N° 475
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 octobre 2024.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi visant à restaurer un système de retraite plus juste en annulant les dernières réformes portant sur l’âge de départ et le nombre d’annuités,
Par M. Thomas Ménagé,
Député.
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Voir le numéro : 284.
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SOMMAIRE
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I. La réforme des retraites de 2023 est aussi inefficace sur le plan économique que budgétaire
A. Non nécessaire, cette réforme ne répondait à aucune urgence
B. La réforme est inefficace face aux enjeux de soutenabilité de notre système de retraite
C. Cette réforme paramétrique néglige la situation d’ensemble des finances publiques
A. Les femmes, les plus modestes et les carrières hachées sont négativement affectés par la rÉforme
III. D’autres réformes ambitieuses et réellement efficaces mériteraient pourtant d’être conduites
A. Face à une natalité en chute libre, soutenir les familles
B. Réhausser le taux d’emploi, en particulier des plus jeunes, des plus âgés et des moins qualifiés
C. Accroître la productivité en favorisant l’innovation et la réindustrialisation
D. Diversifier les ressources, réduire les dépenses
Article 1er Abrogation du report de l’âge légal de départ à la retraite et autres mesures d’âge
Article 2 sexies (nouveau) Remise d’un rapport au Parlement sur la réforme des retraites de 2023
ANNEXE N° 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNéES PAR Le RAPPORTEUR
ANNEXE N° 2 : LISTE DES CONTRIBUTIONS écrites reçues PAR Le RAPPORTEUR
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Un an après la réforme des retraites conduite en 2023 ([1]), le constat est clair : d’une violence démocratique inégalée sous la Cinquième République, les choix imposés s’avèrent d’une faible efficacité économique et budgétaire ; ils sont injustes pour les Français ; ils font l’impasse sur les leviers structurels qu’il faudrait employer.
Au vu de ce constat, il apparaît aujourd’hui nécessaire de réparer et préparer :
– réparer, d’abord, les injustices et les erreurs économiques et budgétaires commises, en abrogeant les pires dispositions adoptées en 2023 et à l’occasion d’autres réformes des retraites antérieures ;
– préparer, ensuite, un système des retraites plus efficace et plus juste, en modifiant plus largement la loi applicable, au-delà de la réforme de 2023, pour disposer d’une assurance vieillesse prête à de futures réformes que le rapporteur appelle de ses vœux.
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I. La réforme des retraites de 2023 est aussi inefficace sur le plan économique que budgétaire
A. Non nécessaire, cette réforme ne répondait à aucune urgence
La réforme des retraites de 2023, présentée comme une nécessité absolue par le Gouvernement qui l’affichait comme indispensable pour « sauver » un système qui aurait été au bord de la faillite, ne répondait à aucun impératif d’urgence. Le choix du recours aux articles 47-1, 44 alinéa 3 et 49 alinéa 3 de la Constitution a par ailleurs fortement contraint l’examen du texte.
En effet, en 2023, l’ancien président du Conseil d’orientation des retraites (COR), M. Pierre-Louis Bras, déclarait devant les commissions des affaires sociales et des finances de l’Assemblée nationale qu’« il n’y (avait) pas de dérive » et que « les dépenses de retraites ne dérap(aient) pas » ([2]). Sans la réforme, le COR prévoyait déjà à l’horizon 2030 une stabilisation voire une diminution du poids des dépenses de retraites dans le produit intérieur brut (PIB) dans la majorité des scénarios exposés ([3]).
De plus, comme le soulignait l’économiste Henri Sterdyniak le 4 janvier 2023 : « Le système français de retraite est actuellement satisfaisant. Les retraités bénéficient d’un niveau de vie équivalent à celui des personnes en activité. Le taux de pauvreté des personnes âgées est nettement plus faible que celui de l’ensemble de la population. Le taux de remplacement du salaire par la retraite est plus élevé pour les bas que pour les hauts salaires. » ([4])
Il n’y avait donc, contrairement à ce que prétendait le Gouvernement en 2023, aucune urgence à reculer l’âge d’ouverture des droits pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
Le rôle des cotisations sociales dans le financement du système de retraite en 2023
Dans le cadre d’un système de retraite par répartition, les pensions versées aux retraités sont financées par des cotisations prélevées sur les actifs. En France, les cotisations représentent 66,5 % du financement du système de retraite en 2023 soit 256,8 milliards d’euros ([5]). Les taux et assiettes de cotisation diffèrent en fonction du régime de l’assuré.
Cependant, le taux de cotisation retraite en France dans les régimes obligatoires compte parmi les plus élevés de l’OCDE à hauteur de 27,8 % contre 18,2 % en moyenne en 2022 ([6]).
TAUX EFFECTIFS DE COTISATIONS AUX RÉGIMES DE RETRAITE OBLIGATOIRES
SUR LE SALAIRE MOYEN DANS L’OCDE
Note : En Italie, en Allemagne, au Danemark, au Luxembourg et en Lituanie, les cotisations aux régimes de retraite obligatoires financent également les prestations d’invalidité.
Source : Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale à partir de OCDE, Panorama des pensions 2023, p. 209.
Comme le souligne le haut-commissariat au plan dans une note de décembre 2022, « les taux de cotisation français de droit commun portent déjà notre niveau de prélèvement sur les rémunérations des actifs au maximum européen aujourd’hui constaté » ([7]). Le relèvement du taux de cotisation ne semble donc pas constituer un levier pertinent pour assurer l’équilibre du système de retraite sous peine de pénaliser les actifs.
Cependant, les pays avec des taux de cotisation plus élevés comme la France tendent à verser de pensions de retraite supérieures à la moyenne de l’OCDE. Le niveau élevé de cotisations sociales en France constitue donc un compromis visant à favoriser un montant moyen des pensions plus élevé. De même, pour le rapporteur, il justifie un âge d’ouverture des droits à la retraite inférieur à la moyenne de l’OCDE.
B. La réforme est inefficace face aux enjeux de soutenabilité de notre système de retraite
Selon le COR, après trois années excédentaires, le solde du système de retraite devrait être de nouveau déficitaire dès 2024 à – 0,2 % du PIB ([8]). Malgré la réforme des retraites, il resterait déficitaire sur l’ensemble de la période de projection pour atteindre – 0,8 % du PIB en 2070 ([9]).
Solde du système de reTraite observé et projeté
dans le scénario de référence (convention EPR)
Note : La convention « EPR » (équilibre permanent des régimes) ajuste en projection le niveau de compensation de l’État en fonction des évolutions propres de ces régimes. Ainsi, une diminution du déficit d’un régime compensé aurait naturellement tendance à faire baisser la compensation de l’État, à droit constant.
Source : COR, rapport annuel 2024, p. 88.
Par ailleurs, la Cour des comptes a récemment estimé que la réforme des retraites de 2023 devrait se traduire par un surcoût en 2024, puis par un gain net cumulé de seulement 1 milliard d’euros en 2025 ([10]). De fait, en 2024, les prestations de retraite augmenteraient fortement de 6,8 % selon le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale. À long terme, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) estime que la réforme des retraites de 2023 augmenterait les dépenses de retraite de 0,2 point de PIB en 2070 ([11]).
En effet, le relèvement de l’âge légal de départ en retraite à taux plein peut provoquer une hausse des dépenses de retraite. D’une part, l’effet en baisse des dépenses est d’autant plus limité que l’écart entre l’âge moyen conjoncturel de départ et l’âge d’ouverture des droits est faible ([12]). Or, en 2021, cet âge moyen conjoncturel de départ s’élevait en moyenne à 62 ans et 7 mois, les femmes partant en moyenne à 63 ans ([13]). D’autre part, le relèvement de l’âge d’ouverture des droits et de la durée d’assurance requise entraîne un allongement des carrières et une progression du montant moyen des pensions suscitant une hausse des dépenses de retraite ([14]).
La réforme des retraites de 2023 n’est donc parvenue qu’à stabiliser la part des dépenses de retraites dans le PIB. Et encore est-ce au prix d’une baisse du niveau de vie relatif des retraités puisque la hausse des pensions, indexées sur l’indice des prix à la consommation hors tabac ([15]), devrait être moins dynamique que celle des salaires des actifs cotisants ([16]). Ce phénomène se conjugue à l’impossibilité pour un certain nombre d’assurés d’atteindre un âge légal de départ en hausse en ayant validé l’ensemble de la période d’assurance requise, entraînant une décote des pensions.
C. Cette réforme paramétrique néglige la situation d’ensemble des finances publiques
Comme l’ont souligné les auditions menées par le rapporteur, la réforme des retraites de 2023 doit être évaluée à l’aune de la situation globale des finances publiques. Si le solde du système de retraite était à l’équilibre en 2022 et 2023, le déficit public s’est aggravé passant de 4,8 % du PIB en 2022 à 5,5 % du PIB en 2023 ([17]). Cette dérive des comptes publics est confirmée par le niveau du déficit public en 2024 estimé à 6,1 % dans le projet de loi de finances pour 2025. L’urgence réside donc avant tout dans le redressement des comptes publics dans leur ensemble plutôt que dans celui du seul système de retraite.
Le rapporteur souligne que les seuls réels bénéfices attendus de la réforme sont en matière de déficit public dans son ensemble. En augmentant le nombre de personnes au travail, la réforme augmenterait le PIB de 1,5 % et, par conséquent, les recettes tirées par l’État des prélèvements obligatoires, ce que le Gouvernement n’a, opportunément ou non, jamais expliqué aux Français en concentrant son raisonnement sur le seul solde du système de retraite. La véritable raison d’être de la réforme de 2023 était pourtant la situation globale des finances publiques, et notamment les recettes fiscales pouvant en être tirées, ce qui a été souligné par plusieurs personnes auditionnées.
L’équilibre financier du système de retraite repose sur l’analyse de son solde qui est de nature conventionnelle. Or, dès lors que près de quarante‑deux régimes coexistent, il est nécessaire d’apprécier l’équilibre financier de chacun plutôt qu’à partir d’un agrégat qui ne donne qu’une vision parcellaire ([18]). À ce titre, la situation financière est très différente selon les régimes. Si le régime complémentaire des salariés du privé est excédentaire, et le resterait à long terme selon les projections du COR du fait des réserves de l’Agirc-Arrco, d’autres comme le régime spécial des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, géré par la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), sont structurellement déficitaires pour des raisons essentiellement démographiques ([19]).
Une analyse sincère de la soutenabilité du système de retraite ne peut donc faire l’économie d’une analyse détaillée par régime et d’une analyse globale de la situation d’ensemble des finances publiques. En effet, le financement du système ne repose pas entièrement sur les seules cotisations des actifs mais, pour près de 14 % des ressources collectées, d’impôts et de taxes affectés (Itaf) ([20]).
II. Injuste, cette réforme pénalise les plus précaires tout en entraînant de nombreux effets d’éviction
A. Les femmes, les plus modestes et les carrières hachées sont négativement affectés par la rÉforme
Selon le COR, la réforme des retraites de 2023 abaissera de 27,2 à 26,8 ans la durée de vie à la retraite pour la génération 2000, tandis que l’âge moyen de départ des femmes de la génération 1972 devrait augmenter de 9 mois contre 5 mois pour les hommes.
La réforme des retraites de 2023 pénalise en particulier :
– les personnes qui avaient atteint la durée d’assurance requise de 62 ans et qui doivent désormais continuer une activité jusqu’à 64 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein ([21]) ;
– les femmes, qui partent en retraite plus tard que les hommes en moyenne, et sur lesquelles l’effet de report du départ en retraite sera plus élevé ([22]) ;
– les travailleurs les plus modestes, alors que les cadres ont une espérance de vie à 55 ans supérieure de 3,3 années à celle des ouvriers en raison d’une moindre exposition aux risques professionnels ([23]).
Ainsi, comme le rappellent les économistes Simon Rabaté et Julie Rochut, « l’augmentation de l’âge légal de départ en retraite est très efficace pour les personnes qui ont déjà un emploi, mais pas pour celles qui sont déjà retirées de la population active » ([24]).
Le choix d’agir sur le critère de l’âge de départ en retraite pour bénéficier d’un taux plein ne permet pas non plus de cibler les travailleurs exposés à des facteurs de pénibilité. À ce titre, le rapporteur regrette qu’en 2017, le Gouvernement ait supprimé quatre critères d’éligibilité au compte professionnel de prévention (C2P), à savoir la manutention manuelle de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et l’exposition aux risques chimiques sans y avoir substitué de nouveau dispositif susceptible de prendre en compte ces situations. En outre, s’agissant de la retraite anticipée pour carrière longue, il semble peu aisé pour les travailleurs de réunir l’ensemble des conditions requises, notamment la durée d’assurance minimale pour bénéficier du taux plein.
B. Des effets d’éviction ont des conséquences négatives sur les autres branches de la sécurité sociale
Les effets de la réforme des retraites de 2023 doivent être pris en compte ici encore à l’échelle de l’ensemble des comptes des administrations publiques et non du seul solde du système de retraite. À ce titre, le report de l’âge légal de départ entraîne des effets d’éviction et des reports de dépenses vers d’autres branches de la sécurité sociale à travers l’augmentation des dépenses d’invalidité, de maladie et de chômage.
Plusieurs études ont ainsi montré que le relèvement de l’âge légal de départ en 2010 a pu provoquer une hausse du nombre de séniors ni en emploi ni en retraite (NER) ([25]). Si le relèvement de l’âge de départ a suscité une baisse de 13 points du nombre de personnes âgées de 60 à 64 ans en retraite entre 2014 et 2022, il a également entraîné une hausse de 3,5 points du nombre de celles qui ne sont ni en emploi ni en retraite ([26]). Or en 2023, seuls 43 % des 55 à 69 ans sont en emploi et 14 % des assurés âgés de 55 à 69 ans ne sont déjà ni en emploi ni en retraite, une situation majoritairement subie, faute de réussite dans leur recherche d’emploi mais aussi pour des raisons de santé ou de handicap ([27]). La réforme de 2023 risque donc d’aggraver la précarité à travers l’augmentation du nombre de séniors inactifs ou au chômage ainsi que du fait de l’allongement de la période d’inactivité des NER ([28]). Cette situation pourrait particulièrement concerner les ouvriers qui sont, à l’âge de 61 ans, à 35 % ni en emploi ni en retraite et seulement à 28 % en emploi ([29]).
Par ailleurs, les précédentes réformes paramétriques du système de retraite ont entraîné une hausse des dépenses sociales car les plus âgés qui ne peuvent poursuivre leur activité, pour des raisons d’inaptitude ou d’usure professionnelle, deviennent prestataires d’allocations sociales. Ainsi, le recul de l’âge de départ à 62 ans en 2010 aurait entraîné, en 2017, une hausse des dépenses sociales de 3 milliards d’euros selon la Cour des comptes ([30]). Ces résultats coïncident avec ceux de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) qui estimait qu’un report de l’âge d’ouverture des droits de deux ans en 2019 aurait entraîné une augmentation de 3,6 milliards d’euros des prestations sociales versées, soit un effet d’éviction de 25 % ([31]). La direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) estimait, en janvier 2022, que le relèvement de l’âge d’ouverture des droits de 62 à 64 ans entraînerait 1,3 milliard d’euros de dépenses supplémentaires au titre de l’assurance chômage ([32]). Au total, plusieurs milliards d’euros de dépenses sociales devront donc, à terme, être retranchés des ressources supplémentaires apportées par la réforme.
Effet d’un relèvement de l’âge d’ouverture des droits
de Deux ans (de 62 à 64 ans) sur certaines dépenses sociales en 2019
Note : L’effet sur les rentes AT-MP se cumule année après année.
Source : DREES. « Évaluation de l’augmentation des dépenses de certaines prestations sociales induite par un relèvement de l’âge légal d’ouverture des droits à la retraite ». n° 21-43, janvier 2022, p. 4.
III. D’autres réformes ambitieuses et réellement efficaces mériteraient pourtant d’être conduites
A. Face à une natalité en chute libre, soutenir les familles
L’année 2023 entrera dans l’histoire comme celle où le nombre de naissances aura été le plus faible depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Avec 678 000 naissances, l’indicateur conjoncturel de fécondité s’établit 1,68 enfant par femme. En baisse de 2,2 % par rapport à 2022, le nombre de naissances a chuté de 20 % depuis 2010 ([33]). Pourtant, le désir d’enfant moyen est lui plus élevé. En 2024, il était évalué à 2,27 selon une étude de l’Union nationale des associations familiales ([34]). L’écart entre le nombre d’enfants par femmes effectif et le désir d’enfants peut dès lors s’expliquer, si ce n’est uniquement mais partiellement, par les atteintes répétées portées à la politique familiale qui nuisent gravement à la confiance des familles françaises.
Face à une telle baisse, un sursaut des pouvoirs publics semble nécessaire, non seulement pour préserver les intérêts fondamentaux de notre pays mais également pour sauvegarder notre système de retraite. Pour ce faire, ni le recours à une immigration incontrôlée, ni l’inaction des Gouvernements successifs depuis plusieurs années n’ont semblé à même d’inverser une tendance solidement installée. Alors que le COR fait reposer en 2024 ses projections de financement du système de retraite sur un retour à 1,8 enfant par femme, seules des mesures ambitieuses en matière de politique familiale permettraient d’atteindre un tel objectif.
Ainsi, le rapporteur préconise des mesures vigoureuses tant sur le plan fiscal, au travers de l’attribution d’une pleine part dès le deuxième enfant, que sur le plan budgétaire, au travers de prestations familiales valorisées et mieux ciblées. Il faut également veiller à l’articulation entre vie personnelle et vie professionnelle des parents. À ce titre, l’accroissement du soutien aux modes de garde au domicile ou dans des structures collectives apparaît un impératif. Au-delà de la politique familiale au sens strict, le rapporteur souligne l’importance de disposer d’une vision d’ensemble pour relancer durablement la natalité au travers de politiques publiques efficaces en matière de logement, de services publics, de sécurité, d’emploi ou bien encore de pouvoir d’achat.
B. Réhausser le taux d’emploi, en particulier des plus jeunes, des plus âgés et des moins qualifiés
Au-delà du PIB en volume, la France se singularise par un PIB par habitant inférieur aux pays voisins et comparables de l’Union européenne. Ainsi, l’écart de PIB par habitant est de 12 % avec l’Allemagne, 15 % avec le Danemark et 20 % avec les Pays-Bas ([35]). Comme l’ont souligné les auditions conduites par le rapporteur, la divergence semble principalement s’expliquer par un différentiel de taux d’emploi.
En effet, le taux d’emploi des 15‑64 ans s’établit en France à 68,1 % en 2022. Légèrement inférieur à la moyenne de l’Union européenne à 69,9 %, il est moindre de près de 10 points que le taux d’emploi allemand ou de près de 14 points que le taux d’emploi néerlandais ([36]). Plus encore, ce sont les taux d’emploi de certaines catégories de la population qui font montre de caractéristiques particulières en France :
– le taux d’emploi des plus âgés, en particulier des 60‑64 ans, dépasse légèrement les 35 %, soit deux fois moins qu’un pays comme la Norvège ([37]) ;
– le taux d’emploi des jeunes, en particulier des 15‑24 ans, s’établit sous les 35 %, lorsque le même indicateur dépasse 50 % en Allemagne et en Autriche ([38]) ;
– le taux d’emploi des personnes peu qualifiées, comme l’illustre le taux de chômage des ouvriers non qualifiés qui était près de cinq fois supérieur à celui des cadres à 15,3 % en 2022 ([39]).
