabilité les victimes qui osent encore trop peu dire ce qui leur est arrivé. Elles prospèrent sur le sentiment d’impunité de certains qui se pensent intouchables.

Cette honte et cette culpabilité doivent désormais changer de camp. Elles vont changer de camp ! Cette commission d’enquête doit permettre d’identifier les mécanismes et les défaillances qui permettent ces violences, d’émettre des recommandations sur les évolutions législatives et réglementaires et, partant, d’apporter une réponse à toutes les victimes, dont les corps ont été marchandisés, sexualisés, exploités. Les députés socialistes approuveront bien sûr cette proposition de résolution.

Mme Frédérique Meunier (DR). Qu’elle nous paraît lointaine et qu’elle est proche pourtant, cette époque singulière où la libération des mœurs correspondait à la banalisation de comportements abjects de la part de créateurs ou d’artistes indifférents aux tourments qu’ils infligeaient impunément. On ne les condamnait pas : parfois, on leur tendait même le micro, parce que la morale et la vertu étaient, disait-on, une affaire de bourgeois. L’heure était à la subversion des valeurs. Rares étaient ceux qui se refusaient au nouvel ordre moral, et plus esseulés encore ceux qui défendaient ces évidences que sont la dignité humaine et le respect du corps et de l’esprit.

Mesurons les stigmates laissés par ces décennies de déviance libertaire et les insondables blessures dont nous avons pu, pour certaines, prendre connaissance, mais dont la plupart seront tues à jamais – les gorges nouées, les pleurs étouffés, les éternels silences.

Mesurons l’importance du sujet qui nous réunit alors que se dissipe la cécité collective et que se fait cruellement jour l’ampleur du naufrage. Fernand Braudel disait que les mentalités sont des « prisons de longue durée ». On voit bien, à la lumière de trop nombreux témoignages, que subsiste encore, dans certains milieux artistiques et à l’égard de certains comportements, une forme d’indulgence, quand il ne s’agit pas d’une véritable omerta organisée.

Aussi la meilleure manière d’assurer les victimes de notre considération est-elle de nous employer à comprendre les rouages de ce système mortifère, afin d’y mettre un terme. En tant que parlementaires, il n’est pas de notre compétence d’identifier nommément les coupables, ni de les condamner. Notre devoir est en revanche d’appréhender en profondeur les mécanismes qui leur permettent d’agir et, parfois, de se soustraire au pouvoir judiciaire.

L’exercice de cette commission d’enquête sera ainsi soumis à une double exigence, difficile à tenir, mais essentielle à son succès. La première est l’indispensable respect de la présomption d’innocence, y compris devant des faits que nous jugerions inqualifiables, tant qu’ils n’ont pas été établis par la justice. La seconde est une considération totale pour le témoignage des victimes qui, trop longtemps, se sont heurtées au mur du discrédit ou du dédain.

Les forteresses où ces comportements ont sévi – la dernière en date étant le milieu médical – tombent heureusement l’une après l’autre. Il est grand temps que les industries du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité en fassent autant. Si cette commission d’enquête, comme nous le pensons, peut apporter sa pierre à l’édifice, elle sera salutaire. Le groupe Droite républicaine votera donc naturellement en faveur de sa création et, si nécessaire, s’impliquera dans ses travaux.

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Quand la parole se libère, la responsabilité de la représentation nationale est d’écouter, de réfléchir et de trouver comment faire pour éviter les violences.

