Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire
– Examen de la seconde partie du projet du projet de loi finances pour 2025 (n° 324) (M. Charles de Courson, rapporteur général) ; examen et vote sur les crédits des missions :
– Défense :...................................2
- Budget opérationnel de la défense (M. Emeric Salmon, rapporteur spécial)
- Préparation de l’avenir (M. Christophe Plassard, rapporteur spécial)
– Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (Mme Yaël Ménaché, rapporteure spéciale) 21
– Présences en réunion...........................29
Jeudi
31 octobre 2024
Séance de 23 heures
Compte rendu n° 039
session ordinaire de 2024-2025
Présidence de
M. Véronique Louwavie,
Vice-présidente
— 1 —
La commission examine la seconde partie du projet du projet de loi finances pour 2025 (n° 324) (M. Charles de Courson, rapporteur général)
Mme Véronique Louwagie, présidente. L’ordre du jour appelle la suite de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2025. Nous examinerons ce soir les missions Défense et Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial (Budget opérationnel de la défense). Le budget opérationnel de la défense se compose de deux des quatre programmes de la mission Défense : le programme 178, qui regroupe les crédits de préparation, de maintien en condition opérationnelle et d’emploi des forces, et le programme 212, qui rassemble les fonctions transverses de direction et de soutien mutualisé. Il comprend en particulier les crédits de personnel et ceux relatifs à la condition militaire.
Les crédits des programmes 178 et 212 sont conformes à la trajectoire fixée par la loi de programmation militaire (LPM). Les crédits de paiement augmentent de 3,3 milliards, soit 7 %, par rapport à 2024. Dans le difficile contexte budgétaire actuel, une telle hausse est tout à fait notable. Autre bonne nouvelle, le schéma d’emploi prévu en 2025 est, contrairement à l’année dernière, conforme à celui fixé par la LPM, avec 700 ETP (équivalents temps plein) supplémentaires.
Avant d’entrer davantage dans le détail, j’attire votre attention sur trois points.
D’abord, la trajectoire d’augmentation prévue dans la LPM doit être considérée comme un minimum. Il est ressorti très clairement des auditions que j’ai conduites que, malgré les efforts inédits consentis dans la LPM, des tensions budgétaires peuvent persister dans l’exécution des crédits. Si ces tensions venaient à s’accroître en 2025, nos forces armées pourraient perdre en compétence et ne pas être entièrement prêtes en cas de conflit. Les députés Rassemblement national et moi-même serons particulièrement vigilants sur ce point au moment d’analyser l’exécution des crédits.
Ensuite, nous devons veiller à la bonne utilisation par les armées des crédits qui lui sont accordés. Depuis la chute du mur de Berlin, tirant les fruits des dividendes de la paix, les armées sont passées d’un modèle d’armée prête à un engagement contre une grande puissance à une armée aux effectifs beaucoup plus réduits, conçue pour se déployer sur des théâtres d’opérations extérieures. Les crédits doivent de nouveau se concentrer sur la haute intensité et les effectifs doivent augmenter pour que nous soyons capables de supporter un engagement majeur, comme durant la guerre froide.
Enfin, le service de santé des armées (SSA), auquel j’avais consacré une partie de mes travaux dans le cadre du Printemps de l’évaluation et qui a particulièrement souffert des coupes budgétaires passées, doit remonter en puissance. Nous devons lui accorder les crédits nécessaires pour qu’il soit prêt à assister nos forces armées dans l'hypothèse d’un conflit de haute intensité.
J’en reviens à l’analyse de l’évolution des crédits.
Le budget de la mission s’élève à 50,5 milliards d’euros, hors crédits de pension. S’agissant du programme 178, les crédits de paiement atteignent 14,3 milliards d’euros, en augmentation de 6 % par rapport à l’année précédente, soit 800 millions d’euros supplémentaires. Cet effort est satisfaisant, dans la mesure où il permet de préparer nos armées à l’hypothèse d’un engagement majeur, l’objectif étant de pouvoir déployer une division complète à l’horizon 2027. Il s’agit là d’un excellent signal.
Ces crédits seront utilisés pour renforcer les équipements des militaires et assurer leur maintien en condition opérationnelle – 1,5 milliard d’euros supplémentaires y seront consacrés. La modernisation des équipements est importante, car elle permet à nos forces armées de suivre les évolutions tactiques. L’armée de terre déploie par exemple du nouveau matériel permettant aux soldats de mieux traiter les flux d’information sur le champ de bataille, afin d’adapter la prise de décision tactique.
La baisse de 8 % des autorisations d’engagement du programme 178 n’est pas un motif d’inquiétude : elle correspond au fonctionnement cyclique des opérations de maintien en condition opérationnelle. Les autorisations d’engagement augmentent d’ailleurs de 44 % à l’échelle de la mission.
Les crédits du programme 212, quant à eux, restent relativement stables, particulièrement une fois prise en compte l’hypothèse d’inflation, estimée à 1,5 % en 2025. Les enjeux sont forts puisqu’il s’agit de fidéliser les soldats afin de pouvoir compter sur une armée motivée et prête à l’emploi. Les moyens budgétaires consacrés à ce programme ont déjà considérablement augmenté ces dernières années, avec le déploiement du plan « famille » et l’instauration de la nouvelle politique de rémunération des militaires. En 2025, les sous-officiers et les soldats du rang toucheront ainsi 140 millions d’euros supplémentaires. La revalorisation des officiers n’est pas encore finalisée, la mise en cohérence de leur grille indiciaire étant prévue pour le 1er novembre 2025. J’insiste sur l’importance de cette revalorisation pour fidéliser les officiers.
Les crédits du programme 212 permettront de mobiliser 271 000 ETP au service des forces armées en 2025. L’objectif est d’atteindre 275 000 ETP à l’horizon 2030. Je compte sur le ministère des armées pour y parvenir.
Enfin, des efforts conséquents sont consentis depuis la LPM pour renforcer les crédits alloués au service de santé des armées et améliorer le service rendu tant aux militaires qu’aux civils. Je salue l’effort budgétaire de 61 millions d’euros prévu pour 2025. Le programme Ambition stratégique 2030 sera crucial pour que le SSA soit en mesure d’aider nos troupes dans un conflit de haute intensité. J’attire notamment votre attention sur la nécessité d’augmenter graduellement ses moyens en traumatologie afin qu’il puisse remplir pleinement son contrat opérationnel.
Je vous invite à voter les crédits de la mission Défense, sous réserve que les amendements que nous défendrons soient adoptés. Dans le cas contraire, je me laisserai la possibilité de réviser mon avis.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial (Préparation de l’avenir). Le PLF pour 2025 est placé sous le signe de la contrainte pour les finances publiques. Face à la dégradation du déficit et de la dette publique, il nous faut trouver des moyens de redresser les finances publiques. Nous devons envisager sans tabou des contributions ciblées et temporaires, mais une augmentation massive des impôts est irréaliste. Il nous faut donc trouver aussi des pistes d’économies pour parvenir au juste équilibre entre efforts indispensables et engagements incontournables.
Dans ce contexte, on ne peut que se réjouir du niveau des crédits de la mission Défense : en hausse de 3,3 milliards, ils atteignent 50,5 milliards d’euros, respectant ainsi la marche fixée dans la LPM. Le volume important des crédits permettra aux armées de poursuivre leur remontée en puissance capacitaire.
Le programme 146 Équipement des forces affiche 51 milliards d’euros en AE et 18,7 milliards d’euros en CP.
La moitié des AE concernent le renouvellement des capacités de dissuasion, avec 11,5 milliards pour les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de troisième génération, 7,5 milliards d’euros pour le missile mer-sol M51 embarqué sur les SNLE, et 3,1 milliards pour le lancement en réalisation du missile air-sol nucléaire de quatrième génération (ASN 4G), qui succédera au missile air–sol moyenne portée amélioré (ASMPA).
Quelque 10 milliards d’euros sont prévus pour le porte-avions de nouvelle génération (PANG), et plus de 12 milliards d’euros pour la poursuite des grands programmes à effet majeur – une frégate de défense et d’intervention (FDI), le renouvellement des camions-citernes de l’armée de terre, des infrastructures Rafale ou encore divers lots de missiles. Il faut mesurer la portée de ces investissements qui nous engagent pour les décennies à venir. La défense, c’est le temps long : nous réfléchissons à un horizon de 2040, 2050, 2060 et 2070, autant dire bien au-delà de la LPM. C’est pourquoi la programmation ne doit pas être rabotée, et les projets décalés ou diminués.