Plus que le recul de l’âge légal de départ à la retraite et l’allongement de la durée de cotisation, ces singularités françaises devraient faire l’objet des principaux efforts des pouvoirs publics. L’augmentation du taux d’emploi signifierait non seulement celle des cotisations des actifs, qui paient les pensions des retraités, mais également la progression mécanique de la richesse créée et des recettes issues des prélèvements obligatoires. À titre d’exemple, le COR estime que le rattrapage par la France du taux d’emploi des Pays-Bas générerait 140 milliards d’euros supplémentaires de recettes par an pour les finances publiques, permettant de résorber les déficits prévisionnels du système de retraite.
C. Accroître la productivité en favorisant l’innovation et la réindustrialisation
Les hypothèses de croissance de la productivité retenues par le COR dans son rapport de l’année 2024 sont particulièrement basses et atteignent environ 1 %. La tendance à la baisse est singulièrement marquée depuis la crise sanitaire du covid‑19.
Décrochage de la productivité du travail en france
Source : Bulletin de la Banque de France, Comment expliquer les pertes de productivité observées en France depuis la période pré-Covid ?, mars 2024.
Si cette baisse de la productivité s’explique par des raisons en partie positives liées aux politiques de l’emploi qui ont visé la réduction du taux de chômage ([40]), la levée de certaines contraintes telles que la multiplication des normes pourraient permettre des gains en productivité. Le coût de la complexité administrative s’élèverait ainsi en France à 4 % du PIB ([41]). De même, face à la baisse de la productivité européenne, l’ancien président de la Banque centrale européenne a pointé la nécessaire simplification pour renforcer la compétitivité européenne ([42]).
Or, une fois de plus, la productivité a été la grande oubliée de la réforme des retraites conduite en 2023. Face à de tels constats, le rapporteur pointe le caractère urgent de la réindustrialisation du pays, tout comme de la mobilisation des nouvelles technologies et notamment de l’intelligence artificielle, pour augmenter durablement la productivité française.
D. Diversifier les ressources, réduire les dépenses
Outre ces trois piliers du financement du système de retraite, les auditions conduites par le rapporteur ont permis de mettre en lumière d’autres voies qu’aurait pu explorer une réforme ambitieuse et ce même si elles ne pourraient à elles seules assurer son équilibre :
– réduire le coût de gestion des régimes : les représentants des caisses auditionnés par le rapporteur ont fait état d’un coût de gestion aux alentours de 1 % des prestations servies. Si ce chiffre semble modéré, des leviers d’économie existent et représentent des améliorations du service rendu aux usagers, à l’exemple des systèmes d’information, encore trop cloisonnés entre les régimes ;
– mieux connaître et mieux employer les réserves : près de 200 milliards d’euros de réserves existent à ce jour toutes caisses confondues. Dans certains régimes, ces réserves sont amenées à croître dans les prochaines années. Placées, elles produisent certes un rendement dont bénéficient les différents régimes. Mais il est apparu au cours des auditions qu’elles pourraient faire l’objet d’un pilotage plus stratégique.
À ce titre, le rapporteur souligne que le Fonds de réserve pour les retraites a fait l’objet d’erreurs de gestion stratégiques par les Gouvernements successifs. Institué en 2001, il n’a pas été en capacité de remplir l’objectif qui lui avait été initialement assigné. Sans qu’il constitue l’unique solution aux enjeux budgétaires posés au système de retraite française, il aurait pu constituer un outil complémentaire utile.
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Article 1er
Abrogation du report de l’âge légal de départ à la retraite
et autres mesures d’âge
Rejeté par la commission
L’article 1er de la présente proposition de loi abroge les dispositions portant recul de l’âge légal de départ à la retraite introduites par la loi du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. Il modifie en conséquence diverses dispositions adoptées alors pour rétablir l’état du droit antérieur ou proposer des rédactions alternatives.
À titre principal, le présent article rétablit l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans, maintient l’âge d’annulation de la décote à 67 ans, modifie le dispositif de carrière longue et d’autres mécanismes d’ouverture anticipée des droits.
● La loi du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 a reculé l’âge effectif de départ à la retraite dans l’objectif de diminuer les dépenses de pension sous le double effet de la diminution du nombre de personnes retraitées et de la durée passée à la retraite.
calendrier du relèvement de l’âge légal de départ à la reTraite
Date de naissance |
Âge légal de départ (sauf dispositifs spéciaux) |
Avant le 1er septembre 1961 |
62 ans |
Entre le 1er septembre et le 31 décembre 1961 |
62 ans et 3 mois |
En 1962 |
62 ans et 6 mois |
En 1963 |
62 ans et 9 mois |
En 1964 |
63 ans |
En 1965 |
63 ans et 3 mois |
En 1966 |
63 ans et 6 mois |
En 1967 |
63 ans et 9 mois |
À partir du 1er janvier 1968 |
64 ans |
Source : article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale.
L’augmentation de l’âge d’ouverture des droits s’applique au régime général comme au régime agricole ou à celui de la fonction publique. Notamment, par un jeu de renvoi, le recul « de droit commun » de deux ans entraîne une augmentation identique de l’âge d’ouverture des droits anticipée applicable aux catégories active et super-active de la fonction publique.
Les catégories active et super-active dans la fonction publique
Au sein des trois fonctions publiques, deux catégories d’emploi, « présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles », ouvrent le droit à un départ anticipé à la retraite aux termes de l’article L. 24 du code des pensions civils et militaires de retraite :
– la catégorie active : les fonctionnaires totalisant d’au moins dix années de services en catégorie active bénéficient d’un âge de départ à la retraite progressivement relevé de trois mois par an pour atteindre 59 ans en 2030 à la suite de la réforme de 2023. Les emplois de la catégorie active sont classés par décret ([43]) pour la fonction publique d’État et par arrêté ministériel ([44]) pour les fonctions publiques territoriales et hospitalières. Ils comprennent, notamment, les aides-soignants, les sapeurs-pompiers professionnels ou encore les agents de police municipale ;
– la catégorie super-active : dans le respect de la durée de services super-actifs définie pour chaque emploi, cette catégorie d’emploi bénéficie d’un âge minimum de départ à la retraite relevé de trois mois par an pour atteindre 54 ans en 2030 à la suite de la réforme de 2023. Les emplois super-actifs sont plus restreints. Il s’agit des contrôleurs aériens, des identificateurs de l’institut médico-légal de la préfecture de police de Paris, des fonctionnaires des réseaux souterrains des égouts, des personnels de surveillance pénitentiaire et des fonctionnaires des services actifs de la police nationale.
À la suite de la réforme des retraites de 2023, la loi du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 a adapté le calendrier d’application du report de l’âge d’ouverture des droits à la retraite à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte. En outre, elle a tiré les conséquences rédactionnelles pour maintenir l’âge de suppression de la décote à Mayotte et y a ouvert le bénéfice du nouvel âge anticipé de retraite pour inaptitude.
Pour autant, l’âge d’annulation de la décote, auquel le taux plein est accordé à l’assuré quelle que soit la durée de cotisation, a été maintenu à son niveau antérieur par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale de 2023. Cet âge est désormais de trois ans supérieur à l’âge d’ouverture des droits, soit 67 ans en droit commun. Il est de même pour les catégories active et super-active de la fonction publique dont les âges du taux plein sont désormais respectivement 62 et 57 ans.
Malgré le relèvement progressif de l’âge légal de départ à la retraite, la loi de financement rectificative de la sécurité sociale a maintenu ou créé des âges anticipés de départ à taux plein dans différentes situations. Comme l’a souligné l’avant-propos du présent rapport, s’il avait été procédé autrement, l’effet d’éviction des dépenses de la branche vieillesse vers d’autres branches de la sécurité sociale, observé lors de précédentes réformes, eût été plus important encore. La rapporteure générale d’alors, Mme Stéphanie Rist, notait ainsi que cet effort de justice sociale diminuait le « rendement » des économies attendues par le relèvement de l’âge légal de départ à 64 ans et l’accélération du calendrier du relèvement de la durée d’assurance à hauteur de 1,3 milliard d’euros en 2026 et 3,1 milliards d’euros en 2030 ([45]).
La loi n° 2010‑1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a créé un dispositif de retraite anticipée à taux plein en cas d’incapacité permanente pour des raisons professionnelles pour les salariés du secteur privé. Aux termes de l’article L. 351‑1‑4 du code de la sécurité sociale, il concerne :
– les personnes souffrant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux déterminé par décret (supérieur ou égal à 20 %), reconnue au titre d’une maladie professionnelle ou ayant connu un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d’une maladie professionnelle ([46]). Elles peuvent faire valoir leurs droits à 60 ans dans les dispositions modifiées par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale ;
– les personnes souffrant d’une incapacité permanente d’un taux inférieur au précédent (entre 10 et 19 %), reconnue au titre d’une maladie professionnelle ou d’un accident de travail. Elles peuvent partir deux ans avant l’âge légal d’ouverture des droits, soit 62 ans, en l’état du droit résultant de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
● Alors que l’âge légal de départ à la retraite s’établira progressivement à 64 ans en application de la réforme de 2023, un âge anticipé a été créé à l’article L. 351‑1‑5 du code de la sécurité sociale. Il concerne les assurés reconnus inaptes ou ceux justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux, sans que l’inaptitude ou l’incapacité ait une cause professionnelle.
En effet, avant la loi de financement rectificative de la sécurité sociale, la retraite pour invalidité ou inaptitude concernant les assurés atteints d’une incapacité de travail n’offrait aucune possibilité de départ anticipé mais elle permettait de bénéficier d’une retraite au taux plein dès l’âge légal, quelle que soit la durée de cotisations validée.
Avec un âge anticipé fixé à 62 ans par le pouvoir réglementaire, les personnes éligibles à ce dispositif n’ont pas été concernées par le relèvement de l’âge légal à 64 ans. Ce dispositif s’est appliqué aux assurés du régime général, mais aussi aux non-salariés agricoles, aux ministres des cultes et membres des congrégations et collectivités religieuses, aux professions libérales et aux avocats.
● Par ailleurs, cet âge de départ anticipé sert de référence dans diverses situations dans lesquelles les personnes bénéficiaires d’autres prestations peuvent liquider leurs droits à la retraite. Il s’agit notamment :
– de l’aide à la vie familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d’origine prévue à l’article L. 117‑3 du code de l’action sociale et des familles ;
– du revenu de solidarité active créé à l’article L. 262‑10 du même code ;
– de l’allocation adulte handicapée de l’article L. 351‑7‑1 A du code de la sécurité sociale ;
– du revenu de remplacement régi par l’article L. 5421‑4 du code du travail.
Le dispositif de retraite anticipée des travailleurs handicapés (Rath) a été créé par la loi n° 2003‑775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites. En application de l’article L. 351‑1‑3 du code de la sécurité sociale, l’âge d’ouverture des droits peut ainsi être abaissé jusqu’à l’âge de 55 ans pour les assurés handicapés.
La loi de financement rectificative de la sécurité sociale a maintenu ces dispositions malgré le relèvement de l’âge de départ à la retraite de droit commun. Initialement applicables aux assurés du régime général et des régimes alignés, elles ont ensuite été étendues aux régimes spéciaux, des professions libérales ainsi que de la fonction publique.
Le dispositif de retraite anticipée pour carrière longue a également été mis en place par loi précitée du 21 août 2003. Le mécanisme initial prévoyait que l’âge légal d’ouverture des droits pouvait être abaissé d’un à quatre ans sous réserve de la satisfaction de conditions de durée totale d’assurance, de durée de cotisations et d’âge de début d’activité.
Préalablement à la loi de financement rectificative de la sécurité sociale, le bénéfice de la retraite anticipée pour carrière longue était octroyé à la double condition suivante :
– avoir débuté son activité avant un âge déterminé ;
– avoir cotisé une durée minimale.
La première condition était satisfaite dès lors que l’assuré réunissait au moins cinq trimestres à la fin de l’année civile de :
– son vingtième anniversaire, pour un départ à partir de 60 ans, avec une durée d’assurance requise supérieure de huit trimestres à celle du taux plein ;
– son seizième anniversaire, pour un départ à partir de 58 ans, avec une durée de cotisation requise égale à celle du taux plein.
Prenant en compte le recul de l’âge d’ouverture des droits et l’accélération de l’allongement de la durée de cotisation imposés en droit commun, la loi de financement rectificative de la sécurité sociale a acté une plus grande progressivité du dispositif pour carrière longue en prévoyant, notamment à l’article L. 351‑1‑1 du code de la sécurité sociale, un départ en retraite anticipé pour les assurés ayant commencé leur activité à un âge précoce. Aux termes de l’article L. 351‑1‑1 A, l’âge de départ à la retraite est abaissé d’au moins un an pour ces assurés.
Âge d’ouverture des droits selon l’âge de début d’activité
Âge de début d’activité |
Âge d’ouverture des droits |
16 ans |
58 ans |
18 ans |
60 ans |
20 ans |
62 ans |
21 ans |
63 ans |
Source : article D. 351‑1‑1 du code de la sécurité sociale tel que modifié par le décret du 3 juin 2023.
Par ailleurs, le dispositif de carrière longue s’applique également aux régimes des fonctionnaires, des professions libérales, des avocats et des personnes non salariées des professions agricoles. Ces dernières bénéficient, en outre, d’un abaissement de la durée de cotisation maximale d’assurance, égale à 167 trimestres, pour le dispositif carrière longue.
La retraite progressive constitue un dispositif destiné à assurer une bonne transition emploi-retraite. Elle permet de bénéficier par anticipation d’une fraction de la pension, dans le cas où l’assuré est à temps partiel, avant l’âge légal de départ tout en continuant à cotiser dans le but d’en augmenter le montant futur.
Régie par l’article L. 351‑15 du code de la sécurité sociale, la retraite progressive a été réformée par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale qui a notamment généralisé son recours, en particulier à la fonction publique. Aux termes de l’article L. 351‑1‑1 A du même code, l’âge d’ouverture des droits anticipé est abaissé d’au moins un an par rapport à l’âge de droit commun. Cet abaissement est à ce jour de deux ans, soit un âge d’ouverture des droits de 62 ans ([47]).
Afin d’accompagner le relèvement de l’âge légal à la retraite, la loi de financement rectificative de la sécurité sociale a introduit dans le code de la sécurité sociale un nouvel article L. 351‑1‑2‑1 majorant la pension des parents dont l’âge d’ouverture des droits est au moins égal à 63 ans et qui bénéficient d’au moins un trimestre au titre des dispositifs suivants :
– pour les femmes, de la maternité ;
– pour l’ensemble des assurés, de l’éducation d’un enfant bénéficiaire de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé ;
– pour l’ensemble des assurés, d’une période de congé parental.
Sans cette majoration, les personnes atteignant avant l’âge légal la durée d’assurance requise pour l’obtention du taux plein dans les trois cas susmentionnés, c’est-à-dire essentiellement les mères de famille, cotiseraient « à perte » jusqu’à cet âge. En effet, une surcote n’est accordée qu’en contrepartie des trimestres cotisés au-delà de la durée requise et de l’âge légal.
Ainsi, une majoration de 1,25 % est accordée pour chaque trimestre accompli, au cours de l’année précédant l’âge de départ à la retraite, au-delà du nombre de trimestres exigé pour une retraite à taux plein. Elle s’applique au régime général ainsi qu’à divers autres régimes dont les personnes non salariées agricoles, les professions libérales et les avocats ainsi qu’aux fonctionnaires.
● Afin de rétablir l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans, le 1° du I rétablit les dispositions de l’article L. 161‑17‑2 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction antérieure à celle résultant de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale, de telle sorte que l’âge d’ouverture des droits serait à nouveau fixé à 62 ans.
● Par voie de conséquence, les VI et VII rétablissent l’article 5 de la loi n° 87‑563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d’assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que les articles 6 et 11‑1 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte relatifs aux conditions d’âge dans leur rédaction antérieure à la loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
● De même, le VIII rétablit dans sa rédaction antérieure à la loi de financement rectificative de la sécurité sociale l’article 37 de la loi n° 2010‑751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique. L’âge d’ouverture des droits des personnes ayant choisi d’appartenir aux corps et cadres d’emplois d’infirmiers et de personnels paramédicaux de la catégorie A serait ainsi rétabli à 60 ans.
Par le jeu des renvois avec le code des pensions civiles et militaires de retraites, les fonctionnaires relevant des catégories active ou super-active retrouveraient respectivement un âge d’ouverture des droits respectivement fixé à 57 ans et 52 ans.
● Afin de ne pas abaisser l’âge d’annulation de la décote, le a du 7° du I établit un écart de cinq années entre celui-ci et l’âge d’ouverture des droits. Il demeurerait ainsi fixé à 67 ans.
Le a du 4° du IV procède aux mêmes adaptations, au bénéfice des personnes non salariées des professions agricoles, aux articles L. 732‑25 et L. 781‑33 du code rural et de la pêche maritime.
● De même, le 2° du III assure la coordination nécessaire pour les fonctionnaires relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite à son article 14 bis :
– l’âge de suppression de la décote serait ainsi maintenu à 67 ans pour les fonctionnaires ;
– l’âge de suppression de la décote pour les fonctionnaires occupant ou ayant occupé un emploi classé en catégorie active serait maintenu à 62 ans ;
– l’âge de suppression de la décote pour les fonctionnaires occupant des emplois dits super-actifs serait maintenu à 57 ans.
● Enfin, le b du 7° du I fixe l’âge d’annulation de la décote à l’âge d’ouverture des droits de « droit commun » pour les assurés reconnus inaptes au travail et pour ceux justifiant d’une incapacité permanente.
Si la présente proposition de loi n’apporte aucune modification à l’article L. 351‑1‑4 du code de la sécurité sociale, l’abaissement en droit commun de l’âge d’ouverture des droits de 64 à 62 ans engendrerait, par jeu de renvois, une anticipation à 60 ans de l’ouverture des droits des assurés justifiant d’une incapacité permanente, reconnue au titre d’une maladie professionnelle ou d’un accident de travail, entre 10 et 19 %, identique à celle applicable aux incapacités permanentes supérieures ou égales à 20 %.
Pour autant, la proposition de loi modifie différents dispositifs de départ anticipé afin de rétablir l’âge d’ouverture des droits de droit commun. Par conséquent, l’âge serait ici maintenu à 62 ans.
● Le 6° du I tire les conséquences du rétablissement de l’âge d’ouverture des droits de 64 à 62 ans, en abrogeant l’article L. 351‑1‑5 du code de la sécurité sociale qui ouvre droit à un âge de départ anticipé pour les assurés reconnus inaptes au travail et ceux justifiant d’une incapacité permanente. Ainsi, l’âge d’ouverture des droits pour ces assurés serait maintenu à 62 ans.
Par coordination, à l’article L. 351‑1‑1 A du même code, le a du 4° du I supprime la référence à l’article abrogé des cas de figure ouvrant droit à un départ anticipé.
De même, l’âge de départ anticipé est substitué par l’âge légal de départ à la retraite au sein des articles du code de la sécurité sociale qui faisaient précédemment mention de l’article abrogé :
– à l’article L. 161‑22‑1‑9, dans les cas de retraite progressive pour les assurés bénéficiaires d’une pension d’invalidité (2° du I) ;
– aux articles L. 341‑15 à L. 341‑17, dans les cas de conversion de la pension d’invalidité en pension de vieillesse (3° du I).
Les rédactions des articles susmentionnés antérieures à la loi de financement rectificative de la sécurité sociale sont ainsi rétablies.