En 2007, Tarana Burke fut la première femme à utiliser le terme « MeToo » pour dénoncer les violences sexuelles commises sur les petites filles noires. D’autres femmes parleront, dans les années suivantes, pour dénoncer les violences sexistes et sexuelles qu’elles ont subies. De nombreuses femmes, de tout profil, en France et dans le monde entier, dans absolument tous les métiers et pour dénoncer toutes les violences, ont pris la parole, souvent en prenant de très grands risques pour leur carrière, leur vie, leur réputation. Je pense à Peng Shuai, cette joueuse de tennis chinoise qui ne s’est plus montrée après la dénonciation des viols qu’elle a subis, à Isild Le Besco, à Charlotte Arnould, à Lucie Lucas, à Aurélien Wiik, à Anna Mouglalis, à Adèle Haenel, à Francis Renaud, à Marie Coquille-Chambel, à Florence Mendez, ou encore, bien sûr, à Judith Godrèche, qui a demandé avec force arguments la création de cette commission d’enquête. Ma collègue Francesca Pasquini, qui a été à l’origine de celle de la précédente législature, avait entendu cet appel : il s’agit maintenant de reprendre le flambeau et de poursuivre le travail entamé. Nous disposons d’un précédent avec la commission d’enquête sur les violences dans le sport.

Nous l’avons vu, dès qu’un espace de confiance est ouvert, les victimes parlent et leurs paroles, par leur force, transforment le monde. Les violences faites aux femmes, par leur ampleur et leur récurrence, ont un caractère systémique. Un viol ou une tentative de viol a lieu toutes les sept minutes en France. Au total, 200 000 femmes sont victimes de violences conjugales chaque année. Entre 100 et 150 féminicides ont lieu tous les ans.

Quant aux enfants, ils sont des victimes encore plus invisibles. Un enfant est victime de viol ou d’agression toutes les trois minutes. Deux à trois enfants par classe sont victimes d’inceste. La Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants a commencé à soulever le voile, à peine. Il y a trop d’absences de plainte, trop de classements sans suites, trop de non-lieux, trop d’impunité partout.

Les violences contre les enfants dans le monde du cinéma, du théâtre, de l’audiovisuel s’inscrivent dans la continuité des violences systémiques qu’ils subissent et se couplent à des mécanismes de domination inhérents au milieu du spectacle. Ce dernier crée des figures intouchables, ces grands artistes présentés comme faisant la fierté de la France, leur talent faisant office de collier d’impunité. Chaque année, plus de 13 000 demandes d’autorisation d’emploi pour des enfants sont déposées rien qu’en Île-de-France dans le domaine du spectacle. Ce sont autant de jeunes qu’il convient de protéger contre les agressions et les violences, dont nous savons qu’elles ne sont pas anecdotiques.

Judith Godrèche et tant d’autres ont permis, par leurs témoignages, de dénoncer ce système, afin qu’il ne soit plus possible pour personne de feindre de l’ignorer. Il nous faut maintenant dépasser l’étape de la dénonciation et travailler à des mesures et à des lois afin que les enfants et les femmes soient protégés avant de devenir victimes.

Il faut un village pour élever un enfant, dit le proverbe ; il en faut aussi un pour protéger un agresseur. La réouverture de cette commission d’enquête constitue un premier pas vers la compréhension des rouages et des carences qui autorisent ces violences. Pour que le monde de la culture puisse venir ici dire toute la vérité, rien que la vérité, sous serment, cette commission d’enquête est indispensable.

M. Frantz Gumbs (Dem). Avant la dissolution, les révélations dans les médias d’acteurs et surtout d’actrices ont provoqué une onde de choc au sein de la société et du monde de la culture. Toutes et tous ont dénoncé la léthargie du monde du cinéma face aux multiples dérives qui ne cessent de se produire et de se reproduire. Il existe une véritable omerta, d’autres l’ont dit, dans le monde de la culture et aucune mesure concrète n’a suivi les dénonciations faites depuis des années, y compris dans les secteurs de la publicité ou de la photographie.

En 2016, Flavie Flament a dénoncé le viol dont elle avait été victime de la part d’un photographe lorsqu’elle était adolescente. En 2019, Adèle Haenel a révélé avoir été victime d’agression sexuelle à l’adolescence, de la part d’un réalisateur. Il y a encore Judith Godrèche et, en 2024, à la veille de la grand-messe du cinéma français, l’acteur Aurélien Wiik témoignant des abus qu’il a subis, toujours à l’adolescence, de la part de son agent, désormais condamné pour ces faits. Les années se suivent et se ressemblent, le point commun des témoignages étant la jeunesse des victimes et la position dominante des agresseurs.

