Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

–  examen pour avis du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (n° 325) (M. Jean-Didier Berger, rapporteur)              2

–  examen de la proposition de loi visant à exonérer de l'impôt sur le revenu les médecins et infirmières en cumul emploi retraite (n° 263) (M. Matthias Renault, rapporteur)              36

  présences en réunion...........................45

 


Mercredi
23 octobre 2024

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 027

session ordinaire de 2024-2025

 

 

Présidence de

M. Éric Coquerel, Président

 

 


  1 

La commission examine, pour avis, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (n° 325) (M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis).

M. le président Éric Coquerel. L’ordre du jour appelle l’examen pour avis du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. La commission des finances s’est, comme à son habitude, saisie pour avis de l’ensemble de ce texte.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. L’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 intervient dans un contexte inédit, puisqu’il a été déposé par le Gouvernement avec plus d’une semaine de retard par rapport au calendrier prévu par les dispositions organiques. Je regrette, par ailleurs, de n’avoir reçu aucune réponse aux quarante-et-une questions écrites adressées cet été aux ministres compétents.

Après un solde négatif de 10,8 milliards d’euros en 2023, en net reflux par rapport aux exercices marqués par la crise sanitaire, le déficit s’établirait à 18 milliards d’euros en 2024. Les comptes sociaux souffrent de la modération de la croissance et de celle de l’évolution de la masse salariale, alors que la normalisation de l’inflation produit ses effets en deux temps : la désinflation constatée en 2024 a directement provoqué le ralentissement des recettes, sensibles à la conjoncture, tandis que la décélération des dépenses n’interviendra – espérons-le – que l’année prochaine.

Pour 2025, le PLFSS envisage un solde négatif de 16,7 milliards d’euros pour les régimes obligatoires de base, ramené à 16 milliards d’euros en intégrant l’excédent du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), les branches maladie et vieillesse portant l’essentiel de ce déficit. Il ne faut pas s’y tromper, cette amélioration n’est que provisoire, pas structurelle. Si nous ne consentons pas davantage d’efforts, le déficit de la sécurité sociale repartira à la hausse, atteignant 17,7 milliards d’euros dès 2026 et près de 20 milliards d’euros en 2027.

Certaines caricatures opposent deux visions, l’une solidaire et l’autre comptable. Mais il n’y a pas de vision solidaire possible sans comptes solides. Au contraire, l’équilibre de nos comptes sociaux est la condition sine qua non de la soutenabilité de notre modèle social et de la solidarité nationale. En outre, une vision qui sacrifierait la solidarité de demain à celle d’aujourd'hui ne serait pas vraiment solidaire.

En l’absence d’une nouvelle reprise de dette par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), l’accumulation des déficits des régimes de base pèse sur l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss). Le dernier rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale prévoit l’aggravation du besoin de trésorerie, dont nous avions discuté à l’occasion du projet de loi d’approbation des comptes de l’année 2023. Ainsi, fin 2024, près de 37 milliards d’euros de dette sociale seront dépourvus de perspectives d’amortissement. Certes, l’article 13 du PLFSS prévoit de desserrer les contraintes de gestion, en relevant le plafond d’emprunt de l’Acoss de 45 à 65 milliards d’euros et en portant la durée maximale d’emprunt de douze à vingt-quatre mois. Mais il ne faut pas s’y tromper : si ces dispositions permettent de faciliter et d’optimiser les conditions de financement de l’Acoss, nous ne faisons que continuer à faire rouler la dette sociale. Nous ne pouvons envisager sa reprise par la Cades qu’avec une amélioration structurelle de notre modèle de financement.

S’agissant des recettes, le PLFSS s’inscrit dans un paquet de mesures législatives et réglementaires visant à dégager près de 15 milliards d’euros d’économies dans le périmètre de la sécurité sociale. C’est un premier pas sur le long chemin du redressement.

Je salue trois mesures en recettes visant à soutenir la compétitivité du secteur agricole et les droits sociaux de ceux qui nous nourrissent. Je me félicite en particulier de la pérennisation et du renforcement du dispositif d’exonération de cotisations patronales pour l’emploi de travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi (TODE). C’est un instrument éprouvé pour réduire le coût du travail au voisinage du Smic et lutter contre le travail illégal des saisonniers.

Inscrite à l’article 6 du PLFSS, la réforme des allègements généraux de cotisations patronales visait une réduction générale, dégressive et unifiée à compter du 1er janvier 2026. Des remarques pertinentes ont émergé de tous les bancs de notre assemblée, et la commission des affaires sociales a supprimé cet article. Je ne doute pas qu’il sera possible, dans la suite de nos travaux et avec la bonne volonté de tous, de faire émerger des solutions pour adoucir la pente des prélèvements sociaux et abaisser raisonnablement le point de sortie, afin de maintenir la compétitivité des entreprises et le taux d’emploi – paramètres encore peu documentés par le Gouvernement.

Enfin, je regrette que le Gouvernement ait une nouvelle fois choisi la facilité s’agissant des comptes de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), le régime spécial des agents territoriaux et hospitaliers. Celle-ci devrait afficher un solde déficitaire de 3,4 milliards d’euros, mais le texte prévoit pour seule solution l’augmentation de 4 points des cotisations à la charge des employeurs, pour une économie estimée à 2,3 milliards d’euros en 2025. Bien sûr, c’est beaucoup moins que les 18 points préconisés, mais nous ne pouvons pas demander aux collectivités locales et aux hôpitaux de consentir un tel effort sans la moindre compensation. Il faudra poser à nouveau la question de la durée de cotisation, même s’il ne nous appartient pas d’y toucher dans le cadre de l’examen du PLFSS. Aussi proposerai-je des amendements pour compenser le surcoût pour les hôpitaux. J’en proposerai d’autres, dans le cadre du projet de loi de finances (PLF), concernant les collectivités locales.

J’en viens aux dépenses. Celles des régimes de base ont progressé de 5 % entre 2019 et 2020 et de 5,7 % entre 2020 et 2021, au pire moment. En 2023, le rythme a été plus modéré puisque les dépenses relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) ont progressé de seulement 0,3 %, tandis que celles liées à la crise sanitaire connaissaient bien sûr un reflux, s’établissant à 1,1 milliard contre 11,7 milliards d’euros en 2022. En 2024, les dépenses sont en forte progression, à hauteur de 5,3 %. Cette croissance est essentiellement due à l’indexation des prestations sur l’inflation, avec la revalorisation de 5,3 % des pensions au 1er janvier. En outre, les dépenses de l’Ondam ont dépassé de 1,2 milliard d’euros la prévision initiale, pour s’élever à 256,1 milliards d’euros. Ce dépassement s’explique principalement par les soins de ville et par les indemnités journalières, qui ont généré, à elles seules, un dépassement de 500 millions d’euros.

En 2025, les dépenses liées à la crise sanitaire ne devraient plus représenter que 500 millions d’euros et l’inflation devrait revenir à un niveau tendanciel autour de 1,8 %. Ce rétablissement d’un contexte économique normalisé nous oblige : il ne sera plus possible de compter sur la réduction des dépenses sanitaires.

Le PLFSS pour 2025 reflète la priorité accordée à la préservation et au renforcement de notre système de protection sociale, alors que la sécurité sociale est appelée à prendre toute sa part dans l’effort de redressement visant à ramener le déficit public à 5 %.

En retranchant les effets des mesures nouvelles du projet de loi, les dépenses retrouveraient une trajectoire de croissance de 3,7 %, sous l’effet des mécanismes d’indexation des prestations sur l’inflation. Néanmoins, ce texte porte une ambition : celle de garantir la soutenabilité financière de la protection sociale des Français, avec 10,1 milliards d’euros d’économies pour les dépenses sociales. Il propose de fixer l’Ondam à 264 milliards d’euros, soit une progression de 2,8 %, et prévoit une dépense totale de 668 milliards d’euros.

J’appelle votre attention sur quelques mesures nouvelles. Le texte présenté par le Gouvernement est marqué par l’ambition d’engager une trajectoire de redressement du solde de la sécurité sociale. Il est ainsi prévu de ralentir la progression des dépenses de l’Ondam en contenant les dépenses remboursées, en particulier dans les secteurs de l’imagerie, de la biologie et des transports sanitaires. Nous pouvons envisager des mesures complémentaires par voie d’amendement, et je proposerai de réformer le délai de carence.

Je proposerai en revanche de rétablir l’entrée en vigueur de l’indexation des retraites au 1er janvier 2025, au lieu de la reporter au 1er juillet comme le texte le prévoit, d’une part pour éviter un effet défavorable sur le pouvoir d’achat des retraités, et d’autre part parce que c’est une question de crédibilité de l’État. Changer les règles du jeu en cours de partie pour des personnes qui ne peuvent pas modifier leurs comportements pose un problème de confiance. La croissance ne peut pas venir sans confiance, laquelle ne peut pas venir sans respect de la parole donnée.

Enfin, dans le sillage de ses prédécesseurs, ce texte comporte des mesures de modernisation de notre système de santé, en particulier pour lutter contre les tensions d’approvisionnement en médicaments et pour répondre aux difficultés financières des Ehpad.

Pour assurer la préservation et le renforcement de notre système de protection sociale, je vous invite à voter ce PLFSS.

M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je voterai contre.

D’abord, la sécurité sociale est à l’équilibre et sera même en excédent de 0,2 point de PIB en 2025. Si les régimes de base affichent un déficit, c’est largement dû à la façon dont la dette sociale doit être remboursée – celle-ci ne pouvant pas « rouler », contrairement à celle de l’État, ce qui signifie qu’on ne paie pas les seuls intérêts de la charge de la dette. Cela soulève la question des transferts de politiques publiques de l’État vers les comptes sociaux qui ont été réalisés, notamment lors de la crise du covid. On peut se demander si c’est à la sécurité sociale d’endosser des aides décidées par l’État, comme celles, par ailleurs justifiées, qui visaient à aider les entreprises par des dispositifs de chômage partiel.

Ensuite, comme pour le budget de l’État, le déficit découle largement d’une baisse des recettes et pas d’une hausse des dépenses. Ces baisses indiquent, d’une part, que l’exécutif prend progressivement le contrôle de la sécurité sociale par des politiques d’aide aux entreprises passant par des exonérations massives – 84 milliards d’euros pour 2024 – elles-mêmes remplacées par des recettes de TVA plus ou moins dynamiques – elles devraient être inférieures cette année de 1,5 milliard d’euros aux prévisions. Cette politique d’aide passant par des baisses de cotisations fragilise le système. D’autre part, la politique économique crée depuis 2017 insuffisamment d’emplois salariés. Les 700 000 travailleurs ubérisés, par exemple, ne paient pas de cotisations à la sécurité sociale, alors qu’ils pourraient être requalifiés en emploi salarié. La politique massive de primes participe également, selon la Cour des comptes, au dérèglement du système car souvent aucune cotisation ne leur est adossée.

Enfin, comme le relève l’Observatoire français des conjonctures économiques, la baisse de 0,8 point des dépenses sociales, en affectant la consommation populaire, aura un aspect récessif. C’est particulièrement vrai pour les retraites. Le ministre envisage que les retraités les moins favorisés ne soient pas touchés par le gel de l’indexation, mais cela ne serait pas suffisant : le problème est global. Depuis 2017, les pensions n’ont augmenté que de 13,6 %, pour une inflation cumulée de 19,5 % – sans parler de l’augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) en 2018. De surcroît, les retraités sont les premiers à subir la hausse du reste à charge pour les soins, puisque les cotisations des complémentaires de santé sont particulièrement élevées pour eux, qui les paient à 100 %, contrairement à de nombreux salariés. Autrement dit, cette mesure touchera une population qui ne peut être tenue pour responsable de l’augmentation des déficits, et aura une forte incidence sur la consommation populaire.

Il est également prévu une baisse de 3,8 milliards d’euros des dépenses de l’Ondam, alors que cette enveloppe n’a pas couvert le coût de l’inflation entre 2022 et 2024, ce qui a creusé le déficit structurel des hôpitaux publics de 2 milliards d’euros et fait passer la part d’Ehpad déficitaires de 27 à 66 %. Cette politique ne peut pas se poursuivre. Elle est d’ailleurs dénoncée par la Fédération hospitalière de France et par son président, le maire de Reims, par ailleurs membre d’Horizons.

Enfin, il y aura aussi une offensive contre les arrêts maladie. L’augmentation de ces arrêts incite surtout à s’interroger sur la hausse des maladies au travail et sur la suppression des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail en 2017. On ferait mieux d’essayer de comprendre pourquoi de plus en plus de personnes sont malades au travail plutôt que d’abaisser les indemnités.

Pour toutes ces raisons, et d’autres, j’estime que ce budget ne correspond pas à ce qu’il faut pour l’hôpital public et aura des répercussions considérables sur la consommation populaire.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez indiqué que la réforme inscrite à l’article 6 n’avait pas fait l’objet d’une étude d’impact économique précise. Le problème de cette réforme est surtout qu’elle va aboutir, deux années consécutives, à augmenter de deux points le coût des salaires compris entre 1 et 1,3 Smic. Les études sur les exonérations de cotisations sociales patronales montrent que, si l’on peut douter de leur utilité au-delà d’un certain niveau, elles sont efficaces pour les bas salaires. En surenchérissant de 4 points en deux ans les bas salaires, n’aboutira-t-on pas au résultat inverse à celui recherché, à savoir une disparition plus rapide des emplois peu qualifiés ? Puisque vous vous êtes montré assez critique, proposez-vous des solutions alternatives ? Nombre de spécialistes préconisent de plafonner l’exonération sur la branche famille, qui va jusqu’à 3,5 Smic, à 2,5 Smic, à une vitesse à déterminer.

L’article 23, qui reporte au 1er juillet la revalorisation des retraites, concerne indifféremment tous les niveaux de pension. Si l’on souhaite un dispositif maintenant le pouvoir d’achat des plus petites retraites, en restant conforme au montant d’économies proposé par le Gouvernement, le point d’équilibre se situerait à 1 600 euros par mois. Maintenir le pouvoir d’achat des retraites allant jusqu’à ce montant paraîtrait raisonnable.

L’autre inconvénient de cet article 23, que vous n’avez pas soulevé, est que c’est un fusil à un coup : l’an prochain, on ne va pas reporter la revalorisation du 1er juillet au 1er janvier d’après ! Le système alternatif que je propose pourrait être pérenne.

Enfin, l’augmentation des cotisations employeur à la CNRACL est considérable : 4 points en 2025 et 4 points en 2026, pour un coût de 2,3 milliards d’euros en 2025 – dont 1 milliard pour les hôpitaux et 1,3 pour les collectivités territoriales – et 4,6 milliards d’euros l’année suivante. A-t-on parlé aux partenaires sociaux de cette caisse qui assure de meilleures prestations que le régime général ? Quelle est la position des organisations syndicales ? Un partage des efforts a-t-il été envisagé, à l’instar de ce qui se passe dans les régimes de base et les régimes complémentaires des salariés du privé ?

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Les points que vous soulevez constituent le cœur du sujet.

Concernant l’article 6, je crains qu’un retour en arrière s’agissant des exonérations pénalise de toute façon l’emploi. Quand on augmente le coût du travail, quel que soit le niveau de salaire, on ne peut pas dire qu’on fait acte de croissance, a fortiori dans un monde aussi compétitif que celui dans lequel interagissent nos entreprises. Un point de sortie à 2,5 Smic serait un peu bas et poserait d’autres types de problèmes aux entreprises qui pratiquent des salaires plus importants. Une analyse est nécessaire pour éviter les effets de seuil et adoucir intelligemment la pente pour les bas salaires, sans créer une mesure contre-productive.

