Compte rendu
Commission d’enquête
visant à établir les freins à la réindustrialisation de la France
– Audition, ouverte à la presse, de M. Stéphane Séjourné, vice-président exécutif de la Commission européenne à la prospérité et à la stratégie industrielle, commissaire européen à l’industrie, aux PME et au marché unique, ancien ministre de l’Europe et des affaires étrangères 2
– Présences en réunion................................19
Mardi
3 juin 2025
Séance de 18 heures
Compte rendu n° 48
session ordinaire de 2024-2025
Présidence de
M. Charles Rodwell,
Président de la commission
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La séance est ouverte à dix-huit heures.
M. le président Charles Rodwell. Mes chers collègues, nous entendons M. Stéphane Séjourné par visioconférence. Monsieur le commissaire, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie d’avoir répondu à notre invitation. Je rappelle qu’avant vos fonctions à la Commission européenne, vous avez été ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Je vous remercie de déclarer tout intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations.
L’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d’enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
(M. Stéphane Séjourné prête serment.)
M. Stéphane Séjourné, vice-président exécutif de la Commission européenne à la prospérité et à la stratégie industrielle, commissaire européen à l’industrie, aux PME et au marché unique. Je vous remercie de me donner l’opportunité d’apporter un éclairage européen à votre commission d’enquête, à l’heure où l’industrie est devenue un élément essentiel de l’agenda de l’ensemble des institutions européennes – Commission, Parlement et Conseil. C’est d’autant plus opportun que l’industrie française est très représentative des défis auxquels l’industrie européenne est confrontée : œuvrer à la réindustrialisation en France revient à faire de même en Europe, et vice versa.
Sans doute faut-il reconnaître, en creux, la fin d’un paradigme dominant en Europe, qui s’est nourri des décennies durant de la division internationale du travail et de la tertiarisation de l’économie européenne. À l’époque, si les pouvoirs publics avaient peut-être conscience de perdre des usines et des emplois, ils pensaient que la valeur ajoutée européenne leur permettrait de conserver une longueur d’avance. Les deux dernières décennies nous ont montré combien nous avons sous-estimé la concurrence venue d’Asie et des États-Unis.
L’exemple du secteur automobile illustre bien ce changement de paradigme : l’Europe demande désormais des transferts de technologie à la Chine. Les constructeurs asiatiques viennent en appui des constructeurs européens et sont en capacité de proposer des innovations industrielles, avec l’ensemble des constructeurs européens. Cette inversion du rapport de force montre l’urgence à agir à l’échelle du continent européen et à développer une politique industrielle européenne.
J’évoquerai à cet égard les grands axes de la nouvelle approche industrielle de la Commission européenne. Le constat est le suivant : l’industrie européenne est prise en étau par plusieurs facteurs exogènes sur lesquels il nous faut agir, dans un contexte géopolitique très complexe. Tout d’abord, le coût de l’énergie, encore trop élevé, prend à la gorge des secteurs emblématiques comme la sidérurgie ou la chimie. Cette dernière – « l’industrie des industries » – est très importante pour l’Union européenne : elle produit énormément de molécules et de composants chimiques qui participent à notre compétitivité internationale et elle rayonne sur l’ensemble de l’industrie européenne. Il y a également une atonie de la demande – flagrante dans le secteur de l’automobile – et des distorsions de concurrence, certains pays tiers menant une politique extrêmement offensive au niveau international, avec une surenchère assez décomplexée des subventions publiques. Jusqu’à présent, nous étions le continent le plus ouvert et les clauses de sauvegarde manquaient pour protéger un certain nombre de nos industries. La Commission européenne a désormais instauré des outils et un arsenal législatif visant à systématiser les clauses de sauvegarde et à mieux utiliser nos capacités de défense commerciale.
L’industrie européenne est aussi freinée par des facteurs endogènes, sur lesquels nous pouvons agir, puisqu’ils dépendent uniquement de nos politiques publiques : la complexité de certains cadres réglementaires européens ; des barrières persistantes sur le marché intérieur – j’ai présenté il y a quelques jours la nouvelle stratégie pour le marché unique européen, qui participe de la réponse à la fermeture des marchés à l’international, et notamment aux tensions commerciales avec les États-Unis ; le déficit de main-d’œuvre, sujet prégnant pour l’industrie française, en particulier dans le secteur de la métallurgie ; et l’écosystème européen du capital-risque, structurellement timide – par rapport à la Chine et aux États-Unis, nous manquons de capital et d’une union des marchés de capitaux (UMC). Ces facteurs font clairement planer sur l’Europe un spectre de décrochage, mis en lumière par le rapport de Mario Draghi sur la compétitivité européenne, remis le 9 septembre 2024. Ils rendent nécessaire que la compétitivité européenne soit au centre de notre stratégie.
Dès le mois de décembre, la nouvelle Commission européenne a établi une feuille de route ambitieuse. Nous avons commencé par reprendre le rapport Draghi précité et le rapport d’Enrico Letta « Bien plus qu’un marché » publié en avril 2024 dans un document de la Commission, qui les traduit en termes de politiques publiques pour les cinq prochaines années et qui a été voté par le collège des commissaires. Au cœur de cette traduction législative figure le pacte pour une industrie propre, initiative transversale qui vise à réconcilier notre trajectoire de décarbonation avec la compétitivité de notre industrie.
Je m’arrête un instant sur le sujet de la décarbonation de notre économie, qui est essentiel dans notre stratégie économique. Il n’est qu’à voir ce que coûte à l’Europe l’achat d’hydrocarbures au Moyen-Orient ou de gaz naturel liquéfié (GNL) aux États-Unis : plus de 420 milliards d’euros. Cet argent ne se retrouve ni dans les services publics, ni dans les impôts et taxes : c’est juste une dépense directe, qui grève le déficit extérieur de l’Union européenne.
D’où notre stratégie d’indépendance énergétique. Puisque nous ne produisons pas d’hydrocarbures en Europe, nous voulons mener une politique très offensive en matière d’électrification et de technologies propres ou cleantech. Nous agissons sur plusieurs leviers : l’accès à l’énergie abordable – avec l’instauration de dispositifs de court et de moyen terme ; l’accès aux matières premières et aux stratégies de matières premières – avec depuis quelques mois plusieurs plans stratégiques, notamment pour ouvrir de nouvelles exploitations minières de métaux rares et de matières stratégiques pour lesquels nous dépendons à 100 % de la Chine ; le développement de marchés porteurs ; l’accès au financement et aux compétences ; et la révision dans les prochains mois des clauses des marchés publics européens. On observe sur ce dernier point un très net changement d’état d’esprit, avec la volonté d’intégrer une préférence européenne à l’achat dans des secteurs stratégiques, de façon à stimuler la demande – c’est le cas pour l’acier et les matières premières – ou à soutenir des marchés qui manquent de demande, comme le recyclage et l’automobile – où des questions de sécurité entrent également en jeu.
