N° 914

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 février 2025.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)
SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE (N° 852),
DE MME CONSTANCE LE GRIP
ET PLUSIEURS DE SES COLLÈGUES,


appelant à la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem SANSAL,

 

 

PAR Mme Constance LE GRIP,

Députée

 

 

 

 

 

 

 

  1.     La composition de la commission figure au verso de la présente page.

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pieyre-Alexandre ANGLADE, président ; M. Laurent MAZAURY, Mmes Manon BOUQUIN, Nathalie OZIOL vice‑présidents ; MM. Benoît BITEAU, Maxime MICHELET, secrétaires ; MM. , Gabriel AMARD, Philippe BALLARD, Guillaume BIGOT, Philippe BOLO, Nicolas BONNET, Mmes Céline CALVEZ, Colette CAPDEVIELLE, M. François-Xavier CECCOLI, Mme Nathalie COLIN-OESTERLÉ, MM. Julien DIVE, Nicolas DRAGON, Mme Pascale GOT, M. Michel HERBILLON, Mme Mathilde HIGNET, M. Sébastien HUYGHE, Mmes Sylvie JOSSERAND, Marietta KARAMANLI, MM. Andy KERBRAT, Bastien LACHAUD, Mme Hélène LAPORTE, M. Jean LAUSSUCQ, Mme Constance LE GRIP, MM. Pascal LECAMP, Laurent LHARDIT, Alexandre LOUBET, Mathieu MARCHIO, Patrice MARTIN, Emmanuel MAUREL, Mme Yaël MENACHÉ, M. Nicolas METZDORF, Mmes Naïma MOUTCHOU, Danièle OBONO, MM. Pierre PRIBETICH, Alexandre SABATOU, Mme Sabrina SEBAIHI, MM. Charles SITZENSTUHL, Thierry SOTHER, Mmes Michèle TABAROT, Sabine THILLAYE, Anne-Cécile VIOLLAND, Caroline YADAN, Estelle YOUSSOUFFA.

 

 


 

SOMMAIRE

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 Pages

introduction

I. Rien ne peut justifier la privation des droits fondamentaux de l’Écrivain franco-algÉrien Boualem Sansal, arrÊtÉ pour avoir usÉ de sa libertÉ d’expression

A. UNE DÉTENTION CONTRAIRE AUX ENGAGEMENTS BILATÉRAUX ET INTERNATIONAUX DE L’ALGÉRIE

1. Âgé et malade, Boualem Sansal est détenu de manière arbitraire

2. Le principe et les conditions de sa détention sont contraires à tous les engagements de l’Algérie vis-à-vis de ses partenaires régionaux et internationaux

B. L’actuelle dÉgradation de la relation franco-algérienne ne peut servir de prÉtexte à la privation des droits D’UN HOMME

a. Les relations franco-algériennes, qui ont toujours oscillé entre tensions et apaisement, se sont récemment fortement dégradées

b. Boualem Sansal, une victime collatérale de la forte mésentente entre la France et l’Algérie, ciblé en raison de son hostilité au pouvoir algérien actuel

II. Tous les leviers De la diplomatie française et europÉenne qui pourraient permettre la libÉration de Boualem Sansal doivent Être mobilisÉs

A. La dÉfense de la libErté d’expression dÉclenche l’europÉanisation du cas de Boualem Sansal

a. Une mobilisation inédite de la société civile confortée par une demande de libération au plus haut sommet de l’État français

b. Une condamnation sans équivoque du Parlement européen

B. La France et l’Union europÉenne doivent se saisir de tous les moyens de pression diplomatique permettant d’obtenir la libÉration de Boualem Sansal

1. À l’échelle nationale, les visas diplomatiques sont un levier puissant pour rétablir une réciprocité

2. À l’échelle européenne, le respect des engagements et le principe de réciprocité devraient guider toute action future

examen en commission

proposition de rÉsolution européenne initiale

amendements examinés par la commission

proposition de résolution eurOpéenne adoptée par la commission

annexe  1 : Liste des personnes auditionnées par lA rapporteurE

 


   introduction

 

Mesdames, messieurs,

Dans une tribune parue dans le Monde le 16 janvier 2025, le poète algérien Kamel Bencheikh écrit ces mots : « La liberté de Boualem Sansal est la nôtre. Son combat est notre combat. Nous ne le laisserons pas seul ».

Né en Algérie en 1944, l’écrivain franco-algérien d’expression française Boualem Sansal, récompensé par une dizaine de prix, dont le prestigieux Grand Prix du roman de l’Académie française en 2015 pour son roman « 2084 : la fin du monde », le Prix Jean Zay en 2013, le Prix international de la laïcité de l’association française « Comité Laïcité République » et le Prix Méditerranée, est considéré par ses pairs comme un auteur très talentueux, engagé, qui use de sa liberté de création et d’expression. Le 16 novembre 2024, il a été arrêté à son arrivée à Alger, puis incarcéré et inculpé. Sur la base de l’article 87 bis du code pénal algérien, il est accusé d’avoir commis un « acte terroriste » portant atteinte à « la sûreté de l’État, l’intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions ».

À l’heure de la commémoration des 10 ans des attentats de Charlie Hebdo, la détention arbitraire de Boualem Sansal nous rappelle brutalement que la liberté d’expression n’est jamais acquise et qu’il nous faut la protéger à chaque instant.