S’agissant des retraites, je n’ai pas bien compris le principe de votre point d’équilibre. Si l’on évite la désindexation des retraites inférieures à 1 600 euros, il faut dégrader autre chose pour garder le même rapport. Cela signifie-t-il qu’il n’y aurait aucune indexation pour les autres ? Cette solution n’est pas politiquement acceptable. Comment expliquer qu’on perçoive plus d’argent en 2025 avec une retraite de 1 599 euros qu’avec une retraite de 1 601 euros ? L’effet de seuil serait difficile à expliquer.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Il n’y a pas d’effet de seuil dans le dispositif que je propose, mais un effacement graduel de la revalorisation entre 1 600 et 1 660 ou 1 670 euros. Il n’y aura donc pas de problème.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Cela pose un problème de justice. Nous sommes tous le riche de quelqu’un d’autre. On ne peut pas distinguer en permanence les petites, les moyennes et les grosses retraites. Je suis favorable à une revalorisation à égalité pour tout le monde. J’espère que le Gouvernement parviendra à faire un effort par ailleurs pour que la date de l’indexation soit avancée, même au 1er mai ou au 1er avril, pour adoucir cette mesure douloureuse pour les retraités. Mais appliquer des seuils serait une double peine pour les retraités qui les dépassent. Ce n’est pas une bonne idée.

Par ailleurs, appliquer une mesure pérenne consistant à ne plus indexer les retraites au-delà d’un certain seuil pour éviter d’utiliser un « fusil à un coup » serait particulièrement injuste pour tous les retraités concernés.

Enfin, s’agissant de la CNRACL, nous arriverons à 10 milliards de déficit en 2027. On cherche à boucher le trou par une mesure qui rapportera 2 milliards d’euros cette année et probablement 2 à 2,5 milliards d’euros l’année prochaine : ce n’est rien, par rapport à ce qui nous attend. Augmenter de 18 points – donc de 50 % – les cotisations patronales ne me paraît pas être la bonne solution. Il me semble donc que les négociations que vous évoquez n’ont pas eu lieu, ou pas suffisamment, et qu’il faut envisager d’autres pistes.

À force d’augmenter les cotisations patronales, les employeurs pourraient renoncer à employer des fonctionnaires et faire appel à davantage de contractuels. Or l’Ircantec va bien, et la CNRACL va mal. On ferait donc mieux de réfléchir, pour ce qui concerne les collectivités territoriales, à la façon de fusionner ces deux caisses, pour retrouver un équilibre. Je ne suis pas sûr en effet qu’inciter les collectivités locales à employer plus de contractuels que de fonctionnaires pour éviter d’avoir à payer des cotisations toujours plus lourdes soit l’objectif recherché, notamment à gauche. Ce débat est devant nous, et il faut envisager l’allongement de la durée de cotisation comme l’une des solutions.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous voterons évidemment contre ce PLFSS, qui montre bien, si besoin était, les échecs des sept dernières années. S’il y avait eu un succès économique et de réindustrialisation, si le plein emploi était au rendez-vous, si vous aviez lutté contre toutes les formes de fraude, les caisses de la sécurité sociale seraient pleines ! Mais non, elles sont en déficit – un déficit plus important que prévu. C’est même le retour à un déficit structurel que l’on pensait derrière nous. Et je n’ai pas entendu d’explication convaincante concernant l’état des caisses et la contradiction flagrante entre les résultats économiques proclamés à longueur de journée et la situation des finances sociales.

Nous voterons contre ce PLFSS pour protester contre cette nouvelle guerre des classes qu’est la guerre des âges, une guerre ouverte contre les retraités, présentés sans cesse par les chiens de garde du système comme des nouveaux privilégiés, des nantis dont le niveau de vie serait responsable de la misère du pays. Or, le président de la commission l’a rappelé, les pensions des retraités n’ont pas été revalorisées à la hauteur de l’inflation depuis que le sinistre François Hollande était au pouvoir, avec sept points de retard par rapport au niveau de vie qu’ils devraient avoir. Le décalage de l’indexation des retraites, c’est toujours le début de la fin de l’indexation pérenne ! C’est ce que François Hollande avait fait : d’abord un décalage, puis une désindexation totale. Pourquoi les retraités devraient-ils payer pour l’échec des autres ? Nous combattons cette idée et nous rétablirons l’indexation.

Autre folie, celle de la hausse du coût du travail. Comme le rapporteur général l’a souligné, il n’y a pas eu d’étude d’impact. Pourquoi ne commencez-vous pas par vous occuper de la « trappe à stagnation des salaires » autour de 2,5 Smic ? C’est un mystère.

Les sujets à critiquer sont nombreux, mais ces deux points expliquent à eux seuls notre vote contre ce budget.

M. David Amiel (EPR). Les chiffres du chômage ne sont pas établis par le Gouvernement, mais par le Bureau international du travail, qui applique la même méthodologie dans tous les pays. En l’occurrence, ils montrent bien que le chômage a baissé et que la précarité a reculé, avec une part des CDI en hausse. Quant au développement de l’apprentissage, c’est plutôt une bonne nouvelle pour les jeunes Français et pour l’orientation professionnelle.

Nous partageons le diagnostic du PLFSS : nous devons mieux maîtriser nos dépenses sociales, qui expliquent en grande partie l’écart en matière de dépenses publiques qui existe entre la France et les autres pays, y compris ceux du nord de l’Europe connus pour leur progressisme.

Nous partageons beaucoup des mesures proposées, parmi lesquelles la réduction des dépenses excessives en matière de transport sanitaire, la poursuite du travail engagé contre la fraude ou le renforcement de la lutte contre les pénuries de médicaments.

Pour autant, nous avons deux divergences importantes avec le texte initial. La première concerne le coût du travail : nous considérons que les économies budgétaires ne peuvent pas se faire au détriment des salaires et de l’emploi. Le travail est trop taxé. Nous proposons des alternatives à l’augmentation des charges, qui détruirait des centaines de milliers d’emplois et irait à rebours de l’objectif de « désmicardisation » et de lutte contre les trappes à bas salaires.

Ensuite, nous proposerons de rétablir l’indexation des retraites. Il y a un peu d’ironie à voir certains se faire les défenseurs du niveau des pensions de retraite alors qu’ils proposent, dans le même temps, de supprimer la réforme des retraites, qui permet de financer ces pensions à un juste niveau. C’est une forme de schizophrénie, budgétaire et politique !

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). S’il y avait le plein emploi, comme le Gouvernement et les macronistes s’en gargarisent, il n’y aurait pas de problème avec la sécurité sociale : les cotisations seraient très élevées. Mais force est de constater que le plein emploi n’existe pas et que les chiffres avancés par le Gouvernement sont systématiquement manipulés. Et si l’on peut se réjouir du développement de l’apprentissage, il est bon de rappeler aussi que vous avez sorti les apprentis des chiffres du chômage, faisant ainsi artificiellement baisser le niveau de ce dernier – et je passe sur la précarité de l’emploi que vous avez alimentée.

Non, nous ne sommes pas obligés de baisser nos dépenses sociales et de santé, alors que la France a rarement compté autant de pauvres, autant de personnes en difficulté et autant qui renoncent aux soins. Au contraire, nous avons besoin de les augmenter. Pour cela, vous avez raison, il faut de l’argent. Mais, pour le budget de la sécurité sociale comme pour celui de l’État, vous avez vidé les caisses à grands coups d’exonérations de cotisations ! On tourne cette année autour des 80 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales. Or quand on permet aux patrons ou aux grandes entreprises de ne pas payer leurs cotisations sociales, on a moins d’argent. Vous en concluez qu’il faut baisser les dépenses : non, il faut supprimer les exonérations sociales et surtout arrêter de les faire payer aux Français par des transferts de TVA.

Mme Sophie Pantel (SOC). Nous aussi, nous considérons que le dialogue avec les partenaires sociaux est insuffisant et nous étonnons des incohérences entre l’autosatisfaction au sujet du plein emploi et le manque de recettes.

Il y a un an, Christian Baptiste déclarait que le PLFSS pour 2024 déshabillait Pierre pour faire semblant d’habiller Paul. Cette année, il déshabille les deux !

Comment répartir l’effort ? Ce PLFSS fait plusieurs victimes. D’abord, la santé, avec une baisse du niveau des remboursements des consultations médicales, aucune vraie mesure pour l’hôpital public et le maintien de la tarification à l’activité, qui ne permet pas de prendre en compte les besoins des territoires. La moitié des Français ont déjà renoncé à une consultation médicale en raison des délais d’attente, parce qu’il leur fallait se rendre dans un autre département ou en raison du reste à charge.

Les deuxièmes victimes sont les plus jeunes. Le secteur de la petite enfance aurait mérité une réflexion plus ambitieuse, face à la privatisation et à certaines dérives. Je pense aussi aux jeunes actifs, notamment les apprentis, qui seront désormais assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG). En outre, peu de place est faite à la prévention.

Enfin, les grands perdants sont les seniors. Nous sommes contre le report de l’indexation des retraites, et aucune solution n’est apportée pour les Ehpad. La branche autonomie est peu dotée, malgré le vieillissement de la population. Aucune réponse n’est apportée non plus pour le financement du Ségur.

Je mentionnerai encore le transfert politique effectué par l’État vers les comptes sociaux et les transferts non compensés sur le dos des collectivités – je pense en particulier à la question de la démographie médicale.

Une vision uniquement comptable n’est pas satisfaisante. Il est essentiel de préserver notre modèle social, héritage du Conseil national de la résistance.

M. Nicolas Ray (DR). Comme nous, les Français sont attachés à notre régime de sécurité sociale et à sa philosophie, selon laquelle chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Or force est de constater que nos comptes sociaux dérapent, avec un déficit de 18 milliards d’euros et un déficit prévisionnel de 16 milliards d’euros pour 2025, qui alimentent l’ensemble de nos déficits publics.

Le gouvernement de Michel Barnier hérite d’une situation financière dégradée et des efforts sont indispensables pour redresser nos comptes et garantir la pérennité de notre système. Nous saluons ceux qui sont proposés par le Gouvernement et nous en débattrons dans un esprit constructif.

Néanmoins, ce redressement ne peut s’opérer sur le dos de la France qui travaille et qui a travaillé toute sa vie. Le report de l’indexation des retraites au 1er juillet notamment constitue un coup de canif dans le contrat avec nos retraités.

Nous sommes inquiets des déremboursements de soins et des transferts de prise en charge de l’assurance maladie vers les mutuelles, qui auront pour effet d’accroître le tarif de celles-ci. Nous sommes préoccupés par la réduction des allègements de charges sur les bas salaires, notamment peu qualifiés – attention à bien étudier son impact sur l’emploi ! Nous sommes dubitatifs face à l’évolution de l’Ondam hospitalier, fixé à + 3,1 % mais qui sera fortement grevé par les hausses de cotisations à la CNRACL.

Il serait plus juste de privilégier des économies différentes, qui encouragent le travail et l’emploi – lequel finance notre système social. Création d’une allocation sociale unique, plafonnée à 70 % du Smic, gel de la revalorisation du revenu de solidarité active (RSA), recentrage des dépenses de l’aide médicale de l’État et de l’hébergement d’urgence, lutte accrue contre les abus et la fraude sociale : voici les pistes d’économies que nous proposerons, des économies acceptées et même demandées par nos concitoyens qui travaillent et qui contribuent au financement de notre modèle social.

M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Ce PLFSS est encore plus décevant que celui de l’an dernier. L’Ondam global est en hausse de 2,8 %, mais une fois l’augmentation des cotisations à la CNRACL neutralisée, la progression n’est que de 2 % sans compter l’inflation. Qui plus est, le Haut Conseil des finances publiques juge l’hypothèse de croissance du PIB de 1,1 % trop optimiste, du fait des effets récessifs qui résulteront des coupes budgétaires massives proposées dans le PLF. Les effets sur l’emploi, donc sur les cotisations et les dépenses sociales, fragiliseront encore plus les prévisions de ce PLFSS. La commission des finances est prévenue de cet optimisme qui confine à la témérité.

Hier soir, nous avons obtenu des compensations pour les agriculteurs. Toutefois, les grandes questions comme la santé mentale, la dépendance des personnes âgées ou encore le financement des fauteuils roulants sont absentes de ce texte. Aussi notre groupe parlementaire fera-t-il des propositions fortes pour ces thématiques, tout en présentant des pistes d’économies.

Enfin, en tant que représentant des Français établis hors de France, je souligne la désinvolture scandaleuse et l’indigence des budgets des politiques d’action sociale qui leur sont destinées : 15 millions par an pour une population de 2,5 millions de personnes ! La question de la dépendance des Français établis hors de France ne fait même pas l’objet d’une ligne budgétaire, si ce n’est celle des rapatriements d’urgence, qui sont un outil onéreux et inadapté.

Cet impensé dans nos politiques publiques n’est pas une fatalité, et nous avons des solutions. La Caisse des Français de l’étranger pourrait être l’instrument idoine, mais cette caisse de sécurité sociale qui assure une mission de service public et de solidarité pour 2,5 millions de nos compatriotes reçoit en tout et pour tout 380 000 euros du budget de l’État. Merci pour la charité !

Par conséquent, nous défendrons des amendements au PLFSS et au PLF proposant des mesures de financement pour une réelle politique publique de la santé, couvrant les thématiques que j’ai citées et intégrant nos compatriotes à l’étranger ainsi que les grands impensés comme la malnutrition ou la pollution de l’air. Le groupe Écologiste et social continuera de défendre un budget de sécurité sociale à la hauteur des défis posés par la préservation de la santé et la dignité des Français.

Mme Perrine Goulet (Dem). Le PLFSS s’inscrit dans un contexte de perte de maîtrise des comptes sociaux, relevé par la Cour des comptes. Si le déficit pour 2023 plafonnait à 10,8 milliards d’euros, il pourrait atteindre 18 milliards d’euros à la fin de l’année en cours. En tant que membres de la commission des finances, notre priorité absolue doit être d’endiguer ce point de bascule déterminant pour l’avenir de nos comptes publics.

Toutefois, malgré la baisse des crédits du côté du budget général, les dépenses de sécurité sociale progresseront au total de 18 milliards d’euros par rapport à la base 2024 rectifiée.

Nous saluons plusieurs mesures qui étaient attendues, comme la traduction des engagements conventionnels signés avec les professionnels de santé, portant la consultation à 30 euros ; l’accès à une unité de soins palliatifs sur l’ensemble du territoire d’ici fin 2025 ; l’accès des familles monoparentales au complément de mode de garde jusqu’à 12 ans ; la création du service public de la petite enfance. Sur ce dernier point, nous avons besoin d’accroître le nombre de places, mais pas au détriment de la qualité de l’accueil et de la sécurité du jeune enfant. Cela doit être accompagné budgétairement, et notamment par les communes, autorités organisatrices. Enfin nous saluons le recours facilité au dispositif Mon soutien psy, sans prescription médicale, et l’élargissement de VigilanS aux mineurs, pour prévenir les suicides et les actions d’aller vers.

Cependant, nous émettons des réserves sur le nombre trop important de dispositions essentielles qui sont à la discrétion du pouvoir réglementaire. Elles doivent être soumises au débat démocratique.