Les CP augmentent de 13 %, pour accompagner la montée en puissance des programmes à effet majeur et les livraisons de matériels et de munitions : quatorze Rafale, douze Mirage 2000D rénovés, une FDI, un bâtiment ravitailleur de force, vingt et un chars Leclerc rénovés, 308 véhicules blindés du programme Scorpion – Serval, Griffon, Jaguar –, des lots de missiles – Aster, VL Mica, Exocet, Scalp et MMP.
Le programme 144, Environnement et prospective de la politique de défense, affiche 2 milliards d’euros en AE et en CP.
Les crédits prévus pour le soutien à l’innovation de défense excèderont 1 milliard d’euros pour la quatrième année consécutive. Ce renforcement des moyens alloués à la délégation générale de l’armement (DGA) et à l’Agence de l’innovation de défense (AID) permettra de continuer à investir massivement dans des technologies de rupture et de poursuivre le développement de démonstrateurs innovants dans tous les domaines : spatial, hypervélocité, armes à énergie dirigée, quantique, intelligence artificielle, etc.
Je n’oublie pas les services de renseignement, la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD), qui voit leurs moyens augmenter conformément à la programmation, pour accompagner l’augmentation de leur activité dans un contexte de menaces accrues. Il en va de même pour la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS), dont les missions d’analyse de l’évolution du contexte stratégique sont cruciales pour le ministère des armées.
Si la LPM est respectée en apparence pour 2025, il convient de rester attentif à la fin de gestion pour 2024 – c’est ce qui ressort de toutes nos auditions. Pas moins de 1,17 milliard d’euros sont encore gelés sur le programme 146, et 127 millions sur le programme 144. L’absence de dégel aurait un effet délétère sur l’entrée en 2025.
Une prise en charge par la mission Défense des surcoûts liés au soutien à l’Ukraine et aux opérations extérieures (Opex) et missions intérieures, contrairement aux engagements pris dans la LPM, aurait nécessairement des effets d’éviction, c’est-à-dire un allongement ou une réduction mécanique des programmes de moyen et long terme.
En exemple, je citerai le programme de frégates multimissions (Fremm). Un rapport de la Cour des comptes en date de 2018 expliquait on ne peut mieux cette situation où l’État prévoyait de dépenser 10 milliards d’euros pour dix-sept bateaux. Par souci d’économie, seulement huit bateaux ont finalement été livrés pour une note s’élevant à 8 milliards d’euros. Le coût unitaire de la frégate a ainsi presque doublé, passant de 600 millions à 1 milliard d’euros, avec un nombre de bâtiments livrés presque divisés par deux pour un coût final quasiment identique. On peut s’interroger sur la stratégie de l’État.
Sans un dégel, la cohérence opérationnelle des armées en serait réduite. Et on enverrait un très mauvais signal aux industriels qui ont besoin de visibilité pour la remontée en puissance qu’exige l’économie de guerre.
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis de la commission de la défense (Soutien et logistique interarmées). Dans le périmètre de mon avis budgétaire j’appelle votre attention sur un point précis qui crée une insincérité budgétaire globale de la mission Défense.
La qualification de mission opérationnelle (Missops) de certaines opérations de nos armées à l’étranger permet un évitement démocratique et une illisibilité budgétaire nuisible au pouvoir de contrôle du Parlement. Ces missions ne sont qualifiées ni d’Opex, qui permettent un financement interministériel en cas de dépassement du budget opérationnel de programme (BOP) Opex, ni d’intervention à l’étranger, qui nécessiteraient un vote du Parlement conformément à l’article 35 de la Constitution. Ce tour de passe-passe n’est pas seulement sémantique, il empêche les militaires d’accéder aux droits liés aux Opex, dont plusieurs ont des conséquences budgétaires, notamment pour le calcul de la pension et certaines primes.
Surtout, la question des surcoûts des Missops pose un problème global concernant le respect de la LPM. Si ces surcoûts sont imputés sur l’enveloppe budgétaire allouée à la mission Défense, le budget de la défense est insincère et la LPM n’est pas respectée, vu que ce budget doit absorber des coûts qui n’étaient pas prévus dans la programmation. Si ces surcoûts sont imputés à un financement interministériel comme des Opex, c’est le budget global qui n’est pas sincère.
Cette année, les déclarations du ministre en audition semblent indiquer que les surcoûts seraient pris en charge sur enveloppe, ce qui signifie que la LPM ne sera pas respectée. Il a même inventé le concept de programmation physique, respecté selon lui, pour indiquer que le reste de la programmation, non physique, ne le serait pas. Votre rapporteur pour avis propose une solution simple, démocratique et rigoureuse : considérer qu’aucune mission n’ayant pas reçu l’aval du Parlement ne puisse bénéficier de financement interministériel et, réciproquement, que les missions ayant reçu l’aval du Parlement en bénéficient. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable sur l’adoption des crédits de la mission Défense.
Mme Isabelle Santiago, rapporteure pour avis de la commission de la défense (Préparation et emploi des forces : Forces terrestres). Vu l’heure tardive, je ne vais pas faire de présentation liminaire, mais j’interviendrai dans les débats sur les amendements.
Article 42 et État B : Crédits du budget général
Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette l’amendement II-CF278 de M. Matthias Renault.
Amendements II-CF2639 et II-CF2640 de Mme Cyrielle Chatelain (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous demandons un renforcement des moyens de prospective et de recherche de l’armée, afin d’améliorer l’anticipation des conséquences géopolitiques, militaires et stratégiques des crises écologiques en cours sur la sécurité nationale. Face aux conséquences du réchauffement sur l’évolution du monde, les armées ne devront pas seulement se préparer à des conflits potentiels exacerbés par les tensions autour des ressources ou des mouvements de population, elles devront aussi envisager un rôle renouvelé, axé sur la garantie d’une sécurité globale face à des événements incontrôlables et imprévisibles. Leur mission pourrait ainsi évoluer vers la protection des populations et des territoires face aux risques environnementaux majeurs.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Les conditions difficiles dans lesquelles évoluent nos armées lorsqu’elles sont en Opex ne favorisent pas les préoccupations de transition écologique, qui pourraient les conduire, par exemple, à utiliser des véhicules électriques ou la propulsion à hydrogène. Néanmoins, dans le cadre de l’évolution obligatoire de leur matériel, les armées intègrent l’efficacité énergétique dans le choix des programmes : elles n’ont aucun intérêt opérationnel à rester dépendantes d’énergies vouées à disparaître.
Plusieurs programmes d’innovation sont déjà en cours : le passage à l’électrique ou à l’hybride des camions qui ne vont pas en Opex ; la recherche sur les carburants alternatifs durables pour l’aviation ; le projet de planeur électrique Euroglider ; la recherche sur des moteurs à hydrogène pour les avions et les drones ; Arquus a fait des progrès significatifs sur la propulsion hybride de véhicules blindés. Il faut accélérer, mais ce n’est pas une question de crédits supplémentaires. C’est pourquoi je demande le retrait de ces amendements.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Votre argumentaire était fort intéressant, mais adapté à un tout autre amendement.
La commission adopte l’amendement II-CF2639.
En conséquence l’amendement II-CF2640 tombe.
Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette l’amendement II-CF2953 de la commission de la défense.