Sur les quarante-sept projets stratégiques sélectionnés par la Commission européenne en matière de recyclage, production, extraction et raffinage de matières premières, neuf sont français. Deux d’entre eux concernent l’exploitation et nécessitent un financement dédié, avec des garanties ou des subventions : les prochains mois permettront de déterminer comment les soutenir. L’objectif est de ramener notre dépendance aux pays tiers en dessous de 65 % d’ici à 2030 pour chaque matière première stratégique, voire de devenir totalement autonomes – en termes de production, raffinage et recyclage – pour certaines d’entre elles, comme le lithium. Sur ces questions, la Commission a beaucoup évolué, se rapprochant des positions françaises, et la capacité de la France à convaincre n’est pas pour rien dans le consensus qui a émergé.
Enfin, la simplification est un marqueur important du nouvel agenda de la Commission européenne. Nous voulons développer une nouvelle culture réglementaire visant à réduire la charge administrative et à soutenir l’investissement. Trois premières propositions de directives de simplification – dites « omnibus », puisqu’ils concernent la modification de plusieurs textes européens existants – ont été envoyés au Parlement. Le premier vise à réduire les obligations de déclaration ou reporting en matière de durabilité. Le second, qui concerne les investissements, permettra de dégager jusqu’à 50 milliards d’euros, qui seront réinvestis en fin d’année dans des actions de dérisquage ou derisking grâce à l’outil InvestEU, qui permet d’apporter des garanties d’emprunt à des projets risqués au niveau européen. Le troisième projet de simplification, qui porte sur la politique agricole, sera présenté au Parlement européen et débattu dans les prochains jours.
Le 21 mai dernier, j’ai présenté un autre projet, instaurant une définition, au niveau européen, des entreprises de taille intermédiaire (ETI) – entre 250 et 750 salariés. Le but est d’exonérer cette catégorie d’entreprises de certaines réglementations européennes contraignantes et de lisser l’effet de seuil existant, le passage de 250 à 251 salariés ayant pour effet de déclencher une cinquantaine de réglementations. Nous avons créé cette catégorie pour faire bénéficier les ETI – les industries de demain, pour l’Union européenne comme pour la France – des mêmes exemptions que les PME. Le texte sera prochainement discuté au Parlement européen.
Bref, notre agenda de simplification est assez ambitieux. Il vise à créer des flexibilités qui n’existaient pas auparavant. Les textes dits omnibus, envoyés chaque mois au Parlement européen, permettent de cibler et identifier les contraintes, afin de résoudre les problèmes rapidement. Ainsi, le Conseil et le Parlement européen viennent d’adopter définitivement, en deux mois seulement, nos textes relatifs à l’assouplissement des règles imposées aux constructeurs automobiles en matière d’émissions de CO2, afin de leur éviter des amendes. Cela montre que lorsqu’il y a urgence, nous savons faire preuve d’efficacité.
M. le président Charles Rodwell. Merci pour cette présentation. Ma première question concerne la politique économique menée à l’échelle nationale depuis 2017, baptisée politique de l’offre. Comment est-elle perçue par nos partenaires européens, notamment ceux avec lesquels vous échangez fréquemment ? Est-elle considérée comme un moment de bascule, y a-t-il un avant et un après 2017 en matière de politique économique industrielle française ?
Si elle ne relève pas de votre portefeuille, ma deuxième question a directement trait à des dossiers dont vous avez la charge : quelle réponse sommes-nous en mesure d’apporter à la politique tarifaire de Donald Trump et à la guerre commerciale qu’il nous mène ? Au-delà de ses aspects douaniers et commerciaux, la question a-t-elle une traduction dans votre champ de compétences, allez-vous prendre des dispositions spécifiques au secteur productif européen ?
Ma troisième question concerne les projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC), ces alliances industrielles développées notamment suite à la crise du Covid. Ces projets portent par exemple sur les batteries, avec l’ouverture de l’usine ACC à Douvrin, sur les semi-conducteurs, avec le règlement européen du 13 septembre 2023 établissant un cadre de mesures pour renforcer l’écosystème européen des semi-conducteurs dit European Chips Act, ou sur l’hydrogène. Pouvez-vous dresser un état des lieux du déploiement des PIIEC dans le nouvel agenda de la Commission européenne, suite aux dernières élections ? Ont-ils vocation à s’amplifier, au service de l’industrie française et européenne ?
M. Stéphane Séjourné. La semaine prochaine, dans le cadre du Semestre européen, seront dévoilées les recommandations de la Commission européenne pays par pays, avec un débat au collège des commissaires. Sans entrer dans le détail d’informations qui ne sont pas encore officielles, je peux vous indiquer qu’il y aura un certain nombre de commentaires positifs sur la France, notamment eu égard à la politique économique conduite ces dernières années. La comparaison avec les autres pays européens sur la même période a en effet mis en valeur l’attractivité internationale de la France, ainsi que les politiques menées dans certains secteurs d’activité, qui ont permis de sauvegarder des emplois et de créer de la croissance. Lorsque la présentation aura eu lieu, je pourrai mettre à votre disposition l’ensemble des documents utiles.
S’agissant de la politique tarifaire, une réorganisation mondiale du commerce est en train de s’opérer. L’Union européenne doit se repositionner très rapidement pour préserver ses débouchés et soutenir son industrie à l’extérieur. Nous avons beaucoup compté sur notre demande intérieure pour construire nos industries, mais celles-ci doivent aussi être en capacité d’exporter. Notre objectif est donc de trouver des nouveaux marchés, pour réduire nos dépendances à certains pays et pour trouver des débouchés alternatifs suite à la fermeture d’autres pays, comme les États-Unis. Nous menons une politique très offensive pour conquérir de nouveaux secteurs d’activité, qui passent par des accords spécifiques dans des secteurs particuliers avec de nouveaux partenaires – Mexique, Canada, Corée du Sud, Japon. L’Union européenne s’attache à diversifier ses marchés à l’étranger, pour ne pas dépendre des droits de douane des uns ou des autres.
Nous avons également une stratégie interne à développer. Le renforcement de notre marché intérieur – 450 millions de consommateurs – est de notre responsabilité, et fait partie d’ailleurs de la réponse à la guerre commerciale. Ces dix dernières années, les industries et entreprises françaises se sont plus internationalisées qu’européanisées. Il faut donc leur donner des perspectives et les encourager à aller chercher des marchés européens.
Ces derniers ne sont théoriquement soumis à aucun droit de douane. Toutefois, les différences réglementaires entre États membres représentent l’équivalent de 50 % de droits de douane pour les biens et de 110 % pour les services. Ainsi, une entreprise française qui souhaite commercialiser un bien en Allemagne doit avoir une filiale, un représentant légal, un cabinet d’audit qui expertise la réglementation allemande et suit ses évolutions. En définitive, le coût pour l’entreprise est très important, alors même que nous sommes un marché commun.
Si nous renforçons le marché intérieur, nous devons protéger les frontières extérieures de l’Union. Cela suppose de finaliser la réforme des douanes au niveau européen, en nous protégeant notamment des petits colis – dont presque 6 milliards sont attendus sur le territoire européen en 2026. C’est un enjeu important : on ne saurait supprimer des barrières à l’entrée dans le marché intérieur sans être sûr d’avoir une protection aux frontières de l’Union.