Derrière le sort inique qui touche Boualem Sansal, c’est très précisément la liberté d’expression politique qui est menacée, cette liberté fondamentale qui reconnaît à tous, dans le cadre défini par la loi, le droit de communiquer ses idées et la possibilité d’être contredit. C’est un des droits les plus précieux de l’homme qui, en permettant la circulation du plus grand nombre d’opinions, donne à chacun d’entre nous la possibilité de rencontrer ses contradicteurs, de débattre, de forger ses propres convictions et de participer à la construction collective de la pensée.

Intervenant dans un contexte de tensions diplomatiques croissantes entre la France et l’Algérie, la détention arbitraire de Boualem Sansal s’est par ailleurs accompagnée d’une violation en cascade d’autres droits fondamentaux, comme les droits de la défense ou le droit à un procès équitable, au mépris des engagements internationaux pris par l’Algérie, consacrés dans sa propre Constitution. Son texte fondateur reconnaît en effet dans son préambule l’attachement du peuple algérien « aux Droits de l’Homme tels qu’ils sont définis dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 et les traités internationaux ratifiés par l’Algérie ».

Pour ces raisons, nous demandons la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal. Nous le demandons par respect du droit mais également au regard de son âge avancé et de sa mauvaise santé. Cette proposition de résolution européenne vise ainsi à le soutenir sans réserve.

Sans réserve car si l’on peut critiquer les idées d’un homme, s’y opposer, on ne saurait l’enfermer pour ses seules opinions ! À travers la figure de l’intellectuel engagé que représente Boualem Sansal, ce sont toutes les formes d’opinions engagées et critiques qui sont visées. La liberté d’opinion et d’expression est un bien précieux qu’il nous appartient de défendre.

Sans réserve car les liens que nous entretenons avec l’Algérie nous honorent mais nous obligent également. La France comme l’Algérie se sont engagées à respecter les droits fondamentaux à travers différents accords qu’elles ont pu signer ensemble. Chacune des parties doit s’y tenir. Y renoncer, ce serait renoncer à nos engagements et désavouer nos valeurs.

Sans réserve car l’Algérie est également liée à l’Union européenne et l’accord d’association qu’elles ont signé en 2002 fait du respect des valeurs démocratiques un élément essentiel de ce partenariat.

Sans réserve enfin car Boualem Sansal est un citoyen français et qu’en tant que parlementaires, en tant que représentants du peuple français, nous avons une responsabilité particulière. Cette responsabilité s’impose avec d’autant plus de force que le Parlement européen – car Boualem Sansal est aussi un citoyen européen –, a adopté le 23 janvier dernier, à une très large majorité, une résolution commune, émanant de plusieurs groupes parlementaires, appelant à la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal.

Il nous appartient désormais de suivre ce même chemin. Votre rapporteure espère que cette proposition de résolution européenne portée par notre chambre en défense de notre concitoyen et de la liberté d’expression, sera adoptée de manière transpartisane, unanime et sans réserve. Enfin, un devoir d’humanité envers un homme malade, âgé, maintenu arbitrairement en prison dans des conditions très contestables, s’impose à nous : il nous faut sans relâche œuvrer à la libération de Boualem Sansal !

 


I.   Rien ne peut justifier la privation des droits fondamentaux de l’Écrivain franco-algÉrien Boualem Sansal, arrÊtÉ pour avoir usÉ de sa libertÉ d’expression

A.   UNE DÉTENTION CONTRAIRE AUX ENGAGEMENTS BILATÉRAUX ET INTERNATIONAUX DE L’ALGÉRIE

1.   Âgé et malade, Boualem Sansal est détenu de manière arbitraire

Son voyage en Algérie devait être de courte durée, quelques jours à peine. Il venait simplement récupérer des effets personnels dans sa maison de Boumerdès, une station proche d'Alger, avant de revenir en France, aux côtés de sa femme. Cette même année, il avait obtenu la nationalité française grâce à l'intervention personnelle du Président de la République Emmanuel Macron.

Pourtant, alors qu’il venait à peine de fouler le sol de sa terre natale, Boualem Sansal a été arrêté par les autorités algériennes, au motif de propos tenus sur le Sahara occidental. Incarcéré sans que sa famille ou son avocat français n'en soient avisés, il est accusé d’avoir commis "un acte terroriste ou subversif…visant la sûreté de l’État, l’intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions ». Cet acte, prévu à l’article 87 bis du Code pénal algérien récemment durci, est passible de la prison à vie, voire de la peine de mort (même si un moratoire sur la peine capitale existe en Algérie depuis 1993).

Par ailleurs, Boualem Sansal s’est vu, dans les premiers jours de sa détention, privé du droit de communiquer avec sa famille, privé d’accès à un conseiller juridique et interrogé en l’absence d’avocat, en parfaite méconnaissance du droit international qui garantit les droits de la défense et notamment le droit à un procès équitable.

Enfin, Boulem Sansal s’est vu refuser, en tant que citoyen français, la protection consulaire française. Cette protection, dont les origines remontent au XIIe siècle, permet à tout ressortissant français résidant à l’étranger ou y séjournant temporairement de bénéficier de l’assistance des services consulaires français. En cas d’arrestation, cette protection permet notamment de vérifier les conditions de détention et le respect des droits de la défense. Elle facilite également les contacts avec la famille. Au cas d’espèce, les autorités algériennes n’ont jamais donné suite à la demande de l’Ambassadeur français de se rendre sur les lieux de détention de M. Sansal.

