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N° 701

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 décembre 2024.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi

 

visant à rendre accessible à tous les étudiants le repas à 1 euro,

 

 

 

 

 

Par Mme Fatiha Keloua Hachi,

 

 

Députée.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro : 519.

 


SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION

I. les Étudiants font face À une prÉcaritÉ accrue, qui affecte tout particuliÈrement leur alimentation

A. Dans un contexte social dÉgradÉ, les Étudiants font face À une prÉcaritÉ accrue

B. Les Étudiants subissent plus particuliÈrement une prÉcaritÉ alimentaire importante qu’il revient aux pouvoirs publics de combattre

II. en dÉpit de son efficacité dans la lutte contre la prÉcaritÉ alimentaire, Le repas À 1 euro n’est pas accessible À l’ensemble des Étudiants qui devraient pouvoir y prÉtendre

A. Le repas À 1 euro demeure en partie fondÉ sur le statut de boursier, une rÉFÉrence qui s’avÈre inadaptÉe compte tenu des limites du systÈme de bourses

B. L’Élargissement du dispositif aux Étudiants non boursiers en situation de prÉcaritÉ ne s’avÈre pas SUFFISANT pour atteindre l’ensemble des Étudiants qui en auraient besoin

C. L’accès À une offre de restauration À tarif modÉrÉ prÉvu par la loi dite lévi ne constitue pas une garantie suffisante

III. L’Élargissement du bénéfice du repas À 1 euro À tous les Étudiants et sur tous les sites de restauration permettrait d’accroître l’accessibilité du dispositif

A. Un Élargissement À tous les étudiants et À tous les sites de restauration

B. La nÉcessitÉ d’un soutien au réseau des œuvres universitaires et scolaires afin de garantir la bonne mise en œuvre du dispositif

commentaire des articles

Article 1er Limitation à un euro du tarif des repas servis dans tous les sites de restauration des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires

Article 1er bis (nouveau) Remise d’un rapport au Parlement sur l’opportunité de la généralisation de la gratuité des repas

Article 1er ter (nouveau) Remise d’un rapport au Parlement sur le soutien de l’État au réseau des œuvres universitaires et scolaires dans son activité de restauration étudiante

Article 1er quater (nouveau) Remise d’un rapport au Parlement sur les conséquences  de la généralisation du repas à 1 euro

Article 2 Gage financier

TRAVAUX DE LA COMMISSION

1. Réunion du mercredi 4 décembre 2024 à 9 heures 30

2. Réunion du mercredi 4 décembre 2024 à 14 heures 45

ANNEXE 1 : Liste des personnes ENTENDUEs par la rapporteure

Annexe 2 : textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

 


   INTRODUCTION

L’abaissement à 1 euro, pour les étudiants boursiers, du tarif des repas servis dans les restaurants universitaires a été mis en œuvre à compter de la rentrée 2020, dans le contexte de la crise sanitaire. Au vu des conséquences particulières de cette dernière sur leurs conditions de vie, le bénéfice de cette mesure a été élargi à l’ensemble des étudiants entre janvier et août 2021. Depuis lors, seuls les titulaires d’une bourse sur critères sociaux versée par les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) et les étudiants justifiant d’une situation de précarité particulière bénéficient de ce tarif dérogatoire. Celui-ci représente moins du tiers du prix imposé aux autres étudiants dans les sites de restauration des Crous, qui s’élève à 3,30 euros.

Depuis la rentrée 2020, la fréquentation des sites de restauration des Crous s’est continuellement accrue pour toutes les catégories d’étudiants – boursiers ou étudiants précaires identifiés par les services sociaux des Crous, d’une part ; étudiants qui ne bénéficient pas de repas à 1 euro, d’autre part. Au cours de l’année universitaire 2023-2024, près de 43 millions de repas ont été servis par les Crous, parmi lesquels 24 millions de repas à 1 euro, ce nombre représentant une augmentation de 23,4 % (+ 4,5 millions de repas) par rapport à l’année précédente. Au total, le dispositif a ainsi bénéficié à 483 000 étudiants boursiers pendant la dernière année universitaire, auxquels s’ajoutent 43 000 étudiants non boursiers ayant fait connaître leur situation de précarité. Cette augmentation sensible du nombre de bénéficiaires (+ 13,2 % par rapport à l’année précédente) témoigne des besoins accrus d’étudiants toujours plus exposés à la précarité.

La montée en puissance de l’offre de repas à 1 euro ne doit pas occulter les nombreuses limites qui la rendent difficilement accessible pour des étudiants qui en ont besoin. Parmi elles, peuvent être cités le brouillage de sa lisibilité sous l’effet de ses changements successifs de périmètre, le manque d’information des étudiants, le caractère stigmatisant de la procédure imposée aux non boursiers pour faire connaître leur précarité ou encore les délais d’attente associés à la constitution et au dépôt d’un dossier.

Pour répondre à ces limites, la voie de l’universalisation avait été soutenue par votre rapporteure à travers sa proposition de loi n° 659 visant à assurer un repas à 1 euro à tous les étudiants ([1]). Examinée en séance publique le 9 février 2023, celle-ci fut rejetée à une voix près. La dégradation de la situation des étudiants, dont plus d’un tiers déclare sauter des repas par manque d’argent ([2]), invite plus que jamais à adopter ce texte qui permettrait de rendre effectif, pour tous, l’accès au repas à 1 euro, et donc de soulager rapidement la précarité alimentaire étudiante.

I.   les Étudiants font face À une prÉcaritÉ accrue, qui affecte tout particuliÈrement leur alimentation

A.   Dans un contexte social dÉgradÉ, les Étudiants font face À une prÉcaritÉ accrue

Les étudiants connaissent, de façon structurelle, des difficultés particulières liées à leur situation économique propre, caractérisée pour la majorité d’entre eux par l’absence ou le caractère accessoire de revenus tirés d’une activité professionnelle ([3]). Ainsi, dès lors que la poursuite d’études n’est assortie d’aucune rémunération, les étudiants sont tributaires de l’aide dispensée par leur famille, de la solidarité nationale sous forme de bourses, ou encore d’un emploi susceptible de concurrencer les études. Or, chacun de ces types de revenus a été affecté par la crise sanitaire, puis par la crise inflationniste ([4]). En particulier, l’évolution du système de bourses – dont le montant n’est pas indexé sur l’inflation n’a pas permis de soutenir de façon satisfaisante les revenus des étudiants précaires, en dépit d’une réforme entreprise en 2022. Plus généralement, le soutien public à l’amélioration des conditions de vie des étudiants connaît toujours de graves insuffisances (voir infra), tandis que certains étudiants ne bénéficient d’aucun de ces différents types de ressources.

Dans ce contexte, la dernière étude de l’Observatoire de la vie étudiante (OVE) montre que « 19 % des étudiants déclarent des difficultés financières telles qu’il leur a été impossible de faire face à leurs besoins (alimentation, loyer, gaz ou électricité, etc.) » ([5]). Au fil des ans, la précarité étudiante – caractérisée par le cumul de fragilités – se transforme donc en une véritable situation de pauvreté.

En l’absence de réponses adéquates à la dégradation des conditions de vie des étudiants liée à la situation sociale du pays et à l’inadaptation des politiques en faveur de la jeunesse, la satisfaction de leurs besoins les plus élémentaires se trouve menacée. Ainsi, la précarité alimentaire, à laquelle la présente proposition de loi vise à répondre, constitue une part prépondérante des difficultés des étudiants.

B.   Les Étudiants subissent plus particuliÈrement une prÉcaritÉ alimentaire importante qu’il revient aux pouvoirs publics de combattre

Plusieurs indicateurs témoignent d’une dégradation de l’accès des étudiants à l’alimentation. En effet, si la précarité alimentaire est apparue dans cette catégorie de la population bien avant la pandémie de covid-19 et la crise inflationniste ([6]), ces phénomènes successifs l’ont considérablement aggravée.

En premier lieu, un recours accru des étudiants au réseau associatif pour subvenir à leurs besoins alimentaires est manifeste depuis la crise sanitaire. La présence massive d’étudiants aux distributions organisées par différents acteurs de la solidarité constitue la manifestation la plus emblématique de cet état de fait qui perdure aujourd’hui. Le recours des étudiants à l’aide alimentaire concerne aussi bien de grandes associations généralistes telles que les Restos du cœur ou le Secours populaire, que des organisations créées à l’intention des étudiants, et souvent à l’initiative de certains d’entre eux, à l’image de l’association Cop1. Selon l’OVE, pas moins de 28 % des étudiants déclarent avoir besoin de l’aide alimentaire ([7]) sous l’une de ses formes (banque alimentaire, épicerie solidaire…).

Outre la stigmatisation que le recours à de telles aides peut représenter pour les étudiants, ce symptôme de la précarité alimentaire affecte l’image internationale de la France, et plus particulièrement de son système d’enseignement supérieur. La presse étrangère s’est notamment fait l’écho du recours massif aux distributions alimentaires, dont les bénéficiaires sont pour une part significative des étudiants étrangers ([8]). L’attractivité de l’enseignement supérieur français pour les étudiants internationaux ne peut que pâtir d’un tel état de fait.

Au-delà de la part visible de la précarité alimentaire que mettent en lumière ces actions, il y a lieu d’insister sur l’ampleur d’un phénomène aux manifestations variées et diffuses. Celui-ci se traduit notamment par une tendance – elle aussi plus prononcée pour les étudiants que pour le reste de la population – à sacrifier l’alimentation en cas de difficultés financières. Le dernier baromètre annuel de l’association Cop1, mené avec l’institut Ifop, montre ainsi que « plus d’un tiers des jeunes interrogés déclare sauter souvent ou de temps en temps un repas par manque d’argent ». Cette proportion, qui s’élève à 36 %, dépasse la moyenne nationale (29 %) de 7 points.

En tout état de cause, les pouvoirs publics et la société ne peuvent s’accommoder d’une telle situation. En premier lieu, les effets sanitaires d’une alimentation insuffisante en quantité et en qualité sont connus. L’impact des privations sur la santé physique et morale des jeunes s’ajoute aux autres formes de précarité dont ils sont atteints, qui ont trait notamment aux conditions de logement et aux difficultés d’insertion professionnelle et sociale. La difficulté à se nourrir correctement participe manifestement de la dégradation de la santé mentale des étudiants, dont 23 % ont dû consulter un psychologue au cours de l’année écoulée ([9]), une proportion en forte augmentation depuis quelques années. Plus largement, la dégradation des conditions de vie des étudiants à laquelle participe la précarité alimentaire est de nature à altérer la conduite des apprentissages, jusqu’à provoquer l’abandon des études supérieures et l’inscription durable dans la précarité.

Face à l’amplification de la précarité alimentaire étudiante, les mesures mises en œuvre par les derniers gouvernements successifs n’ont permis de lutter que marginalement contre une précarité alimentaire qui continue d’affecter de façon croissante les étudiants.

II.   en dÉpit de son efficacité dans la lutte contre la prÉcaritÉ alimentaire, Le repas À 1 euro n’est pas accessible À l’ensemble des Étudiants qui devraient pouvoir y prÉtendre

A.   Le repas À 1 euro demeure en partie fondÉ sur le statut de boursier, une rÉFÉrence qui s’avÈre inadaptÉe compte tenu des limites du systÈme de bourses

Les boursiers constituent le public ciblé en premier lieu par le dispositif du repas à 1 euro, dans la mesure où il s’agit de la seule catégorie d’étudiants à avoir toujours pu prétendre au repas à 1 euro depuis sa création et où, par ailleurs, ils peuvent y avoir accès sans démarche préalable particulière. Or, une approche du phénomène de la précarité étudiante fondée, à titre principal ou exclusif, sur le statut de boursier, s’avère aujourd’hui largement inadaptée.

D’abord, la décision d’attribution des bourses repose sur un barème fondé sur le revenu fiscal de référence (RFR) des parents du bénéficiaire, sur une estimation des coûts liés à la distance entre le domicile familial et le lieu d’études, et sur la composition du foyer, permettant l’attribution de points de charge ([10]). Or, le soutien financier apporté aux étudiants par leur famille n’est pas strictement corrélé aux ressources de celle-ci – d’autant plus que la situation familiale et les revenus pris en compte dans le calcul du montant de la bourse correspondent à l’année fiscale qui précède le dépôt de la demande, et peuvent donc se rapporter à une réalité dépassée. Si, depuis la crise sanitaire, les revenus de l’année N peuvent être pris en compte à titre exceptionnel, ce n’est pas systématiquement le cas. En outre, la répartition des titulaires de bourses entre neuf échelons correspondant chacun à un niveau de prestation différent suscite des effets de seuil. Ceux-ci sont susceptibles de se traduire par l’inéligibilité au système, à la faveur d’une augmentation du RFR des parents de quelques dizaines d’euros. Enfin, le redoublement ou le manquement à l’obligation d’assiduité entraînent la perte du statut de boursier, alors que les étudiants étrangers sont soumis à des règles restrictives pour pouvoir y prétendre ([11]).

Le report de la réforme des bourses initialement prévue par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche à la suite d’une concertation et d’une première étape menées en 2022, rend moins pertinente encore la référence à la catégorie de boursier. La non-revalorisation des seuils d’éligibilité pourrait, par ailleurs, provoquer la sortie d’un certain nombre de boursiers du système, dès lors que les revenus de leurs parents dépasseraient les plafonds de ressources à la seule faveur de l’augmentation nominale, liée à l’inflation, de leurs revenus. Plus largement, la baisse des crédits en faveur des bourses dans le projet de loi de finances pour 2025 – une diminution de 120,2 millions d’euros (– 4,5 %) fait craindre une augmentation de la précarité étudiante, et invite à consolider la place de la restauration étudiante dans le soutien des pouvoirs publics aux étudiants.

Pour tenir compte des limites d’une aide reposant sur la perception d’une bourse sur critères sociaux, une condition alternative permettant l’accès aux repas à 1 euro dans les sites de restauration des Crous a été instaurée.