Pour ce qui concerne les tarifs, nous avons instauré un programme défensif et un programme offensif. Le programme défensif est très clair : par le biais des gouvernements nationaux et des représentations de la Commission dans toutes les capitales européennes, nous sommes en contact avec les chefs d’entreprise que le nouveau gouvernement américain sollicite, dans le domaine industriel. Parfois ils se voient proposer des facilités d’installation, d’autres fois ils se font menacer sur leurs marchés existants : la Commission européenne a su s’adapter et flexibiliser son organisation pour les accompagner. Je l’ai évoqué, elle a une stratégie offensive en matière de simplification et de compétitivité. Elle organisera les choses avec eux pour éviter des délocalisations massives dans les prochains mois.
Enfin, les PIEEC sont un très bon instrument de coopération entre les États membres. La Commission envisage d’ailleurs d’y participer elle-même, en tant qu’entité, ce qui n’est actuellement pas le cas – elle met uniquement son tampon sur les aides d’État qui sont octroyées dans le cadre de ce dispositif. Il ne serait pas illogique qu’elle contribue au financement de ces projets d’intérêt commun et européen. Il y a quelques semaines, nous en avons lancé dans le secteur nucléaire, ce qui est nouveau car ce sujet faisait l’objet de désaccords entre les États membres et de pressions au sein de la Commission.
Bref les PIIEC sont un instrument formidable, qui fonctionne très bien. Il faut les simplifier et les rendre plus flexibles, pour pouvoir aller plus vite. La Commission européenne fera dans les prochains mois des propositions pour que ces projets, qui sont une réussite en matière d’innovation et de coproduction entre entreprises européennes, soient élargis au-delà des sujets que vous avez mentionnés.
M. Alexandre Loubet, rapporteur. Monsieur le vice-président, je vous remercie d’avoir accepté d’être auditionné alors que, contrairement aux personnes que nous convoquons, votre statut de commissaire européen ne rendait pas obligatoire de répondre à notre convocation.
J’aurai trois séries de questions, que je vais présenter tout de suite afin d’éviter les redites : la première porte sur le poids des normes, la deuxième sur les différentes mesures de protection, comme le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) ou Carbon Border Adjustment Mechanism (CBAM), le fléchage de l’épargne ou encore la préférence européenne, et la troisième concerne plus précisément le secteur automobile.
Mais auparavant, vous venez d’indiquer que la Commission européenne envisageait de financer directement des projets industriels par le biais des PIIEC. Avec quel argent ?
M. Stéphane Séjourné. La Commission européenne a plusieurs fonds à cet effet. À ce propos, j’ai besoin du soutien de la France, de l’Allemagne, de la Pologne et de tous les pays qui sont dans une logique de réindustrialisation pour organiser un fonds de compétitivité qui couvrirait l’ensemble de la vie des entreprises, de la recherche jusqu’à la mise à l’échelle industrielle. L’ensemble des crédits, qui avoisinent les 300 milliards d’euros, ce qui paraît peu, sont dispersés entre cinquante fonds. Nous réfléchissons au moyen de soutenir les PIIEC, soit directement sous forme de subventions, soit sous forme de garantie, ce qui n’est pas possible aujourd’hui.
M. Alexandre Loubet, rapporteur. Ma première série de questions est donc relative au poids des normes.
Le président Rodwell vous a interrogé sur la politique de l’offre menée sous la présidence d’Emmanuel Macron. Ne considérez-vous pas que les 30 milliards d’euros d’allégements fiscaux, qui auraient pu favoriser la compétitivité des entreprises, ont finalement été plombés par le poids des normes ? De nombreuses études, à commencer par celles de la Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (Ifrap) ou le rapport Draghi, évaluent le coût d’application des normes européennes entre 20 et 40 milliards chaque année – et je ne parle même pas des effets de la surtransposition française. Cela signifierait que les allégements fiscaux sont neutralisés par l’inflation normative.
Par ailleurs, la Commission von der Leyen II semble avoir la volonté d’alléger les normes européennes. Cela marque un tournant, et nous ne pouvons que nous en féliciter. Le Rassemblement national soutiendra toute action du Parlement européen en ce sens. En plus de réaliser un test PME sur l’ensemble des décisions, ne faudrait-il pas effectuer un test compétitivité pour évaluer l’impact des décisions européennes ? En effet, l’interdiction de la vente des véhicules à moteur thermique en 2035 par exemple n’a pas fait l’objet d’une véritable étude d’impact, alors qu’elle représente une véritable menace pour l’emploi.
L’Union européenne vient de décider un allégement de la directive du 14 décembre 2022 relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises ou Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) : on ne peut que s’en réjouir. Supprimerez-vous le devoir de vigilance qui inquiète fortement les industriels, comme l’ont demandé le Président de la République, le Rassemblement national et d’autres mouvements ? Il s’agit en fait de rendre juridiquement responsables les entreprises des mauvaises pratiques de leurs fournisseurs ou des entités appartenant à leur chaîne de valeur.
Enfin, ce week-end, vous avez déclaré dans un média français que les différences de réglementations d’un pays à l’autre équivalaient à charger les échanges de 50 % de droits de douane sur les biens et de plus de 100 % sur les services. Les différences normatives entre les pays européens ne sont-elles pas précisément le fruit de l’inflation normative européenne due à la Commission von der Leyen I ? Les derniers gouvernements français ont-ils fait preuve d’un excès de zèle, notamment en transposant plus vite que l’ensemble des autres pays européens la CSRD, qui s’impose aux entreprises et dont l’application coûtera plus de 4 milliards d’euros en 2025 ?
M. Stéphane Séjourné. Je n’étais effectivement pas obligé d’accepter cette audition, merci de l’avoir rappelé, mais je considère qu’il est important d’apporter cet éclairage européen. Toutefois, permettez-moi dans mes réponses de respecter la forme de neutralité politique qui est requise des commissaires européens – vous savez à quel bord je me trouve.
La première proposition de directive omnibus vise à réduire la charge réglementaire des entreprises – équivalant à 37,5 milliards pour l’ensemble de l’Union européenne cette année. Néanmoins, en tout cas dans les pays à l’organisation fédérale, où les régions ont un large pouvoir normatif, cette charge est répartie entre le niveau national et local – c’est moins le cas en France. Dès lors, les différences de réglementation et la bureaucratie se répercutent à différents échelons.
Le travail d’harmonisation que nous menons nécessite d’avoir un agenda très pro-européen : nous prônons l’harmonisation des règles nationales par le haut. Pour éviter toute polémique, il faudra à terme une convergence en matière fiscale ; nous y travaillons. Il faudra des convergences de règles ; nous y travaillons aussi. Nous avons besoin de renforcer le marché intérieur, donc de lever certaines barrières – d’où la stratégie du marché unique européen que j’ai évoquée.
Les propositions de directives omnibus de simplification sont élaborées avec l’ensemble des filières, en menant des dialogues stratégiques avec les syndicats, les patrons d’entreprises et de secteurs et les gouvernements. Il s’agit d’identifier les blocages et de repérer les règles européennes dont la levée aurait un impact économique. Entre les plans stratégiques et les omnibus, nous avons passé beaucoup de temps à consulter et à échanger avec l’ensemble des acteurs du terrain, au niveau national et régional.