Aujourd’hui, son avocat français, Maître François Zimeray, n'a toujours pas pu voir son client, sa demande de visa pour Alger restant sans réponse, ce qui constitue une violation flagrante du droit de la défense de M. Sansal. La nomination de trois avocats commis d’office par le bâtonnier d’Alger, quelle que soit leur compétence, n’est pas satisfaisante au vu des circonstances.

Sa demande de remise en liberté provisoire ayant été rejetée par la justice algérienne le 11 décembre 2024, Boualem Sansal doit rester en prison, alors qu’il a 80 ans et qu’il a été diagnostiqué d’un cancer de la prostate. Si sa femme a désormais l’autorisation de lui rendre visite une fois par semaine, ses proches s’inquiètent légitimement pour lui car sa détention pourrait aggraver son état de santé. Malgré des conditions de détention opaques, il semble qu’il ait été transféré à plusieurs reprises dans une unité de soins de l’hôpital Mustapha, pour subir des examens médicaux et de la radiothérapie. Il se trouverait aujourd’hui à nouveau dans la prison de Koléa. Très peu d’informations fiables sont données quant à la réalité de la dégradation de son état de santé, de la nature et de la fréquence des soins qui lui ont été ou sont prodigués.

2.   Le principe et les conditions de sa détention sont contraires à tous les engagements de l’Algérie vis-à-vis de ses partenaires régionaux et internationaux

L’Algérie est liée par de nombreux accords bilatéraux et internationaux, avec des partenaires régionaux ou internationaux. Ces accords protègent notamment les droits et libertés dont Boualem Sansal a été privé : liberté d’expression, droit à un procès équitable, protection consulaire.

Si aujourd’hui l’Algérie refuse d’appliquer ses engagements, elle rejoindrait le camp de ceux pour lesquels les traités ne seraient que des « chiffons de papier ».

Or, pour les pays attachés à l’État de droit, les conventions ne sont pas de simples « chiffons ». Elles traduisent l’engagement d’un État, elles sont le symbole matériel de la parole donnée, elles favorisent la confiance mutuelle.

Parce que nous sommes attachés aux liens qui unissent nos deux pays, à notre histoire commune, nous souhaitons que cette confiance soit restaurée.

Ainsi, en ratifiant la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples en 1987 et le Protocole de Ouagadougou portant création de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, l’Algérie a réaffirmé son attachement « aux libertés et aux droits de l'homme et des peuples contenus dans les déclarations, conventions et autres instruments adoptés dans le cadre de l'Organisation de l'unité africaine, du Mouvement des pays non-alignés et de l'Organisation des Nations unies »

En ratifiant la Convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963, l’Algérie s’est engagée à appliquer la protection consulaire.

En ratifiant le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté en 1966 par l'Assemblée générale des Nations unies, l’Algérie s’est engagée via son préambule à « promouvoir le respect universel et effectif des droits et des libertés de l’homme » et via son article 19 à ce que toute personne ait droit à la liberté d’expression. « Ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix » car « nul ne peut être inquiété pour ses opinions. »

En signant l’accord d’association avec l’Union européenne en 2002, l’Algérie s’est engagée à faire du « respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l’Homme, tels qu’énoncés dans la déclaration universelle des droits de l’homme » un élément essentiel du partenariat. L’article 19 de la DUDH dispose par ailleurs que « chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion… » et son article 9 affirme que « nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ou exilé ».

S’agissant enfin des nombreux accords liant la France et l’Algérie, environ 900, il suffit de se référer aux tout premiers, les accords d’Évian de 1962. Dans la partie consacrée aux déclarations gouvernementales, ces accords prévoient notamment que : « L'État algérien souscrira sans réserve à la Déclaration universelle des droits de l'homme et fondera ses institutions sur les principes démocratiques et sur l'égalité des droits politiques entre tous les citoyens sans discrimination de race, d'origine ou de religion. Il appliquera, notamment, les garanties reconnues aux citoyens de statut civil français. »

Or, Boualem Sansal est un citoyen français, ce que les autorités algériennes se refusent aujourd’hui à pleinement reconnaître. Dans une interview publiée le 3 février 2025 dans le journal « l’Opinion », le Président Tebboune tient à rappeler que « Sansal n’est français que depuis 5 mois » et qu’il est « d’abord algérien depuis 74 ans ».

Ceci étant, même en tant qu’Algérien, Boualem Sansal a parfaitement le droit d’avoir recours à un conseil étranger, en l’espèce français. Par ailleurs, un texte d’application des accords de 1962 permet à un avocat français d'intervenir aux côtés de ses confrères algériens dans une procédure ouverte en Algérie, et réciproquement. En effet, l’article 16 du Décret n°62-1020 du 29 août 1962 prévoit que : « les avocats inscrits à un barreau d’Algérie pourront assister ou représenter les parties devant toutes les juridictions françaises tant au cours des mesures d’instruction qu’à l’audience, dans les mêmes conditions que les avocats inscrits à un barreau français. À titre de réciprocité, les avocats inscrits à un barreau français pourront assister ou représenter les parties devant toutes les juridictions algériennes, tant au cours des mesures d’instruction qu’à l’audience, dans les mêmes conditions que les avocats inscrits à un barreau algérien ».

