Compte rendu
Commission
des affaires étrangères
– Examen, ouvert à la presse, du rapport d’information « flash » sur les problématiques rencontrées par les Français vivant en zone transfrontalière dans l’Hexagone (Mme Brigitte Klinkert, rapporteure). 2
Mercredi
5 mars 2025
Séance de 9 heures 30
Compte rendu n° 40
session ordinaire 2024-2025
Présidence
de M. Bruno Fuchs,
Président
— 1 —
La commission procède à l’examen, ouvert à la presse, du rapport d’information « flash » sur les problématiques rencontrées par les Français vivant en zone transfrontalière dans l’Hexagone.
La séance est ouverte à 9 h 35.
Présidence de M. Bruno Fuchs, président.
M. le président Bruno Fuchs. Chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner un rapport d’information important et attendu, consacré aux problématiques rencontrées par nos compatriotes vivant en zone transfrontalière.
Ce travail, issu de la mission flash créée le 4 décembre dernier et porté par Mme Brigitte Klinkert, met en lumière les défis spécifiques auxquels sont confrontés ces Français qui, chaque jour, tissent des liens économiques, sociaux et culturels avec nos voisins européens. Les zones transfrontalières sont des espaces de dynamisme, d’échanges, mais aussi de complexités administratives, fiscales et sociales. Chaque jour, des centaines de milliers de travailleurs frontaliers passent la frontière pour aller travailler, en Suisse, en Allemagne, en Belgique, au Luxembourg, en Espagne ou en Italie. Ces mobilités sont une richesse pour notre pays, mais elles s’accompagnent de nombreuses difficultés : accès aux soins, emploi, transport et aménagement du territoire.
Ce rapport s’inscrit pleinement dans les préoccupations de notre commission, qui veille à la bonne articulation entre les engagements internationaux de la France et la réalité vécue par nos compatriotes au quotidien.
Je pense par exemple à l’avenant à la convention entre la France et le Luxembourg que notre commission a eu l’occasion d’examiner en fin d’année dernière, au rapport de notre collègue Pascale Got, sur la question de l’imposition des journées de télétravail des travailleurs transfrontaliers et qui était d’une grande importance pratique pour les personnes concernées. Je pense également à l’accord entre la France et l’Allemagne relatif à l’apprentissage transfrontalier que nous avons examiné tout récemment, déjà au rapport de Mme Klinkert, qui pourrait d’ailleurs servir de modèle à la conclusion de prochains accords bilatéraux sur ce même sujet avec le Luxembourg, la Belgique, la Suisse ou encore l’Italie. Je pense évidemment enfin aux traités cadres récents (traités d’Aix-la-Chapelle en 2019 en Allemagne, du Quirinal en 2021 avec l’Italie, et de Barcelone en 2023 en Espagne), qui ont mis en place des mécanismes institutionnels de dialogue pour améliorer la gouvernance des zones frontalières.
Ce rapport, fruit d’un travail approfondi et d’auditions nombreuses, vise à dresser un état des lieux précis de ces enjeux et à formuler de nombreuses propositions concrètes pour améliorer la situation de nos concitoyens. Je tiens à remercier madame la rapporteure pour la qualité et la rigueur de son travail. Nous allons maintenant lui donner la parole afin qu’elle nous présente les principales conclusions de son rapport, avant d’ouvrir la discussion.
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Notre commission m’a confié le 4 décembre dernier le soin de mener une mission flash sur les problématiques rencontrées par les Français vivant en zone transfrontalière. Ce sujet me tient particulièrement à cœur en tant qu’Alsacienne, mais aussi en tant que députée, puisque 25 millions de Français vivent en zone frontalière. Après trois mois de travail, j’ai l’honneur de vous présenter le compte rendu de cette mission, mes conclusions et surtout cinquante-cinq propositions.
Ces propositions sont le fruit d’auditions menées avec plus de soixante personnes, préfets, diplomates français et étrangers, élus locaux, représentants d’administrations centrales et déconcentrées, d’associations et du monde économique qui, tous, se sont montrés disponibles et réactifs, ce qui prouve l’importance de ce sujet autant que sa faible reconnaissance. À cet égard, je rappelle que, hormis le rapport sur l’approfondissement de la coopération transfrontalière franco-allemande rédigé par M. Sylvain Waserman en 2018, le dernier rapport parlementaire comparable remonte à 2010.
Pour respecter les délais propres aux missions flash, j’ai défini strictement le périmètre des travaux. Je me suis limitée aux frontières terrestres de l’Hexagone, qui présentent des problématiques spécifiques liées à l’intensité des flux qui les traversent, et me suis efforcée de les couvrir toutes afin de mettre en évidence leurs spécificités et leurs points communs. J’ai décidé de traiter des questions qui concernent le quotidien des transfrontaliers, mais aussi des personnes qui vivent et qui travaillent en France, aux frontières. J’ai volontairement laissé de côté la question de la fiscalité, car elle fait déjà l’objet d’une attention suivie de la part du gouvernement. Enfin, conformément à la mission de contrôle du gouvernement par le Parlement, je me suis concentrée sur les solutions de nature réglementaire ou bilatérale susceptibles d’être mises en œuvre à court ou à moyen terme, ce qui n’exclut pas une initiative parlementaire si nécessaire.