● Les 8° et 9° du I procèdent aux coordinations nécessaires aux articles L. 382‑24 et L. 382‑27 pour les ministres des cultes et les membres des congrégations et collectivités religieuses titulaires d’une pensions d’invalidité.
De même, le d du 10° du I abroge le IV des articles L. 643‑3 et L. 653‑2 relatifs à l’abaissement de l’âge d’ouverture des droits dans des cas similaires pour les professions libérales et les avocats. En conséquence, le 11° du I rétablit à leur intention l’âge légal d’ouverture des droits, soit 62 ans.
Enfin, il en va de même pour les personnes non-salariées des professions agricoles : le a du 10° du IV procède aux mêmes modifications à l’article L. 732‑17‑1 du code rural et de la pêche maritime. À l’image de l’abrogation de l’article L. 351‑1‑5 du code de la sécurité sociale (6° du I), le 3° du IV abroge l’article L. 732‑18‑4 du code rural et de la pêche maritime qui prévoyait le même dispositif. Le b du 4° du IV tire les conséquences de cette abrogation en retirant sa mention des articles L. 732‑25 et L. 781‑33 du même code.
● Au sein du code de l’action sociale et des familles, l’âge de départ anticipé prévu à l’article L. 351‑1‑5 du code de la sécurité sociale, abrogé, est remplacé par l’âge d’ouverture des droits de droit commun. Cela concerne au sein dudit code :
– à l’article L. 117‑3, en cas d’inaptitude au travail, les étrangers en situation régulière vivant seuls qui peuvent bénéficier d’une aide à la vie familiale et sociale à compter de cet âge (1° du II) ;
– à l’article L. 262‑10, en cas d’inaptitude au travail, la pension de vieillesse prise en compte pour l’accès au droit au revenu de solidarité active si la personne a atteint ledit âge (2° du II).
● À l’article L. 5421‑4 du code du travail, en coordination là encore avec l’abrogation des articles L. 351‑1‑5 du code de la sécurité sociale et L. 732‑18‑4 du rural et de la pêche maritime, le V procède aux modifications rédactionnelles nécessaires s’agissant des conditions dans lesquelles le revenu de remplacement cesse d’être versé aux allocataires bénéficiaires d’une retraite.
● À l’article L. 351‑1‑1 A du code de la sécurité sociale, le a du 4° du I modifie la durée de l’abaissement minimum de l’âge d’ouverture des droits dans les cas de retraite progressive et de carrière longue. Cette durée s’établirait ainsi à au moins deux ans. Il en va de même pour les professions libérales et les avocats (b du 10° du I), les fonctionnaires (3° du III) et les personnes non salariées des professions agricoles (1° du IV).
Sous le double effet de cet abaissement à au moins deux ans et du rétablissement de l’âge de départ à la retraite à 62 ans, la loi fixerait désormais un âge d’ouverture des droits minimum pour ces deux situations d’au plus 60 ans.
● Le 5° du I modifie le dispositif ouvrant un âge de départ anticipé aux assurés ayant poursuivi une carrière longue. Il connaîtrait désormais deux seuils de déclenchement au lieu de quatre, correspondant à l’âge auquel l’assuré a commencé à cotiser et n’excédant pas vingt ans. Si cet alinéa diminue la progressivité du mécanisme en conséquence de l’abaissement de l’âge d’ouverture des droits de droit commun, il ne rétablit pas pour autant la rédaction antérieure de l’article L. 351‑1‑1 du code de la sécurité sociale, qui prévoyait un unique âge non plafonné légalement.
● En coordination, le c du 10° du I modifie les articles L. 643‑3 et L. 653‑2 du même code pour une évolution identique du dispositif pour carrière longue applicable aux professions libérales et aux avocats.
Le 3° du III opère à l’article L. 25 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite des modifications identiques à destination des fonctionnaires, tout comme les a et b du 2° du IV à l’article L. 732‑18‑1 du code rural et de la pêche maritime pour les personnes non salariées des professions agricoles.
● Enfin, le c du 2° du IV modifie au même article L. 732‑18‑1 du code rural et de la pêche maritime la durée maximale d’assurance requise pour le dispositif de carrière longue des personnes non salariées des professions agricoles. En conséquence du rétablissement de l’âge d’ouverture des droits à 62 ans et de la durée minimale d’abaissement de l’âge anticipé applicable aux carrières longue portée à deux ans, la durée de cotisation nécessaire serait au plus celle de droit commun.
● Eu égard à l’abaissement de l’âge d’ouverture des droits à la retraite de droit commun, le b du 4° du I adapte l’abaissement maximal de cet âge pour les bénéficiaires de la retraite anticipée des travailleurs handicapés (Rath). Il s’établirait désormais à sept ans, soit un âge d’ouverture des droits pouvant aller jusqu’à 55 ans. L’état du droit resterait ainsi inchangé.
● En coordination, le second alinéa du b du 10° du I modifie les articles L. 643‑3 et L. 653‑2 du code de la sécurité sociale pour les assurés handicapés relevant d’une profession libérale et de la profession d’avocat. Le b du 1° du IV effectue la même modification pour les personnes non salariées des professions agricoles à l’article L. 732‑17‑1 du code rural et de la pêche maritime.
● Par ailleurs, l’article L. 351‑7‑1 A du code de la sécurité sociale est modifié par le 3° du I pour que les assurés bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) puissent liquider leur retraite à l’âge d’ouverture des droits de droit commun et non plus à un âge abaissé. De manière similaire, le 12° du I modifie l’article L. 821‑1 du même code, de telle sorte que les bénéficiaires de l’AAH soient réputés inaptes à ce même âge et non plus à un âge abaissé. Cette même substitution d’un âge de départ anticipé par l’âge d’ouverture des droits de droit commun est opérée au 5° du IV modifiant l’article L. 732‑30 du code rural et de la pêche maritime. En définitive, dans l’ensemble de ces situations, l’âge de 62 ans est maintenu.
Au regard de l’abaissement de l’âge d’ouverture des droits à la retraite, le 6° du I abroge l’article L. 351‑1‑2‑1 du code de la sécurité sociale créé par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Le droit applicable est ainsi rétabli dans son état antérieur.
Tirant les conséquences de cette abrogation, le a du 10° du I supprime une disposition identique aux articles L. 643‑3 et L. 653‑2 du même code pour respectivement les professions libérales et les avocats. Il en est de même pour les fonctionnaires relevant de l’article L. 14 du code des pensions civiles et militaires, dont les IV et V sont abrogés par le 1° du III ainsi que pour les personnes non salariées des professions agricoles puisque l’article L. 732‑25‑2 du code rural et de la pêche maritime est abrogé par le 3° du IV.
Le IX supprime des dispositions transitoires introduites par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale, devenues sans objet. Elles concernent notamment :
– l’évolution de la durée de services et de bonifications qui devait être validée par les fonctionnaires pour la génération née entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1964, qu’ils occupent des emplois de catégorie sédentaire, active ou super-actives ainsi que pour les militaires ;
– la possibilité, pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1961, de bénéficier du remboursement des versements effectués au cours de leur activité pour « acheter » des trimestres supplémentaires. Cette possibilité est ouverte dans la mesure où ces rachats peuvent se révéler inutiles, compte tenu du recul de l’âge d’ouverture des droits ;
– la possibilité pour les personnes ayant demandé de liquider leur pension après le 31 août 2023 dans des conditions qui ne leur sont plus accessibles au regard de la réforme d’annuler leur demande.
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Rejeté par la commission
L’article 2 de la proposition de loi abroge les dispositions portant rehaussement de la durée d’assurance requise pour bénéficier d’un départ à la retraite à taux plein issues de la loi du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 ainsi que de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraite.
À titre principal, l’article 2 abroge l’accélération du calendrier de la réforme dite « Touraine » et fixe une durée d’assurance de 168 trimestres pour un départ en retraite à taux plein pour tous les assurés nés à partir du 1er janvier 1961.
Il tire également les conséquences de ces mesures pour les fonctionnaires et les militaires ainsi que pour les assurés de Saint-Pierre-et-Miquelon.
L’article L. 161‑17‑3 du code de la sécurité sociale a été créé par la loi n° 2014‑40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraite. Il fixe à 172 trimestres, soit 43 annuités, la durée d’assurance requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein pour les assurés nés à partir du 1er janvier 1973, pour l’ensemble des fonctionnaires et des salariés du secteur privé.
Cette loi prévoit la mise en œuvre progressive de ses dispositions à raison d’un trimestre supplémentaire toutes les trois cohortes pour atteindre 172 trimestres à partir de la cohorte née en 1973 dès 2035.
Bornes d’Age fixÉes par la loi « touraine »
Génération concernée |
Durée d’assurance requise (en trimestres) |
1er janvier 1958 – 31 décembre 1960 |
167 |
1er janvier 1961 – 31 décembre 1963 |
168 |
1er janvier 1964 – 31 décembre 1966 |
169 |
1er janvier 1967 – 31 décembre 1969 |
170 |
1er janvier 1970 – 31 décembre 1972 |
171 |
Nés à partir du 1er janvier 1973 |
172 |
Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.
L’article 10 de la loi n° 2023‑270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale a accéléré le calendrier de majoration de la durée d’assurance requise issu de la loi « Touraine » en portant à 43 annuités la durée requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein dès 2027, soit pour la génération née en 1965, contre 2035 et à partir de la génération née en 1973 comme initialement prévu. Le relèvement s’effectue à partir du 1er septembre 2023 au rythme d’un trimestre par an, et non plus d’un trimestre tous les trois ans. L’âge d’annulation de la décote à 67 ans a été maintenu.
Ce relèvement est applicable aux fonctionnaires dans les conditions du régime général ([48]).
Évolution de la durée de cotisations requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein en application de l’article 10
de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale
Génération concernée |
Durée d’assurance requise avant la LFRSS 2023 (en trimestres) |
Durée d’assurance requise après la LFRSS 2023 (en trimestres) |
Hausse de la durée d’assurance requise en application de la LFRSS 2023 (en trimestres) |
1er janvier – 31 août 1961 |
168 |
168 |
0 |
1er septembre – 31 décembre 1961 |
168 |
169 |
1 |
1962 |
168 |
169 |
1 |
1963 |
168 |
170 |
2 |
1964 |
169 |
171 |
2 |
1965 |
169 |
172 |
3 |
1966 |
169 |
172 |
3 |
1967 |
170 |
172 |
2 |
1968 |
170 |
172 |
2 |
1969 |
170 |
172 |
2 |
1970 |
171 |
172 |
1 |
1971 |
171 |
172 |
1 |
1972 |
171 |
172 |
1 |
1973 |
172 |
172 |
0 |
Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.
● Le I modifie l’article L. 161‑17‑3 du code de la sécurité sociale afin de revenir sur le calendrier dessiné par la réforme « Touraine » et accéléré par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Il requiert de tous les assurés, nés à partir du 1er janvier 1961, 168 trimestres d’assurance pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
Évolution de la durée de cotisations requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein en application du dispositif proposé
Génération concernée |
Durée d’assurance requise (en trimestres) |
1er janvier 1958 – 31 décembre 1960 |
167 |
À partir du 1er janvier 1961 |
168 |
Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.
● Le II modifie l’article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite qui renvoie à l’article L. 161‑17‑3 du code de la sécurité sociale fixant la durée d’assurance requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Les fonctionnaires et les militaires pourront partir à taux plein sous réserve d’une durée d’assurance ramenée à 168 trimestres pour tous les assurés nés à partir du 1er janvier 1961, et non plus établie à 172 trimestres.
● Le III modifie la loi n° 87‑563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d’assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, la durée d’assurance requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein y étant différente de celle de droit commun. Le dispositif proposé aligne ces dispositifs à 168 trimestres pour les assurés nés à partir de 1965, quand la durée requise pour les générations précédentes est d’ores et déjà inférieure à 168 trimestres.
évolution proposée de la Durée d’assurance requise pour bénéficier d’un départ en retraite à taux plein à saint-pierre-et-miquelon
Génération |
Durée d’assurance requise (en trimestres) |
1961 |
162 |
1962 |
164 |
1963 |
166 |
1964 |
167 |
À partir de 1965 |
168 |
Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.
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Introduit par la commission
L’article 2 bis prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise d’un rapport au Parlement par le Gouvernement proposant des ressources différentes et novatrices de financement du système de retraite en France.
Cet article est issu d’un amendement de M. Stéphane Viry adopté en dépit d’un avis défavorable du rapporteur.
Fondé sur le principe de la répartition, le système de retraite français a progressivement diversifié ses modes de financement de telle sorte que les cotisations ne représentent aujourd’hui qu’environ deux tiers de ses ressources.
Alors que le système de retraite sera durablement déficitaire à compter de 2024 et jusqu’en 2070 selon le conseil d’orientation des retraites (COR), l’article 2 bis prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise d’un rapport au Parlement par le Gouvernement proposant des ressources différentes et novatrices de financement du système de retraite en France.
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Introduit par la commission
L’article 2 ter prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise au Parlement par le Gouvernement d’un rapport évaluant l’opportunité de la création d’une instance donnant aux partenaires sociaux la responsabilité de fixer l’âge de départ à la retraite et également de repenser le financement du système de retraite.
Cet article est issu d’un amendement de M. Stéphane Viry adopté en dépit d’un avis défavorable du rapporteur.
L’implication des partenaires sociaux dans la gestion de la sécurité sociale a été au fondement de sa création et de son évolution depuis 1945.
L’article 2 ter prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise au Parlement par le Gouvernement d’un rapport évaluant l’opportunité de la création d’une instance donnant aux partenaires sociaux la responsabilité de fixer l’âge de départ à la retraite et également de repenser le financement du système de retraite.
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Introduit par la commission
L’article 2 quater prévoit la remise d’un rapport au Parlement par le Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, pour qualifier le rôle, l’importance et la pérennité du paritarisme dans le cadre des réformes successives liées à la réforme des retraites.
Cet article est issu d’un amendement de M. Stéphane Viry adopté en dépit d’un avis défavorable du rapporteur.
L’implication des partenaires sociaux dans la gestion de la sécurité sociale a été au fondement de sa création et de son évolution depuis 1945.
L’article 2 quater prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise au Parlement par le Gouvernement d’un rapport qualifier le rôle, l’importance et la pérennité du paritarisme dans le cadre des réformes successives liées à la réforme des retraites.
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Introduit par la commission
L’article 2 quinquies prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise d’un rapport au Parlement par le Gouvernement évaluant, d’une part, les effets de la politique de natalité sur le financement du système de retraite et, d’autre part, les mesures susceptibles d’améliorer la politique en faveur de la natalité en France.
Cet article est issu d’un amendement de M. Stéphane Viry adopté en dépit d’un avis défavorable du rapporteur.
Le système français de retraite repose sur le principe de la répartition, c’est-à-dire que les cotisations des actifs qui travaillent financent les pensions des retraités. Selon l’Insee, le nombre de naissance en France a diminué de 20 % entre 2010 et 2023, ce qui pèsera à terme sur le financement du système de retraite.
L’article 2 quinquies prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise d’un rapport au Parlement par le Gouvernement évaluant, d’une part, les effets de la politique de natalité sur le financement du système de retraite et, d’autre part, les mesures susceptibles d’améliorer la politique en faveur de la natalité en France.
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Article 2 sexies (nouveau)
Remise d’un rapport au Parlement sur la réforme des retraites de 2023
Introduit par la commission
L’article 2 sexies prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise d’un rapport au Parlement par le Gouvernement évaluant les effets de la loi n° 2023‑270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 au regard des carrières dites hachées, des carrières dites longues, de la pénibilité et de l’égalité entre les femmes et les hommes, tout en présentant diverses mesures permettant de corriger ladite réforme, dans un objectif de justice sociale.
L’article 2 sexies est issu d’un amendement de M. Stéphane Viry adopté en dépit d’un avis défavorable du rapporteur.
Il prévoit la remise, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, d’un rapport au Parlement par le Gouvernement évaluant les effets de la loi n° 2023‑270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 au regard des carrières dites hachées, des carrières longues, de la pénibilité et de l’égalité entre les femmes et les hommes, tout en présentant diverses mesures permettant de corriger la réforme précitée, dans un objectif de justice sociale.
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Article 2 septies (nouveau)
Remise d’un rapport au Parlement
sur le caractère redistributif du système de retraite
Introduit par la commission
L’article 2 septies prévoit que, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur le caractère redistributif du système de retraite.
Cet article est issu d’un amendement de Mme Prisca Thevenot et plusieurs de ses collègues adopté en dépit d’un avis défavorable du rapporteur.
Il prévoit que, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur le caractère redistributif du système de retraite – notamment sur les variations de la pension cumulée sur le cycle de vie. L’information du Parlement concernant l’objectif d’équité entre les assurés du système de retraite s’en trouverait améliorée.
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Introduit par la commission
L’article 2 octies prévoit que, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur l’impact des différentes réformes du système de retraite depuis 2000.
Cet article est issu d’un amendement de Mme Prisca Thevenot et plusieurs de ses collègues, modifié par trois sous-amendements de M. Bazin, adoptés en dépit d’avis défavorables du rapporteur.
Il prévoit que, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’impact des différentes réformes du système de retraite depuis 2000 ainsi que l’identification de mesures visant à assurer sa soutenabilité financière, le renouvellement des générations et l’augmentation du taux d’emploi des mères de famille et des seniors.
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Adopté par la commission
L’article 3 de la présente proposition de loi gage sur l’accise sur les tabacs et sur la taxe sur les transactions financières la charge et la perte de recettes résultant des dispositions précédentes pour les organismes de sécurité sociale.
Le présent article correspond à l’usage du « gage » de la charge que représente la proposition de loi sur :
– la taxe assise sur le tabac prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services ;
– la taxe sur les transactions financières prévue à l’article 235 ter ZD.
En effet, la mise en place d’un âge d’ouverture des droits à 62 ans et d’une durée d’assurance requise à 168 trimestres pour les générations nées à partir du 1er janvier 1961 représente pour les organismes de sécurité sociale :
– une charge puisque l’abaissement de l’âge d’ouverture des droits constitue une extension des droits des assurés entraînant une hausse du montant total et de la durée des pensions versées ;
– une perte de recettes à raison de la baisse de cotisations sociales résultant de la réduction de la durée d’activité.
La pratique du « gage de charge » s’appuie sur de nombreux précédents confirmés par les rapports d’information successifs des présidents de la commission des finances :
– le rapport d’Éric Woerth de 2022, selon lequel « conformément à une tradition établie et favorable à l’initiative parlementaire, la délégation du Bureau tolère l’inscription à l’ordre du jour de propositions de loi dont l’adoption aurait pour conséquence une violation des dispositions de l’article 40 de la Constitution en aggravant une charge publique. Pour cela, il suffit que la proposition de loi considérée comporte un gage de charge, manifestant que le fait que la charge qu’elle comporte a été repérée, mais tolérée » ([49]) ;
– le rapport de Gilles Carrez de 2017, aux termes duquel « la délégation du Bureau chargée de l’examen de la recevabilité financière admet la recevabilité d’une proposition de loi qui crée ou qui aggrave une charge publique, si celle-ci est assortie d’un gage de compensation » ([50]) ;
– le rapport de Jérôme Cahuzac de 2012, pour lequel « la délégation du Bureau admet traditionnellement la recevabilité d’une proposition de loi qui crée ou aggrave une charge publique si celle-ci comporte un gage de compensation » ([51]).
