Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

 

 

–  Avis public sur la nomination par la Présidente de l’Assemblée nationale de Mme Lucie Muniesa à la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations              2

–  Examen du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 (n° 538) (M. Charles de Courson, rapporteur général)              2

  Présences en réunion.......................30


Mercredi
13 novembre 2024

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 051

session ordinaire de 2024-2025

 

 

Présidence de

M. Éric Coquerel,

Président

 

 


  1 

La commission émet un avis public sur la nomination par la Présidente de l’Assemblée nationale de Mme Lucie Muniesa à la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations

M. le président Éric Coquerel. J’ai reçu de la présidente de l’Assemblée nationale une lettre m’informant qu’elle envisage de désigner Mme Lucie Muniesa pour siéger à la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, en remplacement de Mme Florence Parly qui avait été désignée en avril 2023.

Je vous rappelle que, en application du 6° de l’article L. 518-4 du code monétaire et financier, le président ou la présidente de l’Assemblée nationale désigne à la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations trois membres « en raison de leurs compétences dans les domaines financier, comptable ou économique ou dans celui de la gestion […] après avis public de la commission permanente de l’Assemblée nationale chargée des finances ».

Selon une pratique désormais bien établie, il convient simplement de recueillir votre assentiment à cette nomination, sans audition préalable de la personne ni scrutin secret sur la proposition de la présidente de l’Assemblée nationale.

Un CV (curriculum vitae) relatif à la personne dont la nomination est envisagée vous a été préalablement communiqué.

 

La commission émet un avis favorable à la nomination de Mme Lucie Muniesa comme membre de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations.

 

Puis la commission examine le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 (n° 538) (M. Charles de Courson, rapporteur général)

 

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons à l’examen du projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) pour 2024, au sujet duquel nous avons auditionné, le lendemain de sa présentation en Conseil des ministres, M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. Comme vous le savez, ce texte sera examiné en séance publique le mardi 19 novembre, et le délai de dépôt des amendements expire vendredi à dix-sept heures.

Ce projet de loi a fait l’objet de quatre-vingt-neuf amendements en commission. Le contrôle de leur recevabilité financière et du respect des exigences de la Lolf – loi organique relative aux lois de finances – a conduit à en déclarer vingt irrecevables, soit un taux d’irrecevabilité de 22,5 %. Cela peut sembler élevé, alors même que les auteurs des amendements avaient bien compris que le projet de loi de finances de fin de gestion ne pouvait accueillir de nombreuses dispositions que les parlementaires ont l’habitude de proposer en loi de finances et que la quasi-totalité des amendements déposés étaient des amendements de crédits. Néanmoins, un nombre significatif de ces amendements ne respectaient pas les exigences habituelles en matière de disponibilité des crédits.

S’agissant des amendements proposant des mouvements de crédits relatifs à des programmes pour lesquels le PLFG ne prévoyait aucun mouvement de crédits nouveau, j’ai appliqué les mêmes règles que l’an dernier. Avec le collectif de fin de gestion, nous disposons d’une information précieuse : un tableau, figurant aux pages 157 et suivantes du projet de loi, précise le montant des autorisations d’engagement et des crédits de paiement encore disponibles pour chaque programme budgétaire. J’ai considéré, comme l’année dernière, qu’il n’était pas possible de proposer des annulations lorsque les crédits de programmes votés en loi de finances initiale avaient déjà été consommés dans des proportions supérieures au mouvement proposé.

En ce qui concerne les amendements demandant de refuser des annulations de crédits, leurs auteurs ont parfois commis l’une ou l’autre des deux erreurs suivantes, voire les deux de façon cumulative.

Les auteurs de certains amendements ont refusé des annulations de crédits pour certains programmes sans supprimer, dans le même temps, les ouvertures proposées pour d’autres programmes de la même mission. En soi, il est possible de moduler par amendements les annulations et les ouvertures nouvelles de crédits ou de les répartir différemment entre les programmes de la mission. Toutefois, la somme des propositions de crédits résultant du projet de loi combiné à l’amendement ne doit pas être supérieure aux crédits totaux ouverts pour la mission.

Les auteurs d’amendements n’ont parfois refusé des annulations de crédits que pour les crédits hors titre 2, alors que le gouvernement proposait des annulations sur le titre 2. Ils se sont alors heurtés à l’impossibilité de refuser autant d’annulations pour des crédits hors titre 2 alors que, à l’inverse, ils auraient pu refuser des annulations de montants comparables pour des crédits de titre 2.

Une fois que les auteurs d’amendements fautifs auront corrigé ces différentes imperfections, au demeurant compréhensibles car il est beaucoup plus complexe de procéder à des mouvements de crédits dans un projet de loi de finances de fin de gestion, il ne fait pas de doute qu’ils parviendront à déposer des amendements recevables en vue de la séance. Mon cabinet est évidemment à la disposition des collègues concernés.

Comme nous avons déjà eu un débat lors de l’audition du ministre, jeudi dernier, je vous propose de commencer sans plus tarder l’examen des amendements.

Article liminaire : Prévision du solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques pour l’année 2024

Amendements CF22 de M. Mathieu Lefèvre, CF83 et CF85 de M. David Amiel, CF43 de M. Mathieu Lefèvre, CF3 de M. Charles Sitzenstuhl et CF44 de M. Mathieu Lefèvre (discussion commune)

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Mon premier amendement vise à rappeler, notamment au gouvernement, que des marges de manœuvre étaient encore possibles au mois de septembre, lors de sa prise de fonctions, et qu’elles le restent dans ce projet de loi de finances de fin de gestion, pour ramener le déficit public bien en deçà de 6,6 % du PIB. Il faudrait ainsi davantage d’annulations de crédits mis en réserve ; le gouvernement fait un choix minimal, qui se monte à 5,6 milliards d’euros pour 2024. Par ailleurs, des mesures réglementaires de bon sens n’ont pas été prises, comme la fin du remboursement des tests covid sans ordonnance, non plus que des mesures rétroactives en matière de fiscalité, par exemple l’application à l’exercice 2024 de la contribution sur les rentes inframarginales ou de la taxe sur le rachat d’actions, qui auraient très bien pu figurer dans le projet de loi de finances. Ces mesures nous permettraient de partir d’un point moins haut pour le désendettement et la réduction des déficits publics dans le projet de loi de finances pour 2025.

M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Je présenterai en même temps les amendements CF83 et CF85, le second étant de repli. Heureusement que des décisions courageuses – 10 milliards d’euros d’annulations de crédits et 16 milliards d’euros de « gel » – ont été prises en début d’année par Gabriel Attal, Bruno Le Maire et Thomas Cazenave. Ces mesures ont permis de contenir le déficit après un dérapage toujours non expliqué, en particulier des recettes fiscales – nous attendons beaucoup de la commission d’enquête. Il nous paraît important de continuer les efforts pour réduire le déficit, y compris en 2024. Je sais que des mesures ont déjà été prises, mais Mathieu Lefèvre a donné d’autres exemples. L’effort en 2025 sera plus facile si nous en faisons déjà le plus possible en 2024. Nos amendements demandent donc au gouvernement d’annuler davantage de crédits jusqu’à présent gelés.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). S’il est devenu malheureusement impossible, dès lors que nous sommes en novembre, d’atteindre 5,5 % de déficit, il est encore temps de passer sous les 6 %, notamment en freinant beaucoup plus fermement les dépenses qui font actuellement l’objet d’une mise en réserve – des programmes sont épargnés. Je souligne au passage que l’État a fait le boulot en 2024 : la dépense de l’État sera inférieure au niveau de 2023. S’agissant du seul levier dont nous disposons vraiment à ce stade de l’année, nous pouvons néanmoins aller plus loin.

M. Charles Sitzenstuhl (EPR). L’amendement CF3, qui a déjà été déposé à plusieurs reprises depuis quelques semaines, vise à poursuivre la discussion sur l’état du déficit en 2024. Les 6,1 % actuellement prévus n’étaient pas une fatalité : c’est le choix de ce gouvernement de laisser le déficit à un tel niveau en 2024. Il était possible de passer sous la barre des 6 %, comme l’ont notamment démontré la semaine dernière au Sénat Bruno Le Maire, l’ancien ministre des finances, et Gabriel Attal, l’ancien premier ministre. Pour cela, le gouvernement aurait pu déposer un projet de loi de finances rectificative (PLFR) dès sa prise de fonctions – je regrette que cette décision n’ait pas été prise. S’agissant des annulations de crédits, un effort supplémentaire aurait pu être fait dans ce texte de fin de gestion et je regrette, une fois encore, que le gouvernement n’ait pas pris toutes les mesures possibles pour réduire les dépenses dès maintenant.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Le gouvernement choisit d’annuler 5,6 milliards d’euros sur les crédits mis en réserve, qui sont de l’ordre de 16 milliards – cela représente donc un peu plus d’un tiers du total. Le gouvernement peut aller plus loin, y compris parce que de nombreux crédits ne sont pas consommés et peuvent ne pas avoir vocation à l’être, si nous assumons la dimension limitative des crédits en fin d’année, pour atteindre nos objectifs budgétaires.

M. Charles de Courson, rapporteur général. L’amendement d’appel CF22 vise à interpeller le gouvernement, auquel vous reprochez de ne pas avoir pris en compte des mesures auxquelles le précédent exécutif avait travaillé. Je vous demande un retrait : vous pourrez ainsi interroger le gouvernement en séance.

L’amendement suivant, lui aussi d’appel, demande de nombreuses modifications dans le tableau de l’article liminaire, relatives non seulement à la dépense publique, que vous voulez réduire plus fortement, mais aussi aux prélèvements obligatoires, car vous demandez que des mesures fiscales nouvelles s’appliquent dès 2024. Cependant, l’article liminaire a valeur de constat : il brosse le tableau de la situation des finances publiques une fois adoptées les mesures contenues dans le texte.

Vous avez évoqué la nécessité de prendre des mesures fiscales applicables dès cette année. Or le texte soumis à notre examen ne peut en comporter. On est libre de le déplorer mais il en est ainsi, puisqu’il s’agit d’un projet de loi de finances de fin de gestion et non d’un projet de loi de finances rectificative. Cette seule raison me conduit à émettre un avis défavorable si vous ne retirez pas l’amendement.

Même avis, pour les mêmes raisons, concernant l’amendement CF85.

