Compte rendu

Commission
des affaires économiques

 Suite de l’examen des articles du projet de loi d’urgence pour Mayotte (n° 772) (Mme Estelle Youssouffa, rapporteure) 2

 

 


Lundi 13 janvier 2025

Séance de 21 heures 30

Compte rendu n° 40

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de Mme Aurélie Trouvé,

Présidente


  1 

La commission a poursuivi l’examen du projet de loi d’urgence pour Mayotte (n° 772) (Mme Estelle Youssouffa, rapporteure).

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Il reste 192 amendements à discuter ; je précise que cet après-midi, nous en avons examiné quinze par heure en moyenne. Nous avons envisagé de nous réunir demain à vingt et une heures, si nécessaire, pour poursuivre l’examen du projet de loi. La rapporteure et le ministre d’État sont d’accord pour poursuivre les travaux après minuit : nous ferons un point à ce moment-là, afin de voir ce que nous souhaitons décider pour la suite de nos travaux.

 

 

Article 3 (suite) : Exemption de formalités d’urbanisme des constructions dédiées à l’hébergement d’urgence implantées pour une durée de moins de deux ans

 

Amendement CE249 de Mme Estelle Youssouffa

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. L’amendement vise à réduire à un an le délai pour commencer à construire les habitats modulaires en bénéficiant de la dispense de formalités, ainsi que leur durée d’implantation. En effet, la situation est urgente, mais les habitats modulaires ne peuvent constituer une solution pérenne : il faut qu’après 2027, leur construction soit soumise à une autorisation d’urbanisme, comme toute autre construction.

M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer. Il faut aller vite pour reconstruire Mayotte ; toutefois, l’ampleur des travaux à mener est telle que les Mahorais pourraient avoir besoin d’un toit provisoire pendant plus de deux ans. De plus, les besoins d’installation pourraient évoluer au fur et à mesure des travaux. Mieux vaut conserver les deux délais de deux ans inscrits dans le texte. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements CE119 de Mme Nadège Abomangoli et CE150 de M. Frédéric Maillot (discussion commune)

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). L’amendement CE119, de repli, vise à préciser que la dispense de toute formalité relevant du code de l’urbanisme ne s’applique pas aux mesures visant à garantir la sécurité des personnes et la préservation de l’environnement. Les constructions temporaires, fragiles, sont particulièrement exposées aux risques. Par ailleurs, la pénurie de logements qui existait avant le passage du cyclone peut faire craindre que ces constructions ne perdurent. Les entreprises chargées de les bâtir pourraient abuser d’une dispense totale de formalités, mettant en danger les sinistrés et l’environnement.

M. Davy Rimane (GDR). L’amendement CE150 tend à maintenir les formalités relatives aux exigences de sécurité, pour tenir compte des réalités de Mayotte. La naissance d’un volcan sous-marin crée un risque sismique ; on connaît ceux liés aux cyclones et aux inondations. Les constructions provisoires doivent respecter les règles de sécurité dans ces trois domaines au moins.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Ils sont satisfaits. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements CE48 de M. Frédéric Maillot et CE75 de Mme Marie Lebec (discussion commune)

M. Davy Rimane (GDR). L’amendement CE48 vise à garantir l’installation de certaines commodités dans les constructions provisoires, comme la séparation des pièces de jour de celles de nuit, une cuisine et des toilettes aménagées, pour que nos concitoyens conservent malgré tout une certaine qualité de vie.

Mme Marie Lebec (EPR). L’amendement CE75 tend à préciser que les constructions temporaires remplissent les conditions minimales de confort et d’habitabilité.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis défavorable à l’amendement CE48, car il mentionne aussi des obligations en matière de prestations, à la différence de l’amendement CE75, auquel je suis favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Sur l’amendement CE48, avis défavorable. Sur l’amendement CE75, sagesse.

M. Davy Rimane (GDR). Je ne peux pas retirer l’amendement à la place de son auteur. Par ailleurs, je ne comprends pas la réponse de Mme la rapporteure au sujet des prestations, qui ne soulèvent pas de problème particulier.

M. René Pilato (LFI-NFP). Je soutiens ces amendements. J’ajoute qu’il faut penser à l’assainissement : le provisoire devenant parfois définitif, il faut séparer les eaux pluviales des eaux usées.

La commission adopte l’amendement CE48.

En conséquence, l’amendement CE75 tombe.

 

Amendement CE151 de M. Davy Rimane

M. Davy Rimane (GDR). Le présent amendement vise à préciser que les projets de construction seront soumis à l’avis de la commune ; l’absence de réponse dans le délai prévu vaudra validation.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Avis défavorable. Cette mesure ajouterait une formalité, alors que le texte vise à simplifier les démarches administratives pour accélérer les réponses aux besoins urgents d’hébergement. Je fais confiance au dialogue entre l’État et les collectivités locales pour atteindre les objectifs visés.

M. Davy Rimane (GDR). Nous avons adopté des amendements tendant à rendre obligatoire l’accord de la commune. Celui que je défends va dans le même sens. J’ajoute que la validation par absence de réponse dans le délai imparti évitera les problèmes que craint le ministre.

La commission adopte l’amendement.

 

La commission adopte l’article 3 modifié.

 

 

Article 4 : Habilitation à déroger à certaines règles de construction à Mayotte

 

Amendement de suppression CE36 de M. Aurélien Taché

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Le présent amendement vise à supprimer l’article 4, qui prévoit d’habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance. En effet, les dérogations prévues en matière de construction sont trop imprécises et trop larges, ce qui risque de tirer la qualité de la reconstruction vers le bas, alors que nous sommes tous d’accord sur la nécessité de faire preuve pour Mayotte de bien plus d’ambition que ces dernières années. S’il n’était pas adopté, nous défendrions des amendements de repli visant à renforcer les exigences.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. L’habilitation vise à permettre de construire moins cher. Le champ de l’ordonnance est effectivement trop large, mais certaines règles, relatives notamment aux places de stationnement, méritent d’être modifiées pour gagner de l’espace.

Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Les réglementations seront adaptées après une discussion technique avec les professionnels de la construction et les acteurs locaux. Je souhaite que les règles relatives à la sécurité ne soient pas concernées. Il s’agit de modifier les exigences relevant d’autres réglementations : les ascenseurs et les bornes de recharge pour les véhicules électriques, par exemple, ne seront pas systématiquement obligatoires. En revanche, certaines règles pourraient être ajustées pour augmenter le niveau d’exigence, afin de garantir une reconstruction durable.

De nombreux travaux montrent que réduire le coût de construction et s’adapter aux spécificités des territoires n’entraînent pas nécessairement une baisse de qualité. C’est encore plus vrai pour la reconstruction de Mayotte. Les professionnels, notamment les bailleurs sociaux, demandent un changement de cette nature. Nous ne bradons pas la reconstruction, nous trouvons des solutions pour reloger plus vite les Mahorais que la catastrophe a privés de toit.

J’émets donc un avis défavorable.

M. Davy Rimane (GDR). Je peux admettre le principe. Mais, dans ce cas, il y a d’autres dispositifs qu’on ne peut pas non plus imposer aux collectivités relevant du principe d’identité législative. Si les bornes de recharge ne sont pas obligatoires, on ne peut plus maintenir dans ces territoires une surtaxation sur les véhicules thermiques. Si on allège la réglementation pour accélérer la reconstruction et reloger nos concitoyens, il faut cesser de matraquer fiscalement ceux qui n’ont pas les moyens d’acquérir un véhicule électrique et qui ne disposeront pas de bornes de recharge – il faut être cohérent. Dans ce cas, il faut modifier en ce sens le projet de loi de finances (PLF) en cours d’examen, et pas seulement pour Mayotte.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Je suis ouvert à la discussion sur les autres territoires. Vous comprendrez qu’on commence par Mayotte, mais il faudra revoir la question des normes et de leur application.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE121 de Mme Aurélie Trouvé

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Le présent amendement, de repli, vise à préciser la nature temporaire des mesures dérogatoires, afin de garantir un retour progressif au droit commun en matière d’urbanisme et de construction. En effet, si les dispenses sont nécessaires pour répondre à l’urgence de la reconstruction, il est essentiel de les limiter dans le temps pour nous assurer que les aménagements seront durables et pour garantir la cohérence à long terme des politiques publiques. Il s’agit de souligner que le droit commun n’est pas fondamentalement remis en cause par cette adaptation exceptionnelle à une situation de crise et de préserver la cohérence du droit de l’urbanisme, en évitant la prolifération de règles dérogatoires.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Adopter cet amendement donnerait un coup d’accélérateur aux travaux de reconstruction : les dispositions dérogatoires visant à rendre les opérations moins onéreuses s’appliqueraient pendant une année seulement, encourageant les responsables de projet et les professionnels du bâtiment et des travaux publics (BTP) à œuvrer rapidement. D’autre part, cela limiterait la durée d’autorisation de constructions moins ambitieuses en matière d’accessibilité ou d’énergie.