Amendement II-CF2641 de Mme Cyrielle Chatelain
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Dans ce monde en constante évolution et au vu des défis géopolitiques auxquels nous devons faire face, nous proposons que l’Europe renforce sa capacité à répondre de manière coordonnée et efficace aux nouvelles menaces. Pour cela, il faut accroître les moyens dédiés à la coopération militaire européenne : il est essentiel de multiplier les entraînements communs pour faciliter l’interopérabilité, le partage de connaissances et les pratiques entre les troupes. C’est un signal politique fort en faveur de l’engagement de la France envers une Europe de la défense intégrée et efficace.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Près de 330 000 euros en CP seront consacrés en partie à la coopération militaire pour l’année 2025. Dans le contexte budgétaire actuel, ces crédits sont suffisants. De nombreux exercices interalliés sont prévus en 2025 – Dacian Spring 2025 pour l’armée de terre, Polaris pour la marine nationale – et sont suffisants sur le plan de la préparation opérationnelle. Les auditions menées dans le cadre du rapport spécial ne permettent pas de conclure à la nécessité d’augmenter les crédits consacrés aux entraînements interalliés. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2928 et II-CF2929 de la commission de la défense, amendement II-CF2249 de M. Aurélien Saintoul, II-CF2930, II-CF2932 et II-CF2931 de la commission de la défense, et II-CF2884 de Mme Catherine Hervieu (discussion commune)
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. J’émets un avis favorable pour l’amendement II-CF2932, que j’ai déposé et qui a été adopté par la commission de la défense. Il prévoit d’augmenter de 18 millions d’euros les crédits consacrés à l’achat de groupements médico-chirurgicaux pour le service de santé des armées. Je demande le retrait de tous les autres amendements. À défaut, j’émettrais un avis défavorable à[NB2] ceux-ci.
La commission rejette les amendements II-CF2928 et II-CF2929
Elle adopte l’amendement II-CF2249
En conséquence, les amendements II-CF2930, II-CF2932, II-CF2931 et II-CF2884 tombent.
Suivant l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission rejette l’amendement II-CF2957 de la commission de la défense.
Amendements II-CF2963 et II-CF2964 de la commission de la défense (discussion commune)
M. Jocelyn Dessigny (RN). La contribution de la France à l’Agence européenne de défense (AED), fixée à 8,7 millions d’euros dans le PLF pour 2025, n’a pas lieu d’être. L’AED n’a pas de légitimité pour se substituer à la politique de défense des États. Le groupe Rassemblement national rappelle que la raison d’être d’un État est sa défense. Il ne peut donc pas en déléguer la responsabilité à une autorité tierce. C’est sur ce principe que s’est fondée la Ve République et il ne saurait être question de le remettre en cause.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. J’émets un avis favorable sur l’amendement II-CF2963, adopté en commission de la défense. La suppression de l’AED vise à lutter contre « l’agencification » croissante de l’action publique. L’augmentation des moyens, consécutive à cette suppression, permettrait de donner davantage de marges de manœuvre au ministère des armées dans la gestion du programme 178.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF2916 de la commission de la défense.
Mme Isabelle Santiago, rapporteure pour avis. Cet amendement, déposé par M. Boccatelli, a été adopté hier en commission de la défense. À titre personnel, je suis défavorable à cette proposition. Le maintien en condition opérationnelle (MCO) est un élément clef pour permettre de garantir un niveau de disponibilité suffisant des matériels, mais il ressort de mes auditions que le montant des crédits proposés est suffisant pour répondre aux besoins. On peut évidemment toujours faire mieux, comme nous essayons de le faire avec ce budget de la défense.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Pour ma part, j’approuve cette proposition. Comme indiqué dans mon propos introductif, la trajectoire fixée par la LPM s’entend comme un minimum. En l’occurrence, pour l’année 2025, les auditions montrent que des risques quant à la bonne exécution budgétaire pourraient remettre partiellement en cause la remontée en puissance du MCO. Il me semble donc nécessaire de légèrement rehausser le plafond des crédits pour le programme 178 afin de donner au ministère des armées davantage de marge de manœuvre dans sa gestion. Avis favorable.
Mme Véronique Louwagie, présidente. On peut se réjouir du respect intégral de la LPM en cette période de grande difficulté budgétaire.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF2942 de la commission de la défense et II-CF2973 de M. Emeric Salmon
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. À titre personnel, j’avais émis un avis défavorable pour ces amendements adoptés par la commission de la défense.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Il s’agit de rehausser le plafond des crédits pour le programme 178, ce qui permettrait de donner plus de latitude au ministère des armées afin qu’il amplifie ses efforts en matière de cybersécurité.
La commission rejette les amendements.
Amendement II-CF2823 de Mme Catherine Hervieu
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Il tend à augmenter les moyens alloués à l’habillement et à l’équipement individuel des réservistes à hauteur de 200 500 euros.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. En 2025, le budget consacré aux réservistes a été augmenté de 26 millions d’euros pour atteindre 221 millions d’euros. L’ajout que vous proposez paraît donc en total décalage. Retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2241 de Mme Murielle Lepvraud et II-CF2918 de la commission de la défense (discussion commune)
M. Emmanuel Fouquart (RN). Par cet amendement d’appel, nous souhaitons appeler l’attention du Gouvernement sur le statut des sous-mariniers engagés dans la dissuasion. Alors qu’ils sont engagés en permanence pour maintenir notre posture nucléaire, les sous-mariniers ne bénéficieront jamais du statut d’ancien combattant, du fait notamment de la qualification de leur mission : ils ne sont pas considérés comme étant en Opex.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Le statut d’ancien combattant doit pouvoir intégrer les missions opérationnelles effectuées par le personnel de la marine nationale, ce qui n’est actuellement pas le cas. Il serait opportun d’interroger le Gouvernement à ce sujet. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement II-CF2241.
En conséquence, l’amendement II-CF2918 tombe.
Amendement II-CF2933 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. C’est un amendement d’appel qui vise à renforcer les moyens civils relatifs aux évacuations sanitaires. Dans les territoires ultramarins, ces évacuations reposent essentiellement sur nos forces armées et les mettent en tension. Un renforcement des moyens civils permettrait à nos forces armées de se concentrer sur l’essentiel de leur mission.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Cet amendement ne concerne pas directement les forces armées. Retrait ou avis défavorable.
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Je me vois mal retirer, à titre personnel, un amendement adopté par la commission de la défense.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF304 de M. Matthias Renault
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis favorable sur cet amendement qui permet de lutter contre « l’agencification » [NB3]de l’action publique et le démembrement de l’État.
La commission rejette l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission rejette l’amendement II-CF303 de M. Matthias Renault
Amendement II-CF2834 de Mme Catherine Hervieu et amendement II-CF2642 de Mme Cyrielle Chatelain (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Ces amendements concernent les crédits alloués à la rénovation thermique et à la gestion du parc immobilier de l’armée. Bien que ces moyens soient une nouvelle fois en hausse, ils restent insuffisants au vu du chantier de l’adaptation du parc immobilier de l’armée aux effets du changement climatique. La rénovation thermique n’est pas une option mais une nécessité. En tant que composante majeure de l’aménagement du territoire, les infrastructures militaires doivent être à la pointe de la transition. Ces amendements proposent respectivement 30 et 15 millions d’euros supplémentaires.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. J’émets un avis défavorable sur ces deux amendements car il n’est pas nécessaire de prévoir des crédits supplémentaires. Le PLF prévoit 144 millions d’euros en CP pour la rénovation de logements, ce qui inclut la réalisation d’infrastructures standardisées avec des bâtiments devant répondre aux exigences énergétiques du label E3C1, attestant d’une bonne performance énergétique.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF2958 de la commission de la défense, amendements identiques II‑CF2959 de la commission de la défense et II-CF2975 de M. Emeric Salmon, et amendement II-CF2240 de M. Christophe Bex (discussion commune)
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Les deux amendements adoptés par la commission de la défense ne diffèrent que sur les montants proposés pour améliorer la qualité des hébergements militaires : 30 millions d’euros pour le premier, 15 millions pour le second. Je suggère aux commissaires d’adopter plutôt le second, identique à mon amendement II‑CF2975. Sagesse pour le II-CF2958 et défavorable pour le II-CF2240.
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Je m’étonne de l’avis défavorable du rapporteur spécial sur les deux amendements précédents qui portent sur le même programme. Surtout, au vu de mon rapport, l’amendement II-CF2240 me semble le plus réaliste : je doute des capacités du service d’infrastructure de la défense (SID) à dépenser autant d’argent en un an, compte tenu de ses ressources humaines.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF2839 de Mme Mélanie Thomin
Mme Mélanie Thomin (SOC). Avec la guerre au Proche-Orient, la mer Rouge est devenue un espace instable. Pour faire face aux attaques répétées des Houthis dans le golfe d’Aden, la marine nationale mobilise d’importants moyens matériels, financiers et humains, notamment une frégate, qui escorte les navires de commerce occidentaux. Alors que la plupart des grands armateurs mondiaux contournent désormais cette zone, la CMA CGM a maintenu une ligne commerciale, grâce à un tel soutien. Les militaires sécurisent ainsi, au péril de leur vie, nos intérêts commerciaux et économiques.