L’amendement CF43 vise à réduire le déficit de 0,2 point, mais l’article liminaire dresse un constat, je l’ai dit. L’exposé sommaire appelle notre attention sur le fait que tous les crédits mis en réserve ne sont pas annulés. C’est effectivement le cas. Si vous l’interpellez en séance, le gouvernement pourra, s’il le souhaite, justifier ce choix. Par conséquent, demande de retrait ou avis défavorable.

Même position au sujet des deux derniers amendements. En revanche, rien n’interdit de déposer des amendements aux articles suivants pour réduire la dépense publique. Nous pourrons ensuite revenir à l’article liminaire.

M. le président Éric Coquerel. Ces amendements de fond ont une certaine logique : ils s’inscrivent dans la suite de ce que nous a dit Bruno Le Maire lorsqu’il était encore ministre de l’économie. Il préconisait d’annuler non pas seulement une partie des crédits gelés, mais l’intégralité, ce qui porterait la baisse à plus de 26 milliards d’euros en 2024. Néanmoins, je trouve que cela ne serait pas raisonnable dès lors que l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) estime qu’il en résulterait un effet récessif en 2025.

Nous aurions pu discuter de cette question si un PLFR avait été déposé, ce qui aurait permis des amendements de recettes. Nous venons de démontrer dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 qu’il était possible d’arriver à une baisse des déficits grâce à davantage de recettes. Or un projet de loi de finances de fin de gestion porte uniquement sur les crédits, et il ne serait pas du tout raisonnable de refroidir le moteur de notre économie, qui est également alimenté par les commandes et les dépenses publiques. Il paraît nécessaire de le répéter pour que cela finisse par rentrer.

Voilà les raisons pour lesquelles je m’opposerai, pour ma part, à ces amendements.

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Quand on en est là, c’est du fanatisme : le projet de loi de finances de fin de gestion propose déjà de couper plus de 6 milliards d’euros supplémentaires dans les dépenses, alors qu’il est établi – c’est dit dans le projet de loi et tout le monde va dans le même sens – que ce sont les recettes le problème et non les dépenses.

Oui, nous arrivons à 6,1 % de déficit. Et oui, c’est le chaos budgétaire. Voilà ce que nous ont laissé les gouvernements que vous défendez. Quand on a 5,7 % de déficit structurel, c’est qu’un problème de moindres recettes se pose. Vous avez pourtant fait des coupes dans le budget de 2023 et de nouveau au début de cette année. Si nous faisons ce que vous souhaitez ou même seulement ce que le gouvernement propose – ce serait déjà une saignée –, nous aurons l’année prochaine le même problème parce que les recettes n’augmenteront pas. Ce que vous demandez atteindra directement la croissance, notre président l’a rappelé.

Mais vous avez déposé encore d’autres amendements, car vous considérez qu’on ne va jamais assez loin. Vous parlez de chiffres comme s’il n’y avait aucune réalité derrière, alors que les coupes prévues signifient 338 millions d’euros en moins pour l’écologie, quand tout le monde sait que c’est le combat à mener, et près de 150 millions d’euros en moins pour l’agriculture au moment où les agriculteurs s’apprêtent à se remobiliser – ils sont à bout de souffle.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Je rappelle à M. Le Coq que les dépenses de l’État ont augmenté de 100 milliards d’euros depuis 2019 : il me semble que nous avons un problème de dépenses plutôt que de recettes.

Les annulations de crédits ont-elles un effet récessif ? Vous considérez que c’est le cas et nous non. C’est là un débat de politique économique.

Monsieur le rapporteur général, considérez-vous que nous aurions pu techniquement aller plus loin dans les annulations de crédits en fin d’année ? Y avait-il encore des marges de manœuvre ? Tous les leviers ont-ils été utilisés en cette fin d’année pour essayer de dégonfler le déficit public ? Sinon, estimez-vous que c’est un choix politique que de maintenir le déficit public au-delà de 6 % du PIB en 2024 ?

S’agissant de la fiscalité, nous ne l’aurions certes pas fait de gaieté de cœur, mais des mesures rétroactives auraient très bien pu être prises dans la loi de finances initiales et non, évidemment, dans celle de fin de gestion.

M. Philippe Lottiaux (RN). Nous sommes toujours d’accord pour réduire le déficit, mais tous les crédits mis en réserve ne sont pas annulables. Par ailleurs, on va dépasser 1,5 % des crédits ouverts : on ne peut pas s’y prendre de cette manière, il aurait fallu un PLFR. Nous ne voterons donc pas ces amendements.

Mme Véronique Louwagie (DR). Je comprends les propositions de nos collègues compte tenu de leur constance à les défendre. Ils appelaient à un PLFR dès le printemps, je crois. On peut effectivement regretter de ne pas en avoir eu un dès le décret d’annulation de 10 milliards d’euros de crédits du mois de février, c’est-à-dire à peine deux mois après la publication du PLF. Pour autant, ce qui nous est proposé n’est pas raisonnable, car il ne restera qu’un mois après l’adoption du projet de loi de finances de fin de gestion pour appliquer des baisses de crédits d’une très grande ampleur. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre ces amendements.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je suis un peu sur la même ligne. Nous étions nombreux à souhaiter un PLFR, mais il était peut-être un peu tôt en février ou en mars pour avoir de la visibilité sur les recettes. Dans l’idéal, il aurait fallu attendre mai ou juin. Or chacun sait ce qui s’est passé et nous prenons acte de la situation. Le temps qui reste est un peu court pour agir : laissons donc ce projet de loi de fin de gestion suivre sa course. C’est une photographie. Nous ne pouvons y traiter la question des recettes, et il faudra faire avec. Nous ne voterons pas ces amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’article liminaire non modifié.

 

 

  PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

 

Article 1er : Ajustement des dispositions relatives à l’affectation de ressources à des tiers

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement CF33 de Mme Christine Arrighi.

Elle adopte l’article 1er non modifié.

Article 2 : Rectification du montant de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » au titre de l’année 2024

Amendements de suppression CF38 de M. Aurélien Le Coq et CF63 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Nous demandons la suppression de l’article 2 qui réduira de plus de 50 millions d’euros, en cours d’exercice, le transfert d’une partie des recettes de TVA destiné à financer l’audiovisuel public. Son budget, déjà très affaibli, s’amenuisera encore dans les prochaines années. La redevance pour l’audiovisuel avait le mérite d’assurer des fonds propres à ces services publics.

M. Charles de Courson, rapporteur général. L’article 2 vise à diminuer de 50,7 millions d’euros la fraction de TVA affectée aux sociétés de l’audiovisuel public. Cette évolution découle essentiellement de l’arrêt du programme de transformation de l’audiovisuel public, qui reposait sur un programme budgétaire ad hoc. Ce programme de transformation a fait l’objet d’annulations de crédits de 20 millions d’euros dans le cadre du décret du 21 février 2024, puis il a été interrompu à partir du mois de mai dans le contexte de l’examen de la proposition de loi visant à fusionner les sociétés de l’audiovisuel public. Le PLFG se limite à constater la non-consommation de 30 millions d’euros de crédits supplémentaires et à les annuler. Ces amendements rétabliraient donc un programme qui n’existe plus depuis mai, ce qui perturberait les trajectoires financières des sociétés de l’audiovisuel public. Elles ne seraient pas en mesure de s’adapter à un financement supplémentaire pour déployer dans un temps contraint des investissements. Je rappelle également que ces fonds étaient destinés à favoriser la création d’une holding, projet qui semble abandonné. L’annulation de ces crédits étant sans conséquence pour les moyens de l’audiovisuel public, avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Il y aura quand même une conséquence. Vous voulez laisser à l’appréciation de l’exécutif, quel qu’il soit, la détermination d’une partie du budget de l’audiovisuel public. Constance Le Grip avait déposé un amendement pour 2025 que nous étions beaucoup à soutenir, et la question se pose aussi en 2024. Si ces crédits n’ont pas été utilisés, ce n’est pas parce qu’ils n’étaient pas nécessaires mais à cause de la situation dans laquelle s’est trouvé l’audiovisuel public. Il faut arrêter avec cette pratique et donner à l’audiovisuel public des assurances en matière budgétaire, pour lui permettre de fonctionner.

La commission rejette les amendements.

Amendements CF4 de M. Matthias Renault et CF59 de M. Mathieu Lefèvre (discussion commune)

M. Matthias Renault (RN). L’amendement CF4 tend à matérialiser notre proposition constante de privatiser une partie de l’audiovisuel public, pour réaliser une économie de 2,5 milliards d’euros.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Monsieur le président, une fois n’est pas coutume, je partage votre inquiétude. Les fonds de transformation ont cessé d’être versés, mais les besoins continuent à exister en la matière. C’est notamment vrai pour l’Institut national de l’audiovisuel (INA), à Bry-sur-Marne, qui fait face, avec l’arrêt des versements, à une difficulté de trésorerie de 7 millions d’euros, ramenée à 5 millions grâce à des efforts de bonne gestion. Je propose d’abonder d’autant le budget de l’INA.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Le premier amendement tend à diminuer de 2,6 milliards d’euros la fraction de TVA affectée à l’audiovisuel public – le montant serait alors ramené à 1,4 milliard en 2024. Nous connaissons le point de vue du groupe Rassemblement national concernant la privatisation de l’audiovisuel public. L’amendement pose, par ailleurs, un problème juridique majeur : il amputerait de 65 %, à un mois de la fin de l’année, le budget des sociétés de l’audiovisuel public alors qu’elles ont déjà consommé 3,3 milliards d’euros de crédits de paiement. L’amendement conduirait ces sociétés à une impasse majeure et porterait atteinte à l’indépendance de l’audiovisuel public, ce qui nous exposerait certainement à une censure du Conseil constitutionnel. Avis défavorable.

Le second amendement est d’une tout autre nature. L’arrêt des versements prévus dans le cadre du programme de transformation des sociétés de l’audiovisuel public a eu lieu en mai 2024. Depuis lors, l’INA a pu intégrer cette contrainte financière nouvelle dans ses perspectives. Les crédits qui lui sont alloués s’inscrivent dans une tendance positive : ils ont été revalorisés de 11 % en 2023 – soit 10 millions d’euros – et de 4 % en 2024. Il est raisonnable que l’INA, comme l’ensemble des sociétés de l’audiovisuel, participe au redressement des comptes publics. Par conséquent, avis défavorable.

Successivement, la commission rejette l’amendement CF4 et adopte l’amendement CF59.