Alors que dénoncer son agresseur demande un courage important, nous ne pouvons faire partie de ceux qui n’écoutent pas, de ceux qui mettent la poussière sous le tapis. Nous ne pouvons faire partie de ceux qui, à leur niveau, ne protègent pas. En revanche, nous pouvons faire partie de ceux qui accompagnent ce mouvement et qui soutiennent les victimes. Comme le disait Albert Einstein, « le monde est dangereux à vivre ! Non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire. » Je refuse que nous soyons de ceux-là et que notre inaction favorise l’émergence d’un monde trop dangereux pour nous tous, particulièrement pour nos enfants.

Réveillons-nous, agissons, disons à toutes les victimes de violences physiques, psychologiques, sexistes et sexuelles que nous les écoutons et que nous allons travailler à offrir un monde plus sûr. Cette proposition de résolution constitue un bon moyen pour cela et je connais l’engagement d’Erwan Balanant sur cette question. Votons pour la création de cette commission d’enquête qui nous permettra de mettre au jour les défaillances, d’établir les responsabilités de chacun et de proposer un nouveau cadre plus protecteur. C’est ce que feront avec force les députés Démocrates.

Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). En février dernier, devant la délégation aux droits des femmes, Judith Godrèche avait formulé avec insistance son espoir que soit créée une commission d’enquête parlementaire sur le droit du travail relatif aux mineurs dans le monde du cinéma. Elle avait fait valoir que les mêmes systèmes y étaient à l’œuvre que dans les mondes de l’éducation, de la médecine, de l’édition ou du sport, domaine pour lequel une telle commission d’enquête a été menée. De nouveau auditionnée, quinze jours plus tard, cette fois par la délégation aux droits des enfants, Judith Godrèche, nous laissant une fois de plus chamboulés par son témoignage et son appel à agir, avait réitéré sa demande de création d’une commission d’enquête afin de protéger les enfants et leurs familles. Elle-même avait reçu 4 500 témoignages de victimes.

À votre initiative, monsieur Balanant, nous pourrions reprendre cette commission d’enquête dont les travaux avaient démarré mais avaient été brutalement interrompus. Je me félicite qu’un sujet aussi délicat qu’important fasse l’unanimité entre nous et, aussi triste et désolant qu’il soit, je me réjouis de pouvoir discuter de ce fléau qui touche tant de personnes, mineures comme majeures, dans tant de secteurs.

Depuis le début du mouvement #MeToo à Hollywood il y a maintenant six ans, la parole se libère, enfin, dans le cinéma français. Cela a notamment permis en début d’année l’émergence du mouvement #MeTooGarçons, qui a révélé des abus sur des acteurs adolescents dans le monde du cinéma.

Cette proposition de résolution comporte différents axes. Elle vise d’abord à évaluer la situation des mineurs travaillant dans ce secteur, mais aussi dans ceux de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité ; puis à dresser un état des lieux des violences commises sur les majeurs au sein de ces mêmes secteurs ; à identifier les mécanismes et les défaillances qui permettent ces éventuels abus et violences et à établir les responsabilités de chacun ; et enfin à émettre des recommandations.

Soucieux que ce sujet ne s’éteigne pas dans notre société après des décennies d’aveuglement et de silence, touché par le témoignage de Judith Godrèche et de tant d’autres, et certain qu’il faut agir vite et bien, le groupe Horizons et indépendants se prononcera en faveur de cette commission d’enquête. Nous espérons qu’elle pourra formuler des propositions concrètes et œuvrer dans des conditions dignes de ce sujet grave et sensible.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Depuis 2017, le mouvement #MeToo a mis en évidence l’ampleur des violences sexistes et sexuelles dans notre pays et a contribué à libérer la parole des victimes. Pourtant, nombre d’agressions sexuelles et de violences psychologiques et physiques restent difficiles à révéler, en particulier lorsqu’elles surviennent pendant l’enfance. Si la famille reste la sphère de socialisation où se produisent la majorité des agressions subies par les enfants, le monde professionnel en est aussi le théâtre.