Dans un contexte d’effort collectif de réduction de la dépense publique, la marine nationale doit-elle continuer à prendre en charge seule les coûts de protection des navires commerciaux croisant en mer Rouge ? Il serait légitime de réfléchir à une contribution fiscale des armateurs, comme nous le proposons avec cet amendement.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. La réflexion sur l’opportunité d’alourdir la fiscalité des armateurs ne relève pas de la mission Défense et il semble inutile de prévoir 30 millions de crédits pour engager une réflexion.
Par ailleurs, la sécurité des mers ne doit pas dépendre d’une hypothétique taxe affectée, qui porterait d’ailleurs atteinte au principe budgétaire d’universalité.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2937 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Nous proposons d’abonder de 20 millions d’euros le programme 212, Soutien de la politique de la défense, afin de relancer l’opération « poignée de porte », qui avait bien fonctionné en 2022. C’est nécessaire pour réduire les irritants du quotidien des militaires.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. L’exposé des motifs de votre amendement n’est pas très clair : souhaitez-vous renforcer les services de soutien, ou améliorer la condition militaire ?
S’il s’agit d’améliorer la condition militaire, le ministère des armées fournit déjà des efforts dans ce domaine. En outre, il convient d’être vigilant en matière de dépenses publiques.
Si vous visez les services de soutien, plutôt que d’améliorer la qualité des infrastructures en France, il semble préférable d’insister sur les aspects opérationnels. En effet, dans l’hypothèse d’un engagement majeur, les services de soutien doivent gagner en volume au plus près du déploiement des troupes, dans une perspective interalliée.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2947 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Alors que la grille indiciaire des sous-officiers supérieurs devait être revalorisée le 1er octobre, elle ne le sera finalement qu’au 1er décembre.
Cet amendement adopté par la commission de la défense permettrait aux militaires concernés de compenser le manque à gagner. Si nous voulons fidéliser les militaires, il faut que le ministre des armées respecte ses engagements.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. La revalorisation de la grille indiciaire des sous-officiers fait déjà l’objet d’un effort important, avec un coût de 46 millions d’euros en année pleine. Il s’agit désormais de se concentrer sur la revalorisation de la grille indiciaire des officiers, prévue pour novembre 2025, dont la mise en oeuvre doit être garantie malgré le contexte budgétaire difficile.[NB4] Son coût en année pleine s’élèvera à 75 millions d’euros.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2242 de M. Abdelkader Lahmar
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Le #MeToo dans les armées a permis de révéler que 30 % des femmes militaires ont été victimes de violences sexistes ou sexuelles. Ce chiffre terrible impose de créer des dispositifs pour libérer la parole hors du cadre du commandement.
Cet amendement vise à créer un ombudsman militaire. Suivant le modèle adopté dans de nombreux pays, une autorité parlementaire, indépendante, pourrait mener des enquêtes et recueillir la parole des victimes.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. La multiplication des comités nuit au bon contrôle par le Parlement de l’action publique. Le suivi du respect des droits des militaires est déjà une prérogative des parlementaires. Nous pouvons tous nous en saisir. Les associations professionnelles nationales militaires, que j’ai d’ailleurs auditionnées, jouent également un rôle de vigie.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2949 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Les modalités actuelles d’attribution du SUFE (le supplément familial de solde à l’étranger) créent des effets de seuil, au détriment de certains officiers et sous-officiers affectés à des missions de défense à l’étranger. L’amendement adopté par la commission de la défense sur ce sujet technique vise à y remédier.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis favorable. La fidélisation demeure un enjeu majeur pour les forces armées. La désincitation au travail que vous décrivez doit être corrigée et la cellule familiale préservée.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2948 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission de la défense vise à améliorer les conditions de vie des militaires affectés à l’étranger, en corrigeant une inégalité. Le montant des indemnités perçues par les sous-officiers déployés dans le réseau diplomatique correspond actuellement à celui du personnel de catégorie C, alors qu’il devrait être équivalent à celui des personnels de catégories B, dans la grille prévue par le Quai d’Orsay.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis favorable. Les inégalités de traitement en matière d’indemnité de résidence à l’étranger entre le personnel militaire et le personnel civil ne sont pas acceptables. C’est une question de fidélisation, qui demeure prioritaire pour les forces armées.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2960 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Il me semble que cet amendement de la commission de la défense, qui tend à accorder 1 million d’euros pour les « poignées de porte » est satisfait, puisque nous venons d’adopter un amendement prévoyant 20 millions d’euros en ce sens. Mais enfin, 1 million d’euros de crédits sont toujours bons à prendre.
M. Laurent Jacobelli, (RN). Plus précisément, cet amendement vise à rénover les installations sportives des militaires. Dans beaucoup de cas, elles sont vieillissantes, pratiquement inutilisables. L’entraînement est une partie intégrante de leur activité et l’absence d’entraînement nuit à leur efficacité.
Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2945 de la commission de la défense et II-CF2645 de Mme Cyrielle Chatelain (discussion commune)
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF2945 de la commission de la défense vise à favoriser l’inclusion des personnes en situation de handicap dans le ministère des armées. Ce ministère est le deuxième employeur public de France et a donc une capacité d’entraînement et une responsabilité d’exemplarité dans la promotion de l’inclusion professionnelle et la lutte contre les discriminations. Or, actuellement, il n’est pas à la hauteur des attentes en la matière.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). L’amendement II-CF2645 vise à renforcer l’engagement du ministère des armées en faveur de l’insertion des personnes handicapées. Le taux d’emploi des personnes handicapées dans l’armée est inférieur à la moyenne nationale, y compris dans les emplois civils.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. Ces amendements sont satisfaits par le projet de loi de finances pour 2025. Quelque 2 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus pour l’aménagement des postes de travail et le déploiement de transports adaptés pour les agents en situation de handicap ainsi que les actions de sensibilisation. Ces crédits progressent de plus de 100 % par rapport à 2024. Nous gagnons à lisser l’effort sur plusieurs années.
La commission adopte l’amendement II-CF2945.
En conséquence, l’amendement II-CF2645 tombe.
Amendement II-CF2946 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission de la défense vise à augmenter le personnel de la cellule Thémis (Cellule du ministère des armées chargée de lutter contre le harcèlement sexuel, les violences sexuelles et sexistes et les discriminations de toutes sortes).
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. L’instruction ministérielle du 28 juin 2024 sur la mise en œuvre d’un programme de lutte contre les violences sexuelles et sexistes au sein du ministère des armées a permis la création d’un protocole ambitieux d’accompagnement des victimes. J’appelle les commissaires aux finances à en attendre le bilan, avant d’augmenter ses moyens budgétaires.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2643 de Mme Cyrielle Chatelain
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons de renforcer la collaboration entre le ministère des armées et les autres acteurs des territoires d’implantation des bases, tels que les collectivités territoriales, les ONG, les associations d’habitants et les entreprises. Le ministère doit s’ouvrir davantage sur son environnement, notamment dans le cadre de sa politique immobilière.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. Cet amendement est satisfait par le projet de loi de finances pour 2025. Le plan « famille 2 » prévoit 750 millions d’euros pour l’amélioration de l’intégration des familles de militaires, déployés en partenariat avec les collectivités territoriales. Il n’est pas nécessaire d’abonder de 100 000 euros les crédits du programme 212 pour engager des partenariats avec la société civile et créer un dialogue avec les ONG.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF2920 et II-CF2950 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Ces amendements, adoptés à l’unanimité de la commission de la défense visent à remédier à une inégalité de traitement concernant les baleiniers en Polynésie française.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. Au vu de leur montant, 50 000 euros, il s’agit clairement d’amendements d’appel. Il n’y a donc pas lieu de les voter. Il semble plus utile d’adresser une question écrite ou orale Gouvernement à ce sujet.
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Seuls trois baleiniers sont concernés par cet amendement. Les 50 000 euros demandés suffiraient à satisfaire les besoins.
La commission adopte les amendements.