Elle adopte l’article 2 modifié.

Après l’article 2

Amendement CF19 de Mme Marie-Christine Dalloz

Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Le gouvernement ne peut pas sans cesse faire financer ses mesures par les collectivités territoriales. La « prime Ségur » a été étendue à l’ensemble du personnel sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif, sans concertation, alors qu’elle représente une dépense supplémentaire de 170 millions d’euros pour les départements. L’amendement vise à compenser le coût de cette mesure prise unilatéralement en prélevant le montant correspondant sur les recettes de l’État.

M. Charles de Courson, rapporteur général. L’amendement pose la question plus vaste des décisions prises par les gouvernements successifs, sans compensation pour les départements, dont un nombre croissant est en déficit de fonctionnement. Je vous suggère de le retirer et de le redéposer en séance afin d’interroger directement le gouvernement sur le sort réservé aux amendements adoptés en commission et en séance sur la première partie du projet de loi de finances pour 2025, en particulier à celui prévoyant 466 millions d’euros d’aide aux départements que nous avions adopté à la quasi-unanimité. Avis défavorable, même si vous avez raison sur le fond.

M. le président Éric Coquerel. Je soutiendrai l’amendement, qui est la meilleure manière d’obtenir une réponse du gouvernement.

Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Je maintiens l’amendement. Ce n’est pas seulement un amendement d’appel, c’est une question de logique. L’accord initialement prévu n’a pas été respecté : l’État n’a pas compensé le coût de la mesure, ce qui met en difficulté les départements. Je rappelle que ceux-ci financent les Ehpad à but non lucratif.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Dans ce cas, j’émets un avis de sagesse.

La commission adopte l’amendement CF19.

TITRE II : DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

 

Article 3 : Équilibre général du budget de trésorerie

Amendements CF7 et CF6 de M. Matthias Renault

M. Kévin Mauvieux (RN). Ces deux amendements d’appel visent à tirer la sonnette d’alarme au sujet du coût de la dette indexée et de la souveraineté de la dette.

L’amendement CF7 vise à obtenir plus d’informations sur le surcoût qu’ont représenté les obligations assimilables du Trésor indexées sur l’inflation (OATi) en 2024. C’est notre cheval de bataille : les OATi coûtent très cher, dans une période où nous cherchons à réduire les dépenses. L’amendement CF6, quant à lui, demande plus de transparence sur les détenteurs de la dette. Lors du printemps de l’évaluation, j’ai rendu un rapport démontrant que l’on ne savait pas réellement où était détenue notre dette ; on sait seulement que la moitié des prêteurs sont des non-résidents. La loi empêche l’État de savoir où elle se trouve.

M. Charles de Courson, rapporteur général. L’amendement CF7 n’est pas raisonnable. Même si l’on peut déplorer leur existence, les OATi représentent 10 % de notre dette et l’on ne peut pas supprimer du tableau de financement de l’État les 4 milliards d’euros que représente le supplément d’indexation en 2024.

Ma position sur le sujet est celle de l’Allemagne, qui interdit l’indexation des OAT. Les OATi perturbent les comptes de l’État français : il y a un peu plus d’un an, il a fallu faire une provision de 10 milliards d’euros et les charges liées à la dette sont devenues erratiques en raison de cette provision que l’on récupère progressivement. Je vous suggère de retirer l’amendement et de le déposer en séance afin de poser directement la question au gouvernement : faut-il continuer d’émettre des OAT indexées ?

L’amendement CF6 vise à connaître les détenteurs des titres de dette souveraine française par nationalité et par type d’activité. Nous demandons cette information depuis plusieurs années. Cependant, le moyen proposé complexifierait excessivement le tableau de financement de l’État, qui n’a pas vocation à être le réceptacle de telles informations. Un indicateur de performance, une annexe dédiée ou le rapport sur la dette annexé au projet de loi de finances seraient plus adéquats. Je suis favorable au fond de l’amendement, comme la quasitotalité des membres de la commission, mais pas sous cette forme. Avis défavorable.

M. Kévin Mauvieux (RN). Je maintiens les amendements, n’en étant pas le signataire principal ; si je l’étais, je retirerais peut-être le premier, mais pas le second. Nous l’avons déposé parce qu’aucun rapport publié ne contient cette information. Le gouvernement est sourd à nos demandes et chacun campe sur ses positions. Notre appel aura plus de force s’il n’est pas noyé dans un texte contenant d’autres mesures du même type.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement CF45 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Il vise à savoir si les prévisions d’impôt sur les sociétés présentées dans le PLFG sont nettes du mécanisme d’autolimitation. Comme vous le savez, l’impôt sur les sociétés peut être modulé par les entreprises si elles considèrent, à tort ou à raison, que le montant versé est trop important, sur le modèle du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Cette autolimitation a conduit à des difficultés de prévision de l’impôt sur les sociétés indiquées dans le rapport du sénateur Husson, lequel préconise de limiter la prévision du dernier trimestre au seul quatrième acompte. Je souhaite connaître le point de vue du rapporteur général sur cette préconisation et savoir si le gouvernement en a tenu compte.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Cet amendement à 1 euro vise à appeler l’attention du gouvernement sur les prévisions d’impôt sur les sociétés et sur la proposition récemment formulée par mon homologue, le sénateur Jean-François Husson, à propos du cinquième acompte de l’impôt sur les sociétés : « Compte tenu de l’impossibilité, en pratique, de faire une prévision fiable sur son niveau qui, net de l’autolimitation, peut être positif ou négatif, il serait préférable de limiter la prévision du dernier trimestre, comme celle des trimestres précédents, au seul quatrième acompte. » Il s’agit tout de même de recettes de l’année : il serait curieux de n’en tenir aucun compte dans les textes financiers de l’année. Ne serait-il pas plus approprié de demander aux entreprises de communiquer à l’administration fiscale plus d’informations en amont sur leur cinquième acompte, ou encore de demander au Gouvernement et à son administration de tenir meilleur compte des comptes nationaux trimestriels dans l’établissement des prévisions d’impôt sur les sociétés du projet de loi de finances de fin de gestion ?

Vous pourrez, si vous y tenez, redéposer l’amendement en vue de l’examen du texte en séance, mais ce n’est pas son adoption qui vous permettra d’obtenir les réponses souhaitées. La question pourrait être abordée dans le cadre, plus approprié, des travaux que la commission des finances dotée des pouvoirs d’une commission d’enquête mènera au cours des prochaines semaines. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendement CF11 de M. Charles Sitzenstuhl et CF46 de M. Mathieu Lefèvre (discussion commune)

M. Charles Sitzenstuhl (EPR). Mon amendement vise à interpeller le gouvernement sur la chute importante des recettes de la TVA. Je déposerai d’autres amendements d’appel sur l’article 3 en séance publique. Nous devons comprendre les erreurs de prévision du budget.

M. Mathieu Lefèvre (EPR). Monsieur le rapporteur général, à votre connaissance, le gouvernement a-t-il tenu compte des retards de remboursement de TVA en 2023 dans le PLFG ?

M. Charles de Courson, rapporteur général. Vous demandez au gouvernement s’il a bien réalisé une étude interne sur les raisons des retards dans le traitement des remboursements de TVA en 2023 et quelles mesures correctives il a adoptées depuis septembre 2024 pour la fin de gestion. Des instructions ont-elles été données en vue de freiner les remboursements, ou est-ce un problème d’organisation des services ? On ne le sait pas. Je constate seulement que les remboursements et dégrèvements ont considérablement augmenté par rapport à la loi de finances initiale – 7 milliards d’euros – sans explication précise ; une partie est due à la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS), mais celle-ci représente tout au plus 500 à 700 millions d’euros, soit 10 % de la variation. Je vous suggère de retirer les amendements et de demander des explications au gouvernement en séance.

Les amendements sont retirés.

Amendement CF5 de M. Matthias Renault

M. Matthias Renault (RN). Cet amendement d’appel porte sur le compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État, lequel visait à l’origine à récupérer les recettes de l’État actionnaire et à les affecter aux dépenses de l’État actionnaire. Nous constatons néanmoins une tendance, dénoncée par la Cour des comptes, à y inscrire des subventions du budget général de l’État pour des sommes très importantes dont on ne connaît pas les bénéficiaires finaux. Pour l’exercice 2024, la subvention du budget général est minorée de 2 milliards d’euros sans que la raison soit précisée. Nous demandons des informations complémentaires au gouvernement.

M. Charles de Courson, rapporteur général. J’ai moi-même demandé des explications au gouvernement sur la réduction de 2 milliards d’euros de la subvention du budget général au compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État. Il m’a été indiqué que, compte tenu des dépenses prévisionnelles de ce compte d’affectation spéciale, qui présentent souvent un caractère confidentiel jusqu’à leur réalisation, aucun versement du programme 367 du budget général de l’État ne serait nécessaire.

Je vous propose de retirer l’amendement et de le redéposer en séance pour obtenir des explications. Hélas, je connais déjà la réponse du ministre. C’est la même depuis des décennies : sous prétexte que cela risque de perturber le marché et de favoriser les spéculateurs, on refuse de nous donner les raisons pour lesquelles la dotation augmente ou diminue. La vente et le rachat des participations de l’État sont apparemment une chose trop sérieuse pour en informer le Parlement a priori, ce que j’ai toujours trouvé choquant. Il faut évidemment être prudent, mais on pourrait en informer le rapporteur général, qui n’est généralement pas un irresponsable.

M. Matthias Renault (RN). Je le maintiens et je le redéposerai en séance. Cette réponse n’est pas satisfaisante. Je peux entendre qu’une information détaillée sur les prises de participations de l’État perturbe le marché, mais on pourrait nous en donner les grandes lignes. De surcroît, certaines prises de participation de l’État ont un caractère politique ; elles sont même parfois prises à l’initiative des parlementaires, comme cela a été le cas pour Atos.

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette l’article 3.

La commission rejette la première partie du projet de loi.