Sous réserve que les autorités algériennes puissent garantir sa pleine sécurité, il est donc juridiquement tout à fait possible que Maître François Zimeray se rende en Algérie pour rencontrer Boualem Sansal et travailler avec ses homologues algériens, ce qu’il ne peut malheureusement pas faire à ce jour, faute de visa.

B.   L’actuelle dÉgradation de la relation franco-algérienne ne peut servir de prÉtexte à la privation des droits D’UN HOMME

a.   Les relations franco-algériennes, qui ont toujours oscillé entre tensions et apaisement, se sont récemment fortement dégradées

Les relations franco-algériennes sont intenses et complexes depuis l’indépendance de l’Algérie en 1962. Au contentieux historique comme élément explicatif, s’ajoutent des enjeux de différente nature, notamment sécuritaire ou économique.

Ainsi, alors qu’en 2022, le Président Emmanuel Macron et le Président Abdelmadjid Tebboune décidaient de relancer la relation bilatérale en créant une commission mixte d’historiens, l’année 2024 est marquée par une sévère dégradation de la relation franco-algérienne.

La lettre adressée par le Président Emmanuel Macron au roi Mohammed VI le 31 juillet 2024, dans laquelle il indiquait que l’avenir du Sahara occidental s’inscrivait « dans le cadre de la souveraineté marocaine » a aggravé une crise diplomatique larvée. Bien avant cette lettre en effet, à titre d’illustration, le président Tebboune n’avait cessé d’ajourner sa visite d’État prévue à Paris.

Mais la reconnaissance par Paris de la souveraineté marocaine sur cette ex-colonie espagnole a provoqué l’ire d’Alger. En effet, le Sahara occidental oppose depuis un demi-siècle le Maroc au mouvement indépendantiste, le Front Polisario, soutenu par l’Algérie. Or, le dossier du Sahara occidental constitue un point de cristallisation des tensions entre le Maroc et l’Algérie, les deux gouvernements ayant fait du Sahara occidental un point central de leur politique intérieure.

L’attribution du prix Goncourt à Kamel Daoud n’a fait qu’exacerber le mécontentement d’Alger. Le roman Houris, primé en France et interdit au salon du livre d’Alger, évoque les massacres de la « décennie noire », guerre civile qui a fait plus de 150 000 morts entre 1992 et 2002. Deux plaintes ont d’ailleurs été déposées début août contre l’auteur et son épouse au tribunal d’Oran, l’une pour violation du secret médical, l’autre pour violation de la loi de réconciliation nationale.

En octobre 2024, lors de sa visite officielle au Maroc, le Président Macron a réaffirmé le soutien à la France à la souveraineté marocaine du Sahara occidental. Il a promis des investissements français pour le développement de cette région.

b.   Boualem Sansal, une victime collatérale de la forte mésentente entre la France et l’Algérie, ciblé en raison de son hostilité au pouvoir algérien actuel

Rien ne pouvait laisser penser à Boualem Sansal qu’il se mettait en danger en se rendant une nouvelle fois en Algérie en novembre 2024. Contrairement à Kamel Daoud, il n’avait pas fait l’objet d’une campagne de presse extrêmement violente tant en France qu’en Algérie. « Ne t'inquiète pas, ils me prennent pour un vieux fou ! », aurait-il répondu à l’un de ses proches qui lui avait toutefois fait part de son inquiétude.

Aujourd’hui, après plus de deux mois et demi de détention, chacun a toutes les raisons de s’inquiéter, en raison, rappelons-le encore une fois, de l’âge et de l’état de santé de Boualem Sansal.

Si les opinions de Boualem Sansal ont pu sérieusement froisser le pouvoir algérien, notamment ses déclarations au média Frontières, selon lesquelles le territoire marocain aurait été tronqué sous la colonisation française au profit de l'Algérie, ou sa dénonciation opiniâtre de la montée de l’islamisme en Algérie, il apparaît surtout comme un bouc émissaire.

L’Algérie est en effet sujette à de fortes tensions internes et régionales. Or, comme le rappelait Pierre Vidal-Naquet, historien spécialiste de la Grèce antique et intellectuel engagé dans la défense des droits de l’homme, dans Du bon usage de la trahison, plus les nations sont fragiles, plus la figure du bouc émissaire est essentielle pour ressouder l’unité nationale.

Sur la scène intérieure, l’Algérie est confrontée à de fortes contestations. En 2019, une mobilisation populaire spontanée et pacifique, d’une ampleur inédite depuis des décennies, le Hirak, a écarté M. Abdelaziz Bouteflika du pouvoir. En 2024, le taux de participation à l’élection présidentielle anticipée, très faible, a par ailleurs été fortement contesté. Au même moment, le hashtag « #je suis insatisfait » (en arabe « #manich radi »), naissait. Devenu viral tant en Algérie qu’à l’étranger, ce phénomène exprime une tristesse générale, particulièrement au sein de la jeunesse algérienne, envers la situation socio-économique et politique actuelle du pays.