Amendement II-CF2944 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission de la défense vise à améliorer la prise en charge des frais immobiliers des militaires français déployés à l’étranger.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. En effet, l’amendement serait inopérant car la gestion du parc de logements du ministère de l’Europe et des affaires étrangères ne dépend pas du ministère des armées.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2943 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission de la défense vise à égaliser les taux de retenue auxquels sont soumis les personnels civils et militaires pour leurs logements de fonction, quand ils sont affectés en outre-mer.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Sur le fond, je rejoins votre préoccupation, qui pourrait faire l’objet d’une question écrite ou orale au Gouvernement. Avis de sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2647 de Mme Cyrielle Chatelain
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons de réduire à terme les arsenaux nucléaires de la France, en cohérence avec ses engagements en faveur d’une réduction globale des arsenaux nucléaires, du désarmement et de la promotion de la paix. Cet amendement permettrait de réduire fortement les crédits alloués au programme Équipement des forces.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Je ne peux être favorable à votre projet de réduction des arsenaux militaires. Depuis les années 1960, notre modèle d’armée est articulé autour de la dissuasion nucléaire. Celle-ci nous protège des menaces et protège nos intérêts vitaux. Elle nous a également permis de maintenir des savoir-faire, contrairement au Royaume-Uni, par exemple, au bénéfice tant des civils que des militaires.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette l’amendement II-CF2517 de Mme Anna Pic.
Amendement II-CF2460 de M. Boris Vallaud
M. Philippe Brun (SOC). Cet amendement vise à aider l’Ukraine à protéger sa souveraineté, tout en renforçant notre industrie de défense.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Même si l’intention est bonne, le ministère des armées a choisi de financer le soutien à l’Ukraine grâce aux économies permises par le niveau moindre qu’escompté de l’inflation, et par les intérêts des avoirs russes gelés, qui devraient rapporter près de 300 millions d’euros l’an prochain, soit davantage que les crédits que vous demandez. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2934 de la commission de la défense
M. Laurent Jacobelli, (RN). Alors qu’il est essentiel d’assurer notre souveraineté en matière de défense, la France ne produit plus de munitions de petit calibre et se trouve donc dépendante de partenaires ou de fournisseurs étrangers. Cela créerait une situation préjudiciable en cas de conflit. Il est temps de rapatrier cette production en France.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Le ministère des armées avait annoncé en mai 2024 son intention de lancer un partenariat avec la Belgique pour reconstruire une filière de munitions de petit calibre. Toutefois, la démarche se heurte à deux difficultés. Le droit européen interdit d’invoquer l’intérêt essentiel de sécurité – qui permet de contourner le droit de la concurrence – pour un partenariat étranger. En outre, ce projet manquerait de rentabilité et renchérirait les coûts. Avis défavorable.
M. Laurent Jacobelli, (RN). Je suis surpris par ce discours, qui contredit totalement celui du ministre des armées.
La commission rejette l’amendement.
Suivant les avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette successivement les amendements II-CF2926, II-CF2925, II‑CF2938, II-CF2940, II-CF2936, II-CF2927 et II-CF2962 de la commission de la défense.
Amendements identiques II-CF2955 de la commission de la défense et II-CF2974 de M. Emeric Salmon ; amendement II-CF2466 de M. Sébastien Saint-Pasteur (discussion commune)
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Mon amendement vise à augmenter de 10 millions d’euros les moyens alloués à la cyberdéfense.
Mme Isabelle Santiago, rapporteure pour avis. Qu’il s’agisse des plans opérationnels ou des données personnelles du personnel militaire, le secteur de la défense est une cible de choix pour les cyberattaques. Même si nous saluons le respect de la trajectoire budgétaire initialement prévue en 2025, nous demandons avec l’amendement II-CF2466 des crédits supplémentaires pour la cybersécurité. Ceux-ci permettraient de développer et de produire des chiffreurs, afin de protéger les informations sensibles et classifiées.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. En 2025, le montant total de l’effort dans le domaine cyber s’élève déjà à plus de 300 millions d’euros de crédits de paiement, répartis sur trois programmes, le 146, avec les programmes Cyber et Gesa (gestion des éléments secrets des armées) ; le 178, à travers l’instruction du personnel et son maintien en condition opérationnelle (MCO), ainsi que le 144, avec le soutien à l’innovation. Ces crédits sont conformes à l’enveloppe de 4 milliards d’euros prévue dans la loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements identiques II-CF2955 et II-CF2974.
Elle adopte l’amendement II-CF2466.
Suivant les avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette successivement les amendements II-CF2954 de la commission de la défense, II-CF2236 de M. Bastien Lachaud, II-CF2247 de M. Aurélien Saintoul et II-CF2246 de M. Bastien Lachaud.
Amendements identiques II-CF2956 de la commission de la défense et II-CF2247 de M. Aurélien Saintoul et II-CF2246 de M. Bastien Lachaud.
Amendements identiques II-CF2956 de la commission de la défense et II-CF2248 de M. Aurélien Saintoul
M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). L’entreprise Atos étant plombée par une dette de 5 milliards d’euros, sa valeur marchande a plongé, pour s’établir à 70 millions d’euros. Nous proposons de débloquer 70 millions d’euros de crédits pour la nationaliser car c’est un fleuron industriel stratégique. Elle contribue à la dissuasion, au fonctionnement des centrales nucléaires et à l’ensemble des services informatiques des collectivités. Nous refusons qu’elle soit vendue à la découpe.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Oui, Atos est une entreprise stratégique. J’ai moi-même travaillé sur la guerre économique, même si mon rapport à ce sujet n’a pas pu être publié avant la dissolution, et je suis très sensible au risque de rachat d’entreprises stratégiques par des concurrents étrangers. Évitons que des fleurons français disparaissent de nouveau.
Le dossier est complexe ; je sais le Sissé (service de l'information stratégique et de la sécurité économiques), la DGE (la direction générale des entreprises) de Bercy et la DGA très engagés sur ce dossier. La nationalisation n'est pas la seule solution envisageable, même si l’État reste ouvert à la possibilité de prendre une participation. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission adopte les amendements.
Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette l’amendement II-CF2238 de M. Aurélien Saintoul.
Amendement II-CF2245 de Mme Murielle Lepvraud
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Du fait de l’interdiction prévue de commercialiser des moteurs thermiques dans l’Union européenne à partir de 2035, les principaux constructeurs renonceront à produire ce type d’équipement et il sera difficile pour les industries de défense de les remplacer à un coût accessible. Cet amendement vise donc à préparer l’après-pétrole.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. L’absence de pétrole n’est pas envisageable pour les forces armées à moyen terme. Il n’existe pas de borne de recharge électrique sur les théâtres d’opération des conflits de haute intensité. Pour les matériels qui ne sont pas destinés à être soumis au feu, une réflexion est en cours sur le passage à des moteurs électriques ou hybride. En outre, des carburants alternatifs durables peuvent être développés avec l’aviation civile et les matériels récents sont plus économes en pétrole.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, l’amendement II-CF2727 de M. Damien Girard est rejeté.
Amendement II-CF2250 de M. Bastien Lachaud
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Dans le cadre de la LPM, il a été décidé de renoncer au lancement d’un troisième satellite Syracuse IV et de dépendre de la future constellation européenne Iris2. Or ce projet européen rencontre des difficultés. Nous vous interpellons donc sur le risque d’un déficit capacitaire en satellites de communication.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Puisqu’il s’agit d’un amendement d’appel, je vous demande de le retirer. Sur le fond, je partage votre constat.
La commission rejette l’amendement.
Suivant les avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette successivement les amendements II-CF2237 de M. Emmanuel Fernandes et II-CF2244 de M. Aurélien Saintoul.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Nous en venons aux explications de vote sur les crédits de la mission.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Au vu du sort des différents amendements, je suis défavorable à l’adoption des crédits.
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Compte tenu des amendements adoptés, notamment au sujet de la nationalisation d’Atos, mon avis est également défavorable.
M. Laurent Jacobelli (RN). Nous ne voterons pas ces crédits, car certains des amendements qui ont été adoptés ne nous paraissent pas aller dans le bon sens. D’une manière plus générale, ce budget avait d’emblée des défauts de fabrication : il ne respectait pas réellement la progression prévue par la LPM. Pour nous, le compte n’y est pas.
Mme Véronique Louwagie, présidente. J’en profite pour préciser que le montant des amendements adoptés est de 196 millions d’euros.