  SECONDE PARTIE : MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE IER : AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2024 – CRÉDITS DES MISSIONS

 

Article 4 et État B : Budget général : ouvertures et annulations de crédits

Amendement CF47 de M. Mathieu Lefèvre

M. Charles de Courson, rapporteur général. L’article 4 étant un article de récapitulation, il convient que le surcroît d’annulations de 4,4 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement proposé par l’amendement tire la conséquence d’amendements de crédits précédemment adoptés ; j’observe que vous n’en avez pas déposé. Il semble par ailleurs préférable de cibler les annulations en tenant compte de la réalité des besoins de crédits par ministère plutôt que de fixer un montant global. Enfin, il faut que les annulations demandées soient réalistes. Le ministre a déclaré devant la commission des finances, la semaine dernière, que les annulations de crédits proposées correspondaient « au freinage le plus fort auquel nous pouvons consentir » et que « nous ne pouvons pas aller plus loin ». Il est nécessaire de laisser une certaine marge sur la réserve des programmes afin de leur permettre de faire face à l’intégralité de la gestion 2024. Nous sommes déjà mi-novembre ; le temps que le projet de loi revienne du Sénat, nous serons en décembre. La demande est impossible à satisfaire.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF79 de M. Stéphane Hablot

Mme Estelle Mercier (SOC). Cet amendement vise à rehausser de 40 millions d’euros les autorisations d’engagement de la Facilité européenne pour la paix (FEP), qui vient en aide à l’Ukraine et finance notamment les premiers secours, le carburant essentiel à la chaîne logistique, l’effort de renseignement et l’administration ; toutes choses essentielles à l’effort de guerre ukrainien. Le PLF 2025 prévoit une baisse de 40 millions sur ce fonds. Dans le contexte de l’élection de Donald Trump, ce n’est pas envisageable.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Je ne suis pas insensible à cet amendement. Il est vrai que le montant de la participation à la FEP sera en baisse de près de 40 millions d’euros en 2025, d’après le PLF, pour s’élever à 104,1 millions d’euros. Toutefois, la baisse relève du calcul de la quote-part française à cet instrument extrabudgétaire et pluriannuel de l’Union européenne. D’après les informations qui m’ont été transmises, les annulations présentées par le PLFG pour 2024 ne concernent pas la contribution financière du ministère de l’Europe et des affaires étrangères à la FEP. Il convient de relever qu’environ 20 millions d’euros avaient été annulés par le décret du 21 février 2024 en raison d’un appel à contribution moins important que prévu ; c’était une économie de constatation plus qu’une économie réelle. Il ne semble pas opportun d’ouvrir 40 millions d’euros à la FEP au titre de l’année 2024. Je vous suggère de retirer l’amendement et de le redéposer en séance pour obtenir la confirmation du ministre, qui m’a indiqué qu’il n’y aurait pas d’annulation de crédits pour la FEP.

Mme Estelle Mercier (SOC). Je ne me sens pas en droit de retirer l’amendement de mon collègue Stéphane Hablot.

M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Le PLFG réaffirme notre soutien à l’Ukraine. Dans le contexte international particulier que nous connaissons, celui-ci est vital pour la sécurité de notre pays. Je soutiens l’amendement et je souhaite moi aussi comprendre à quoi correspondent ces 40 millions d’euros pour m’assurer que nous ne faillirons pas dans notre soutien à l’Ukraine.

La commission adopte l’amendement CF79.

Amendement CF74 de M. Dominique Potier

Mme Estelle Mercier (SOC). Mon excellent collègue Dominique Potier propose d’allouer 90 millions d’euros supplémentaires à l’action 9, Planification écologique, stratégie de réduction et de l’utilisation des produits phytosanitaires. Le PLF 2025 prive la stratégie de réduction d’utilisation des produits phytosanitaires de 90 millions d’euros, soit une baisse de 35 %. C’est un grand recul pour la planification écologique, alors que les alertes concernant l’impact des pesticides sur plusieurs secteurs de l’environnement se multiplient.

Le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur l’usage des produits phytopharmaceutiques dresse vingt-sept recommandations pour peser sur la stratégie gouvernementale Écophyto 2030 : régulation de la concurrence déloyale, réallocation des aides publiques, réorientation du pilotage public, sanctuarisation des captages d’eau potable… Les moyens financiers et la volonté politique sont largement insuffisants pour encourager les acteurs à changer de pratiques. Le coût budgétaire proposé est bien moindre que la répartition des dégâts environnementaux et sanitaires que nous subirons en continuant d’utiliser les produits phytosanitaires.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Le débat a déjà eu lieu lors de l’examen de la mission Agriculture : ce sont les financements pour 2025 qu’il faudrait maintenir au niveau de 2024 afin de permettre l’application complète de la stratégie Écophyto 2030 et de donner de la visibilité aux agriculteurs. Quand bien même nous voterions l’amendement, il est trop tard pour que celui-ci ait des conséquences en 2024. De plus, bien que le projet de loi de finances ait été repoussé en séance, nous avions voté cette mesure en commission des finances. Je vous suggère de redéposer l’amendement en séance pour demander au gouvernement s’il a conservé l’amendement de la commission dans le texte transmis au Sénat[IF1]. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF8 de M. Matthias Renault

M. Matthias Renault (RN). Nous proposons de supprimer les 250 millions d’euros supplémentaires prévus dans le PLFG pour l’hébergement d’urgence, dont la gestion a récemment fait l’objet d’un rapport de la Cour des comptes. Ce rapport pointe un certain nombre de surcoûts, en particulier le recours massif aux nuitées d’hôtel qui, dans le dispositif initial, était réservé aux situations d’urgence. Un chiffre est sorti il y a quelques mois : 50 000 nuitées en 2024, rien qu’en Île-de-France ! Faute de statistiques, on ignore la part des migrants, mais il est évident qu’ils y prennent une place importante.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Il est effectivement surprenant de voir apparaître 250 millions d’euros supplémentaires pour l’hébergement d’urgence pour une dotation initiale de 210 millions d’euros ; c’est un doublement des crédits. Cette ouverture de crédits complète la budgétisation initiale en intégrant les ouvertures financées par le PLFG pour 2023 au titre de l’hébergement d’urgence qui n’avaient pas été intégrées dans la loi de finances pour 2024, ce que je trouve choquant. Elle intervient également, ce qui est plus excusable, au titre de l’agrément de l’accord de branche du Ségur au secteur accueil, hébergement, insertion. Le fait générateur de cette dépense n’était pas connu lors de la budgétisation initiale, puisque l’agrément a eu lieu en juin 2024 avec effet rétroactif. L’ouverture de crédits supplémentaires permet de couvrir les besoins, alors mal appréciés, liés à l’hébergement des réfugiés ukrainiens.

Mon avis est défavorable. Je vous incite à interroger le gouvernement en séance sur les raisons d’une si faible dotation initiale.

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Cet amendement est insupportable.

Pourquoi le recours aux nuitées d’hôtel est-il aussi massif ? Parce que les structures d’hébergement d’urgence pérennes sont insuffisantes.

Vous questionnez le profil des personnes hébergées et le caractère d’urgence de certaines situations. Je ne sais pas où vous vivez, monsieur Renault, moi je croise tous les jours des gens qui vivent dans la rue, parfois avec des enfants. Dormir dans la rue, c’est une situation d’urgence à mes yeux. Vous voulez aussi faire le tri entre les migrants et les personnes de nationalité française. Nous voterons contre cet amendement ignoble.

M. Matthias Renault (RN). C’est un amendement non pas ignoble, mais de gestion. Il s’agit de savoir comment traiter le flux de personnes ayant besoin d’un hébergement d’urgence. Pourquoi l’État a-t-il recours dans de telles proportions aux nuitées d’hôtel dont le coût pour les finances publiques est astronomique ?

En ce qui concerne les migrants, notre offre politique est différente de la vôtre. Là où voulez les accueillir sans limitation, nous plaidons pour un examen des demandes d’asile dans les pays de provenance.

M. le président Éric Coquerel. Derrière le mot de gestion, monsieur Renault, il y a tout de même des gens qui dorment dehors la nuit et des droits humains à respecter. J’ose espérer que, quelle que soit leur situation, vous ne les laisserez pas dormir dehors en hiver au risque de leur vie.

Mme Véronique Louwagie (DR). Le ton employé par certains collègues témoigne de la sensibilité du sujet.

Nul ne peut contester les failles du dispositif. L’urgence n’est pas toujours caractérisée : certaines personnes occupent ainsi des hébergements d’urgence de manière durable. Le recours aux nuitées d’hôtel n’est pas satisfaisant.

Ces difficultés mériteraient une réflexion sereine et dépassionnée. Il n’est pas acceptable que des personnes dorment dehors la nuit mais il n’est pas acceptable non plus que les solutions proposées ne soient pas adaptées.

M. le président Éric Coquerel. Le problème est structurel et la responsabilité collective : le déficit de logements sociaux conduit à proposer un hébergement d’urgence à des personnes qui pourraient prétendre à un logement pérenne. Une fois que les gens sont dans la rue, vous admettrez qu’on ne peut pas les y laisser.

Mme Véronique Louwagie (DR). Nous devrions nous mettre autour d’une table pour apporter une réponse au problème que vous reconnaissez.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Le problème est double. Il est, d’une part, budgétaire : en 2023, 2,8 milliards d’euros de crédits avaient été ouverts, auxquels la loi de finances rectificative a ajouté 220 millions ; cette année, 2,9 milliards ont été ouverts et il nous est demandé d’ouvrir 250 millions ; pour l’année prochaine, ce sont de nouveau 2,9 milliards qui sont inscrits. Il manque structurellement au moins 200 millions chaque année. Je ne peux donc pas être favorable à l’amendement visant à supprimer les crédits supplémentaires nécessaires.

D’autre part, le problème tient à la gestion des crédits. La Cour des comptes a montré la manne que représente pour les hôteliers l’hébergement d’urgence. Or c’est un détournement de la politique d’urgence, tout comme le fait que des personnes restent logées dans des structures d’urgence dans l’attente d’un HLM. La commission devrait réfléchir aux moyens de gérer mieux et à moindre coût l’urgence.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF13 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (EcoS). L’amendement vise précisément à répondre au problème que nous venons d’évoquer.

Il s’agit d’augmenter de 19 millions le budget dédié au plan « logement d’abord » qui permet d’offrir un logement pérenne à des personnes à la rue par le biais de l’intermédiation locative et des pensions de famille.

Voilà une réponse concrète au sans-abrisme auquel ma circonscription est particulière confrontée : 586 personnes dormant dans la rue ont été recensées dans le douzième arrondissement de Paris lors de la dernière nuit de la solidarité, soit une hausse de 33 %.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Les places en pension de famille sont moins coûteuses que celles dans les hôtels donc ce serait une mesure de bonne gestion. Toutefois, les objectifs fixés par le deuxième plan « logement d’abord » en la matière ne sont pas complètement atteints en raison de la réticence des maires et d’un manque de foncier disponible.