De l’industrie de la mode au spectacle vivant en passant par le cinéma, de nombreuses victimes, hommes et femmes, ont récemment témoigné de violences sexuelles subies lorsqu’elles étaient mineures. C’est le cas notamment d’une dizaine d’ex-mannequins qui, en 2021, auditionnées par le Sénat, ont accusé des figures de la mode comme Gérald Marie ou Jean-Luc Brunel de les avoir violées dans les années 1980 et 1990. Après avoir déposé une plainte pour viol sur mineur contre les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon, l’actrice et réalisatrice Judith Godrèche a dénoncé l’écrasement de la parole et l’invisibilisation de la souffrance des enfants dans l’industrie du cinéma.

Relations asymétriques entre réalisateurs et acteurs, rapport à l’image, au regard de l’autre et au corps déformé par une contrainte esthétique : les industries culturelles présentent de multiples facteurs de risque de violences sexistes et sexuelles. Les amnésies traumatiques et les troubles psychologiques durables que provoquent ces crimes entravent encore davantage la libération de la parole des victimes et la condamnation des agresseurs.

Des dispositifs de protection des mineurs travaillant dans ces secteurs existent, mais force est de constater qu’ils restent largement insuffisants. Toute avancée dans la reconnaissance, la prévention et la répression de ces violences est à saluer. C’est pourquoi nous nous félicitons que la ministre de la culture ait décidé de rendre obligatoire la présence d’un « responsable enfants » sur chaque tournage employant des mineurs.

Cette proposition de résolution, fruit de l’excellent travail de notre ancienne collègue Francesca Pasquini, dont je salue l’engagement, est une étape fondamentale en vue d’améliorer la reconnaissance des victimes d’abus et de violences et de construire des dispositifs protecteurs pour tous les mineurs et professionnels des secteurs culturel et publicitaire. Le groupe GDR votera bien évidemment en faveur de ce texte.

Mme Graziella Melchior (EPR). Je me fais ici la voix de Véronique Riotton, retenue à une réunion de la délégation aux droits des femmes, dont elle vient d’être élue présidente.

C’est avec une grande joie que je vois Erwan Balanant reprendre le flambeau d’une commission d’enquête qu’il avait admirablement animée, de façon transpartisane, avec Francesca Pasquini. Lorsque l’Assemblée nationale a été dissoute, j’ai eu une pensée pour toutes les victimes des industries de la culture qui ont vécu l’arrêt de ses travaux comme un déchirement ; pour tous ceux qui, malgré le backlash sur les réseaux sociaux, malgré la violence de la culture du viol qui renvoie les victimes à un silence assourdissant, ont eu le courage de dénoncer les violences. Je songe à Judith Godrèche, à Guslagie Malanda, à Lucie Lucas, à Sophie Marceau, à Juliette Binoche, à Aurélien Wiik – et la liste est encore très longue. Merci à chacun, lanceurs et lanceuses d’alerte, victimes et témoins.

Je souhaite que les travaux reprennent au plus vite, pour que nous mettions un terme à la souffrance des victimes et surtout pour que nous engagions des actions concrètes. Au nom du groupe EPR, je veux affirmer ici et au-delà de cette assemblée que non, ce que vivent ces enfants et ces femmes, ce ne sont pas seulement des comportements inappropriés ou des blagues un peu lourdes ; que non, embrasser une actrice ou lui imposer des scènes de sexe sans la prévenir ne fait pas partie intégrante du métier.

