N° 593
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 novembre 2024.
PROPOSITION DE LOI
visant à réprimer pénalement les pratiques de surenchère d’intéressement dans les offres de reprise d’entreprises,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Olivier MARLEIX, M. Thibault BAZIN, Mme Émilie BONNIVARD, M. Ian BOUCARD, M. Fabrice BRUN, M. Fabien DI FILIPPO, M. Julien DIVE, M. Michel HERBILLON, Mme Véronique LOUWAGIE, Mme Frédérique MEUNIER, Mme Josiane CORNELOUP, Mme Christelle PETEX, M. Eric LIÉGEON, Mme Valérie BAZIN-MALGRAS, M. Vincent DESCOEUR, M. Vincent JEANBRUN, M. Jean-Luc BOURGEAUX,
députés et députées.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L’intéressement des salariés d’une entreprise, et notamment de ses cadres, est un critère clé de la réussite de l’entreprise. De nombreux outils ont été mis en place dans notre droit pour favoriser ces mécanismes. Intéressement, participation, bonus, plans de stocks options, bons de souscription de parts créateur d’entreprise, distribution d’actions ordinaires, actions de préférence, bons de souscription d’actions …etc.
Le « management package » est un outil d’intéressement qui permet à un investisseur financier de d’associer durablement de l’engagement des cadres dirigeants d’une entreprise rachetée en les associant au capital de l’entreprise dans le cadre d’un leveraged buy-out (LBO). Il a la particularité d’être offert à un salarié par un futur repreneur et non par son actionnaire.
Cet outil est évidemment très pertinent notamment en cas de reprise d’une entreprise ‑ notamment d’une petite et moyenne entreprise (PME) ou d’une entreprise de taille intermédiaire (ETI) ‑ où le repreneur a besoin de s’assurer qu’il pourra compter sur les compétences d’acteurs clés de l’entreprise.
Dans le cas de très grandes entreprises, les montants offerts au travers de « management packages » paraissent déraisonnables dans la mesure où ils peuvent atteindre plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’euros. Même s’ils conservent formellement le même objet d’association d’un dirigeant au capital, les sommes en jeu sont davantage proportionnées au montant de l’acquisition réalisée qu’au travail ou à la valeur professionnelle des salariés bénéficiaires. Elles sont souvent sans communes mesure avec les salaires de ces dirigeants et apparaissent alors parmi les frais de l’opération.
Dans l’hypothèse ou une entreprise est confrontée à plusieurs offres, la surenchère de conditions offertes par les candidats à la reprise via un « management package » peut avoir pour effet d’orienter les dirigeants salariés de l’entreprise vers un choix qui tient davantage compte de leur intérêt personnel et de le détourner de celui de leur entreprise et de ses actionnaires.
Ainsi, on a vu récemment un actionnaire minoritaire d’Atos porter plainte au pénal pour corruption contre les offres faites par un repreneur déclaré à des cadres dirigeants de l’entreprise, alors qu’il considérait que le projet de reprise était contraire à l’intérêt de la société.
La présente proposition de loi vise donc à encadrer cette pratique en en réprimant pénalement l’usage lorsque plusieurs offres de reprises sont en discussion pour une entreprise.
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proposition de loi
Article 1er
Après l’article 445‑1‑1 du code pénal, il est inséré un article 445‑1‑2 ainsi rédigé :
« Art. 445‑1‑2. – Est puni de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 1 000 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction, le fait, par quiconque, de proposer, à tout moment, directement ou indirectement, au salarié d’une entreprise exerçant des fonctions de direction, des offres, des promesses, des dons ou des avantages quelconques, lors d’une opération de rachat d’entreprise faisant entrer en concurrence plusieurs repreneurs, lorsque cette promesse a pour objectif d’influer sur le processus de décision de l’entreprise. »
Article 2
La section 1 du chapitre V du titre IV du livre IV du code pénal est complétée par un article 445‑2‑2 ainsi rédigé :
« Art. 445‑2‑2. – Est puni de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 1 000 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction, le fait, par le salarié d’une entreprise exerçant des fonctions de direction, de solliciter ou d’agréer de quiconque, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des présents, des dons ou des avantages quelconques, pour lui‑même ou pour autrui pour influer sur les décisions de l’entreprise lors d’une opération de rachat d’entreprise faisant entrer en concurrence plusieurs repreneurs déclarés. »