En outre, il ne semble pas réaliste d’ouvrir, début décembre, 19 millions pour créer 2 700 places supplémentaires. Il faut le faire dans le cadre du budget pour 2025. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF58 de Mme Danielle Simonnet

M. Tristan Lahais (EcoS). L’amendement vise à revenir sur les annulations de crédits qui concernent les aides au logement.

Ces mesures de gestion découlent probablement d’une sous-consommation des aides qui est révélatrice de l’absence de politique de soutien à l’accès de tous au logement mais aussi de régulation du marché. Le mal logement et l’exclusion sont la conséquence de cette faillite politique.

La mécanique est connue : ceux qui sont éligibles au logement social n’y ont pas accès, en conséquence de quoi ils bloquent des places d’hébergement, ce qui conduit in fine au recours aux nuitées d’hôtel que nous déplorions à l’instant.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Le nombre de demandeurs pour les aides à l’accès au logement a été surestimé en 2024. L’annulation des crédits est la conséquence de ce constat. Il me semble donc inutile de demander 224 millions à un mois de la fin de l’année. Avis défavorable.

M. Tristan Lahais (EcoS). Prenez notre amendement comme le signe de notre opposition à une politique défavorable au logement social et au logement pour tous.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF23 de M. Emmanuel Maurel

M. Emmanuel Maurel (GDR). L’amendement vise à revenir sur la double annulation – dans le décret du 21 février dernier et dans le PLFG – des crédits alloués à la politique de la ville, laquelle est l’une des grandes sacrifiées du budget 2025. Déjà en 2024, elle avait été amputée de 100 millions. À ce train-là, il ne restera plus grand-chose de cette politique ô combien nécessaire – d’autant que soixante-six nouveaux quartiers avaient été identifiés dans la nouvelle géographie prioritaire. Il s’agit donc de stopper l’hémorragie.

M. Charles de Courson, rapporteur général. L’annulation de crédits du programme 147 concerne l’intégralité de la mise en réserve. Cette mise en réserve concernait la dotation initialement prévue pour le Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) à hauteur de 50 millions.

L’État est déjà en retard dans ses décaissements prévus au titre du NPNRU – 9 % fin 2023, contre 24 % pour Action Logement et 33 % pour la Caisse de garantie du logement social. On m’a assuré en outre que la trésorerie de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), estimée à 440 millions, permet de supporter l’annulation de crédits.

Votre amendement ne me semble donc pas utile.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF9 de M. Matthias Renault

M. Matthias Renault (RN). L’amendement tend à supprimer les 2 millions supplémentaires alloués par le PLFG au Conseil économique, social et environnemental (CESE) au nom d’une « surexécution prévisionnelle » peu convaincante.

À défaut de sa suppression que nous sommes plusieurs à préconiser, le CESE devrait, à l’instar de l’Assemblée nationale, du Sénat et de l’Élysée, contribuer à l’effort de redressement des finances publiques en 2025.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Le CESE perçoit des ressources propres grâce à la valorisation du Palais d’Iéna – par exemple, la location d’espaces pour l’organisation de défilés de mode. Ces recettes sont reversées à l’État, qui les attribue ensuite au CESE, l’opération figurant au Journal officiel (JO).

En 2024, aucune attribution de produit n’a été effectuée. Le CESE attend le versement de la dernière attribution publiée au JO du 26 décembre 2023, que l’État s’est engagé à lui affecter dans le cadre d’une loi de finance rectificative ou de fin de gestion.

Par conséquent, les crédits ouverts ne sont pas des crédits supplémentaires mais le simple reversement des recettes dégagées par le CESE. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF21 de M. Matthias Renault

M. Matthias Renault (RN). L’amendement, qui avait déjà été présenté et adopté l’année dernière, a pour objet la nationalisation temporaire et partielle d’Atos.

Bruno Le Maire avait annoncé à l’été 2024 l’intention du gouvernement de reprendre les activités stratégiques du groupe – supercalculateurs, programme Artemis pour la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), systèmes de combat et de communication. Mais le rôle stratégique d’Atos est aussi lié à des logiciels, sans lien avec l’activité militaire, qui sont quotidiennement utilisés par les Français et les services publics tels que France Connect.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Ce débat aurait davantage sa place dans le cadre du compte de concours financiers Participations financières de l’État. Les crédits de la mission Défense n’ont pas vocation à financer une telle mesure, ni le ministère des armées à jouer le rôle de l’Agence des participations de l’État.

Sur le fond, nul ne conteste que certaines des activités d’Atos sont stratégiques et qu’elles ne doivent pas tomber dans les mains de n’importe qui.

Une entrée de l’État au capital d’Atos n’est pas exclue, elle a même été annoncée par le gouvernement mais nous n’en connaissons pas encore les détails. La direction générale des entreprises (DGE) et la direction générale de l’armement (DGA) sont engagées sur ce dossier complexe, avec la possibilité à long terme d’acquérir les activités stratégiques opérées par le groupe Atos.

Enfin, l’entrée au capital n’est pas la seule solution envisageable. Nous disposons d’autres instruments pour soutenir nos entreprises stratégiques. Ainsi, une convention de protection des actifs stratégiques entre l’État, Atos et Bull a été signée le 26 juin 2024 et confère des droits de protection renforcés à l’État sur les activités sensibles. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF81 de M. Christophe Plassard

M. Christophe Plassard (HOR). L’amendement vise à diminuer de 125 millions environ le montant des annulations de crédits qui affectent le programme 146, Équipement des forces, à hauteur de 532 millions.

L’ampleur des annulations, inégalée sur les derniers exercices, empêchera la DGA de finaliser certains contrats ou livraisons initialement prévus en 2024. La liste des programmes concernés n’est pas connue à ce stade, ni le montant des intérêts moratoires que l’État aura à verser aux industriels concernés. Ces annulations augmenteront également le report de charges, rognant ainsi les crédits de paiement pour 2025.

Je l’indique dans mon rapport spécial, toute remise en cause de la programmation militaire aurait un grave impact sur les moyens d’action et la cohérence capacitaire de nos armées. Elle entraînerait des renoncements voire des abandons de souveraineté, y compris dans des domaines stratégiques. Elle affaiblirait aussi la base industrielle et technologique de défense, ainsi que sa capacité à mener de nouveaux programmes ambitieux à moyen et long terme.

Je prends acte de l’effort demandé aux armées et consenti par elles. Je souhaite néanmoins alerter sur la nécessité de le limiter le plus possible.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Je vous rejoins sur la remontée inquiétante du report de charges. Si le montant des reports atteint 20 % des crédits hors titre 2 en 2024, cela signifie que près de 6,8 milliards de crédits de paiement ouverts en 2025 couvriront des dépenses initialement prévues en 2024. Cela pose problème du point de vue du principe d’annualité.

Plutôt que de diminuer le montant des annulations de crédits, il me semble plus pertinent de s’attaquer à ces reports de charges considérables. Sont-ils une manière de masquer les déficits ou sont-ils liés à des difficultés rencontrées dans les programmes d’équipement ?

Je vous invite à retirer l’amendement et à le redéposer en séance pour pouvoir interroger le ministre sur ce point.

L’amendement est retiré.

Amendement CF72 de M. Romain Eskenazi

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement a pour objet d’abonder les crédits de la Société nationale de sauvetage mer (SNSM).

En février dernier, le programme Affaires maritimes, pêche et aquaculture, qui finance les actions de la SNSM, a subi une coupe de 10 millions. Le budget 2025 prévoit également une baisse de la dotation de la société. Les amendements, que la commission du développement durable et la commission des finances avaient adoptés pour majorer les crédits de la SNSM, ne seront malheureusement pas examinés en séance.

On ne peut pas transiger avec la sécurité en mer ; ce sont des vies humaines qui sont en jeu. Le manque de ressources peut se traduire par une diminution des chances de sauvetage.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Je vous invite à retirer votre amendement et à interroger le gouvernement en séance sur le sort qu’il entend réserver à celui qu’avait adopté la commission des finances. À défaut, mon avis sera défavorable car cela n’a pas de sens dans une loi de fin de gestion.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Je maintiens l’amendement. J’interpellerai le gouvernement mais la SNSM a besoin de ces fonds dès 2024.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CF77 de M. Hervé Saulignac et CF18 de Mme Eva Sas (discussion commune)

Mme Eva Sas (EcoS). Il s’agit d’abonder de 100 millions le fonds Barnier, destiné à financer la prévention des risques naturels qu’il conviendrait plutôt d’appeler risques climatiques désormais.

Nous devons accroître nos efforts face aux évènements météorologiques extrêmes. Ces catastrophes liées au changement climatique se multiplient et se renforcent, comme on l’a vu encore récemment en Espagne.

Il est urgent d’investir dans la prévention pour protéger nos concitoyens et les aider à s’adapter aux risques. Le fonds Barnier manque de ressources notamment pour étendre le système Vigicrues. Or l’État détourne les recettes issues de la surprime catastrophe naturelle qui devraient normalement alimenter le fonds.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Le premier ministre a annoncé le 25 octobre une hausse de 75 millions du fonds qui ne figure pas dans le projet de loi de finances.

Je vous propose de retirer l’amendement et d’interroger le gouvernement sur son intention de déposer un amendement en ce sens au Sénat.

Mme Eva Sas (EcoS). Arrêtons de glorifier une hausse de 75 millions alors que la surprime, dont le taux a été porté de 12 à 20 %, devrait rapporter 450 millions au fonds Barnier.

Le Gouvernement affecte la hausse de la surprime, qui sera douloureuse pour de nombreux Français, à la résorption des déficits plutôt qu’à la prévention des risques. Ce n’est pas acceptable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CF12 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (EcoS). Il s’agit de revenir sur les coupes budgétaires dont sont victimes MaPrimeRénov’ et le chèque énergie, deux outils concrets pour lutter contre la précarité énergétique et encourager la rénovation thermique.

Sous couvert de sous-exécution, le PLFG propose de réduire encore de 182 millions les crédits de paiement dédiés à ces dispositifs.

Puisque la sous-exécution s’explique par l’incapacité des ménages à financer le reste à charge sur des opérations de rénovation thermique, il aurait été plus judicieux d’affecter les crédits non consommés à des actions concrètes telles que le développement du réseau des accompagnateurs France Rénov’ ou le soutien à la labellisation RGE (« reconnu garant de l’environnement ») qui est coûteuse pour les entreprises.