B.   L’Élargissement du dispositif aux Étudiants non boursiers en situation de prÉcaritÉ ne s’avÈre pas SUFFISANT pour atteindre l’ensemble des Étudiants qui en auraient besoin

Depuis août 2021, un étudiant non boursier est éligible à cette tarification dès lors qu’il justifie d’une situation de précarité. En principe, cette approche présente l’avantage d’éliminer, dans l’accès au service de restauration, les effets de seuil dont pâtissent les étudiants qui, bien qu’ils ne perçoivent pas de bourse sur critères sociaux, connaissent une situation personnelle ou familiale difficile constatée par les services des Crous.

Toutefois, le nombre total d’étudiants non boursiers bénéficiaires, en dépit de son dynamisme, demeure faible, particulièrement au regard du nombre total d’étudiants rencontrant d’importantes difficultés financières. En 2023-2024, ce sont 43 000 étudiants uniques non boursiers qui ont eu accès au repas à 1 euro. Or, sur les 2,3 millions d’étudiants ne bénéficiant pas du système de bourses sur critères sociaux, 417 000 environ seraient en situation de précarité économique ([12]). Au regard de ces données, le taux de non-recours au repas à 1 euro – qui inclut toutefois des étudiants fréquentant les Crous au tarif de 3,30 euros – peut donc être évalué à environ 9 étudiants non boursiers précaires sur 10. Le recours au repas à 1 euro de cette catégorie d’étudiants est donc bien plus faible, proportionnellement, que celui des étudiants boursiers : 483 000 de ces derniers en ont bénéficié au cours de l’année universitaire 2023-2024, sur un total de 679 000 boursiers de l’enseignement supérieur ([13]), soit plus de 7 étudiants bénéficiaires sur 10 étudiants boursiers.

Le fait que le nombre de bénéficiaires reste nettement inférieur à celui des étudiants connaissant de grandes difficultés financières s’explique par un certain nombre de limites que connaît le dispositif, et que la proposition de loi entend lever. L’un des obstacles semble résider dans le dépôt des demandes et leur instruction par les services sociaux des Crous. En effet, malgré les efforts et la qualité du travail individuel accomplis par les agents de ces derniers, la fourniture de justificatifs, leur examen et, le cas échéant, la prise de rendez-vous préalable à la mise en place de la tarification dérogatoire au bénéfice des étudiants non boursiers demeurent des démarches relativement lourdes. L’hétérogénéité des critères pris en compte en fonction du Crous de rattachement de l’étudiant peut s’avérer, malgré les standards fixés par le Centre national des œuvres universitaires et scolaires (Cnous), source d’inégalités entre étudiants. En outre, le caractère stigmatisant que peuvent revêtir le dépôt d’un dossier et la prise de rendez-vous avec les services sociaux, semble devoir constituer un frein durable. Le manque de publicité du dispositif limite enfin l’accès au repas à 1 euro, souvent associé aux seuls boursiers, et dont le recours par les autres étudiants est probablement affecté par les multiples évolutions de périmètre qu’il a connues depuis son lancement lors de la crise sanitaire : certains d’étudiants pourraient donc être éligibles, mais l’ignoreraient.

Au total, l’offre de restauration des Crous ne permet qu’imparfaitement de pallier la précarité alimentaire des étudiants, dans un contexte où seuls 54 % des étudiants fréquentent les restaurants universitaires ([14]). Si le premier facteur de non-recours avancé par les étudiants, à savoir l’éloignement géographique, est placé au cœur de la loi dite Lévi qui vise à y remédier (voir infra), le coût trop élevé de l’offre de restauration demeure cité par une part importante d’étudiants (13 %) ([15]), invitant à rendre accessible à tous les étudiants une offre de restauration à tarif très social.

C.   L’accès À une offre de restauration À tarif modÉrÉ prÉvu par la loi dite lévi ne constitue pas une garantie suffisante

La loi n° 2023-265 du 13 avril 2023 visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré, dite Lévi, constitue un progrès dans l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modérée. Elle concerne particulièrement les étudiants n’ayant pas accès aux lieux de restauration universitaires, en encourageant les agréments d’organismes publics (écoles, hôpitaux…) ou privés.

Néanmoins, le dispositif institué par cette loi ne répond que partiellement à l’enjeu de la précarité des étudiants éloignés des sites de restauration gérés par les Crous. Le tarif de l’offre de restauration mise à leur disposition par les organismes conventionnés n’étant pas précisément défini – l’article L. 822-1-1 du code de l’éducation ne mentionne qu’une offre à tarif modéré –, le coût des repas proposés peut continuer de représenter une charge significative pour les étudiants. En l’état, la loi ne corrige donc pas de façon satisfaisante l’ensemble des inégalités observées entre les étudiants pouvant aisément accéder à des sites de restauration universitaire où sont servis des repas à 1 euro d’une part, et les étudiants n’ayant accès qu’à des structures conventionnées d’autre part.

À défaut d’accès à une offre de restauration à tarif modérée, les étudiants situés à plus de 20 minutes à pied ou en transport en commun se verront attribuer, à partir de février 2025, une compensation financière leur permettant d’accéder à des organismes conventionnés avec une carte prépayée, dont le montant a été récemment défini par voie réglementaire à 40 euros par mois pour les boursiers et 20 euros pour les non boursiers, cette aide étant majorée de 10 euros dans les outre-mer. La rapporteure estime que ces montants, qui équivalent à 60 centimes par repas pour les boursiers, sont manifestement insuffisants pour garantir l’égal accès à l’alimentation de tous les étudiants.

III.   L’Élargissement du bénéfice du repas À 1 euro À tous les Étudiants et sur tous les sites de restauration permettrait d’accroître l’accessibilité du dispositif

A.   Un Élargissement À tous les étudiants et À tous les sites de restauration

La présente proposition de loi prévoit deux effets complémentaires :

– d’une part, la généralisation à l’ensemble des étudiants de la tarification actuellement réservée aux étudiants boursiers et aux étudiants précaires ;

– d’autre part, sa mise en œuvre dans tous les points de vente des Crous – cette notion excédant le périmètre des restaurants universitaires, et visant en particulier les cafétérias, lesquelles se caractérisent par une offre de produits et des tarifs différents de ceux pratiqués dans les sites de restauration assise.

La première de ces deux actions présente la particularité d’avoir été déjà mise en œuvre, dans le contexte de la pandémie de covid-19. À cet égard, l’un des arguments qui ont été opposés à votre rapporteure lors de l’examen de sa proposition de loi visant à assurer un repas à 1 euro pour tous les étudiants consistait à invoquer les circonstances particulières dans lesquelles elle avait été mise en œuvre, marquées par une importante baisse de la fréquentation des restaurants universitaires sous l’effet des mesures de confinement et de couvre-feu, ainsi que par le développement de l’enseignement à distance. Dès lors, tout rétablissement de la tarification antérieurement appliquée se traduirait par une hausse de la fréquentation, que les contraintes encadrant celle-ci durant la crise sanitaire avaient empêchée. Toutefois, un tel raisonnement repose sur le présupposé implicite que l’abaissement de 3,30 à 1 euro du prix des repas dans les restaurants universitaires entraînerait à lui seul une augmentation incontrôlable de leur activité.

Or, au vu de la différence de prix entre les repas proposés par les Crous et les offres de restauration privées à proximité des campus, il y a lieu de penser que l’attrait des restaurants universitaires repose avant tout sur leurs tarifs. De fait, le caractère abordable du prix des repas constitue de loin le premier motif de fréquentation de ces restaurants ([16]). Il semble donc que les Crous attirent au premier chef les étudiants qui ont le plus besoin d’une offre de restauration abordable, et que l’extension du dispositif à tous les étudiants entraînerait une augmentation modérée de la fréquentation, ciblée sur ceux des étudiants qui en auraient besoin du fait de leurs difficultés financières – qui sont, au demeurant, surreprésentés au sein des universités. Pour le reste, elle aurait surtout pour effet de permettre à des étudiants qui fréquentent d’ores et déjà les Crous, mais à un tarif de 3,30 euros, de bénéficier du tarif à 1 euro.

Par ailleurs, la présente proposition de loi aurait l’avantage de pérenniser, en en rehaussant la base juridique, une mesure dont le fondement actuel réside dans des dispositions de nature réglementaire. En ce sens, son adoption représenterait un gage de stabilité et constituerait, sur le long terme, une forme de « bouclier social » protégeant l’ensemble des étudiants, qui disposeraient de fait d’un droit opposable.

Le second axe d’évolution consiste à étendre la possibilité de disposer d’un repas à 1 euro à tous les points de vente des Crous, dont par exemple les cafétérias. Cette disposition est conçue comme complémentaire de la loi n° 2023-265 du 13 avril 2023 visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré, qui cible les étudiants ne disposant pas, à proximité de leur lieu d’études, de sites de restauration gérés par les Crous. Entre cette catégorie d’étudiants et ceux qui sont en mesure d’accéder aisément à de véritables restaurants universitaires, une catégorie intermédiaire n’ayant accès qu’à des lieux de type cafétéria demeure privée d’offre de restauration à 1 euro – cette catégorie étant du reste susceptible de comprendre des étudiants boursiers ou précaires. Déjà mise en œuvre dans certains points de vente gérés par les Crous, la possibilité d’accéder à un repas à 1 euro dans de nouveaux sites de restauration garantirait l’égalité de l’ensemble des étudiants, quel que soit leur lieu d’études.

B.   La nÉcessitÉ d’un soutien au réseau des œuvres universitaires et scolaires afin de garantir la bonne mise en œuvre du dispositif

La mise en œuvre du repas à 1 euro dans le format actuel fait d’ores et déjà l’objet d’une compensation de l’État au bénéfice du réseau des œuvres universitaires et scolaires. Le gouvernement a ainsi inscrit dans le projet de loi de finances pour 2025 un total de 54,5 millions d’euros supplémentaires au titre de la subvention pour charges de service public versée au réseau ([17]). Ce montant devra être revalorisé pour permettre l’extension du dispositif à tous les étudiants et à l’ensemble des sites gérés par les Crous.

Dans la mesure où le tarif à 1 euro existe déjà pour certains étudiants, toute augmentation de la dépense publique liée à la généralisation de cette mesure à l’ensemble des étudiants serait la résultante de deux effets distincts :

– d’une part, à fréquentation constante, la réduction de 2,30 euros du prix acquitté pour chaque repas par les étudiants qui ne sont ni boursiers, ni précaires. Dès lors que 18,3 millions de repas à 3,30 euros ont été servis en 2023 (hors boursiers et précaires), le surcoût peut être estimé à 42 millions d’euros environ en année pleine ;

– d’autre part, une augmentation du nombre de repas servis sous l’effet de l’extension de formules à 1 euro à de nouveaux sites de restauration, de l’ouverture d’un nombre croissant de sites de restauration le soir et, plus marginalement, du recours aux offres du Crous par de nouveaux étudiants du fait de la baisse des prix – même si une majorité d’étudiants précaires fréquentent d’ores et déjà les Crous, mais au tarif de 3,30 euros. Cette montée en puissance de l’offre supposerait, pour être menée à bien dans de bonnes conditions un investissement similaire à celui précédemment évoqué, à hauteur de 42 millions d’euros.

Dans ces conditions, le coût de la proposition de loi n’excéderait pas, au total, 90 millions d’euros. Cette évaluation est cohérente avec celle du Cnous, qui estime de 100 à 110 millions d’euros le coût d’une généralisation du repas à 1 euro ([18]).

Ces crédits supplémentaires permettraient en premier lieu de financer les équipements indispensables à l’élargissement du dispositif (cuisines, places de restauration assise). Ces investissements sont nécessaires pour garantir un repas à 1 euro à tous les étudiants dans des délais raisonnables, alors que 39,4 % des étudiants disposent de moins de 45 minutes, temps de trajet compris, pour déjeuner ([19]). De nouvelles infrastructures permettraient notamment de réduire les files d’attente, qui sont susceptibles de décourager un certain nombre d’entre eux d’accéder au dispositif. Elles permettraient à davantage d’étudiants de prendre le temps de s’asseoir pour consommer un repas, participant à la construction et au renforcement du lien social dont de trop nombreux étudiants sont aujourd’hui privés.

En second lieu, ce montant couvrirait le recrutement d’agents au sein des Crous, dont l’audition ([20]), ainsi que celle des syndicats d’agents ([21]), a mis en lumière une mise sous tension du réseau sous l’effet de l’augmentation de la demande. Ces crédits supplémentaires permettraient notamment de rendre plus attractifs les postes proposés, dans un contexte où les traitements des agents des Crous peinent à faire face à la concurrence du secteur privé dans des professions comparables. À plus long terme, le recrutement d’agents supplémentaires devra permettre, dans la mesure du possible pour le réseau des œuvres universitaires et scolaires, d’ouvrir davantage de restaurants universitaires le soir, afin de proposer à chaque étudiant deux repas à 1 euro par jour.


   commentaire des articles

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article vise à limiter à un euro le prix des repas distribués à l’ensemble des étudiants par le réseau des œuvres universitaires et scolaires. Par l’insertion d’un article L. 822-1-2 nouveau dans le code de l’éducation, cette mesure tend à offrir à tous les étudiants, indépendamment de leur statut au regard du système des bourses, une alimentation abordable et saine, dans le but de lutter contre la précarité alimentaire étudiante.

La commission a notamment adopté des amendements :

– étendant les dispositions de l’article aux sites conventionnés mentionnés à l’article L. 822-1-1 du même code, issu de la loi dite Lévi ;

– obligeant les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires à proposer cette offre de restauration sous forme de repas à emporter.