Nous sommes également réservés quant au décalage de la revalorisation de toutes les pensions de retraite au 1er juillet. Nous souhaitons une mesure plus ciblée, permettant aux petites retraites d’être revalorisées dès le 1er janvier.

De manière générale, notre dispositif de protection sociale – l’un des plus redistributifs au monde – constitue un héritage qu’il nous faut préserver.

M. Christophe Plassard (HOR). Cette année encore, le PLFSS s’inscrit dans un contexte budgétaire extrêmement contraint. Les dépenses sociales devraient dépasser les 643 milliards d’euros, c'est-à-dire un budget supérieur à celui de l’État. L’Ondam reste dynamique, à + 2,8 %, accompagné de réformes structurantes et d’une trajectoire de près de 5 milliards d’euros d’économies fondées sur l’efficience et la santé publique.

Le groupe Horizons et indépendants rappelle son attachement à l’équilibre des comptes et à l’efficience de la dépense publique : chaque euro de l’argent des Français doit être dépensé de façon juste et efficace.

Ce texte reflète un engagement ferme à protéger les Français face aux défis économiques et budgétaires. Avec une hausse des dépenses de sécurité sociale de 18 milliards, le PLFSS répond aux besoins croissants en matière de santé, de retraite et d’autonomie. Malgré cette augmentation, les efforts budgétaires restent maîtrisés. Nous veillerons à ce que les mesures affectant les régimes de retraite ou le coût du travail soient conçues avec une attention particulière, pour ne pas fragiliser davantage ceux qui sont vulnérables.

Par ailleurs, le PLFSS poursuit le renforcement de la lutte contre les fraudes sociales, avec le déploiement de 1 000 agents supplémentaires et des outils modernes pour sécuriser le système, avec un objectif de 5,5 milliards d’euros de redressements cumulés d’ici 2027.

Notre groupe soutiendra ce texte, mais nous resterons attentifs à ce que les mesures d’économies ne mettent pas en péril les principes fondamentaux de la protection sociale, et garantissent la justice sociale dans l’effort budgétaire.

M. Michel Castellani (LIOT). Nous notons quelques avancées dans ce texte, mais aussi des lacunes. Ainsi, nous regrettons que des sujets majeurs comme la prévention, la santé mentale ou la petite enfance semblent avoir été mis de côté. Ce PLFSS présente un Ondam insuffisant, ce qui posera in fine un problème d’accès aux soins. Nous déplorons aussi la noncompensation de l’inflation et les surcoûts pour les territoires insulaires et ultramarins – c’est un problème récurrent. L’accès aux soins est fragilisé, avec la réduction du ticket modérateur, celle du plafond de rémunération des indemnités journalières et la hausse des franchises. Nous regrettons encore l’absence de financements ad hoc pour la branche autonomie, pour laquelle nous appelons à la création d’une contribution spécifique.

Il faut nous mettre à l’ouvrage pour proposer des modifications portant le texte à la hauteur des enjeux de santé.

M. Gérault Verny (UDR). Notre système de protection sociale repose quasiment intégralement sur les travailleurs et les entreprises, qui sont par ailleurs les moins consommateurs de prestations. Il existe une décorrélation totale entre l’augmentation du coût de ce système et la qualité de ses prestations, puisque les dépenses sociales sont passées de 20 % du PIB dans les années 1990 à 35 % aujourd’hui tandis que les déremboursements sont toujours plus massifs et que le transfert de responsabilité vers les mutuelles privées génère une double charge pour les particuliers et les entreprises.

Ce PLFSS devrait nous permettre de repenser l’hôpital, pour qu’il puisse se concentrer sur sa mission – soigner ; de repenser nos recettes, pour que le poids de notre système social ne soit pas un facteur de baisse de la compétitivité de nos entreprises ; d’améliorer le soutien aux familles pour inverser le déclin de la natalité, qui rend encore plus difficile la soutenabilité de notre système de retraites ; et d’améliorer la vie de nos aînés.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Monsieur Tanguy, je ne suis ni l’avocat, ni le procureur du passé. J’essaie simplement d’être le promoteur des solutions proposées pour le présent tout en veillant à ce qu’elles soient les plus justes et les plus équitables possible. Voter contre ce texte, c’est ne pas permettre à l’Acoss de gérer la dette qui est la nôtre dans les deux ans qui viennent. C’est une responsabilité qui pèse sur chacun d’entre nous.

J’attends avec impatience les alternatives évoquées par le groupe Ensemble pour la République concernant la baisse des exonérations, afin d’étudier la façon d’améliorer la première version du Gouvernement.

La France insoumise considère que nous ne sommes pas obligés de baisser les dépenses, mais alors, nous n’aurons pas de marge de manœuvre pour la suite. Le PLFSS prévoit déjà 18 milliards d’euros de dépenses supplémentaires, ce qui prouve que nous sommes très loin des logiques d’austérité parfois évoquées. L’austérité, ce n’est pas quand les dépenses continuent à augmenter mais quand elles baissent, et très fortement.

Je répondrai à notre collègue socialiste que si rien n’est fait, ce sont Pierre, Paul et Jacques qui seront nus demain. Nous n’aurons plus le sou pour nous occuper ni des uns ni des autres. Il est vrai que les transferts vers les collectivités posent problème, mais le texte prévoit aussi plusieurs mesures de modernisation, en particulier s’agissant des Ehpad. Nous devrions pouvoir nous accorder sur les mesures positives.

Je salue les propos de Nicolas Ray concernant les efforts indispensables à fournir, avec des propositions concrètes pour améliorer la copie du Gouvernement. J’y suis sensible.

Comme le groupe Écologiste, je pense qu’il y a des mesures à imaginer concernant les Français de l’étranger. Toutes les propositions seront les bienvenues. Mais affirmer que celles contenues dans le PLFSS sont décevantes, c’est ne pas mesurer l’ampleur des difficultés que nous rencontrons.

Pour répondre aux observations du groupe Les Démocrates, nous sommes déjà le pays qui redistribue le plus au monde. Prévoir des mesures ciblées pour les retraites augmenterait encore le caractère redistributif de notre pacte social. Or nous sommes déjà à un point si élevé que cela finit par devenir inéquitable vis-à-vis de ceux qui portent la solidarité.

Enfin, pour répondre aux groupes Horizons, LIOT et UDR, la dépense n’est évidemment pas un gage de qualité. Il faut sortir de ce paradigme et trouver des mesures équilibrées. Aussi serons-nous attentifs à tous les amendements qui seront proposés sur ce point.

Article liminaire : Prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale pour 2024 et 2025

Amendement de suppression CF31 de M. Jean-Philippe Tanguy.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). C’est un amendement de suppression, puisque le groupe Rassemblement national ne croit pas aux prévisions de ce PLFSS et ne croit pas à la politique économique du Gouvernement – passé ou présent. En toute logique, nous ne pouvons pas cautionner ces prévisions.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Par principe, nous n’aimons pas trop les suppressions d’articles. Mais surtout, sur le fond, cette demande est difficile à soutenir venant d’un groupe qui propose d’abroger la réforme des retraites, donc d’aggraver encore la situation de 15 milliards d’euros par an.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’article liminaire.

PREMIÈRE PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2024

Article 1er : Rectification des prévisions de recettes, des tableaux d’équilibre et des objectifs de dépenses pour 2024

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement CF32 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 1er.

Article 2 : Rectification de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que de ses sousobjectifs pour 2024

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 2.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

 

DEUXIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2025

TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Article 3 : Alignement de l’effort contributif des non-salariés agricoles sur celui des travailleurs indépendants dans le cadre de la réforme du mode de calcul de la pension de retraite de base

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 3 non modifié.

Après l’article 3

Amendements identiques CF77 de Mme Élise Leboucher et CF157 de M. Philippe Brun

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Cet amendement vise à abroger l’injuste réforme des retraites que la Macronie nous a imposée – réforme qui n’a jamais été soumise au vote de cette assemblée et qui a mis des millions de personnes dans la rue, dans un mouvement social comme la France n’en avait pas connu depuis plusieurs dizaines d’années. Une réforme qui a été désapprouvée par 70 % des Français et 93 % des actifs ! Si elle avait été voulue et souhaitée, vous n’auriez sans doute pas perdu chacune des dernières élections, messieurs les macronistes.

Il s’agit donc d’y revenir – mais pas pour faire semblant, pas pour tromper tout le monde en mentant comme le fait le Rassemblement national. Celui-ci a voté contre cet amendement en commission des finances, il essaie de nous faire croire de manière hypocrite qu’il voudrait abroger cette réforme mais il ne propose aucune solution de financement, sinon faire payer les Français plus longtemps – leur faire payer eux-mêmes pour leur propre abrogation de la réforme des retraites, leur faire payer eux-mêmes la différence entre les 64 et les 62 ans ! Ne venez pas faire les beaux sur les plateaux de télévision et affirmer que vous voulez abroger la réforme des retraites alors que vous avez été absents des mobilisations et que vous avez fait partie de ceux qui ont le moins amendé le texte !

Il existe un moyen, pour abroger cette réforme : voter cet amendement, parce qu’il permet les augmentations de cotisations sociales qui le rendent possible. Si l’on veut abroger la réforme des retraites, il va falloir que les employeurs qui en ont les moyens y contribuent.

M. Philippe Brun (SOC). Nous demandons effectivement l’abrogation de la réforme des retraites. Cette proposition n’a pas rencontré de majorité en commission des affaires sociales, mais ce serait un beau symbole qu’en commission des finances, nous réparions cette injustice – injustice qui a amené des millions de personnes dans la rue au printemps 2023.

Cette réforme, c’est deux années de vie prises à ceux qui ont commencé à travailler le plus tôt et qui exercent les métiers les plus pénibles, ceux qui ont commencé à 20 ans, qui ne sont pas concernés par les mesures promises pour les carrières longues et à qui l’on va demander de cotiser quarante-quatre ans, soit une ou deux années de plus que ceux qui ont commencé à travailler à 25 ans. C’est cette inégalité fondamentale qui a justifié notre rejet de cette réforme des retraites. C’est cette inégalité fondamentale qui a conduit des millions de Français dans la rue, y compris dans nos campagnes. Par cet amendement, nous voulons revenir sur cette mesure d’âge injuste, qui n’a été comprise par personne et qui est massivement rejetée par les Français.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Vous dites qu’il faut trouver des mesures pour compenser, mais vous les faites peser sur tout le monde : les employeurs, les salariés et tous ceux qui ne seront pas embauchés parce que le coût du travail sera tel que nous n’aurons plus la compétitivité suffisante ! En outre, faire et défaire sans arrêt aboutit à une situation illisible pour nos compatriotes.

M. Charles Sitzenstuhl (EPR). Nous avons fait cette réforme des retraites parce que l’espérance de vie ne cesse d’augmenter et qu’il faut financer notre modèle social. Pour cette raison, il faut travailler un peu plus longtemps – c’est un effort collectif. Nous avons aussi besoin d’augmenter la quantité de travail, car les chiffres et les comparaisons internationales sont têtus : la France est toujours un pays qui, de façon globale, travaille moins que ses principaux concurrents économiques européens.

Compte tenu de nos finances publiques, l’abrogation de la réforme des retraites serait irresponsable, car elle se traduirait par un trou de plusieurs dizaines de milliards d’euros. Ce serait la ruine, voire la banqueroute assurée. Il est donc impossible d’y revenir dans la situation actuelle. Nous nous opposerons donc avec vigueur à ces amendements.

Mme Perrine Goulet (Dem). Je n’ai pas voté cette réforme des retraites pour embêter les Français, mais pour résoudre une difficulté liée à l’allongement de la durée de vie. La baisse des actifs et l’augmentation des inactifs imposent de faire quelque chose pour pérenniser le système de retraite. Les amendements que vous défendez empêchent cette pérennisation. Il est tellement plus facile d’être dans l’opposition pour faire de la démagogie, pour ne pas avoir à dire les vérités qui font mal ! Oui, il est difficile de dire qu’il faut travailler plus pour remettre notre système à l’équilibre, mais c’est la vérité. Les acteurs syndicaux de l’Agirc-Arrco ont d’ailleurs instauré un système de malus pour obliger les gens à travailler un an de plus afin justement de pérenniser le système.

Arrêtons la démagogie. Nous devons tous défendre notre système de retraite, car nous y tenons tous. Abroger cette réforme serait la plus grosse stupidité pour nos comptes publics et pour les retraites à venir.

M. Philippe Juvin (DR). La position du groupe Les Républicains est claire : abroger la réforme des retraites, si imparfaite soit-elle, coûterait un argent considérable. Les cotisations ne financent que les deux tiers des retraites, qui sont alimentées par des taxes affectées et par des concours de l’État. Le système est déjà déficitaire, et revenir sur la réforme creuserait davantage encore ce déficit.

Il faut réfléchir aux vraies questions. Si l’on veut pérenniser un système par répartition, faut-il le compléter par de la capitalisation collective ? La gauche, qui hurle aux loups dès qu’on parle de capitalisation collective, a été la première à affirmer qu’il fallait défendre le système de capitalisation de la Banque de France quand il s’est agi de le supprimer : c’est assez curieux… Par ailleurs, quand on divise le nombre d’heures travaillées par le nombre de personnes en âge de travailler, la France a le ratio le plus faible de l’Union européenne. Ainsi, sauver le système par répartition, c’est travailler plus, travailler probablement plus longtemps pour un certain nombre de personnes, et ajouter un système de capitalisation collective.

M. David Guiraud (LFI-NFP). Ce débat fait apparaître certains arguments assez curieux. Un collègue indique que les cotisations ne financent que deux tiers des retraites, qui sont alimentées par les concours de l'État. Une autre évoque un trou de plusieurs dizaines de milliards d’euros à la sécurité sociale. Mais c’est vous qui votez 60 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales ! C’est plus que le trou ! Et le pire, c’est que vous faites quand même payer ces cotisations aux Français, avec la TVA. Il n’est donc pas vrai que le système de retraites soit dans une difficulté insoutenable.

Et même si l’on retenait quelques secondes vos arguments, l’allongement de la durée du travail ne serait pas la seule solution. Certaines cotisations patronales ou certaines cotisations sociales pour les plus hauts revenus pourraient être augmentées, comme nous l’avions proposé lors du débat sur les retraites. On pourrait aussi augmenter les cotisations dans le temps, pour que ce soit indolore sur la fiche de paie. Mais vous avez refusé de le faire, au nom de l’idéologie. Car, non, vous n’êtes plus dans la réalité : en votant 60 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales tous les ans, on n’est plus dans la réalité !

M. Matthias Renault (RN). Nos collègues ont fait le même numéro en commission des affaires sociales, mais attention : cet amendement n’abroge pas la réforme des retraites, il augmente les cotisations. Je sais que la gauche est gênée par la proposition de loi que nous présenterons dans le cadre de notre niche, le 31 octobre. Débrouillez-vous pour vos positions de vote respectives, mais on ne peut pas voter un amendement dont le seul effet est d’augmenter les cotisations.

M. le président Éric Coquerel. Vous aviez reçu une invitation à un colloque que nous avons organisé avec Charles de Courson ce lundi 21 octobre et qui a réuni toutes les organisations patronales et syndicales ainsi que des économistes. J’en retiens trois points.

D’abord, le président du Conseil d’orientation des retraites, Gilbert Cette, nommé en remplacement de M. Pierre-Louis Bras et favorable à la réforme, a expliqué que l’objectif n’était pas de réduire le déficit du régime de retraite, mais celui de l’État. C’est ce que nous avons toujours dit.