M. Charles de Courson, rapporteur général. L’annulation de crédits ne fait que tirer la conséquence de la sous-exécution constatée au cours de l’année 2024 des crédits alloués aux aides à la transition énergétique des ménages.

En raison de l’atonie du secteur à la suite de la réforme de MaPrimeRénov’ de janvier 2024, les crédits ne pourraient être consommés et leur rétablissement n’aurait aucun impact sur le pouvoir d’achat des ménages. Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (DR). Les objectifs ambitieux fixés par le gouvernement en matière de rénovation globale sont très loin d’être atteints. Pourtant, pour la deuxième année, on constate une sous-exécution des crédits liés à MaPrimeRénov’. Le dispositif avait pourtant été réformé dans le PLF pour 2024 avant d’être corrigé en début d’année. J’ai rédigé avec ma collègue Annie Vidal, un rapport dans le cadre du comité d’évaluation et de contrôle qui pointait les difficultés.

Par ailleurs, je souhaiterais que la commission des finances puisse avoir connaissance des comptes de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). Ces comptes devraient être publics.

M. le président Éric Coquerel. Nous le demanderons, madame Louwagie.

Dès lors que nous sommes tous d’accord pour considérer que la rénovation thermique est indispensable, nous ne pouvons pas nous satisfaire de la baisse des crédits pour cause de sous-exécution. Nous paierons tous la facture de l’inaction climatique.

Parmi les solutions, je souhaite que soit examinée la piste de prêts hypothécaires. La situation actuelle n’est pas tenable.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Le nombre de dossiers déposés s’est effondré de 50 % en 2024, sans doute en raison d’une réforme trop ambitieuse du dispositif : en voulant encourager les rénovations globales, très coûteuses, on a conduit de très nombreux ménages à renoncer à effectuer des travaux.

M. le président Éric Coquerel. Rappelons tout de même que cette réforme était motivée par le fait que les rénovations partielles étaient inefficaces.

M. Emmanuel Mandon (Dem). La difficulté que nous éprouvons à appréhender cette question montre que si les politiques peuvent fixer des objectifs, c’est bien à nos concitoyens qu’il revient ensuite d’agir concrètement, d’autant que le dispositif à privilégier pour être efficace fait encore débat. En la matière, nous devons rester très modestes. Dans mon département, par exemple, les collectivités et les artisans sont fortement mobilisés et tous font preuve de bonne volonté, mais le décalage entre les ambitions et les moyens reste patent.

M. Jacques Oberti (SOC). Les plans départementaux d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées (PDALHPD) souffrent d’un réel manque de moyens pour accompagner les ménages concernés. Le reste à charge peut être réduit à condition de bien connaître les dossiers, de les phaser correctement et de disposer d’une vision d’ensemble : audelà de l’aspect purement financier, l’accompagnement est aussi fondamental. Or le dispositif MaPrimeRénov’ a en quelque sorte nationalisé la démarche et mis de côté cette relation de proximité, qui portait pourtant ses fruits.

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Je confirme que si les artisans sont de bonne volonté, le label RGE reste un élément bloquant pour de très nombreux chantiers de rénovation : l’ANAH n’intervient que si les entreprises possèdent le label, mais les professionnels n’ont pas toujours les moyens ni le temps de se former pour l’obtenir.

Mme Eva Sas (EcoS). La commission des finances ne pourrait-elle pas lancer une mission flash sur cette question ? Il me semble que nous avons suffisamment de recul sur les différents dispositifs en vigueur, qu’il s’agisse du barème – qui a été modifié en février dernier pour soutenir à nouveau les mono-gestes – ou du label RGE, pour évaluer l’impact de nos décisions sur les demandes d’aide.

La sous-exécution des crédits dure depuis deux ans. Il devient urgent de trouver la bonne formule pour relancer la rénovation thermique, dès 2025.

M. le président Éric Coquerel. Le bureau examinera cette possibilité. J’ai par ailleurs bien pris note de la demande Mme Louwagie concernant les comptes de l’ANAH.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CF41 de Mme Mathilde Feld, CF48 de M. Aurélien Le Coq, CF78 de Mme Christine Arrighi, CF29 de M. Nicolas Sansu, amendements identiques CF28 de M. Nicolas Sansu et CF49 de Mme Mathilde Feld (discussion commune)

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Nous proposons de supprimer les annulations de crédits des programmes Service public de l’énergie et Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires.

Le fait que le gouvernement tente de réduire des crédits dédiés à l’écologie en 2025 représente une menace pour nos conditions d’existence à moyen et long terme. Le programme Service public de l’énergie finance notamment le développement des énergies renouvelables. La France est le seul pays de l’Union européenne à ne pas avoir atteint ses objectifs en la matière : environ 60 % de l’énergie que nous consommons est toujours d’origine fossile, quand cette part devrait être réduite à 42 % d’ici à 2030 si nous voulons respecter nos engagements internationaux. Pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, il est vital que chaque euro prévu soit employé pour accélérer le développement des énergies renouvelables, en remplacement de l’énergie fossile et nucléaire à laquelle nous avons encore massivement recours.

Nous souhaitons aussi supprimer les annulations de crédits du fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires. Les collectivités territoriales réalisant deux tiers des investissements publics, il est urgent de leur accorder des moyens.

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Au début de nos débats budgétaires, des élus macronistes ont souligné la nécessité de s’attaquer non seulement à la dette financière, mais aussi à la dette environnementale. D’autres ont évoqué le rapport de Selma Mahfouz et Jean Pisani Ferry, qui estiment à 30 milliards d’euros annuels l’investissement public nécessaire d’ici à 2030 pour engager la bifurcation écologique et respecter les engagements internationaux de la France.

Pourtant, vous proposez de réduire à nouveau les dépenses consacrées au service public de l’énergie de 500 millions d’euros. Comment comptez-vous tenir les engagements de la France et faire face au réchauffement climatique si, à chaque texte budgétaire, l’écologie et le développement des énergies renouvelables font les frais du chaos budgétaire dans lequel vous nous avez plongés ?

Mme Christine Arrighi (EcoS). Thomas Cazenave, alors ministre chargé des comptes publics, prévoyait de revoir la CRIM (contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité) en 2024 afin de générer au moins 1 milliard d’euros de recettes supplémentaires. Le PLFG ne fait pourtant état que d’une hausse modeste, de 33,7 millions d’euros. Plus globalement, cette taxe sur les superprofits des énergéticiens n’a rapporté que 600 millions en 2023, bien loin des 12,3 milliards espérés. Le premier président de la Cour des comptes a d’ailleurs évoqué un « écart extraordinairement rare en matière de prévisions fiscales ».

Mon amendement vise à réduire de 33,7 millions d’euros l’annulation en autorisations d’engagement prévue pour le programme Service public de l’énergie.

M. Emmanuel Maurel (GDR). L’amendement CF29 tend quant à lui à revenir sur la double annulation des crédits du fonds Vert. Le rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement pour 2023 avait montré l’efficacité de ce dispositif, puisque les 2 milliards d’euros de crédits qui lui étaient alloués avaient permis de financer des projets pour un coût total de 10 milliards, soit un effet de levier de 5.

Le fonds Vert a pourtant fait l’objet d’un premier coup de rabot de 500 millions d’euros en février et subit une nouvelle diminution de 400 millions en autorisations d’engagement et de 65 millions en crédits de paiement, soit près de 1 milliard en moins par rapport à la loi de finances pour 2024. Cette baisse est d’autant plus regrettable que les collectivités, qui participent fortement à l’investissement public, font beaucoup d’efforts en matière de transition écologique.

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). L’amendement CF49 est un amendement de repli, visant à supprimer les annulations de crédits du seul programme Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, qui se trouve effectivement amputé de 400 millions d’euros en autorisations d’engagements et de 65 millions en crédits de paiement.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Vous soulevez deux questions.

L’annulation de crédits sur le programme 345, d’abord, résulte du report de l’appel d’offres de soutien à l’hydrogène décarboné. Ce mécanisme devant être notifié à la Commission européenne au titre des aides d’État, une procédure de notification a été engagée dès 2022 mais n’a pu aboutir, faute de définition de l’hydrogène décarboné à l’échelle européenne. Un projet d’acte délégué instaurant une telle définition devrait permettre de lever ce frein en 2025. Si l’on peut déplorer ce délai supplémentaire s’agissant d’une filière prometteuse pour le développement des énergies renouvelables, il est question ici d’un plan de soutien de dix à quinze ans, dont la première tranche de contractualisation devrait intervenir au cours de l’exercice 2025. L’annulation de crédits que vous dénoncez est donc un simple constat, dans l’attente de la décision de l’Union européenne.

Le débat sur la réduction des crédits du fonds Vert, ensuite, a déjà eu lieu en commission dans le cadre de l’examen du PLF pour 2025. Il ne relève pas du PLFG : ouvrir des crédits qui ne pourront pas être consommés d’ici la fin de l’année n’aurait pas d’intérêt.

Avis défavorable sur l’ensemble des amendements.

Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Je rappelle que nous examinons ici un projet de loi de finances de fin de gestion. Les amendements que vous défendez auraient leur place dans les missions budgétaires du PLF pour 2025, mais vous proposez de rétablir des crédits qui ne pourront pas être consommés d’ici la fin de l’année 2024. S’agissant du fonds Vert, par exemple, connaissez-vous les délais à respecter pour déposer un dossier de financement en préfecture ? Un peu de cohérence et de bonne foi !

Mme Christine Arrighi (EcoS). Selon votre logique, nos débats ne servent à rien, puisqu’il suffit d’annuler tous les crédits non consommés en fin d’année.

Peut-être un exemple pourra-t-il vous convaincre. Le plan Vélo a été supprimé pour les exercices 2024 et 2025. Or 400 collectivités avaient reçu des dossiers en réponse aux appels d’offres qui avaient été construits de façon collective pour octroyer les crédits qui ont ainsi été annulés d’un trait de plume. Ces collectivités pourraient tout à fait consommer ces 250 millions d’euros d’ici la fin de l’année s’ils étaient rétablis. Votre argument ne tient pas.