  1.   le droit existant
    1.   Une mesure limitée aux étudiants boursiers et précaires, prise en charge par l’État au moyen de la subvention pour charges de service public allouée au réseau des œuvres

La tarification des repas distribués par les Crous dans leurs sites de restauration est liée aux dotations budgétaires inscrites en loi de finances au programme 231 Vie étudiante de la mission Recherche et enseignement supérieur, gérées par le ministère de l’Enseignement supérieur dans le cadre de la tutelle qu’il exerce en application du deuxième alinéa des articles L. 822-2 – qui concerne le Cnous – et L. 822-3 du code de l’éducation – relatif aux centres régionaux.

La tarification dérogatoire dont bénéficient les étudiants boursiers et précaires dans les sites de restauration des Crous fait l’objet d’une compensation par l’État au profit de ces derniers, au regard de la perte de recettes correspondant à la différence entre le tarif général de 3,30 euros par repas et le prix dont s’acquittent effectivement ces étudiants. Cette compensation est assurée au moyen d’une majoration de la subvention pour charges de service public versée au réseau des œuvres, à hauteur de 51 millions d’euros sur l’année 2023-2024, et de 54,5 millions d’euros proposés, pour l’année à venir, dans le projet de loi de finances pour 2025.

Cette compensation existe également pour permettre aux organismes conventionnés en application de la loi dite Lévi de proposer aux étudiants des repas à tarification sociale, avec 13,6 millions d’euros inscrits dans le projet de loi de finances pour 2025 pour compenser les coûts supportés par les organismes ayant passé un conventionnement avec le réseau des œuvres universitaires et scolaires.

  1.   Un dispositif dépourvu de fondement législatif et, comme tel, susceptible d’être remis en cause à tout moment

Le fondement législatif de l’activité de restauration des Crous réside dans le cinquième alinéa de l’article L. 822-1 du code de l’éducation. Ce dernier prévoit que le Cnous « peut exercer les missions d’une centrale d’achat […] pour acquérir, à destination de l’État, des collectivités territoriales ou des établissements publics, des denrées alimentaires et d’autres biens nécessaires au développement d’une offre de restauration bénéficiant au moins en partie à des étudiants ». Cette formulation générale, centrée sur l’exercice de fonctions d’achat aux fins d’application des règles en matière de commande publique, ne préjuge pas des conditions de mise en œuvre de l’offre de restauration mentionnée.

L’article L. 822-1-1, issu de la loi Lévi, impose l’existence « d’une offre de restauration à tarif modéré […] dans les lieux de restauration gérés par le réseau des œuvres universitaires et scolaires mentionné à l’article L. 822-1 ou par des organismes, de droit public ou de droit privé, conventionnés, dans le territoire considéré, par ce même réseau. »

Aussi la tarification des repas servis par le réseau des œuvres dans le cadre de son activité de restauration est-elle déterminée par l’État et par le conseil d’administration du Cnous, dans le cadre de ses fonctions de définition de la politique générale du réseau et de répartition des crédits budgétaires entre ses composantes prévues par les 1° et 2° de l’article L. 822-2 du code de l’éducation. Il en découle principalement deux conséquences pour la pérennité du dispositif.

D’une part, dès lors que la tarification de l’offre de restauration peut augmenter sous l’effet d’une décision du Cnous, organisme dont la capacité d’action dépend du montant des crédits budgétaires qui lui sont attribués chaque année en loi de finances, l’application de la mesure peut aisément être remise en cause.

D’autre part, les modalités de celle-ci, et plus particulièrement de la dérogation prévue en faveur des étudiants non boursiers en situation de précarité, sont susceptibles d’évoluer rapidement. Début 2023, le passage d’un accès au dispositif sur une base déclarative à un examen des demandes de dérogation par les services sociaux des Crous au regard des justificatifs produits par l’étudiant a témoigné de la rapidité des changements qui peuvent intervenir.

Ainsi, tant la limitation du bénéfice de la mesure aux seuls étudiants boursiers et précaires que les modalités de mise en œuvre de celle-ci appellent une intervention du législateur afin de pérenniser et élargir le dispositif. L’adoption de cette proposition de loi permettrait ainsi de faire de l’accès au repas à 1 euro un droit opposable dont bénéficieraient les étudiants.

  1.   Les dispositions de la proposition de loi

La présente proposition de loi procède à l’insertion, à la suite de l’article L. 822-1 définissant les fonctions du réseau des œuvres universitaires, d’un nouvel article L. 822-1-1 A dans le code de l’éducation. L’apport de celui-ci est triple :

 plutôt que l’imposition d’un tarif unique, conçu comme immuable, le présent article prévoit un plafond fixé à 1 euro par repas pour la tarification des repas servis dans les sites de restauration des Crous. Aussi un nouvel abaissement, voire la gratuité des repas, resteraient possibles sur la base de cette rédaction ;

 par l’absence de mention d’une catégorie de bénéficiaires, le présent article permettra de lutter contre le non-recours au dispositif, qui provient largement de la nécessité, pour les étudiants qui ne sont pas boursiers, de faire reconnaître leur situation de précarité par les services sociaux des Crous ;

 enfin, en mentionnant l’ensemble des sites de restauration gérés par les Crous, la présente proposition de loi vise à pallier l’inégalité territoriale qui prévaut à l’heure actuelle dans l’accès au repas à 1 euro, ce dernier ayant vocation à être dorénavant accessible tant dans les restaurants universitaires que dans les autres points de vente du réseau, comme les cafétérias.

  1.   Les MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

Outre un amendement de la rapporteure visant à placer le dispositif prévu par la proposition de loi après l’article L. 822‑1‑1 du code de l’éducation issu de la loi dite Lévi qui évoque une « offre de restauration à tarif modéré », la commission a adopté un autre amendement de la rapporteure étendant le champ d’application de l’article 1er aux sites de restauration gérés par les organismes conventionnés dans le cadre de la loi précitée.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission a également adopté un amendement de Mme Violette Spillebout (EPR) obligeant les Crous à proposer cette offre de restauration à 1 euro sous forme de repas à emporter. Selon son auteure, cette généralisation de l’offre de repas à emporter permettra de faciliter l’accès aux sites de restauration et de mieux gérer les flux en réduisant la « congestion » souvent constatée au sein des sites de restauration concernés.

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Le présent article prévoit la remise au Parlement d’un rapport sur l’opportunité de généraliser la gratuité des repas servis par les Crous dans tous leurs sites de restauration et points de vente gérés ou agréés.

La commission a adopté, suivant l’avis favorable de la rapporteure, un amendement de Mme Marie Mesmeur et des membres du groupe LFI-NFP prévoyant la remise au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, d’un rapport relatif à l’opportunité de mettre en œuvre la gratuité des repas servis par les Crous dans tous leurs sites de restauration et points de vente gérés ou agréés.

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Le présent article prévoit la rémise d’un rapport au Parlement sur le soutien de l’État au réseau des œuvres universitaires et scolaires dans son activité de restauration étudiante.

Résultant de l’adoption d’un amendement de la rapporteure, le présent article prévoit la remise au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, d’un rapport sur le soutien de l’État au réseau des œuvres universitaires et scolaires dans son activité de restauration étudiante.

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Le présent article prévoit la remise d’un rapport au Parlement sur les conséquences, dans différentes dimensions, de la généralisation du repas à 1 euro issue de la présente proposition de loi.

Suivant les avis favorables de la rapporteure, la Commission a adopté quatre amendements de Mme Violette Spillebout (EPR) prévoyant la remise au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, d’un rapport sur les conséquences de celle-ci sur la fréquentation des sites de restauration des Crous. Ce rapport détaillera la répartition des publics fréquentant ces sites et bénéficiant du repas à 1 euro, en précisant les profils socioéconomiques des usagers. Il analysera les caractéristiques qualitatives et quantitatives, par assiette servie, de ce type de repas. Enfin, il évaluera les conséquences, pour les finances publiques, de l’application de la présente loi.

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Adopté sans modification

Le présent article garantit la recevabilité de la proposition de loi, condition nécessaire à son dépôt, en instaurant une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs, prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Le présent article vise à ce que l’État assume la charge financière résultant, pour le réseau des œuvres universitaires et scolaires, de la mise en œuvre de la proposition de loi.

Le soutien de l’État au réseau des œuvres universitaires et scolaires apparaît indispensable dès lors que les Crous font d’ores et déjà face à une forte augmentation de la demande en matière de restauration. La compensation prévue par la proposition vise à couvrir les coûts relatifs aux moyens matériels (cuisines, places de restauration assise, etc.) et humains (recrutement d’agents) nécessaires afin de permettre la mise en œuvre du repas à 1 euro dans l’ensemble des sites de restauration gérés par les Crous.


   TRAVAUX DE LA COMMISSION

1.   Réunion du mercredi 4 décembre 2024 à 9 heures 30

La commission examine la proposition de loi visant à rendre accessible à tous les étudiants le repas à 1 euro (n° 519) (Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure) ([22]).

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Les étudiants ont faim. Les chiffres témoignent d’une précarité étudiante grandissante, qui n’est autre qu’une nouvelle forme de pauvreté : en 2023, près d’un étudiant sur cinq déclarait que ses difficultés financières l’empêchaient de vivre dignement ; 65 % d’entre eux disent avoir déjà eu recours à l’aide alimentaire ; 36 % sautent des repas par manque d’argent.

Cette situation est en partie due à la décision de restreindre le dispositif des repas à 1 euro pour tous les étudiants, institué pendant la crise sanitaire. En réservant ce tarif aux seuls étudiants boursiers ou identifiés comme précaires par les services sociaux des Crous (centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires), le gouvernement a privé de nombreux étudiants d’un dispositif dont ils avaient besoin.

Accorder le repas à 1 euro en priorité aux étudiants boursiers, c’est persister à fonder cette mesure de justice et d’égalité sur un statut de boursier pourtant largement dépassé. Ses lacunes sont en effet connues : effets de seuil, prise en compte injuste des revenus des parents, faible adaptabilité du fait d’un calcul fondé sur les revenus de l’année précédant la demande. À notre grand regret, cela ne devrait pas s’arranger dans un avenir proche, le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche ayant annoncé un nouveau report de la réforme du système des bourses, que tous les acteurs du secteur appellent pourtant de leurs vœux.

Pour les étudiants non boursiers mais précaires, l’accès au dispositif reste, quant à lui, trop limité. Il faut notamment constituer un dossier et prendre rendez-vous auprès des assistants sociaux du Crous. Malgré le travail et les efforts quotidiens de ces derniers, les délais d’attente peuvent atteindre plusieurs mois, en particulier au moment sensible de la rentrée universitaire, quand ils ne dissuadent pas les étudiants de déposer une demande. Plus profondément, ces procédures varient fortement d’un Crous à l’autre, notamment s'agissant des documents à présenter pour faire état d’une situation de précarité. Elles sont donc porteuses d’inégalités et leur caractère intrusif, voire stigmatisant, pose question. Enfin, cette possibilité est limitée, dans la pratique, par la faible information des étudiants sur les aides auxquelles ils pourraient prétendre.

Finalement, seul un étudiant non boursier sur dix a recours au dispositif, soit 40 000 jeunes, sur plus de 400 000 qui en auraient besoin. Nous ne pouvons pas nous accommoder d’un tel taux de non-recours, ni prétendre apporter des aides qui ne seront, en réalité, pas sollicitées par leurs destinataires.

La loi dite Levi du 13 avril 2023 visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré a le mérite de prendre en compte les étudiants les plus éloignés des centres de restauration universitaire, mais présente une lacune : elle ne définit pas ce qui constitue une « offre de restauration à tarif modéré », si bien que les repas servis dans ce cadre peuvent continuer de grever les budgets des étudiants les plus précaires. Par ailleurs, la compensation financière de 40 euros par mois prévue pour les boursiers ne disposant d’aucun site de restauration à moins de vingt minutes de leur lieu d’études est insuffisante : n’avons-nous donc que 60 centimes par repas à offrir à nos étudiants ?

Il y a près de deux ans, je déposais une proposition de loi visant à étendre le repas à 1 euro à tous les étudiants. En février 2023, elle était rejetée à une voix près dans l’hémicycle. Depuis, l’accroissement de la précarité étudiante a confirmé la nécessité de cette mesure, que j’ai l’honneur de défendre de nouveau aujourd’hui.

Dans le cadre de mes travaux préparatoires, j’ai visité les Crous de Caen, de Nancy, de Marseille, de Lille, de Bordeaux et bien d’autres. J’ai rencontré de nombreuses organisations étudiantes – l’Union étudiante, la Fage (Fédération des associations générales étudiantes), l’Unef (Union nationale des étudiants de France) – ainsi que des associations de solidarité comme Cop1. Je me suis entretenue avec des représentants de la CGT, avec les responsables du Cnous (centre national des œuvres universitaires et scolaires), ainsi qu’avec les directeurs des Crous de La Réunion, de Bordeaux, de Créteil, ou encore de Corse. J’ai échangé avec l’Association des villes universitaires de France ainsi qu’avec France Universités, dont les membres étaient mobilisés hier contre la baisse du budget des universités et à qui j’adresse tout mon soutien. Je tiens à remercier toutes ces personnes pour leur implication et la qualité de nos échanges et à saluer leur dévouement précieux dans le contexte social dégradé que nous connaissons.

L’instauration d’un tarif unique à 1 euro comporterait plusieurs avantages. Ce tarif effacerait les différences de traitement injustifiées opérées entre les étudiants en raison de leur situation vis-à-vis du système des bourses et constituerait une première étape vers le soutien universel à l’émancipation des jeunes, décorrélé des ressources de leurs parents, que le groupe Socialistes et apparentés promeut depuis plusieurs années.

Il remédierait aux effets de seuil et au problème du non-recours, les étudiants précaires étant peu au fait des démarches à effectuer. Ouvert à tous les étudiants, il bénéficierait avant tout aux plus précaires, puisque les Crous sont principalement fréquentés par des étudiants modestes, le prix étant leur premier facteur d’attractivité. Prétendre qu’une masse d’étudiants privilégiés se ruerait vers les restos U si la mesure était votée, c’est par ailleurs méconnaître la sociologie des universités, avant tout composées de jeunes des classes modestes et moyennes.