Sur la scène internationale, l’Algérie doit fait face à une recomposition de la géopolitique régionale où les alliances sont plus incertaines (dénonciation par le Mali de l’accord d’Alger en 2024, perte d’influence au Niger, perte de son allié historique Bachar el-Assad, rejet en 2023 de la candidature d’Alger pour les BRICS). Surtout, Donald Trump occupe de nouveau le bureau ovale de la Maison-Blanche, lui qui est à l’origine de la politique de normalisation des relations entre le Maroc et Israël en 2020, en échange de la reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.

II.   Tous les leviers De la diplomatie française et europÉenne qui pourraient permettre la libÉration de Boualem Sansal doivent Être mobilisÉs

A.   La dÉfense de la libErté d’expression dÉclenche l’europÉanisation du cas de Boualem Sansal 

a.   Une mobilisation inédite de la société civile confortée par une demande de libération au plus haut sommet de l’État français

La détention arbitraire de Boualem Sansal a naturellement ému et mobilisé tant la classe politique que la société civile française et internationale.

Sur le plan des symboles, de nombreuses personnalités politiques ont appelé à la libération de Boualem Sansal, au premier chef le Président de la République. En effet, lors de la 30e Conférence des ambassadrices et ambassadeurs du 6 janvier dernier, le Président Macron a qualifié l’écrivain de “combattant de la liberté” et dénoncé une détention “totalement arbitraire par les responsables algériens”. Il a également ajouté qu’en maintenant Boualem Sansal en prison malgré son état de santé fragile et son grand âge, l’Algérie « n’est pas à la hauteur de ce qu’elle est ».

Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, a fait notamment part de ses préoccupations concernant l’état de santé de Boualem Sansal, en raison de l'information très limitée fournie par Alger à ce sujet. Il a proposé de se rendre à Alger pour rencontrer les autorités.

Au niveau de la société civile, un Comité de soutien a notamment été créé à l’initiative d’Arnaud Benedetti et de la Revue politique et parlementaire, présidé par Catherine Camus, la fille d’Albert Camus. De très nombreux parlementaires français ont adhéré à ce comité de soutien. Les anciens Présidents de la République François Hollande et Nicolas Sarkozy, ainsi que plusieurs anciens Premiers ministres, ont participé à la première grande soirée de soutien à Boualem Sansal le 16 décembre 2024 à Paris. De leur côté, Yaël Braun-Pivet, Présidente de l'Assemblée nationale, et Gérard Larcher, Président du Sénat, ont écrit le 16 janvier dernier à leurs homologues algériens pour demander la libération de Boualem Sansal pour "raison humanitaire". Ce comité est désormais composé de plus de 1 200 membres, issus de 20 nationalités différentes et rassemblant écrivains, journalistes, chercheurs, politiques pour la cause de Boualem Sansal. Sous l’égide de Maître Noëlle Lenoir, il a interpellé les autorités françaises ainsi que les hauts responsables de l’Union européenne tels que les présidents de la Commission, Madame Ursula von der Leyen, du Conseil, Monsieur António Costa et la Haute représentante pour les affaires étrangères, Madame Kaja Kallas, afin qu’ils mettent tout en œuvre pour la libération de Boualem Sansal.


Tous ces soutiens les plus proches s’indignent des motifs de son arrestation et de son statut de « prisonnier politique ». Ils ont aussi exprimé leurs préoccupations quant à son état de santé qui se dégrade. Pour eux, « cette détention s’assimile à une non-assistance à personne en danger ».

Outre les personnalités, des institutions ont déjà exprimé leur inquiétude et lancé un appel pour la libération de Boualem Sansal, telles que l’Institut de France et l’Académie française. Plusieurs soirées de soutien ont déjà eu lieu, en France et à l’étranger, et plusieurs mairies ont déployé des banderoles appelant à la libération de Boualem Sansal.

Enfin, cette mobilisation a pris une dimension internationale. En effet, à l’initiative de Jean-Michel Blanquer, une trentaine d’écrivains latino-américains ont signé une tribune afin de libérer leur pair. “Nous, écrivains latino-américains, condamnons cette atteinte flagrante à la liberté de conscience et à la liberté d’expression. C’est avec des mots et des arguments, et non avec la prison, qu’il faut répondre aux mots. Boualem Sansal a 75 ans ; son seul tort a été d’exercer sa liberté de pensée et d’expression – par le biais de romans, d’essais et de déclarations – en traitant parfois, bien sûr, de son pays d’origine, l’Algérie.

b.   Une condamnation sans équivoque du Parlement européen

Au rebours de l’exécutif européen qui pour l’instant est silencieux, le Parlement européen a adopté à une large majorité une résolution le 23 janvier dernier qui condamne sans réserve l’arrestation de Boualem Sansal et réclame sa libération immédiate et inconditionnelle. Adoptée avec 533 votes pour, 48 abstentions et 24 contre, cette résolution transpartisane traduit le fort engagement des parlementaires européens de toutes nationalités à témoigner de leur soutien à un écrivain arbitrairement détenu en prison.

Dans ses considérants, la résolution européenne constate que la liberté d’expression a régressé en Algérie, ayant reculé à la 139e place du classement mondial de la liberté de la presse en 2024. Elle rappelle la pression croissante à laquelle sont soumis les journalistes. Elle rappelle également que l’article 87 bis du code pénal algérien, qui a servi de fondement à la détention de Boualem Sansal, contient des dispositions qui sont souvent utilisées contre les personnes critiquant le gouvernement algérien, notamment des défenseurs des droits de l’homme. D’après ces derniers, l’Algérie compte au moins 215 prisonniers d’opinion.