Le rapport comprend deux parties, une première portant sur les difficultés et les solutions concrètes, et une seconde sur la question de la gouvernance des zones transfrontalières, indissociable de la mise en œuvre des solutions proposées.
Au cours des auditions, la question des transports a été la plus citée parmi les irritants. L’attractivité et la densification des zones frontalières ont progressivement conduit à une saturation des axes routiers. Le développement des transports en commun peine à y remédier, en particulier dans certaines régions rurales.
De nombreux projets de liaisons ferroviaires transfrontalières représentent une source d’espoir dans la mesure où celles qui sont déjà en service donnent satisfaction. Toutefois, ces projets réclament de longs délais de réalisation, notamment en raison d’un manque de souplesse dans nos réglementations. La loi du 27 décembre 2023 sur les services express régionaux métropolitains doit nous aider à développer des projets de mobilité du quotidien en prenant en compte les spécificités des zones frontalières. À cet égard, il est impératif d’harmoniser nos normes applicables au matériel et au personnel roulant avec celles de nos voisins. Dans la zone frontalière franco-allemande, par exemple, un niveau B2 dans les langues des deux pays est exigé pour conduire un bus ou un train transfrontalier. Il s’agit d’un blocage inutile, même si un effort de formation adaptée est nécessaire, et j’y reviendrai.
Par ailleurs, il est nécessaire d’ouvrir en urgence une discussion avec la SNCF sur la commercialisation des lignes transfrontalières, puisque deux compagnies, l’une française, l’autre allemande, proposent le même trajet à des tarifs différents. En outre, la SNCF ne propose pas toujours les trajets transfrontaliers sur son application, bien qu’ils existent, et privilégie des correspondances longues et coûteuses. De même, des tronçons transfrontaliers sur des lignes internationales, comme Paris-Milan, ne sont pas mis à la vente. Cela mérite d’être corrigé en faveur du train et de la mobilité décarbonée en Europe.
Corollaire de la saturation des transports, l’accès au logement est devenu un défi croissant, en particulier aux abords des frontières suisse et luxembourgeoise. Les écarts de revenus ont fait exploser le coût du logement, ce qui pénalise principalement les frontaliers qui travaillent en France, notamment les fonctionnaires, et cette situation pèse sur les services publics et les employeurs français.
Je propose des adaptations du droit de l’urbanisme et de l’environnement, comme cela existe déjà en zones littorales et montagneuses. Il est en effet indispensable de permettre la création de logements sociaux par des dérogations à l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN), de réserver certains logements à des fonctionnaires ou à des soignants, de revaloriser les indemnités de résidence dans les départements concernés et de négocier un mécanisme de participation des employeurs étrangers sur le modèle du 1 % logement.
Ces difficultés de logement se répercutent sur les services publics, qui peinent à recruter. Dès lors, je propose que les schémas de cohérence territoriale (Scot) prennent une dimension transfrontalière et associent l’ensemble du bassin de vie, y compris de l’autre côté de la frontière, pour réaliser des choix cohérents et faire remonter des demandes coordonnées aux échelons de décision supérieurs.
La difficulté à attirer des soignants dans les régions transfrontalières et à faire face à la concurrence des salaires suisses et luxembourgeois, crée des situations de désertification médicale. La mise en commun de l’offre médicale de part et d’autre de la frontière constitue par conséquent une mesure nécessaire par le biais des corridors sanitaires. Chacun, qu’il se trouve d’un côté ou de l’autre de la frontière, doit pouvoir être soigné dans les mêmes conditions, notamment financières. Cela existe déjà dans certaines zones géographiques et sur des catégories de soins spécifiques, par exemple entre la Sarre et la Moselle pour les soins d’urgence.
Les agences régionales de santé (ARS) et l’assurance maladie se montrent assez frileuses quant au développement de ces partenariats, principalement pour des questions financières. Pourtant, l’exemple de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne, à la frontière franco-espagnole, montre que des établissements communs sont possibles et favorisent l’accès aux soins dans des régions parfois enclavées. Je recommande par conséquent d’avancer rapidement sur des accords bilatéraux et des conventions entre établissements. Nous pouvons également agir unilatéralement pour alléger certaines procédures imposées par l’assurance maladie aux patients français. Par exemple, une autorisation préalable de la caisse primaire d’assurance maladie est aujourd’hui indispensable pour bénéficier d’un examen d’imagerie médicale de l’autre côté de la frontière, alors que les délais sont très importants en France. Cette situation est un non-sens.
La question de la protection sociale des travailleurs transfrontaliers est source de difficultés administratives. Parmi une multitude d’exemples, le rapport cite l’exigence de certificats médicaux dans les deux pays pour faire reconnaître une situation d’invalidité, ce qui correspond à une démarche lourde et lente, à laquelle s’ajoute la barrière linguistique. Les employeurs sont également confrontés à des difficultés administratives pour exercer leur activité des deux côtés de la frontière. Ils sont contraints de recourir au travail détaché, qui implique des procédures déclaratives complexes et répétitives pour des employeurs qui envoient quotidiennement des travailleurs de l’autre côté de la frontière. En dépit de simplifications, le décret prévu par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, supposé alléger les formalités, n’a jamais été appliqué, faute d’accord avec l’Allemagne. Une réflexion devrait être engagée pour concevoir un statut d’entreprise frontalière, à l’image du statut des frontaliers personnes physiques, qui permette d’exercer librement des deux côtés de la frontière.