La proposition de loi vise également à assurer un meilleur maillage territorial du dispositif, beaucoup d’étudiants manquant d’un restaurant universitaire à proximité de leur lieu d’études. Pour ce faire, le premier levier consiste à étendre l’offre à tous les points de vente gérés par les Crous, notamment aux cafétérias, afin que ce service public soit proposé sur tous les campus, même sur les plus petits. La seconde étape serait d’étendre l’offre de restauration à 1 euro aux sites agréés par les Crous, dans le sillage de la loi Levi, qui encourage le conventionnement de structures publiques et privées dans les zones dépourvues de sites de restauration universitaire.

Ce texte est enfin un appel à renforcer les moyens alloués au réseau des œuvres universitaires, en particulier pour soulager les agents, qui font face à une forte augmentation de la demande, et pour désengorger les restaurants universitaires, dont les files d’attente s’allongent. Je réitère mon soutien aux agents des Crous, qui travaillent souvent dans des conditions difficiles et composent avec des moyens insuffisants. Le coût de cette proposition de loi, estimé à environ 90 millions d’euros, inclut une hausse des moyens mis à leur disposition.

J’ajoute que l’activité des restaurants des Crous n’a pas vocation à être rentable : ayons le courage de la considérer comme une activité de service public, au même titre que l’école ou l’hôpital. La précarité étudiante est un phénomène d’ampleur, qui appelle une réponse forte des pouvoirs publics. Les dernières annonces du ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, et, plus largement, le désengagement de l’État en la matière, dont témoigne la baisse significative des crédits consacrés à la vie étudiante dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025, devraient nous inquiéter.

Un sursaut est indispensable. La mise à disposition d’une offre de restauration à 1 euro pour tous les étudiants serait la première étape du long chemin qu'il nous faut emprunter pour mettre fin à la pauvreté étudiante. Un pays comme le nôtre doit traiter correctement ses étudiants, qui rendront largement à l’État, au cours de leur vie de travail, ce qu’ils auront perçu.

François Mitterrand disait : « Si la jeunesse n’a pas toujours raison, la société qui la méconnaît et qui la frappe a toujours tort ». Soyons à la hauteur.

Mme Frédérique Meunier, présidente. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Bruno Clavet (RN). La situation des étudiants en France n’a jamais été aussi alarmante que sous Emmanuel Macron : 43 % des étudiants sautent des repas et 76 % ne disposent que de 3 euros par jour pour vivre – ou survivre. Pourtant, Emmanuel Macron avait promis dès 2017 de faire de la jeunesse et des étudiants une priorité, s’engageant notamment à éradiquer la précarité alimentaire. Il avait également annoncé une revalorisation massive des bourses, pour les rendre plus accessibles et adaptées aux besoins. Force est de constater que ces promesses, comme tant d’autres, sont restées lettre morte.

Face à cet énième renoncement, c’est au Parlement qu’il revient de s’emparer de cette réalité indigne d’un pays comme le nôtre, censé être celui de l’égalité des chances. C’est pourquoi la mesure consistant à proposer un repas à 1 euro à tous les étudiants constitue un premier pas intéressant. Elle promeut des valeurs d’égalité qui sont au cœur de l’engagement du Rassemblement national, selon lesquelles chacun doit avoir les mêmes chances d’où qu’il vienne et où qu’il naisse en France.

Les députés du Rassemblement national sont donc prêts à soutenir cette proposition de loi. Ils prouvent ainsi une fois de plus qu’ils ne sont pas sectaires, acceptant d’ajouter leur voix aux vôtres – une attitude qui n’est malheureusement que rarement partagée, mais qu’importe : notre esprit de responsabilité demeure intact, car notre priorité est et restera toujours l’intérêt des Français.

C’est dans cet esprit de coconstruction que ma collègue Tiffany Joncour a déposé un amendement visant à équilibrer la proposition de loi et même à la renforcer, en prévoyant d’instaurer le repas à 1 euro pour les étudiants boursiers et à 2 euros pour les autres. Cette modulation tarifaire respecterait les réalités financières de chacun tout en maintenant une aide substantielle pour ceux qui en ont le plus besoin. Elle permettrait aussi aux Crous de préserver la qualité des repas sans les mettre sous pression.

Nous réaffirmons notre soutien à ce texte, a fortiori si notre amendement est adopté. Ce soutien sera d’ailleurs indispensable à son adoption. En 2023, un texte similaire avait été rejeté à une voix près, à cause de l’opposition des macronistes. La donne a changé : ils ne sont plus majoritaires et c’est une bonne nouvelle, pour les étudiants comme pour la France. Voilà qui montre bien que, pour défendre les avancées sociales, mieux vaut croiser sur sa route les députés du Rassemblement national que ceux d’Emmanuel Macron.

Mme Graziella Melchior (EPR). En 2020, pour faire face aux difficultés économiques des étudiants en pleine crise du covid, notre majorité a instauré le repas à 1 euro dans les Crous. Le dispositif a depuis été maintenu pour les boursiers et pour les étudiants précaires qui en font la demande. Afin d’assurer la pérennité du droit à un tarif minoré, notre groupe avait également déposé une proposition de loi, défendue par Anne Brugnera en février 2023.

En outre, pour pallier les effets de l’inflation, la ministre chargée de l’enseignement supérieur Sylvie Retailleau avait annoncé la plus forte revalorisation des bourses depuis dix ans : toutes ont augmenté, de 37 à 127 euros par mois, et 35 000 étudiants supplémentaires ont été reconnus comme boursier.

Nous avons donc apporté des réponses concrètes aux étudiants en difficulté, dans un souci de justice sociale.

À l’heure d’examiner votre texte, je me demande en quoi le fait de rendre le repas à 1 euro accessible à tous les étudiants, y compris à ceux dont les parents disposent de moyens financiers importants, sert la justice sociale. La démocratisation de l’enseignement supérieur permet à de plus en plus de jeunes issus de familles modestes de s’inscrire à l’université. C’est bien eux que nous devons soutenir. Il me semblait que cela faisait partie des valeurs de la gauche.

Rappelons qu’une tarification sociale s’applique pour tous dans les restos U, le prix du repas étant fixé à 3,30 euros quand son coût réel s’établit entre 7 et 9 euros. Quel message envoie-t-on aux jeunes en prétendant qu’on peut manger pour 1 euro, au moment où, devenant autonomes, ils prennent conscience du coût de la vie ? Je pense aussi aux agriculteurs, qui s’engagent pour fournir une alimentation toujours plus saine et de qualité et dont nous défendons par ailleurs la rémunération. Notre collègue Philippe Fait défendra d’ailleurs un amendement afin que le coût réel des repas soit affiché dans les Crous.

Par ailleurs, une enquête de l’Ifop révèle que seuls 54 % des étudiants fréquentent régulièrement les restos U, notamment en raison de l'éloignement géographique et de files d’attente excessives. Votre proposition ne risque-t-elle pas d’aggraver le problème ? Peut-être conviendrait-il, avant tout, de s’assurer que les étudiants qui en ont besoin bénéficient réellement du repas à 1 euro. N’oublions pas non plus les inégalités territoriales : de nombreux établissements ne se trouvent pas à proximité d’un restaurant universitaire.

Bien conscient des difficultés plurielles qui persistent et afin de garantir que ce droit ne subisse pas les aléas politiques, notre groupe soutiendra donc l’amendement de Bertrand Sorre, qui vise à inscrire dans le code de l’éducation un tarif minoré, fixé à un 1 euro pour tous les étudiants boursiers et précaires. C’est cela, me semble-t-il, la justice sociale.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Merci d’avoir redéposé ce texte. Il y a quelque chose de ridicule, et même d’indécent, à devoir débattre une nouvelle fois, des années plus tard, de l’opportunité d’accorder 2 euros par jour à des étudiants dont la moitié explique ne pas manger à leur faim. Soyons honnêtes : si nous devons nous battre, c’est parce qu’un homme, seul, bloque tout, alors que la société comme l’Assemblée nationale sont majoritairement favorables au repas à 1 euro. Cet homme, c’est Emmanuel Macron.

Deux images marqueront particulièrement ses quinquennats : les files d’étudiants devant les lieux de distribution d’aide alimentaire et les repas à Versailles où il invite ses amis, au premier rang desquels Bernard Arnault. Il est temps de choisir entre le champagne pour quelques-uns et le repas Crous pour tous.

Ceux qui s’opposent au repas à 1 euro au motif que le fils de Bernard Arnault en bénéficierait également ont le souci d’équité sélectif ! En effet, le fils de Bernard Arnault n’a pas besoin de travailler pour payer ses études, contrairement au fils de l’assistante maternelle, qui a donc moins de temps pour réviser. Cet argument de l’équité est déconnecté et de mauvaise foi. Seuls 43 000 étudiants non boursiers bénéficient du repas à 1 euro, alors qu’ils sont 417 000 à en avoir besoin. En réalité, si vous ne voulez pas de cette mesure, c’est parce qu’Emmanuel Macron a choisi d’abandonner les étudiants. Elle ne coûterait que quelques millions, mais c’est déjà trop pour lui !

Le cœur du problème est la question de la solidarité sociale et nationale. Tant que l’accès aux études dépendra du revenu des parents, chargés de financer le train de vie de leur enfant, les inégalités persisteront – certains pourront permettre au jeune de vivre au-dessus du seuil de pauvreté, d’autres non. C’est pourquoi je vous appelle à vous rallier à l’idée du revenu étudiant, seule mesure structurelle susceptible de sortir des centaines de milliers d’étudiants de la précarité dans laquelle ils sont enfermés depuis des années. À mesure que le temps passe, le nombre d’étudiants à l’université augmente. Le problème ne fera donc qu’empirer, sauf si la précarité infligée aux jeunes issus des milieux populaires parvient à les dissuader de s'inscrire à l’université !

Au vu du blocage politique qui s’annonce, et au-delà du sort de ce texte, auquel je suis favorable, j’appelle les étudiants à se mobiliser contre ce gouvernement de radins que j’ai hâte de faire tomber et contre cette minorité présidentielle que nous avons hâte de dégager, pour mettre fin à la précarité dans laquelle vous les enfermez.

Mme Florence Herouin-Léautey (SOC). La précarité étudiante atteint des niveaux alarmants, au point de remettre en cause le droit fondamental à poursuivre des études supérieures dans des conditions dignes. Chaque jour, des milliers de jeunes, faute de moyens, font la queue pour obtenir des colis alimentaires. D’autres peinent à se loger ou vivent dans des conditions insalubres. Nombre d’entre eux doivent cumuler études et petit boulot pour subvenir à leurs besoins, souvent au détriment de leur réussite académique et de leur santé.

Cette précarité n’est pas qu’un simple chiffre ou une anecdote. Elle est une réalité brutale et quotidienne pour toute une génération : 36 % des étudiants déclarent avoir déjà sauté des repas par manque d’argent. Cette réalité à des conséquences auxquelles il nous revient d’apporter des solutions. Beaucoup d’étudiants renoncent à se soigner, alors que la santé mentale des jeunes ne cesse de se détériorer. À terme, ces difficultés compromettent l’égalité des chances et c’est notre avenir collectif qui s’en trouve fragilisé. Réjouissons-nous de l’augmentation significative du nombre d’étudiants depuis dix ans, mais soyons à la hauteur de leurs ambitions et accompagnons-les.

C’est précisément ce que permettra cette proposition de loi en instaurant un repas à 1 euro pour tous les étudiants. Cette mesure n’est pas seulement de nature financière, elle touche aussi à un enjeu de santé publique : bien manger, c’est mieux vivre. Les conséquences de l’alimentation sur la santé physique, la concentration, la réussite dans les études et, à terme, la capacité à s’épanouir et à construire son avenir sont bien réelles. La précarité alimentaire n’est pas une fatalité, mais une injustice. Un repas équilibré ne devrait jamais être un luxe. Pourtant, nombreux sont les étudiants qui sautent des repas ou se tournent vers des solutions peu nutritives car ils ne peuvent pas se permettre autre chose. Garantir à chaque étudiant un repas à 1 euro, c’est garantir non seulement de quoi manger, mais aussi de quoi se construire sainement.

Le texte traite aussi de la question de l’accessibilité géographique en généralisant le dispositif à tous les sites des Crous, y compris les cafétérias. Cela permettra de couvrir les besoins, non seulement dans les grandes villes, mais aussi dans les zones où l’offre est insuffisante, afin que chaque étudiant, où qu’il soit, puisse bénéficier de cette avancée.

Cette proposition de loi est un acte de justice sociale et d’égalité républicaine. En l’adoptant, nous enverrons un message clair : aucun étudiant ne devrait avoir à choisir entre manger et étudier. Soutenir la jeunesse, c’est investir dans l’avenir de notre pays. Je vous invite à voter ce texte, pour que les mots « solidarité » et « égalité » prennent tout leur sens.

Mme Béatrice Piron (HOR). Cette proposition de loi s’inscrit dans une démarche louable : lutter contre la précarité étudiante, qui est un problème crucial. Les chiffres le rappellent : près de 700 000 étudiants bénéficient d’une bourse sur critères sociaux et plus de 20 millions de repas ont été servis dans ce cadre en 2021 – un dispositif précieux pour des étudiants de plus en plus en difficulté.

Cependant, une bonne intention ne suffit pas toujours à produire une politique publique juste et efficace.

Tout d’abord, le texte, en généralisant les repas à 1 euro, y compris pour les étudiants qui ont les moyens de s’acquitter du tarif social, nuit à la justice sociale et pourrait réduire l’efficacité du dispositif actuel, ciblé sur les plus précaires.

De plus, il accentuerait l’écart entre le coût de production des repas et leur prix de vente, augmentant la charge financière pour les Crous de plusieurs centaines de millions d’euros par an, dans un contexte budgétaire déjà tendu. Est-ce responsable ? Cette forte pression les contraindrait à réduire leurs coûts de production, ce qui pourrait compromettre l'intégration de produits bio ou locaux, pourtant essentiels à une alimentation saine et durable.