La conséquence financière de l’allongement de la durée d’assurance requise par la réforme « Touraine » de 2014 a été évaluée, dans l’étude d’impact annexée à la loi précitée du 20 janvier 2014, à 5,4 milliards d’euros en 2030 et 10,4 milliards d’euros en 2040 ([52]).
L’effet du recul de deux ans de l’âge d’ouverture des droits à la suite de la loi du 14 avril 2023 a été évalué, pour l’ensemble des régimes de retraites, dans le tableau ci-après.
Rendement estimé à la suite de la loi du 14 avril 2023 (en milliards euros) |
Année |
0,27 |
2023 |
3,3 |
2024 |
5,3 |
2025 |
7,5 |
2026 |
8,2 |
2027 |
14,1 |
2030 |
Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale à partir du rapport sur les objectifs et les effets du projet de réforme des retraites de janvier 2023.
La Cour des comptes, dans ses rapports successifs sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, a évalué les recettes supplémentaires liées à la réforme des retraites de 2023 à 1 milliard d’euros en 2025, 2 milliards d’euros en 2026 et 7 milliards d’euros à l’horizon 2030 ([53]).
Conséquences financières de la réforme des retraites de 2023 sur le solde de la branche vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse
(en milliards d’euros)
Note : Tous régimes obligatoires de base de la sécurité sociale confondus, en milliards d’euros.
Source : Cour des comptes, rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale 2023, p. 52.
L’impact financier de l’abrogation de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale a également fait l’objet de plusieurs estimations. L’Institut Montaigne a évalué le coût de l’abrogation de la réforme des retraites de 2023 à 0,3 point de PIB, soit 9 milliards d’euros en 2024 et 8,2 milliards d’euros à horizon 2027 ([54]). L’économiste Henri Sterdyniak souligne, quant à lui, dans une contribution écrite communiquée au rapporteur, que le retour sur les mesures d’âge de la réforme des retraites de 2023 devrait entraîner à terme un déficit limité du système de retraite d’environ 1 % du PIB.
D’une part, le rendement actuel des accises sur le tabac est estimé par la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) à 14,2 milliards d’euros en 2023 ([55]).
D’autre part, le rendement de la taxe sur les transactions financières prévu à l’article 235 ter ZD est estimé à 1,7 milliard d’euros en 2023, 1,2 milliard d’euros en 2024 et 1,87 milliard d’euros en 2025 par les projets de loi de finances pour 2023, 2024 et 2025.
Par conséquent, le gage compense le montant de la charge et la perte de recettes de manière crédible ([56]).
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Lors de sa première réunion du 23 octobre 2024, la commission a examiné la proposition de loi visant à restaurer un système de retraite plus juste en annulant les dernières réformes portant sur l’âge de départ et le nombre d’annuités (n° 284) (M. Thomas Ménagé, rapporteur) ([57]).
M. le président Frédéric Valletoux. En tant que président de la commission, il m’appartient de veiller à la bonne application des dispositions constitutionnelles, organiques et réglementaires. J’ai donc saisi le président de la commission des finances sur la recevabilité au titre de l’article 40 de la Constitution de la proposition de loi que nous examinons ce matin.
Selon le président Éric Coquerel, les dispositions prévues par les deux premiers articles du texte entraîneront des charges pour les organismes de sécurité sociale, que les dispositions de l’article 3 visent à équilibrer. Si l’article 40 interdit de compenser la création d’une charge par la création d’une ressource nouvelle ou l’augmentation d’une ressource existante, il est de jurisprudence constante de tolérer le dépôt d’un texte dont l’adoption aurait pour conséquence la création ou l’aggravation d’une charge publique, dès lors qu’elle comporte un gage de charge.
Le président Coquerel juge que cette lecture favorable à l’initiative parlementaire doit trouver à s’appliquer non seulement lors du contrôle, par le bureau de l’Assemblée nationale, de la recevabilité au moment du dépôt des propositions de loi, mais aussi lorsque cette recevabilité est contestée par la suite auprès du président de la commission des finances. Il conclut que le texte est recevable au titre de l’article 40.
Nous en venons donc à cette proposition de loi, que je remercie le rapporteur de bien vouloir présenter à la commission.
M. Thomas Ménagé, rapporteur. Depuis que la réforme des retraites a été adoptée par la force en 2023, cette proposition de loi visant son abrogation est la seconde qu’examine notre commission. Nous nous étions penchés sur la première en juin 2023 à l’initiative du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (LIOT). Nous savons ce qu’il est advenu de ce texte en raison des manœuvres déployées par l’ancienne majorité présidentielle.
À l’occasion de la journée d’ordre du jour réservé à notre groupe politique, nous proposons une deuxième proposition de loi, qui n’est ni partisane ni polémique. Elle ne vise pas à appliquer le programme d’une formation politique. Il s’agit d’un texte de concorde conçu dans l’intérêt supérieur des Français.
Sur la base des professions de foi présentées lors des dernières élections législatives, nous savons qu’une large majorité – une majorité absolue ! – existe en faveur de ce texte dans notre hémicycle. Cette majorité, nous la devons à nos électeurs, qui nous écoutent et nous observent. Face à une violence démocratique inégalée sous la Ve République, à l’usage des articles 44, alinéa 3, 47‑1 et 49, alinéa 3 de la Constitution, nous avons une triple responsabilité.
La première de ces responsabilités est de réparer une erreur démocratique mais aussi les erreurs commises par les réformes successives des retraites, aussi inefficaces sur le plan économique que budgétaire. En 2023, le Gouvernement et l’ancienne majorité présentaient cette réforme des retraites comme indispensable pour sauver un système menacé de faillite. Pourtant, le compte n’y est pas et le Conseil d’orientation des retraites (COR) annonce un déficit de 0,2 % du PIB en 2024 et de 0,8 % en 2070.
La vérité, c’est qu’il n’y avait aucune urgence. Comme le soulignait devant vous en janvier 2023 l’ancien président du COR, Pierre-Louis Bras, les dépenses de retraite « ne dérapaient pas » et le système était excédentaire. Les Français qui travaillent ont servi de variable d’ajustement pour tenter de limiter la dérive des comptes publics. La véritable raison d’être de la réforme de 2023 résidait dans la situation globale des finances publiques, notamment dans les possibles recettes fiscales liées au recul de l’âge du départ en retraite.
Raisonner à partir du solde total du système de retraite est trompeur. En effet, certains régimes sont excédentaires, comme l’Agirc-Arrco, quand d’autres sont déficitaires, comme le régime général. Nous ne pouvons pas nous dispenser de l’analyse de chaque régime et de la soutenabilité d’ensemble de nos comptes publics.
En relevant l’âge de départ en retraite, le Gouvernement prétendait réduire les dépenses sociales alors qu’une telle réforme contribue à les augmenter. Lorsque plus de la moitié des seniors n’occupent pas un emploi, repousser l’âge de départ en retraite revient à augmenter les dépenses sociales. Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques et la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, ces effets d’éviction coûteraient près de 5 milliards d’euros aux finances publiques. Certains économistes, comme Henri Sterdyniak, qui n’est pas membre du Rassemblement National, estiment même le coût de ces effets d’éviction situé entre 5 et 11 milliards d’euros. La réforme des retraites n’introduit aucune mesure de soutien réel à l’emploi des seniors, pourtant un enjeu majeur. La lecture purement comptable du Gouvernement n’a produit aucun résultat. Elle n’a pas « sauvé » le système de retraite et le Gouvernement de l’époque a donc menti.
Notre deuxième responsabilité est de protéger, puisque ces réformes ont conduit à un système injuste qui pénalise les plus précaires. Chaque jour qui passe est un jour de souffrance supplémentaire infligé à nos concitoyens en fin de carrière.
Je pense à tous ces Français qui, après avoir travaillé toute leur vie pour atteindre la durée requise, devront continuer deux années de plus. Je pense à toutes ces femmes qui subiront de plein fouet la réforme et dont l’âge moyen de départ devrait augmenter de 9 mois contre 5 mois pour les hommes, parce que les femmes travaillent plus souvent dans des emplois précaires à temps partiel. Je pense à tous ces ouvriers, à tous ces travailleurs exposés à la pénibilité, qui ont déjà subi l’usine à gaz du compte professionnel de prévention, dont les critères les plus importants ont été supprimés. Ils devront désormais travailler plus longtemps pour espérer une retraite à taux plein.
Nous souhaitons supprimer les pires dispositions des réformes Touraine de 2014 et Borne de 2023. Nous voulons rétablir une forme de justice entre les travailleurs en prenant mieux en compte les carrières hachées, les carrières longues et la pénibilité. Plus on travaille tôt, plus on travaille dur, plus on devrait partir tôt. Nous faisons un choix de société : permettre à nos compatriotes de profiter de leur retraite après une dure vie de labeur. Cependant, rien n’empêche ceux qui souhaitent partir plus tard de le faire. Il faudra les accompagner. Avec cette réforme, nous ne défendons pas le droit à la paresse mais bien la liberté pour chaque Français de partir à un âge raisonnable tout en assurant, pour les carrières longues et les plus pénibles, le droit de partir plus tôt.
Enfin, notre troisième responsabilité est de préparer l’avenir. Nous défendons une vision non pas parcellaire, mais macroéconomique. Or, les gouvernements ayant conduit les différentes réformes n’ont pas eu le courage de mener les actions ambitieuses en mesure de pérenniser notre système de retraite.
D’abord, qu’ont fait ces gouvernements pour rehausser le taux d’emploi, dont la faiblesse constitue malheureusement une spécificité française ? Toutes mes auditions l’ont souligné : si le taux d’emploi en France, qui se situe autour de 68 %, est légèrement moindre que la moyenne européenne, il est inférieur de 10 points à celui de l’Allemagne et de 14 points à celui des Pays- Bas. Pire, les taux d’emploi des personnes âgées, des jeunes et des personnes non qualifiées sont très faibles. Le COR l’a démontré : un rattrapage du taux d’emploi pour atteindre celui des Pays-Bas procurerait jusqu’à 140 milliards d’euros de recettes publiques supplémentaires par an, ce qui couvrirait largement les déficits annoncés. Les emplois créés entraîneraient des cotisations sociales et des recettes fiscales supplémentaires, qui permettraient de financer les pensions de nos retraités. Le gouvernement Borne a fait un choix différent en considérant plus facile de faire travailler les salariés deux ans de plus, plutôt que de permettre à tous les Français de trouver un emploi. Avec cette proposition de loi, nous dénonçons aussi ce choix.
Ensuite, qu’ont fait ces gouvernements successifs en matière de soutien à la démographie ? Dans un régime par répartition, les actifs paient les pensions des retraités. Comme nos concitoyens, nous sommes attachés à ce système. Pourtant, depuis plus de dix ans, la natalité est en chute libre. Chacun est libre de ses choix et de son souhait de devenir père ou mère d’un ou de plusieurs enfants. Personne ne forcera qui que ce soit à fonder ou à agrandir une famille. Cependant, le nombre moyen d’enfants souhaités s’élevait à 2,27 en 2023, mais le nombre moyen d’enfants par femme n’était que de 1,68. Ce décalage doit nous interroger. Il n’est pas normal que des familles ne puissent pas s’agrandir parce que la puissance publique ne les accompagne pas suffisamment, parce qu’elles ne disposent pas d’une chambre supplémentaire ou qu’elles ont du mal à se loger, parce que leur pouvoir d’achat s’est effondré et qu’elles ne peuvent assumer financièrement l’arrivée d’un enfant, ou parce que les places en crèche manquent. Les enfants d’aujourd’hui sont notre avenir et les cotisants de demain. Si l’on fait de la natalité un gros mot alors qu’elle est au fondement du système par répartition, le problème ne sera jamais résolu.
Enfin, qu’ont fait les gouvernements successifs en matière de productivité ? Alors que la productivité française s’étiole, en particulier depuis la crise sanitaire, rien de sérieux n’a été engagé. Les projections du COR sont peu optimistes, atteignant péniblement 1 %. La productivité européenne décroche fortement en comparaison de celle des États-Unis. Il s’agit pourtant d’un sujet fondamental, largement documenté, y compris par le récent rapport Draghi sur la compétitivité européenne. La qualification de la main‑d’œuvre, la mobilisation des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle ainsi que la simplification administrative constituent autant de leviers à actionner de façon urgente. Près de 4 % du PIB sont perdus chaque année dans les lourdeurs bureaucratiques ; il s’agit d’une source possible de recettes qu’il faut sérieusement considérer.
Face à l’ensemble de ces constats, nous agissons grâce à cette proposition de loi. D’une part, ce texte abroge les pires dispositifs de la réforme des retraites de 2023 en proposant à l’article 1er de rétablir l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans et d’abroger l’accélération du calendrier du passage de 42 à 43 annuités de cotisation. D’autre part, il abroge l’allongement de la durée de cotisation auquel avait procédé la réforme Touraine de 2014 et il rétablit, par souci de cohérence et pour tous, une durée légale de cotisation de 42 annuités au travers de l’article 2.
Par ailleurs, la proposition de loi adapte divers dispositifs pour prendre acte du rétablissement de l’âge légal de départ à 62 ans, tels que les départs anticipés pour inaptitude et incapacité, pour les travailleurs handicapés et pour les carrières longues. Par conséquent, nous revenons à l’âge d’ouverture des droits à la retraite en vigueur avant la réforme de 2023 pour les catégories « active » et « super-active » de la fonction publique. Il s’agit d’un sujet important, notamment pour nos policiers, que j’ai souhaité auditionner.
Nous assumons le coût de cette réforme car il s’agit d’un choix de société. Nous le finançons à long terme, notamment à travers une action ambitieuse sur les leviers mentionnés, mais aussi grâce à des économies structurelles dans le budget de l’État.
En résumé, cette proposition de loi est pragmatique et soucieuse des Français, en particulier des plus fragiles.
Soyons cohérents devant nos électeurs. Nous avons l’occasion d’abroger réellement la réforme des retraites et d’honorer nos engagements. J’insiste sur le mot « réellement » pour revenir quelques instants sur le comportement de nos collègues du Nouveau Front Populaire et notamment de M. Jérôme Guedj. Chers collègues, vous avez arpenté les marchés et les plateaux de télévision durant toute la campagne législative pour promettre aux Français d’abroger la réforme. Pourtant, le premier jour de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), vous avez choisi de leur faire croire que vous alliez procéder à cette abrogation grâce à un amendement, qui n’en faisait rien et n’entraînait qu’une augmentation des cotisations censée équilibrer une future réforme. Et dès le lendemain, monsieur Guedj, vous avez avoué sur Twitter que les amendements d’abrogation de la réforme avaient été déclarés irrecevables. Vous prétendez que nous aurions pu abroger la réforme alors que ces amendements n’ont jamais été discutés.
Je ne m’inscris pas dans cette logique de conflit et de conflictualisation, qui nuit au débat et ne fait pas avancer le sujet. Je ne suis ici ni pour raconter des salades aux Français, ni pour faire des effets de manche. Les Français nous ont missionné pour abroger la réforme des retraites. C’est ce que nous proposons de faire de la façon la plus claire, la plus efficace et la plus rapide qui soit. Nos concitoyens l’attendent puisqu’ils sont près de 90 % à vouloir remettre en cause la réforme de 2023.
J’entends aussi la nécessité de remettre à plat le financement de notre système. Chaque groupe a présenté des pistes en la matière et j’ai évoqué des points que nous considérons importants. Cependant, mes auditions l’ont montré : il est important d’associer à cette réflexion les partenaires sociaux, comme l’avait proposé Charles de Courson en juin 2023. Ainsi, dans une vision consensuelle, je présenterai un amendement portant article additionnel relatif à l’organisation d’une conférence de financement de notre système de retraite, autour duquel j’espère que nous pourrons tous nous retrouver dans l’intérêt de nos concitoyens.
Enfin, je suis convaincu que nous pourrons nous entendre autour de ce texte qui dépasse les clivages. C’est ce que j’attends de nos débats et c’est ce que les Français attendent de cette assemblée. Si cette proposition de loi est votée, ce ne sera la victoire d’aucun groupe mais bien la leur.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Guillaume Florquin (RN). Nous avons l’occasion de réparer les dégâts causés par les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, qui n’ont eu de cesse de trahir le peuple et les travailleurs.
Au Rassemblement National, nous sommes les seuls à défendre ceux qui travaillent, à porter la voix des oubliés de la République. Quand d’autres n’ont fait que des promesses vides, nous proposons un projet concret et juste : rétablir l’âge de départ en retraite à 62 ans, après 42 annuités. Il s’agit d’une réponse claire à des décennies de trahison.
La gauche s’est détournée de ses propres valeurs, trahissant ses électeurs et les ouvriers qu’elle prétendait défendre. Ainsi, elle n’a pas soutenu notre motion référendaire lors de l’examen de la réforme des retraites, refusant de donner la parole au peuple et prouvant qu’elle préfère protéger ses intérêts politiciens plutôt que d’écouter ceux qui souffrent.
Les électeurs ne se laissent plus berner. Le porte-parole du Parti communiste, Léon Deffontaines, l’a bien compris puisqu’il appelle à voter notre texte. Les communistes connaissent les conséquences désastreuses des réformes imposées. Ils savent que nous sommes les seuls à défendre les intérêts des travailleurs. Mon élection au premier tour face à Fabien Roussel en apporte la preuve. Les collègues de gauche devraient arrêter de s’abriter derrière des discours sectaires et écouter leurs électeurs. Quant aux collègues de l’ancienne majorité, continueront-ils de défendre un bilan aussi désastreux ou reconnaîtront-ils enfin leurs erreurs ?
Mme Prisca Thevenot (EPR). Monsieur Ménagé, d’après le slogan de votre famille politique, « quand le peuple vote, le peuple gagne ». Cependant, quand le RN propose des textes au vote, le peuple peut perdre beaucoup.
Nous sommes réunis pour examiner la première proposition de loi déposée par le groupe RN lors de cette législature. S’agit-il de redresser les comptes publics ? Non. De défendre le pouvoir d’achat des retraités ? Non plus. De garantir la pérennité de notre système de solidarité intergénérationnelle alors ? Toujours pas. Avec ce texte, le seul objectif du RN est de faire un coup politique en se livrant au jeu du « je t’aime moi non plus » avec La France insoumise.
Vous rappelez ici ce que nous savons depuis 2022 : RN et LFI sont unis dans la démagogie. Que direz-vous, vous et vos nouveaux amis, aux 850 000 retraités qui, grâce à la réforme que vous voulez supprimer, ont bénéficié d’une revalorisation de leur petite pension ? Que direz-vous aux enfants orphelins qui peuvent dorénavant percevoir une pension jusqu’à 21 ans et, quand ils sont en situation de handicap, sans limite d’âge ? Que direz-vous aux sportifs de haut niveau qui peuvent dorénavant racheter des trimestres ? Leur direz-vous que votre coup politique compte bien davantage que leur quotidien et leurs besoins, parce que vous avez envie de vous faire de nouveaux amis ?
Ne nous dites pas que vous ne comptez pas toucher à ces avancées et que vous souhaitez seulement revenir sur les paramètres de la réforme. En le faisant, vous empêcherez le financement de ces avancées. Notre groupe défendra l’intérêt de ces personnes et s’opposera à ce coup politique.
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). L’extrême droite se présente à nouveau parée de son vernis social, espérant convaincre qu’elle souhaite faire abroger cette réforme et que son texte peut aboutir. Il s’agit d’un mensonge qui s’inscrit dans une longue série.