Les propositions de directives omnibus permettent à la Commission européenne de gagner en flexibilité lorsqu’elle identifie des éléments de blocage – c’est une nouveauté. Au niveau international, le temps s’est beaucoup accéléré : la réactivité devient un facteur de compétitivité. Nous avons donc besoin de retrouver de la flexibilité réglementaire, d’aller vite. C’est une vraie différence avec les Américains : le vote d’un texte européen peut prendre jusqu’à dix-huit mois, entre sa parution et le vote par le Conseil et le Parlement européens – la transposition d’une directive prend encore plus de temps. Les textes omnibus, qui nous permettent d’être très réactifs dans un contexte de changements géopolitiques, nous rendent également très offensifs face aux entreprises qui se poseraient la question de délocaliser. Simplifier au maximum est le mantra de la Commission.
S’agissant de la baisse de la compétitivité, oui nous faisons des tests PME : toutes les règles européennes sont évaluées pour mesurer leurs effets sur les entreprises. La nouvelle Commission a également pris l’engagement de réaliser une étude d’impact sur la compétitivité : c’est un élément important de l’agenda européen.
Quant aux simplifications des textes omnibus, la plupart des règles que nous avons modifiées depuis cent jours ne s’appliquaient pas, ou partiellement, en Europe. Par exemple, si la France a été une très bonne élève en matière de transposition de la CSRD et de la directive du 13 juin 2024 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité ou Corporate Sustainability Due Diligence Directive (CS3D), nos amis allemands ne les avaient pas transposées. Il fallait donc trouver un accord. La Commission européenne a proposé un dispositif de suspension de leur application ou stop the clock qui vise à remettre à plat l’ensemble des deux législations, à faire un état des lieux et à discuter avec les chefs d’État et de gouvernement – le président français a déjà pris position. La Commission proposera ensuite un texte susceptible d’être adopté par le Parlement européen et le Conseil. Le travail sur ces deux textes est long puisqu’au Parlement européen, il est plus difficile de trouver une majorité pour modifier plutôt que pour supprimer un texte, et qu’au Conseil, les ambassadeurs et les ministres n’étaient pas unanimes. Nous poursuivons la concertation pour essayer de trouver une voie.
L’objectif est de supprimer le maximum de bureaucratie, et aussi d’éviter que certaines informations ne figurent dans des documents de reporting publiés au niveau international – ce qui ne favorise pas la compétitivité des industries européennes. Nous regarderons, point par point, ce que nous pouvons simplifier et supprimer dans ces deux textes tout en respectant leur objectif de départ, qui est positif.
S’agissant enfin des différences réglementaires je confirme les chiffres que vous avez repris. Lorsqu’une entreprise française veut opérer en Allemagne, en Italie et en Pologne, elle doit avoir dans chacun de ces pays une filiale, une banque, et souvent un cabinet d’audit pour l’accompagner et suivre l’évolution de la réglementation. Tout cela a un coût, qui est équivalent à un droit de douane – pour reprendre une notion que l’actualité a rendue très populaire sur les plateaux de télévision. La seule solution pour faire baisser cet équivalent droits de douane auquel sont soumises les entreprises, c’est l’harmonisation. Il faut donc éviter, dans chaque pays, tant les surtranspositions que l’absence de transposition. Quant à la Commission européenne, elle doit préférer les règlements aux directives.
M. Alexandre Loubet, rapporteur. Merci pour la clarté de votre réponse. Ma deuxième série de questions porte sur les politiques de protection menées par l’Union européenne dans un environnement mondial tendu, entre les menaces américaines de tarifs douaniers et le risque de voir le marché européen inondé par des productions en surcapacité, notamment chinoises.
Je commence par la protection des frontières européennes. Lorsque le MACF avait été voté par le Parlement européen, autrement dit la fameuse taxe carbone, nous avions dénoncé le fait qu’elle se concentrait essentiellement sur les intrants nécessaires à la production industrielle sur le sol européen et non sur les produits semi-finis et finis, qui, eux, font directement concurrence aux produits européens. Confirmez-vous la volonté de la Commission européenne d’étendre le champ d’application du MACF aux produits finis et semi-finis ? Les méthodes de calcul du MACF ne sont-elles pas une usine à gaz, ainsi que le craignent de nombreux industriels ? Ne faudrait-il pas déterminer des valeurs par défaut par pays ?
Deuxième sujet : la préférence européenne. Pour nous protéger, il faut réduire le taux d’ouverture des marchés publics de l’Union européenne, qui est d’environ 82 % contre 32 % aux États-Unis. Il faut mettre fin à cette naïveté. Nous nous félicitons que l’Union prenne enfin le tournant de la préférence européenne. À quels secteurs s’appliquera-t-elle ? Quelle garantie avons-nous que tous les États membres joueront le jeu ?
Concernant le secteur de la défense, deux tiers des importations d’armement sur le sol européen depuis 2020 proviennent des États-Unis. L’objectif de la Commission est d’acheter à terme 50 % d’équipements au sein de l’Union européenne. Comment atteindre cet objectif alors que, sur les 800 milliards du plan annoncé par Mme von der Leyen, la préférence européenne sera cantonnée à 90 milliards – autrement dit les fameux 65 % des 150 milliards de prêts à la défense ?
Ma dernière série de questions concerne les financements. Toute l’Union a été frappée par un chiffre : celui des 300 milliards d’euros d’épargne européenne qui sont investis aux États-Unis. Quel dispositif permettrait de flécher cette épargne vers l’économie européenne, et particulièrement l’économie française ? La France est le meilleur élève d’Europe en matière d’épargne : alors qu’elle verse déjà chaque année davantage à l’Union européenne qu’elle ne reçoit d’elle, évitons que toute l’épargne des Français aille financer les usines délocalisées en Europe de l’Est.
M. Stéphane Séjourné. Le MACF est un dispositif que nous sommes en train de tester à blanc. Il pourra sans doute être repris pour d’autres types de réglementation. L’idée est de vérifier la facilité et la viabilité du dispositif, d’obtenir des retours d’expérience et de le modifier en conséquence, avant qu’il n’entre en vigueur.
Les députés européens ont adopté le 22 mai 2025 un premier paquet omnibus visant notamment à simplifier le MACF. Il permet d’exempter 90 % des entreprises important ou exportant une faible quantité de produits concernés, lesquelles représentent moins de 1 % des émissions. Il s’agit d’une bonne mesure de simplification.
Nous sommes en train de réfléchir à trois modifications. D’abord, le dispositif pourrait être étendu au secteur aval alors qu’il est aujourd’hui limité aux produits bruts – c’est pourquoi il suffit de transformer le produit avant d’importer pour être exonéré de la taxe, comme le sont les carcasses de voiture en acier par exemple. De la même manière, il y a des manques dans les matières concernées par le dispositif, qui pourra être complété. Par ailleurs, une de nos équipes travaille spécifiquement sur la lutte contre le contournement. Enfin, il faut soutenir l’export pour éviter que le dispositif constitue un handicap de ce point de vue. Nous avons trop souvent pensé notre marché, national ou européen, comme créant la demande ; or nos industries ont également besoin d’être compétitives au niveau international. Ainsi, l’acier européen de très bonne qualité est particulièrement compétitif : il doit pouvoir continuer à l’être. Nous devons veiller à ne pas handicaper nos industries.