Avis favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Le cyclone a causé des dégâts énormes. Les constructions en tôle ont été complètement détruites et celles en dur fortement endommagées. Les bâtiments publics, notamment, ont été très dégradés. Nous voulons une reconstruction durable et de qualité, ce qui prendra plus de six mois : il faudra notamment consulter tous les acteurs pour adapter les règles de manière équilibrée, ainsi que sécuriser le foncier et mener les études préalables. Limiter à cette durée les possibilités d’adaptation risque de freiner la dynamique de reconstruction.

Avis défavorable.

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). L’amendement prévoit que le délai de six mois est renouvelable une fois. J’ajoute que s’il est possible d’en discuter la durée d’ici à l’examen en séance publique, c’est le caractère temporaire des mesures, absent du texte, qui est essentiel. On imagine mal que Mayotte soit durablement exonérée des obligations relatives aux personnes en situation de handicap, par exemple.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Nous pourrions prévoir une durée de dix-huit mois. Je vous propose de retirer cet amendement et de le redéposer modifié pour l’examen en séance.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Nous pouvons travailler pour définir un délai, mais moins contraignant. Je m’y engage.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE184 de M. René Pilato

M. René Pilato (LFI-NFP). Le présent amendement vise à préciser que les mesures concernées contribuent à prévenir le ruissellement et ses effets sur les constructions.

L’île est fragilisée ; les pluies énormes survenues ce week-end ont provoqué des torrents de boue. Il faut absorber les eaux différemment pour éviter que des ruissellements forts endommagent les infrastructures et, surtout, mettent les personnes en danger.

Les mesures que je défends sont issues du rapport d’information sur la gestion de l’eau pour les activités économiques que j’ai rédigé avec Patrice Perrot. Nous avions montré qu’il fallait repenser le ruissellement et le stockage de l’eau dans l’Hexagone comme dans les territoires d’outre-mer.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis favorable. Il est capital pour Mayotte de trouver des solutions de bon sens en matière de gestion de l’eau. Notre territoire ne doit pas servir de laboratoire mais, dans ce domaine, l’expérimentation est pertinente – la population comme les élus demandent des solutions innovantes.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Sagesse.

Mme Dominique Voynet (EcoS). À Mayotte, seules sept communes sont dotées d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRNP) : Acoua, Bandraboua, Dembéni, Dzaoudzi, Koungou, Mtsamboro et Pamandzi. Or, dans beaucoup d’autres aussi, le niveau de risque est élevé. Il faudrait accélérer la production des PPRNP, afin de ne pas reconstruire dans les zones humides, ni dans les ravines, notamment.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Je ne sais pas si le cadre du texte permet de déposer un amendement à cette fin en vue de l’examen en séance publique. En tout cas, il faut mener une réflexion en ce sens.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Le texte prévoit d’autoriser le Gouvernement à prendre toute mesure « visant à mieux tenir compte des caractéristiques et des contraintes propres au territoire mahorais ». Je m’en suis remis à la sagesse de la commission parce que le débat est intéressant. Vous êtes le législateur ; je vous demande seulement de ne pas alourdir la loi de contraintes qui existent déjà. On peut renforcer le cadre, mais il s’agit de doter les communes concernées d’un plan de prévention et de l’appliquer.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements CE250 de Mme Estelle Youssouffa, CE123 de Mme Aurélie Trouvé et CE160 de M. Philippe Naillet (discussion commune)

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Je propose une synthèse de différents amendements déposés notamment par Mme Trouvé, M. Naillet et Mme Bamana. Il s’agit d’exclure du champ des futures ordonnances la totalité des règles relatives à la sécurité – règles de stabilité, prévention des risques naturels, prévention des risques technologiques et miniers, sécurité des ascenseurs, sécurité des installations électriques et gaz, prévention des risques de chute et sécurité incendie –, les obligations de recours aux énergies renouvelables et les règles relatives à l’accessibilité pour les établissements recevant du public (ERP) et les installations ouvertes au public en maintenant le champ ouvert à des dérogations en matière d’accessibilité pour les locaux d’habitation.

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). L’amendement CE123, de repli, vise à garantir le respect des normes de construction élémentaires. Contrairement à ce que laisse penser le texte, ces normes ne se limitent pas aux normes de sécurité, mais incluent la qualité sanitaire et l’accessibilité. Il n’est pas concevable de reconstruire Mayotte suivant des solutions d’urgence qui ne pourront durer. Elles risquent, d’une part, de mettre en difficulté les habitants à mobilité réduite, les personnes âgées et les jeunes parents avec poussette et, d’autre part, d’aggraver les conditions sanitaires dans un territoire particulièrement vulnérable aux épidémies et aux pénuries d’eau.

M. Philippe Naillet (SOC). Mon amendement vise à préciser le champ des règles ne pouvant être aménagées par l’ordonnance, du fait du périmètre incertain des « exigences de sécurité des constructions » et afin de garantir un niveau minimal de qualité de construction sans remettre en question l’objectif visé. Seraient exclues du champ de l’ordonnance les règles de stabilité et de solidité, la prévention des risques naturels, technologiques et miniers, parmi lesquels les normes relatives au risque cyclonique, ainsi que les règles de sécurité d’usage des bâtiments, de sécurité des personnes contre les risques d’incendie et de qualité sanitaire.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je retire l’amendement CE123 au profit de celui de Mme la rapporteure.

L’amendement CE123 est retiré.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Nous cherchons à garantir la qualité des nouvelles constructions : les règles sur la sécurité incendie et la prévention des risques, qui permettent d’assurer la sécurité des habitants, sont inchangées. Les adaptations visent à réduire le coût de production et de construction des nouveaux logements et à accélérer leur production. Plus de logements de qualité, c’est l’assurance de reloger plus vite les familles mahoraises. Je le répète, il ne s’agit pas de brader la construction.

Les amendements étant satisfaits par les règles prévues, je formule un avis défavorable à l’amendement de Mme la rapporteure.

La commission adopte l’amendement CE250 ; en conséquence, les amendements CE123 et CE160 tombent, ainsi que les amendements CE213 de Mme Dominique Voynet, CE38 de Mme Nadège Abomangoli et CE12 de Mme Anchya Bamana.

 

Amendement CE182 de M. René Pilato

M. René Pilato (LFI-NFP). Cet amendement technique vise à garantir dans les nouvelles constructions et les nouveaux travaux une gestion parcellaire des eaux de pluie – infiltration, récupération, stockage. Compte tenu des difficultés d’approvisionnement en eau à Mayotte, où des coupures ont lieu deux jours sur trois, la récupération et le stockage de l’eau de pluie dans les nouveaux logements ou à l’occasion de travaux affectant des résidences actuelles permettraient aux habitants de pourvoir de façon autonome à leurs besoins en eau non potable. La quantité récupérée sur la parcelle serait ainsi soustraite à la demande, ce qui allégerait la pression sur la disponibilité en eau potable.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis très favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Avis défavorable. L’établissement public de reconstruction de Mayotte recevra rapidement, je l’espère, sa feuille de route, et il veillera à intégrer les meilleures pratiques pour accompagner le travail de résilience du territoire mahorais. Bien que je soutienne le principe d’une meilleure récupération des eaux de pluie à l’échelle du bâtiment et de la parcelle, l’urgence sanitaire et sociale justifie que l’on n’ajoute pas de complexités techniques ou administratives à la reconstruction de logements pérennes, alors que plusieurs milliers de personnes ne disposent plus d’un logement pour les abriter en ce début de saison des pluies.

M. René Pilato (LFI-NFP). J’insiste : une cuve de 1 mètre cube, ce sont 1 000 litres d’eau disponibles, pour un coût très bas rapporté à celui de la construction dans son ensemble. Inscrire cette disposition dans la loi permettrait aux Mahorais de disposer d’un stockage minimum.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. J’abonde dans le sens de mon collègue. Depuis plusieurs années que nous connaissons des crises de l’eau, de nombreuses familles mahoraises ont construit à leurs frais des citernes artisanales, le plus souvent de gros bidons qui ne sont pas destinés à cet usage ; ces cuves deviennent des bassins de culture pour les moustiques et favorisent la propagation de la dengue. Il est nécessaire de tenir compte de ce problème dans la reconstruction.