Ensuite, comme l’avait indiqué son prédécesseur, ce n’est pas un problème de dépenses que nous avons, mais de recettes.

Enfin, dans les pistes de financement pour éviter le recul à 64 ans de l’âge de départ à la retraite, il suffisait d’augmenter les cotisations de seulement 0,15 % pendant sept ans pour parvenir à l’équilibre.

Ce colloque était très intéressant, quelle que soit la position qu’on peut avoir, et je vous encourage à en écouter l’enregistrement.

M. Éric Woerth (EPR). C’est une présentation totalement orientée ! Évidemment, on peut toujours tout augmenter. Il suffit de monter jusqu’au ciel, de percevoir 100 % des revenus des Français et l’on finance le modèle social !

M. le président Éric Coquerel. Je peux donner ma position, comme vous le faisiez quand vous étiez président de cette commission !

M. Éric Woerth (EPR). Mais alors, laissez-nous vous répondre, comme je le faisais.

M. le président Éric Coquerel. Vous êtes intervenu et nous avons entendu vos positions.

M. Éric Woerth (EPR). À quel moment ?

M. le président Éric Coquerel. Vous ne présidez pas. Je vous rappelle que je peux intervenir et donner ma position. C’est mon droit comme président de la commission. M. Sitzenstuhl a donné la position de votre groupe.

Je vous informe des éléments avancés dans ce colloque et, bien évidemment, je suis favorable à cet amendement.

Je souhaite, par ailleurs, apporter une explication. Un amendement au PLFSS ne peut pas abroger la réforme des retraites, car il serait jugé irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. Cela répond à l’observation de M. Renault. Cet amendement avance donc des pistes en vue d’une conférence de financement que pourrait proposer le Gouvernement.

La commission rejette les amendements.

Article 4 : Pérennisation du dispositif d’exonération de cotisations patronales lié à l’emploi des travailleurs occasionnels et demandeurs d’emploi et relèvement du plafond d’exonération totale de 1,20 Smic à 1,25 Smic

Amendement CF16 de M. Fabrice Brun.

Mme Josiane Corneloup (DR). Cet amendement a pour objet de maintenir le système spécifique d’exonération de cotisations et contributions sociales patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels et de demandeurs d’emploi du secteur agricole. La baisse des allègements généraux engendrerait une hausse du coût du travail de 39 millions d’euros pour les employeurs de CDD saisonniers dès l’an prochain, et 80 millions d’euros par an à partir de 2026. Ce serait donc contreproductif et provoquerait une nette dégradation de la compétitivité de la ferme France.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 4 modifié.

Après l’article 4

Amendement CF7 de M. Fabrice Brun

Mme Josiane Corneloup (DR). Les coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma) permettent à des agriculteurs de se procurer du matériel et de créer des emplois en temps partagé qu’ils n’auraient pas eu les moyens de financer seuls. Elles ne bénéficient pas de l’exonération TODE. Cet amendement vise à les y intégrer.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je demande le retrait de cet amendement. Je comprends le point de vue, mais l’objet des Cuma n’est pas tant la production que le partage d’investissements.

M. Emmanuel Mandon (Dem). J’ai déposé un amendement identique en commission des affaires sociales. Renvoyer les Cuma au partage d’investissements et à la mutualisation est un peu réducteur. Elles emploient aussi du personnel, même si cette mesure concernerait très peu de salariés. Les Cuma doivent être soutenues. C’est important pour notre agriculture, notamment en zone de montagne ou s’agissant des exploitations de petite taille.

Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Je comprends la volonté de notre collègue, mais l’objectif des Cuma est essentiellement de mettre en commun du matériel, pas du personnel. Il n’est donc pas cohérent de leur ouvrir le dispositif TODE. Par ailleurs, on nous dit que cette mesure concernerait très peu de monde, mais nous n’avons pas d’estimation de son coût. Je ne voterai donc pas cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Article 5 : Cumul de l’exonération applicable aux jeunes agriculteurs et des taux réduits de droit commun des cotisations maladie et famille

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 non modifié.

Après l’article 5

Amendement CF23 de M. Fabrice Brun

Mme Josiane Corneloup (DR). La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) de 2024 a réformé l’assiette des cotisations sociales des travailleurs indépendants avec l’objectif, d’une part, de simplifier le calcul de ces cotisations sur la base d’une assiette unique, et d’autre part d’améliorer les droits à retraite des exploitants agricoles. Cependant, certaines spécificités fiscales agricoles n’ont pas été préservées. L’objet de cet amendement est donc de revenir à l’assiette originelle.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Vous proposez que l’exclusion d’assiette « tienne compte » de différents dispositifs, sans plus de précision. Je crois que le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Yannick Neuder, travaille à une rédaction plus robuste. Dans cette attente, je vous invite à retirer cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CF55 et CF56 de M. Philippe Juvin (discussion commune)

M. Philippe Juvin (DR). Le système de santé libéral tient en grande partie grâce aux médecins libéraux qui sont en cumul emploi-retraite. C’est le cas d’un quart des psychiatres, qui sont à la retraite mais continuent à travailler. Sans eux, le système ne fonctionne pas.

Jusqu’ici, les médecins qui travaillaient en cumul emploi-retraite continuaient à cotiser pour la retraite sans que cela leur ouvre de nouveaux droits. Il y a deux ans, nous avions fait passer dans le PLFSS une disposition pour les exonérer de ces cotisations retraite. Puis le 49.3 était passé par là et avait mis deux conditions : c’était seulement pour 2023, et les médecins ne devaient pas gagner plus de 80 000 euros par an. Sachant que la médiane est à 90 000 euros, cela excluait de fait la plupart de ceux qui souhaitaient travailler en cumul emploi-retraite.

Mes deux amendements visent à pérenniser la mesure, en supprimant la limite de 2023, et à supprimer le plafond de 80 000 euros qui exclut plus de la moitié des médecins. Aujourd’hui, 10 % de l’ensemble des médecins libéraux sont en cumul emploi-retraite et l’on sait bien, dans nos circonscriptions, les difficultés qui se posent lorsqu’un médecin part à la retraite.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis favorable aux deux amendements.

M. Matthias Renault (RN). Nous avons déposé une proposition de loi précisément sur ce sujet. Nous serons donc favorables à cet amendement. Je précise que, selon ce que la direction de la sécurité sociale nous a indiqué en audition, le dispositif n’a été prévu que pour une année car la nouvelle réforme des retraites ouvrait des droits nouveaux à compter de 2024 et avait donc vocation à s’y substituer.

Je note l’avis favorable du rapporteur, car il y avait une ambiguïté dans le discours de politique générale de Michel Barnier, qui se disait ouvert à une évolution du cumul emploiretraite sans en préciser les modalités.

La commission adopte l’amendement CF55.

En conséquence, l’amendement CF56 tombe.

Article 6 : Réforme des allègements généraux de cotisations patronales

Amendements de suppression CF3 de M. Charles Sitzenstuhl, CF25 M. Mathieu Lefèvre et CF151 de Mme Christine Loir

M. Charles Sitzenstuhl (EPR). Nous arrivons à un article très inquiétant du PLFSS. Le groupe Ensemble pour la République a été le premier à alerter sur l’effet néfaste des hausses de charge ici prévues.

Depuis sept ans, avec Emmanuel Macron, nous avons tout fait pour aider les entreprises, pour augmenter la quantité de travail, pour aider les chefs d’entreprise à recruter et à revaloriser les salaires. Cette politique a produit de nombreux effets, dont une baisse du chômage inédite depuis trente ans.

L’article 6, comme l’augmentation de l’impôt sur les sociétés (IS), remet en cause la politique de l’offre et met en danger les acquis économiques. J’en demande donc la suppression.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). C’est une constante depuis trente ans : augmenter le coût du travail détruit mécaniquement de l’emploi compte tenu de la structuration de notre économie. Même François Hollande et la gauche avaient commencé à en baisser le coût avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Il est donc incompréhensible que l’actuel gouvernement augmente le coût du travail.

Nous sommes le quatrième pays au coût du travail le plus élevé parmi les membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et le deuxième en matière de cotisations patronales. Par ailleurs, l’augmentation des allègements de charges depuis 2017 est essentiellement liée à la hausse du Smic. Si celui-ci n’était pas indexé, l’augmentation des charges serait bien moindre. Ce sont 50 milliards d’euros de recettes sociales et 50 milliards d’euros de recettes fiscales qui ont pu être obtenues grâce à cette politique.

J’ai reçu de nombreux messages d’entrepreneurs – pas des grandes entreprises qui gagnent un argent mirobolant, mais des pressings, des commerçants, des artisans, des TPE et des PME. Faisons très attention et, surtout, ne touchons pas au coût du travail.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous proposons également de supprimer cet article qui est présenté sans étude d’impact, dans la précipitation la plus totale, après plusieurs décennies de politique de baisse des charges sur les emplois les moins qualifiés et ayant le moins de valeur ajoutée.

En revanche, on ne peut pas laisser dire aux députés Ensemble pour la République que ce sont eux qui ont prévenu les Français du danger d’un dispositif qu’ils ont eux-mêmes conçu au gouvernement, puisqu’il est issu d’une commande d’Élisabeth Borne confirmée par Gabriel Attal. Nous sommes heureux de savoir que les députés macronistes ne soutiennent pas leurs deux derniers Premiers ministres dans leur effort pour annuler la politique des trente années précédentes…

Bref, tout cela est ridicule. La vérité est que vous n’assumez pas l’absurdité de vos politiques. Le vrai problème, c’est la trappe à bas salaires. Un récent rapport de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques montre que l’employeur ne doit pas combler 500, mais 700 euros pour sortir ses salariés du Smic. C’est le Frankenstein monstrueux que vous avez créé, qui fait que près de 20 % des salariés français sont bloqués au plus bas des salaires, nourrissant beaucoup de frustration légitime et d’injustice sociale. Il faut y travailler avec les partenaires sociaux – mais vous en êtes incapables, puisque vous êtes incapables d’être d’accord avec d’autres personnes que vous-mêmes !

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. J’aboutis sur ce point à la même conclusion que la commission des affaires sociales : nous manquons de précisions sur l’impact des dispositions proposées par le Gouvernement. Or, pour bien légiférer, nous ne pouvons pas avancer à l’aveugle.

Se pose aussi la question de l’articulation de ce qui est proposé avec des dispositifs dérogatoires comme ceux de la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM) ou les exonérations TODE.

En tout état de cause, nous devons conserver l’ambition de réformer le dispositif existant pour éviter les trappes à bas salaires, adoucir la pente des exonérations, ajuster les points de sortie et maîtriser le coût des exonérations. En somme, il faut faire attention à ne pas augmenter le coût du travail, tout en gardant nos comptes sociaux sous maîtrise.

Yannick Neuder et le Gouvernement travaillent à une nouvelle rédaction en vue de la séance. Dans cette attente, je donne un avis favorable à ces amendements.

M. le président Éric Coquerel. J’appelle pour ma part à voter contre.

Deux questions nous opposent en matière de politique économique. D’abord, je ne connais pas le coût du travail, mais son prix. Ensuite, ce que vous appelez des charges et des cotisations sont du salaire socialisé. Après la Seconde Guerre mondiale, il a été décidé qu’une part des salaires serait socialisée, à la fois par les cotisations sur les salariés et par les cotisations patronales, pour assurer la protection sociale. Vouloir aider les entreprises au moyen de la baisse de cotisations a entraîné un financement du régime de sécurité sociale par des recettes fiscales, avec les inconvénients que l’on observe. Une fois cette politique enclenchée, il est difficile d’en sortir, à cause de ses effets de seuil qui peuvent effectivement devenir des trappes à bas salaires. Cet effet pervers devrait nous amener à revoir complètement le dispositif. Si aide aux entreprises il doit y avoir, ce qui peut être nécessaire, il convient de la prendre sur le budget de l’État et non de jouer sur les comptes sociaux, qui sans cela pourraient s’équilibrer, comme le montre l’AgircArrco.

Ce sont deux philosophies qui s’affrontent. C’est la raison pour laquelle, même si cet article 6 ne va pas assez loin à mon sens dans la remise en question des exonérations, je m’opposerai à ces amendements de suppression.

M. Philippe Juvin (DR). Nous devons être prudents. D’abord, le pays a besoin de stabilité fiscale. Changer la règle en permanence désincite les investisseurs à venir en France.

Ensuite, le coût du travail est une charge pour les entreprises. Or quand on augmente la charge de l’entreprise, directement ou indirectement, celle-ci répercute toujours ses coûts, soit sur les consommateurs en augmentant ses prix, soit sur les salariés en n’embauchant pas, en n’augmentant pas les salaires ou en licenciant. C’est une règle absolue. Il n’y a pas d’argent magique.

M. Thomas Cazenave (EPR). Qu’on l’appelle hausse du coût ou du prix du travail, l’effet est le même ! Il est mécanique et documenté : l’augmentation du coût ou du prix du travail détruit des emplois – y compris des emplois sans concurrence internationale.

Monsieur Tanguy, notre groupe n’a jamais défendu une proposition de hausse du coût du travail. Le rapport Bozio-Wasmer commandé par Élisabeth Borne avait un objectif : « désmicardiser », et non faire des économies. C’est pourquoi nous proposerons une réforme structurelle de l’étalement de charges, et en aucune manière des économies qui seraient une remise en question de la politique que nous menons depuis plus de sept ans.

M. Nicolas Sansu (GDR). Je m’étonne de ce que ces amendements de suppression viennent du socle gouvernemental. C’est ubuesque ! Le Gouvernement propose un article 6 pour revenir sur des exonérations de cotisations sociales pour un montant de 5 milliards d’euros– sur 80, je le rappelle – mais le bloc dit central veut le supprimer !

La multiplication des exonérations de cotisations sociales a-t-elle entraîné un mieux vivre et une amélioration du pouvoir d’achat ? Non. Les études menées par l’Institut des politiques publiques ou par nos collègues Marc Ferracci et Jérôme Guedj montrent que certaines ne sont utiles ni à l’emploi, ni à l’amélioration du pouvoir d’achat. C’est problématique de ne pas le voir. Nous voterons contre ces amendements.

M. François Jolivet (HOR). À titre personnel, je voterai contre la suppression de l’article 6.

Le partage opéré par le Conseil national de la résistance se fondait sur l’idée que la famille et la santé devaient reposer sur les familles et les entreprises, tandis que les impôts d’État ne devaient financer que les services publics et les forces armées. Depuis une trentaine d’années, on fait passer de l’argent du budget général vers celui de la sécurité sociale : il ne faut pas s’étonner d’avoir moins de services publics ! Qui plus est, les conquêtes sociales ont entraîné des déséquilibres structurels non financés, et l’on compte sur le budget de l’État pour le faire. Ainsi, il faudrait que le budget de l’État finance les augmentations de salaire. C’est d’ailleurs déjà le cas, avec la prime d’activité : par ce dispositif, l’État compense l’insuffisance de l’employeur vis-à-vis de son salarié – lequel oublie souvent qu’il peut le quitter, en situation de plein emploi, pour aller travailler chez quelqu’un qui pourrait le payer mieux.