M. Jean-René Cazeneuve (EPR). À entendre certains, on a le sentiment que nous n’avons obtenu aucun résultat en matière de transition écologique. La France a pourtant réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 5,8 % en 2023 et la baisse sera à nouveau supérieure à 5 % en 2024, ce qui montre clairement que nous agissons et que le succès est au rendez-vous.

Il est tout aussi incroyable d’entendre ceux qui avaient refusé de voter la création du fonds Vert déplorer aujourd’hui, des trémolos dans la voix, qu’on baisse les crédits qui lui sont affectés. Les financements diminuent en raison des contraintes budgétaires que chacun connaît. J’espère que nous pourrons les renforcer à nouveau dès que nous disposerons des marges de manœuvre nécessaires.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CF67 de M. Marc Pena

M. Charles de Courson, rapporteur général. Vous proposez de renforcer les moyens des personnels de santé dans les CRA, les centres de rétention administrative.

La France propose de nombreux dispositifs d’accompagnement sanitaire et social aux personnes retenues dans ces structures, dont le niveau de protection n’est d’ailleurs pas dénoncé par les juridictions internationales. Pendant leur séjour en rétention, les étrangers sont soignés gratuitement et se voient systématiquement proposer une consultation par un professionnel de santé à leur arrivée. L’accès à un psychiatre est par ailleurs assuré, y compris en dehors des situations d’urgence. En outre, les personnes placées en rétention bénéficient d’une protection contre les mesures d’éloignement en vertu de l’article L. 511-4 du Ceseda – code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile –, qui interdit l’exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF) pour les personnes dont l’état de santé nécessite une prise en charge impossible dans leur pays d’origine. Notre droit protège donc les personnes retenues en CRA.

Par ailleurs, 20 millions d’euros sont prévus dans le PLF pour 2025 au titre de l’accompagnement sanitaire et social des personnes retenues en CRA. Ces crédits sont stables par rapport à 2024 et aucune urgence particulière justifiant de les augmenter pour le mois de décembre n’a été relevée. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements CF65 de Mme Céline Thiébault-Martinez et CF50 de M. Aurélien Le Coq.

Amendement CF10 de M. Matthias Renault

M. Matthias Renault (RN). Cet amendement d’appel vise à obtenir des informations de la part du gouvernement quant aux 350 millions d’autorisations d’engagement annulées pour le programme Administration pénitentiaire. Cette annulation serait motivée par des « réajustements des dépenses en matière d’immobilier propriétaire ». Concerne-t-elle le programme de construction de nouvelles places de prison ?

M. Charles de Courson, rapporteur général. Notre collègue n’a pas tort de soulever ce problème. Le plan « 15 000 places de prison » annoncé en 2018 accuse en effet du retard : alors que les 7 000 premières places devaient être livrées en 2022, seules 4 500 places le sont à ce jour. Le ministre de la justice a d’ailleurs annoncé le 10 novembre que le retard ne pourrait être rattrapé d’ici à 2027 et que le plan devrait être rééchelonné dans le temps. Ce retard serait dû à des difficultés à trouver des terrains pour accueillir les prisons, notamment en raison de l’opposition des élus locaux.

Sur le principe, je ne suis pas favorable à l’adoption de ce type d’amendements d’appel. Je vous invite donc à le retirer et à le redéposer en séance, pour que le ministre vous réponde.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements CF69 de M. Pierrick Courbon, CF89, CF75 et CF76 de M. Christian Baptiste et CF70 de M. Pierrick Courbon.

Amendement CF34 de Mme Christine Arrighi

Mme Christine Arrighi (EcoS). Nous nous opposons fermement à l’annulation de 100 millions d’euros de crédits du programme Recherche spatiale, qui représente plus de 10 % de son budget. Au vu des difficultés d’entreprises comme Thales ou Airbus Defence and Space, qui lancent des plans de licenciement ou de reconversion parce que l’État n’a pas respecté ses engagements – pourtant présentés avec force communication et emphase à Toulouse par le président de la République le 11 décembre 2023 –, et alors que d’autres puissances accroissent considérablement leurs financements tandis que la concurrence avec de nombreux acteurs publics et privés s’intensifie, cette coupe affaiblit fortement les positions française et européenne et limite notre capacité d’innovation. Maintenir ces crédits est donc absolument indispensable.

Je peux d’ailleurs assurer à Mme Dalloz que ces 100 millions d’euros seront bien dépensés d’ici la fin de l’année : les programmes sont lancés et devraient être interrompus si les financements n’étaient pas accordés. La baisse prévue n’a enfin nullement été décidée en accord avec la filière, contrairement à ce qu’on pourrait me répondre.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Notre collègue a tout à la fois raison et tort.

Elle a tort parce que les crédits annulés correspondent au solde entre la contribution de la France à l’Agence spatiale européenne (ASE) et les crédits consommés par cette dernière en 2024. En raison du retard pris par le programme Ariane 6, l’Agence n’a pas consommé l’intégralité de ses crédits alloués, dont une partie est donc annulée. Revenir sur ce mouvement en fin de gestion n’améliorerait pas l’exécution des crédits.

Elle a raison dans le sens où ce retard devra être rattrapé lors des prochains exercices budgétaires. Selon les informations dont nous disposons, le rythme d’engagement de la dotation française sera arbitré en amont de la prochaine conférence ministérielle de l’ASE, en 2025.

Avis défavorable.

Mme Christine Arrighi (EcoS). En réaction à la réponse de normand du rapporteur général, j’insiste sur le fait que j’ai beaucoup plus raison que tort, puisque les 100 millions d’euros annulés n’étaient pas nécessairement fléchés sur le programme Ariane 6, mais pouvaient être affectés à d’autres programmes en cours.

M. Charles de Courson, rapporteur général. L’ASE n’a formulé aucune demande et ne serait pas en mesure de consommer ces crédits s’ils étaient rétablis. L’enjeu consistera donc à augmenter les budgets en 2025 afin de rattraper le retard.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CF55 de Mme Mathilde Feld et CF86 de M. Tristan Lahais

Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Nous proposons de supprimer les annulations de crédit de 160 millions d’euros prévues pour la mission Relations avec les collectivités territoriales. Ces financements pourraient être consommés très rapidement : les collectivités seraient ravies de pouvoir traiter les dossiers d’attribution de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) ou de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) qui restent en souffrance.

M. Tristan Lahais (EcoS). Si certains des amendements précédents pouvaient s’apparenter à des amendements d’appel, il serait effectivement tout à fait possible de consommer ces enveloppes. Il n’y a donc aucune raison de maintenir ces coupes brutales et injustes.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Nos deux collègues n’ont pas tort : si nous devions accroître les concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, les dotations d’investissement constitueraient effectivement une priorité. Néanmoins, encore une fois, les crédits que vous proposez d’ouvrir ne seraient pas consommés d’ici la fin de l’année. Il faudrait donc obtenir du gouvernement qu’il accepte de les reporter, sans quoi ils devraient à nouveau être annulés, sitôt après avoir été rétablis.

Avis de sagesse.

La commission rejette les amendements.

Amendement CF57 de M. Aurélien Le Coq

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Le PLFG prévoit d’annuler 6,5 milliards d’euros de crédits au détriment de nombreux secteurs en souffrance – 150 millions pour l’agriculture, 340 millions pour l’écologie, 700 à 800 millions pour l’enseignement scolaire et supérieur –, tout en ouvrant 7,7 milliards de crédits au titre de la mission Remboursement et dégrèvements, c’est-à-dire de cadeaux faits aux grandes entreprises par le biais de crédits d’impôts. Cette hausse du coût des niches fiscales intervient alors que les recettes baissent de 24 milliards d’euros, principalement en raison d’un plus faible rendement de l’impôt sur les sociétés (IS). Ne devrait-on pas en déduire qu’il existe un lien entre niches fiscales et baisse des recettes ? Cette politique n’a en outre aucun effet bénéfique sur l’économie, puisqu’elle atteint son apogée au moment même où Michelin, Sanofi et Auchan, qui ont bénéficié de tous ces dispositifs, licencient ou se séparent de certaines de leurs filiales.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Je me suis moi aussi intéressé à cette affaire. Je relève comme vous le montant très élevé des ouvertures de crédits concernant la mission Remboursements et dégrèvements, qui regroupe les deux tiers des crédits ouverts par ce PLFG.

Pour ce qui est du programme 200 relatif aux impôts d’État, l’écart de 6,9 milliards d’euros par rapport à la prévision s’explique en partie par une hausse de 2,1 milliards relative à l’impôt sur le revenu, liée principalement à des restitutions de trop versés, les revenus ayant progressé moins vite que le barème d’imposition. S’y ajoute une hausse de 7,1 milliards d’euros concernant l’IS : les bénéfices fiscaux ont moins augmenté que prévu entre 2022 et 2023 et sont marqués par une forte hétérogénéité entre entreprises, ce qui a induit d’importants remboursements d’excédents d’acompte en 2024. Les autres impositions font l’objet d’une hausse de 2,3 milliards, dont 500 millions de remboursements de CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. À l’inverse, on enregistre une baisse de 4,6 milliards d’euros relative à la TVA, cohérente avec la révision à la baisse de la croissance des emplois taxables et de la TVA brute.

Pour ce qui est du programme 201 relatif aux impôts locaux, l’écart de 800 millions d’euros porte essentiellement sur les dégrèvements de taxe d’habitation, à la suite notamment des nombreuses erreurs déclaratives observées lors du déploiement de l’application « Gérer mes biens immobiliers ».

Si l’on peut déplorer le montant important de ces ouvertures de crédits en fin de gestion, qui atteignaient même 12,5 milliards d’euros en 2023, elles n’en restent pas moins nécessaires pour corriger les écarts par rapport à la prévision initiale, les crédits de cette mission étant par nature évaluatifs et fortement dépendants du contexte économique. Les ouvertures demandées sont par ailleurs loin de financer uniquement des niches fiscales au bénéfice des grandes entreprises.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements CF62 de M. Arthur Delaporte et CF66 de M. Roger Vicot.

Amendement CF64 de Mme Marie-Noëlle Battistel

M. Charles de Courson, rapporteur général. Je demande le retrait de cet amendement visant à allouer 1 million d’euros à la plateforme d’écoute et d’information pour les femmes victimes de violences et leur entourage. Les moyens humains ont déjà été renforcés ces dernières années, ce qui a permis d’améliorer nettement le taux d’appels traités, qui est passé de 61,9 % en 2021 à 75,8 % en 2022, puis à 86,5 % en 2023, l’objectif étant d’atteindre 95 % en 2025. Laissons l’association absorber ces nouveaux moyens avant de voir s’il faut les compléter.