La formation professionnelle est un autre enjeu majeur pour l’accès à l’emploi transfrontalier. La reconnaissance mutuelle des diplômes, des qualifications et des formations rencontre pourtant de nombreux freins qui empêchent certains frontaliers de retrouver un emploi lorsqu’une activité se déplace de l’autre côté de la frontière. De même, certaines activités périscolaires se heurtent à des obstacles inutiles. Ainsi, une classe française ne peut se rendre dans une piscine belge située à quelques kilomètres, parce que le diplôme de maître-nageur n’est pas équivalent. C’est la raison pour laquelle je suggère dans le rapport de mettre en place une procédure simplifiée de reconnaissance des diplômes en zone transfrontalière et de développer une offre de formation commune.
La coopération en matière de sécurité existe depuis très longtemps, encouragée par l’ouverture des frontières prévue par l’accord de Schengen. Nous avons avec chacun de nos voisins des centres de coopération policière et douanière, ainsi que des brigades communes. Ces dispositifs fonctionnent très bien mais demeurent perfectibles, par exemple en matière de droit de poursuite.
Le droit européen prend désormais bien en compte les spécificités des zones frontalières affectées par le rétablissement des contrôles à certaines frontières. La révision du code Schengen, entrée en vigueur en janvier 2025, prévoit désormais une obligation pour les États membres de veiller à ce que ces contrôles n’aient pas d’effet excessif sur l’activité transfrontalière. J’y serai attentive.
En matière de sécurité civile, la coopération est plus récente, mais tout aussi indispensable en raison notamment de l’augmentation des événements climatiques graves. Elle exige une harmonisation rapide des doctrines d’intervention, des choix de matériel et des systèmes de communication.
Je conclurai cette revue des difficultés en soulignant l’importance d’une meilleure prise en compte des spécificités des bassins de vie transfrontaliers du point de vue de l’éducation et de la culture, en favorisant davantage l’apprentissage de la langue du voisin. L’éducation nationale doit prendre sa part dans l’adaptation des politiques publiques à ce contexte transfrontalier.
J’en viens à présent à la gouvernance des questions transfrontalières. Le constat partagé, toutes frontières confondues, est celui d’un double frein à la mise en œuvre des solutions existantes. D’une part, il semble que l’État central fasse preuve d’un manque de volonté et d’intérêt pour ces questions, en raison probablement de l’éloignement et de la méconnaissance de ces problématiques de la part des administrations centrales. D’autre part, des divergences d’organisations territoriales apparaissent d’un pays à l’autre, qui rendent très difficile le dialogue entre interlocuteurs du même niveau. En effet, nos voisins disposent souvent d’une organisation plus décentralisée, si bien que les accords passés au niveau national demeurent difficiles à concrétiser sur le terrain.
Pour rendre ce dialogue plus fructueux, il me semble indispensable d’associer toutes les parties prenantes, à savoir les collectivités, les administrations déconcentrées et les associations de frontaliers. En outre, il apparaît nécessaire de désigner un ministre ou un secrétaire d’État dédié à ces questions, un interlocuteur identifiable pour les pays voisins en charge de mettre en place un suivi politique et une coordination des administrations.
Au niveau local, les préfectures et les associations regrettent un manque d’accompagnement de l’État, notamment pour conclure des accords et des conventions juridiquement complexes. Je recommande par conséquent de créer un pool d’experts juridiques à disposition des préfectures et des collectivités frontalières. Cette tâche pourrait être confiée à la mission opérationnelle transfrontalière (MOT), une organisation créée par l’État en 1997 qui rassemble l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, la direction générale des collectivités locales, la Banque des territoires, ainsi que de nombreux élus locaux et associations citoyennes.
Les associations d’aide aux frontaliers, dont je tiens à saluer le travail extraordinaire, se substituent trop souvent au service de l’État. Ainsi, le réseau Infobest a traité 21 000 demandes en 2023. La coordination entre les associations et les administrations déconcentrées doit se faire en meilleure intelligence. À cet égard, je recommande la mise à disposition d’interlocuteurs dédiés, maîtrisant la langue du pays frontalier. Je soutiens l’idée de créer des maisons France services destinées aux transfrontaliers confrontés à des questions juridiques spécifiques. Cet accompagnement et cette information du public pourraient également passer par la traduction systématique des formulaires juridiques dans la zone frontalière et par la généralisation de l’expérimentation des points d’accès aux droits transfrontaliers.
Enfin, j’ai évoqué le fait que la France supportait souvent le coût des services publics en zone frontalière. Il convient par conséquent de faire participer les pays d’emploi au financement des services publics français. J’ai évoqué précédemment la mise en place d’un « 1 % logement » à la charge des employeurs étrangers de travailleurs transfrontaliers mais il y a d’autres possibilités : le cofinancement d’infrastructures ou de formations professionnelles par le pays voisin, ou encore la mobilisation de financements européens. À cette fin, l’État doit accompagner et soutenir plus efficacement les collectivités dans les appels à projets.