Le Gouvernement a peut-être besoin de ressources complémentaires, mais cet article va dans le bon sens, car je suis pour l’étanchéité totale entre le PLFSS et le budget général de l’État.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Cette discussion rapide est l’occasion de revenir sur un paradoxe. Le coût du travail et le prix du travail ne sont pas la même chose. La différence, c’est la mondialisation. À partir du moment où vous avez ouvert le marché français et européen aux quatre vents, où vous avez exposé les salariés les moins formés et les emplois avec le moins de valeur ajoutée à la concurrence de pays qui pratiquent quasiment l’esclavage, avec des conditions de travail indignes et l’exploitation de la misère et des ressources écologiques, oui, vous avez transféré dans l’entreprise le conflit entre coût et prix du travail dont nous devrions être protégés par nos frontières. Les entrepreneurs, qui aimeraient payer mieux leurs salariés, et les salariés, qui voudraient percevoir un salaire juste, sont en conflit alors qu’ils devraient être unis contre cette concurrence déloyale. Et qui a organisé cette concurrence déloyale ? Pas les Insoumis certes, mais les socialistes, les Verts, le marché unique européen, les traités de libre-échange ! J’ai eu un débat avec Ségolène Royal sur l’ouverture du marché européen au pays de l’Est, à la Bulgarie et à la Roumanie, où les salaires n’ont pas augmenté depuis vingt ans et se montent à 300 ou 400 euros par mois !

Oui, nous aimerions que le travail ait un prix mais malheureusement, à cause des socialistes et des Verts, il a un coût.

M. le président Éric Coquerel. C’est la raison pour laquelle un amendement a été proposé sur la taxe kilométrique aux frontières de la France, avec des critères écologiques et sociaux – pour lequel vous avez d’ailleurs voté.

La commission adopte les amendements, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 6.

En conséquence, les amendements CF88 de M. Damien Maudet, CF90 de Mme Élise Leboucher, CF26 de M. Mathieu Lefèvre et CF143 de M. Jean-Philippe Tanguy tombent.

Article 7 : Rationalisation des exonérations de cotisations sociales pour les contrats d’apprentissage, les entreprises d’armement maritime, les jeunes entreprises innovantes et les jeunes entreprises de croissance

Amendement de suppression CF34 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je demande le retrait de cet amendement. Sur la forme, la suppression sèche d’un article empêche le débat. Surtout, il est dommage de supprimer l’article 7 sans distinguer les trois dispositifs visés, dont certains nécessitent effectivement encore un peu de travail.

L’amendement est retiré.

Amendements identiques CF27 de M. Mathieu Lefèvre et CF96 de Mme Zahia Hamdane

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Si l’on croit dans les vertus de l’apprentissage, on ne commence pas à le taxer ! Je m’oppose à l’assujettissement aux prélèvements sociaux des indemnités que perçoivent nos apprentis. Autant je soutiens les mesures budgétaires difficiles qui sont proposées, autant cette mesure est une mauvaise manière faite à des gens qui sont peu payés.

M. Jérôme Legavre (LFI-NFP). L’assujettissement des apprentis à la CSG et à la CRDS serait particulièrement injuste : sur un salaire moyen de 1 042 euros par mois, on leur prendrait 24 euros par mois ! On prend à ceux qui touchent le moins, mais on ne touche pas les aides aux entreprises. Pourtant, elles représentaient quasiment 25 milliards d’euros pour l’apprentissage en 2023. C’est une aubaine formidable pour les employeurs, qui sont littéralement arrosés d’aides publiques. Les plus grandes entreprises recourent aux apprentis, sans les conserver, alors même qu’elles envisageaient d’embaucher. Bref, cela ne coûte rien aux employeurs mais très cher aux finances publiques, en débouchant peu souvent sur de l’emploi. Une autre solution consisterait à supprimer les exonérations de cotisations qui coûtent si cher à notre sécurité sociale.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Le principe de la CSG est d’être générale. En outre, ces amendements créent une inégalité. En effet, les stagiaires sont assujettis à des prélèvements sociaux dès que leur gratification dépasse le minimum légal, soit 15 % du Smic, tandis que les salariés en sont redevables dès le premier euro de rémunération. En faisant droit à ces amendements, on permettrait aux apprentis – notamment ceux qui poursuivent des études supérieures – de se constituer des droits sociaux à la retraite et au chômage sans la moindre participation.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). C’est la situation qui existe déjà et il n’y a pas de rupture d’égalité ! Mon amendement n’en créera donc pas.

La commission adopte les amendements.

Amendement CF28 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Le statut de jeune entreprise innovante a permis l’émergence de nombreux champions français. Il crée de l’emploi et incite à l’investissement, pour un coût assez modique pour les finances sociales. Faisons attention à ne pas casser ce qui fonctionne. Nous devons à tout prix préserver les outils qui permettent le déploiement d’entreprises innovantes.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Cet avantage social est disproportionné par rapport aux allègements généraux en vigueur, et l’objectif de l’article 7 est de recentrer la politique de soutien à l’innovation.

Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Il faut de la cohérence dans notre politique, et de la lisibilité. Toutes les entreprises sont assujetties aux cotisations sociales et je ne vois pas pourquoi les jeunes entreprises innovantes continueraient à en être exonérées. Bien sûr, il faut les soutenir, mais elles bénéficient d’autres dispositifs. Le socle de cotisations sociales doit être équivalent partout.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Pour être cohérent, si l’on a refusé l’augmentation généralisée du coût du travail à l’article 6, il faut refuser à l’article 7 l’augmentation spécifique du coût du travail pour les jeunes entreprises innovantes ! Cela ne peut se faire à géométrie variable.

Si nous n’étions pas au quatrième rang de l’OCDE en termes de coût du travail et au deuxième en termes de taux de cotisations patronales, je serais d’accord avec vous. Mais si cette exonération spécifique existe, c’est d’abord parce que le coût du travail est trop élevé et dissuade la création d’entreprises innovantes. Il faut la préserver.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je suis d’accord avec Mme Dalloz. Une entreprise un peu ancienne peut être innovante. Des artisans et des commerçants peuvent aussi l’être. On crée une catégorie à part, mais le monde n’est pas ainsi. On parle beaucoup des start-up, mais d’autres entreprises peuvent rebondir et devenir des formes de start-up innovantes.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 modifié.

Après l’article 7

Amendement CF29 de M. Mathieu Lefèvre.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). C’est un amendement d’appel, que je vais retirer. Dans le PLF et le PLFSS, certains seuils préjudiciables à l’économie française ne sont pas revalorisés. Ne pas revaloriser le seuil d’entrée dans la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) pour les petites et moyennes entreprises, par exemple, est une hausse déguisée du coût du travail. Je comprends que nous le fassions, pour des raisons financières, mais je rappelle que les impôts et taxes frappant les acteurs de production sont cinq fois plus élevés que chez nos voisins allemands, ce qui n’est pas sans incidence sur l’emploi.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement CF162 de M. Philippe Brun.

Amendement CF199 de M. Damien Maudet

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Cet amendement vise à supprimer la récupération sur les successions des sommes allouées au titre d’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa). Cette allocation ponctionne l’héritage des bénéficiaires, d’où une incitation à ne pas y recourir. Elle pénalise les retraités modestes qui ont pu acquérir leur logement à une époque où la propriété immobilière était plus accessible. Quelle hypocrisie de vouloir récupérer les sommes versées en minimum vieillesse sur des héritages modestes pendant que 0,1 % des héritiers reçoivent en moyenne 180 fois l’héritage médian !

S’il est difficile à établir, le niveau de non-recours est régulièrement évalué à plus de 30 %, et une enquête de la Caisse nationale d’assurance vieillesse faisait du recouvrement l’une des premières causes de cette situation. Cet amendement vise donc à assurer aux plus âgés de nos concitoyens leur droit à la subsistance et à la dignité.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. De nombreuses mesures sont déjà venues assouplir ce principe : la récupération sur succession ne peut intervenir sur la part de succession attribuée au conjoint ou à une personne âgée ou invalide à la charge de l’allocataire qu'au décès de ce dernier. L’équilibre issu de la LFSS de 2024 semble satisfaisant, puisque depuis le 1er janvier, la récupération sur succession n’est opérée que si l’actif net est supérieur à 105 300 euros en métropole et à 150 000 euros dans les départements et régions d’outre-mer.

Du point de vue politique, je peine à comprendre votre amendement. Vous dites toujours qu’il faut taper dans les successions, au motif qu’il n’y a pas de raison de laisser cet argent à des gens qui ne le mériteraient pas, pour reprendre vos termes, mais là, vous empêchez de récupérer une part de solidarité qui a bénéficié à la famille.

Pour ces raisons, structurelles et politiques, avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). C’est un bon amendement, que nous avions déposé puis retiré, ce que je regrette : je n’aurais pas dû faire confiance au Gouvernement, une fois de plus ! Il nous avait indiqué qu’il réfléchirait à améliorer le dispositif, mais il n’y a rien.

Votre réponse m’étonne, monsieur le rapporteur pour avis, car j’ai connaissance de plusieurs cas d’enfants en succession directe dont la maison a été confisquée pour récupération sur l’héritage. Dans une commune modeste, un héritier en situation de handicap est expulsé de sa maison, qui ne vaut que 30 000 euros, car elle est confisquée pour récupérer l’Aspa. Soit je ne comprends pas votre réponse, soit il y a un problème d’information de l’administration.

M. David Amiel (EPR). La récupération sur succession ne vise, par définition, pas la personne qui a bénéficié de l’Aspa mais la famille qui en hérite. La question doit s’apprécier en fonction des ressources de cette dernière. Les abattements sur les successions vont jusqu’à 100 000 euros. Nous discuterons en séance, dans le cadre de la première partie du PLF, de l’opportunité de les revoir à la hausse. Ne confondons pas les sujets.

M. Charles de Courson (LIOT). Il existe effectivement un abattement par part de 100 000 euros. Le cas que cite M. Tanguy paraît donc impossible.

Quel est le produit des récupérations de l’Aspa pour l’État ?

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Nous allons vérifier.

M. Charles de Courson (LIOT). Je pense que ces cas sont rarissimes.

Mme Christine Pirès Beaune (SOC). Le cas décrit par M. Tanguy n’est pas possible, parce que l’Aspa n’est récupérable qu’avec un actif net de succession – une fois les dettes déduites – supérieur à 105 000 euros, par part.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Un mécanisme de protection existant déjà, l’amendement est infondé. Par ailleurs, savoir qui doit payer la solidarité, la chose publique ou une contribution de la famille, est un sain débat.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je partage la position du rapporteur pour avis. La récupération de l’Aspa ne concerne pas le défunt mais ses héritiers, et est très encadrée. En outre, la solidarité est prévue de longue date dans le code civil : les parents doivent s’occuper des enfants, lesquels doivent à leur tour aider leurs parents. Les équilibres sont fragiles, mais la solidarité doit aussi s’appliquer dans la famille.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF97 de M. Hadrien Clouet

M. Jérôme Legavre (LFI-NFP). Cet amendement vise à supprimer l’exonération de cotisations patronales sur les contrats d’apprentissage. J’ai parlé des montants exorbitants des aides publiques devant encourager le recours à l’apprentissage. Cela a ouvert un marché et créé un effet d’aubaine pour une série de centres de formation et d’écoles privées à but lucratif, pour des formations parfois très discutables.

Cela fait des décennies que j’entends dire que les exonérations de cotisations sociales sont un remède infaillible pour lutter contre le chômage. Au bout de trente ans, on peut dresser le bilan : nous sommes toujours dans une situation de chômage de masse, la précarité a explosé, avec 11,5 millions de pauvres, la sécurité sociale, dont on a tari les financements, est pillée et les hôpitaux publics sont à l’os ! Il est urgent d’inverser le cours des choses.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable pour cet amendement qui fragilise le dispositif actuel. Supprimer d’un coup toutes les exonérations liées à l’apprentissage pour toutes les entreprises provoquerait un carnage.

La commission rejette l’amendement.

Article 8 : Transferts financiers au sein des administrations de sécurité sociale

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 8.

Article 9 : Clarifier les modalités d’appel et de calcul des clauses de sauvegarde M et Z

Amendement CF53 de M. Philippe Juvin

M. Philippe Juvin (DR). Si la France connaît des pénuries de médicaments, c’est notamment parce que l’assurance maladie les paie moins que dans d’autres pays. En Allemagne, par exemple, le prix des génériques a été augmenté de 10 %.

Afin d’assurer une meilleure rentabilité des génériques et ainsi d’éviter les pénuries, cet excellent amendement vise à exonérer les génériqueurs de la clause de sauvegarde. Cette dernière est payée par l’ensemble des professionnels de la fabrication de médicaments et cela n’obérerait pas les recettes pour l’État.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. C’est un outil pertinent pour participer à la maîtrise de nos dépenses publiques. Avis favorable.

M. le président Éric Coquerel. Imputer la pénurie de médicaments à leur prix est, à tout le moins, partiel ! Je vous rappelle qu’il n’y a pas si longtemps, nous avons connu une pénurie de paracétamol, qui est pourtant rentable – mais certains le jugent moins rentables que d’autres médicaments qu’ils peuvent produire.

Augmenter la rentabilité des médicaments ne servira qu’à rémunérer un peu plus encore les actionnaires : réfléchissons plutôt à la création d’un pôle public du médicament, pour sortir les médicaments essentiels de la logique de marché.

M. Philippe Juvin (DR). La pénurie de médicaments est évidemment multifactorielle, mais les fabricants ont tendance à servir en premier ceux qui paient le mieux. Les Allemands l’ont bien compris ! Mon amendement a pour objectif d’inciter les génériqueurs à privilégier la vente de leurs produits à la France.

Mme Claire Marais-Beuil (RN). Il y a d’autres moyens de lutter contre la pénurie, comme la relocalisation des médicaments produits l’étranger – car c’en est bien là l’une des principales causes.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 9 non modifié.

TITRE II
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Article 10 : Compensation par l’État des pertes de recettes pour la sécurité sociale

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 10 non modifié.

Article 11 : Approbation, pour l’année 2025, des tableaux d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 11.

Article 12 : Objectif d’amortissement de la dette sociale et prévisions sur les recettes du Fonds de réserve pour les retraites et du Fonds de solidarité vieillesse pour 2025

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 12.

Article 13 : Liste et plafonds de trésorerie des régimes et organismes habilités à recourir à des ressources non permanentes et allongement de la durée des ressources non permanentes auxquelles l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale peut recourir

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 non modifié.

Article 14 : Approbation de l’annexe pluriannuelle dite « annexe A »

Amendements identiques CF128 de M. Damien Maudet et CF170 de M. Boris Vallaud

M. Jacques Oberti (SOC). Nous sommes inquiets des graves conséquences sociales de la réforme des retraites, décidée dans une logique purement comptable et passée en force par le Gouvernement. Contrairement à ce qui avait été promis, cette réforme, qui entrera en vigueur le 1er janvier, ne prend pas en compte la pénibilité et pénalise les femmes, qui devront, pour la plupart, travailler plus longtemps alors qu’elles sont déjà moins bien payées que les hommes – une inégalité contre laquelle nous nous battons.

Cet amendement vise à abroger le passage de 62 à 64 ans de l’âge légal de départ en retraite, qui, mécaniquement, allonge la durée de cotisation.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Pour les raisons déjà évoquées, avis défavorable.

Je rappelle que 37 milliards d’euros de dette ne peuvent être amortis faute de recettes – un montant qui pourrait atteindre 90 milliards d’euros à l’horizon 2027 si nous ne faisons rien. Abroger la réforme des retraites, c’est aggraver le déficit de 15 milliards d’euros par an à l’horizon 2032 : le système va exploser !