M. David Amiel (EPR). Nous sommes également en désaccord avec certains des amendements adoptés, mais le débat se poursuivra. Nous voulons saluer l’effort très important qui sera réalisé : le texte initialement déposé par le Gouvernement prévoyait 3,3 milliards d’euros de crédits supplémentaires et respectait ainsi parfaitement les engagements pris dans le cadre de la loi de programmation militaire, elle-même historique, qui donne à nos armées les moyens dont elles ont besoin pour assurer notre autonomie stratégique et garantir notre force de dissuasion tout en renforçant les moyens pour les personnels de nos armées. Nous voterons donc ces crédits.
M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Nous ne ferons pas de même. Les crédits de cette mission sont entachés de trois défauts majeurs : l’insincérité, comme l’a expliqué mon collègue Lachaud, l’instabilité – des murs de restes à payer sont en train de se dresser et les crédits ouverts dès cette année seront très probablement impossibles à honorer en 2027 – et enfin une certaine naïveté, en particulier sur le plan des coopérations. Celles entre la France et l’Allemagne concernant le Scaf et le MGCS menacent gravement la BITD française.
Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Mon groupe votera, au contraire, ces crédits.
M. Nicolas Ray (DR). Le présent budget s’inscrit dans la démarche engagée par la loi de programmation militaire en prévoyant un effort budgétaire significatif malgré le contexte très dégradé de nos finances publiques. Compte tenu du contexte géopolitique très incertain et parce que notre outil de défense est encore fragile et échantillonnaire, nous voterons, malgré les modifications apportées par voie d’amendements, les crédits de cette mission, ce qui permettra d’envoyer un signal fort.
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Ce budget est utile en ce qu’il permet d’adapter globalement notre armée au nouvel environnement stratégique, malgré quelques manquements que nous n’avons pas pu faire corriger, notamment dans le domaine maritime – l’objectif de quinze frégates de premier rang est insuffisant compte tenu de la responsabilité incombant à notre pays qui est doté de la deuxième zone économique exclusive au monde et doit protéger ses nombreux territoires dits d’outre-mer. Enfin, comme nous l’avions déjà regretté lors de l’adoption de la loi de programmation militaire, ce projet de loi de finances ne fixe pas de véritables priorités stratégiques pour la rationalisation de l’emploi de nos forces armées. Néanmoins, mon groupe votera pour ces crédits, leurs imperfections ne devant pas faire oublier l’essentiel, à savoir l’adaptation budgétaire réelle de notre armée à un contexte international plus que dégradé.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cette mission est dotée de plus de 50 milliards d’euros de crédits, ce qui représente une hausse de 3,3 % par rapport à la loi de finances pour 2024. Cette augmentation s’inscrit dans la trajectoire liée à la loi de programmation militaire 2024-2030, votée l’an dernier. Comme nous restons dans l’épure initiale, nous voterons ces crédits.
M. Nicolas Sansu (GDR). Eu égard aux orientations de ce budget, qui reprend celles de la loi de programmation militaire, contre laquelle nous avions voté, et compte tenu du fait que nous restons scotchés à un modèle d’armée de projection, assise sur la dissuasion nucléaire, nous ne voterons pas ces crédits.
La commission adopte les crédits de la mission Défense modifiés.
Après l’article 59
Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission adopte l’amendement II-CF2251 de M. Aurélien Saintoul.
Contre l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission adopte l’amendement II-CF2253 de M. Bastien Lachaud.
Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission adopte les amendements identiques II-CF2951 de la commission de la défense et II-CF2256 de M. Aurélien Saintoul.
Amendement II-CF2257 de M. Aurélien Saintoul
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission adopte les amendements identiques II-CF2939 de la commission de la défense et II-CF2254 de M. Arnaud Saint-Martin.
Contre l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission adopte l’amendement II-CF2258 de M. Aurélien Saintoul.
Contre les avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, elle adopte successivement les amendements II-CF2952, II-CF2967 et II-CF2968 de la commission de la défense.
Amendement II-CF2969 de la commission de la défense
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable à cet amendement qui demande un rapport sur le plan « famille » : je peux mettre à votre disposition celui que j’ai remis il y a un an et demi.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission adopte l’amendement II-CF2970 de la commission de la défense.
Amendement II-CF2971 de la commission de la défense
M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. J’avais émis un avis défavorable, mais la commission de la défense a adopté cet amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF3004 de M. Christophe Plassard
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Cet amendement demande la remise d’un rapport visant à analyser le comportement des entreprises dont l’État est actionnaire. Dans le cadre du passage à l’économie de guerre voulu par le Président de la République, la plupart des entreprises attendent des bons de commande du ministère des armées pour s’engager dans une démarche de renforcement des capacités de production ou de constitution de stocks. Il s’agit de déterminer si l’État opte lui-même, en tant qu’actionnaire, pour une démarche proactive.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF3005 de M. Christophe Plassard
M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Cet amendement vise à permettre de présenter des travaux sur les difficultés de financement des petites et moyennes entreprises du secteur de la défense et sur les moyens d’y remédier.
Après que le Sénat a adopté une proposition de loi reprenant des dispositions votées par notre Assemblée lors de l’examen du PLF pour 2024 afin de rediriger une partie des fonds non centralisés des livrets réglementés, l’annonce par le Premier ministre dans son discours de politique générale du 1er octobre de sa volonté de créer un livret servant au soutien à l’industrie française a renforcé la conviction que l’épargne est un levier sous-utilisé par l’État pour ses politiques stratégiques.
Le rapport que je demande devra déterminer les moyens les plus efficaces pour mobiliser l’épargne en vue de soutenir le développement d’une économie de guerre, en se penchant notamment sur les commandes liées aux programmes 144 et 146 et leur bénéfice pour les PME de la BITD française.
La commission rejette l’amendement.
Mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation (Mme Yaël Ménaché, rapporteure spéciale)
Mme Véronique Louwagie, présidente. Mme Yaël Ménaché étant absente ce soir, c’est M. Emeric Salmon qui la remplacera.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. J’ai l’honneur de vous présenter au nom de la rapporteure spéciale Yaël Ménaché les crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation.
Le PLF tend à doter cette mission de 1,9 milliard d’euros, soit un montant presque équivalent à celui inscrit dans la dernière loi de finances, qui représente 0,3 % des crédits du budget général. Si les autorisations d’engagement (AE) et les crédits de paiement (CP) sont en repli, les crédits proposés pour 2025 peuvent apparaître en légère progression, de 0,4 % en AE et de 1,34 % en CP, si on prend en considération les annulations de crédits décidées au début de l’année 2024, pour un peu plus de 24 millions.
Les tendances baissières résultent d’abord de l’évolution démographique des bénéficiaires de la dette viagère. La rapporteure spéciale souhaiterait que les dépenses ainsi économisées permettent une indexation de la valeur du point de la PMI (pension militaire d’invalidité) sur l’indice des prix à la consommation. Elle a déposé un amendement en ce sens. Le maintien de la référence à l’indice d’ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l’État ne peut que conduire à dégrader le pouvoir d’achat des anciens combattants et à placer les plus fragiles d’entre eux dans une situation de précarité.
Le souci de renforcer la solidarité pour exprimer la reconnaissance de la nation est, je n’en doute pas, partagé par l’ensemble des députés. C’est pourquoi je vous demanderai de soutenir, au-delà des clivages politiques, les amendements déposés dans cet esprit. Je pense notamment à l’élargissement de la prise en charge des frais d’éducation des pupilles de la nation jusqu’à leur vingt-huitième anniversaire et à la suppression de la condition d’âge pour le bénéfice de la demi-part supplémentaire accordée aux veuves d’anciens combattants. Je pense aussi à la situation des harkis qui, en dépit des réelles avancées permises par la loi du 23 février 2022, bénéficient trop peu souvent d’une reconnaissance juste des préjudices qu’ils ont subis à leur arrivée en France. Je déplore qu’une famille de harkis ait ainsi eu à ester devant une juridiction internationale pour faire reconnaître l’insuffisance de l’indemnisation octroyée. Le Gouvernement s’honorerait à élargir au-delà du cas d’espèce, lié au camp de Bias, le versement de montants complémentaires.