En 2007, Jean-Marie et Marine Le Pen se prononçaient pour la retraite à 65 ans. Ils ont ensuite présenté une fausse proposition de retraite à 60 ans, entretenant le flou tant sur le nombre d’annuités que sur l’âge réel de départ. Les dernières élections européennes ont permis de clarifier le programme : la retraite à 66 ans, chiffre auquel M. Jordan Bardella est parvenu après un brillant calcul.
Qui peut croire que le RN lutte contre la retraite à 64 ans alors que ses députés n’ont déposé que soixante‑quinze amendements contre la réforme en 2023 ? Qui peut y croire alors que jamais un seul de ses élus ne s’est rendu aux manifestations les plus massives que la France a connues depuis la Libération, préférant légitimer les violences policières et les arrestations arbitraires sur les chaînes de Vincent Bolloré ? Qui peut y croire alors que ses députés ont voté contre l’abrogation lors de l’examen du PLFSS il y a moins de 48 heures, qu’ils n’ont pas censuré le gouvernement Barnier ni choisi de destituer le Président de la République ?
Ce texte rappelle les obsessions nauséabondes de l’extrême droite en proposant comme seule piste de financement une hausse de la natalité, corolaire d’une vision des femmes dont la seule mission serait d’enfanter. Le RN propose aussi de supprimer les cotisations sociales, ce qui ruinerait la sécurité sociale. Au fond, Mme Marine Le Pen ne sait même pas comment financer sa réforme des retraites.
Collègues, nul besoin de participer à cette arnaque puisque notre proposition de loi visant à abroger la retraite à 64 ans sera discutée le 28 novembre. Notre texte sera le seul à pouvoir être repris au Sénat et à permettre que cette réforme injuste soit enfin abolie.
Mme Sandrine Runel (SOC). Cette proposition de loi est une escroquerie. Le RN ne représente pas la solution pour répondre aux préoccupations des Français. Son programme n’est qu’imposture.
En juin 2023, vous vouliez inscrire la progressivité en fonction de l’âge d’entrée dans la vie active. En mai 2024, Jordan Bardella proposait d’allonger l’âge légal de départ à la retraite à 66 ans. Le 12 juin 2024, le même affirmait qu’il faudrait faire des choix et que le retour à la retraite à 60 ans ne ferait pas partie de ses priorités. En octobre 2024, vous voulez abroger la réforme des retraites.
On se perd dans vos coups de communication. En fin de compte, quel est votre projet ? Voulez-vous ruiner le système par répartition en réduisant toujours davantage les cotisations ? Vous vous êtes pris pour des macronistes ? Pour des Mozart de la retraite ? Si vous vouliez vraiment abroger cette réforme injuste, vous auriez censuré le gouvernement de Michel Barnier, vous voteriez nos amendements d’abrogation dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale et vous auriez été dans la rue pendant que nous manifestions avec les syndicats, les travailleurs et les partenaires sociaux. Où étiez-vous alors, pour défendre les plus précaires, pour évoquer les petites retraites, les carrières hachées, les métiers pénibles et les femmes ?
Nous ne participerons pas à cette escroquerie.
M. Thibault Bazin (DR). Ce texte propose de revenir sur la réforme des retraites en rétablissant l’âge de l’ouverture des droits à 62 ans à compter de la génération née en 1955, ce qui est étonnant puisque les personnes concernées ont aujourd’hui 69 ans et qu’elles sont déjà à la retraite pour leur immense majorité. Dans l’article 1er, vous revenez même sur ceux qui sont nés en 1951. La communication a ses limites.
La proposition de loi vise également à abaisser la durée de cotisation nécessaire pour obtenir le taux plein. Dans la lignée du programme du NFP, il s’agirait de repasser à 42 annuités en revenant sur une réforme votée sous le quinquennat de François Hollande. Quel serait l’impact d’une telle mesure ? Un déficit encore creusé : 3,4 milliards d’euros en 2025 et 16 milliards d’euros par an à partir de 2032. Un tel déséquilibre des caisses de retraite entraînerait une baisse des pensions ou une augmentation des cotisations, soit une baisse du pouvoir d’achat pour les retraités ou pour les actifs, voire pour les deux. C’est inacceptable. Notre système connaît un déficit que la réforme a limité. Mais l’effort reste insuffisant.
Lors de son discours de politique générale, le Premier ministre s’est dit ouvert à des aménagements raisonnables et justes, en concertation avec les partenaires sociaux, tout en rappelant qu’il est impératif de préserver l’équilibre durable de notre système par répartition. Il a fixé deux priorités : l’emploi des seniors et le système d’indemnisation du chômage.
Certaines limites de la loi du 14 avril 2023 peuvent être corrigées. Les questions de la retraite progressive, de l’usure professionnelle ou de l’égalité entre les femmes et les hommes face à la retraite méritent mieux que des fins de non-recevoir.
Votre proposition de loi menace nos pensions et il vaudrait mieux s’atteler à améliorer le soutien aux travailleurs ayant des enfants et le taux d’emploi. L’intérêt des Français doit prévaloir sans opposer retraités et actifs. Nous voterons contre ce texte.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Marine Le Pen est tartufe sur les questions sociales comme sur les autres.
Tartufe parce qu’elle a adhéré à un parti fondé sur l’ultra-libéralisme, la xénophobie et un mépris profond pour les conquêtes de la République sociale. Elle a adhéré à un parti dirigé par son père, qui qualifiait le Smic d’erreur économique, dénonçait l’État‑providence, prônait la dérégulation et la casse des protections sociales, adulait Reagan et désignait le secteur public comme un obstacle à la compétitivité.
Tartufe parce qu’elle a participé à la structuration de ce parti qu’elle préside aujourd’hui et dont le programme souligne qu’il est nécessaire de réduire la durée d’indemnisation du chômage, pour inciter les gens à reprendre un emploi plus rapidement.
Tartufe parce qu’elle a déclaré, en janvier 2022, que les allocataires du revenu de solidarité active devraient travailler quelques heures par semaine, stigmatisant ainsi les plus pauvres.
Tartufe parce qu’elle a dit, en 2018, qu’il fallait réduire les aides sociales, rendant ainsi hommage à son père, qui déclarait que la protection sociale était un luxe que la France ne pouvait plus se permettre.
Tartufe parce que le programme du RN proposait en 2012 la retraite à 65 ans avant de changer sous la pression de l’opinion.
Tartufe parce que le RN a continué de tergiverser sur ces questions lors de la campagne législative de 2024, oscillant entre différentes positions incohérentes et s’alliant même à M. Éric Ciotti, défenseur de la retraite à 65 ans.
Tartufe parce que le RN a refusé de voter l’abrogation de la réforme des retraites en empruntant le chemin le plus solide pour y parvenir, celui qu’offrent nos amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Il est impossible de vous faire confiance. Vous êtes insincères et vous restez les ennemis de la question sociale.
M. Philippe Vigier (Dem). Ce texte supprime la réforme des retraites. Mais il ne dit rien du chiffrage. Au-delà des 10 milliards d’euros de déficit annoncés, l’État ajoute déjà 40 milliards d’euros. Il manque donc en vérité 50 milliards d’euros, ce qui signifie que les pensions devront baisser.
Je n’évoquerai pas les imprécisions et les différents âges de départ à la retraite avancés par le RN. Cependant, il vous faudra expliquer ce que vous ferez de la revalorisation des petites retraites que nous avons instaurée et que votre texte propose de balayer. Il vous faudra expliquer ce qu’il adviendra des dispositifs que nous avons mis en place pour les carrières longues. Il vous faudra expliquer que la clause de revoyure en 2026, que notre groupe a imposée, devra être oubliée. Il vous faudra expliquer que le dispositif ambitieux que nous avons voté pour les fins de carrière, en particulier chez les femmes, devra être balayé, comme les avantages attribués aux sapeurs-pompiers et la possibilité de rachat des trimestres d’études.
M. François Gernigon (HOR). Cette proposition de loi prétend restaurer un système de retraite plus juste en annulant les réformes récentes sur l’âge de départ à la retraite et la durée de cotisation. Derrière les annonces simplistes, il se cache une réalité préoccupante.
Notre système de retraite repose sur un principe fondamental : l’équilibre entre les cotisations des actifs et les pensions des retraités. Ce rapport est déjà sous pression : nous ne comptons plus 4 actifs pour financer 1 retraité mais à peine 1,7. Face à ce constat, les réformes que nous avons engagées sont indispensables pour éviter un effondrement financier. Le RN propose pourtant de revenir dessus sans alternative de financement crédible. Votre contre‑budget, qui prévoit difficilement 13 milliards d’euros d’économies, omet le coût colossal de cette proposition. S’agit-il d’un manque de sérieux ou d’une volonté de tromper les Français ?
Trois possibilités s’offrent à nous : diminuer les pensions, augmenter les cotisations ou travailler plus longtemps. En refusant de choisir, vous mettez en péril le système de retraite. Concentrons-nous plutôt sur des questions concrètes comme le soutien à l’emploi des seniors et le renforcement de la transmission des savoirs dans l’entreprise.
Nous voterons contre cette proposition de loi populiste et irresponsable, preuve de l’imposture du RN sur ces questions essentielles.
M. Stéphane Viry (LIOT). Notre groupe souhaite que la question des retraites soit reconsidérée car la situation actuelle n’est pas satisfaisante. Nous éprouvons tous de l’amertume en songeant à la méthode employée en 2023, qui a enflammé le pays et produit des résultats qui ne sont pas à la hauteur en matière de financement du système comme de justice sociale.
Pour notre groupe, la conférence de financement constitue une base. Il s’agit de se mettre autour de la table et d’en finir avec les chicailleries pour réfléchir aux moyens de garantir à tous les Français des retraites d’un montant suffisant en tenant compte des situations individuelles, des parcours professionnels et de la pénibilité.
Notre groupe est prêt à trouver des compromis. Mais cette proposition de loi n’est pas sérieuse. Le groupe RN joue aux apprentis sorciers en proposant de déséquilibrer les bases mêmes de notre régime de financement. Nous aurions apprécié que le texte évoque l’emploi des seniors ainsi que de nouvelles recettes, qu’il comporte des incitations concrètes à travailler plus longtemps, mais aussi des mesures de justice sociale. Cette proposition de loi opportuniste ne permet pas de corriger un système insatisfaisant.
M. Yannick Monnet (GDR). Il y a deux débats. Le premier oppose les partisans et les opposants à la réforme des retraites. Le second porte sur le fait que le RN soit la force qui s’empare de cette question.
Certes, il s’agit d’un coup politique et d’opportunisme. Le RN étant à la botte du capital, ses élus seraient même embêtés que cette proposition de loi soit votée. Cette question cruciale mérite mieux car le RN est un fossoyeur de la question sociale, notamment sur le sujet des retraites. En témoignent les déclarations de son président, Jordan Bardella, l’opposition systématique de ses élus à une augmentation des recettes de la sécurité sociale et son absence de soutien à la grande mobilisation populaire contre cette réforme.
Il s’agit d’un coup politique, monsieur Ménagé, et vous vous fichez bien de la possibilité pour cette proposition de loi d’avancer. Si vous étiez convaincus par ce que vous dites, vous laisseriez ceux qui défendent cette abrogation depuis le début porter ce combat.
Au sein du groupe Gauche Démocrate et Républicaine, deux positions cohabitent quant à cette proposition de loi. Pour ma part, je considère qu’il s’agit de défendre l’intérêt supérieur et j’ai toujours accordé quelque vertu au vol des voleurs. Je voterai le texte, s’il reste en l’état.
M. le rapporteur. Madame Thevenot, vous avez repris notre slogan : « Si le peuple vote, le peuple gagne ». Le peuple a gagné le 7 juillet et vous avez perdu. Vous n’aviez déjà pas de majorité à l’époque de la réforme des retraites et vous êtes aujourd’hui plus minoritaire encore sur la question.
Avec la morgue habituelle des élus d’Ensemble pour la République, vous avez rappelé la nécessité de redresser les comptes publics. Un peu d’humilité, Madame Thevenot ! Vous avez participé à un gouvernement qui a généré 1 000 milliards d’euros de dette en sept ans. Vous avez été le chantre de la pérennité du système de retraite, dont vous avez prétendu qu’il serait équilibré par la réforme. Mais le COR vous donne tort.
Concernant un éventuel lien avec LFI, je rappelle que votre président de groupe a appelé la France entière à voter pour LFI contre le RN.
Madame Cathala, votre décalage avec les travailleurs fait du RN le premier parti chez les ouvriers. Ceux qui travaillent, ceux qui se lèvent tôt et ceux qui ont le dos cassé vous abandonnent d’élection en élection. Cela s’est d’ailleurs mal terminé pour M. Roussel balayé dès le premier tour.
Les sondages ont montré que le RN était le parti qui avait combattu de la manière la plus intelligente et la plus efficace la réforme des retraites. Vous avez fait le choix de l’obstruction, qui a notamment empêché le débat à l’Assemblée nationale sur l’article 7 portant sur le report de l’âge légal. Vous avez choisi de faire le spectacle dans l’hémicycle et vous avez été les idiots utiles du gouvernement. Vous faites de même en ce moment sur le budget.
J’ai évoqué un certain nombre de pistes de financement à moyen et à long termes. Nous devons prévoir et prendre en compte la natalité, la productivité et le taux d’emploi. Il est plus simple de demander aux Français de travailler deux ans de plus que de se pencher sur les sujets macroéconomiques et la relance de notre économie.
Madame Cathala, je n’ai pas bien compris votre position de vote. Mme Alma Dufour reconnaissait hier, sur un plateau de télévision, qu’il serait bon que LFI vote ce texte. J’interpelle un certain nombre de députés, qui ont été élus à quelques voix près, pour leur rappeler qu’une dissolution est probable dans quelques mois...
M. le président Frédéric Valletoux. Je vous invite tous à rester concentrés sur le fond de la proposition de loi.
M. le rapporteur. Madame Runel, vous avez indiqué que Jordan Bardella aurait défendu un départ en retraite à 66 ans. Je vous invite à reprendre notre programme : nous défendons une retraite progressive, à 60 ans et 40 annuités pour ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans et à 62 ans et 42 annuités pour les autres.
Concernant l’amendement au PLFSS, vous continuez à mentir aux Français. Je comprends que le Parti socialiste soit en difficulté sur cette question. Vous avez fait élire M. François Hollande, qui a soutenu la réforme Touraine et qui siège dans votre groupe, alors que vous avez été élus en juillet en défendant la retraite à 60 ans avec le NFP.
Monsieur Bazin, j’entends votre argument sur la question de la génération née en 1955. Pour le calcul de la surcote, il fallait inclure tous ceux qui liquideront leurs droits de façon tardive.
Monsieur Lucas-Lundy, vous avez évoqué de supposées tartuferies. Vous êtes spécialiste en la matière. Vous avez fait élire deux fois Emmanuel Macron, qui a imposé la réforme des retraites, Élisabeth Borne, dont le gouvernement l’a portée, et vous êtes allié au Parti socialiste, qui a institué les 43 annuités.
Monsieur Vigier, vous avez manqué d’efficacité dans votre lecture du texte. Nous ne remettons pas en cause les éléments que vous avez évoqués et les pompiers ne seront pas lésés. Au contraire, appartenant à la catégorie active, ils partiront à la retraite deux ans plus tôt grâce à cette proposition de loi. Je suis en faveur des clauses de revoyure mais il y en a déjà eu une sur cette réforme, le 7 juillet dernier.
Monsieur Viry, nous nous retrouvons tous autour de ce constat : à long terme, le système n’est pas équilibré. Je vous invite à soutenir la conférence de financement, qui permettra de trouver des réponses. Quant à notre dispositif, dont vous avez dit qu’il n’était pas sérieux, sachez que nous avons repris celui prévu par M. Charles de Courson.
Enfin, je remercie M. Yannick Monnet. Nous devrions tous travailler pour les Français, dès lors que nous sommes élus.
M. le président Frédéric Valletoux. Pour les deux premiers articles de la proposition de loi, je vous indique avoir été saisi par treize députés du groupe RN d’une demande de vote par scrutin. Aux termes de l’alinéa 2 de l’article 44 du Règlement de l’Assemblée nationale, le scrutin est de droit quand il est demandé par au moins 10 % des membres de la commission. Nous procèderons donc à un vote par scrutin sur ces deux articles.
Article 1er : Abrogation du report de l’âge légal de départ à la retraite et autres mesures d’âge
Amendement AS11 de M. Stéphane Viry
M. Stéphane Viry (LIOT). Cet amendement renforce le mécanisme du cumul emploi‑retraite, qui concerne environ 482 000 personnes, chiffre quasiment inchangé depuis une quinzaine d’années. Pourtant, les retraités qui ont recours à ce dispositif voient leurs revenus s’accroître et ils permettent de financer le système grâce à leurs cotisations sociales.
Je propose de soumettre la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) à une obligation de fournir un document informatif concernant le cumul emploi-retraite aux assurés qui s’apprêtent à atteindre l’âge mentionné au premier alinéa.
M. le rapporteur. Effectivement, moins de 5 % des retraités déclarent exercer une activité professionnelle tout en percevant une pension. Le cumul emploi-retraite constitue un dispositif utile, qui permet d’augmenter le taux d’emploi des seniors. Il semble plus adapté qu’un éventuel index senior.
L’obligation d’information me semble aller dans le bon sens. Avis favorable.
Mme Stéphanie Rist (EPR). Cet amendement nous rappelle que la réforme comportait des mesures pour les fins de carrière, telles que le cumul emploi-retraite mais aussi le départ progressif pour les agents de la fonction publique, qui était très attendu. Votre proposition de loi vise aussi à abroger cette dernière possibilité.
M. Thibault Bazin (DR). Je suis d’accord avec notre collègue Stéphane Viry. Néanmoins, il serait peut-être possible d’améliorer cet amendement avant la séance publique, la Cnav ne traitant pas tous les futurs ayants droit.
Il faut aussi aller plus loin sur l’assouplissement de ce dispositif, notamment pour les personnes – des femmes le plus souvent – qui ont des carrières incomplètes et qui sont confrontées à des plafonds, ce qui est injuste car elles perçoivent les retraites les plus basses.
Enfin, nous avions défendu un contrat de travail à durée indéterminée de fin de carrière, notamment pour les seniors éloignés de l’emploi. Cette mesure a été censurée par le Conseil constitutionnel car elle n’était pas prévue dans le projet de loi initial. Il faut remettre cette question sur la table.
M. René Lioret (RN). L’idée défendue par cet amendement est bienvenue quand de nombreux retraités souhaitent reprendre une activité professionnelle pour compléter leur pension ou rester actifs. L’information aujourd’hui reçue est défaillante et seuls six retraités sur dix connaissent ce mécanisme. Le pourcentage de bénéficiaires stagne et il reste bien inférieur à celui atteint dans les pays voisins.
Le programme du RN met l’accent sur la nécessité de défendre le pouvoir d’achat des Français mais également de soutenir l’emploi dans tous les secteurs. En rendant plus accessible ce dispositif, nous offrons à nos aînés une plus grande autonomie financière, tout en répondant aux besoins du marché du travail dans des domaines qui connaissent des pénuries de main-d’œuvre comme la santé, l’éducation ou les services à la personne. Il peut contribuer à lutter contre les déserts médicaux.
M. Fabien Di Filippo (DR). Le cumul emploi-retraite pose encore des problèmes. En reprenant une activité, les retraités risquent des pertes de pension qui restent définitives dans de nombreux cas. Il faut aussi mettre l’accent sur les personnes ayant eu des carrières incomplètes, qui sont celles ayant le plus besoin de travailler.