Alors qu’il y a de plus en plus de retraités et de moins en moins d’actifs, ceux qui prétendent améliorer la situation des retraités sans réformer le système par répartition mentent aux Français.

La commission rejette les amendements.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 14.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR L’EXERCICE 2025

TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES

Article 15 : Régulation des dépenses dans le champ conventionnel 

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 non modifié.

Article 16 : Extension du champ de l’accompagnement à la pertinence des prescriptions

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 16.

Article 17 : Améliorer l’efficience des dépenses de transports de patients 

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 non modifié.

Article 18 : Plafonnement des rémunérations des personnels non médicaux exerçant en intérim

Amendement CF188 de M. Hadrien Clouet

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Pour mettre fin à la précarité des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), cet amendement vise à les intégrer à notre système de santé, à travers un dispositif dédié.

Les médecins étrangers apportent une aide cruciale dans l'offre de soins. Ils représentaient 12,5 % des médecins en activité en France en 2023, contre 7,1 % en 2010. Ils comptent pour 20 % des effectifs des chirurgiens et 16,9 % des autres spécialistes. Principalement venus du Maghreb ou de Syrie, ces médecins apportent une aide particulièrement importante dans les départements où la densité médicale est faible.

Alors qu’ils sont essentiels à la garantie de notre contrat social et qu’ils ont, comme tous les soignants, participé à l’effort de crise face au covid-19, ces médecins font face à des difficultés administratives croissantes pour pouvoir exercer dignement. C’est une véritable injustice pour eux, pour l’ensemble des soignants et pour tous nos concitoyens.

Dans un souci d’économies, nombreux sont les services hospitaliers à recourir à des Padhue, payés en moyenne 1 800 euros, plutôt qu’à des intérimaires, qui demandent des rémunérations pouvant aller jusqu’à 12 000 euros. Un chef de service témoignait ainsi dans Le Figaro que trois des cinq médecins de son service étaient étrangers et que, faute d’autre option, il envisageait d’en recruter un quatrième pour pallier des départs en retraite vieux de deux ans.

Cette situation n’est plus acceptable. L’amendement vise donc à reconnaître le rôle essentiel des Padhue dans le fonctionnement de notre système de santé en leur y accordant la place qu’ils méritent.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Le recours aux Padhue est une solution de court terme, qui ne règle en rien le problème structurel de la pénurie de soignants. En outre, dans certains territoires, comme à Mayotte, il existe des doutes sur l’équivalence des diplômes présentés par les médecins étrangers, ce qui pose un problème pour la sécurité des patients. Le dispositif pose aussi un problème d’égalité entre les soignants. Pour toutes ces raisons, avis défavorable.

M. Philippe Juvin (DR). Les Padhue sont indispensables au bon fonctionnement du système de santé en France. J’ai d’ailleurs appelé plusieurs fois, dans l’hémicycle, à réformer le mode de sélection de ces médecins et les modalités d’accueil, afin qu’on en accueille davantage tout en garantissant le niveau de leurs connaissances – car les études de médecine, pour le dire aimablement, ne sont pas du même niveau dans tous les pays.

Néanmoins, l’amendement ne permet ni de mieux contrôler les connaissances – car c’est bien là le fond du sujet – ni de proposer de meilleures conditions d’accueil aux médecins étrangers. J’y suis donc défavorable.

Mme Christine Pirès Beaune (SOC). D’autres que moi ont dû rencontrer, à leur permanence, des directeurs d’hôpitaux ou des médecins étrangers qui exercent depuis plusieurs années dans nos hôpitaux, où ils donnent toute satisfaction, et qui demandent aujourd’hui à être régularisés ! Ne pourrait-on pas réfléchir, de manière transpartisane, à un moyen pour les intégrer à notre système de santé, où ils officient depuis parfois plus de cinq ans, pour les sortir enfin de la précarité ?

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Inutile d’aller jusqu’à Mayotte, monsieur le rapporteur pour avis : de nombreux services des hôpitaux d’Île-de-France ne pourraient tourner sans les médecins étrangers. Vous prétendez que c’est une solution temporaire, de court terme, mais certains soignent nos concitoyens dans l’ensemble du territoire depuis plus de cinq ans ! À compétences égales, ils sont pourtant malheureusement payés bien moins que les médecins français. Il faut absolument régler cette situation et leur offrir la reconnaissance qu’ils méritent pour leur engagement au service de la santé des Françaises et des Français.

M. François Jolivet (HOR). Dans ma circonscription, certains Padhue travaillent à l’hôpital depuis sept ans, pour un salaire de 1 700 euros. Pourquoi ne pas leur permettre d’exercer aussi en dehors d’un centre hospitalier ? Ma circonscription ne comptera bientôt plus que 56 généralistes pour 200 000 habitants, mais le président de la Conférence des doyens de médecine, lui, estime qu’il est là pour former des médecins, pas pour répondre à la demande de soins. Personnellement, je préfère être soigné par un médecin étranger jugé apte à exercer depuis sept ans à l’hôpital sous l’autorité de médecins formidables, fût-il jugé incompétent par l’ordre des médecins, que pas soigné du tout !

Ce double discours est d’une duplicité incroyable. Sachez que les territoires qui manquent de médecins sont tout prêts à accueillir ces smicards de la médecine.

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Oui, c’est vraiment d’une hypocrisie terrible. Si vous aviez pris un décret reconnaissant les qualifications d’un millier de praticiens étrangers présents en France et les autorisant à exercer, nos hôpitaux n’auraient pas été obligés, cet été, de fermer leurs urgences la nuit et le week-end, faute de professionnels de santé !

Pour faire face à la pénurie de médecins, plutôt que de faire travailler les médecins retraités en échange d’une exonération d’impôt sur le revenu, comme le propose le Rassemblement national, reconnaissons les qualifications des médecins étrangers et cessons de les surexploiter pour un salaire de misère. Il y a urgence !

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 18 non modifié.

Après l’article 18

Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette successivement les amendements CF303 et CF302 de M. Charles Rodwell

Amendements CF305, CF307 et CF308 de M. Jean-Didier Berger, CF71 de M. Philippe Juvin et CF306 de M. Jean-Didier Berger (discussion commune)

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Mes quatre amendements concernent les délais de carence. Je préconise que le délai de base soit de trois jours, dans le public comme dans le privé, mais je propose des dispositifs différents. On pourrait d’abord, à partir de ce minimum de trois jours, augmenter d’un jour au fur et à mesure des arrêts maladie si ceux-ci sont récurrents. Depuis 2017 en effet, le nombre d’arrêts maladie courts a explosé, entraînant la désorganisation des entreprises, des collectivités et des associations, ainsi que des milliards d’euros de dépenses supplémentaires qui doivent être assumées par tous les Français. Le deuxième système serait plus proche d’un bonus-malus et permettrait, pour ceux qui sont rarement malades, d’abaisser la carence à un ou deux jours.

M. Philippe Juvin (DR). C’est un sujet à la fois important et complexe. L’importante hausse du montant total des indemnités journalières, passé de 8 milliards d’euros en 2017 à 18 en 2024, doit nous interroger : la population est-elle simplement beaucoup plus malade qu’avant, ou les conditions de travail beaucoup plus difficiles, entraînant davantage de souffrances ? La réponse est forcément complexe.

Nous proposons pour notre part d’aligner le nombre de jours de carence entre public et privé ainsi que de créer un premier jour de carence d’ordre public, qui ne serait indemnisé ni par la sécurité sociale, ni par les mutuelles, ni par les conventions collectives. Cela ne résoudra pas le problème – nous devons aussi mener une réflexion sur les conditions de travail – mais c’est un début.

Mme Marianne Maximi (LFI-NFP). Ce que vos propos révèlent, c’est que vous ne connaissez rien aux conditions de travail des salariés des entreprises et des agents des services publics ! Dégradation des conditions de travail, perte de sens, manque de moyens : les causes de souffrance au travail se multiplient, et cette souffrance devient chronique. Je l’ai moimême constaté dans le secteur de la protection de l’enfance.

Arrêtez de penser que les médecins délivrent des arrêts de travail de complaisance à des salariés qui n’auraient simplement pas envie d’aller travailler. Quel mépris pour nos professionnels médicaux ! Les médecins font leur travail sérieusement. S’ils prescrivent un arrêt, c’est que l’état de santé de leur patient le justifie. Vous avez vraiment une vision incroyable de la société.

Mme Christine Pirès Beaune (SOC). Nous cherchons tous des économies. Permettez-moi de prendre l’exemple d’un salarié qui s’est blessé au genou. Son médecin lui a prescrit une IRM et une radio. Délai : plus d’un mois. Comme il passe ses journées à marcher à l’atelier, il est contraint de rester en arrêt maladie en attendant ce rendez-vous alors que son souhait, c’est de reprendre le boulot le plus rapidement possible !

Plutôt que d’augmenter le nombre de jours de carence, donnons aux hôpitaux davantage de moyens pour réaliser le plus vite possible les examens prescrits aux patients.

M. Philippe Lottiaux (RN). Il y a sans conteste des abus. Il faut les combattre, car la multiplication des arrêts pose des problèmes, à la fois pour la gestion des personnels et en matière financière. Les patients souffrant d’une pathologie lourde ou d’une affection de longue durée (ALD) susceptible de nécessiter plusieurs arrêts maladie dans l’année seront-ils concernés par le relèvement du nombre de jours de carence ? Dans ce cas, il ne s’agit pas d’un abus.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Toutes les pathologies lourdes sont évidemment exclues du dispositif.

J’entends vos remarques, mais n’oubliez pas que la multiplication des arrêts pèse lourdement sur la solidarité, car elle occasionne aussi plus de souffrance pour ceux qui restent au travail pendant que leurs collègues sont arrêtés, et pour les usagers, qui pâtissent de services publics dégradés. Si un agent territorial spécialisé des écoles maternelles (Atsem) est arrêté, qui s’occupe des enfants ? Pensez-vous vraiment que les collectivités peuvent les remplacer au pied levé, surtout en cas d’arrêts maladie successifs ?

Au final, tous les Français paient les pots cassés, assurés sociaux comme entreprises ! Les indemnités journalières ont un coût, nous devons le partager le plus équitablement possible. C’est tout l’objet de mes amendements.

M. Philippe Juvin (DR). Vous n’avez pas le monopole de la connaissance du monde travail, madame Maximi, arrêtez de dire qu’on n’y connaît rien ! Il se trouve que vous donnez des leçons de morale à la mauvaise personne : je suis de garde à l’hôpital tout le weekend prochain. Venez, je vous montrerai comment ça fonctionne !

De façon générale, il n’y a aucune raison de prévoir un nombre de jours de carence différent pour le public et le privé. Nous proposons donc d’aligner les délais à trois jours.

La commission rejette l’amendement CF305, puis adopte l’amendement CF307. En conséquence, les amendements CF308, CF71 et CF306 tombent.

Article 19 : Lutter contre les pénuries de produits de santé

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 non modifié.

Article 20 : Pertinence des dispositifs médicaux numériques pris en charge par l’assurance maladie

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20 non modifié.

Article 21 : Modification des paramètres de l’expérimentation relative au modèle de financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 21 non modifié.

Article 22 : Aligner le mode de calcul de la pension de retraite de base des non-salariés agricoles sur le régime général

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 22 non modifié.

Article 23 : Décalage de la revalorisation des prestations d’assurance vieillesse au 1er juillet

Amendements de suppression CF142 de M. Damien Maudet, CF149 de Mme Christine Loir, CF178 de M. Philippe Brun et CF297 de M. Jean-Didier Berger

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Nous proposons de revenir sur l’une des mesures les plus honteuses et les plus injustes de ce budget : la désindexation des retraites pour six mois. Le pays compte 2 millions de retraités pauvres, qui galèrent tous les mois pour se nourrir et se loger alors qu’ils ont bossé toute leur vie. Vous volez aux gens deux années de repos avec la réforme des retraites, mais ça ne vous suffit pas : vous continuez à les faire galérer, vous leur faites vivre un enfer ! Tout ça pour 4 milliards d’euros, que vous préférez prendre dans leurs poches plutôt que dans celle des patrons. Pire : en supprimant l’article 6, qui prévoyait de limiter un tout petit peu les exonérations de cotisations sociales, vous avez aggravé le déficit de 5 milliards !

C’est toujours la même histoire : vous prenez aux plus pauvres pour donner aux plus riches. Bien des solutions permettraient de ne plus avoir de pensions sous le seuil de pauvreté et de s’assurer que ceux qui ont travaillé toute leur vie et qui peuvent justifier d’une carrière complète ont une pension décente, supérieure à un Smic revalorisé. Mais pour ça, il faut accepter de prélever des cotisations sociales. Quand il manque 80 milliards d’euros de recettes chaque année parce que vous avez décidé d’enrichir les grandes entreprises à coups d’exonérations, c’est forcément plus compliqué !

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous l’avons dit lors de la discussion générale, nous sommes favorables à l'indexation systématique des pensions des retraités, en particulier la pension de base de la sécurité sociale, qui est, je le rappelle, plafonnée.

La désindexation des pensions, qui affecte durement nos compatriotes, est une mesure injuste à double titre. L’indexation est un devoir moral de la nation envers les retraités, qui ont cotisé toute leur vie : la désindexation est vécue comme une trahison, d’autant qu’elle touche le plus les pensions les plus modestes. Dans le même temps, on apprend que l’AgircArrco a, au contraire, décidé d’indexer les pensions complémentaires, de fait augmentées de 1,6 %, afin de garantir le niveau de vie des assurés.

La loi garantit l’indexation des retraites. Pourquoi, chaque année, remet-on en cause une loi souverainement adoptée par le Parlement ?

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il est tout simplement injuste de prendre 4,5 milliards d’euros dans les poches des retraités modestes. Vous arguez de la nécessité de redresser les comptes de la sécurité sociale, mais dans le même temps, vous creusez le déficit de 5 milliards d’euros en refusant de réformer les allègements de cotisations patronales à l’article 6.

Le présent article frappera aveuglément les retraités, particulièrement les plus modestes, qui sont à la dizaine d’euros près. Le montant de la perte pourra s’élever à 218 euros, pour les retraités dont la pension de retraite atteint le Smic, alors qu’ils ont besoin de cet argent pour se nourrir et se loger – et que cet argent est immédiatement réinjecté dans l’économie.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Le contrat social qui nous lie avec ceux qui ont travaillé toute leur vie et la confiance qu’ils nous portent ne doivent pas être mis à mal. Cela créerait une période d’incertitude, néfaste pendant plusieurs années à l’investissement de nos concitoyens, à leur consommation et donc à la croissance.

La commission adopte les amendements, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 23.

En conséquence, l’amendement CF22 de M. Fabrice Brun tombe.

Article 24 : Améliorer l’indemnisation en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle et mieux prendre en compte le préjudice personnel

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 24.

TITRE II
DOTATIONS ET OBJECTIFS DE DÉPENSES DES BRANCHES ET DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES

Article 25 : Dotations des branches maladie et autonomie au fonds pour la modernisation et l’investissement en santé, de la branche autonomie aux agences régionales de santé, de la branche maladie à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et de la branche accidents du travail et maladies professionnelles au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante et au fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, transfert de compensation de la sous déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles et dépenses engendrées par les dispositifs de prise en compte de la pénibilité

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 25 non modifié.

Article 26 : Objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 26.