Les considérants insistent également sur le durcissement récent du droit pénal algérien, notamment à la suite de la réforme de 2024, qui permet d’intensifier les procès et les sanctions sévères à l’encontre de médias indépendants, « souvent accusés de collusion avec des puissances étrangères contre la sécurité nationale ».

Les députés européens rappellent à travers cette résolution les nombreux engagements pris par l’Algérie concernant le respect des droits fondamentaux et de la liberté d’expression, notamment les engagements pris auprès de l’Union dans le cadre des priorités de l’accord d’association de 2002.

Si la résolution condamne l’arrestation de Boualem Sansal, mais également les arrestations de tous les prisonniers politiques, journalistes et défenseurs des droits, elle « demande aux autorités algériennes de revoir toutes les lois répressives qui restreignent les libertés, notamment les articles 87 bis, 95 bis et 196 bis du code pénal algérien, ainsi que l’indépendance du pouvoir judiciaire, afin de protéger la liberté de la presse consacrée à l’article 54 de la Constitution algérienne ».

Cette résolution a été transmise aux autorités algériennes, à la Commission ainsi qu’à la Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Elle n’a pas encore fait l’objet de réponses officielles.

B.   La France et l’Union europÉenne doivent se saisir de tous les moyens de pression diplomatique permettant d’obtenir la libÉration de Boualem Sansal

1.   À l’échelle nationale, les visas diplomatiques sont un levier puissant pour rétablir une réciprocité

 

L'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, signé à Alger le 16 décembre 2013, prévoit l'exemption réciproque de visas de court séjour pour les titulaires d'un passeport diplomatique ou de service.

L’article 1er du Décret n° 2014-1003 portant publication de l'accord prévoit que : « Les ressortissants de la République française (se déplaçant en mission ou à titre privé) titulaires d'un passeport diplomatique ou de service en cours de validité ont accès, sans visa d'entrée, à l'ensemble du territoire de la République algérienne démocratique et populaire, pour un séjour ininterrompu ou plusieurs séjours dont la durée totale n'excédera pas quatre-vingt-dix jours sur toute période de cent quatre-vingts jours sur le territoire de la République algérienne démocratique et populaire. ».

Si les diplomates algériens peuvent se déplacer librement sur le territoire français, la réciproque n’est pas vraie. En effet, les diplomates français installés en Algérie doivent, s’ils souhaitent se rendre dans une autre localité algérienne, demander une autorisation à la police locale huit jours avant la date de sortie prévue. Ils doivent par ailleurs être escortés.

En ce sens, une harmonisation des pratiques pourrait être recherchée pour davantage de réciprocité.


2.   À l’échelle européenne, le respect des engagements et le principe de réciprocité devraient guider toute action future

 

Signé en 2002 et entré en vigueur en 2005, l'accord d'association entre l’Union européenne et l’Algérie s'inscrit dans le cadre du renforcement de la politique méditerranéenne de l'Union. Ce partenariat global s'articule autour de trois grands volets : politique et sécurité ; économique et financier ; social, culturel et humain. Il libéralise notamment les échanges de marchandises entre les deux rives, avec des éléments d'asymétrie en faveur de l'Algérie.

En juin 2024, l’Union européenne a ouvert une procédure de règlement des différends à l’encontre de l’Algérie, accusée de restreindre depuis 2021 les exportations et investissements de l’Union européenne dans le pays nord-africain et a réclamé des consultations avec les autorités. L’Union européenne considère en effet que les mesures restrictives introduites par Alger violent ses engagements pris dans le cadre de l’accord d’association.

En octobre 2024, le président Tebboune a déclaré vouloir réviser l’accord. Selon lui, « cette révision s’impose au regard de la réalité économique actuelle, sachant qu’à son entrée en vigueur, en 2005, les exportations de l’Algérie étaient basées principalement sur les hydrocarbures ». Le communiqué de presse officiel en janvier 2025 stipule que la révision de cet accord « ne résulte pas d’un conflit, mais vise à soutenir les bonnes relations entre l’Algérie et l’Union européenne en tant que partenaires économiques sur la base du principe gagnant-gagnant ».

Dans sa résolution adoptée en janvier 2025, appelant à la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal, le Parlement européen rappelle qu’entre 2021 et 2024, l’Union européenne a versé 213 millions d’euros à l’Algérie dans le cadre du programme indicatif pluriannuel et que l’accord d’association repose sur la confiance et sur des valeurs communes comme le respect de l’État de droit et des droits fondamentaux. 

À la lumière de cette résolution et de l’asymétrie des relations euroalgériennes, votre rapporteure estime qu’une renégociation de l’accord ne peut avoir lieu sans réciprocité. Il apparaît essentiel de rappeler à l’Algérie ses obligations en matière de droits fondamentaux et de donner tout son sens à l’article 2 de l’accord d’association en vertu duquel le respect des valeurs démocratiques est un élément essentiel de la relation de l’Union européenne avec l’Algérie.