Le rapport de la mission sur les problématiques rencontrées par les Français vivant en zone transfrontalière dans l’Hexagone, dont la vocation est avant tout d’apporter des solutions opérationnelles, formule en tout cinquante-cinq recommandations. J’aurais à cœur que ces recommandations soient suivies par le gouvernement dans les meilleurs délais.
M. le président Bruno Fuchs. Je vous remercie, madame la rapporteure, pour ce rapport extrêmement dense, précis, complet et concret. Notre commission s’est engagée à porter certaines de vos préconisations, notamment celles relatives au décret de 2018, qui n’a jamais été publié. Au-delà des propositions, il reste à effectuer un travail d’influence pour favoriser l’application des différentes mesures, et la commission se tiendra à vos côtés dans cette tâche.
Nous en venons à présent aux questions des orateurs des groupes politiques.
M. Kévin Pfeffer (RN). Le Rassemblement national, loin des caricatures et de la fuite en avant vers un fédéralisme européen, a toujours plaidé pour un renforcement de la coopération à nos frontières avec nos voisins directs.
Madame la rapporteure, vous semblez déplorer dans votre rapport la gestion de l’immigration et des contrôles aux frontières. Pourtant, le dogme de la libre circulation se heurte trop souvent aux problèmes sécuritaires et aux attentes fortes de nos concitoyens. Nous plaidons quant à nous pour une réforme profonde de l’accord de Schengen, et sommes favorables à une libre circulation réservée aux citoyens européens ainsi qu’à une double frontière renforcée aux frontières extérieures de l’Union européenne, avec des contrôles ciblés aux frontières intérieures. L’Allemagne applique ce principe et obtient des résultats, notamment dans la lutte contre l’immigration illégale et les trafics. Nos policiers, comme les policiers allemands, savent quand, qui, où et quoi contrôler. Ainsi, les travailleurs transfrontaliers et les habitants des zones transfrontalières sont épargnés par ces contrôles. Je dirais même que les frontaliers ont pour devoir d’accepter ces contrôles afin de protéger tout le reste du territoire.
La coopération en matière de santé mérite d’être renforcée pour faciliter la vie des frontaliers. La question d’un corridor sanitaire est évoquée depuis plusieurs années, mais peine à se concrétiser entre la Moselle et la Sarre notamment. Si des coopérations ciblées existent, à l’image de celle en vigueur sur la cardiologie, comment lever les autorisations préalables aux soins et accélérer les remboursements ? Comment avancer concrètement sur ces sujets qui permettraient, en outre, de pallier au moins temporairement la grande pénurie de soignants en France ?
Enfin, des problèmes de fiscalité persistent, après des décennies de combat pour l’abolition des doubles impositions. Je pense en particulier aux salariés intérimaires frontaliers, à l’absence de reconnaissance de l’invalidité française ou au prélèvement abusif de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) sur les retraites allemandes.
En résumé, l’Union européenne, comme souvent, agit, s’ingère, s’approprie indûment des compétences, mais peine à répondre aux soucis du quotidien. Les instances locales, dont seul le millefeuille français a le secret, ne sont-elles pas trop nombreuses ? Même si elles sont porteuses d’un symbole de coopération sympathique, elles sont parfois coûteuses et n’apportent que très peu d’avancées. Nous approuvons la plupart de vos propositions, madame la rapporteure, mais ne pensez-vous pas que la France gagnerait à prendre en main directement les discussions bilatérales ?
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Permettez-moi, monsieur Pfeffer, de rectifier votre propos sur les frontières. Comme vous le savez, la France, depuis 2015, a réintroduit des contrôles aux frontières dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et le nouveau code Schengen permet ces contrôles. Toutefois, il convient de garantir aux citoyens le droit de circuler librement. Nos aïeux se sont battus pour que les frontières puissent s’ouvrir, pour la réconciliation avec nos voisins, notamment les Allemands, et je ne voudrais pas revivre ce que nous avons vécu en 2020 lorsque nos frontières se sont fermées. Je suis pour la libre circulation des personnes.
Un chapitre entier de mon rapport est consacré à la santé. J’attire votre attention sur la recommandation n° 17, qui consiste à engager dans chaque zone transfrontalière, et avec l’appui des ARS, des discussions pour mettre en place des corridors sanitaires à travers des conventions entre établissements, filière par filière.
Enfin, concernant la fiscalité, j’aimerais simplement rappeler que nous avons la chance de disposer de financements européens, dont la France et les territoires transfrontaliers bénéficient grandement.
Mme Constance Le Grip (EPR). Ce rapport dresse un état des lieux très précis, très exhaustif et sans concession des réalités de nos compatriotes en zone frontalière : infrastructures de transport inadaptées, marché du logement sous tension, difficulté croissante d’accès aux soins, rigidité administrative qui pèse sur les travailleurs et les entreprises, autant de freins à l’épanouissement de ces territoires stratégiques.
Nous partageons les convictions exprimées dans ce rapport. Les territoires transfrontaliers sont des pôles d’attractivité et de coopération européenne, mais ils font face à des défis structurels complexes, et pâtissent en outre du manque de coordination de certaines politiques publiques. Vos préconisations précises, madame la rapporteure, exigeantes pour certaines, nous paraissent appropriées et nous espérons que le gouvernement voudra bien les mettre en œuvre.