L’eau potable produite par la dessalinisation et les retenues collinaires est rare et chère à Mayotte. C’est pourquoi les élus locaux ont demandé à plusieurs reprises un accompagnement de l’État afin de développer l’usage des eaux non potables, ce que les ménages font déjà de manière illégale et artisanale en recueillant l’eau de pluie.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE161 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet (SOC). L’amendement est satisfait par l’adoption de l’amendement CE250 de Mme la rapporteure pour ce qui concerne les établissements recevant du public. S’agissant des logements, nous proposerons une nouvelle rédaction pour la séance publique.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. L’amendement est satisfait. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE120 de Mme Aurélie Trouvé et sous-amendement CE240 du Gouvernement

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). L’amendement vise à garantir que l’assouplissement des normes de construction concerne exclusivement la reconstruction d’urgence. En effet, certains promoteurs pourraient profiter de l’ambiguïté de la rédaction choisie à l’alinéa 3, qui suggère une rétroactivité. Nous proposons donc de préciser que les autorisations et les permis de construire concernés sont uniquement ceux obtenus postérieurement au 14 décembre 2024.

M. Manuel Valls, ministre d’État. En effet, l’assouplissement des normes de construction doit servir exclusivement à la reconstruction d’urgence, et il faut éviter toute ambiguïté concernant la date d’application des nouvelles règles. Le sous-amendement prend en compte vos préoccupations en faisant uniquement référence aux autorisations d’urbanisme ; de plus, il a pour objet d’assurer que les mesures d’adaptation prévues par l’ordonnance s’appliquent aux constructions temporaires dispensées de formalité au titre du code de l’urbanisme en application de l’article 3 du texte.

Avis favorable à l’amendement, sous réserve de l’adoption du sous-amendement.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis favorable à l’amendement CE120 : la non-rétroactivité est importante. En revanche, avis défavorable au sous-amendement du Gouvernement. Il s’agit de donner plus de souplesse aux constructions modulaires.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

Elle adopte l’article 4 modifié.

 

 

Après l’article 4

 

Amendements CE122 et CE39 de Mme Mathilde Hignet

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). L’amendement CE122 vise à privilégier les dispositifs de ventilation naturelle. Les constructions réalisées à Mayotte, dont le climat est tropical, ne sauraient être pensées comme celles de l’Hexagone. Un rapport de l’Agence de la transition écologique (Ademe) recommande la ventilation naturelle pour assurer le confort thermique dans les logements et indique qu’au-delà de leur contribution au réchauffement climatique, les climatiseurs ajoutent à la surcharge du réseau électrique, lequel est encore en cours de rétablissement sur l’île.

Aux termes de l’amendement CE39, les autorisations d’urbanisme et de construction de bâtiments à usage d’habitation délivrées dans le cadre de la présente loi intègrent un dispositif de collecte des eaux de pluie pour des besoins domestiques autres que la consommation humaine.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. L’amendement CE39 est satisfait.

Avis défavorable à l’amendement CE122. Depuis le cyclone Chido, Mayotte a connu de longues coupures d’électricité. Pour vous parler franchement, sans climatisation, on ne dort pas. On se réveille trois ou quatre fois par nuit et l’organisme ne récupère pas. La climatisation n’est pas un luxe ; deux personnes sont mortes de la chaleur au cours des dernières semaines. L’absence de climatisation est infernale pour les organismes humains. Une étude de la Banque mondiale relève que la climatisation permet un gain de productivité de 40 % dans les pays tropicaux. Même si ce n’est pas votre intention, je crains que l’amendement ne dispense le Gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour équiper les bâtiments.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Le recours à tel ou tel dispositif de construction ne relève pas de la loi et vos propositions n’ont pas de portée normative. Il revient aux concepteurs des projets de prendre en compte les procédés constructifs les plus adaptés au territoire. Avis défavorable à l’amendement CE122.

Concernant le second amendement, je m’aligne également sur la rapporteure. On m’a d’ailleurs indiqué que l’absence de climatisation posait aussi des problèmes vis-à-vis des moustiques.

Mme Dominique Voynet (EcoS). L’amendement est rédigé avec prudence : il n’exclut pas le recours à la climatisation, mais privilégie la ventilation naturelle quand cela est possible, à la fois pour améliorer le confort et pour réduire la consommation électrique.

Voilà un demi-siècle que l’on travaille sur la construction bioclimatique en réfléchissant à l’orientation des bâtiments par rapport au soleil, au vent et aux reliefs, comme dans la quasi-totalité des pays du monde. Un récent rapport de l’Ademe a souligné le potentiel de ces solutions. Nous n’allons pas refaire ici le droit de l’urbanisme, mais si nous voulons construire des bâtiments durables en améliorant le confort et en minimisant les coûts, nous avons intérêt à privilégier ces dispositifs.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements CE251 de Mme Estelle Youssouffa et CE154 de M. Aurélien Taché

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Mon amendement encadre la vente des tôles utilisées comme matériau de construction, en renforçant un arrêté pris par le préfet de Mayotte il y a dix jours. Pour pouvoir acheter de la tôle, un particulier devra s’engager à l’utiliser pour la remise en état de son logement et présenter les justificatifs nécessaires. Cela devrait empêcher d’employer la tôle pour l’habitat informel.

L’amendement a deux objectifs : garantir que les tôles pouvant servir de matériau de construction seront bien utilisées pour la rénovation de logements sinistrés à un moment où ces tôles pourraient faire l’objet d’une pénurie, et éviter qu’elles ne soient utilisées pour la restauration des taudis et des bangas. Les bidonvilles ne sont pas solides et présentent un risque de sécurité pour les occupants et pour la population. Durant le cyclone, les tôles arrachées par le vent sont devenues des projectiles.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Cet amendement important correspond à ce que souhaite le Gouvernement : lutter contre l’habitat indigne et informel et empêcher la reconstruction des bidonvilles. Avis favorable.

M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Voilà où nous en sommes : négocier des dérogations pour acheter de la tôle ! Tout cela parce que, depuis vingt ou trente ans, nous n’avons pas fait ce qu’il fallait pour l’archipel de Mayotte. Nous nous demandons jusqu’où aller dans la dérogation au droit commun car nous ne nous donnons pas les moyens de le respecter. Un préfet de la République a, très sérieusement, pris un arrêté pour restreindre la vente de tôle aux particuliers. Cela ne peut pas être une solution !

Madame la rapporteure, vous représentez admirablement votre territoire et la nation française. Je ne serai jamais aussi touché que vous par ce qui se passe à Mayotte et je sais que nous devons faire face à l’urgence, mais, faisant partie comme vous de la représentation nationale, je me permets de vous dire que ce chemin est sans issue.

Mon amendement vise au contraire à empêcher toute restriction de la vente de tôle aux particuliers.

M. Philippe Gosselin (DR). L’amendement de Mme la rapporteure nous pose des difficultés à tous, tant il est incongru qu’un préfet interdise la vente de tôle à des particuliers. On en sourirait presque, si la situation n’était pas aussi dramatique. Pourquoi ne pas aller jusqu’aux marteaux et aux clous ? Après tout, la tôle ne tient pas toute seule…

Néanmoins, je le voterai. Soyons clairs : de nombreuses tôles tombées à terre ont déjà servi à la reconstruction. Les êtres humains restent des êtres humains et, dans le dénuement le plus complet, on récupère la tôle de ses voisins, morts ou blessés. C’est la limite de notre exercice, mais nécessité fait loi. L’urgence est d’éviter autant que possible la reconstitution de cet habitat précaire – et qui le restera.