En outre, un amendement identique a été adopté par la commission des finances lors de l’examen de la mission Solidarités, insertion et égalité des chances du PLF pour 2025. Il ne me semble donc pas nécessaire de le redéposer sur ce PLFG, qui concerne l’exercice 2024.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF31 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (EcoS). L’amendement vise à supprimer les annulations de crédits prévues à hauteur de 16,5 millions dans ce projet en ce qui concerne la rénovation des bâtiments de l’État.

Cette proposition prolonge celle que j’avais faite en déposant un amendement au PLF pour 2025 pour augmenter de 50 millions ce budget. En réalité, il faudrait même investir 2 milliards de plus dès 2025 pour transformer réellement le bâti public de l’État d’ici à 2032 et suivre ainsi les recommandations du rapport remis par Selma Mahfouz et Jean Pisani-Ferry. Au lieu d’amplifier l’effort, on recule.

Les crédits de l’action Résilience du programme Performance et résilience des bâtiments de l’État et de ses opérateurs, qui financent les travaux à gains énergétiques rapides, ont ainsi été drastiquement réduits. Nous proposons au moins de les maintenir en 2024.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Le programme 348 bénéficiait de 710 millions en AE et 528 millions en CP dans la loi de finances initiale. Il n’a pas vocation à financer l’intégralité de la politique de rénovation des bâtiments de l’État.

Ce programme finance, d’une part, la poursuite du plan de rénovation de trente-six cités administratives – qui sera mené à son terme en 2025 – et, d’autre part, la mise en œuvre d’actions ciblées visant à améliorer la performance énergétique du parc immobilier de l’État et son adaptation aux nouvelles modalités de travail.

Ainsi, l’essentiel de la politique immobilière de l’État, soit plus de 9 milliards, est assuré par les ministères sur leurs propres programmes budgétaires.

Les annulations de crédits du PLFG sur le programme 348 tiennent aux caractéristiques des dépenses en question et ne posent pas de problèmes particuliers.

L’augmentation proposée pour les crédits consacrés à la rénovation des bâtiments de l’État pour l’année 2024 n’aurait pas l’effet escompté au regard du calendrier. En outre, les annulations sont d’un niveau très faible, de l’ordre de 2 %.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette l’article 4.

Article 5 : Budgets annexes : ouvertures et annulations de crédits

La commission rejette l’article 5.

Article 6 : Comptes spéciaux : ouvertures et annulations de crédits

La commission rejette l’article 6.

 

M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Premièrement, ce texte est absolument nécessaire puisqu’il entérine des dépenses exceptionnelles et tient compte d’un certain nombre de dépenses qui n’ont pas eu lieu. Il ne s’agit donc pas de juger les écarts par rapport à la LFI.

Deuxièmement, les dépenses de l’État sont sous contrôle. Nous avons dépensé 6 milliards de moins que ce qui était prévu initialement et je voudrais encore une fois saluer le travail qui a été fait par Gabriel Attal, Bruno Le Maire et Thomas Cazenave dans le précédent gouvernement.

Troisièmement, ce texte comprend beaucoup d’ouvertures de crédits supplémentaires. La gauche veut-elle repousser les ouvertures de crédits pour l’Ukraine et pour l’hébergement d’urgence ? La droite radicale veut-elle repousser 1 milliard de crédits supplémentaires pour la Nouvelle-Calédonie et ceux destinés à payer les primes des membres des forces de l’ordre pour les Jeux olympiques et paralympiques (JOP) ?

Enfin, notre groupe demande de nouveau au gouvernement d’exercer une pression maximale sur le déficit de 2024 afin qu’il soit le plus réduit possible.

M. Philippe Brun (SOC). Monsieur Cazeneuve, il est ridicule de dire que voter contre un budget revient à voter par exemple contre l’aide pour la Nouvelle-Calédonie, les salaires des enseignants ou le budget des agences régionales de santé (ARS). Vous-même avez hier voté contre la première partie du projet de budget. Si je suis votre raisonnement, vous avez aussi voté contre des dépenses utiles… Votre argument n’a aucun sens.

Nous sommes réunis pour discuter de différents équilibres, qui nous conviennent ou non. Le PLF pour 2025 ne vous convenait pas hier. Ce qui est proposé dans ce PFLG ne nous convient pas. À ce stade nous voterons contre ce texte, mais nous sommes ouverts à des discussions avec le gouvernement en séance.

Mme Véronique Louwagie (DR). Ce PLFG est un texte technique qui permet d’ajuster les crédits des missions et d’en ouvrir pour répondre à un certain nombre de besoins majeurs et urgents avec lesquels personne ne peut être en désaccord – tels que le soutien à la Nouvelle-Calédonie, l’aide à l’Ukraine et les opérations extérieures.

Ces dernières années, la droite républicaine n’a jamais voté contre les PLFG – y compris lorsqu’il s’agissait encore de projets de loi de finances rectificative de fin d’année. Compte tenu de l’importance des besoins, nous avions envisagé de voter pour ce texte. Mais il est complètement dénaturé dans la mesure où la première partie a été rejetée.

Mme Christine Arrighi (EcoS). Rien pour l’écologie, la recherche ou la solidarité et le logement : ce PLFG amplifie les choix faits lors du décret d’annulation du 21 février, qui avait fait perdre aux secteurs précités l’essentiel de leurs crédits. Comme s’il ne s’agissait pas de secteurs d’avenir… Nous ne pourrons donc que voter contre ce texte.

Comme l’a très bien relevé Philippe Brun, il faudrait sortir des postures, aussi bien dans l’hémicycle qu’en commission. Les Français ne se trompent pas sur l’analyse des votes. Ils suivent beaucoup nos travaux et ont fort bien compris ce qui est en train de se passer à l’Assemblée nationale.

M. Michel Castellani (LIOT). Il aurait été sans doute été plus adapté à la situation qu’un projet de loi de finances rectificative soit déposé. Débattre des annulations de crédits ou des comptes d’affectation spéciale n’est pas sans intérêt, mais nous préférons retenir le dérapage alarmant du solde public qui devrait tout de même atteindre 6,5 % du PIB. L’endettement augmente chaque année, ce qui entraîne des charges supplémentaires qui contribuent ellesmêmes à alimenter le cycle de la dette.

Par ailleurs, même si nous nous réjouissons des fonds alloués à la NouvelleCalédonie, nous regrettons un certain nombre d’annulations de crédits sur des missions importantes, comme l’aide au développement, France 2030 ou les relations avec les collectivités territoriales.

Dans la situation difficile que nous connaissons, nous espérons qu’un sursaut de croissance apporte un peu d’oxygène.

M. Gérault Verny (UDR). Je vous propose de prendre un peu de hauteur. Ce PLFG consacre un déficit de plus de 160 milliards, qui font gonfler la dette publique pour la porter quasiment à 3 300 milliards. Nous arrivons à la fin d’un système à bout de souffle et nous constatons que l’économie ne répond plus. Les entreprises et les ménages, étranglés par la pression fiscale, n’investissent plus et ne consomment plus.

Il faut aussi combattre avec force la chimère de la création de valeur par la dépense publique. Si cette dernière peut être un amortisseur conjoncturel dans des contextes particuliers, elle est beaucoup moins efficace que l’investissement privé. Ce PLFG confirme la gabegie des dépenses publiques, ce qui génère une inefficacité massive dont témoigne la chute des recettes fiscales. Nous fêtons les cinquante ans de la démonstration selon laquelle l’augmentation de l’impôt entraîne une baisse des recettes. L’expérience est cruelle, mais elle est scientifiquement démontrée.

Chaque renoncement nous rapproche d’une issue plus mortifère. Soyez conscients, chers collègues, que notre lâcheté sera payée par l’ensemble des Français.

Nous voterons donc contre ce texte.

M. le président Éric Coquerel. Il n’y aura pas de vote sur la deuxième partie du projet car tous les articles de celle-ci ont été rejetés.

L’an dernier, le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire s’était abstenu sur le PLFG, mais ce dernier jouait alors son rôle pour ainsi dire traditionnel de voiturebalai.

Le texte qui nous est présenté est d’une tout autre nature et je répète qu’il aurait fallu déposer un projet de loi de finances rectificative. Si l’on additionne les annulations de crédits du 21 février 2024, celles qui figurent dans ce projet et les baisses programmées par le PLF pour 2025, on aboutit à des montants véritablement significatifs pour certains ministères, ce qui me fait parler de politique d’austérité.

Pour cette raison, je n’ai pas changé d’avis et je m’oppose à ce PLFG.

La commission ayant rejeté tous les articles de la deuxième partie, l’ensemble de celle-ci est rejeté.

 

 


Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mercredi 13 novembre 2024 à 9 heures 30

Présents. - M. Franck Allisio, Mme Christine Arrighi, M. Karim Ben Cheikh, M. Jean-Didier Berger, M. Carlos Martens Bilongo, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Michel Castellani, M. Eddy Casterman, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Sébastien Delogu, M. Jocelyn Dessigny, M. Benjamin Dirx, Mme Mathilde Feld, Mme Félicie Gérard, M. José Gonzalez, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, M. Pierre Henriet, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Tristan Lahais, Mme Constance Le Grip, Mme Annaïg Le Meur, M. Aurélien Le Coq, M. Mathieu Lefèvre, M. Corentin Le Fur, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, M. Emmanuel Mandon, Mme Claire Marais-Beuil, M. Jean-Paul Mattei, M. Emmanuel Maurel, M. Kévin Mauvieux, Mme Graziella Melchior, Mme Estelle Mercier, M. Jacques Oberti, M. Didier Padey, Mme Christine Pirès Beaune, M. Christophe Plassard, M. Nicolas Ray, M. Matthias Renault, M. Charles Rodwell, M. Alexandre Sabatou, M. Emeric Salmon, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Charles Sitzenstuhl, M. Bertrand Sorre, M. Jean-Philippe Tanguy, M. Gérault Verny, M. Éric Woerth

Excusés. - M. Christian Baptiste, M. Laurent Baumel, M. Philippe Juvin, M. Damien Maudet, Mme Marianne Maximi, Mme Yaël Ménaché, Mme Sophie Pantel, M. Emmanuel Tjibaou

Assistait également à la réunion. - M. Thibault Bazin

 

 

 


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