Il importe en effet de développer les infrastructures de transport frontalier en garantissant une meilleure interconnexion entre les réseaux, d’encadrer le marché du logement dans les zones frontalières sous tension, de prévoir des logements spécifiques, d’adapter les dispositifs de régulation existants, de faciliter l’accès aux soins, de simplifier les démarches fiscales et administratives pour les entreprises et les travailleurs transfrontaliers, ou encore d’instaurer une gouvernance transfrontalière plus efficace, en allouant aux collectivités locales des moyens d’agir.
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Vous avez parfaitement résumé les enjeux du rapport. J’ajouterais que l’élément qui m’a le plus marquée au cours de la soixantaine d’auditions que j’ai conduites, est ce sentiment éprouvé par les frontaliers que leurs problématiques ne sont pas suffisamment prises en compte. Ils ignorent à qui s’adresser au niveau de l’État lorsqu’ils ont une question à poser ou une proposition à avancer. C’est la raison pour laquelle j’ai formulé des préconisations très fortes en matière de gouvernance.
Comme vous, madame Le Grip, j’espère que le gouvernement considérera ces préconisations, et je sais que le ministre délégué aux affaires européennes, M. Benjamin Haddad, s’y intéresse de près et souhaite me rencontrer très vite.
M. Stéphane Hablot (SOC). Député de Meurthe-et-Moselle, je connais bien ces régions où les habitants se rendent quotidiennement en Allemagne, en Belgique ou au Luxembourg pour travailler. Dans le Pays Haut, par exemple, 120 000 Français traversent la frontière pour accéder à un emploi, à un meilleur salaire. Mais la relation entre les pays frontaliers doit prendre la forme d’un schéma gagnant-gagnant.
Le rapport recense certaines inepties dans l’organisation des transports, qui pénalisent les travailleurs transfrontaliers. Je pense par exemple à l’infernale autoroute menant à Luxembourg, constamment saturée et pour laquelle aucune alternative n’est proposée. Pourtant, des solutions existent. En Allemagne, un tramway permet de franchir la frontière ; au Luxembourg, des transports en commun sont gratuits.
De même, des fonctionnaires exerçant dans des écoles ou des hôpitaux ne trouvent pas de logement et, pour certains, sont contraints d’effectuer jusqu’à 200 kilomètres chaque jour pour se rendre à leur travail. Le rapport relève également des absurdités relatives à l’objectif ZAN et il importe de légiférer afin d’élaborer une véritable stratégie foncière et alléger les procédures administratives. Les transports, les logements, sont autant de secteurs pour lesquels des améliorations sont nécessaires afin de gagner en attractivité.
Mon collègue du Rassemblement national évoquait, dans son intervention, la sécurité et les flux de populations entre pays. Vous avez énuméré, monsieur Pfeffer, différentes problématiques, mais vous avez omis de faire référence aux travailleurs français qui représentent la moitié des salariés du Luxembourg. Cette population est une main-d’œuvre immigrée pour le Luxembourg. Elle y paye des impôts sans bénéficier des services du pays qu’elle enrichit. Aussi, je crois qu’il importe de reverser la part fiscale à la France pour financer nos infrastructures.
M. le président Bruno Fuchs. Les exemples cités par M. Hablot mettent en lumière notre difficulté voire notre incapacité à mettre en œuvre certaines solutions. Au-delà du sujet des zones frontalières, le rapport de Mme Klinkert où figurent des propositions qui, pour certaines, existent depuis longtemps, illustre bien cette problématique dont l’État devrait s’emparer.
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Comme je le rappelais dans mon propos liminaire, le dernier rapport sur les problématiques transfrontalières de l’ensemble de l’Hexagone remonte à 2010. L’attente est donc très forte sur ce sujet, et en témoigne le nombre élevé de contributions écrites que j’ai reçues après les auditions, dans de brefs délais trahissant une certaine impatience. Chaque jour, 500 000 travailleurs traversent les frontières de l’Hexagone pour travailler : ce chiffre suffit à dire l’ampleur du sujet. Autre exemple révélateur des enjeux liés à la mobilité et au logement, il m’a été rapporté que certains fonctionnaires en viennent à refuser le poste auquel leur réussite au concours leur ouvre l’accès parce que, affectés en zone frontalière, ils ne parviennent pas à se loger.
Enfin, je partage le point de vue de M. Hablot sur le financement. Je considère que nous devons demander aux pays voisins où travaillent de nombreux Français, une contribution au financement des infrastructures des zones frontalières. À titre d’exemple, la convention franco-suisse de 1973 prévoit une compensation financière par le canton de Genève au profit des départements de l’Ain et de la Haute-Savoie aux fins de dédommager ces derniers des infrastructures et services publics qu’ils mettent à disposition de leurs habitants travaillant à Genève. Cette compensation est égale à 3,5 % des rémunérations brutes perçues chaque année par les salariés concernés, et représente 387 millions d’euros.
M. Stéphane Hablot (SOC). L’exemple des travailleurs français en Allemagne, dont une part des impôts prélevés en France est reversée à l’Allemagne, mérite d’être lui aussi interrogé.