En ce qui concerne les valeurs, nous travaillons dans le sens de la simplification. Dans les prochains mois, le commissaire chargé du MACF fera une proposition de révision globale au Parlement européen et au Conseil. Je me tiens à votre disposition pour vous donner l’ensemble des informations relatives à nos hypothèses de travail et à la proposition finale que nous présenterons.
S’agissant des marchés publics, je suis pour la réciprocité en matière de commerce international. Pour une entreprise européenne qui obtient un marché aux États-Unis, trois entreprises américaines obtiennent un marché en Europe. Il est clair que nous sommes beaucoup plus ouverts. Nous sommes en train de déterminer les critères en matière de réciprocité que nous devons instaurer. Nous commençons avec les clauses des marchés publics : nous proposerons une révision de la réglementation correspondante début 2026. Je me suis donné pour objectif de consulter tous les acteurs qui passent des marchés publics, à savoir les pouvoirs adjudicateurs, notamment les représentants des régions et des communes, afin de savoir quelles nouvelles clauses ils souhaiteraient voir incluses dans les marchés pour pouvoir donner la préférence à un achat local ou européen. Nous sommes prêts à examiner toutes les propositions qui seront formulées par les représentations nationales des États membres comme par les associations d’élus locaux.
En ce qui concerne le secteur de la défense, le taux fixé pour la préférence nationale n’est pas de 50 % mais de 65 %. Très peu de matériels militaires européens comportent moins de 65 % d’éléments européens : cela couvre donc très largement les capacités de nos entreprises. Nos industries de l’armement, y compris françaises, utilisent des composants internationaux mineurs, qui ne sont pas stratégiques. Nous ne pouvions donc pas contraindre les industriels à utiliser 100 % de produits européens, sauf à exclure des pans entiers des gammes de matériels.
Néanmoins, ne vous arrêtez pas aux chiffres, prenez plutôt en compte la démarche : il s’agit de décloisonner les aides européennes, qui étaient fléchées sur des fonds de cohésion, pour les réorienter vers l’achat de matériels militaires. Cela répond à une volonté de réarmement de l’ensemble des États membres, au moment où le nouveau gouvernement américain donne des sueurs froides à l’ensemble des capitales européennes.
Il est vrai que 300 milliards d’euros d’épargne européenne sont investis aux États-Unis. C’est un peu paradoxal : une partie de ces fonds financent des entreprises européennes, notamment des start-ups et des entreprises en cours de changement d’échelle ou scale-ups, qui se sont délocalisées aux États-Unis justement pour trouver des financements. Il faut arrêter cela tout de suite. Cette situation se réglera par de la simplification, le renforcement du marché intérieur et l’union des marchés de capitaux (UMC). Nous avons besoin d’améliorer la circulation de l’épargne et des capitaux en Europe. C’est la priorité de la Commission européenne, avec le prix de l’énergie, autre facteur essentiel de compétitivité. Si nous parvenons à convaincre les États d’adopter l’ambitieuse réforme de l’UMC, l’effet sur la compétitivité européenne sera maximal. Les ETI, employant entre 250 et 750 salariés, qui sont les entreprises de demain, pourront ainsi trouver des financements et, surtout, rester sur le territoire européen.
M. Alexandre Loubet, rapporteur. J’en arrive à ma dernière série de questions. Le secteur automobile français est particulièrement affecté par la réglementation européenne, notamment l’interdiction de la vente des véhicules à moteur thermique. La Plateforme automobile (PFA) estime qu’environ 100 000 emplois seront supprimés dans le seul secteur industriel, sans compter ceux qui le seront dans le secteur de la distribution et des services, alors qu’il s’agit d’emplois de proximité structurant l’économie des territoires. L’interdiction de la vente des véhicules à moteur thermique en 2035 n’est-elle pas trop rigide, du point de vue tant des délais, qui ne sont pas tenables, que de la technologie ? Les moteurs hybrides sont une filière d’excellence en France : pourquoi ne pas assouplir l’interdiction et autoriser la vente de véhicule à moteurs hybrides ?
Deuxièmement, alors que les constructeurs automobiles sont en grande difficulté et que les PDG de Stellantis et de Renault alertent sur l’état de crise du marché automobile, confirmez-vous que la Commission européenne est en train de négocier la levée des surtaxes qui pèsent sur les véhicules électriques chinois ? Cette mesure a-t-elle fait l’objet d’une étude d’impact ? En quoi consiste le dispositif de remplacement, qui ne semble pas convaincre les constructeurs automobiles français ?
Troisièmement, confirmez-vous que la Commission européenne souhaite imposer une part de composants européens dans les véhicules électriques vendus en Europe ? Cette mesure s’appliquera-t-elle aux véhicules importés depuis l’Asie, notamment chinois ?
M. Stéphane Séjourné. Le « Plan d’action pour stimuler l’innovation, la durabilité et la compétitivité du secteur automobile », publié par la Commission européenne le 5 mars 2025, a reçu un bon accueil et couvre, pour la première fois, l’ensemble des aspects du secteur, notamment la dimension extérieure – clauses de sauvegarde, droits de douane – et les enjeux de compétitivité interne, qui passent par la simplification. Apóstolos Tzitzikóstas, commissaire chargé des transports durables, et moi-même avons pris l’engagement d’avancer la clause de revoyure, que l’on doit à mon prédécesseur, Thierry Breton, afin d’être prêts en 2026. L’objectif est de stabiliser le cadre réglementaire le plus rapidement possible pour permettre aux constructeurs de faire ce qu’ils savent faire le mieux, c’est-à-dire vendre des véhicules.
Pour le reste, je ne veux pas anticiper les conclusions des discussions à venir dans le cadre du dialogue stratégique engagé avec l’ensemble de la filière – les constructeurs, mais aussi les équipementiers, les fournisseurs ou encore les giga-usines ou megafactories qui produisent les batteries : c’est tout un écosystème dont nous devons prendre le pouls pour configurer au mieux la réglementation applicable jusqu’en 2035.
À cette date, se posera la question de la neutralité technologique ou des technologies à privilégier. Sur ce point, au vu du contexte économique actuel, je suis très favorable à ce que nous donnions la plus grande flexibilité possible aux industriels : notre objectif n’est pas de les plomber, mais de les conforter et de les renforcer. Rien ne sera fait qui mette le secteur en difficulté.
Nous restons néanmoins attachés aux objectifs de décarbonation du secteur, qui sont très clairs. Des dispositifs ont été conçus pour stimuler la demande, notamment en vue de verdir les flottes de véhicules professionnels, qui représentent environ 55 % des ventes de voitures neuves en Europe. Leur renouvellement anticipé permettra aussi d’alimenter le marché de l’occasion en véhicules propres, donc de faire baisser leur prix d’acquisition.
Nous poursuivons donc une logique globale conciliant la stimulation de la demande et la stabilisation de l’environnement réglementaire, étant entendu que le principe de neutralité technologique pourrait être placé au cœur de nos objectifs pour 2035 afin de gagner en flexibilité.
