N° 1328

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 avril 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à lever des contraintes pour améliorer la recherche scientifique en France,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Michel LAUZZANA,

député.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France dispose d’un potentiel scientifique de premier plan, porté par des institutions de recherche reconnues mondialement, un tissu hospitalo‑universitaire performant, et un fort engagement de ses chercheurs et cliniciens. Pourtant, dans un contexte international marqué par une concurrence accrue entre les grandes puissances scientifiques, notre pays voit progressivement son attractivité en matière de recherche clinique et d’innovation biomédicale s’éroder.

En 2022, la France représentait seulement 11 % des nouveaux essais cliniques lancés à l’échelle mondiale, se plaçant derrière l’Espagne (14 %) et l’Allemagne (13 %), alors qu’elle bénéficiait historiquement d’une position de leadership européen dans le domaine. Ces chiffres sont susceptibles d’affaiblir notre souveraineté sanitaire, notre influence scientifique, ainsi que la capacité de nos citoyens à bénéficier rapidement des innovations médicales issues de la recherche.

Face à ce constat, il est nécessaire de réinterroger certains freins administratifs et juridiques qui limitent aujourd’hui la souplesse, la réactivité et la compétitivité de notre système de recherche. Cette proposition de loi, structurée autour de quatre articles, vise ainsi à renforcer l’attractivité scientifique de la France en apportant des ajustements ciblés et proportionnés, sans jamais remettre en cause les principes d’éthique, de sécurité et de transparence qui fondent la légitimité de notre cadre de recherche.

L’article 1er a pour objet d’assouplir certaines règles encadrant la commande publique en matière de recherche. Aujourd’hui, de nombreuses collaborations entre laboratoires publics et partenaires privés se heurtent à des exigences incompatibles avec la nature même des travaux de recherche, notamment en matière de propriété intellectuelle ou de conditions de financement. Ces obstacles sont de nature à dissuader des partenariats pourtant stratégiques, ou à ralentir des projets à forte valeur ajoutée scientifique et économique.

Il est donc proposé de faciliter la contractualisation dans le cadre de marchés publics de recherche, en permettant de déroger à certaines conditions standard dès lors que cela est justifié par les spécificités de la recherche expérimentale. Cette évolution s’inscrit dans la continuité des objectifs de la loi de programmation de la recherche pour 2021‑2030, qui entendait déjà assouplir certains cadres juridiques pour favoriser l’agilité des opérateurs publics de recherche.

L’article 2 traite d’un autre frein bien identifié : la lourdeur du recueil du consentement parental dans le cadre des recherches menées chez les mineurs. Le droit actuel impose le recueil du consentement des deux titulaires de l’autorité parentale, y compris pour des recherches sans risque ni contrainte pour l’enfant, comme de simples observations non invasives ou des questionnaires anonymes. Dans la pratique, cette exigence ralentit considérablement les projets, notamment en pédiatrie, où les protocoles nécessitent une inclusion rapide.

La mesure proposée vise à autoriser le recueil du consentement d’un seul des deux parents pour les recherches présentant un risque et une contrainte négligeables, tout en instaurant une obligation d’information immédiate du second parent. Elle permet de respecter le cadre éthique protecteur du mineur, tout en allégeant une procédure aujourd’hui disproportionnée au regard du bénéfice attendu des recherches concernées.

L’article 3 poursuit cette logique d’ajustement raisonné en simplifiant le régime du consentement applicable au prélèvement de certains produits biologiques d’origine humaine. Actuellement, toute collecte à visée non thérapeutique est soumise à un consentement écrit formel, quel que soit le produit ou la méthode de prélèvement. Ce cadre, pertinent pour des échantillons sanguins ou des biopsies, devient en revanche excessif lorsqu’il s’agit de prélever de la sueur, des larmes, des cheveux, des ongles ou des selles, dans des conditions non invasives et sans conséquences sanitaires.

Il est donc proposé d’instaurer un consentement simplifié, pouvant être recueilli sous forme électronique, pour ces types de prélèvements. Cette mesure permettra de faciliter la constitution de biobanques, d’accélérer des études en microbiologie, en épidémiologie ou en nutrition, tout en maintenant un haut niveau de respect du droit des personnes.

L’article 4, enfin, propose la suppression d’un article obsolète du code de la santé publique (l’article L. 52134), qui impose un dépôt préalable à l’ANSM pour certains dispositifs médicaux à usage unique. Cette disposition, mise en place dans un contexte réglementaire antérieur, ne correspond plus aux pratiques actuelles de recherche ni au droit européen harmonisé. Elle constitue aujourd’hui un frein administratif inutile, y compris pour des dispositifs expérimentaux sans risque pour la santé publique. Sa suppression vise à moderniser notre droit et à réduire les délais dans le développement de nouveaux outils médicaux ou technologiques.

 


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proposition de loi

Article 1er

Le 2° de l’article L. 2512‑5 du code de la commande publique est complété́ par les mots : « ainsi que les prestations annexes qui contribuent directement à la réalisation de ces services, qu’il s’agisse de services, de travaux, ou de fournitures, sans que les conditions relatives à l’absence de propriété́ exclusive des résultats ou au financement ne s’appliquent à ces prestations annexes ».

Article 2

L’article L. 1121‑7 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

 « Pour les recherches impliquant la personne humaine présentant un risque et une contrainte négligeables et ne modifiant pas la prise en charge habituelle du mineur, le consentement d’un seul titulaire de l’autorité parentale peut être recueilli, après information claire, loyale et compréhensible et dans des conditions définies par décret. Le second titulaire est informé sans délai. »

Article 3

Le chapitre unique du titre Ier du livre II de la première partie du code de la santé publique est complété par un article L. 1211‑9‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 121191. – Par dérogation aux dispositions des articles L. 1241‑1 à L. 1245‑7, le prélèvement, la conservation, le traitement et l’utilisation de produits biologiques humains ne présentant pas de caractère vital ou de risque sanitaire pour le donneur peuvent faire l’objet d’un consentement simplifié, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« Cette simplification s’applique uniquement aux usages non thérapeutiques directs, notamment pour la recherche ou la constitution de collections biologiques.

« Le consentement est recueilli par écrit ou par voie électronique, après information claire, loyale et compréhensible.

« Sont notamment concernés : les selles (hors usage thérapeutique), la salive, la sueur, les larmes, les cheveux et les ongles.

« Toute utilisation à visée thérapeutique, en particulier les réimplantations chez un receveur, reste soumise au régime prévu par les articles L. 1241‑1 à L. 1245‑7. »

Article 4

L’article L. 5213‑4 du code de la santé publique est abrogé.