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Je suis d’accord. Je précise toutefois que, tenant compte des impératifs d’une mission flash, j’ai écarté les questions relatives à la fiscalité et au télétravail. Ces sujets sont examinés par les services de l’État et requièrent un temps d’étude que ne permettait pas une mission flash de deux mois et demi.
M. Pierre Cordier (DR). Vous dites, madame la rapporteure, avoir rencontré une soixantaine d’interlocuteurs venus de différents horizons, mais je regrette que vous n’ayez pas auditionné les parlementaires frontaliers. Nous, députés de ces zones, recueillons dans nos permanences les doléances de nos concitoyens relatives à des problématiques très concrètes et quotidiennes. Ma circonscription s’étend sur la pointe des Ardennes, un territoire que l’on pourrait dire amicalement encerclé par la Belgique, et je sais les difficultés que rencontrent ses habitants sur les sujets que nous évoquons aujourd’hui. Notre collègue Jean-Luc Warsmann avait d’ailleurs créé une antenne du conseil régional à Charleville-Mézières, permettant à chacun de se renseigner sur toutes ces difficultés.
Je souscris à la notion de bassin de vie que le rapport met en avant, comme je suis sensible à la question du désenclavement. Des Ardennais, qui souvent trouvent qu’ailleurs l’herbe est plus verte, scolarisent leurs enfants en Belgique et s’y font soigner. Pourtant, nous disposons en France d’hôpitaux et d’écoles dont les services ne sont pas moins qu’ailleurs de qualité.
Enfin, j’attire votre attention sur une particularité de notre territoire, liée à la présence de la centrale nucléaire de Chooz, dans le Nord des Ardennes. Cette centrale nucléaire, toute proche de la Belgique, pose question en matière de sécurité car les réflexes et les procédures en cas d’incident nucléaire ne sont pas les mêmes de chaque côté de la frontière.
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Je n’ai, en effet, pas auditionné de parlementaires, mais j’ai reçu des contributions de la part de collègues députés qui avaient connaissance de cette mission publique. Par ailleurs, j’ai souhaité donner la priorité, lors des auditions, à des personnalités locales qui n’avaient jamais été entendues jusqu’à présent, et n’avaient jamais eu l’occasion de faire remonter leurs problèmes.
Chaque bassin de vie, en territoire transfrontalier, a ses spécificités. Sur la question des irritants, je voudrais signaler la récente adoption, d’un règlement européen relatif à la création d’un mécanisme visant à lever les obstacles juridiques et administratifs dans un contexte transfrontalier. Ce dispositif, nommé Bridge for EU, devrait entrer en vigueur en 2025 et permettre de signaler les obstacles transfrontaliers auprès des autorités compétentes, d’assurer un suivi et d’informer le demandeur sur l’évolution de sa demande. Je pense que Bridge for EU nous aidera à avancer sur les problématiques transfrontalières.
M. Jean-Louis Roumégas (EcoS). Les zones transfrontalières sont de véritables bassins de vie, le cœur battant d’échanges économiques, sociaux et culturels parfois intenses. Le dynamisme économique et démographique induit par l’effet frontières est à saluer et à encourager. Cependant, les Français vivant dans ces zones sont confrontés à des difficultés engendrées par cette même proximité avec la frontière : disparités salariales, manque de coordination administrative, spéculation immobilière, saturation des infrastructures de transport, pénurie des services publics.
Les recommandations que vous formulez, madame la rapporteure, nous semblent tout à fait pertinentes. Je citerais à titre d’exemple les préconisations relatives à la coordination et la simplification des procédures de part et d’autre de la frontière, indispensables pour faciliter la vie des 500 000 travailleurs transfrontaliers. De même, il nous paraît nécessaire de développer des lignes ferroviaires, l’apprentissage des langues, la reconnaissance des diplômes ou l’accès aux soins dans les pays voisins.
Toutefois, j’aimerais décaler l’angle de vue, et porter le débat sur l’état de nos services publics. Votre rapport le montre bien : les hôpitaux et les écoles peinent à recruter. Pourquoi ? Parce que les conditions de travail sont meilleures de l’autre côté de la frontière ? Si tel est le cas, ce n’est pas tant en raison des performances des systèmes voisins, mais plutôt de l’effondrement de nos services publics.
Au-delà des recommandations du rapport, il importe avant tout de revaloriser les métiers et les conditions de travail en France pour mettre fin à ce que l’on peut qualifier d’exode dans les zones transfrontalières. Un plan d’investissement dans les services publics et une politique ambitieuse en matière de logement sont indispensables. Il est inacceptable, par exemple, que des agents publics, soignants ou enseignants, peinent à se loger. C’est la raison pour laquelle nous appelons à des changements structurels, par-delà l’amélioration des conditions de vie et de travail des citoyens transfrontaliers.
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. La lucidité nous commande de constater qu’il existe des écarts de revenus très importants de part et d’autre de la frontière. Dès lors, il paraît bien compréhensible que certains de nos concitoyens vivant à côté de l’Allemagne, du Luxembourg ou de la Suisse, franchissent la frontière. Parfois ils en reviennent, parce qu’ils sont là-bas des travailleurs immigrés et donc ne sont pas toujours très bien considérés.