Enfin, je l’ai dit, nous devrons aussi nous occuper des sous-traitants et des fournisseurs. Une attention particulière sera accordée aux batteries, qui représentent 40 % du prix d’un véhicule électrique. Certains producteurs chinois, dont il faut reconnaître la supériorité technologique, montent actuellement des co-entreprises ou joint-ventures avec des constructeurs européens. Nous devons pouvoir négocier des transferts de technologie dans ce cadre afin de faire baisser les prix : si les constructeurs chinois souhaitent produire et commercialiser en Europe, ils doivent accepter de transférer leur technologie aux industriels européens. Nous l’avons fait dans l’autre sens il y a vingt-cinq ou trente ans, dans d’autres secteurs d’activité, comme le nucléaire avec la Chine ; nous devons maintenant pouvoir exiger la même chose en retour.
L’importation de voitures électriques chinoises intervient donc dans le cadre de discussions dont vous comprenez bien qu’elles ne se limitent pas aux seules barrières tarifaires. Nous avons toutefois bien appliqué des droits de douane aux véhicules chinois et nous continuerons de le faire, parce qu’il faut protéger le secteur en attendant d’avoir totalement stabilisé la réglementation et d’avoir négocié d’éventuels transferts de technologie. Ces discussions sont en cours. Je travaille en lien étroit avec mon collègue le commissaire Maroš Šefčovič, qui est responsable de cette question. J’ai évidemment à cœur de défendre l’industrie européenne et je serai très attentif à ce que les accords qui seront trouvés ne soient pas contre-productifs pour nos constructeurs.
Je vous confirme enfin que l’obligation d’intégrer des composants européens dans les voitures électriques vendues en Europe s’étendra bien aux véhicules importés, notamment pour des raisons de sécurité nationale. J’ai souvent eu l’occasion de le souligner : des automobiles en circulation peuvent actuellement être déconnectées à tout moment, depuis Austin, siège de Tesla aux États-Unis, ou depuis Shenzhen, siège de BYD en Chine. Les constructeurs qui installent les composants électroniques connectés dans ces véhicules doivent donc être soumis au droit européen, et non à des législations de pays tiers, qui pourraient nous exposer à d’éventuelles interactions politiques sur lesquelles nous n’avons aucun contrôle.
Nous avons récemment connu des crises qui nous semblaient impensables auparavant – sanitaires, diplomatiques, militaires. Nous devons donc nous prémunir contre d’éventuelles tensions diplomatiques avec des pays qui seraient capables de déconnecter des millions de véhicules européens du jour au lendemain. Actuellement, le nombre de véhicules concernés se compte en centaines de milliers ; s’il atteignait plusieurs millions, cela poserait de vrais problèmes de sécurité à l’ensemble des États membres. Nous devons imposer que les composants soient installés par des entreprises de droit européen, soumises à des tribunaux européens, ce qui nous laisse au moins une possibilité de recours.
M. Éric Michoux (UDR). Vous avez parlé avec une certaine élégance de la nécessité de créer des ETI de dimension nationale et surtout internationale. Or cela suppose de leur permettre d’accéder à des capitaux et de répondre à des problèmes financiers importants. Dans les domaines qu’il m’arrive de traiter en tant qu’entrepreneur, les garanties demandées par les clients – garantie de restitution d’acompte, garantie de bonne exécution, garantie financière, retenue de garantie – imposent aux entreprises de disposer d’importants soutiens financiers. Le même constat vaut pour les fournisseurs sollicités par les industriels dans le cadre de leur démarche de décarbonation, qui est très coûteuse.
Malheureusement, les ETI françaises ne sont pas capables d’apporter ces garanties à leurs clients, contrairement aux entreprises polonaises ou italiennes, qui y parviennent assez bien – sans parler des Chinois, qui sont capables de lever des garanties incroyables. Pour obtenir un contrat de plusieurs millions d’euros, il faut pouvoir apporter une garantie presque équivalente : la plupart des entreprises industrielles françaises en sont incapables, puisqu’elles parviennent tout juste à investir dans leurs propres machines. On peut bien sûr se tourner vers la Banque publique d’investissement (BPIFrance), la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface) ou les banques, mais ces dernières nous renvoient généralement vers des sociétés de financement ou des assureurs.
Malgré des technologies de très grande qualité et des prix compétitifs, les entrepreneurs français se heurtent donc à ce barrage de la capacité à financer le risque et à apporter des garanties. Comment pouvez-vous nous aider à répondre à ce problème concret ?
M. Pierre Cordier (DR). Personne ne doute de votre volonté de bien faire, monsieur le vice-président, ni de votre engagement. Simplement, en tant qu’élu d’un territoire confronté à de nombreuses difficultés économiques et sociales, principalement dans des secteurs de l’industrie traditionnelle – forge, estampage, fonderie, usinage – qui sont confrontés à la fin du moteur thermique, je veux témoigner du vécu des chefs d’entreprise. Confrontés à d’importantes difficultés, ils espéraient récupérer une petite partie des 50 milliards d’euros annoncés par la France. Dans quelle mesure pouvez-vous intervenir pour aider les entreprises qui subissent de fortes baisses de leurs commandes du fait du passage au moteur électrique ?
Nous aussi, nous rencontrons fréquemment des chefs d’entreprise et je perçois une différence assez nette entre votre discours et les retours qui nous sont faits sur le terrain. Les entreprises peuvent certes bénéficier d’aides de l’Union européenne, mais à condition de remplir des dossiers de 3 887 pages et d’embaucher une personne qui s’y consacre à temps plein. La paperasse fait partie des contraintes qui exaspèrent les chefs d’entreprise. Ils ne demandent pas que toutes les formalités soient supprimées, mais les simplifier leur permettrait d’y voir plus clair.
Je vous invite en tout cas à venir dans le département des Ardennes pour y rencontrer des chefs d’entreprise : ils vous feront part directement de leurs problèmes et des dizaines, voire des centaines d’emplois supprimés au cours des cinq dernières années dans les secteurs que j’ai évoqués.
M. Stéphane Séjourné. Je m’astreins à effectuer un déplacement chaque semaine, dans des zones industrielles situées partout en Europe, et je vous rejoins : il y a souvent un écart entre ce qu’on me dit dans les directions et ce que je perçois sur le terrain. Nous devons donc trouver des solutions. Je viendrai en tout cas bien volontiers dans votre circonscription.
La meilleure des garanties, c’est le carnet de commandes. C’est pourquoi nous nous efforçons de remplir ceux des ETI en les libérant d’un certain nombre de contraintes. Le processus ne fait que commencer puisque, sur la cinquantaine de textes européens susceptibles de faire l’objet de dérogations pour les ETI qui m’ont été proposés, j’ai décidé, dans un premier temps, d’en soumettre sept au Parlement européen. Il s’agit de points présentant un fort impact économique, comme certaines obligations prévues par le règlement général sur la protection des données (RGPD). Celui-ci impose par exemple aux entreprises de conserver les données de leurs clients, ce qui les oblige souvent à passer un contrat de prestation et à consacrer un équivalent temps plein au maintien du fichier – ce qui devient coûteux pour de l’archivage de données. Ces allègements permettront aux entreprises de gagner en compétitivité et de se concentrer sur ce qu’elles savent faire le mieux, c’est-à-dire produire.