Votre rapporteure vous invite donc à voter en faveur de la présente proposition de résolution européenne, pour défendre un homme retenu prisonnier au mépris des droits fondamentaux, dont celui du droit à la défense, des règles internationales et du devoir d’humanité, et pour appeler à sa libération immédiate.

 

 


   examen en commission

La commission s’est réunie le mercredi 5 février 2025, sous la présidence de M. Pieyre-Alexandre Anglade, président, pour examiner la présente proposition de résolution européenne.

 

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Nous en venons à l’examen de la proposition de résolution européenne (PPRE) de Constance Le Grip appelant à la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal.

Ce débat est important. Nous sommes extrêmement préoccupés par la détention de l’écrivain franco-algérien et par son état de santé. La liberté d’expression et d’opinion sont des droits fondamentaux que nous défendrons sans relâche. Le Parlement doit être pleinement mobilisé, au-delà de l’action de la diplomatie française, pour suivre la situation de notre compatriote. Nous appelons évidemment à sa libération immédiate, et à ce qu’il puisse bénéficier, en attendant, de la protection consulaire en tant que ressortissant français. Ces principes devaient être rappelés.

 

Mme Constance Le Grip, rapporteure. J’ai initié cette proposition de résolution européenne (PPRE) que j’ai l’honneur de rapporter. Cette PPRE est soutenue par l’ensemble des membres du groupe Ensemble pour la République (EPR).

M. Boualem Sansal est un écrivain franco-algérien, très talentueux, engagé, très courageux, reconnu par de nombreux prix littéraires. En tant qu’amoureux de la langue française, il a fait le choix d’écrire en français. Il a été distingué par de nombreux prix littéraires, dont le Grand prix du roman de l’Académie française, en 2015, pour 2084 : la fin du monde, une fable glaçante et puissante sur la dictature, la soumission à l’ignorance et la foi.

Boualem Sansal a également reçu le prix Jean Zay, le prix international de la laïcité décerné par l’association française « comité laïcité République », le prix Méditerranée, le prix de la paix des libraires allemands. Il a pour maison d’éditions, Gallimard, depuis la parution du Serment des barbares, il y a vingt-cinq ans.

Boualem Sansal a une aura qui va au-delà de ses lecteurs : il est considéré par ses pairs comme une grande voix de l’universalisme et de la francophonie ! C’est un homme engagé par ses essais, ses romans, ses écrits de paix et de tolérance condamnant toute forme d’obscurantisme.

Boualem Sansal a été arrêté, le 16 novembre 2024, à sa descente d’avion, à Alger, puis immédiatement incarcéré et inculpé. Il est détenu dans la prison de Koela à Alger, sur le fondement de l’article 87 bis du code pénal algérien, qui définit le terrorisme et qui a récemment été durci.

Boualem Sansal est accusé, j’ouvre les guillemets, d’avoir commis « un acte terroriste, visant la sécurité de l’État, l’unité nationale, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions ». La peine maximale prévue par l’article 87 bis est la condamnation à mort. Toutefois, depuis 1993, un moratoire sur la peine de mort est en vigueur : la peine maximale est immédiatement commuée en emprisonnement à perpétuité.

D’autres chefs d’accusation le viseraient sans que nous n’en connaissions les fondements.

Un homme de lettres, un intellectuel engagé a été arrêté depuis son arrestation parce qu’il a écrit, parlé, en homme libre, parce qu’il a exercé sa liberté d’expression, sa liberté d’opinion, sa liberté de création ! À nos yeux, rien, absolument rien, ne peut justifier une privation des droits fondamentaux, la persécution d’un homme libre, qui porte, haut et fort, la liberté et les valeurs républicaines, une certaine idée de la laïcité et de l’universalisme, et combat avec constance toutes les formes d’obscurantisme et de soumission !

Faut-il le rappeler ? Boualem Sansal est un homme âgé, il a quatre-vingt ans, malade, il est atteint d’un cancer de la prostate. Or, il est incarcéré dans des conditions certainement éprouvantes, privé de ses droits fondamentaux.

Outre sa liberté de mouvement, il est privé de sa liberté d’opinion, et de sa liberté d’expression. Il s’est vu refuser la protection consulaire alors qu’il est un citoyen Français. Les autorités algériennes n’ont pas répondu à sa demande.

En conséquence, l’ambassadeur de France ne peut pas lui rendre visite. Dans une interview donnée au journal l’Opinion, le 3 février dernier, le président algérien, M. Tebboune, a  affirmé : « Sansal n’est Français que depuis cinq mois ». Boualem Sansal se voit également refuser le droit de se défendre. Si ses avocats algériens, commis d’office, peuvent le rencontrer, son avocat français, maître François Zimerray, ne dispose pas de ce droit, aucun visa ne lui ayant été accordé pour rencontrer son client. La violation des droits fondamentaux de M. Boualem Sansal, de son droit à se défendre est caractérisé : le silence des autorités algériennes à la demande de visite est inacceptable. Maître Zimmeray n’a pas accès au dossier de son client : il ne peut connaître les chefs d’accusation qui vise M. Sansal ni travailler avec ses confrères algériens. Tous les engagement bilatéraux et internationaux de l’Algérie impliquent que l’Algérie respecte les libertés et les droits de l’homme, et les principes démocratiques, je dis bien : tous ! L’Algérie est signataire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la convention de Vienne sur les relations consulaires, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le Protocole d’Association entre l’Union européenne et l’Algérie, signé en 2002, ainsi que les Accords d’Évian de 1962.