Tel est le choix qui s’impose à nous : continuer de détourner le regard ou décider de regarder enfin en face ces violences et ceux qui les perpétuent, proposer des solutions pour qu’elles cessent. Il est de notre responsabilité, en tant que parlementaires, de tendre la main aux victimes et d’exiger des politiques publiques à la hauteur de l’enjeu.

Votons à l’unanimité en faveur du rétablissement de cette commission d’enquête, afin d’envoyer un message clair à ceux qui se croient tout-puissants : nous ne voulons pas de violences sexistes et sexuelles dans l’industrie de la culture et nous ne les cautionnerons pas.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons aux questions des autres députés.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Je me félicite de la reprise des travaux de cette indispensable commission d’enquête, née du cri d’alerte de Judith Godrèche, se joignant aux voix de nombreuses autres actrices, et qui avait été brutalement close après la dissolution de l’Assemblée nationale.

Je veux dire haut et fort qu’il n’y a pas viol et viol : un viol commis sur une comédienne débutante en contrat précaire, c’est un viol ; un viol commis sur une maquilleuse dans l’ombre d’une loge, c’est un viol ; un viol commis par un réalisateur sur une jeune comédienne dont il dirige le corps, c’est un viol ; un viol commis sur un plateau de tournage, c’est un viol ; un viol commis par un génie, c’est un viol.

Tel est, je crois, le sens de cette commission d’enquête : ne plus jamais permettre que l’art ou la gloire servent de couverture au viol, chasser le viol hors de la culture et, plus largement, combattre la culture du viol.

M. Erwan Balanant, rapporteur. Sarah Legrain pose parfaitement le débat. Le cinéma et la culture sont-ils le miroir de notre société ? Il me semble que si ces secteurs sont le théâtre de violences, ils sont surtout, au fond, le reflet d’une société où la culture du viol est forte, où l’égalité entre les femmes et les hommes n’est pas encore naturelle, où trop de femmes restent dominées par les hommes.

On pourrait effectivement, comme Mme Parmentier, craindre que la commission d’enquête ait à traiter un périmètre trop large. J’estime toutefois qu’on ne saurait se restreindre au cinéma en oubliant les mondes voisins du théâtre, de la musique, de l’audiovisuel ou de la mode. Et comme ces questions concernent en réalité toute la société, nos travaux seront utiles à la société dans son ensemble : ils permettront de révéler une nouvelle fois des faits qui surviennent aussi trop souvent dans le monde du travail, ou dans des cercles prétendument amicaux. Le champ que nous avons défini ne me paraît donc pas trop vaste – peut-être même ne l’est-il pas assez, mais nous n’avons que six mois pour mener nos travaux et nos moyens ne sont pas extensibles.

Mme Frédérique Meunier l’a souligné très justement : entre-temps, le mouvement #MeToo s’est étendu à l’hôpital ou à l’armée, tout simplement parce que ces secteurs font partie de la société et qu’en réalité, c’est toute la société qui est concernée.

Comme l’a dit Andy Kerbrat, nos travaux ne devront pas rester lettre morte. Un des objets de notre commission d’enquête sera de proposer des solutions, qui ne relèveront pas forcément toutes de la loi : ce sont parfois des attitudes, un certain rapport aux autres que nos conclusions devront promouvoir.

Céline Hervieu a évoqué les rêves et la passion qui animent bien souvent les enfants lorsqu’ils décident un jour d’apprendre à jouer de la trompette ou de faire du théâtre. Que ces rêves puissent se fracasser sur le mur d’une violence sexuelle ou sexiste est une chose terrible, dont nous devons protéger nos enfants.

Pardonnez-moi si j’ai oublié de répondre à certains d’entre vous, mais vous me semblez tous favorables à ce que nous reformions cette commission d’enquête. Je me réjouis de nous voir entamer les travaux de cette législature par un vote unanime sur une question aussi importante.