Par ailleurs, cette extension du repas à 1 euro risque de fragiliser le réseau des Crous, qui compte près de 1 000 points de restauration, lesquels ont servi plus de 35 millions de repas en 2022, soit une hausse de près de 30 % par rapport à 2021. Saturer ces infrastructures pourrait nuire à la qualité des prestations offertes et les bénéficiaires les plus précaires pourraient être pénalisés par des temps d’attente prolongés ou par une réduction des capacités d’accueil.

L’enjeu n’est pas tant de généraliser le repas à 1 euro que d’en améliorer le ciblage et d’accompagner les publics fragiles. La réforme des bourses prévues pour 2024 ou 2025 pourrait corriger certains effets de seuil pénalisant les classes moyennes. Il est également essentiel de mieux informer les étudiants sur leurs droits, car beaucoup ignorent pouvoir prétendre à une tarification réduite dès leur inscription. La France est le seul pays européen à proposer des repas complets à 3,30 euros, partout, pour tous les étudiants. Nous pouvons être fiers de ce modèle. C’est pourquoi nous soutiendrons les amendements de MM. Sorre et Croizier visant à inscrire l’information sur le tarif à 1 euro dans la loi.

Mon groupe est convaincu que cette proposition de loi, malgré les bonnes intentions de ses auteurs, manque de pragmatisme. Généraliser le repas à 1 euro conduirait à diluer les moyens au détriment des plus fragiles, tout en aggravant les tensions budgétaires. Nous voterons donc contre ce texte.

Mme Pascale Bay (DR). Dans une période de déficit public record, qui exige un effort de chacun, les parlementaires doivent faire preuve d’exemplarité et limiter les dépenses de l’État au strict nécessaire. Un repas servi par le Crous coûte environ 9 euros à produire : les tarifs pratiqués sont donc déjà très avantageux. Ramener pour tous le prix du repas de 3,30 à 1 euro est une dépense injustifiée, qui laisse un reste à charge pour l’État de 8 euros par repas.

Le rôle du législateur n’est pas de créer des dépenses qui ne répondent à aucun besoin. Nous nous opposons donc fermement à tout élargissement de l’offre de repas à 1 euro aux étudiants non boursiers. Nous considérons cependant que le système actuel doit être pérennisé et qu’il est nécessaire de protéger les étudiants boursiers et non boursiers en situation de précarité identifiés par le réseau des œuvres universitaires. En effet, la précarité alimentaire des étudiants est une réalité et nous devons leur apporter notre soutien.

D’une part, il est de notre devoir d’inciter le Cnous à implanter des restaurants universitaires dans les territoires qui en sont dépourvus. Le repas à 1 euro pour tous signifierait moins d’ouvertures de sites de restauration dans les territoires ruraux et dans les établissements isolés. D’autre part, nous devons organiser la lutte contre le non-recours aux aides, avec le soutien des universités. Les plus précaires des étudiants ont besoin d’être mieux informés et aidés pour profiter des dispositifs existants.

Il serait plus pertinent de permettre à des étudiants qui en ont besoin de profiter d’une aide à laquelle ils n’ont pas accès, plutôt que de donner des avantages supplémentaires à des étudiants qui n’en ont pas besoin.

M. Jean-Claude Raux (EcoS). Nous pouvons faire ce matin un nouveau pas – sans doute pas décisif, mais symbolique – contre la précarité étudiante, après tant de débats, d’alertes, de manifestations et de vrais drames. La généralisation du repas à 1 euro est une nécessité, quand 26 % des jeunes de 18 à 24 ans vivent sous le seuil de pauvreté, quand plus d’un étudiant sur trois affirme avoir déjà sauté un repas par manque d’argent – et jusqu’à deux sur trois dans certains territoires ultramarins – et quand 20 % des étudiants ont recours à l’aide alimentaire.

On me répondra certes que personne n’a jamais fait autant pour les étudiants que les derniers gouvernements. Allons donc demander à tous les jeunes dans les files de distribution, à ceux qui sont forcés de travailler à côté, s’ils vivent mieux depuis l’élection d’Emmanuel Macron : nous avons une petite idée de la réponse ! En espérant l’adoption définitive du repas à 1 euro, j’ai une pensée émue pour tous les étudiants qui ressentent de la honte à être précaires, pour ceux qui bénéficient de l’aide alimentaire, pour ceux qui demandent de l’aide auprès d’un assistant de service social ou qui, au contraire, n’osent pas en demander. Recevoir de l’aide ne devrait jamais être une honte. On ne répétera jamais assez à ces jeunes qu’ils ne sont pas responsables de la précarité dans laquelle ils se trouvent. Ils sont victimes d’une absence criante et insupportable de justice sociale.

La généralisation du repas à 1 euro est une réponse immédiate aux attaques des gouvernements contre l’université publique et le système de protection sociale de notre pays, une réponse aux carences de l’État dans la protection de sa jeunesse, une mesure urgente qui doit ouvrir un nouveau chapitre de réformes structurelles contre la pauvreté des jeunes, parce que « jeunesse » ne devrait plus jamais rimer avec « détresse » et que la pauvreté ne peut plus constituer une forme de rite de passage pour nos jeunes.

Surtout, le groupe Écologiste et social plaide pour que la réforme globale du système de bourses finisse par voir le jour, pour que les plans de construction de logements de Crous soient respectés et renforcés, et pour que les frais d’inscription soient supprimés. À terme, une garantie d’autonomie pour chaque jeune nous semble indispensable.

Le texte qui nous est soumis a été rendu possible par le combat des syndicats étudiants et par les alertes et les actions des associations étudiantes qui luttent contre la pauvreté, comme Linkee ou Cop1. Je tiens à saluer le travail et l’abnégation de notre présidente et rapporteure, Mme Keloua Hachi.

Le groupe Écologiste et social votera bien évidemment pour ce texte. Étendre ces droits n’est pas un cadeau que nous faisons aux étudiants, mais notre devoir. J’en appelle donc à votre humanité et à votre responsabilité : votez ce texte !

M. Laurent Croizier (Dem). Selon une étude d’octobre 2024, plus d’un tiers des étudiants déclarent sauter régulièrement un repas par manque d’argent. La précarité étudiante est un fléau auquel les députés démocrates refusent de se résoudre. La France est, et nous en sommes fiers, le seul pays du monde à proposer une restauration à tarif social à tous les étudiants. Alors que le coût réel d’un repas au Crous se situe autour de 8 euros, le tarif du repas universitaire est maintenu depuis 2019 à 3,30 euros. C’est notre majorité qui a mis en place, en 2020, lors de la crise du covid, le repas à 1 euro à l’intention des étudiants boursiers, avant de l’étendre à tous les étudiants en 2021. Nous l’avons ensuite maintenu pour les étudiants boursiers et les étudiants non boursiers se déclarant en situation de précarité.

Pour le groupe Les Démocrates, chaque euro dépensé doit avoir du sens et être utile, a fortiori dans un contexte budgétaire difficile. Il est donc une seule et unique question à se poser à propos de cette proposition de loi : l’extension du repas à 1 euro à tous les étudiants, sans aucun critère social, permet-elle de lutter efficacement contre la précarité étudiante ? La réponse me semble négative, pour trois raisons en particulier.

La première est que cette mesure profiterait uniquement aux jeunes non boursiers ou ne se déclarant pas en situation de précarité, qui bénéficient déjà d’un tarif aidé à 3,30 euros. Ensuite, elle bénéficierait indifféremment aux étudiants issus de familles très modestes ou des familles les plus aisées. Enfin, les 90 millions d’euros qu’elle coûterait par an nous sembleraient plus utiles s’ils étaient orientés vers l’aide aux étudiants précaires ou vers le logement étudiant, qui est une question majeure.

À l’égalité, qui veut la même aide pour tous, nous, démocrates, préférons l’équité, qui offre l’aide la plus juste à ceux qui en ont réellement besoin. Cette proposition de loi manque totalement sa cible. Elle est empreinte d’un égalitarisme qui oublie que l’enjeu n’est pas d’offrir le repas à 1 euro aux étudiants les plus aisés, mais de répondre à la précarité des étudiants les plus fragiles.

Nous nous demandons, par ailleurs, quel sens il y a à fixer dans la loi le montant d’un tarif de restauration. En effet, la loi n’a pas à souffrir du temps : or quel sens auront des montants de 1 ou 2 euros dans deux, cinq ou dix ans ?

En cohérence, et en reprenant la proposition rédigée en 2023 avec nos collègues de Renaissance et Horizons, le groupe Les Démocrates défendra deux amendements relatifs à un enjeu qui nous semble plus pertinent que l’extension du repas à 1 euro aux plus aisés : pérenniser et inscrire dans la loi le principe d’une tarification sociale minorée ciblée sur les étudiants boursiers et les étudiants non boursiers en situation de précarité.

M. Salvatore Castiglione (LIOT). Si la précarité étudiante n’a pas été créée par la crise sanitaire, celle-ci l’a fortement aggravée. Les confinements ont cessé, mais les étudiants continuent de faire la queue devant les épiceries solidaires. Avec l’inflation des dernières années, la hausse du coût de la vie des étudiants se poursuit, tirée également par l’augmentation des loyers, du prix d’internet et, bien sûr, de l’alimentation. Aujourd’hui, 65 % des étudiants interrogés déclarent avoir recours à l’aide alimentaire et plus d’un tiers déclarent sauter parfois un repas par manque d’argent ou par priorité. Ce chiffre supérieur de sept points à la moyenne nationale est le signe que, malheureusement, la précarité alimentaire est structurellement ancrée dans la population étudiante.

Durant la précédente législature, notre groupe avait déjà défendu le maintien du ticket-restaurant universitaire à 1 euro pour tous, et non pas seulement pour les étudiants boursiers, car la précarité étudiante est une double peine : non seulement les difficultés financières empêchent les étudiants d’accéder aux biens et services les plus élémentaires, mais elle amène en outre la moitié d’entre eux à exercer une activité rémunérée, au détriment de leur réussite scolaire.

Payer non pas 3,30 euros, mais 1 euro pour un repas est loin d’être anecdotique : cela représente de 70 à 140 euros d’économies par mois. Le dispositif mériterait par ailleurs d’être simplifié pour les étudiants non boursiers précaires, qui doivent déposer sur le site du Crous un dossier en ligne avec justificatifs, alors que les étudiants connaissent très mal leurs droits.

Cette disposition doit s’appliquer au moins le temps qu’intervienne une vraie réforme des bourses, qui tarde à venir depuis son annonce en 2022 – 60 % des étudiants en sont exclus, dont ceux qui sont issus des classes moyennes. La priorité est de viser les étudiants se situant dans la zone de fragilité, en révisant les critères et en luttant contre les effets de seuil. La situation des étudiants ultramarins doit aussi être particulièrement scrutée.

Bien sûr, pouvoir accéder à un resto U n’est pas seulement une question de prix : les horaires et les inégalités territoriales sont d’autres questions sur lesquelles il faudra se pencher. L’annonce d’une aide pour ceux qui en sont éloignés est un premier pas, mais elle ne réglera pas tout. D’ici à une vraie réforme des bourses et de la restauration universitaire, le rétablissement du repas à 1 euro, sans être la solution miracle à la précarité de tous les étudiants, sera une respiration pour beaucoup d’entre eux, encore trop nombreux.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Deux ans pratiquement se sont écoulés depuis la première fois que notre assemblée a examiné cette proposition de loi visant à offrir à tous les étudiants le repas à 1 euro. À l’époque, la crise avait mis en lumière la fragilité des conditions de vie des jeunes. Nous nous souvenons tous des images qui tournaient en boucle sur les chaînes de télévision, montrant des files d’attente interminables pour l’aide alimentaire. Ces images nous avaient émus, mais manifestement pas assez pour convaincre les députés qui avaient voté contre, arguant que le dispositif aurait bénéficié à tous les jeunes sans distinction.

La précarité étudiante est pourtant devenue une réalité bien ancrée. Ce n’est plus une question passagère liée à la crise sanitaire. D’ailleurs, les enquêtes de l’Observatoire de la vie étudiante sont claires : au moins un quart des étudiants vivent dans la précarité. Lors de cette rentrée, par exemple, les étudiants non boursiers ont subi une augmentation de près de 3 % des frais d’inscription et de la CVEC (contribution de vie étudiante et de campus), à quoi s’ajoute une hausse des loyers de 2,5 %, alors que le logement reste le principal poste de dépense. Face à cette explosion des coûts, les étudiants ne peuvent couper que dans l’alimentation. Résultat : 20 % des étudiants ne mangent pas à leur faim et 36 % sautent régulièrement des repas.

Aujourd’hui, le dispositif des repas à 1 euro est réservé aux boursiers et, pour les non boursiers, soumis à une évaluation sociale. Ce n’est clairement pas suffisant.

La proposition de loi que nous examinons a un objectif simple : élargir à tous les étudiants ce repas à 1 euro, parce qu’en leur garantissant des repas variés et équilibrés, nous faisons un pas pour l’amélioration de leurs conditions de vie et de réussite.

Il faut cependant préciser que ce tarif devrait aussi être appliqué dans les restaurants agréés par le Crous, qui offrent aux étudiants qui ne disposent pas d’un restaurant universitaire à proximité des repas complets à tarif social. Il serait incohérent de les exclure du dispositif.

Le groupe GDR votera donc en faveur de cette proposition de loi qui va dans le sens d’une amélioration réelle des conditions de vie des étudiants. Nous espérons qu’elle pourra ouvrir la voie à une proposition de loi-cadre sur l’avenir de notre jeunesse permettant d’aborder les multiples enjeux auxquels celle-ci est confrontée, comme l’accès au logement et à l’enseignement supérieur ou la création d’un revenu étudiant qui garantisse à chacun une autonomie financière durant ses études.