Vous avez évoqué, monsieur Roumégas, un effondrement de nos services publics. Mais sachez qu’en Allemagne, juste de l’autre côté de la frontière, des lits ferment dans les hôpitaux, quand ce ne sont pas les hôpitaux eux-mêmes qui ferment. Dans ma région, nos voisins allemands sont demandeurs d’un hôpital transfrontalier, d’un centre de formation de soignants, voire d’une faculté de médecine transfrontalière. Et pourtant, beaucoup de nos soignants partent travailler en Allemagne.
Il ressort de mon rapport l’importance de raisonner au-delà des frontières en matière de programmation, en matière de Scot, en matière de schémas, en un mot de travailler ensemble, davantage et mieux. Je plaide également que les hauts fonctionnaires affectés dans nos régions connaissent un minimum la langue du voisin, parce que cela facilite les contacts et les négociations.
M. Michel Guiniot (RN). Madame la rapporteure, vous proposez dans votre rapport de mettre en place une reconnaissance mutuelle des vignettes écologiques pour les voitures circulant dans les zones de faible émission (ZFE). Vous estimez en effet injuste que les étrangers circulant dans les centres-villes français soient pénalisés, et y voyez même un obstacle inutile aux déplacements des frontaliers, ajoutant que la non-verbalisation des automobilistes pénalise l’économie française. Cependant, il me semble que vous n’allez au fond du sujet : ce sont ces vignettes écologiques elles-mêmes qui constituent un obstacle inutile et punitif, non seulement pour les étrangers, mais pour tous les automobilistes.
Par ailleurs, vous recommandez de ne pas intégrer les actes de naissance d’enfants étrangers nés en zone transfrontalière. S’agit-il d’une remise en cause du droit du sol ? Vous indiquez que le problème était identifié et en cours de résolution. De quelle manière ?
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Vous plaidez, monsieur Guiniot, contre les vignettes écologiques. Sur ce point, nous sommes en désaccord. Selon moi, le problème se rapporte à l’équivalence des vignettes et à un manque de coordination européenne. Je suis pour ma part favorable à une vignette unique.
Aujourd’hui, un enfant qui naît à l’hôpital transfrontalier de Cerdagne est inscrit au service central d’état civil du ministère des affaires étrangères à Nantes. Or il me semble légitime que ses parents souhaitent inscrire leur enfant à l’état civil de leur commune de résidence. Permettre cette démarche est affaire de bon sens, et cela ne remet aucunement en question le droit du sol.
M. le président Bruno Fuchs. Je cède la parole aux collègues pour leurs interventions et questions formulées à titre individuel.
Mme Christine Engrand (NI). Nos frontières ne sauraient être des barrières en matière de formation professionnelle. Pourtant, elles ressemblent à des murs invisibles, faits de diplômes non reconnus, de formations inadaptées et d’un manque cruel d’information sur les opportunités qui s’ouvrent aux diplômés. Alors que certains secteurs, de l’industrie au bâtiment en passant par la santé, cherchent désespérément de la main-d’œuvre, nous laissons nos talents à quai, empêtrés dans des tracasseries administratives. Nos zones frontalières ne doivent plus être des territoires d’attente, mais des terres d’opportunité. À cet égard, il est urgent de bâtir une politique ambitieuse qui fasse de ces régions des modèles de coopération, dans lesquels chaque jeune Français pourra accéder à des formations reconnues et des emplois qualifiés.
Comment accéder à la mise en place de formations professionnelles transfrontalières adaptées aux réalités du marché du travail ? Quels leviers concrets sont susceptibles d’être activés pour inciter les entreprises à s’engager davantage dans la formation transfrontalière ? Comment garantir que les zones transfrontalières ne soient pas oubliées dans les futures réformes de la formation et de l’apprentissage ?
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Nous devons, à mon sens, multiplier les forums de formation et d’emploi binationaux sur l’ensemble de nos frontières. Le sujet de la formation réclame une attention particulière, et je rencontrerai prochainement le directeur de cabinet de la ministre de l’éducation nationale pour évoquer justement l’équivalence, ou à tout le moins la reconnaissance mutuelle des diplômes. Concernant la frontière franco-allemande, le traité sur la coopération et l’intégration franco-allemande d’Aix-la-Chapelle prévoit des dispositions dérogatoires. Pourquoi ne pas y recourir ?
M. Alain David (SOC). Le rapport met en lumière la situation des soignants formés gratuitement en France qui exercent de l’autre côté de la frontière, alors que notre pays voit s’étendre des déserts médicaux. Pourriez-vous développer, madame la rapporteure, le dispositif contractuel incitatif, voire contraignant, que vous avez imaginé pour les inciter à exercer plutôt en France ?
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Hormis la Suisse et le Luxembourg, la pénurie de soignants touche de nombreux pays européens, dont l’Allemagne. C’est la raison pour laquelle les Allemands souhaitent mettre en place des centres de formation de soignants en zone transfrontalière. Il s’agit à mes yeux d’une piste intéressante, pour nos deux pays, parce que de tels centres permettraient de former davantage de soignants, mais aussi de mieux connaître la culture du pays voisin. Concernant les corridors sanitaires transfrontaliers, j’ai déjà évoqué le blocage au niveau des ARS, où l’on estime que de tels dispositifs pèchent par complexité. Surtout, je propose dans mon rapport d’instituer une obligation de service en France d’une, deux ou trois années pour les soignants formés dans notre pays, à l’image des dispositions en vigueur pour les hauts fonctionnaires.