Mme Dominique Voynet (EcoS). Ce n’est pas seulement incongru, c’est choquant. Qui connaît bien Mayotte sait que les constructions légales en dur et les constructions moins légales, voire franchement illégales, faites de tôle, de pneus et de planches y sont étroitement imbriquées. On trouve au cœur même de Mamoudzou des parcelles sur lesquelles le propriétaire de la maison a installé dans une dépendance des familles comoriennes, en situation régulière ou non, auxquelles s’ajoutent, au fond du jardin, les appentis, les garages, les locaux agricoles, etc. Les tôles vendues à des Français risquent-elles moins de s’envoler que celles posées sur des bangas dans les quartiers de Kawéni ou de Doujani ? Si vous parvenez à m’en convaincre, je suis prête à voter pour l’amendement.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Il n’y a pas de condition de nationalité pour l’achat de tôles ; il suffit de présenter une pièce d’identité. Je tiens par ailleurs à souligner l’incohérence de la position de certains. On ne peut pas déplorer l’anarchie urbaine, nous demander des comptes sur le bilan des morts dans les bidonvilles et nous accuser ensuite d’être inhumains lorsque nous proposons des moyens de lutter contre leur construction. Je suis à court d’arguments. C’est une telle absurdité ! Les fonctionnaires arrivant de l’Hexagone pensent que les bidonvilles ont toujours fait partie du paysage à Mayotte. C’est une erreur : ils prolifèrent depuis une quinzaine d’années seulement. Et depuis quinze ans, les élus mahorais alertent sur le fait que ces constructions illégales ont lieu sur des zones dangereuses.

Madame Voynet, vous évoquez la complicité des propriétaires, mais l’on sait parfaitement que la plupart des tôles vendues à Mayotte ne sont pas destinées à couvrir les maisons : quand on construit une maison en dur, on ne refait pas sa toiture tous les deux jours. Les tôles vendues en quantité industrielle se retrouvent dans les bidonvilles. Cela fait des années que Mayotte déplore l’absence de contrôle à la vente, et il est bienvenu que l’État ait enfin décidé de prendre des mesures au lendemain du cyclone Chido.

Le 3 janvier dernier, un enfant a été emporté par une coulée de boue dans un bidonville à Kawéni. Je ne doute pas que nous compterons de nouveau les morts à la fin de l’alerte rouge. Après la pluie et les inondations de ce week-end, nous redoutons le pire. Tout justifie le n’importe quoi concernant les bidonvilles, mais je refuse de laisser perdurer l’impuissance collective. Nous ne supportons plus l’attitude qui consiste à condamner et à déplorer ce qui se passe à Mayotte sans rien faire. Il faut prendre des décisions, même difficiles. Je vous demande d’avoir le courage de vous remettre en question.

M. Manuel Valls, ministre d’État. S’agissant des victimes des derniers événements climatiques, il faut attendre d’avoir tous les éléments, même si les coulées de boue et les inondations représentent évidemment un danger supplémentaire.

L’amendement de Mme la rapporteure est important, pour les raisons qu’elle a indiquées. On a bien compris qu’il fallait mettre fin à la construction des bidonvilles et à l’immigration illégale : ce sont des sujets lourds et graves. Cela étant, la situation à Mayotte nous oblige à entrer dans le détail. Ne pas comprendre que ces matériaux de construction, ces tôles, puissent être utilisés pour l’habitat illégal, c’est ignorer la réalité à laquelle Mayotte est confrontée. C’est pourquoi nous soutenons cet amendement. Il y a dix ans, il y avait déjà des tôles à Mayotte, mais pas dans ces proportions.

Il faut se doter d’instruments, au-delà de ceux qui sont déjà dans la loi, pour empêcher cela. Madame Voynet, les tôles entraînent des risques majeurs pour les occupants des bidonvilles ou des bangas ; pour preuve, ces derniers ont été reconstruits en quelques heures ! En visitant les communes de l’île, j’ai vu passer sur les routes des gens transportant des tôles, à l’évidence à cet effet. Lors du passage du cyclone, ces tôles ont été à l’origine de nombreux accidents et blessures, parfois mortels. Il faut donc réglementer. Lorsqu’il achètera ces matériaux, un particulier devra désormais s’engager à les utiliser pour remettre en état son logement et présenter les justificatifs nécessaires. On peut certes imaginer que cela donnera naissance à une économie souterraine : il nous appartiendra de la combattre. Cette mesure marque notre volonté commune d’en finir avec ce type de constructions.

La commission adopte l’amendement CE251.

En conséquence, l’amendement CE154 tombe.

 

 

CHAPITRE III  ADAPTER LES PROCÉDURES D’URBANISME ET D’AMÉNAGEMENT AUX ENJEUX DE LA RECONSTRUCTION À MAYOTTE

 

Article 5 : Champ et durée d’application du chapitre III de la loi

 

Amendement CE214 de Mme Dominique Voynet

Mme Dominique Voynet (EcoS). On ne peut pas conseiller de reconstruire à l’identique. Il faut tirer les enseignements du cyclone Chido et réduire les vulnérabilités en privilégiant les adaptations ou les améliorations. Aussi je propose de supprimer les mots « à l’identique », à l’alinéa 1er, tout en précisant que la reconstruction ou la réfection doit se faire dans le respect de la réglementation relative aux risques naturels.

Pour revenir sur les tôles, monsieur le ministre, vous savez qu’elles sont utilisées pour clôturer des parcelles – comme cela a été fait sur le site de l’agence régionale de santé, à Tsoundzou –, construire des abris de jardin ou des garages. Je partage pleinement votre volonté de réduire l’usage de ces armes volantes, mais il faut le faire pour tout le monde : cela ne doit pas être lié à la capacité d’une personne à présenter une carte d’identité. D’ailleurs, je suis à peu près certaine que beaucoup de gens prêteront leurs papiers pour permettre l’achat de tôles.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Je partage votre objectif mais, en l’état, votre amendement est moins-disant que le texte. Je vous invite à le retirer et à le réécrire en vue de la séance.

M. Manuel Valls, ministre d’État. L’amendement me paraît satisfait par la rédaction du projet de loi, et ne va pas aussi loin. Je vous invite à le retirer ; à défaut, mon avis sera défavorable.

Mme Dominique Voynet (EcoS). Je le compléterai en vue de la séance.

L’amendement est retiré.

 

Amendements identiques CE1 de M. Stéphane Travert, CE53 de M. Éric Bothorel, CE63 de Mme Marie-Noëlle Battistel, CE74 de Mme Marie Lebec et CE186 de Mme Louise Morel

M. Stéphane Travert (EPR). Il s’agit d’étendre le champ d’application du chapitre III, relatif à l’adaptation des procédures d’urbanisme, à la reconstruction des réseaux de communications électroniques, qui présente des enjeux spécifiques.

Mme Louise Morel (Dem). Plusieurs d’entre nous ont été saisis de cette question par la Fédération française des télécoms, qui a proposé des amendements. Il nous semble que le projet de loi a un peu moins pris en compte cette dimension, pourtant importante compte tenu des dégâts constatés. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce qui est fait ou envisagé dans ce domaine ?

M. Manuel Valls, ministre d’État. Vous souhaitez préciser que les procédures d’urbanisme prévues aux articles 5 à 9 s’appliquent aux réseaux de communications électroniques. L’article 5 inclut déjà, de mon point de vue, la reconstruction ou la réfection des constructions, aménagements et installations liés aux réseaux de communications électroniques, tels que les antennes relais. C’est d’ailleurs ce que précisent tant l’exposé des motifs du projet de loi que l’étude d’impact. Cette précision ne me paraît donc pas nécessaire et je vous invite à retirer l’amendement, à défaut de quoi j’émettrais un avis défavorable. J’ajoute que le Gouvernement a déposé un amendement CE235, portant article additionnel après l’article 6, qui apporte des précisions en la matière.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Sagesse.

M. Stéphane Travert (EPR). L’amendement CE235 du Gouvernement englobant l’ensemble, je retire l’amendement CE1.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Cet amendement du Gouvernement prévoit bien que le texte s’applique aux installations de télécoms ?

M. Manuel Valls, ministre d’État. Oui.

Les amendements sont retirés.

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE253 de Mme Estelle Youssouffa, rapporteure.