Article 27 : Fixation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que de ses sousobjectifs pour 2025

Amendement de suppression CF182 de M. Philippe Brun

M. Jacques Oberti (SOC). Cet article prévoit une augmentation de 3 % de l’Ondam pour 2025. Or, selon nos calculs, il faut déduire de ce taux 0,2 point de dépenses liées à la covid, 1,8 point à cause de l’inflation et 0,9 point puisque vous avez pris en compte dans l’Ondam la hausse de 4 points du taux de cotisation retraite pour les collectivités et les hôpitaux.

Ainsi, en 2025, la croissance réelle de l’Ondam ne sera que de 0,1 %, alors que la population augmentera de 0,3 %. Nous demandons la suppression de l’article 27 car nous refusons cette politique d’austérité.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Vous évoquez une logique austéritaire alors que l’Ondam croîtra en 2025. Ce n’est pas en supprimant cet article que vous réglerez les problèmes actuels.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF304 de M. Jean-Didier Berger

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Le Gouvernement prévoit une hausse des cotisations versées par les employeurs à la CNRACL. Je déposerai un amendement au PLF pour compenser les effets de cette hausse pour les collectivités locales et je défends le présent amendement pour compenser ses effets pour les établissements hospitaliers.

La commission adopte l’amendement.

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 27.

Article 28 : Objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 28 non modifié.

Article 29 : Objectif de dépenses de la branche vieillesse pour 2025

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 29.

Après l’article 29

Amendement CF287 de M. Louis Boyard

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Nous proposons de subordonner, d’ici trois ans, l’attribution d’aides financières publiques à l’absence de caractère lucratif des établissements d’accueil du jeune enfant.

Les récentes enquêtes sur les crèches privées dessinent un monde où le souci de rentabilité se substitue au souci de la qualité de l’accueil du jeune enfant. L’ouverture du secteur de la petite enfance au secteur privé, il y a vingt ans, a fait du jeune enfant un bien marchand, qui sert à enrichir les grands groupes.

Une poignée d’entre eux, détenus par des fonds d’investissement, déploie une stratégie prédatrice. Arrosées d’argent public, ces entreprises de crèche réduisent au maximum les coûts et favorisent ainsi la maltraitance. L’exigence de rentabilité nuit au bien-être de l’enfant. Elle est incompatible avec la promesse d’un service public de la petite enfance.

Le délai de trois ans que nous prévoyons permettra les adaptations nécessaires. Il correspond également à l’âge auquel les derniers enfants fréquentant des établissements marchands entreront à l’école.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. C’est une erreur d’attaquer les crèches privées. Vous vous targuiez tout à l’heure de votre expérience de terrain. Quant à moi, en tant que maire, je sais que ces structures démultiplient le nombre de places en crèche dans notre pays ; elles emploient les auxiliaires de puériculture et autres professionnels si recherchés.

Bien évidemment, il faut encadrer les crèches privées – nous y parvenons d’ailleurs très bien, dans le cadre des délégations de service public. Mais vous commettez une erreur d’analyse en vous attaquant de façon systématique à elles.

M. Emeric Salmon (RN). J’ai été contacté par les responsables d’une microcrèche rurale à Saint-Sauveur, en Haute-Saône, qui s’inquiétaient à la suite de la parution de l’enquête Les Ogres. Pourtant, les enfants y sont très bien, je peux en attester pour l’avoir visitée. Elle se développe d’ailleurs, avec une deuxième implantation, pour répondre à la demande des parents dans cette zone très rurale.

Même si une enquête doit être menée sur les problèmes mis au jour, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain, si je puis dire. Ne détruisons pas une filière indispensable, notamment dans le monde rural où les communes n’ont pas les moyens de financer des crèches publiques.

M. le président Éric Coquerel. Ces crèches privées sont indispensables faute d’un service public de la petite enfance et de crèches publiques. C’est de cela qu’il faut débattre.

Toutes les crèches privées ne sont certes pas concernées par les dérives, mais le scandale révélé par Les Ogres est de même ampleur que celui des Ehpad.

M. Philippe Juvin (DR). Il y a des brebis galeuses partout. Ce n’est pas parce qu’un accident médical se produit dans un hôpital public qu’on supprime l’hôpital public ! Le service public de la petite enfance peut être délégué à des personnes de droit public ou de droit privé ; le tout est de contrôler sa qualité. Cet amendement ne rend pas service au service public en voulant supprimer un service au public.

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Par idéologie, vous confondez secteur privé et finalité lucrative. Les associations loi 1901, qui relèvent du droit privé, ont pourtant un but non lucratif. Ce type de structures aussi doit être financé.

La commission rejette l’amendement.

Article 30 : Objectif de dépenses de la branche famille

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 30 non modifié.

Article 31 : Objectifs de dépenses de la branche autonomie

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 31.

Article 32 : Prévision des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires (Fonds de solidarité vieillesse)

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 32 non modifié.

Après l’article 32

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement CF37 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale modifiée.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

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La commission examine la proposition de loi visant à exonérer de l'impôt sur le revenu les médecins et infirmières en cumul emploi retraite (n° 263) (M. Matthias Renault, rapporteur).

M. Matthias Renault, rapporteur. Les difficultés d’accès aux soins constituent un problème mondial, comme l’a relevé l’Organisation mondiale de la santé. En France, le problème des déserts médicaux est bien connu, à tel point qu’un syndicat de médecins a estimé, durant les auditions, que « la France tout entière est devenue un grand désert médical ».

Cette situation résulte à la fois de politiques publiques anciennes, notamment le numerus clausus, dont les effets sont difficiles et longs à résorber, de difficultés propres à certains territoires, et du vieillissement de la population, qui accroît la demande de soins. La France est confrontée à une insuffisance de médecins et à une répartition géographique déséquilibrée des généralistes comme des spécialistes.

En pratique, 87 % du territoire est un désert médical, selon la classification des agences régionales de santé (ARS) établie sur la base de l’indicateur d’accessibilité potentielle localisée construit par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). Cet indicateur permet de distinguer dans chaque région des zones d’intervention prioritaire et des zones d’action complémentaire, qui bénéficient de mesures de soutien à l’installation et au maintien d’une activité médicale libérale.

Des mesures ont été prises pour renforcer la présence de professionnels de santé, avec notamment la loi Valletoux du 27 décembre 2023. S’il est trop tôt pour faire un premier bilan de ce texte, de nombreux concitoyens continuent d’être pénalisés quotidiennement et peinent à se soigner.

À la suite de la crise du covid, certains leviers ont été mobilisés, parmi lesquels le cumul emploi-retraite. Les motivations des médecins poursuivant une activité médicale après la retraite sont très diverses : raisons financières, attachement à la profession, souhait de transmettre ou au contraire absence de remplaçant, souci de la patientèle… Le cumul emploi-retraite est un outil efficace pour augmenter le nombre de médecins en activité, lesquels sont en outre reconnus et expérimentés. Toutefois, son développement est freiné par l’obligation de payer des cotisations, ainsi que l’impôt sur le revenu, sur le revenu qui en est tiré.

Une disposition déjà ancienne permettait aux médecins retraités qui poursuivent leur activité dans un désert médical de bénéficier d’une dispense d’affiliation et donc de cotisation à un régime complémentaire de vieillesse. La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) de 2023 est allée plus loin, en prévoyant une exonération temporaire de toutes les cotisations retraites pour l’année 2023. La LFSS rectificative de 2023 a ensuite permis que les cotisations retraites payées pendant le cumul emploi-retraite donnent lieu à de nouveaux droits à pension.

Ces incitations semblent avoir permis un rebond du cumul emploi-retraite des médecins. En 2024, celui-ci concerne ainsi 13 500 médecins libéraux, dont 43 % de généralistes, soit une augmentation de 12,3 % par rapport à 2018. Cette dynamique doit être poursuivie.

La présente proposition de loi propose ainsi d’exonérer d’impôt sur le revenu (IR) les médecins généralistes libéraux cumulant emploi et retraite. Cette mesure s’appliquera inévitablement à certains contribuables aisés. Toutefois, elle doit être comprise avant tout comme un levier pour augmenter l’offre de soins. Les représentants de la profession auditionnés ont tous considéré qu’elle pouvait contribuer à un choc d’attractivité pour le cumul emploi-retraite. Quant à son coût, il peut être maîtrisé. Nous l’estimons à environ 75 millions d’euros par an.

Nous proposons également d’exonérer d’IR les infirmières libérales en cumul emploiretraite. La régulation est plus étroite pour cette profession et la démographie est plus favorable. Il n’y a donc pas de « désert infirmier » en France – ou plutôt, pas encore : de nombreux signaux faibles, soulevés en audition, doivent nous alerter.

Les auditions ont également permis de conclure à la probable absence d’effet incitatif de la mesure pour les infirmières, métier dont la pénibilité, notamment physique, est bien supérieure au métier de médecin. Leur inclusion serait donc davantage une mesure de reconnaissance de l’utilité publique de celles qui choisissent de continuer à travailler après la retraite et du service qu’elles rendent à nos concitoyens. Le nombre d’infirmières actuellement en cumul emploi-retraite est peu élevé : environ 900.

Nous proposons donc ici une mesure de santé publique au coût maîtrisé qui rétablira l’égalité de traitement entre professions médicales libérales.

M. le président Éric Coquerel. Je voterai contre ce texte. La niche fiscale que vous proposez coûterait 450 millions d’euros en perte de recettes rien que pour les médecins actuellement en cumul emploi-retraite, et 20 à 40 millions pour les infirmiers.

Les finances sociales seront déjà mises à contribution en 2025 au profit des médecins généralistes, avec l’augmentation du tarif de la consultation à 30 euros – dont je me félicite par ailleurs.

Ce dispositif incite les médecins âgés à rester en activité par intérêt fiscal. Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne solution au problème des déserts médicaux, d’autant que vous n’établissez aucune distinction entre les zones bénéficiant d’une forte présence de professionnels médicaux et les zones sous-dotées.

Selon moi, il faut surtout financer l’université pour qu’elle accueille de nouveaux étudiants ; régulariser, dans une certaine mesure, les médecins étrangers ; améliorer les conditions de travail et réduire la charge de travail en développant l’exercice salarié en centre de santé. Il faudrait également envisager la création d’un corps de médecins fonctionnaires.

Quant aux infirmiers, le problème n’est pas que nous manquions de diplômés, mais que nombre d’entre eux aient renoncé à ce métier, à cause de l’insuffisance des revenus par rapport à la charge de travail. Il faut donc améliorer les conditions de travail et la rémunération, notamment pour les soignants hospitaliers.

Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Emmanuel Blairy (RN). Le manque de professionnels de santé se fait sentir de manière plus saisissante qu’ailleurs dans nos circonscriptions rurales, que je qualifie de « toundras médicales ». Le chiffre est stupéfiant : un rural vit deux ans et demi de moins qu’un urbain, à cause de l’éloignement des centres de décision et des centres de santé. À Bucquoy, dans ma circonscription, trois médecins généralistes partiront à la retraite en même temps, le 31 octobre prochain. Près de 4 000 patients, dont un grand nombre souffre d’affections de longue durée (ALD), n’auront donc plus de médecin généraliste. Je regrette que l’État, à travers les ARS, n’ait pas anticipé ce problème.

Comme l’écrivait Antoine de Saint-Exupéry, « Chacun est seul responsable de tous ». Avec ce texte, le Rassemblement national prend ses responsabilités dans la lutte contre les déserts médicaux. Marine Le Pen a rappelé nos lignes rouges à ne pas franchir sur le projet de loi de finances ; ce texte dessine en revanche une ligne bleu marine qu’il convient de suivre.

M. David Amiel (EPR). Je suis surpris par l’attitude du Rassemblement national. De même qu’il demande ou rejette, selon les jours, des hausses d’impôt massives, il arrive à donner des leçons de réduction des dépenses publiques tout en défendant le même jour deux propositions de loi, celle que nous examinons, qui coûterait 1 milliard, et celle devant abroger la réforme des retraites, qui dépasserait la dizaine de milliards. Chacun jugera de la cohérence de ces positions.

Par ailleurs, tout comme la proposition d’exonérer d’impôt sur les revenus les moins de 30 ans que le Rassemblement national a un temps soutenue, ce texte manifeste une méconnaissance complète des principes de progressivité et de ciblage des dispositifs fiscaux, tant en fonction du niveau de revenus que du lieu d’activité. Pour lutter contre les déserts médicaux, il faudrait pourtant concentrer les moyens publics sur ces zones.

Évidemment, il faut pouvoir s’appuyer davantage sur les médecins retraités pour traverser la période difficile qui nous sépare de l’arrivée sur le marché du travail des nouvelles générations formées grâce à la suppression du numerus clausus que nous avons voulue. Pour cela, nous disposons d’outils bien plus efficaces que celui proposé ici.

Je pense notamment à la retraite progressive que nous avons créée lors de la dernière réforme des retraites, qui permet d’ouvrir de nouveaux droits à pension dans le cadre du cumul emploi-retraite, ou aux aides à l’embauche d’assistants médicaux, pour décharger les médecins des tâches administratives. Les forfaits multiples doivent également être renforcés pour faciliter l’exercice médical dans certains territoires.

Mme Karen Erodi (LFI-NFP). Le Rassemblement national fait encore une fois la démonstration grandiose de son incompétence. L’exonération qu’il propose est à la fois fiscalement injuste, inefficace et socialement dangereuse. Rien qu’avec les médecins cumulant actuellement emploi et retraite, elle entraînerait une perte de recette de 450 millions par an pour l’État. Rappelons en outre que ces médecins bénéficient déjà, grâce à M. Macron, d’une exonération de cotisations sociales, alors que la rémunération des infirmières n’a pas été revalorisée depuis quinze ans. Ces disparités sont injustifiables, aussi proposerai-je une hausse de la tarification des actes infirmiers lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Surtout, alors que le Rassemblement national prétend défendre la retraite à 62 ans et la prise en compte des carrières difficiles et longues, il propose de faire travailler des infirmiers et infirmières jusqu’à 72 ans et des médecins jusqu’à 75 ans, main dans la main avec la Macronie, à l’origine de la loi Valletoux, qui favorise déjà le cumul emploi-retraite du personnel médical. La retraite est un droit, celui de se reposer après une carrière longue et difficile.

Le texte rate de surcroît sa cible, les déserts médicaux, puisqu’il exonère indistinctement tous les professionnels de santé au lieu de cibler les zones sous-denses ou rurales.

Une étude de la Drees montre d’ailleurs que les exonérations de cotisation sociale de la Macronie ont eu des effets d’aubaine, qui se sont concentrés sur les zones urbaines plutôt que les zones rurales.

Pour lutter contre les déserts médicaux, il faut réguler l’installation des médecins, favoriser la formation universitaire, supprimer le numerus clausus, régulariser les médecins étrangers. Le présent texte n’est qu’une arnaque, et La France insoumise votera contre.

M. Guillaume Garot (SOC). Même si je vous sais gré d’appeler notre attention sur la désertification médicale, monsieur le rapporteur, ce texte n’est que de la poudre aux yeux. En prétendant régler le problème de la désertification médicale avec cette niche fiscale, vous vous moquez du monde.

Les allègements de cotisations retraite votés dans la loi de finances de 2023 pour les médecins poursuivant une activité n’ont pas eu l’effet escompté. Ils ont surtout favorisé le maintien en activité de professionnels dans les zones les mieux dotées. Les exonérations tombent donc à côté du problème – d’autant que celle proposée ici coûterait plusieurs centaines de millions d’euros : ce n’est pas un bon usage des deniers publics.