La question des garanties est effectivement un enjeu européen. À cet égard, nous disposons d’un outil spécifique, le programme InvestEU de 2021 à 2027, qui est très intéressant puisqu’il permet de lever 15 euros d’investissement pour chaque euro d’argent public mis en garantie. Ces garanties concernent surtout des projets très risqués, que les banques ne soutiendraient pas en l’absence d’opérateurs publics. Nous avons levé récemment 25 milliards supplémentaires pour donner davantage de profondeur à ce fonds. Nous pourrons également aborder, dans le cadre de la discussion budgétaire européenne à venir, la question de la somme à consacrer aux garanties destinées aux ETI et aux PME. J’y vois un beau sujet de débat, car c’est typiquement le rôle de la Commission européenne que d’offrir des garanties pour soutenir les entreprises qui prennent des risques. Je proposerai, dans le cadre du futur budget européen, d’aller plus loin et d’allouer davantage d’argent à ce volet.
Pour ce qui est des entreprises et des fournisseurs fabriquant des pièces électroniques pour l’automobile, une chose est sûre : ils sont les premiers touchés par le passage au tout électrique, parce qu’un moteur électrique compte beaucoup moins de pièces qu’un moteur thermique. Certains sous-traitants que j’ai rencontrés récemment à Stuttgart rencontrent le même problème, d’autant que les constructeurs allemands produisaient massivement des moteurs thermiques destinés à l’export vers les marchés chinois et américain.
Nous devons trouver des solutions, par exemple en réorientant certaines de ces entreprises vers le secteur de la défense, dont certains projets continueront de recourir à des moteurs thermiques – sachant que de très importants contrats européens sont en train de se nouer avec les industries de la défense. Il nous faudra trouver de nouveaux marchés, comme de nombreux fabricants ont su le faire lors de l’essor de la batterie électrique. Il y a là de vraies transformations à opérer, que nous devons accompagner pour qu’elles se fassent au bon rythme et sans casse sociale. Il revient toutefois à chaque État membre de prendre des dispositions pour permettre ces transformations, notamment en assurant les formations nécessaires – la Commission consacre aussi un certain nombre de fonds et de budgets à cette thématique.
M. Frédéric Weber (RN). Vous avez annoncé des mesures de soutien à l’acier. Les capacités de production européennes d’acier liquide ont fortement diminué ces dernières années. On pourrait évoquer le fiasco de Liberty Steel, qui avait racheté une partie des sites d’ArcelorMittal avec l’assentiment de la Commission européenne ; les suppressions de postes autour de Liège ; la reprise de la société Ilva, un temps sous gestion d’ArcelorMittal, par l’État italien, qui veut conserver des capacités stratégiques dans le secteur ; ou encore la Pologne et l’est de l’Europe, où la capacité de production d’acier liquide baisse depuis bien longtemps.
En France, il ne reste désormais plus que les sites de Dunkerque et de Fos-sur-Mer, où les hauts fourneaux encore en activité sont vieux et nécessiteront des travaux importants. ArcelorMittal a présenté un projet de transition vers des fours électriques ou à injection d’hydrogène. Rappelons que les fours électriques étaient reçus comme le chant des sirènes il y a quelques dizaines d’années – tout le monde pensait qu’ils permettraient, en réutilisant la ferraille, de sauver la production – mais que cette technologie n’était pas viable économiquement et s’est révélée un fiasco. Elle a donc été abandonnée, sauf pour quelques marchés de niche. Les fours électriques ne permettent en outre pas de produire certaines qualités d’acier, utilisées notamment dans l’automobile, alors que les hauts fourneaux classiques suivent des processus maintenant bien maîtrisés depuis plus d’un siècle.
Êtes-vous certain qu’ArcelorMittal respectera ses engagements d’investissement dans les sites de Dunkerque et de Fos-sur-Mer, ou pourrions-nous avoir la mauvaise surprise de les voir disparaître dans quelques années ? Ou alors, en bons Européens, devrions-nous accepter que la France perde son autonomie dès lors que l’Europe peut se fournir en acier en fusion à Gand ou à Brême ?
Pensez-vous vraiment qu’un retour aux fours électriques garantira les volumes nécessaires aux besoins stratégiques de l’Europe et, plus spécifiquement, de la France ? Les produits finis qui en sortiront seront-ils aussi bons que ceux que nous sommes capables de fabriquer actuellement ? Nous visons l’excellence, il serait dommage de revenir à l’acier pierrafeu. Enfin, au moment où la société ArcelorMittal annonce des suppressions de postes et dit attendre votre plan d’action, croyez-vous que le MACF, sera à la hauteur des espérances des industriels européens ? Les fédérations syndicales et professionnelles européennes IndustriALL Global Union et Eurofer se satisfont-ils de vos propositions ?
M. Thierry Tesson (RN). En tant que député de Douai, je me trouvais ce matin à la gigafactory AESC, qui recevait la visite du chef de l’État. Ce dernier a regretté ce qu’il a appelé un retour en arrière, faisant référence au projet de loi de simplification de la vie économique en cours d’examen par l’Assemblée, qui prévoit un affaiblissement partiel de l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) ainsi que la suppression des zones à faibles émissions (ZFE).
Pardon de poser une question si générale, mais tous les efforts de simplification que vous faites à l’échelle européenne avec les projets de réformes omnibus, que je salue par ailleurs, ne portent-ils pas pareillement en eux une contradiction fondamentale ? Au-delà, ne sommes-nous pas tout simplement allés un peu trop loin ?
M. Stéphane Séjourné. L’acier est un sujet sérieux, qui nous a beaucoup occupés. Comme pour l’automobile, ma responsabilité est de garantir un environnement réglementaire et des clauses de sauvegarde favorables au secteur, conformément aux demandes des chefs d’État et de gouvernement européens, qui souhaitent garder leur outil industriel. La mission de la Commission est claire : faire en sorte qu’au moins 80 % de la demande européenne soit couverte par la production européenne, étant entendu que nous continuons aussi à exporter certains produits très ciblés.
Pour ce faire, les États membres nous ont demandé de simplifier le MACF et d’offrir des garanties, notamment en luttant contre le contournement et en nous assurant que le mécanisme couvre bien les produits du segment aval. Nous faisons actuellement tourner le modèle à blanc nous assurer que ceux de nos industriels qui veulent continuer à exporter de l’acier ne s’en trouvent pas handicapés.
Nous essayons également de concilier les besoins des industriels avec l’objectif macroéconomique de décarbonation du secteur. Les achats d’hydrocarbures représentent 420 milliards d’euros à l’échelle européenne. En réduisant notre dépendance, qui grève nos balances commerciales, nous dégagerions autant de marge de manœuvre pour investir dans la décarbonation et gagner en compétitivité.
Toutes les propositions figurent noir sur plan dans le « Plan d’action de la Commission visant à garantir une industrie sidérurgique et métallurgique compétitive et décarbonée », publié le 19 mars 2025. Je me suis engagé personnellement, aussi bien devant vos collègues européens qu’auprès d’ArcelorMittal, à adopter une clause de sauvegarde renforcée en temps et en heure. Mon collègue Maroš Šefčovič et moi-même avons réduit de 15 % les entrées d’acier en Europe, au 1er avril de cette année. Dans un souci de transparence, je me suis également engagé à déposer une proposition législative devant le Parlement européen avant l’été.