 

Amendement CE13 de Mme Anchya Bamana

Mme Anchya Bamana (RN). Par cet amendement, nous souhaitons, encore une fois, redonner leur place aux maires. L’adaptation des procédures d’urbanisme et d’aménagement aux enjeux de la reconstruction, qui peut paraître technique, aura pourtant des conséquences sur l’urbanisme de l’archipel pendant de nombreuses années. Elle ne peut donc pas être décidée sans concertation avec les élus locaux.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Il n’est pas inutile de prévoir un travail partenarial renforcé entre chaque commune et l’État, d’autant plus que les communes ne seront pas toutes représentées au conseil d’administration de l’établissement public qui sera créé. Je note cependant que l’amendement n’a pas de portée normative. Avis favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Le maire, au nom de la commune, est l’autorité compétente de droit commun pour délivrer les autorisations d’urbanisme dans les communes dotées d’un plan d’urbanisme – ce qui est le cas, a priori, de toutes celles de Mayotte. Les maires seront amenés à délivrer des autorisations d’urbanisme portant sur la reconstruction ou la réfection des constructions, installations ou aménagements dégradés ou détruits par le cyclone Chido, conformément aux documents d’urbanisme existants des collectivités. Votre objectif est satisfait ; il ne me paraît pas nécessaire d’alourdir inutilement la loi. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE254 de Mme Estelle Youssouffa

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Cet amendement vise à rappeler que les dispositions dérogatoires relatives au droit à la reconstruction, prévues par les articles 6 à 9, ne peuvent pas s’appliquer à l’habitat informel. Vous n’ignorez pas que de nombreuses associations sont très actives sur le plan judiciaire et font avancer le droit des étrangers à Mayotte. Or, ce texte pourrait ouvrir de nombreuses brèches. Il faut veiller à ne pas ouvrir la porte aux régularisations ou, à tout le moins, à ne pas favoriser l’habitat informel.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Les articles 5 à 9 visent à faciliter et à accélérer la reconstruction des locaux qui ont été régulièrement édifiés. La rédaction de la rapporteure permet de réaffirmer ce principe qui figurait dans le projet de loi. Favorable.

M. Davy Rimane (GDR). Lorsqu’on parle d’habitat informel, on vise bien l’ensemble des logements qui ont été construits sans titre ? Dès lors, les Mahorais qui ont bâti une maison sans permis de construire il y a un certain nombre d’années ne pourront eux non plus pas bénéficier du dispositif.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. On parle des habitations sans droit ni titre, mais qui ne respectent pas non plus les normes sanitaires et de sécurité.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Nous avons eu ce débat sur place, avec les élus, la rapporteure et les parlementaires. On se trouve sur une ligne de crête spécifique à Mayotte. Il y a évidemment des situations particulières, un certain nombre de logements qui n’ont pas donné lieu à la délivrance d’un titre de propriété et qui ne sont pas assurés. Mais il faut bien faire la différence entre l’habitat illégal et ces situations qui, sur le plan juridique, doivent être régularisées. C’est tout le travail que nous allons mener, notamment dans le cadre de l’aide qu’il faut apporter aux familles mahoraises pour la reconstruction de leur toit.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’article 5 modifié.

 

 

Article 6 : Adaptation des règles d’urbanisme en cas de reconstruction ou de réfection du bâtiment à l’identique ou avec certaines modifications

 

Amendements CE139 de M. Frédéric Maillot et CE217 de Mme Dominique Voynet (discussion commune)

M. Davy Rimane (GDR). L’amendement CE139 vise à ce que la reconstruction prenne en compte les particularités de Mayotte, liées à son environnement géographique et climatique. La réglementation, notamment thermique, qui est basée sur la situation de l’Hexagone, doit être adaptée à ces spécificités.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis défavorable. Adopter l’amendement reviendrait à autoriser une modification du gabarit – par exemple, un agrandissement de quelques mètres carrés – mais pas une reconstruction à volume identique.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Même avis.

M. Davy Rimane (GDR). L’amendement ne porte pas sur le gabarit, mais sur les matériaux employés, qui doivent être adaptés aux spécificités de Mayotte.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Cela relève du droit de la construction, qui était traité à l’article 4. Le chapitre que nous examinons concerne le droit de l’urbanisme.

M. Manuel Valls, ministre d’État. L’article 6 du projet de loi vise les reconstructions à l’identique ou avec des adaptations ou des améliorations, nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire. Les mots « à l’identique » visent à permettre de reconstruire les maisons qui bénéficiaient d’une autorisation en respectant la même surface et le même gabarit, et donc à sauvegarder les droits à construire de leurs propriétaires. Ces dispositions ne font pas obstacle à des constructions de meilleure qualité et mieux adaptées aux contraintes du territoire. D’autres dispositions s’appliquent, comme les règles de construction prévues par le code de la construction et de l’habitation, lesquelles seront adaptées par l’ordonnance prévue à l’article 4. L’établissement public de reconstruction intégrera cette exigence de qualité dans les projets. C’est la raison pour laquelle mon avis est défavorable.

L’amendement CE217 est retiré.

La commission rejette l’amendement CE139.

 

Amendement CE218 de Mme Dominique Voynet

Mme Dominique Voynet (EcoS). M. le ministre s’obstine à nous expliquer ce qu’est l’habitat illégal. Pour ma part, je considère qu’une bonne partie des habitations de Mayotte, qui ont été bâties sans titre de propriété ni permis de construire et qui ne sont pas assurées, sont des constructions illégales. Cela étant, j’ai bien compris qu’il s’agissait d’entretenir une différence avec l’habitat informel et les près de 20 000 bangas, où l’on vit dans des conditions extrêmement précaires, souvent sans eau, ni assainissement, ni électricité.

La rédaction du premier alinéa de l’article 6 m’inquiète, car elle exclura une bonne partie des constructions. En effet, la dérogation concernera les constructions, aménagements et installations « sous réserve qu’ils aient été régulièrement édifiés ». Je propose donc de supprimer ces derniers mots.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Il ne faut pas confondre l’anarchie documentaire autour du cadastre et du foncier avec la prédation et l’occupation illégale de terrains qui font l’objet de droits de propriété. Ce dont nous parlons, c’est de constructions illégales sur des terrains qui ont des propriétaires, publics ou privés, et qui sont fiscalisés. Des personnes s’en emparent et construisent dessus dans l’illégalité la plus absolue ; elles menacent les propriétaires et vont parfois jusqu’à les tuer. Cela n’a rien à voir avec le capharnaüm qui règne dans l’administration foncière et avec les difficultés auxquelles on est confronté en matière d’indivision et de reconnaissance ou de délivrance des titres. Il est important d’éviter les discours totalement fallacieux qui mettent sur le même plan les occupations illégales de personnes étrangères, qui arrivent sur le territoire et s’approprient des terrains, et la situation des Mahorais qui peinent à obtenir des réponses de la part de l’administration. Rappelons qu’après l’incendie du cadastre à Moroni, un autre incendie a ravagé les archives en 1993, ce à quoi s’ajoute le sous-financement chronique de toutes les institutions qui étaient censées régulariser le foncier à Mayotte.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Madame Voynet, je ne m’obstine pas, j’argumente. Votre amendement vise à ce que les constructions, aménagements et installations non régulièrement édifiés puissent bénéficier du régime d’adaptation des procédures d’urbanisme. La possibilité d’une reconstruction à l’identique ou avec des adaptations, même quand le document d’urbanisme ne le permet plus, ne peut s’envisager que si la construction initiale a été régulièrement édifiée et a fait l’objet d’une autorisation d’urbanisme. Votre proposition reviendrait à autoriser la reconstruction de bâtiments construits illégalement, ce qui ne correspond pas au projet que nous pouvons porter collectivement pour le territoire, ni à la demande de qualité qui est exprimée dans plusieurs amendements. Bref, elle avaliserait la régularisation de l’habitat informel – c’est le cœur du problème.

Les Mahorais dont les habitations n’avaient pas été dûment autorisées pourront demander à régulariser leur situation vis-à-vis du code de l’urbanisme et des règles du plan local d’urbanisme (PLU) en sollicitant une autorisation dans le cadre de la reconstruction – nous savons qu’ils le feront. C’est cette opération que nous voulons mener à bien. Ne confondons pas l’habitat illégal, informel et la situation des Mahorais qui n’avaient pas régularisé leur situation au regard du code de l’urbanisme et du PLU. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE147 de Mme Aurélie Trouvé

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Cet amendement vise à préciser l’étendue de la dérogation prévue à l’article 5. Par dérogation à l’article L. 111-15 du code de l’urbanisme, l’article 6 autorise la reconstruction même si la carte communale ou le PLU en dispose autrement, mais il ne mentionne pas le plan de prévention des risques naturels prévisibles. Or, la reconstruction ne saurait raisonnablement contrevenir aux dispositions prévenant les risques naturels. Il est essentiel de préciser que, si tel était le cas, la dérogation ne s’appliquerait pas.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Je considère que l’amendement est satisfait par le III de l’article 6. Je vous propose donc de le retirer ; à défaut, avis défavorable.

M. René Pilato (LFI-NFP). Les torrents de boue qui ont dévasté Mayotte ce week-end nous rappellent, indépendamment des aspects juridiques, qu’il ne faut pas reconstruire à un endroit exposé à des risques naturels. C’est tout le sens de cet amendement.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Il est en effet impératif que l’île réétudie la question des risques naturels.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CE255 de Mme Estelle Youssouffa, rapporteure, tombe.