Les crédits prévus dans le cadre de la politique de mémoire sont logiquement en baisse par rapport au financement qu’avait requis le cycle mémoriel de 2024. D’autres actions mériteraient pourtant un financement pérenne, en particulier celles concernant les associations d’anciens combattants et du Souvenir français. La rapporteure spéciale nous alerte sur les besoins liés au renouvellement des porte-drapeaux lors des cérémonies, à l’entretien des monuments aux morts ou aux solutions visant à éviter la reprise de concessions funéraires échues ou abandonnées dans nos cimetières communaux qui servent de sépultures à des soldats morts pour la France.
La rapporteure spéciale salue, en revanche, l’augmentation des crédits pour le lien armée-jeunesse, dans le cadre de la nouvelle mouture de la JDC, la journée défense et citoyenneté, qui donne une place plus importante à la découverte des métiers militaires. Plus généralement, un renforcement de l’implication du ministère des armées dans la mise en œuvre du service national universel est souhaitable.
Au-delà de ces observations se rapportant au programme 169, la rapporteure spéciale a souhaité centrer cette année ses travaux sur les dispositifs d’indemnisation des victimes de la seconde guerre mondiale financés par le programme 158. Elle a repris à son compte le constat global qui a été établi par la Cour des comptes dans un rapport publié en septembre. La Cour a souligné que si la France dispose d’un des dispositifs de réparation les plus complets au sein des pays européens, l’action des administrations publiques demeure inachevée en la matière, principalement en raison de moyens insuffisants. Il y va pourtant de la bonne application de la loi de 2023 relative à la restitution des biens culturels ayant fait l’objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites.
La rapporteure spéciale, qui a pu échanger avec la Fondation pour la mémoire de la Shoah, suggère de renforcer les moyens de la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 (M2RS), créée en 2019 afin d’achever le travail de recensement systématique des œuvres dans les collections publiques, en particulier les biens dits Musées nationaux récupération (MNR). La rapporteure spéciale souligne qu’au-delà des dossiers parfois médiatisés en raison de l’importance des œuvres concernées, la restitution des biens spoliés pendant l’Occupation recouvre une grande diversité de situations patrimoniales. Le travail de justice entamé depuis le début des années 2000 doit être salué et poursuivi pour l’ensemble des ayants droit. Enfin, la rapporteure spéciale salue l’inscription d’une mesure nouvelle exceptionnelle de 1 million d’euros visant à soutenir les actions des institutions mémorielles de la Shoah dans un contexte préoccupant de recrudescence de l’antisémitisme.
M. Laurent Jacobelli, rapporteur pour avis de la commission de la défense. Ce budget a fait l’objet de longs échanges au sein de la commission de la défense, notamment au sujet de la revalorisation du point PMI, lequel n’évoluera pratiquement pas cette année. Cela représente pour les anciens combattants et tous ceux qui ont souffert un signe très négatif, après la promesse de Mme Mirallès, ex-ministre des anciens combattants, d’une double augmentation de 2 %, une fois cette année et l’autre en 2025. C’est une vraie ligne rouge pour toutes les associations d’anciens combattants et patriotiques ainsi que pour tous les groupes représentés à la commission de la défense. S’agissant des harkis, des efforts restent à faire pour accélérer le traitement des dossiers et pour quelques cas que nous aurons l’occasion d’aborder tout à l’heure. Avant que la commission de la défense n’adopte de nombreux amendements, notamment déposés par le Rassemblement national, mon avis était défavorable.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-CF2276 de Mme Zahia Hamdane
M. David Guiraud (LFI-NFP). C’est un député d’une des villes ayant accueilli le plus de harkis en France – plus de 7 000, dit-on –, qui s’exprime : nous avons d’énormes problèmes en matière de traitement des dossiers et de reconnaissance. Le maillage historiquement établi exclut, de fait, beaucoup d’habitants des quartiers nord, est et ouest de ma ville. Des associations, comme l’Afran (Association des Français rapatriés d’Afrique du Nord), se battent en déposant des dossiers auprès de l’Office national des combattants et des victimes de guerre, mais leur traitement est beaucoup trop lent pour des familles qui peinent à obtenir une forme de reconnaissance et de réparation, malgré les promesses faites lors des derniers discours officiels, notamment par le Président de la République. Le ministère nous répond que les dossiers sont trop nombreux pour les effectifs, qui seraient débordés. Nous voulons bien le croire et c’est pourquoi nous avons déposé cet amendement tout simple qui demande une augmentation des moyens alloués à la réparation des harkis.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Nous sommes nombreux à avoir été saisis par des associations d’anciens harkis et de leurs familles. La décision de la CEDH (Cour européenne des droits de l’homme) du 4 avril 2024 montre que pour beaucoup l’octroi d’une juste compensation des préjudices subis reste un parcours du combattant, les conditions d’éligibilité fixées par l’administration variant d’un lieu d’accueil à un autre pour des raisons souvent mal comprises ou perçues comme arbitraires. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF2275 de M. Bastien Lachaud et II-CF2899 de la commission de la défense (discussion commune)
M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Notre amendement, de justice fiscale, vise à permettre aux veuves d’anciens combattants de pouvoir bénéficier d’une demi-part fiscale supplémentaire sans attendre l’âge de 74 ans.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Je suis favorable à cette évolution.
La commission adopte l’amendement II-CF2275.
En conséquence, l’amendement II-CF2899 tombe.
Contre l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission adopte l’amendement II‑CF2273 de M. Bastien Lachaud.
Amendements identiques II-CF2897 de la commission de la défense et II-CF2730 de Mme Catherine Hervieu et amendement II-CF2896 de la commission de la défense (discussion commune)
M. Laurent Jacobelli, rapporteur pour avis. Ces amendements concernent un point très important, même si les sommes en jeu ne sont pas énormes. Il s’agit de régulariser la situation de membres rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun, au nombre de vingt-deux. Nous demandons au total 92 290 euros, soit un peu plus de 4 000 euros par personne, afin de permettre une forme de reconnaissance absolument nécessaire.
Le premier amendement, II-CF2897, adopté par la commission de la défense, ainsi que l’identique, II-CF2730, prennent le financement nécessaire sur l’indemnisation des victimes de persécutions antisémites pendant la seconde guerre mondiale. Vous comprendrez que je n’y sois pas favorable, contrairement à l’amendement II-CF2896 qui tend à créer un programme spécifique sans toucher au budget des victimes de la déportation.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Même avis.
La commission adopte les amendements II-CF2897 et II-CF2730.
En conséquence, l’amendement II-CF2896 tombe.
Amendements identiques II-CF2898 de la commission de la défense et II-CF2277 de M. Christophe Bex
M. Laurent Jacobelli, rapporteur pour avis. Plusieurs groupes s’alarment du fait que le point de la PMI ne soit pratiquement pas revalorisé. L’écart entre son augmentation et l’évolution du coût de la vie, hors tabacs, au fil des années est d’à peu près 17 points. Le pouvoir d’achat a reculé d’autant, ce qui est intenable. L’amendement de la commission de la défense vise à attirer l’attention de M. le ministre des anciens combattants, à qui je me suis directement adressé en vue de trouver une solution. Nous ne pouvions pas adopter autre chose qu’un amendement de 1 euro, compte tenu du cadre contraint de ce budget et parce que nous n’acceptons pas de prendre l’argent sur l’indemnisation des victimes de la Shoah, mais ces amendements d’appel sont très importants.
Suivant l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission adopte les amendements.
Contre l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission rejette l’amendement II‑CF2909 de la commission de la défense.
Amendement II-CF2905 de la commission de la défense
M. Laurent Jacobelli, rapporteur pour avis. Il s’agit, là encore, d’un amendement d’appel. Nous souhaitons appeler l’attention de notre assemblée sur la nécessité d’aider les associations d’anciens combattants à entretenir les monuments aux morts, qui sont en quelque sorte ceux de notre famille à tous puisqu’ils honorent les personnes tombées pour la France.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Favorable.
Mme Véronique Louwagie, présidente. En règle générale, l’entretien de ces monuments est assuré par les collectivités, lesquelles font appel à certaines structures qui les y aident. C’est en tout cas ainsi que les choses se passent chez moi, dans l’Orne.
M. Laurent Jacobelli, rapporteur pour avis. Ces structures sont précisément financées par la mission Anciens combattants ; je pense notamment à l’Office national des combattants et des victimes de guerre (ONACVG) et au Souvenir français.