Plus largement, nous constatons combien les répercussions du « quoi qu’il en coûte » représentent un fardeau financier pour l’État et pour chaque Français. Or, les mesures dont nous discutons aujourd’hui pèseraient sur les comptes publics. Avant de me prononcer sur cette proposition de loi, j’ai besoin de savoir comment vous en financeriez le coût.
M. François Gernigon (HOR). Je suis favorable à cet amendement. Plutôt que d’abroger la réforme des retraites, il faudrait une loi relative au statut du travailleur senior et à son accompagnement dans le maintien à l’emploi, notamment à travers la transmission du savoir et des compétences.
M. le rapporteur. Madame Rist, vous avez raison : il faut encore développer les dispositifs tels que le cumul emploi-retraite, le départ progressif ou les mécanismes de tutorat, pour une augmentation du taux d’emploi des seniors. En revanche, dans la réforme, vous avez repoussé l’âge de départ à la retraite pour la catégorie active, ce qui génère un certain nombre de perdants.
Monsieur Bazin, il serait effectivement intéressant de retravailler l’amendement pour intégrer les autres régimes.
Je souscris au propos de M. Di Filippo : la question du financement à long terme du système par répartition doit nous occuper. Il faut néanmoins rappeler que ce système n’existe déjà plus puisqu’un tiers de ses dépenses ne sont pas financées par les cotisations. L’abrogation de la réforme coûterait une dizaine de milliards d’euros. Mais, dès qu’on reporte l’âge de départ de deux ans, on observe des effets d’éviction puisque, au-delà d’un certain âge, ceux qui travaillent sont plus exposés au chômage, à l’invalidité et aux maladies professionnelles. Ainsi, un Français sur deux parvient à l’âge de la retraite sans être au travail. Le coût de ces effets est d’environ 5 milliards d’euros par an. Des leviers d’action existent, notamment ceux du taux emploi et de la natalité.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS27 du rapporteur.
M. le président Frédéric Valletoux. Avant que nous ne passions au vote par scrutin, plusieurs députés souhaitent prendre la parole sur l’article 1er.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Ce texte est très mauvais. Hier, vous avez communiqué un projet de rapport dans lequel vous précisez que le relèvement du taux de cotisation n’est pas pertinent. Ceci signifie que tout le monde paiera, sauf les hauts salaires protégés par le plafond de la sécurité sociale, et les grandes entreprises préservées par les exonérations de cotisations sociales que vous avez sauvées hier soir.
Vous ouvrez aussi des pistes angoissantes, expliquant notamment que le financement passera par la natalité. En Hongrie ou en Pologne, nous avons vu ce que font vos amis quand ils tiennent ce genre de propos : ils interdisent l’interruption volontaire de grossesse. Et, quand bien même la natalité augmenterait, il faudrait des années pour que cette hausse ait des conséquences sur le financement du système.
Vous proposez aussi de baisser les frais de gestion de la sécurité sociale, qui ne représentent qu’1 % de son budget. Que ferez-vous, à part licencier ?
Votre rapport estime que nous avons un problème avec le taux d’emploi des personnes âgées de 60 à 65 ans. Ainsi, pour baisser l’âge de départ à 62 ans, vous comptez mettre plus de gens au travail à 62 ans !
Enfin, vous concluez en précisant qu’il faut utiliser l’intelligence artificielle pour doper la productivité.
Mme Justine Gruet (DR). Je fais confiance au Premier ministre pour mener à bien les actions nécessaires à la pérennisation du système par répartition. Nous l’avons dit quand la réforme des retraites était discutée : si le système s’effondre, ce ne sont pas ceux qui ont le plus de moyens qui seront pénalisés à l’âge de la retraite. Le Premier ministre a souligné que nous devions travailler ensemble, avec les partenaires sociaux, pour trouver des solutions.
Je trouve démagogique de présenter un texte qui propose des solutions simples à un problème complexe et de le faire à l’occasion d’une niche parlementaire, qui ne nous laissera pas le temps de discuter des sujets de fond.
M. Thibault Bazin (DR). Vous avez évoqué les effets d’éviction. Mais le taux d’emploi des 55‑59 ans est passé de 50,4 % en 2000 à 77 % en 2023. La progression est aussi significative pour les 60‑64 ans, avec respectivement 11,2 % en 2000 et 38,9 % en 2023. Quand l’âge est relevé, le taux d’emploi s’améliore, ce qui crée des recettes tout en générant moins de dépenses.
Il y a un problème dans votre analyse économique. Nous nous opposerons à cet article.
M. Christophe Bentz (RN). Je m’adresse aux collègues qui ont voté pour Emmanuel Macron aux seconds tours des élections présidentielles de 2017 et 2022, avant de passer un accord avec lui en 2024 : vous êtes caricaturaux quand vous employez des termes comme « mensonge », « escroquerie » ou « imposture ». Vous pouvez ne pas croire en notre sincérité. Mais vous devriez mettre fin à votre comportement puéril et sectaire.
Je remercie le porte-parole du Parti communiste, Léon Deffontaines, ainsi que notre collègue Yannick Monnet, de sortir du sectarisme habituel pour défendre les Français qui souffrent et qui travaillent dur. Voter une proposition de loi du RN, si vous en approuvez le fond, ne vous rendra pas radioactifs. Votez en vous pinçant le nez si vous le souhaitez, mais faites‑le en pensant aux Français.
M. Fabien Di Filippo (DR). Avant de voter cet article, il faut en mesurer les conséquences financières, dont le possible appauvrissement de ceux que vous pensez défendre. Cette proposition de loi ne permettra pas d’augmenter le taux d’emploi. Elle le fera baisser.
La réforme des retraites n’a pas résolu le problème auquel notre système est confronté et qui reste avant tout démographique. Quand nous ne compterons plus que 1,5 actif pour 1 retraité, nous ne pourrons plus financer qu’un socle minimal et nous basculerons dans un système par capitalisation individuelle.
Votre texte entraînerait un creusement de la dette, une accélération de l’effet boule de neige de ses intérêts et un appauvrissement de la population.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Le RN est un parti de menteurs. Ce texte est un coup d’un soir législatif puisque vous n’avez pas la capacité de le mettre à l’ordre du jour du Sénat, où vous n’avez pas de groupe – heureusement ! Vous n’abrogerez pas la réforme des retraites. Il ne s’agit que d’esbroufe. Cependant, vous auriez pu agir en censurant le gouvernement de Michel Barnier ou en votant nos amendements.
Vous nous reprochez d’avoir appelé au barrage républicain. Je l’assume : face à l’extrême droite, je choisirai toujours n’importe qui. De votre côté, vous avez fait élire dix‑sept députés partisans d’Éric Ciotti, en faveur de la retraite à 65 ans. Nous n’avons aucune leçon à recevoir de votre part !
M. Philippe Vigier (Dem). La seule question qui vaille est de savoir si vos mesures sont financées. Comme elles ne le sont pas, ce seront toujours les mêmes qui souffriront : les classes moyennes et les petits retraités. La réforme des retraites prévoyait certains aménagements. Mais il faut aller plus loin, notamment sur les questions de la pénibilité et des petites retraites.
Le COR et le haut‑commissaire au plan l’ont rappelé : l’État dépense déjà près de 50 milliards d’euros pour équilibrer le système.
Nous nous opposerons à cet article.
Mme Prisca Thevenot (EPR). Les dernières prises de parole le montrent bien : ce texte n’est qu’un prétexte pour simuler une vaine opposition avec LFI. Comment financerez‑vous les mesures proposées ? Ne me répondez pas que ce sera grâce à la capacité des femmes de faire des enfants. Si cette proposition de loi était adoptée, l’ensemble des retraités verraient leurs pensions de retraite baisser de façon immédiate.
M. Louis Boyard (LFI-NFP). Je voudrais dénoncer le culot du RN. Lors de la réforme des retraites, vous n’étiez pas dans la rue et vous avez fait le choix de travailler avec Emmanuel Macron pour « améliorer » le texte. Les Français n’ont pas la mémoire courte. Ils n’oublieront pas les propos tenus par Jordan Bardella pendant les dernières campagnes.
Vous n’avez pas voté les amendements du NFP, qui prévoyaient de financer l’abrogation en taxant les personnes gagnant plus de 4 000 euros par mois. Vous avez également voté contre la censure du Gouvernement et contre la destitution d’Emmanuel Macron, dont vous êtes l’assurance vie.
Votre proposition de loi a été écrite avec les pieds. Les mesures prévues pour la financer sont ridicules – le réarmement démographique cher à Emmanuel Macron ou l’augmentation de 1 000 % des droits sur l’alcool et les tabacs... Vous mentez aux Français et vous jouez avec leurs espoirs. Je veux les rassurer : le 28 novembre, nous pourrons voter la proposition de loi du NFP. Elle prévoit un financement pour l’abrogation et elle pourra être discutée au Sénat.
M. le rapporteur. Monsieur Clouet, nous ne forcerons pas les femmes à avoir des enfants. Nous voulons juste leur donner la possibilité matérielle d’en avoir si elles le souhaitent. La Chine n’est pas notre modèle.
Monsieur Bazin, monsieur Di Filippo et madame Thevenot, vous avez évoqué la protection des retraités et de leur pouvoir d’achat. Mais, dans les prochains jours, nous allons débattre de la désindexation des retraites sur proposition d’un gouvernement que vous soutenez ensemble. Vous prévoyez donc de diminuer les retraites alors que nous avons connu une inflation inédite ces dernières années.
Monsieur Di Filippo, en 2023, vous avez voté la motion de censure pour faire tomber le gouvernement sur la réforme des retraites. Vous êtes-vous vendu pour une circonscription ? Vous êtes l’incohérence faite homme.
Enfin, dans notre contre-budget, nous ne proposons pas 15 milliards d’euros d’économies mais 15 milliards d’euros d’économies supplémentaires, à ajouter aux 60 milliards d’euros déjà prévus. Quel que soit le coût exact de l’abrogation, il faut le mettre en regard des 15 milliards d’euros qui peuvent être récupérés sur la fraude à la TVA et des 25 milliards d’euros qui peuvent l’être sur la fraude sociale. Nous faisons le choix de frapper les profiteurs d’en haut et d’en bas pour redonner à ceux qui travaillent.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous allons procéder au scrutin.
Plusieurs députés LFI-NP. Nous ne participerons pas à cette mascarade.
Il est procédé au vote, par scrutin public et par appel nominal, de l’article 1er.
Votent pour :
M. Christophe Bentz, M. Théo Bernhardt, Mme Sandra Delannoy, Mme Sandrine Dogor-Such, M. Gaëtan Dussausaye, M. Guillaume Florquin, M. Thierry Frappé, Mme Katiana Levavasseur, M. René Lioret, Mme Christine Loir, Mme Joëlle Mélin, M. Thomas Ménagé, M. Yannick Monnet, M. Serge Muller, Mme Lisette Pollet, Mme Angélique Ranc et M. Emmanuel Taché de la Pagerie.
Votent contre :
M. Thibault Bazin, Mme Sylvie Bonnet, Mme Nathalie Colin-Oesterlé, M. Paul‑André Colombani, Mme Josiane Corneloup, Mme Sophie Delorme, M. Fabien Di Filippo, M. Olivier Falorni, M. François Gernigon, M. Jean-Carles Grelier, Mme Justine Gruet, M. Jérôme Guedj, M. Michel Lauzzana, Mme Christine Le Nabour, Mme Brigitte Liso, Mme Joséphine Missoffe, M. Christophe Mongardien, M. Laurent Panifous, Mme Stéphanie Rist, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, M. Arnaud Simion, Mme Prisca Thevenot, M. Nicolas Turquois, M. Frédéric Valletoux, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier et M. Stéphane Viry.
S’abstiennent :
Mme Ségolène Amiot, M. Joël Aviragnet, Mme Béatrice Bellay, Mme Anaïs Belouassa‑Cherifi, M. Louis Boyard, M. Elie Califer, M. Hadrien Clouet, M. Hendrik Davi, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Karen Erodi, Mme Océane Godard, Mme Zahia Hamdane, Mme Florence Herouin‑Léautey, Mme Élise Leboucher, M. Benjamin Lucas‑Lundy, M. Damien Maudet, M. Sébastien Peytavie, M. Jean-Hugues Ratenon et Mme Sandrine Runel.
Les résultats du scrutin sont donc les suivants :
Nombre de votants : 64
Pour : 17
Contre : 28
Abstentions : 19
En conséquence, la commission rejette l’article 1er.
Article 2 : Abrogation de la durée d’assurance requise pour bénéficier d’un départ à la retraite à taux plein
Il est procédé au vote, par scrutin public et par appel nominal, de l’article 2.
Votent pour :
M. Christophe Bentz, M. Théo Bernhardt, Mme Sandra Delannoy, Mme Sandrine Dogor‑Such, M. Gaëtan Dussausaye, M. Guillaume Florquin, M. Thierry Frappé, Mme Katiana Levavasseur, M. René Lioret, Mme Christine Loir, Mme Joëlle Mélin, M. Thomas Ménagé, M. Serge Muller, Mme Lisette Pollet, Mme Angélique Ranc et M. Emmanuel Taché de la Pagerie.
Votent contre :
M. Thibault Bazin, Mme Sylvie Bonnet, Mme Nathalie Colin‑Oesterlé, M. Paul‑André Colombani, Mme Sophie Delorme, M. Fabien Di Filippo, M. Olivier Falorni, M. Jean‑Carles Grelier, M. Michel Lauzzana, Mme Christine Le Nabour, Mme Brigitte Liso, M. Benjamin Lucas‑Lundy, Mme Joséphine Missoffe, Mme Stéphanie Rist, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, M. Arnaud Simion, Mme Prisca Thevenot, M. Frédéric Valletoux, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier et M. Stéphane Viry.
S’abstiennent :
Mme Ségolène Amiot, Mme Béatrice Bellay, Mme Anaïs Belouassa‑Cherifi, M. Louis Boyard, M. Elie Califer, M. Hadrien Clouet, M. Hendrik Davi, Mme Karen Erodi, Mme Florence Herouin‑Léautey, Mme Élise Leboucher, M. Damien Maudet et Mme Sandrine Runel.
Les résultats du scrutin sont donc les suivants :
Nombre de votants : 50
Pour : 16
Contre : 22
Abstentions : 12
En conséquence, la commission rejette l’article 2.
Amendement AS26 de M. Thomas Ménagé
M. le rapporteur. Permettez-moi d’expliquer ce qui vient de se passer à l’intention de ceux qui suivent nos discussions. Les Français ont attendu ce débat pendant des mois, espérant depuis les élections législatives que la majorité absolue qui s’est dégagée en faveur de l’abrogation de la réforme des retraites parviendrait à ce résultat demandé par les urnes. Mais une alliance dont on commence à avoir l’habitude entre le bloc central – macronistes et DR – et le NFP conduit à l’instant, en commission, à renoncer à cette abrogation. Selon le même mécanisme que lors des dernières élections, en s’abstenant, à l’exception – que je salue – des communistes de M. Monnet, l’extrême gauche a permis aux macronistes de se sauver encore une fois. On empêche les Français de partir deux ans plus tôt à la retraite. J’espère que la suite des débats sera plus ouverte et moins sectaire.
L’amendement prévoit l’organisation d’une conférence de financement du système de retraite dans un délai de six mois suivant la promulgation de la loi et, un an après celle-ci, la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur les solutions envisagées. Dans un esprit transpartisan, nous reprenons le dispositif proposé à l’époque par M. Charles de Courson. Il s’agit d’associer les partenaires sociaux au processus, conformément à ce qu’ils demandent.
Je l’ai dit en préambule, mais certains ont fait mine de ne pas l’entendre : l’abrogation n’est qu’une première étape. Il ne s’agit pas du programme d’un parti politique, mais d’un retour à la situation antérieure. Ceci n’équivaut pas à ne rien faire : nous avons notre propre projet de réforme. Aux Français de choisir le programme le plus efficace lors des prochaines échéances législatives et présidentielle !
En attendant, pour préparer l’avenir, il faut réfléchir aux nouvelles sources de financement. Elles ne peuvent se réduire – je le dis notamment à nos collègues du NFP – à des taxes et à des cotisations alors que notre pays est déjà champion en la matière, ses cotisations vieillesse atteignant 28 % du salaire brut contre 18 % en moyenne dans l’Organisation de coopération et de développement économiques. Lors des auditions auxquelles j’aurais aimé qu’assistent nos collègues du NFP, il est apparu que les cotisations vieillesse sont le premier poste de dépenses pour un salarié – 928 euros pour le salaire moyen –, devant le logement – 900 euros. On ne peut pas augmenter les cotisations pour équilibrer la branche vieillesse. Il faut d’autres financements : taux d’emploi, productivité, démographie.
Je vous invite à soutenir cet amendement, qui reprend les propos et les propositions de nombre d’entre vous.
M. Jean-Hugues Ratenon (LFI-NFP). En vous écoutant, je suis très surpris. D’abord, le financement du texte est totalement décousu, hasardeux et dangereux. Deuxièmement, tous ici, et le RN en premier lieu, savent que la proposition de loi, quelle que soit l’issue de son examen en commission – que l’on devine déjà –, n’ira pas bien loin. Elle a une durée de vie très limitée. Alors pourquoi l’avoir déposée ?
À mon sens, il s’agit d’une arnaque, d’un coup politique sans lendemain parlementaire. Cela me révolte. Mais je m’inquiète aussi de votre mépris pour la population. A-t-on pris en compte la détresse des gens qui bossent, qui ont trimé et qui triment ? Le désespoir des salariés ultramarins, qui ne savent plus où donner de la tête, qui sont épuisés, qui souhaitent partir à la retraite ? RN, êtes-vous les traîtres de la retraite ?
Nous, le Nouveau Front populaire, nous avons un plan de financement juste, crédible et équilibré. Nous avons manifesté pendant des jours, des semaines, des mois. Où était le Rassemblement National ? Pire : il y a à peine quarante-huit heures, vous avez voté ici même contre nos amendements visant à abroger la réforme des retraites. Oui, vous êtes vraiment les traîtres de la retraite !
Nous portons la voix des sans-voix, de tous ceux qui souhaitent que nous nous battions pour eux dans cette assemblée. C’est notre responsabilité de parlementaires et d’élus. L’arnaque n’a pas sa place dans cette commission. Rendez-vous le 28 novembre !
M. Fabien Di Filippo (DR). La logique économique du Rassemblement National apparaît d’une fragilité inquiétante : l’idée est d’abroger la réforme des retraites et de voir ensuite seulement, dans le cadre d’une conférence, s’il est possible de financer cette abrogation. Cela finira soit par des prélèvements supplémentaires, soit par une diminution du niveau des pensions. La leçon de la gestion d’Emmanuel Macron ces dernières années est que les promesses chimériques non financées se paient toujours le double, au détriment de tous les Français.
Monsieur le rapporteur, vous m’avez renvoyé à mon vote lors de la motion de censure il y a un an. Je vous avais dit qu’il venait du fait que je refusais, en tant que député, que nous soyons privés d’un vote sur un sujet aussi important. À l’époque déjà, je m’opposais à la réforme parce que, quels que soient les reports d’âge, le système par répartition est condamné à cause de l’état du pays. Il faudra y ajouter un étage de capitalisation individuelle.