 

Amendement CE106 de M. Philippe Gosselin

M. Philippe Gosselin (DR). Nous restons ici dans l’esprit de l’article 5 : cet amendement vise à garantir que le texte n’autorisera à reconstruire que des bâtiments légaux dotés de titres de propriété et non des bidonvilles.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Il me paraît satisfait, je vous recommande donc de le retirer.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Même avis. Nous partageons les mêmes objectifs, ce qui transparaît dans la rédaction actuelle de l’article : les reconstructions ou réfections de bâtiments sont autorisées, « sous réserve qu’ils aient été régulièrement édifiés ».

M. Philippe Gosselin (DR). Mon amendement n’est que partiellement satisfait, dans la mesure où ma rédaction vise des locaux édifiés « sans droit ni titre », ce qui recouvre des situations différentes de celles que vous évoquez, monsieur le ministre d’État.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE107 de M. Philippe Gosselin

M. Philippe Gosselin (DR). Encore une fois, nous souhaitons que la reconstruction puisse se faire vite et bien.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Je comprends vos intentions, monsieur Gosselin, mais l’article 6 permet déjà aux constructions répondant à un objectif d’intérêt général de ne pas respecter les règles d’encadrement du gabarit. Votre amendement est satisfait, je vous propose de le retirer.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE136 de Mme Aurélie Trouvé ; amendement CE257 de Mme Estelle Youssouffa et sous-amendement CE298 du Gouvernement (discussion commune)

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). L’amendement CE136 propose de remplacer les alinéas 2 et 3 par l’alinéa suivant : « S’agissant des constructions, les travaux nécessaires à leur reconstruction peuvent comporter des adaptations impliquant une diminution ou une augmentation de son gabarit initial à la condition que ces adaptations soient motivées par un objectif d’intérêt général et strictement nécessaires à la réalisation du ou des objectifs invoqués pour la justifier. » Nous souhaitons ainsi limiter au strict nécessaire les variations de gabarit des constructions à rebâtir, quel que soit le pourcentage de modification de celles-ci.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Votre proposition me paraît beaucoup trop restrictive. Le projet de loi prévoit une modification du gabarit de 5 %, ce qui permet de limiter des évolutions, tout en donnant un minimum de marge aux demandeurs. Avis donc défavorable. Mon amendement CE257, lui, est rédactionnel et je suis favorable au sous-amendement CE298 du Gouvernement.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Pour les mêmes raisons que Mme la rapporteure, je suis défavorable à l’amendement CE136. En revanche, je suis favorable au CE257 sous réserve de l’adoption de mon sous-amendement qui précise, en cohérence avec la rédaction du premier alinéa de l’article 6, que les possibilités d’adaptation du gabarit en cas de réfection ou reconstruction concernent tant les constructions que les installations.

La commission rejette l’amendement CE136.

Elle adopte successivement le sous-amendement CE298 et l’amendement CE257 sous-amendé.

 

Amendement CE128 de M. Davy Rimane

M. Davy Rimane (GDR). Nous proposons de porter de 5 % à 10 % le taux d’augmentation ou de diminution prévu à l’alinéa 2. Proposé par l’association Mayotte a soif, cet amendement vise à offrir davantage de flexibilité, afin de mieux répondre aux besoins spécifiques des projets et de s’adapter aux contraintes locales, mais également pour tenir compte des réalités opérationnelles et des attentes des acteurs concernés.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE258 de Mme Estelle Youssouffa et sous-amendement CE299 du Gouvernement

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. L’amendement précise la portée de l’objectif d’intérêt général, qui peut ainsi correspondre à des améliorations du bâti – performance énergétique, accessibilité, sécurité – mais aussi à d’autres motifs, tels que l’exercice d’une mission de service public.

M. Manuel Valls, ministre d’État. J’émets un avis favorable sous réserve de l’adoption de mon sous-amendement, encore une fois par souci de cohérence avec la rédaction du premier alinéa de l’article 6.

M. Davy Rimane (GDR). Après avoir refusé notre proposition de porter le taux de 5 % à 10 % pour donner de la flexibilité, vous nous proposez de dépasser le seuil de 5 %. Cela signifie-t-il que notre taux n’était pas suffisant, que vous êtes disposés à dépasser 10 % ?

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Votre amendement ne faisait pas référence à la notion d’intérêt général, cher collègue.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

En conséquence, l’amendement CE14 de Mme Anchya Bamana tombe.

Mme Anchya Bamana (RN). L’amendement CE14 qui vient de tomber concernait les constructions destinées à l’exercice d’une mission de service public, qui sont habituellement sous-dimensionnées. Cela va vous paraître irréel, mais il n’y a pas partout à Mayotte de boîtes postales pour que les habitants récupèrent leur courrier. Le chantier d’adressage n’est d’ailleurs pas finalisé. C’est un exemple du dimensionnement qui est à prévoir, au-delà des 5 % d’ajustement technique des reconstructions, mais aussi un exemple parmi tant d’autres de la différence structurelle qui existe entre les conditions de vie des citoyens français de Mayotte et de ceux des autres départements de France.

 

Amendement CE146 de Mme Aurélie Trouvé

Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Il vise à préciser les contours de la notion juridique d’intérêt général retenue dans cet alinéa 3, en faisant référence à la définition donnée dans l’article L. 102-1 du code de l’urbanisme pour justifier l’application du régime applicable au projet d’intérêt général : « Être destiné à la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’équipement, au fonctionnement d’un service public, à l’accueil et au logement des personnes défavorisées ou de ressources modestes, à la protection du patrimoine naturel ou culturel, à la prévention des risques, à la mise en valeur des ressources naturelles, à l’aménagement agricole et rural ou à la préservation ou remise en bon état des continuités écologiques ».

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Trop restrictive, cette précision empêcherait d’augmenter légèrement le gabarit pour améliorer les caractéristiques du bâtiment en matière d’accessibilité, de performance énergétique ou de sécurité. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE259 de Mme Estelle Youssouffa et sous-amendement CE300 du Gouvernement

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. C’est un amendement rédactionnel.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Mon sous-amendement s’inscrit dans la même logique que les deux précédents.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

En conséquence, l’amendement CE22 de Mme Dominique Voynet tombe.

 

Amendement CE35 de M. Aurélien Taché

M. Aurélien Taché (LFI-NFP). Travaillé avec APF France handicap, il vise à garantir le respect des prescriptions d’accessibilité des bâtiments dans la reconstruction de Mayotte. Rappelons que le Comité des droits de l’homme de l’ONU a épinglé notre pays pour inapplication de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. A priori satisfait, votre amendement pose en outre un problème sur le plan rédactionnel. Je vous suggère de le retirer et de vous rapprocher de la commission afin d’en proposer une nouvelle rédaction d’ici à l’examen du texte en séance.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE143 de Mme Aurélie Trouvé

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Il est proposé de compléter cet article par la phrase suivante : « Le permis ne peut être accordé si le projet est de nature à porter atteinte à la salubrité et la sécurité publique sans qu’il soit possible d’assortir l’autorisation de prescriptions spéciales permettant de les garantir. » Nous voulons ainsi veiller au respect des normes de construction élémentaires : l’urgence de la reconstruction ne saurait justifier l’autorisation de travaux pouvant porter atteinte à la salubrité et à la sécurité publique.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. L’amendement me semble satisfait. Il ne faudrait d’ailleurs pas considérer que certaines prescriptions urbanistiques permettraient de garantir la salubrité et la sécurité publique des habitats informels. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 6 modifié.

 

 

Après l’article 6

 

La commission examine l’amendement CE57 de M. Éric Bothorel, les amendements identiques CE5 de M. Stéphane Travert et CE71 de Mme Marie Lebec en discussion commune.

M. Stéphane Travert (EPR). L’amendement CE5 est la traduction législative d’une disposition du plan « Mayotte debout », présenté par le Gouvernement, qui prévoit une dérogation à la loi dite loi « littoral » afin de faciliter l’implantation des pylônes de téléphonie mobile nécessaires à la connectivité du territoire après le passage du cyclone. L’amendement CE57 est défendu.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Ces amendements permettraient de se dispenser de l’avis des architectes des bâtiments de France (ABF) lors de la pose d’antennes relais et d’infrastructures de télécommunication. Leur rédaction peut inspirer des réserves et mériterait d’être étoffée, notamment parce qu’il n’est pas proposé de terme précis à l’application de cette dérogation –ce qui peut se révéler problématique et source de dérives. Je demande le retrait de ces amendements. À défaut, avis défavorable.