La commission rejette l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission rejette l’amendement II‑AC2907 de la commission de la défense.
Amendements II-CF2906 et II-CF2904 de la commission de la défense (discussion commune)
M. Laurent Jacobelli, rapporteur pour avis. Il s’agit, ici, de préserver les tombes des combattants morts pour la France.
Contre l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission rejette successivement les amendements.
Contre l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission rejette successivement les amendements II-CF2902, II-CF2903, II-CF2908 et II-CF2895, tous de la commission de la défense.
Amendements identiques II-CF2900 de la commission de la défense et II-CF2274 de M. Emmanuel Fernandes
M. Laurent Jacobelli, rapporteur pour avis. Il s’agit de créer un nouveau programme consacré à la reconnaissance et à l’indemnisation des orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle pendant la seconde guerre mondiale. La question est très importante dans les départements concernés.
M. Emmanuel Fernandes (LFI-NFP). L’incorporation de force de 145 000 Alsaciens et Mosellans dans les armées ennemies pendant la seconde guerre mondiale reste une plaie ouverte pour les habitants des trois départements concernés. Comment se peut-il que, 80 ans après, leurs orphelins souffrent encore d’une double peine : celle d’avoir perdu un parent forcé de se battre dans les armées nazies et celle de demeurer ostracisés, privés de reconnaissance et du travail mémoriel qui libérerait de cette chape de plomb l’Alsace et la Moselle et réconcilierait le pays ?
Oui, les malgré nous ont subi leur sort car, s’ils refusaient l’incorporation de force, les membres de leur famille, enfants compris, étaient expropriés, jetés à la rue et internés dans le camp de concentration du Struthof, voire déportés dans des camps de travail en Allemagne.
Nous proposons donc d’étendre aux orphelins des malgré nous le décret de 2004 qui indemnise les descendants de victimes de la barbarie nazie, car c’est bien de cela qu’il s’agit.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Avis favorable.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). J’insiste sur l’importance de ces amendements, dont j’espère qu’ils recueilleront l’unanimité, et je salue l’engagement de notre collègue Fernandes en faveur de la reconnaissance des malgré nous, reconnaissance que leurs orphelins exigent depuis trop longtemps. Nous devons nous souvenir qu’à compter d’août 1942, 130 000 Alsaciens et Mosellans nés entre 1908 et 1926 ont été arrachés à leur famille et obligés de servir dans une armée étrangère parce qu’ils vivaient dans deux départements annexés de fait par l’Allemagne nazie.
La commission adopte les amendements.
Amendements II-CF2901 et II-CF2910 de la commission de la défense (discussion commune)
M. Laurent Jacobelli, rapporteur pour avis. Nous proposons, à la demande de nombreuses associations, que les pupilles de la nation et les orphelins de guerre puissent être recensés en vue de leur indemnisation.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Favorable.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Je suis moi-même très sensible à cette question.
La commission rejette successivement les amendements.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Nous en venons aux explications de vote sur les crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Je suis défavorable à l’adoption des crédits de cette mission.
M. Laurent Jacobelli (RN). Compte tenu du rejet d’un certain nombre d’amendements, notre groupe s’oppose à l’adoption des crédits de la mission.
M. David Amiel (EPR). Nous voterons pour l’adoption de ces crédits.
M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Du fait de l’adoption de deux amendements que nous jugeons particulièrement importants – celui qui vise à indemniser les harkis et celui qui tend à reconnaître les orphelins des malgré nous –, nous voterons pour les crédits de la mission.
Mme Dieynaba Diop (SOC). Eu égard aux amendements importants que nous sommes parvenus à faire adopter, nous voterons pour l’adoption des crédits de la mission.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Pour information, les amendements adoptés représentent un peu plus de 42 millions.
M. Nicolas Ray (DR). Compte tenu de ce que représente le monde combattant et malgré le contexte budgétaire contraint, nous voterons en faveur de l’adoption des crédits de cette mission.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Eu égard aux amendements qui ont été adoptés, notamment celui qui a trait à la reconnaissance des malgré nous, nous voterons pour l’adoption des crédits de la mission.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Favorable.
M. Christophe Plassard (HOR). Favorable également.
M. Nicolas Sansu (GDR). Le budget augmente de 1 % par rapport à la loi de finances initiales de 2024, soit une progression moindre que l’inflation. Mais puisque de très beaux amendements ont été adoptés, nous voterons pour l’adoption des crédits de cette mission.
M. Gérault Verny (UDR). Nous voterons contre.
Contre l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission adopte les crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation modifiés.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Nous en venons à l’examen des amendements portant article additionnel rattaché à la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation.
Après l’article 59
Amendement II-CF2278 de M. Emmanuel Fernandes
M. Emmanuel Fernandes (LFI-NFP). Nous demandons que soit remis au Parlement un rapport évaluant le nombre des malgré nous survivants en vue de leur indemnisation.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission rejette successivement les amendements II-CF2912 et II-CF2913 de la commission de la défense.
Amendement II-CF2279 de M. Aurélien Taché
M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Nous demandons au Gouvernement qu’il remette au Parlement un rapport qui fasse la lumière sur un épisode très sombre de l’histoire coloniale : le massacre de Thiaroye. La mission Libération, chargée d’organiser la commémoration du 80e anniversaire de la Libération, disposait des moyens nécessaires pour accomplir ce travail historique ; elle ne l’a pas fait. Le service historique de la défense est parfaitement capable de s’acquitter de cette tâche.
M. Emeric Salmon, rapporteur spécial suppléant. Les demandes de reconnaissance par la France de la répression violente qui est intervenue au camp de Thiaroye en 1944 ont été satisfaites à deux reprises par le président Hollande, lors de déplacements au Sénégal en 2012 et 2014. Surtout, l’ONACVG a décidé, en juillet dernier, de faire droit à la demande d’attribuer aux tirailleurs décédés à la suite de la répression la mention « Mort pour la France ».
Les historiens s’accordent sur l’impossibilité matérielle d’établir le nombre des victimes. Dès lors, je ne vois pas comment la production scientifique du Gouvernement pourrait être meilleure que celle déjà publiée par les historiens. En tout état de cause, un amendement au projet de loi de finances ne me paraît pas être le véhicule idoine pour atteindre votre but, à savoir l’établissement de la responsabilité de la France dans ce que vous désignez comme un massacre. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial suppléant, la commission rejette l’amendement II‑CF2911 de la commission de la défense.
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Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du jeudi 31 octobre 2024 à 23 heures
Présents. - M. David Amiel, M. Karim Ben Cheikh, M. Philippe Brun, M. Pierre-Yves Cadalen, Mme Gabrielle Cathala, M. Thomas Cazenave, M. Jean-François Coulomme, M. Sébastien Delogu, M. Jocelyn Dessigny, Mme Dieynaba Diop, Mme Mathilde Feld, M. Emmanuel Fouquart, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, M. Philippe Juvin, M. Jérôme Legavre, M. Gérard Leseul, M. Emmanuel Mandon, M. Jean-Paul Mattei, M. Nicolas Metzdorf, M. Christophe Plassard, M. Nicolas Ray, M. Matthias Renault, M. Emeric Salmon, M. Arnaud Simion, Mme Danielle Simonnet, M. Jean-Philippe Tanguy, Mme Céline Thiébault-Martinez, M. Gérault Verny
Excusés. - M. Éric Coquerel, M. Nicolas Sansu
Assistaient également à la réunion. - Mme Cyrielle Chatelain, M. Emmanuel Fernandes, M. Laurent Jacobelli, M. Bastien Lachaud, M. Pascal Lecamp, M. Aurélien Saintoul, Mme Isabelle Santiago, Mme Mélanie Thomin
[SM1]L’amendement avait déjà été retiré avec le début de la discussion, son état sur eLoi n’est pas « Discuté »
[NB2]Substituer « à » par « pour » ?
[NB3]Pourquoi des guillemets ? S’agit-il d’un néologisme ?
[NB4]Cette affirmation ne correspond pas à la pensée du rapporteur spécial. Si l’exécution 2025 peut menacer la mise en œuvre de la revalorisation des officiers, le rapporteur spécial ne souhaite pas conditionner la revalorisation à cette dernière.