Vous avez voté ici même, hier, avec la gauche, des taxes supplémentaires sur les dispositifs d’intéressement, de participation, de primes dépassant 6 000 euros par an pour les salariés. Cela confirme que, quand on fait des promesses chimériques non financées, on finit par les faire payer aux Français, et toujours à ceux qui travaillent ou ont travaillé toute leur vie. Nous ne pouvons pas l’accepter.
M. Stéphane Viry (LIOT). La mesure que propose l’amendement aurait dû figurer dans la proposition de loi. La question du financement est la porte d’entrée : quand on est responsable, avant d’abroger une ressource, on en cherche une autre pour ne pas déséquilibrer le système.
Dans l’absolu, j’approuve l’idée, proposée jadis, d’une conférence de financement pour aller chercher d’autres solutions et ouvrir le champ des possibles, qui dépasse en effet le seul régime par répartition. La proposition de loi de Charles de Courson avait été préparée dans un contexte d’urgence et de tensions sociales. C’est pourquoi elle contenait des mesures chocs pour décaler l’application de la réforme votée en 2023. Le contexte a changé. Je plaide pour que notre assemblée travaille sérieusement et sereinement à un système de financement plus pérenne, pour assurer le paiement durable des pensions.
M. Philippe Vigier (Dem). Notre rapporteur sait bien que cet amendement ne sera jamais appliqué pour une raison simple : le texte que nous examinons est une proposition de loi, qui ne sera jamais reprise au Sénat. Le délai de six mois après promulgation de la loi n’a pas de sens puisque le texte ne sera pas publié. Une conférence est par ailleurs annoncée pour faire le point sur l’état des retraites, les déficits, étudier des solutions alternatives et les moyens d’améliorer le pouvoir d’achat des retraités. L’amendement est inopérant.
M. Gaëtan Dussausaye (RN). De La France insoumise aux Républicains, les critiques envers la proposition de loi abrogeant l’injuste réforme des retraites d’Emmanuel Macron sont les mêmes : le parti unique constitué à l’occasion des élections législatives se porte toujours bien ! Seul problème : c’est au détriment de la France, des Français, de ceux qui travaillent.
Le passage en force de la retraite à 64 ans à coups de 49.3 a été la cause d’un grand malaise démocratique, quasi équivalent à celui qui a suivi le rejet de la Constitution européenne lors du référendum de 2005. Il y a 89 % des Français qui veulent revenir sur cette réforme, 55 % des députés qui se sont fait élire sur la promesse de l’abroger. Au risque de plagier Stéphane Viry : arrêtons les chicailleries et mettons-nous à travailler ensemble !
Le but de cet amendement est simple : mettre un terme à sept années de ce mépris macroniste qui a fait entièrement fi du dialogue social. Il faut chercher des pistes de financement ensemble. Nous en avons déjà proposé un certain nombre : macroéconomiques, concernant le taux d’emploi, la productivité, la natalité.
Soyez à la hauteur des enjeux, répondez à l’injonction du peuple français ! Il vous regarde et ne comprendra pas que, par votre faute, son quotidien ne puisse s’améliorer.
M. Thibault Bazin (DR). Au lieu de se tenir après la promulgation de la loi, la conférence de financement devrait être un préliminaire. C’était d’ailleurs le cas dans l’amendement de nos collègues sénateurs de la droite républicaine. Nous sommes favorables au dialogue. Le Premier ministre l’a dit : il veut ouvrir une concertation avec les partenaires sociaux.
Dans l’amendement, vous évoquez l’emploi des seniors. Cela tombe bien, cela fait partie de ce sur quoi il veut se pencher. Vous mentionnez le renouvellement des générations. C’est un des axes de notre réflexion depuis longtemps ; nous voulons une politique familiale dans la lignée de celle des gaullistes et des communistes juste après la guerre, caractérisée par l’universalité des allocations. Quant à l’harmonisation par le haut des pensions de réversion, dont il existe actuellement treize systèmes différents, elle requiert des financements. Or, vous réduisez justement les financements, ce qui la rend impossible. Nous sommes attachés aux droits conjugaux et familiaux. Il faudra se donner les moyens de relever ce défi. Mais cela passe par l’équilibre de notre système de retraite.
La composition que vous souhaitez pour la conférence correspond à celle du COR. Cela ne créerait-il pas un doublon qui pourrait entraîner des surcoûts ?
M. Hendrik Davi (EcoS). La conférence de financement répond à une demande des syndicats et c’est une bonne idée. Pour cette raison, nous aurions pu voter l’amendement. Mais une petite phrase nous en empêche : « elle propose des pistes afin de relancer la natalité française ». Comme l’a dit Hadrien Clouet, si la natalité française augmente à nouveau aujourd’hui, cela ne produira des effets que dans vingt ou trente ans. De plus, si la France a longtemps fait exception en Europe par son taux de natalité, c’est parce que la caisse d’allocations familiales permettait d’aider les familles et que l’école maternelle accueillait les enfants, contrairement à ce qui a cours en Allemagne.
Si on veut, de manière sociale et sans stigmatiser les femmes, permettre aux familles qui en ont envie d’avoir des enfants, il faut aider les parents. Pour cela, il faut un service public de la petite enfance, aider les parents isolés qui n’arrivent pas à subvenir à leurs besoins et à se loger décemment. Mais cela suppose d’augmenter les cotisations sociales : c’est la seule façon de bien financer la sécurité sociale. Vous proposez exactement le contraire. Sans ces éléments qui favorisent la politique familiale telle que nous la connaissons depuis 1945, la natalité baissera.
Mme Prisca Thevenot (EPR). À notre collègue du Rassemblement National qui propose que nous nous mettions à travailler : faites-le, il est temps ! Nous n’avons cessé de vous demander comment vous financez votre proposition d’abrogation de la réforme des retraites. Et voilà que, dans un amendement caché au fin fond du texte, vous dites que vous allez y réfléchir plus tard et que vous voulez saisir le Gouvernement pour le faire. Si votre travail était sérieux, vous sauriez expliquer comment financer le système de retraite, puisque vous voulez abroger la réforme qui permet ce financement. Si vous n’en êtes pas capables, tournez-vous vers vos amis du jour, La France insoumise, pour améliorer votre proposition de loi. M. Éric Coquerel a annoncé il y a quelques jours un colloque sur le sujet. Vous savez bien que, quand ils déposeront le même texte, vous le voterez.
M. le rapporteur. Monsieur Ratenon, vous avez évoqué différents sujets sociaux à propos desquels je peux vous rejoindre. J’ai du mal à comprendre que vous ayez mis autant de cœur à défendre ceux qui travaillent après vous être félicité de saborder le texte qui leur aurait permis de partir à la retraite plus tôt. Manifester, c’est bien ; voter, c’est mieux. Votre fonction, ce n’est pas d’être dans la rue. C’est d’accompagner et soutenir les partenaires sociaux, bien sûr, et ceux qui se sont mobilisés. Mais votre mandat, ce pour quoi vous êtes payé, c’est de voter quand on vous propose un texte en ce sens. J’ai bien compris l’objectif de votre encart publicitaire pour le 28 novembre. Nous, nous sommes cohérents. Nous avons toujours dit que nous voterions un tel texte de quelque groupe qu’il émane. Nous ne sommes pas là pour défendre une chapelle ou Jean-Luc Mélenchon, mais pour protéger les Français, qui attendent de nous que nous abrogions la réforme des retraites.
Monsieur Di Filippo, selon le COR, à l’horizon 2070, le niveau de vie des personnes retraitées va baisser. C’est la preuve que la réforme n’a apporté aucune solution. Et vous avez pour projet de casser encore plus leur niveau de vie par la désindexation ! La capitalisation, évoquée tout au long des auditions, est l’objet d’un débat depuis plusieurs années. Au-delà du fait que nous sommes tous attachés à la répartition, la question aurait pu se poser si nous pouvions demander aux Français un peu plus d’efforts pour capitaliser. Mais quand les cotisations vieillesse représentent 28 % du salaire, seuls les plus riches ont cette possibilité. Il est donc impossible d’instaurer un tel système.
Lisez les rapports du COR : le système sera équilibré si la croissance est élevée, si les jeunes gens entrent plus tôt sur le marché du travail, si on agit sur d’autres leviers. Vous faites semblant de ne pas entendre nos pistes de financement. Il est vrai qu’elles demandent plus de travail qu’un simple report qui oblige les gens à bosser deux ans de plus. Il s’agit de réindustrialiser le pays et de faire réellement diminuer le chômage – qui va encore augmenter, d’après les données de l’Unedic publiées ce matin, ce qui implique des cotisants en moins et des comptes qui continuent de se déséquilibrer.
Monsieur Davi, je suis d’accord avec vous puisque vous dites ce que j’écris dans le rapport : il faut soutenir les familles en créant des places de crèche, par des services publics qui fonctionnent, des allocations familiales pour accompagner ceux qui veulent avoir des enfants et les familles monoparentales – bref, par une politique sociale globale. Alors ne refusez pas cette conférence, et arrêtez de croire que « natalité » est un gros mot. Ce n’est pas honteux d’avoir des enfants. On en a le droit ! Et c’est le rôle de l’État de soutenir ceux qui souhaitent en avoir, car les bébés qui vont naître, ce sont – à moyen ou long terme, certes – des cotisations supplémentaires pour notre système par répartition.
Madame Thevenot, vous avez mené tout votre combat en faveur de la réforme des retraites au nom de l’équilibrage du système et vous avez échoué. Il est toujours déficitaire. Balayez devant votre porte !
La commission rejette l’amendement.
Article 2 bis (nouveau) : Remise d’un rapport au Parlement sur la diversification des ressources du système de retraite
Article 2 ter (nouveau) : Remise d’un rapport au Parlement sur la création d’une instance confiant diverses compétences aux partenaires sociaux en matière de retraite
Article 2 quater (nouveau) : Remise d’un rapport au Parlement sur le paritarisme au sein des réformes des retraites
Article 2 quinquies (nouveau) : Remise d’un rapport au Parlement sur la natalité et le financement du système de retraite
Article 2 sexies (nouveau) : Remise d’un rapport au Parlement sur la réforme des retraites de 2023
Article 2 septies (nouveau) : Remise d’un rapport au Parlement sur le caractère redistributif du système de retraite
Article 2 octies (nouveau) : Remise d’un rapport au Parlement sur l’impact des différentes réformes du système de retraite depuis 2000
Amendements AS5, AS6, AS7 et AS8 de M. Stéphane Viry, amendements AS9 de M. Stéphane Viry et AS13 de Mme Prisca Thevenot (discussion commune), amendement AS12 de Mme Prisca Thevenot, amendement AS14 de Mme Prisca Thevenot et sous‑amendements AS28, AS29 et AS30 de M. Thibault Bazin
M. Stéphane Viry (LIOT). L’amendement sur la conférence de financement venant d’être rejeté, je propose dans l’amendement AS5 une autre solution, traditionnelle mais parfois utile : un rapport du Gouvernement au Parlement. Remis dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, il porterait sur les pistes de financement possibles. Le rapporteur l’a dit : le COR fait une description inquiétante de l’avenir à l’échéance de 2070. Il faut donc trouver de l’argent pour le réinjecter dans le système. À cause du mur démographique devant nous, le régime par répartition devra être modifié, complété et diversifié. Parmi ces sources de financement nouvelles pourrait figurer un régime universel à points. En effet, ce n’est pas parce qu’Édouard Philippe, alors Premier ministre, a échoué à appliquer à la France un tel régime, juste et tenant compte de l’individualité des parcours, qu’il ne s’agit pas d’une bonne solution.
Les deux amendements suivants renforcent le dialogue social. Le sujet des retraites est lié à celui du travail : les partenaires sociaux, employeurs comme salariés, doivent s’en saisir. Il faut leur redonner le rôle qui leur revient dans le processus de réforme.
Dans l’amendement AS8, j’évoque à mon tour, mais sans dogmatisme, la question de la natalité. Pour un régime par répartition, la dynamique démographique est essentielle. Faire l’impasse sur le sujet pour des raisons doctrinales serait une erreur. Voyons comment investir dans une nouvelle politique familiale, car l’actuelle fait défaut.
Dans l’amendement AS9, enfin, je propose d’évaluer dès à présent une partie de la réforme de 2023, notamment s’agissant des carrières dites hachées, des carrières longues, de la pénibilité et de l’égalité des sexes. On ne sait pas si, dans ces domaines, la réforme porte ses fruits comme le Gouvernement l’avait annoncé. L’équité et la justice sociale sont pourtant cruciales.
Mme Prisca Thevenot (EPR). Nos amendements tendent à l’évaluation de la réforme de 2023 pour que nous puissions fonder des propositions sur du concret – au contraire de ce que vous faites, monsieur le rapporteur.
Nous sommes favorables aux amendements de M. Viry. Je le dis sans provocation et avec la plus grande bienveillance : nous devons pouvoir discuter de démographie, de natalité et de famille. Je me réjouis que nous puissions trouver un chemin dans ce domaine. En début d’année, quand le Président de la République a parlé de réarmement démographique, j’ai plutôt entendu des quolibets.
À la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, nous travaillons sur ce sujet dans sa globalité, incluant les questions de l’infertilité féminine et masculine et des modes de garde. Nous formulerons des propositions par l’intermédiaire de la présidente Véronique Riotton. J’espère que nous pourrons alors compter sur toutes les voix qui se sont fait entendre ici aujourd’hui.
M. Thibault Bazin (DR). Le dernier rapport du COR fait état de risques non négligeables sur l’avenir de notre système de retraite, qu’il s’agisse du taux d’emploi ou du taux de renouvellement des générations. Je propose que les rapports demandés approfondissent les questions de dynamique démographique, des mères de famille qui travaillent et du taux d’emploi des seniors. Ils pourront ainsi dessiner des trajectoires en fonction de l’évolution des politiques publiques. Ceci nous permettra de débattre de la stratégie à adopter, en respectant bien sûr la liberté et les aspirations de chaque citoyen.
M. le rapporteur. Avis défavorable à l’ensemble des amendements et des sous‑amendements. Ce n’est pas que je juge inopportuns les sujets qui y sont évoqués, bien au contraire. Mais la multiplication des demandes de rapport au Gouvernement risque de submerger celui-ci, qui a beaucoup à faire, et de nourrir la complexité administrative.
Madame Thevenot, l’article L. 114‑2 du code de la sécurité sociale confie au COR la mission de « suivre l’évolution des écarts et inégalités de pensions des femmes et des hommes et d’analyser les phénomènes pénalisant les retraites des femmes ». Autrement dit, vous demandez un rapport au Gouvernement alors qu’il existe un organisme dont la fonction est de traiter ce sujet. C’est symptomatique de la bureaucratie.
En revanche, vous évoquez un vrai sujet en abordant ce que le Président de la République a appelé le réarmement démographique. Il s’est réveillé un peu tard à ce sujet. Vous‑même, vous étiez l’une des plus virulentes face à notre collègue Laure Lavalette quand elle parlait natalité. Mais maintenant qu’il a donné le signal... Et vous avez raison : ce n’est pas un gros mot.
En matière de retraites, les femmes subissent une injustice criante. L’écart de niveau de leur pension avec celle des hommes, de 40 % en 2021 selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, est l’un des éléments majeurs qui a motivé le combat du Rassemblement National contre la réforme des retraites. C’était couru d’avance, et même avoué d’avance : M. Franck Riester avait reconnu sur les plateaux de télévision que les femmes seraient les plus pénalisées par la réforme. Vous-même et les autres membres de la majorité de l’époque avez tenté de le masquer et vous êtes passés en force. La réforme n’a fait qu’aggraver les inégalités au détriment des femmes, qui partiront à 63,2 ans en moyenne contre 62,7 ans pour les hommes.
Je le répète, tous les sujets abordés dans les amendements et les sous-amendements sont parfaitement pertinents. Mais laissons le COR faire son travail et faisons le nôtre : quand un texte permet d’abroger une réforme dont vous énumérez tous les aspects problématiques, faites les bons choix – pas comme ce matin où on a vu réapparaître l’alliance de la carpe et du lapin, le parti unique allant de M. Wauquiez et M. Philippe à M. Mélenchon. Les électeurs jugeront.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Je ne vois pas de difficulté à ce que l’on parle natalité à condition de rompre avec l’injonction permanente aux femmes de faire des enfants, d’admettre la réalité de l’infertilité liée aux pesticides et aux perturbateurs endocriniens que vous avez souvent refusé de combattre, de questionner la précarité des jeunes couples et des familles monoparentales – très souvent des femmes – et d’être prêts à déconstruire la société patriarcale qui discrimine les femmes, notamment celles qui élèvent seules leurs enfants.
Et si l’on décide de lever tous les tabous concernant les sources de financement de nos retraites et de vitalité économique, chers collègues RN, DR et de la Macronie, il va falloir rompre avec vos orientations en matière d’immigration. Si on applique la politique migratoire que vous souhaitez, ce sera la retraite à 68 ans parce qu’il n’y aura plus beaucoup de cotisants ! Dans ce domaine aussi, que tout le monde ouvre ses chakras !
Concernant les amendements et sous-amendements, je suis favorable à ce que nous ayons un maximum de rapports pour éclairer nos débats.
M. Théo Bernhardt (RN). L’identification de nouvelles sources de financement visée par l’amendement AS5 est cruciale. C’est précisément pourquoi nous demandons la tenue d’une conférence nationale associant l’ensemble des partenaires sociaux. La demande de rapport n’est pas pour autant pertinente dans la mesure où elle s’adresse aux fossoyeurs mêmes de notre système de retraite. En effet, ce sont les macronistes qui se sont portés en fer de lance dans cette réforme injuste et injustifiée dont personne ne voulait, faisant preuve d’une violence institutionnelle inouïe qui a abîmé notre démocratie et notre République.
Le NFP y prend également part : tout à l’heure encore, comme pendant les élections législatives, il s’est uni à la Macronie. Mais on savait déjà qu’il contribuait à abîmer la démocratie.
Les Républicains, enfin, portent la responsabilité ou, du moins, l’héritage de la gestion calamiteuse de notre pays et de son économie, qui met en danger la pérennité de notre système de retraite. Le modèle par répartition, fondé avant tout sur le nombre de cotisants, est intrinsèquement lié à la natalité. Or, cette question n’a jamais retenu l’attention des Républicains qui ont préféré, lorsqu’ils étaient au pouvoir, offrir aux Français des centres d’accueil pour migrants plutôt que des crèches. Ils sont également coupables de la désindustrialisation continue du pays, faisant de nos usines des ruines et réduisant la création de richesse, donc les prélèvements obligatoires qui financent les retraites. En somme, vos anciens collègues ont préféré dresser le couvert pour leurs amis mondialistes que remplir le frigo de nos grands-parents !
Plutôt que de choisir entre ceux qui ont saboté les fondements de notre système de retraite et ceux qui lui ont porté le coup de grâce pour camoufler leur incompétence, l’auteur de l’amendement devrait se tourner vers le Rassemblement National pour trouver des sources de financement « différentes et novatrices ».
M. Michel Lauzzana (EPR). Je suis favorable à ces amendements. Faire le point sur la réforme des retraites, qui n’est présentée que de manière négative par les oppositions, est une bonne chose. Or, selon le rapport du COR du mois de juin 2024, elle a des effets positifs. Son président Gilbert Cette considère qu’elle est redistributive. Bien qu’imparfaite, elle réduit les inégalités. Par exemple, les écarts de pension entre les hommes et les femmes seront réduits et la progression des pensions des femmes sera, de manière relative, deux fois plus importante que celle des hommes.