 

M. Manuel Valls, ministre d’État. Même avis que celui exprimé par Madame la rapporteure !

 

M. Stéphane Travert (EPR). J’accepte votre suggestion de retrait car l’amendement CE235 du Gouvernement offre une accroche pour cette mesure.

Les amendements CE57 et les amendements CE5 et CE71 sont retirés.

 

Puis la commission examine l’amendement CE235 du Gouvernement

M. Manuel Valls, ministre d’État. Pour que la population mahoraise puisse disposer de la couverture numérique à laquelle elle peut légitimement prétendre, il est nécessaire de reconstruire dans les meilleurs délais le réseau de téléphonie mobile permettant également un accès à internet. C’est un défi important !

En procédure ordinaire, le déploiement d’un site de téléphonie mobile – depuis la recherche d’un terrain jusqu’à l’ouverture commerciale – prend deux ans. Les dispositions du projet de loi vont permettre de réduire ces délais de manière significative.

Le chapitre III organise une simplification temporaire des procédures d’urbanisme lorsqu’il est prévu de reconstruire, à l’identique ou avec des adaptations ou améliorations, des constructions telles que les antennes de radiotéléphonie mobile.

En cohérence avec ces dispositions, le présent amendement de simplification administrative permet d’éviter de solliciter de nouveau le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale sur un projet concernant une antenne relais, la construction initiale ayant déjà fait l’objet d’une telle information et obtenu l’accord ou l’avis de l’Agence nationale des fréquences. Il prévoit aussi que les éventuelles permissions de voirie sur le domaine public routier soient octroyées dans un délai de quinze jours au lieu de deux mois. Enfin, il prévoit de déroger à l’article L. 424‑5 du code de l’urbanisme de sorte que, pendant deux ans à compter de la promulgation de la loi, il ne soit pas possible de revenir sur une décision d’urbanisme favorable accordée à compter de cette date.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis favorable.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’adoption de cet amendement ferait tomber les quinze amendements suivants, c’est-à-dire jusqu’à l’amendement CE191 inclus.

M. Philippe Gosselin (DR). Je constate qu’il y a ce soir un axe entre la présidence de la commission et le Gouvernement !

Mme la présidente Aurélie Trouvé. N’exagérons rien !

M. Philippe Gosselin (DR). Comme quoi, cela nécessitait une petite explication de texte… Plus sérieusement, je pense que cet amendement ne répond pas totalement aux préoccupations de nos collègues Bothorel et Travert, notamment en ce qui concerne l’avis des ABF. L’amendement porte sur l’autorisation des travaux sur les infrastructures. Il serait judicieux d’avoir quelques assurances sur ce point et, le cas échéant, de prévoir un petit complément avant l’examen du texte en séance.

La commission adopte l’amendement CE 235 du Gouvernement.

En conséquence, les amendements CE55 de M. Bothorel, CE3 de M. Travert, CE65 de Mme Battistel, CE188 de Mme Morel, CE56 de M. Bothorel, CE4 de M. Travert, CE189 de Mme Morel, CE6 de M. Travert, CE58 de M. Bothorel, CE190 de Mme Morel, CE7 de M. Travert, CE59 de M. Bothorel, CE66 de Mme Battistel, CE72 de Mme Lebec, CE191 de Mme Morel tombent.

 

Puis la commission examine les amendements CE73 de Mme Marie Lebec et CE54 de M. Éric Bothorel, les amendements identiques CE2 de M. Stéphane Travert, CE64 de Mme Marie-Noëlle Battistel et CE187 de Mme Louise Morel endiscussion commune.

Mme Marie Lebec (EPR). Notre amendement est la traduction législative d’une disposition du plan Mayotte debout prévoyant une dérogation à la loi « littoral » pour permettre l’implantation des pylônes de téléphonie mobile nécessaires à la connectivité de ce territoire. Il reprend aussi un article de la proposition de loi d’Éric Bothorel visant à simplifier et à améliorer la couverture mobile du territoire.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. J’émets un avis défavorable sur tous ces amendements.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Tel que rédigé, votre amendement ne comporte pas tous les garde-fous nécessaires, Madame Lebec. C’est pourquoi je vous propose de le retirer afin que nous puissions le retravailler ensemble en vue de l’examen du texte en séance. Pour l’amendement CE54 de M. Bothorel, je propose également de retravailler le dispositif d’ici à la séance. Quant aux amendements identiques, je ne peux que leur donner un avis défavorable, pour des raisons d’opportunité et parce qu’ils présentent des difficultés techniques et juridiques. Contrairement aux amendements précédents, leur deuxième alinéa codifie la disposition temporaire prévue dans le premier. Cet ajout pourrait conduire à considérer que la disposition s’applique à l’ensemble du territoire national et pas uniquement à Mayotte – ce qui ne correspond ni à l’exposé des motifs, ni à l’objet du projet de loi.

Mme Marie Lebec (EPR). Je retire mon amendement, Madame la Présidente.

M. Stéphane Travert (EPR). Je retire mes amendements. Je vais travailler à une nouvelle version qui précisera bien que la mesure est destinée exclusivement à Mayotte.

 

Mme Marie-Noel Battistel : Même chose en ce qui concerne mes amendements !

Les amendements CE73, CE54, CE2, CE64 et CE187 sont retirés.

 

Article 7 : Réduction des délais d’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme

 

Amendement CE262 de Mme Estelle Youssouffa

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Je propose que l’avis de dépôt d’une demande de permis ou d’une déclaration préalable soit affiché ou publié dans la semaine qui suit ce dépôt, plutôt que « dans les meilleurs délais », qui constitue une expression particulièrement vague.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Cela va dans le bon sens.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE153 de M. Frédéric Maillot

M. Davy Rimane (GDR). Étant donné les difficultés d’accès à internet, nous souhaitons que ces avis soient systématiquement affichés en mairie en plus d’être publiés en ligne.

Pour rebondir sur la remarque de M. Gosselin, l’alignement n’est pas tant, à mon sens, entre la présidence et le Gouvernement qu’entre le Gouvernement et la rapporteure...

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Quelle malice ! Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Avis également défavorable.

M. Davy Rimane (GDR). Mais pourquoi ? C’est du simple bon sens. Tout le monde n’a pas accès à internet – c’était déjà le cas avant le passage de Chido – et le territoire souffre d’un fort illectronisme.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. L’obligation de double publicité imposerait une surcharge de travail aux mairies. Je reconnais néanmoins avec vous que Mayotte est un désert numérique.

M. Philippe Gosselin (DR). Même si je comprends la nécessité de simplifier les procédures pour aller plus vite, il ne faut pas le faire à l’extrême. Le cas de Mayotte n’est d’ailleurs pas isolé. Je fais partie de ceux qui se bagarrent pour imposer, pour quelque temps encore, une étape avant le tout-numérique. Cette mini-charge de travail supplémentaire en vaut la peine : l’information n’a de valeur que si elle est partagée.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Laissons aux maires le soin d’utiliser les bonnes méthodes en matière de publicité.

La commission adopte l’amendement.

 

Les amendements CE142 de Mme Aurélie Trouvé et CE167 de M. Philippe Naillet sont retirés.

 

Amendement CE219 de Mme Dominique Voynet

Mme Dominique Voynet (EcoS). L’accélération des procédures doit s’appliquer à la construction de logements et de services publics et non à celle de surfaces industrielles ou commerciales de plus de 1 000 mètres carrés.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis défavorable. L’amendement complexifie inutilement la loi. Mieux vaut en rester à un délai d’instruction d’un mois pour tous les projets. D’ailleurs, les sites industriels et commerciaux sont nécessaires à la vie économique et sociale de Mayotte.

La commission rejette l’amendement.

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE263 de Mme Estelle Youssouffa, rapporteure.

 

Amendement CE168 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet (SOC). En ramenant le délai d’instruction à un mois pour les permis de construire et quinze jours pour les déclarations préalables, le Gouvernement entend accélérer drastiquement ces procédures, mais il prend aussi le risque d’emboliser les services instructeurs. Ce faisant, nombre d’autorisations pourraient être accordées tacitement, faute de respect des délais, voire explicitement mais en manquant de temps pour mener un examen approfondi. Afin de réduire ce risque sans nuire aux objectifs de l’article, nous proposons de porter de trois à six mois le délai de retrait par l’autorité compétente des autorisations d’urbanisme illégales ayant bénéficié d’une non-opposition tacite ou explicite.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis favorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Même si le volume de demandes concernant des reconstructions à l’identique s’annonce important, le délai légal de trois mois apparaît suffisant pour permettre aux autorités compétentes de réagir face à d’éventuelles décisions d’urbanisme illégales. Je crois humblement que le délai de six mois risquerait d’aller à l’encontre de l’accélération voulue. Les constructeurs n’engagent pas les travaux et n’obtiennent pas les financements des projets tant que l’autorisation d’urbanisme peut être remise en cause. Votre amendement risquerait d’insécuriser les auteurs des demandes, notamment les particuliers souhaitant reconstruire leur logement. Avis défavorable.