Je conclurai en soulignant que si Judith Godrèche a remis ces sujets sur la table, d’autres avant elle avaient dénoncé des faits, provoquant chaque fois l’émoi et les « plus jamais ça » généralisés. Je me souviens parfaitement d’Adèle Haenel en 2019, de Flavie Flament en 2016, et même de Maria Schneider dans les années 2000. Chaque fois, le soufflé est retombé. J’aimerais, si vous le voulez bien, que nous fassions le serment de ne pas laisser l’émotion retomber une nouvelle fois sans aboutir à rien, mais bien de formuler des propositions fortes pour œuvrer à la nécessaire égalité entre les hommes et les femmes et à l’émergence d’un rapport nouveau entre les femmes et les hommes.

Mme Caroline Parmentier (RN). Compte tenu de la réponse du rapporteur, je retire les trois amendements que j’avais déposés sur ce texte. Mon souhait n’était pas tant de restreindre le nombre de secteurs traités par la commission d’enquête que de m’assurer qu’elle se concentrerait bien sur les violences sexistes et sexuelles. Nous œuvrerons de concert pour que nos travaux se déroulent dans les meilleures conditions.

M. Erwan Balanant, rapporteur. Il ne me reste donc plus qu’à vous remercier tous pour cette magnifique concorde.

La commission adopte la proposition de résolution.

 

 

La séance est levée à seize heures cinquante-cinq.

 


Informations relatives à la commission

 

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation a désigné les députés qui siègeront dans les onze organismes extraparlementaires suivants :

 

Conseil d’administration de Radio France

Mme Prisca Thevenot

Conseil d’administration de France Télévisions

M. Emmanuel Grégoire

Conseil d’administration de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France (FMM)

M. Jérémie Patrier-Leitus

Commission pour la modernisation de la diffusion audiovisuelle

Mme Soumya Bourouaha

M. Jean Laussucq

Conseil d’administration de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger

M. Karim Ben Cheikh

Conseil d’orientation stratégique de l’Institut français

Mme Bénédicte Auzanot

Conseil d’administration du Centre national du cinéma et de l’image animée

Mme Sarah Legrain

Conseil supérieur des programmes

Mme Anne-Laure Blin

Mme Caroline Parmentier

M. Paul Vannier

Conseil d’évaluation de l’école

Mme Ayda Hadizadeh

M. Bertrand Sorre

Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur

Mme Delphine Lingemann

Conseil supérieur de l’Agence France-Presse

M. Bruno Bilde

 

 

 

 


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Présences en réunion

 

Présents.  Mme Farida Amrani, M. Raphaël Arnault, M. Gabriel Attal, M. Erwan Balanant, M. José Beaurain, Mme Béatrice Bellamy, M. Arnaud Bonnet, Mme Soumya Bourouaha, Mme Céline Calvez, M. Pierrick Courbon, Mme Julie Delpech, M. Emmanuel Grégoire, M. Frantz Gumbs, M. Steevy Gustave, Mme Ayda Hadizadeh, Mme Florence Herouin-Léautey, Mme Céline Hervieu, Mme Tiffany Joncour, Mme Florence Joubert, Mme Fatiha Keloua Hachi, M. Jean Laussucq, M. Christophe Marion, Mme Graziella Melchior, Mme Caroline Parmentier, Mme Béatrice Piron, Mme Lisette Pollet, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Claude Raux, Mme Véronique Riotton, Mme Sophie-Laurence Roy, M. Arnaud Sanvert, Mme Sophie Taillé-Polian, Mme Prisca Thevenot, M. Paul Vannier

Excusés.  M. Xavier Breton, Mme Annie Genevard, M. Frédéric Maillot, Mme Claudia Rouaux, Mme Nicole Sanquer

Assistaient également à la réunion.  Mme Agnès Firmin Le Bodo, M. Andy Kerbrat, Mme Sarah Legrain, Mme Sandrine Rousseau