M. Belkhir Belhaddad (NI). La coopération transfrontalière luxembourgeoise s’est considérablement intensifiée depuis la création de la commission intergouvernementale (CIG) franco-luxembourgeoise en 2010. De cette coopération sont nés un certain nombre de projets tels que le centre technique de maintenance de la SNCF à Montigny-lès-Metz ou la Maison du Luxembourg de l’Eurométropole de Metz.
Dans ce cadre, les dépenses résidentielles doivent être prises en compte. Par exemple, la modélisation des crèches sur le pôle métropolitain frontalier s’élève à 2 millions d’euros quand les deux parents travaillent au Luxembourg. Aussi, il convient de revoir à la hausse la participation financière luxembourgeoise afin de compenser ces charges. Actuellement, les projets sont financés en co-développement, mais d’autres pistes existent, à l’image de la rétrocession fiscale ou de la création d’un fonds de coopération transfrontalier. Quel serait selon vous, madame la rapporteure, le modèle de financement le plus approprié ?
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Je considère que les dispositifs de financement peuvent varier selon les modalités de coopération définies avec les pays voisins. Pour s’attarder un instant sur l’exemple du périscolaire, il me semble indispensable que le Luxembourg finance des projets pour des Français travaillant sur son territoire. Le Luxembourg et la Suisse participent déjà au financement des équipements en zone transfrontalière. Il convient d’encourager d’autres pays à emprunter cette voie, car les services publics, notamment dans les petites communes, restent difficiles à financer.
Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). De nombreux Français établis en Suisse, résidant dans la région du Grand Genève ou dans l’Arc jurassien, sont concernés par les défis socio-économiques et territoriaux évoqués dans le rapport.
Des acteurs intergouvernementaux et des organismes de coopération locale et régionale ont émergé afin de renforcer les échanges entre les autorités compétentes de part et d’autre des frontières. Je note cependant que ces initiatives sont dépourvues d’une coordination nationale d’envergure qui renforcerait leur efficacité. La recommandation n° 47 du rapport propose justement de confier les questions transfrontalières à un interlocuteur unique au sein du gouvernement. Quelles seraient selon vous, madame la rapporteure, ses prérogatives ? De quels leviers d’action disposerait il pour surmonter les blocages ? Estimez-vous que, compte tenu de la transversalité des enjeux, cette responsabilité devrait être rattachée au premier ministre afin de garantir une coordination interministérielle efficace ?
Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Permettez-moi, avant de vous répondre, de saluer l’excellent travail réalisé au Quai d’Orsay par M. Philippe Voiry, ambassadeur pour les commissions intergouvernementales, la coopération et les questions frontalières.
Les questions transfrontalières sont à l’évidence des questions interministérielles. La nomination d’un membre du gouvernement en charge de ces questions répondrait, selon moi, à trois enjeux : assurer un suivi et un portage politique de ces questions, mettre en place une coordination interministérielle des actions des différentes administrations, et enfin disposer d’un interlocuteur unique, qui fait actuellement défaut pour les frontaliers et pour nos voisins européens.
M. le président Bruno Fuchs. Je vous remercie, madame la rapporteure, pour vos réponses et pour ce rapport de grande qualité.
Conformément à l’article 145 du Règlement de l’Assemblée nationale, à l’issue des échanges, la commission autorise la publication du rapport d’information qui lui a été présenté.
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La séance est levée à 10 h 35
Membres présents ou excusés
Présents. – M. Pieyre-Alexandre Anglade, Mme Clémentine Autain, M. Hervé Berville, Mme Véronique Besse, Mme Eléonore Caroit, M. Sébastien Chenu, M. Pierre Cordier, M. Alain David, Mme Dieynaba Diop, Mme Stella Dupont, Mme Christine Engrand, M. Olivier Faure, M. Marc de Fleurian, M. Bruno Fuchs, M. Julien Gokel, Mme Pascale Got, M. Michel Guiniot, M. Stéphane Hablot, Mme Marine Hamelet, M. François Hollande, Mme Brigitte Klinkert, M. Xavier Lacombe, Mme Constance Le Grip, Mme Élisabeth de Maistre, Mme Alexandra Masson, M. Laurent Mazaury, M. Kévin Pfeffer, M. Jean-François Portarrieu, M. Pierre Pribetich, M. Stéphane Rambaud, M. Franck Riester, Mme Laurence Robert-Dehault, M. Jean-Louis Roumégas, Mme Marie-Ange Rousselot, M. Lionel Vuibert
Excusés. – Mme Nadège Abomangoli, M. Bertrand Bouyx, M. Pierre-Yves Cadalen, M. Marc Fesneau, M. Perceval Gaillard, M. Alexis Jolly, Mme Amélia Lakrafi, Mme Marine Le Pen, M. Jean-Paul Lecoq, Mme Mathilde Panot, Mme Maud Petit, M. Davy Rimane, Mme Sabrina Sebaihi, Mme Michèle Tabarot, Mme Liliana Tanguy, M. Laurent Wauquiez, Mme Estelle Youssouffa
Assistait également à la réunion. – M. Belkhir Belhaddad