M. Hervé de Lépinau (RN). Bien que je sois en désaccord avec la réponse qu’il y donne, l’amendement pose une bonne question : comment gérer le flux des demandes de permis de construire dans un délai raisonnable ? Je me demande s’il ne faudrait pas restaurer un pouvoir d’instruction, celui de la DDT, la direction départementale des territoires, pour venir en renfort des services qui instruiront les demandes.

M. Manuel Valls, ministre d’État. On me dit que votre proposition, monsieur Naillet, s’applique déjà, en réalité, dans treize communes sur les dix-sept.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE70 de Mme Marie Lebec

Mme Marie Lebec (EPR). L’amendement vise à supprimer la fin de l’alinéa 5, qui ne me semble pas relever du domaine de la loi.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Il est important que les communes aient une connaissance précise des demandes d’autorisation, même quand la décision ne relève pas de leurs compétences. Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Sagesse.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE69 de Mme Marie Lebec

Mme Marie Lebec (EPR). Nous proposons de fixer le délai limite de majoration du délai d’instruction d’une autorisation d’urbanisme à trente-cinq jours au lieu de quarante-cinq, lorsque celle-ci est subordonnée à la réalisation d’une participation du public par voie électronique (PPVE). Le délai minimal pour réaliser une PPVE en droit commun est de trente jours, mais il est fréquent qu’elles soient réalisées en 31 à 33 jours seulement.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Le délai de quarante-cinq jours est un délai maximal, qui n’empêche en rien les services d’instruire plus rapidement. Par ailleurs, le nombre de demandes risque d’entraîner un allongement de la période d’instruction. Demande de retrait, ou avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE166 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet (SOC). Compte tenu des difficultés d’accès à internet que rencontrent actuellement les habitants de Mayotte et certaines administrations, cet amendement vise à aménager transitoirement les procédures relevant de la PPVE, jusqu’au 1er juillet 2025 – date à laquelle le Gouvernement prévoit un retour à une couverture satisfaisante. Il est ainsi proposé de systématiser et de faciliter la mise à disposition des dossiers, ainsi que de leur associer un registre permettant le recueil manuscrit des observations du public, dès lors que ces dernières ne pourraient être transmises par voie électronique.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. L’amendement fait, à juste titre, le constat des difficultés de connexion à internet à Mayotte, qui était déjà un désert numérique avant Chido et qui dépend désormais de Starlink à certains endroits. Malheureusement, la procédure proposée sera lourde pour les communes. Sagesse.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Pour les mêmes raisons, avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE199 de Mme Dominique Voynet et sous-amendement CE248 de Mme Estelle Youssouffa

Mme Dominique Voynet (EcoS). Nous souhaitons que les autorités puissent passer des conventions avec leurs homologues d’autres collectivités territoriales, métropolitaines ou ultramarines, pour instruire les dossiers, afin de réduire la part de ceux qui seront acceptés sans réel examen.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Le sous-amendement vise à préciser que les services qui viendraient aider les services instructeurs de l’autorité compétente travaillent conjointement avec ces derniers mais ne s’y substituent pas.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Les services de l’État instruisent les autorisations d’urbanisme de treize communes mahoraises, à leur demande. L’État local apporte donc d’ores et déjà un soutien très direct, évidemment gratuit, aux communes qui le souhaitent. Je suis favorable à l’amendement, mais défavorable au sous-amendement, car il convient de laisser les collectivités locales agir entre elles comme elles le souhaitent.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Les services de l’État seront-ils renforcés pour faire face à la surcharge de travail ?

M. Manuel Valls, ministre d’État. L’ensemble des services de l’État seront renforcés à Mayotte pour atteindre les objectifs de la loi, et ce sera évidemment nécessaire pour ceux qui sont chargés de l’instruction. Il faudra aussi revoir le rapport de l’État avec ce territoire. Notre préfet fait un travail exceptionnel ; les suivants devront tous avoir une grande expérience.

M. Davy Rimane (GDR). En temps ordinaire, les services de l’État manquent, à bien des égards. J’espère que les renforts dont vous parlez, monsieur le ministre, viendront à Mayotte, sans quoi nous aurons de très grandes difficultés. La parole vaut l’homme.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

 

Amendements identiques CE40 de M. Aurélien Taché et CE208 de Mme Dominique Voynet

M. Aurélien Taché (LFI-NFP). La réduction des délais d’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme à quinze jours à compter de la réception du dossier est nécessaire au vu de l’urgence. Néanmoins, considérer que le silence de l’administration vaut acceptation paraît très compliqué, voire risqué.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Avis défavorable.

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). En pleine crise, ce principe selon lequel le silence vaut accord risque d’être la porte ouverte aux acceptations sans instruction. Ce n’est, à mon sens, qu’une manière de gérer une pénurie à laquelle il conviendrait plutôt de remédier, d’autant que les derniers événements nous ont montré qu’il fallait être particulièrement vigilant quant au respect des règles de prévention des risques.

M. Davy Rimane (GDR). La rédaction proposée n’oblige pas l’autorité à prendre clairement position sur le dossier. Il faut aller plus loin et imposer des garde-fous.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Les décisions favorables tacites sont courantes en droit de l’urbanisme. Supprimer cette possibilité, y compris pour des demandes de faible importance, risquerait de nuire à la reconstruction de Mayotte – surtout aux projets des particuliers.

La commission rejette les amendements.

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE260 de Mme Estelle Youssouffa, rapporteure.

 

Amendements CE261 de Mme Estelle Youssouffa et CE37 de Mme Nadège Abomangoli (discussion commune)

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure. Par cohérence avec l’alinéa 11, qui prévoit que les avis, accords ou autorisations doivent être adressés dans un délai de quinze jours à l’autorité compétente, l’amendement précise que l’organisme collégial compétent doit se réunir dans ce même délai et supprime ainsi la référence aux « plus brefs délais », particulièrement vague.

Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Nous proposons un délai d’un mois à compter de la réception du dossier.

M. Manuel Valls, ministre d’État. Avis défavorable sur l’amendement CE37 ; favorable sur celui de la rapporteure.

La commission adopte l’amendement CE261.

En conséquence, l’amendement CE37 tombe.

 

La commission adopte l’article 7 modifié.

 

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’examen du texte est suspendu et se poursuivra demain soir, à vingt et une heures, pour permettre à notre rapporteure et aux députés ultramarins, en plein décalage horaire, de reprendre des forces.

 

 


 

Membres présents ou excusés

 

Commission des affaires économiques

 

Réunion du lundi 13 janvier 2025 à 21 heures

 

Présents. - M. Henri Alfandari, M. Maxime Amblard, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Benoît Biteau, M. Arnaud Bonnet, M. Julien Dive, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Inaki Echaniz, M. Frédéric Falcon, M. Julien Gabarron, M. Antoine Golliot, M. Philippe Gosselin, Mme Géraldine Grangier, M. Frantz Gumbs, Mme Mathilde Hignet, Mme Julie Laernoes, Mme Annaïg Le Meur, Mme Nicole Le Peih, Mme Marie Lebec, M. Robert Le Bourgeois, M. Pascal Lecamp, M. Hervé de Lépinau, M. Laurent Lhardit, M. Alexandre Loubet, M. Bastien Marchive, M. Patrice Martin, M. Max Mathiasin, M. Nicolas Meizonnet, Mme Manon Meunier, Mme Louise Morel, M. Philippe Naillet, Mme Sandrine Nosbé, Mme Maud Petit, M. René Pilato, M. Dominique Potier, M. Davy Rimane, Mme Valérie Rossi, M. Aurélien Taché, M. Matthias Tavel, Mme Mélanie Thomin, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, M. Stéphane Vojetta, Mme Dominique Voynet, M. Frédéric Weber, Mme Estelle Youssouffa

 

Assistaient également à la réunion. - Mme Anchya Bamana, M. Christophe Bentz, M. Pierre Meurin