M. Maxime Michelet (UDR). L’importante croissance de la précarité étudiante suscite une inquiétude unanime, à laquelle l’UDR s’associe naturellement, et nous saluons l’engagement de Mme la rapporteure sur cette question. Les chiffres sont alarmants : qu’il s’agisse de l’alimentation, du logement, de la mobilité ou de la santé mentale, tous les indicateurs se dégradent. Ainsi, les deux tiers des étudiants français auraient déjà eu recours à l’aide alimentaire. Ce chiffre est intolérable.

Face à cette réalité, nous devons proposer des solutions efficaces, sans céder aux effets d’annonce. Aujourd’hui, le repas dans les restaurants du Crous coûte 3,30 euros pour l’ensemble des étudiants et 1 euro pour les étudiants boursiers ou en situation de précarité. Ces prix sont déjà très bas au regard de l’inflation que connaît notre pays, et appuyés sur des mécanismes d’ajustement aux réalités sociales.

Avant donc de vouloir baisser à toute force le montant des repas, il convient de nous interroger sur les failles du dispositif actuel, pour mieux répondre aux besoins réels des étudiants. Une récente étude de l’Ifop explique ainsi que 54 % des étudiants profitent actuellement du repas à 3,30 euros dans les restaurants des Crous. Pour ceux qui n’en profitent pas, le premier frein n’est pas le prix du repas, puisque 13 % seulement déclarent que c’est le cas : bien plus nombreux sont ceux qui déclarent être freinés par des disparités territoriales, ou simplement par un déficit d’information. L’universalité du repas à 1 euro ne nous semble donc pas une réponse calibrée aux faits constatés sur le terrain. Les questions d’accès et d’information nous apparaissent plus importantes, particulièrement l’information permettant à tous les étudiants éligibles de recourir au repas à 1 euro.

Nous appelons l’attention de la commission sur la nécessité de garantir une juste rémunération à nos producteurs, agriculteurs et éleveurs, qui nourrissent notre pays et donc aussi nos étudiants. Dévaluer ainsi le prix des repas pourrait se révéler contre-productif et engendrer une pression accrue sur le prix des denrées alimentaires, à moins de promouvoir un modèle excessivement déficitaire, qui ne saurait être durable et vertueux, surtout en l’état actuel des finances publiques.

Dans notre pays, où les études supérieures sont déjà quasi intégralement prises en charge par l’État, nous devons veiller attentivement à l’efficacité de toutes les dépenses engagées dans ce domaine. Compte tenu de l’ensemble de ces éléments et dans le cadre de cet examen en commission, l’Union des droites pour la République s’abstiendra sur ce texte.

Mme Frédérique Meunier, présidente. Nous en venons aux questions des autres députés.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Monsieur Boyard, je suis étonnée par la forme et le fond de vos propos. Si vous avez eu beaucoup de mal à prendre la parole et si vous avez beaucoup bégayé en évoquant le repas à 1 euro, est-ce parce que vous aviez honte – de ne pas avoir été de ceux qui l’ont créé, d’avoir été de ceux qui ont voulu bloquer tous les budgets permettant de le déployer pour l’ensemble de jeunes ? Sommes-nous ici pour lancer de nouveaux challenges ou pour travailler cette proposition de loi, qui a le mérite d’exister ? Il existe un dispositif qui s’adresse à tous les jeunes, dans tous les territoires. Peut-être peut-il être amélioré, et c’est pour cela que nous sommes ici, pas pour faire l’influenceur sur les réseaux sociaux pour se faire mousser et flatter son ego. (Exclamations.) Vous ne servez pas à cela. Pendant que vous rigolez, des jeunes comptent sur les députés que nous sommes.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Téma ton bilan de ministre ! (Exclamations.)

Mme Frédérique Meunier, présidente. S’il vous plaît.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Monsieur Boyard, vous êtes rouge de honte. Vous nous dites de nous barrer ? Non, nous sommes élus et nous continuerons à nous mobiliser ici.

Mme Frédérique Meunier, présidente. Je vous remercie…

Mme Prisca Thevenot (EPR). Madame la présidente, il ne s’agit pas seulement de couper le micro à ceux qui parlent, mais de faire en sorte que ceux qui n’ont pas la parole respectent le temps de parole des autres. Nous sommes tous légitimes, tous élus pour siéger, c’est-à-dire pour travailler pour les Françaises et les Français et non pas pour faire les influenceurs. C’était votre métier d’avant, monsieur Boyard, peut-être devriez-vous y revenir.

Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Je tiens à remercier Mme Keloua Hachi pour sa ténacité, sa constance et son engagement pour les étudiants. Quarante pour cent d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté, et encore ce chiffre est-il, selon moi, largement sous-évalué, car je ne connais aucun jeune qui vive avec les 1 216 euros par mois correspondants : on peut donc considérer qu’ils vivent tous sous le seuil de pauvreté. Tous doivent payer leur loyer, leurs charges, leur matériel informatique, leurs titres de transport et leurs repas, tous subissent de plein fouet l’explosion du coût de la vie, avec par exemple l’augmentation de 29,75 % des prix alimentaires depuis le premier quinquennat d’Emmanuel Macron. Aucun n’a le temps de travailler à côté de ses études, sauf à échouer.

Mme Melchior disait tout à l’heure que les étudiants doivent apprendre la vie, qu’ils doivent savoir qu’un repas ne coûte pas 1 euro, qu’ils doivent être autonomes. Mais voulez-vous vraiment qu’ils le soient, alors que vous conditionnez tout aux revenus de leurs parents ? S’ils ne dépendaient plus du revenu de leurs parents, ils seraient tous boursiers.

Nous ne pouvons pas considérer les étudiants, qui sont des adultes, comme des sous-citoyens sous tutelle de leur famille. Chers collègues, ne préférez pas la charité à la solidarité. La République se grandit de ses mesures universalistes.

M. Eric Liégeon (DR). Garantir une alimentation abordable à tous les étudiants est un objectif louable, mais la proposition de loi soulève plusieurs questions. La première est celle de son financement. Vous estimez que la généralisation du repas à 1 euro coûtera entre 90 et 100 millions d’euros : cette dépense est-elle raisonnablement soutenable dans le contexte budgétaire actuel ? Quelles sont les modalités de son financement, sachant en outre que nous risquons de ne pas avoir de budget pour 2025 ?

Par ailleurs, habituer une génération à des repas à prix très bas ne risque-t-il pas de dévaloriser davantage les produits agricoles et le travail de nos agriculteurs en masquant les véritables coûts, alors que cette profession ne cesse de crier sa colère ? Comment cette proposition s’inscrit-elle dans une logique de juste valorisation de la production agricole et d’éducation alimentaire ?

Je rappelle en outre que les Français consacrent aujourd’hui 28 % de leur budget à l’alimentation, contre 35 % en 1960.

M. Erwan Balanant (Dem). Avec ce texte, notre présidente et rapporteure reprend et valorise une idée que nous avons eue, et c’est très bien. Il faut en effet rappeler que c’est notre majorité qui a instauré le repas à 1 euro au moment de la crise du covid, et qu’elle a maintenu ce dispositif au moment où il aurait pu s’arrêter.

Je pose une question sans polémique, car le fait que vous repreniez cette idée montre que nous pouvons travailler ensemble : la précarité étudiante n’existait-elle pas entre 2012 et 2017, période où le prix du repas étudiant est passé de 3,10 à 3,25 euros ? Si le repas à 1 euro n’a pas été instauré à cette époque, c’est parce que, quand on est socialiste, on fait de l’équité, pas forcément de l’égalité, et que le repas à 1 euro casse l’idée d’équité.

Je vous encourage donc à voter l’amendement de Laurent Croizier qui permettra d’inscrire dans la loi une tarification sociale pour tous.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Le jeu d’opposition auquel nous assistons est inutile, et même contre-productif. Je rappelle que 90 % des étudiants précaires, soit 360 000 personnes, n’ont pas accès au repas à 1 euro. Ce dernier, monsieur Balanant, est effectivement une bonne mesure et si notre gouvernement ne l’a pas adoptée en 2012, c’est parce que la précarité étudiante s’est largement accélérée à cause du covid. C’est incontestable. Certes, les étudiants étaient déjà en situation de fragilité et de précarité, mais pendant les deux années de la crise sanitaire, ils n’ont même plus trouvé de jobs étudiants. Et maintenant qu’ils ont retrouvé leurs jobs, l’inflation est telle que cela ne suffit pas. Vous savez très bien que des étudiants vivent dans leur voiture, ce qui n’était pas le cas entre 2012 et 2017. La conjoncture est différente et il faut l’accepter.

Nous devons tous ensemble agir pour les étudiants. Dire, comme le fait le groupe Ensemble pour la République, que les parents qui ont des moyens financiers importants peuvent payer pour leurs enfants, c’est méconnaître la réalité, qui est qu’un étudiant sur deux ne mange pas au restaurant universitaire mais à l’extérieur : tous ceux qui en ont les moyens mangent hors des restaurants universitaires, en raison de leur saturation et de l’obligation d’attendre de trente à quarante minutes pour un repas qui, s’il est équilibré, n’est pas pour autant gastronomique.

Madame Melchior, un étudiant sur deux ne mange pas au restaurant universitaire et ces 50 % sont ceux qui ont les moyens d’aller manger ailleurs. Les restaurants universitaires sont le moyen qui permet aux étudiants modestes et de condition moyenne de manger un repas équilibré. C’est la raison pour laquelle nous proposons d’en fixer le prix à 1 euro. Quant à l’élargissement de ce tarif à tous, soyons honnêtes : l’élargissement pour les étudiants précaires est un échec.

Si je n’ai pas redéposé cette proposition de loi durant la 16e législature, c’est parce que Sylvie Retailleau m’avait promis que tous les étudiants précaires auraient accès à ce repas à 1 euro. C’est un échec : les comptes précis que nous venons de recevoir pour l’année universitaire 2023-2024 montrent que ce n’est le cas que pour 10 % d’entre eux. Faut-il attendre un miracle, ou au moins une communication élargie ? Voilà déjà un an et demi que nous attendons et rien ne s’est rien passé, y compris pour la réforme des bourses, dont M. Hetzel nous a dit qu’elle ne se ferait pas à l’horizon 2025. Faut-il attendre que les étudiants meurent de faim, que les files d’attente devant les banques alimentaires s’allongent encore, que les Restos du cœur ferment leurs portes ? Dans ma ville de Rosny-sous-Bois, les Restos du cœur sont saturés. Parmi les 400 bénéficiaires qu’ils peuvent accueillir, et qui étaient autrefois 400 familles, on compte aujourd’hui 200 personnes de moins de 25 ans. Est-ce cela que nous voulons pour notre société ?

Le défaut de cette proposition de loi est de vouloir que tout le monde mange pour 1 euro. Nous sommes tous conscients que la France est un modèle social, avec des droits d’inscription faibles et un repas à tarif social. Mais nous ne parvenons pas à l’équilibre que nous recherchons entre la possibilité que devraient avoir les étudiants de vivre avec leur propre revenu fiscal et une massification de l’accès aux universités. La preuve que nous ne l’avons pas atteint, c’est que les étudiants de licence qui ne mangent pas à leur faim arrêtent leurs études.

Madame Melchior, le maillage territorial est en effet un problème : les restaurants universitaires ne sont pas assez nombreux. Dans les zones rurales notamment, les étudiants qui étudient dans de petites universités ou dans de petites structures comme des instituts de formation en soins infirmiers n’ont pas de repas à 1 euro, et même pas de repas du tout. Je demande donc une évaluation de la loi Levi, qui devait assurer ce repas à tous les étudiants. En attendant, j’ai déposé un amendement pour rappeler que nous devons trouver des solutions, au moyen par exemple de conventions avec les collectivités. Nous demandons que tous les repas – même dans les lieux conventionnés, qui devraient déjà proposer une tarification à 3,30 euros – soient au tarif de 1 euro.

Monsieur Boyard, l’objet de cette proposition de loi est aussi que nous nous penchions sur la condition des étudiants et sur la vie étudiante. Il est essentiel qu’un étudiant ait le ventre plein et un logement chaud pour pouvoir faire sereinement ses études. Si 40 % des étudiants arrêtent leurs études en licence, c’est par manque de conditions de vie appropriées. Cette situation affecte leur santé mentale, comme le montrent les chiffres du recours des adolescents et jeunes adultes à des consultations de psychologue.

Quant aux coûts de production des repas, nous savons certes qu’il est de 8,80 euros, mais il est grave de penser que les étudiants ne le sauraient pas. De nombreux Crous ne servant pas de repas le soir, les étudiants mangent chez eux et font leurs courses : ils connaissent le prix d’un paquet de pâtes ou celui des légumes. Penser le contraire est un profond manque de respect envers eux, qui sont plus conscients du coût de la nourriture que nous ne l’étions à leur âge. Née dans les années 1970, j’avais conscience, en faisant mes études, de ce que coûtait un sandwich, mais pas de ce que ma mère faisait bouillir dans la marmite. Aujourd’hui, les jeunes le savent. (Exclamations.)

Mme Prisca Thevenot (EPR). Avant aussi !

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Très bien, vous avez vécu la guerre ! J’en suis ravie pour vous. Mais la différence avec les courses que nous faisions voilà vingt ans est que les jeunes sont confrontés aujourd’hui à une inflation terrifiante. Ils peuvent dépenser jusqu’à 6 euros pour un seul repas. Il faut absolument que tous les Crous ouvrent le soir, ce qui n’est cas que pour la moitié d’entre eux.

Enfin, comme l’a très justement rappelé M. Liégeon, les Français mangent moins, ne consacrant plus que 25 % de leur budget à l’alimentation. Surtout, ils mangent moins bien qu’il y a vingt ou trente ans. Les Crous ont donc le devoir d’offrir à nos étudiants un repas équilibré, avec des légumes et des produits locaux. Je ne veux pas que le repas à 1 euro soit un repas au rabais : il doit donner à l’étudiant la quantité et la qualité nécessaires pour qu’il puisse faire sereinement ses études.