S’agissant du MACF, j’ai déjà indiqué que nous nous étions engagés à répondre aux attentes des industriels.
Enfin, nous avons mis plus de 100 milliards d’euros sur la table, à travers divers dispositifs, pour accompagner la décarbonation de l’industrie. Une chose est sûre : la notion de neutralité technologique doit être appréciée en fonction de la qualité de l’acier produit. Le groupe de travail ou la task force de suivi des exportations qui vient d’être créée nous permettra d’avoir connaissance de toutes les exportations de ferraille au niveau européen et d’en interdire une partie lorsque ce sera nécessaire pour garder nos matières premières et faire fonctionner nos fours. L’objectif de décarbonation doit être atteint, par l’électrification ou par d’autres méthodes. Nous accompagnerons toutes les technologies qui permettront d’aller en ce sens.
J’attends désormais des investissements et des prises de position assez fortes dans les prochaines semaines, car je considère que nous avons été à la hauteur de ce qu’on nous a demandé : le cadre réglementaire est protecteur, le marché est fermé aux surcapacités des producteurs étrangers et les industriels bénéficient d’un accompagnement financier pour atteindre leurs objectifs de décarbonation. Il revient maintenant aux pouvoirs publics nationaux et locaux de créer le dialogue qui débouchera sur des implantations en Europe. Partout – en Espagne, en Belgique, en Roumanie, en Pologne –, on me parle d’investissements qui ne sont pas réalisés et on me fait part d’attentes fortes. Malheureusement, nous sommes handicapés par les discussions commerciales en cours avec les Américains : tant qu’elles se poursuivront, c’est-à-dire jusqu’à la fin du mois de juillet, il sera très compliqué d’offrir une perspective dégagée aux différentes parties.
Je serai en tout cas très engagé pour que les investissements interviennent le plus rapidement possible. L’acier étant selon moi un marché partiellement domestique, nous devons pouvoir le protéger des surcapacités de producteurs étrangers sursubventionnés. Sur ce point, la Commission européenne sera au rendez-vous.
M. Jordan Guitton (RN). Dans mon département de l’Aube, l’industrie textile est en crise depuis des décennies. En quarante ans, elle a perdu 68 % de ses emplois de fabrication et le nombre de salariés a chuté de 11 000 à 3 500. La fermeture des usines met en péril un patrimoine industriel et historique très important qui générait de nombreux emplois directs et indirects à Troyes, dans la bonneterie et dans le textile. Dernier échec en date : Le Coq sportif, passé en liquidation judiciaire après avoir été l’équipementier officiel des Jeux olympiques.
Les professionnels de la filière mettent en avant le problème des coûts énergétiques. Allez-vous enfin réformer le marché européen de l’électricité, en investissant massivement dans le nucléaire ? Qu’avez-vous fait au niveau européen pour défendre le domaine d’excellence aubois qu’est le textile, comme il en existe tant d’autres dans les territoires ruraux ? Allez-vous mettre fin au dumping social et appliquer enfin le protectionnisme intelligent tant attendu par la filière ? Étant donné l’importance du coût des matériaux et celle des marchés, la perte de l’industrie textile auboise sera irréversible, pour le territoire comme pour la France.
M. Stéphane Séjourné. Le renforcement du marché intérieur va de pair avec le contrôle aux frontières. Le secteur du textile est massivement touché par les petits colis qui arrivent de Chine : si nous ne faisons rien, nous verrons arriver l’année prochaine 6 milliards de colis de moins de 150 euros, dont la plupart contiennent du textile et des produits qui ne respectent pas les normes européennes. Nous avons donc l’obligation d’avancer rapidement sur la réforme des douanes au niveau européen.
Pour ce faire, nous avons formulé des propositions qui sont actuellement en discussion au Conseil, entre les ministres des 27 États membres. Elles consistent à supprimer l’exemption de droits de douane en dessous de 150 euros, à créer un fichier commun des douanes et à coordonner les douanes européennes afin d’assurer un contrôle équivalent dans chaque port et chaque aéroport, pour éviter le dumping entre les sites d’arrivée. Dimanche dernier, dans la presse française, j’ai donné une illustration très claire de ce dernier point en comparant deux ports européens : l’un rejette un produit sur 2 000 tandis que le second rejette un produit sur 2 millions.
S’agissant de l’énergie, le choix du mix énergétique, enjeu de souveraineté, est une compétence nationale des États membres. Toutefois, la Commission européenne est responsable dans des matières telles que la coordination, les infrastructures transfrontalières ou la vente d’électricité dont le produit permet d’entretenir et de moderniser le réseau – nous avons besoin d’interconnexions, pour les pays acheteurs comme pour les vendeurs.
Le prix de l’électricité européenne n’est pas encore acceptable. Pour le faire baisser, nous avons instauré plusieurs dispositifs de court et de moyen terme, dont j’ai déjà parlé.
La première urgence pour les entreprises est de pouvoir disposer de contrats de vente directe d’électricité ou power purchase agreement (PPA) qu’elles peuvent passer directement avec un fournisseur d’énergie, hors du marché de l’électricité, où les prix sont volatils. Pour la première fois, à notre demande, la Banque européenne d’investissement va apporter une garantie publique à ces contrats privés. Cela permettra de sortir d’un environnement très volatil en garantissant le prix de l’électricité, sa stabilité et la pente négociée dans les PPA.
Il y a également un important travail de mise à jour de la législation européenne à mener pour y remplacer le mot « green », autrement dit vert, par « clean », c’est-à-dire propre car bas carbone. Cette dernière appellation inclut le nucléaire, afin de maintenir un mix énergique garantissant des prix plus abordables et moins volatils pour les entreprises et un bon entretien des réseaux nationaux et européen. Nous avons commencé par les actes délégués sur la production d’hydrogène, laquelle pourra désormais être assurée par l’énergie nucléaire. Cette victoire était attendue depuis de nombreuses années ; elle est aujourd’hui une réalité, et c’est une belle réalisation des cent cinquante premiers jours de la Commission.
M. le président Charles Rodwell. Du green au clean, c’est un beau mot de la fin. Avez-vous quelque chose à ajouter avant de conclure cette audition ?
M. Stéphane Séjourné. La France n’est pas toute seule à travailler à la réindustrialisation : c’est un sujet européen. J’ai tenté de vous convaincre que les réponses formulées au niveau européen étaient aussi dans l’intérêt de la France. Travailler à la réindustrialisation européenne, c’est travailler à la réindustrialisation française.
M. le président Charles Rodwell. Nous vous remercions à nouveau pour votre participation aux travaux de la commission d’enquête, d’autant plus précieuse qu’elle n’était pas obligatoire et que vous avez apporté des réponses intéressantes et détaillées à nos questions.
Vous pourrez compléter nos échanges en nous retournant le questionnaire qui vous a été envoyé il y a quelques jours et en y joignant tous les documents que vous jugerez utiles à la commission d’enquête.
La séance s’achève à dix-neuf heures quarante.
Présents. – M. Pierre Cordier, M. Alexandre Loubet, M. Éric Michoux, M. Charles Rodwell, M. Thierry Tesson, M. Lionel Vuibert
Assistait également à la réunion. – M. Jordan Guitton