Les rapports demandés visent précisément à étudier des pistes de financement, question à laquelle vous n’avez toujours pas répondu. Alors que 44 % de l’augmentation de la dette entre 2017 et 2023 est due aux retraites, on ne peut continuer ainsi. Je m’inquiète pour mes enfants et mes petits-enfants.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi (LFI-NFP). Je remercie le Rassemblement National de respecter la décision du Conseil d’État qui a classé le Rassemblement National à l’extrême droite et La France insoumise à gauche.
Demander un rapport relatif à l’égalité salariale est nécessaire car les lois successives en matière d’égalité professionnelle n’ont pas réduit l’écart de salaires entre les femmes et les hommes. Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques, en 2022, le salaire des femmes était inférieur de 23 % à celui des hommes en moyenne, et de 15 % à temps de travail identique. Si elles perçoivent de plus faibles rémunérations, elles ont également des contrats plus précaires : les trois quarts des salariés à temps partiel sont des femmes. Nous devons avancer sur les inégalités salariales.
Je suis favorable à ces amendements car il importe de mener un travail sur ces questions et de faire preuve de sérieux en matière de financement du système de retraite.
M. Thibault Bazin (DR). Je suis sidéré par les propos caricaturaux tenus sur ces demandes de rapport. Monsieur Ménagé, votre approche est quelque peu sectaire : vous donnez des avis défavorables tout en concédant que vous êtes d’accord sur le fond.
Nos concitoyens, retraités et actifs, sont inquiets. Ils ont peur. Ils sont nombreux à penser qu’ils n’auront pas de retraite et à ne plus croire au système. Or, les mesures contenues dans la proposition de loi aggraveraient le déficit.
Selon le COR, l’évolution du pouvoir d’achat des retraités sera moindre que celle des actifs si l’on ne fait rien. Il ne faut ni raser gratis ni raconter n’importe quoi. Selon un député RN, nous n’aurions rien fait pour la politique familiale lorsque nous étions au pouvoir. Nous avons rédigé des rapports ; nous avons créé des dispositifs afin de mieux concilier la vie professionnelle et la vie familiale. Où est la responsabilité dont le RN prétend faire preuve ? Ce n’est pas sérieux.
Mme Katiana Levavasseur (RN). Nous sommes défavorables à l’amendement AS13 pour la simple et bonne raison que nous savons très bien l’impact de la réforme des retraites sur les femmes. Même Franck Riester, alors ministre chargé des relations avec le Parlement, avait avoué en 2023 que les femmes seraient pénalisées par le report de l’âge. Malgré l’ajout de quelques trimestres supplémentaires liés à la maternité ou à l’adoption, elles devront toujours travailler plus longtemps que les hommes. L’écart est particulièrement important pour les femmes nées dans les années 1970 puisque, selon le COR, l’âge moyen de départ des femmes nées en 1972 augmentera de neuf mois contre cinq mois pour les hommes. De plus, l’ouverture du droit à la surcote est mécaniquement décalée de deux ans.
Déjà qu’il était difficile pour une femme d’obtenir tous les trimestres requis pour une pension à taux plein, elle devra désormais redoubler d’efforts pour une surcote, souvent bienvenue dans à l’issue d’une carrière hachée ou faiblement rémunérée. Alors que le minimum contributif devait être augmenté de 100 euros, les femmes concernées ne percevraient, en réalité, que 38 euros supplémentaires par mois en moyenne. C’est un montant dérisoire. Il n’est nul besoin d’un énième rapport pour le savoir. Allez à la rencontre de vos concitoyens, madame Thevenot, ils vous expliqueront les conséquences sur eux de la réforme des retraites, qui est une réelle injustice sociale.
M. Nicolas Turquois (Dem). Le débat sur les demandes de rapports est à l’image de cette matinée : pathétique. Tous les arguments ont été développés mais chacun s’en tient à sa posture, qui relève de l’imposture. À quel moment les soixante-dix députés ici présents ont-ils œuvré pour les Français et la pérennité du système de retraite ?
Je suis catastrophé : la proposition de loi, qui se borne à l’abrogation de la réforme des retraites, est creuse au possible. Elle ne prend aucunement en compte les arguments qui auraient pu conduire à adapter le droit en vigueur et qui ont été exposés ce matin.
Je suis défavorable à ces demandes de rapports car je suis défavorable au texte. Les sujets évoqués par monsieur Viry sont pertinents mais ils n’ont pas leur place ici.
M. Christophe Bentz (RN). Une instance est déjà chargée de rédiger des rapports sur cette question : le COR. Les rapports demandés constitueraient donc des doublons. C’est pourquoi nous ne voterons pas ces amendements, même si les sujets qu’ils évoquent, en particulier la natalité et l’égalité entre les hommes et les femmes, sont intéressants.
S’agissant de l’amendement AS6, les syndicats et les partenaires sociaux ont été consultés à l’époque. À titre personnel, je les ai tous reçus à l’exception d’un – je vous laisse deviner lequel. Il faut que nous redonnions toute leur place aux corps intermédiaires, il faut de l’écoute et du dialogue social. En fait, il faut faire l’inverse de ce qu’a fait le Gouvernement il y a un an, c’est-à-dire brutaliser notre pays, les syndicats représentatifs, les actifs qui sont à 90 % opposés à cette réforme, et les Français qui la rejettent pour les deux tiers. Bref, s’agissant de la réforme des retraites, notre pays a surtout besoin de dialogue et d’apaisement.
M. Stéphane Viry (LIOT). Nous demandons un rapport en vue d’éclairer les futurs débats et d’avoir des outils pour prendre la meilleure décision possible. Qui a la certitude d’avoir l’expertise en matière de retraites ? S’opposer à ces demandes de rapports relatifs à des sujets que vous tous considérez comme pertinents, c’est verser dans la petite politicaillerie, bien loin des attentes de nos concitoyens.
M. le rapporteur. Monsieur Lucas-Lundy, vous avez lié la question de la natalité à celle de l’immigration. Alors qu’on dénombre plus de cinq millions et demi de chômeurs, avant de faire venir de la main-d’œuvre bon marché dans une logique capitaliste, il conviendrait d’appliquer des politiques publiques permettant à ces Français de travailler. En vous opposant à l’abrogation de la réforme des retraites, vous avez oublié les Français qui travaillent. Cette fois, vous oubliez les chômeurs, ceux qui cherchent à travailler dans notre pays, préférant défendre vos visions idéologiques en matière d’immigration.
Monsieur Lauzzana, certes, le président Gilbert Cette n’apporte pas les mêmes éclairages que son prédécesseur, débarqué pour avoir contredit le Gouvernement. Mais il est beaucoup plus facile d’être d’accord avec les personnes qu’on nomme plutôt qu’avec celles qui expriment une parole libre dans l’intérêt du pays.
Monsieur Bazin, j’ai donné un avis défavorable aux demandes de rapport par souci de cohérence. La pratique veut qu’on ne demande pas de rapports relatifs à des sujets qui font déjà l’objet de nombreuses études, notamment de la part du COR. La différence entre nous, c’est que nous ne faisons pas confiance au Gouvernement pour apporter des solutions. Il est précisément le fruit d’une alliance entre les macronistes et votre formation, responsables tous deux des réformes successives qui ont échoué à rééquilibrer le système et qui n’ont fait qu’accroître la souffrance des Français. Einstein l’a dit : « il ne faut pas compter sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre ».
Monsieur Viry, le COR a déjà rédigé des rapports sur tous ces sujets et de nouvelles études seront rédigées dans les prochains mois.
Monsieur Turquois, je suis également catastrophé de l’image donnée ce matin aux Français alors que nous avions une chance unique d’abroger la réforme des retraites. Comme le 7 juillet dernier, le NFP et les macronistes se sont alliés pour se sauver mutuellement et pour taper encore une fois sur la tête des Français qui travaillent.
La commission adopte successivement les amendements AS5, AS6, AS7 et AS8. Les articles 2 bis, 2 ter, 2 quater et 2 quinquies sont respectivement ainsi rédigés.
Puis la commission adopte l’amendement AS9. L’article 2 sexies est ainsi rédigé.
En conséquence, l’amendement AS13 tombe.
Puis la commission adopte l’amendement AS12. L’article 2 septies est ainsi rédigé.
Enfin, elle adopte successivement les sous-amendements AS28, AS29 et AS30 et l’amendement AS14 sous-amendé. L’article 2 octies est ainsi rédigé.
Article 3 : Gage financier
La commission adopte l’article 3 non modifié.
Enfin, elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.
*
* *
En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.
– Texte adopté par la commission : https://assnat.fr/QfQiOz
–Texte comparatif : https://assnat.fr/eF40V4
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ANNEXE N° 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNéES PAR Le RAPPORTEUR
(Par ordre chronologique)
Audition conjointe :
– Agirc-Arrco * – M. Frédéric Amar, secrétaire général
– Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (Ircantec) – M. Ronan Mahieu, directeur des études et des statistiques à la direction des politiques sociales de la Caisse des dépôts et consignations, Mme Aurélie Piteau, responsable des études et statistiques au sein de la direction des politiques sociales de la caisse des dépôts, et M. Christophe Charenton, conseiller relations institutionnelles
Audition conjointe :
– Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) – M. Renaud Villard, directeur général
– Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) * – M. Ludovic Martin, directeur délégué au secrétariat général institutionnel, et M. Christophe Simon, chargé des relations parlementaires
Audition conjointe :
– Direction générale des finances publiques (DGFiP) – Service des retraites de l’État – M. Guillaume Talon, chef du service des retraites de l’État
– Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) – M. Ronan Mahieu, directeur des études et des statistiques à la direction des politiques sociales de la Caisse des dépôts, Mme Ségolène de Bailliencourt, responsable des études et des statistiques à la direction des politiques sociales de la Caisse des dépôts, et M. Christophe Charenton, conseiller relations institutionnelles
Conseil d’orientation des retraites (COR) – M. Gilbert Cette, président, et M. Emmanuel Bretin, secrétaire général
Table ronde :
– Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) – Mme Pascale Coton, première vice-présidente, et M. Nassim Chibani, conseil technique
– Confédération française de l’encadrement - Confédération générale des cadres (CFE CGC) – Mme Christelle Thieffinne, secrétaire nationale du secteur protection sociale et Mme Emérance Haushalter, chargée d’études protection sociale
– Force ouvrière (FO) – M. Michel Beaugas, secrétaire confédéral en charge de l’emploi et des retraites, et Mme Jennifer Sedeau, assistante confédérale en charge des retraites
Table ronde :
– Fédération autonome des syndicats du ministère de l’intérieur (UNSA-FASMI) – M. Jean-Philippe Bozzola, délégué national secteur social et M. Chamsseddine Baaziz, délégué national secteur juridique
– Fédération FO des syndicats du ministère de l’intérieur (FSMI FO) – M. Grégory Joron, secrétaire général, et M. Jérôme Moisant, secrétaire général adjoint
– Interco CFDT – M. Julien Morcrette, secrétaire national chargé du ministère de l’intérieur et des forces de sécurité publique et civile et M. Christophe Miette, secrétaire national du syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI-CFDT)
Syndicat Alliance Police nationale – M. Benoît Barret, conseiller spécial, et M. Patrice Ribero, conseiller spécial
Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) * – M. Éric Chevée, vice-président chargé des affaires sociales, Mme Gwendoline Delamare-Deboutteville, directrice des affaires sociales, M. Yves Piot, conseiller juridique en droit social, M. Adrien Dufour, responsable des affaires publiques, et Mme Claire Richier, juriste affaires sociales
Direction de la sécurité sociale (DSS) – M. Morgan Delaye, chef de service, adjoint au directeur de la sécurité sociale, M. Antoine Imberti, adjoint au sous-directeur des études et des prévisions financières, et M. Hédi Brahimi, adjoint à la sous-directrice des retraites et des institutions de la protection sociale complémentaire
M. François Écalle, président de l’association Fipeco
M. Pierre-Louis Bras, inspecteur général des affaires sociales, ancien président du Conseil d’orientation des retraites (COR)
Audition conjointe :
– Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) * – M. Luc Smessaert, vice-président, M. Xavier Jamet, directeur des affaires publiques, Mme Aude Fernandez, chargée de mission retraite, et Mme Romane Sagnier, chargée de mission affaires publiques
– Coordination rurale * – M. Armand Paquereau, responsable de la section retraités
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.
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ANNEXE N° 2 :
LISTE DES CONTRIBUTIONS écrites reçues
PAR Le RAPPORTEUR
(Par ordre chronologique)
M. Henri Sterdyniak, directeur de recherche à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)
Mouvement des entreprises de France (Medef) *
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.
([1]) Loi n° 2023‑270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.
([2]) Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, compte rendu de réunion n° 40 (19 janvier 2023).
([3]) Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, septembre 2022, p. 8.
([4]) Sterdyniak, Henri, « Une hausse brutale de l’âge de départ frapperait les ouvriers en particulier », Le Monde, 4 janvier 2023.
([5]) Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, juin 2024, p. 81.
([6]) Les écarts entre les taux de cotisations agrègent cotisations dites employeurs et cotisations dites salariées puisque l’analyse économique de leur incidence fiscale montre que ce sont bien les salariés qui en supportent effectivement la charge. Voir : Bozio, Antoine et al. « Does Tax-Benefit Linkage Matter for the Incidence of Social Security Contributions ? » Institute of Labour Economics, n° 12502, juillet 2019, pp. 1-88.
([7]) Haut-commissariat au plan, Retraites : une base objective pour le débat civique », décembre 2022, p. 23.
([8]) Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, juin 2024, p. 85.
([9]) Contrairement aux années précédentes, le COR retient à compter de cette année un unique scénario. Dans son rapport annuel 2023, le COR développait pourtant quatre scénarios : trois d’entre eux étaient déficitaires sur l’ensemble de la période et l’un d’entre eux était excédentaire à compter de 2045. L’unique scénario retenu en 2024 semble correspondre au deuxième scénario le plus pessimiste présenté en 2023.
([10]) Cour des comptes, rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale 2024, p. 54
([11]) Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, juin 2024, p. 66.
([12]) Défini par l’Insee comme « l’âge moyen de départ à la retraite une année donnée, en neutralisant les différences de taille de génération ».
([13]) Drees, « Les retraités et les retraites », 2022, p. 133.
([14]) Comité de suivi des retraites, Onzième avis, juillet 2014, p. 18.
([15]) Article L. 161‑25 du code de la sécurité sociale.
([16]) Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, juin 2024, p. 59.
([17]) Insee, Informations rapides, mars 2024, n° 74, pp. 1-5.
([18]) Gannon, Frédéric, Legros, Florence et Touzé, Vincent, « Vers un nouveau recul de l’âge de la retraite, la réforme Borne 2023 », Revue de l’OFCE, n° 184, pp. 22‑23.
([19]) Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, juin 2024, p. 16.
([20]) Ibid., p. 84.
([21]) Guillemard, Anne-Marie, « Apories d’une réforme de la retraite reposant sur l’unique paramètre de l’âge pour prolonger la vie active », Revue de l’OFCE, n° 184, pp. 1‑24.
([22]) Aubert, Patrick et Bozio, Antoine, « L’âge de départ à la retraite en perspective historique : un retour sur 50 ans de réformes », Blog IPP, 11 février 2023.
([23]) Drees, « Espérance de vie, durée passée à la retraite », n° 40, juin 2013, p. 8.
([24]) Rabaté, Simon, and Rochut, Julie. « Employment and Substitution Effects of Raising the Statutory Retirement Age in France ». Journal of Pension Economics and Finance, n° 3, 2020, pp. 293‑308. Nous traduisons.
([25]) Voir notamment Dubois, Yves et Koubi, Malik. « Taux d’emploi des séniors : le cas de la réforme des retraites de 2010 ». Insee Analyses, n° 30, 2017, pp. 1‑4.
([26]) Dares. « Les séniors sur le marché du travail en 2022 ». septembre 2023, n° 47, pp. 1‑4.
([27]) Insee. « La situation des seniors sur le marché du travail en 2023 ». juillet 2024, pp. 28‑29.
([28]) Zemmour, Michaël. « Les effets du report de l’âge minimal de la retraite à 62 ans : une approche par catégories socio-professionnelles ». LIEPP, 2024, pp. 1‑30.
([29]) Insee. « En 2021, une personne de 55 à 69 ans sur six ni en emploi ni à la retraite, une situation le plus souvent subie ». mai 2023, pp. 1-4.
([30]) Cour des comptes. « Continuer à adapter le système de retraite ». Les enjeux structurels pour la France, octobre 2021, p. 14.
([31]) Drees. « Évaluation de l’augmentation des dépenses de certaines prestations sociales induite par un relèvement de l’âge légal d’ouverture des droits à la retraite ». n° 21‑43, janvier 2022, pp. 1‑19.
([32]) Dares. « Estimation des dépenses d’ARE/AREF supplémentaires suite à un relèvement de l’âge d’ouverture des droits (AOD) ». janvier 2022, pp. 1‑10.
([33]) Insee, Bilan démographique 2023, janvier 2024.
([34]) Unaf, « L’idéal personnel moyen du nombre d’enfants en France », janvier 2024, pp. 1-7.
([35]) Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, juin 2024.
([36]) Dares, Emploi, chômage, revenus du travail, 2023.
([37]) Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, juin 2024.
([38]) Dares, Emploi, chômage, revenus du travail, 2023.
([39]) Insee, Emploi, chômage, revenus du travail, juin 2023.
([40]) Bulletin de la Banque de France, Comment expliquer les pertes de productivité observées en France depuis la période pré-Covid ?, mars 2024.
([41]) Pellegrino, Bruno et Zheng, Geoff, Measuring the Cost of Red Tape, octobre 2023.
([42]) Mario Draghi, The future of European competitivenes, septembre 2024.
([43]) Décret n° 54‑832 du 13 août 1954 portant règlement d’administration publique pour la codification de lois et de règlements d’administration publique relatifs aux pensions civiles et militaires de retraite.
([44]) Arrêté du 12 novembre 1969 relatif au classement des emplois des agents des collectivités locales en catégories A et B.
([45]) Rapport n° 814 de Mme Stéphanie Rist au nom de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, 1er février 2023.
([46]) Une liste des maladies professionnelles éligibles à ce dispositif est fixée par arrêté.
([47]) Article D. 161‑2‑24 du code de la sécurité sociale.
([48]) Article L. 24 du code des pensions civiles et militaires.
([49]) Rapport d’information n° 5107 sur la recevabilité financière des initiatives parlementaires et la recevabilité organique des amendements à l’Assemblée nationale, 23 février 2022, p. 29.
([50]) Rapport d’information n° 4546 sur la recevabilité financière des initiatives parlementaires, 22 février 2017, p. 22.
([51]) Rapport d’information n° 4392 sur la recevabilité financière des initiatives parlementaires, 21 février 2012, p. 21.
([52]) Étude d’impact annexée au projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraite, 17 septembre 2013, p. 26.
([53]) Cour des comptes, rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale 2023, p. 52, et rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale 2024, p. 54.
([54]) Institut Montaigne, « Abroger la réforme des retraites », Législatives 2024. Cette estimation repose sur les prévisions annexées à la loi de financement rectificative de la sécurité sociale du 14 avril 2023.
([55]) DGDDI, Bilan annuel de la douane 2023, p. 60.
([56]) Le rapporteur précise qu’il ne s’agit en aucun cas d’augmenter les taxes sur le tabac ou sur les transactions financières mais bien de gager la charge pour les organismes de sécurité sociale afin d’assurer la recevabilité financière de la proposition de loi au regard de l’article 40 de la Constitution.