Madame Bay, vous considérez que le repas à 1 euro n’est pas une dépense nécessaire. Il est absolument nécessaire de faire manger tous les étudiants, par ce biais ou par un autre. Certes, 90 millions d’euros par an, c’est beaucoup d’argent, mais nous n’avons pas apporté de solution à la précarité alimentaire des étudiants jusqu’à présent. Les 90 % d'étudiants précaires qui ne bénéficient pas du repas à 1 euro ne mangent pas du tout, ou vont chercher des colis repas à l’aide alimentaire. Ce n’est pas une mode, le besoin est réel ! Les personnes âgées de ma circonscription sont choquées par les images des files d’attente devant les banques alimentaires, elles me parlent d’un retour aux tickets de rationnement ! Soit vous avez un peu d’humanité (Exclamations) et vous voyez ces images comme elles sont, soit vous n’en avez pas, auquel cas je ne sais pas ce que vous faites ici. Il est temps de mettre fin à cette période funeste. Le monde nous regarde.

Monsieur Croizier, vos arguments sont justes, à l’exception d’un seul : les étudiants aisés ne mangent pas au Crous. Si l’on a 10 euros dans sa poche pour manger, on va s’acheter un sandwich à la boulangerie ou déjeuner dans une brasserie. Je rappelle aussi que les universités ne prévoient pas de pause déjeuner et qu’il faut au minimum une heure trente pour aller manger au Crous. Tout cela fait que de nombreux étudiants avalent un sandwich dans les escaliers. Par ailleurs, vous pensez que ce montant de 1 euro ne devait pas être inscrit dans la loi. Toutefois, le code de l’éducation mentionne le montant de la CVEC, qui est fléché et même indexé sur l’inflation, contrairement aux bourses. Pour ma part, ce n’est pas un montant mais un plafond que je donne, le prix du repas peut être inférieur.

Enfin, je veux dire un mot des étudiants ultramarins. Le directeur général du Crous de Mayotte décrit une réalité affligeante : un seul restaurant universitaire de 300 places sur l’île, pour des milliers d’étudiants. Bref, dans les faits, tout le monde ne bénéficie pas du repas à 1 euro.

Mme Frédérique Meunier, présidente. Tâchons d’accélérer, sans quoi c’est nous qui risquons de ne pas déjeuner à midi. Dans l’examen des amendements, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin sur l’amendement AC14 et sur l’ensemble de la proposition de loi.

Article 1er : Limitation à un euro du tarif des repas servis dans tous les sites de restauration des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires

Amendement AC14 de M. Laurent Croizier

M. Laurent Croizier (Dem). Cet amendement de réécriture vise à recentrer la proposition de loi autour de l’enjeu fondamental, à savoir aider les étudiants précaires, en inscrivant dans la loi non pas un tarif de repas, mais le principe d'une tarification sociale minorée pour les étudiants boursiers et les étudiants non boursiers en situation de précarité. Il prévoit également d’assurer l’information des étudiants sur ce point. Nous pensons qu’étendre le dispositif sans considérer la précarité des étudiants les plus fragiles, comme le propose le texte, contreviendrait au principe d’équité. Nous avons ici l’occasion de faire un geste fort. Les étudiants comptent sur nous. Ne manquons pas ce rendez-vous.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. L’amendement inscrirait dans la loi une distinction qui pose déjà problème et freine à l’accès libre au repas à 1 euro. Avis défavorable.

M. Erwan Balanant (Dem). Au contraire, cet amendement résout la question ! Inscrire dans la loi l’ambition de prendre soin des étudiants en situation financière difficile serait une véritable avancée. Plutôt que de préciser un montant de 1 euro dont personne ne sait ce qu’il représentera dans quelques années, nous aidons tout simplement les étudiants à suivre leurs études dignement, sans avoir faim. C’est ce que souhaite le groupe Démocrates et, je le crois, une bonne partie de la commission.

Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Madame la présidente, vous venez de dire que c’est nous qui n’allions pas manger. Il est honteux de soupirer toutes les cinq minutes alors que nous parlons de 360 000 étudiants précaires et que 36 % des étudiants sautent des repas par manque d’argent – et, non, il ne s’agit pas du fils de Bernard Arnault dont vous parlez si souvent. Ce ne sont pas les jeunes aisés qui vont au Crous. Cet argument fallacieux est employé dans le seul but de ne rien faire pour ceux qui font la queue devant les banques alimentaires, pour les trois quarts des étudiants qui sont exclus d’un système de bourse injuste, insuffisant et infantilisant, puisqu’il fait dépendre le jeune adulte de ses parents.

Vous êtes à côté de l’histoire et des attentes de la société. La France s’est grandie en instaurant la protection sociale pour le quatrième âge, c'est-à-dire les retraites, mais vous ne faites rien contre la précarité criante, contre les files à l’aide alimentaire, contre la pauvreté qui augmente sous votre quinquennat. En attendant de vous censurer ce soir et d’instaurer l’allocation d’autonomie qui permettra de protéger tous les jeunes, nous voterons contre l’amendement.

Il est procédé au vote, par scrutin public et par appel nominal, sur l’amendement AC14 de M. Laurent Croizier.

Votent pour :

M. Erwan Balanant, Mme Pascale Bay, Mme Béatrice Bellamy, M. Xavier Breton, Mme Danielle Brulebois, M. Joël Bruneau, Mme Céline Calvez, Mme Danièle Carteron, M. Salvatore Castiglione, M. Laurent Croizier, Mme Julie Delpech, M. Philippe Fait, M. Frantz Gumbs, M. Eric Liégeon, Mme Delphine Lingemann, M. Christophe Marion, Mme Graziella Melchior, Mme Frédérique Meunier, Mme Béatrice Piron, Mme Isabelle Rauch, M. Bertand Sorre et Mme Prisca Thevenot.

Votent contre :

Mme Farida Amrani, M. Raphaël Arnault, M. Carlos Martens Bilongo, M. Idir Boumertit, Mme Soumya Bourouaha, M. Louis Boyard, M. Alexis Corbière, M. Pierrick Courbon, M. Emmanuel Grégoire, Mme Ayda Hadizadeh, Mme Florence Herouin-Léautey, Mme Mathilde Hignet, Mme Tiffany Joncour, Mme Florence Joubert, Mme Fatiha Keloua Hachi, Mme Marie Mesmeur, M. Thierry Perez, M. Christophe Proença, M. Jean-Claude Raux, Mme Anne Sicard, M. Thierry Sother, Mme Violette Spillebout, et Mme Sophie Taillé-Polian.

Les résultats du scrutin sont donc les suivants :

Nombre de votants : 45

Pour l’adoption de l’amendement : 22

Contre l’adoption de l’amendement : 23

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC23 de Mme Fatiha Keloua Hachi

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Il vise à placer le dispositif permettant l’extension du repas à 1 euro à tous les étudiants après l’article L. 822-1-1 issu de la loi Levi, qui évoque une « offre de restauration à tarif modéré ».

La commission adopte l'amendement.

Amendements AC21 de Mme Fatiha Keloua Hachi et AC13 de Mme Soumya Bourouaha (discussion commune)

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Mon amendement vise à inclure dans le champ d'application de la proposition de loi les sites de restauration mis à disposition par les organismes agréés dans le cadre de la loi Levi. Il faut absolument rendre effectif l’accès au repas à 1 euro dans un maximum de lieux de restauration, afin que les étudiants puissent en bénéficier dans tous les territoires.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Mon amendement va dans le même sens, en garantissant que l’offre de repas à 1 euro sera accessible dans tous les centres de restauration agréés par le Crous. En corrigeant une inégalité territoriale, nous renforçons notre engagement envers tous les étudiants, en ville ou en milieu rural.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. L'amendement de Mme Bourouaha est parfaitement justifié, mais il est satisfait par le mien. Demande de retrait.

L'amendement AC13 ayant été retiré, la commission adopte l'amendement AC21.

Amendement AC3 de Mme Tiffany Joncour

Mme Tiffany Joncour (RN). Bruno Clavet a parfaitement présenté la position du groupe Rassemblement national : nous soutenons la solidarité et l’aide aux étudiants dans les restaurants universitaires, mais nous devons aussi rester lucides sur la gestion des finances publiques. La généralisation du repas à 1 euro représenterait un coût supplémentaire de 90 millions d’euros par an, un montant difficilement justifiable dans le contexte de crise économique. C’est pourquoi nous proposons une mesure de compromis plus adaptée : un repas à 1 euro réservé aux étudiants boursiers et précaires, qui sont les plus touchés, et à 2 euros pour les autres. Cette tarification différenciée offrirait un soutien aux étudiants en difficulté en étant plus raisonnable du point de vue budgétaire. L’enseignement est le socle de notre avenir car il forme les générations de demain : soutenir l’éducation, c’est investir dans la réussite de la jeunesse et dans la prospérité de la nation.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Avis défavorable. D’une part, 2 euros, c’est encore beaucoup pour certaines bourses. D’autre part, en prévoyant un tarif préférentiel, l’amendement perpétue la différence qui existe actuellement entre les étudiants boursiers et les autres. Les étudiants précaires n’auront toujours pas accès au repas à 1 euro, et le système des bourses n’est pas satisfaisant.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Par cet amendement, le Rassemblement national montre qu’il est macroniste dans sa conception de la précarité étudiante. Il pense sincèrement que, si l’on n’est pas boursier, on n’est pas précaire et que le repas à 1 euro n’est pas justifié. Je rappelle que 417 000 étudiants non boursiers sont en situation de précarité, dont seulement 43 000 ont accès au repas à 1 euro. Et la deuxième proposition du Rassemblement national en matière de lutte contre la précarité étudiante consiste à donner un tout petit peu plus d’argent aux étudiants qui travaillent, et à eux seulement, sans leur permettre de passer au-dessus du seuil de pauvreté. Autrement dit, le Rassemblement national, c’est le macronisme en pire.

M. Erwan Balanant (Dem). Il y a une belle contradiction dans cet amendement du Rassemblement national : vous considérez que 90 millions d’euros supplémentaires, c’est trop cher, tout en proposant d’abaisser le prix du repas de 3,30 à 2 euros.

On le voit, ce n’est pas une question de prix. Le groupe Démocrates est prêt à mettre 90 millions d’euros sur la table pour lutter contre la précarité étudiante, mais il faut les cibler. Discutez avec les gestionnaires des restaurants universitaires : ils disent qu’il est compliqué de tenir les prix avec un repas à 1 euro, et qu’ils préféreraient proposer des repas équilibrés, mieux sourcés, avec des produits de qualité, à ceux qui en ont le plus besoin.

M. Laurent Croizier (Dem). Je suis choqué que l’on veuille fixer un tarif dans la loi à une époque où chacun réclame moins de normes, plus d’agilité, plus de souplesse. Le jour où il faudra changer ce prix, il faudra que l’Assemblée se réunisse, que le texte parte au Sénat, qu’il revienne… S’il fallait faire la même chose pour tous les tarifs, on ne s’en sortirait plus ! Ce n’est pas la conception que je me fais de la loi. Elle doit contenir des principes qui résistent à l’usure du temps.

Enfin, je me délecte de voir M. Boyard défendre le repas à 1 euro pour les riches.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Il ne s’agit pas d’un tarif, mais d’un plafond : le prix du repas pourrait être fixé à 90 centimes, voire gratuit. Et quand bien même il s’agirait d’un tarif, nous avons le précédent de la CVEC dans le code de l’éducation.

La commission rejette l'amendement.

*

2.   Réunion du mercredi 4 décembre 2024 à 14 heures 45

La commission poursuit l’examen de la proposition de loi visant à rendre accessible à tous les étudiants le repas à 1 euro (n° 519) (Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure) ([23]).

Mme Frédérique Meunier, présidente. Nous reprenons l’examen des amendements à l’article 1er.

Article 1er (suite) : Limitation à un euro du tarif des repas servis dans tous les sites de restauration des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires

Amendement AC4 de M. Bertrand Sorre

M. Bertrand Sorre (EPR). C’est en 2020 que notre majorité a eu la volonté de proposer le repas à 1 euro aux étudiants boursiers et à ceux qui sont en situation de précarité. J’en profite pour rappeler le travail de notre collègue Anne Brugnera qui, durant la législature précédente, était très engagée dans l’accompagnement des étudiants.

Le présent amendement propose lui aussi une réécriture générale de l’article, qui est préférable à celle qu’ont soutenue nos collègues du groupe Les Démocrates. Il vise à pérenniser le dispositif actuel en l’inscrivant dans la proposition de loi, donc dans le code de l’éducation, afin qu’il soit accessible à tous les étudiants boursiers et non boursiers en situation de précarité qui en font la demande. En précisant le dispositif, il propose une mesure d’équité et de justice sociale reposant sur le principe d’une aide renforcée au profit de ceux qui en ont le plus besoin.

 

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. S’agissant d’un amendement de réécriture générale de l’article, j’émets un avis défavorable. Comme M. Croizier, vous vous contentez de maintenir le dispositif dans son périmètre actuel et de l’inscrire dans la loi. Nous proposons mieux.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC5 de M. Bertrand Sorre

M. Bertrand Sorre (EPR). Complémentaire du précédent, il vise à inscrire dans le code de l’éducation l’obligation, pour les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), d’informer les étudiants sur la tarification à laquelle les boursiers et ceux qui rencontreraient des difficultés financières ont accès.

L’amendement est retiré.

Amendement AC6 de M. Philippe Fait

Mme Violette Spillebout (EPR). Il vise à rendre obligatoire l’affichage dans les Crous du coût réel des repas qui sont servis. Si le repas à 1 euro est une avancée importante pour la justice sociale et l’accès des étudiants aux services de restauration universitaire, nous souhaitons la compléter par une information claire et transparente sur la gestion des fonds publics qui y sont alloués.