Pour ces raisons, nous présenterons un amendement de suppression de l’article 1er.

Le vrai courage consiste à s’attaquer aux racines du problème. Pour cela, il faut parler de la formation des médecins, de la régulation à l’installation, des nouveaux modes d’exercice. Il faut en discuter avec l’ensemble des soignants. C’est ainsi que nous serons efficaces.

M. Philippe Juvin (DR). Il est fondamental de s’attaquer à la question du cumul emploi-retraite des médecins et des infirmiers. Un quart des psychiatres libéraux exercent actuellement dans ce cadre. Autrement dit, sans médecins continuant à travailler après leur retraite, il n’y a plus de système de santé.

En revanche, le coût du dispositif que vous proposez serait extrêmement élevé. L’Institut Montaigne l’évalue entre 819 millions et 1,09 milliard par an, soit plus de dix fois le montant que vous avez mentionné – et ce, uniquement pour les médecins. L’Institut relève en outre une possible difficulté constitutionnelle, car cette mesure entraînerait une rupture d’égalité devant l’impôt.

L’idée qui consiste à aider les soignants à continuer à travailler est bonne, mais le dispositif retenu n’est pas réaliste. Nous voterons contre cette proposition.

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Cette proposition de loi est aussi démagogique qu’inefficace.

Le cumul emploi-retraite des professions libérales bénéficie déjà d’exonérations de cotisations sociales. Vous prévoyez d’y ajouter une exonération d’impôt sur le revenu.

Quel effet ? Cette exonération n’est assortie d’aucune condition relative à la zone où est installé le médecin ou l’infirmier. C’est une première absurdité.

Quel coût ? La somme colossale de 1 milliard par an.

Quel ciblage ? Aucun, alors que de nombreux spécialistes retraités perçoivent une pension de 133 000 euros par an et font partie des 2 % de la population aux plus hauts revenus. Faut-il vraiment leur organiser une exonération d’impôt sur le revenu ?

J’insiste sur les incohérences du Rassemblement national. Vous voulez abroger le report à 64 ans l’âge de la retraite, mais vous voulez faire travailler tous les retraités. Vous êtes contre le financement des pensions par les cotisations, mais vous avez voté contre l’amendement proposé pour abroger la réforme des retraites en augmentant lesdites cotisations. Et dans le même temps vous êtes contre l’impôt sur le revenu, surtout pour les plus riches, contre la restauration de l’impôt de solidarité sur la fortune et contre la flat tax.

En résumé, vous ne défendez pas la sécurité sociale et vous souhaitez qu’elle soit financée par l’impôt, tout en proposant des mesures inefficaces et affreusement coûteuses. Vous êtes complètement aveuglés par votre libéralisme et par votre logique discriminante.

Pour mettre fin aux déserts médicaux, il est urgent de supprimer le numerus clausus, d’en finir avec Parcoursup, de former suffisamment de médecins, d’infirmiers et d’aides-soignants, de revaloriser les salaires, de développer les centres de santé – qui répondent à une forte demande d’exercice salarié – et de conditionner l’installation – en exigeant que ceux qui auront bénéficié d’une formation payée par l’État commencent leur carrière en exerçant pendant plusieurs années dans des centres de santé des zones où manquent les soignants.

M. Emmanuel Mandon (Dem). L’existence de déserts médicaux est un fait reconnu, même si la tension entre l’offre et la demande de soins est très inégale selon les territoires. Cela résulte d’abord d’un phénomène ancien de fragilisation du système de santé. C’est aussi une conséquence des choix professionnels des nouvelles générations de médecins, qui ont été mal anticipés.

De nombreux médecins partiront à la retraite dans les prochaines années et la situation pourrait s’aggraver. Il nous revient de rechercher des solutions à cette crise.

Celle que le groupe RN propose ne semble pas satisfaisante à notre groupe. Certes, des mesures favorisant le cumul emploi-retraite pourraient éviter d’aggraver la situation, mais le dispositif proposé souffre de défauts majeurs.

D’abord, le texte va bien au-delà de l’objectif affiché puisqu’en l’état de la rédaction, l’exonération pourrait bénéficier à une quinzaine de professions libérales, dont les architectes, les experts-comptables ou les moniteurs de ski.

Même si le dispositif était bien réservé aux professions médicales, son coût serait potentiellement très lourd, ce qui est incompatible avec la situation des finances publiques.

Le groupe Les Démocrates propose pour sa part que l’on réfléchisse à des mesures plus ciblées et plus efficaces, telles que la pérennisation de l’exonération de cotisations retraite pour les médecins qui cumulent emploi et retraite.

Par conséquent, nous voterons contre une proposition insuffisamment ciblée et certainement coûteuse pour les finances publiques.

M. Christophe Plassard (HOR). Le cumul emploi-retraite est en constante augmentation chez les professionnels de santé, depuis plus de vingt ans. Même si la médecine est une vocation avant d’être un métier, cela ne suffit pas à expliquer cette croissance constante, en accélération ces deux dernières années.

La raison se trouve au cœur même de nos circonscriptions, où il est toujours plus difficile d’avoir accès à un médecin ou à un infirmier alors que notre modèle social est présenté comme un exemple. Il n’est pas acceptable d’avoir à patienter des semaines ou d’avoir à parcourir 40 kilomètres. Dans mon département de la Charente-Maritime comme partout en France, la situation est urgente. Il faut agir.

Mais, en pratique, il faut près de dix ans pour former un médecin et plus de trois ans pour former une infirmière – laquelle ne peut exercer en libéral qu’après deux ans d’expérience à l’hôpital. La lutte contre les déserts médicaux se joue sur le temps long.

Le texte présente le mérite de proposer une solution, mais plusieurs points méritent d’être discutés.

Le premier concerne l’accès à la médecine de ville. Les études montrent que le cumul emploi-retraite est majoritairement pratiqué par des spécialistes, alors que l’on a surtout besoin de généralistes dans les déserts médicaux.

Ensuite, on remarque que les médecins qui cumulent ne sont pas ceux qui sont le plus dans le besoin. Il s’agit donc davantage d’un choix personnel que d’une nécessité financière, ce qui remet en cause la pertinence d’une mesure fiscale qui, par ailleurs, ne tient aucun compte du lieu d’exercice.

Enfin, cette mesure coûterait environ 1 milliard d’euros. Ce serait acceptable si nous avions la garantie de régler le problème des déserts médicaux, mais tel n’est pas le cas.

Cette proposition est trop limitée et ses résultats sont incertains. Encourager le cumul emploi-retraite des professionnels de santé mérite un texte plus large, qui pourrait reprendre diverses initiatives déjà existantes. C’est la raison pour laquelle notre groupe votera contre cette proposition.

M. Michel Castellani (LIOT). Le problème soulevé est réel, mais il n’y a qu’une solution de fond : augmenter les moyens destinés à la formation de personnels soignants.

Le cumul emploi-retraite permet bien sûr d’atténuer les manques, surtout dans les zones tendues, mais le dispositif proposé se heurte frontalement au contexte budgétaire que nous connaissons tous. Il coûterait des centaines de millions que nous n’avons pas.

Plusieurs dispositifs contribuent déjà au maintien en activité des praticiens, dont des exonérations de cotisations sociales, un certain nombre de primes et des exonérations fiscales pour ceux qui exercent en zone de revitalisation rurale.

M. Gérault Verny (UDR). Les Français demandent aux responsables politiques du bon sens et du pragmatisme.

Il n’y a pas assez de médecins formés ni d’infirmières, mais la suppression du numerus clausus ne permettra d’obtenir une réponse que dans dix ou douze ans. Cela ne résout en rien le problème actuel. En outre, les déserts médicaux éloignent les patients des soins et entraînent un coût supplémentaire, puisque les pathologies qui ne sont pas prises en charge de façon précoce s’alourdissent.

Le texte propose donc une mesure assez simple : une incitation au cumul emploi-retraite afin de pallier le manque d’anticipation – encore un – des gouvernements précédents.

Les médecins et les infirmiers seront libres d’utiliser ou non ce dispositif. Il n’est donc pas question de repousser l’âge de leur départ à la retraite, puisque le cumul reposera sur le volontariat.

Quant au coût de la mesure, il faudra l’évaluer en prenant en compte les économies qui résulteront d’un traitement plus précoce des pathologies.

Pour toutes ces raisons, notre groupe soutiendra cette proposition.

M. Matthias Renault, rapporteur. Deux évaluations du coût du dispositif circulent, qui sont très largement exagérées.

Celle de 1 milliard effectuée par l’Institut Montaigne, en réaction au programme du Rassemblement national pour les élections législatives, repose sur l’hypothèse que l’exonération bénéficierait à tous les médecins et non pas aux seuls médecins généralistes libéraux, qui constituent 42 % des médecins en cumul emploi-retraite.

Ensuite, l’Institut applique l’exonération au revenu global des médecins, alors que la proposition vise seulement les revenus d’activité des retraités.

Enfin, il part de l’hypothèse que la mesure permettrait de multiplier par deux le nombre de médecins cumulant emploi et retraite. Même si nous nous réjouissons que l’Institut Montaigne reconnaisse une si grande efficacité au dispositif que nous proposons, c’est déraisonnable. On compte actuellement 13 500 médecins qui cumulent emploi et retraite, on peut au mieux en espérer quelques milliers de plus dans quelques années.

J’ai par ailleurs déposé trois amendements répondant à certaines interrogations qui ont été exprimées. L’un prévoit de recentrer le dispositif sur les zones d’intervention prioritaire, autrement dit les déserts médicaux. Un autre propose de plafonner à 80 000 euros les revenus exonérés, soit le montant retenu par décret dans le cadre de la LFSS de 2023 s’agissant de l’exonération de cotisations retraite. L’objectif est d’éviter des effets d’aubaine trop importants. Le troisième propose d’exclure du dispositif les médecins salariés d’une société de téléconsultation. Il s’inspire d’une proposition formulée par les syndicats de médecins lors de leur audition et vise à favoriser ceux qui exercent directement au contact des patients.

J’ai procédé à une estimation du coût de ce dispositif amendé. Sur 13 500 médecins libéraux en cumul emploi-retraite en 2024, 42 % sont des généralistes visés par la proposition, soit environ 5 800 médecins. Selon la direction de la sécurité sociale, leur bénéfice non commercial s’élève en moyenne à 64 000 euros. Si l’on considère que le taux d’imposition moyen de cette population est de 20 %, on obtient un montant d’environ 72 millions pour les seuls médecins, soit un coût relativement maîtrisé. Le coût serait dérisoire en ce qui concerne les infirmières, puisque moins de 900 d’entre elles pratiquent le cumul.

Les critiques formulées par la gauche soulignent ses positions dans le débat sur la liberté d’installation des médecins. Faut-il instaurer des contraintes en matière d’installation des médecins, comme c’est déjà le cas pour les pharmaciens et les infirmières ? Si ces dernières ont accepté des limites à leur liberté d’installation dans le cadre de la convention, c’est aussi parce que l’évolution de leur nombre n’est pas comparable à celui des médecins. On pourra peut-être discuter de mécanismes plus coercitifs s’agissant de ces derniers lorsque la démographie médicale sera devenue plus favorable grâce à la fin du numerus clausus, mais nous n’en sommes pas du tout là. Il faut donc trouver une solution provisoire qui soit acceptable en évitant de braquer toute la profession.

Monsieur Juvin, vous avez à juste titre soutenu l’exonération des cotisations vieillesse prévue dans la LFSS de 2023 et sa reconduction en 2024. Lors de leur audition, les représentants de la direction de la sécurité sociale ont indiqué que ce dispositif avait dès le départ vocation à ne s’appliquer que pendant un an, en attendant que la réforme des retraites prévue dans la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 crée de nouveaux droits pour les cotisants. Comme cette dernière est entrée en vigueur, selon eux les deux dispositifs ne devraient pas se cumuler.

Je ne sais pas ce à quoi faisait référence M. Barnier dans son discours de politique générale lorsqu’il s’est dit, en termes très généraux, ouvert à une réflexion sur le régime du cumul emploi-retraite pour les personnels médicaux. Mais quelle que soit l’intention du Gouvernement, ce dernier n’a pas déposé d’amendement pour pérenniser le dispositif voté en LFSS. Si tel était le cas, nous le soutiendrions.

Je relève enfin qu’il existe une petite injustice fiscale et sociale entre le régime applicable aux médecins et celui applicable aux infirmiers – c’est aussi pour cela que nous les avons inclus dans notre proposition. En effet, l’exonération de cotisations votée en 2023 ne bénéficiait qu’aux médecins, alors même que le coût de l’extension de la mesure aux infirmières aurait été limité en raison du faible nombre de celles qui seraient potentiellement concernées. Notre proposition vise donc moins à les inciter à pratiquer ce cumul qu’à reconnaître l’utilité publique de celles qui continuent à exercer malgré la pénibilité de leur travail.

 

Article 1er :

Amendements de suppression CF1 de M. Guillaume Garot et CF3 de Mme Karen Erodi

M. Matthias Renault, rapporteur. Je crois que nous avons fait le tour de la question. J’insiste simplement sur le fait que le coût de la mesure est maîtrisé, puisque l’ordre de grandeur est au maximum de 100 millions – très loin de l’évaluation à 1 milliard qui a pu être avancée. Avis évidemment défavorable.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 1er est supprimé et les amendements CF6, CF5 et CF4 de M. Matthias Renault tombent.

 

Article 2 : Gage de recevabilité financière

La commission rejette l’article 2.

 

La commission ayant rejeté tous les articles de la proposition de loi, l’ensemble de celle-ci est rejeté.

 

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mercredi 23 octobre 2024 à 9 heures 30

 

Présents. - M. Franck Allisio, M. David Amiel, Mme Christine Arrighi, M. Christian Baptiste, M. Laurent Baumel, M. Karim Ben Cheikh, M. Jean-Didier Berger, M. Carlos Martens Bilongo, M. Anthony Boulogne, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Michel Castellani, M. Eddy Casterman, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jocelyn Dessigny, M. Benjamin Dirx, Mme Mathilde Feld, M. Emmanuel Fouquart, Mme Félicie Gérard, M. José Gonzalez, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, M. François Jolivet, M. Philippe Juvin, M. Daniel Labaronne, M. Tristan Lahais, Mme Constance Le Grip, M. Aurélien Le Coq, M. Mathieu Lefèvre, M. Corentin Le Fur, M. Jérôme Legavre, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, M. Emmanuel Mandon, Mme Claire Marais-Beuil, M. Jean-Paul Mattei, M. Kévin Mauvieux, Mme Marianne Maximi, Mme Estelle Mercier, Mme Sophie Mette, M. Nicolas Metzdorf, M. Jacques Oberti, M. Didier Padey, Mme Sophie Pantel, Mme Christine Pirès Beaune, M. Christophe Plassard, M. Nicolas Ray, M. Matthias Renault, M. Charles Rodwell, M. Alexandre Sabatou, M. Emeric Salmon, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, Mme Danielle Simonnet, M. Charles Sitzenstuhl, M. Jean-Philippe Tanguy, M. Gérault Verny, M. Éric Woerth

 

Excusés. - M. Jean-Pierre Bataille, M. Emmanuel Maurel, Mme Yaël Ménaché, M. Emmanuel Tjibaou, M. Vincent Trébuchet

 

Assistaient également à la réunion. - M. Emmanuel Blairy, Mme Josiane Corneloup, Mme Karen Erodi, M. Guillaume Garot