Il s’agit de mettre en valeur le coût des repas, celui d’un approvisionnement auprès de fournisseurs locaux en produits bio et de bonne qualité, auprès de personnes qui ne payent que 1 euro, ou 3,30 si la présente proposition de loi n’est pas adoptée. Cela permet aussi de rappeler la qualité des repas à 1 euro ainsi que l’importance de respecter le travail des agriculteurs et des éleveurs de notre pays qui y contribuent.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Je suis pleinement en accord avec la démarche : il est important de dire clairement combien coûte un repas, mais aussi quelles sont sa qualité nutritionnelle ou la provenance des produits. Toutefois, je ne peux qu’émettre un avis défavorable car il est question dans l’exposé sommaire de l’amendement d’encourager la responsabilisation des gestionnaires des Crous. Cette formulation stigmatisante et agressive méconnaît leur travail.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC11 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Cet amendement m’offre l’occasion de rappeler que, contrairement à certains membres de mon groupe, je suis favorable à la présente proposition de loi. Mais nous avons beaucoup entendu dire, notamment par les membres du groupe La France insoumise, que tout est ralenti dans le processus législatif alors même qu’il y a urgence pour les étudiants. J’aimerais leur rappeler que, pour ralentir le processus législatif, il n’y a rien de tel que renverser le gouvernement. Exciper de l’urgence à adopter la proposition de loi dans ces conditions me semble un peu hypocrite.

Les documents exigés pour justifier de la précarité ouvrant droit au repas à 1 euro, dont je rappelle qu’il est un acquis de notre majorité, induisent un effet de seuil. Par ailleurs, les personnes se présentant aux Crous ne peuvent pas toutes se permettre d’aller ailleurs. Il est donc probable que la présente proposition de loi augmentera les flux dans les Crous. Nous proposons donc d’introduire de façon systématique, dans l’offre de repas à 1 euro, un format de vente à emporter.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. La possibilité de consommer les repas à emporter est intéressante, car elle permet de désengorger les restaurants universitaires et de réduire le temps d’attente des étudiants.

J’émets donc un avis favorable, non sans exprimer une réserve : le repas doit être un moment convivial. Il importe que les étudiants puissent passer un moment à table, assis, à sociabiliser. Compte tenu de la fragilité actuelle de leur santé mentale et de leur isolement, ce moment de la journée est spécialement important. Prévoir une possibilité de vente à emporter permet de désengorger les Crous, mais nous devrons réfléchir, à l’avenir, à d’autres stratégies.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC12 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Le sujet de la précarité alimentaire des étudiants est important. Or nous avons un problème de rapidité dans l’application des lois que nous adoptons, après passage à l’Assemblée, au Sénat puis en commission mixte paritaire. Le présent amendement vise à préciser le calendrier de la mise en œuvre du repas à 1 euro dans les Crous afin que, si la proposition de loi est adoptée, elle soit appliquée dès la rentrée prochaine, pour répondre aux besoins urgents et soulager ainsi, en partie, la précarité étudiante.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Il y a certes urgence, mais nous ne maîtrisons pas le calendrier législatif. La mesure proposée peut même être contre-productive, si par exemple la proposition de loi était promulguée fin septembre ou début octobre 2025. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 1er modifié.

Après l’article 1er

L’amendement AC16 de M. Arnaud Bonnet est retiré.

Amendement AC20 de M. Boris Tavernier

M. Boris Tavernier (EcoS). Faute d’un maillage territorial suffisant, tous les étudiants ne peuvent accéder à une offre de restauration universitaire. La loi Levi, adoptée en 2023, prévoit d’y remédier par une aide financière. Néanmoins, compte tenu des annonces récentes du gouvernement au sujet de son montant, elle ne permettra pas aux étudiants éloignés des Crous d’accéder à une alimentation en quantité et en qualité suffisantes – en 2025, elle sera inférieure à 1 euro par jour pour les étudiants non boursiers et inférieure à 2 euros par jour pour les étudiants boursiers.

Or une étude menée notamment par la nutritionniste Nicole Darmon a démontré qu’il est mathématiquement très difficile, voire impossible de composer un panier équilibré du point de vue nutritionnel pour moins de 3,85 euros par jour et par personne. Le chiffre ayant été calculé en 2017, il est probablement plus élevé à l’heure actuelle, compte tenu de la forte inflation sur les produits alimentaires qu’a connue notre pays. En précisant la loi Levi, le présent amendement vise à garantir aux étudiants éloignés des Crous une aide financière suffisante pour accéder à une alimentation équilibrée.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Sagesse. L’amendement n’est pas dénué d’intérêt mais il est un peu loin du sujet de la proposition de loi. Par ailleurs, il ne prévoit aucun montant précis mais seulement un montant « suffisant », ce qui dit tout et rien à la fois. Je propose que nous procédions à une évaluation de l’application de la loi Levi dans le cadre d’une mission flash, pour déterminer comment se nourrissent les étudiants en zone blanche.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission adopte l’amendement AC1 de Mme Marie Mesmeur.

Amendement AC22 de Mme Fatiha Keloua Hachi

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Il vise à obtenir, dans un délai de six mois après la promulgation de la présente proposition de loi, un rapport sur le soutien de l’État aux Crous. Il est important que l’État assume en permanence son rôle de soutien des Crous et vérifie qu’ils ont les moyens nécessaires pour proposer des repas à 1 euro à tous les étudiants.

La commission adopte l’amendement.

L’amendement AC2 de M. Louis Boyard est retiré.

Amendement AC7 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Un argument légitime contre l’élargissement du repas à 1 euro repose sur la capacité des Crous à absorber d’un seul coup une hausse de fréquentation. Je propose donc de demander au gouvernement un rapport sur l’impact de la loi, au bout d’un an, sur la fréquentation des sites de restauration concernés, qui sont nombreux à avoir besoin d’une rénovation énergétique et d’un agrandissement. Ce rapport permettrait d’évaluer les travaux à mener pour continuer d’accueillir en toute sécurité les étudiants.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Je suis favorable à cet amendement ainsi qu’aux AC8, AC9 et AC10, qui visent aussi à obtenir des rapports du gouvernement. Je suggère de les rassembler en un seul amendement en vue de la séance publique, dans la mesure où ils portent sur divers aspects du même sujet.

Mme Violette Spillebout (EPR). J’aimerais revenir sur l’amendement AC8, qui porte sur la répartition des publics bénéficiant du repas à 1 euro. Dans le système actuel, les étudiants non boursiers doivent produire des justificatifs sur la plateforme des Crous, relatifs notamment à la situation de leurs parents. La procédure dissuade certains de faire une demande.

Si le repas à 1 euro devient la règle, on peut penser que ce sont ceux qui en ont le plus besoin qui se présenteront aux Crous pour l’obtenir. Il n’en est pas moins nécessaire de se demander qui ils sont, par exemple par le biais d’un questionnaire rempli sur la base du volontariat. Parce qu’il est nécessaire d’orienter les politiques publiques, parce que les budgets ne sont pas extensibles à l’infini, parce que certains aussi redoutent un effet d’aubaine, auquel je ne crois pas, une évaluation fine de la sociologie des bénéficiaires du repas à 1 euro me semble indispensable.

J’entends le besoin de transformer ces amendements en un seul.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Je suggère même d’en faire la matière d’une proposition de loi, peut-être transpartisane, relative au profil sociologique des étudiants qui fréquentent l’université publique française. Elle pourrait être l’occasion d’introduire un IPS (indice de position sociale) étudiant.

La commission adopte l’amendement.

Suivant l’avis de la rapporteure, elle adopte successivement les amendements AC8, AC9 et AC10 de Mme Violette Spillebout.

Amendement AC17 de M. Arnaud Bonnet

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Il me paraît satisfait par l’amendement AC10 qui vient d’être adopté.

L’amendement est retiré.

Amendement AC18 de M. Arnaud Bonnet

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. De la même façon, j’y suis favorable, mais il me paraît satisfait.

L’amendement est retiré.

Article 2 : Gage financier

La commission adopte l’article 2 non modifié.

La demande de scrutin public ayant été retirée, elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure. Merci pour tous les étudiants de France.

*

*     *

En conséquence, la commission des Affaires culturelles et de l’éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 Texte adopté par la commission : https://assnat.fr/ZN5NXa             

–Texte comparatif : https://assnat.fr/l5F0M2             

 


   ANNEXE 1 :
Liste des personnes ENTENDUEs par la rapporteur
e

(par ordre chronologique)

Centre national des œuvres universitaires et scolaires (Cnous) Mme Bénédicte Durand, présidente, et M. Clément Cadoret, directeur général délégué

Confédération générale du travail (CGT)  Mme Charlotte Vanbesien, secrétaire générale FERC-CGT, M. Jean Harchouche (UN CGT Crous), Mme Stéphanie Such (UN CGT Crous), et M. Khaled Laouar (UN CGT Crous)

Table ronde de représentants des organisations de solidarité :

 Union étudiante  M. Nathan Guillemot, élu Cnous et membre de l’équipe nationale

 Fédération des associations générales étudiantes (Fage)*  Mme Mylène Schroer, vice-présidente chargée d’affaires sociales, et Mme Flore Grèze, vice‑présidente chargée des relations publiques

 Union nationale des étudiants de France (Unef)*  Mme Hania Hamidi secrétaire générale, et M. Mouhammad Benussi Thioune, membre du bureau national

 Cop1 Solidarités Étudiantes*  M. Benjamin Flohic, président, et Mme Clara Limoge, directrice du plaidoyer

France Universités* – M. Lamri Adoui, président de l’Université de Caen

      Table ronde de responsables de Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) :

 Crous Bordeaux-Aquitaine  M. Jean-Pierre Ferré, directeur général

 Crous Corse  M. Marc Paul Luciani, directeur général

 Crous Créteil  Mme Virginie Catherine, directrice générale, et M. Steve Plisson, directeur de la restauration

 Crous de La Réunion et de Mayotte  M. Pierre-Olivier Sempere, directeur général

Association des villes universitaires de France (Avuf)  MM. Marc Sciamanna, administrateur national délégué, et François Rio, délégué général

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


Annexe 2 :
textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

 

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de l’éducation

L. 822-1-2 (nouveau)

 


([1]) Le présent rapport législatif reprend l’essentiel des constats alors dressés.

([2]) Baromètre Ifop pour Cop1, La précarité étudiante en France : quelle réalité ?, 2024.

([3]) Selon l’Enquête Conditions de vie (2023) de l’Observatoire de la vie étudiante, 25 % des étudiants occupent un emploi sans lien avec leurs études (excluant donc les activités professionnelles réalisées en alternance).

([4]) L’augmentation des prix mesurée par l’évolution de l’indice des prix à la consommation a atteint des taux annuels de 5,2 % en 2022 et 4,9 % en 2023, selon l’Insee. L’alimentation a toutefois connu une augmentation des prix plus prononcée, atteignant par exemple 10 % en glissement annuel en septembre 2022 selon l’Inspection générale des finances, dans son rapport L’inflation des produits alimentaires (2022).

([5]) Observatoire de la vie étudiante, La crise dans le rétroviseur ? Panorama des conditions de vie étudiantes en 2023, 2024.

([6]) À titre d’exemple, les jeunes de moins de 25 ans représentent environ 50 % des bénéficiaires des Restos du cœur, cette association ayant alerté les pouvoirs publics au sujet de la précarité alimentaire des étudiants avant le déclenchement de la crise sanitaire. De manière analogue, l’association AGORAé a ouvert de premières épiceries solidaires à destination d’étudiants dès 2011. Voir rapport d’information n° 742 (2020-2021) de M. Laurent Lafon fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat dans le cadre de la mission d’information sur les conditions de vie des étudiants.

([7]) Observatoire de la vie étudiante, La  crise dans le rétroviseur ? Panorama des conditions de vie étudiantes en 2023, 2024.

([8]) Un étudiant étranger sur quatre a bénéficié d’une aide alimentaire au cours de l’année précédant la dernière enquête de l’Observatoire de la vie étudiante. Voir La crise dans le rétroviseur ? Panorama des conditions de vie étudiantes en 2023, 2024.

([9]) Baromètre Ifop pour Cop1, La précarité étudiante en France : quelle réalité ?, 2024.

([10]) D’autres critères, comme le handicap ou le statut d’aidant, permettent de bénéficier de points de charge supplémentaires.

([11]) Outre les conditions d’études, d’âge et de revenus, les étudiants étrangers hors Union européenne doivent disposer d’un titre de séjour, être domiciliés en France depuis au moins deux ans et attester d’un foyer fiscal de rattachement en France depuis au moins deux ans.

([12]) Le taux de précarité économique des non boursiers est évalué à 18 %, contre 22 % pour les étudiants bénéficiant de bourses sur critères sociaux. Voir Observatoire de la vie étudiante, La crise dans le rétroviseur ? Panorama des conditions de vie étudiantes en 2023, 2024.

([13]) Sur le périmètre des bourses sur critères sociaux. Note des systèmes d’information et études statistiques (SIES) du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche Les boursiers sur critères sociaux en 2023-2024, 2024.

([14]) Baromètre Ifop pour Cop1, La précarité étudiante en France : quelle réalité ?, 2024.  

([15]) Idem.

([16]) 66 % des étudiants qui fréquentent les sites de restauration des Crous invoquent ce motif. Voir Cnous, Rapport d’activité 2023, 2024.

([17]) Projet annuel de performances pour 2025.

([18]) Audition du Cnous, le lundi 18 novembre 2024.

([19]) Cnous, Rapport d’activité 2023, 2024.

([20]) Audition des Crous de Bordeaux-Aquitaine, Créteil, Corse et La Réunion-Mayotte, le lundi 25 novembre 2024.

([21]) Audition de la Confédération générale du travail-Crous (CGT-Crous), le 21 novembre 2024. Contributions écrites de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) Éducation Formation Recherche publiques d’une part, et de l’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) Éducation d’autre part.

([22]) https://assnat.fr/3hCbiP

([23]) https://assnat.fr/xDQsba