L’arrestation de Boualem Sansal, la violation flagrante de ses droits fondamentaux, relève pour nous de l’arbitraire, d’un régime qui veut manifestement faire taire un opposant. La situation inique de M. Boualem Sansal s’inscrit dans une situation de forte dégradation de la relation franco-algérienne. Toutefois, cette dégradation ne saurait servir de prétexte à la privation des droits fondamentaux d’un homme. Cet homme ne peut être la victime, le bouc émissaire des mésententes entre les autorités françaises et algériennes. Mon rapport détaille la chronologie récente de cette rapide dégradation : la reconnaissance, par la France, en juillet 2024, de la marocanité du Sahara Occidental, le voyage du Président de la République à Rabat, en octobre 2024, l’attribution du prix Goncourt à M. Kamel Daoud, le 4 novembre 2024. Kamel Daoud fait d’ailleurs l’objet d’une campagne virulente de la part d’Alger.

L’octroi récent de la nationalité française à Boualem Sansal, voulue par le chef de l’État, a incontestablement constitué un point de crispation. Mais nous ne pouvons pas admettre que des tensions diplomatiques, fussent-elles fortes, alimentées par des épisodes tels que ceux que je viens d’évoquer, aient une répercussion aussi directe et dramatique sur le destin et les droits d’un individu, d’un citoyen français.

Le respect de l’État de droit et des droits fondamentaux s’impose à tous, à tous les États qui s’y sont engagés, a fortiori à un État lié par un accord d’association avec l’Union européenne et qui a récemment souhaité le réviser afin de l’adapter à certaines réalités économiques nouvelles.

Le 23 janvier dernier, le Parlement européen a adopté, à une très large majorité, une résolution condamnant l’arrestation et la détention arbitraires de Boualem Sansal et appelant à sa libération immédiate. Je partage l’esprit et la lettre de cette résolution.

Nous reviendrons certainement, lors des débats sur les amendements déposés, sur plusieurs points de cette résolution du Parlement européen, notamment l’état de santé et l’âge avancé de Boualem Sansal. Si nous avons connaissance de ses allers-retours entre la prison d’Alger et l’hôpital Mustapha, nous ne savons rien sur la nature, la fréquence et la réalité des soins reçus.

Je tiens à rappeler notre attachement aux liens qui unissent nos deux pays, nos peuples, notre histoire commune, notre relation intense et passionnelle, nos intérêts communs face aux défis. Il y a quelques semaines, à l’occasion de la conférence des ambassadrices et ambassadeurs, le chef de l’État a qualifié Boualem Sansal de « combattant de la liberté ».

Il a ajouté : « L’Algérie, que nous aimons tant, et avec laquelle nous partageons tant d’enfants et tant d’histoire, entre dans une histoire qui la déshonore, a empêché un homme gravement malade de se soigner. Et ce n’est pas à la hauteur de ce qu’elle est. Nous qui aimons le peuple algérien et son histoire ».

Pour restaurer le dialogue et la confiance, il faut se parler, mais aussi se respecter et respecter les règles de droit, au premier chef le droit à la défense et à la protection consulaire. En tant que parlementaires, nous ne pouvons rester insensibles au sort cruel réservé à Boualem Sansal, un homme politique écouté et respecté.

Quelques jours après son arrestation arbitraire en novembre, l’ancien ministre d’État Jean-Pierre Chevènement disait : « Je presse l’Algérie, un pays qui connaît le prix de la liberté, de respecter la liberté d’expression et d’opinion, en particulier celle d’un écrivain ». Il poursuivait : « Les autorités algériennes s’honoreraient à libérer sans tarder Boualem Sansal ».

Plus récemment, il lance à nouveau un appel en rappelant les mots du général Charles de Gaulle à propos de Jean-Paul Sartre en 1960 : « On n’emprisonne pas Voltaire ! ». On n’emprisonne pas les penseurs et les écrivains. Puissent les autorités algériennes et le président Abdelmadjid Tebboune s’inspirer de cette pensée.

Puissions-nous être utiles en votant largement, unanimement, sans réserve, cette proposition de résolution européenne appelant à la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal.

 

L’exposé de la rapporteure est suivi d’un débat.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. La parole est aux orateurs de groupe.

M. Laurent Mazaury, groupe (LIOT). Si une résolution a déjà été votée par le Parlement européen le 23 janvier dernier et que le Président de la République a également demandé la libération de Boualem Sansal, il n’existe pour ce sujet aucun texte qui soit de trop pour affirmer notre soutien aux détenus arbitraires qui portent par leur voix et leurs combats nos valeurs les plus essentielles.

L’examen de ce texte est précieux, notre Assemblée doit réaffirmer son attachement aux droits fondamentaux. Par ailleurs, cette proposition de résolution européenne intervient dans un contexte de mépris des libertés : nous avons ainsi examiné la situation des femmes iraniennes. La liberté d’expression ne fait pas et ne doit pas faire exception. Selon Amnesty International, en 2022, la liberté d’expression aurait régressé pour 80 % de la population mondiale par rapport à 2021. Concernant le texte examiné aujourd’hui, je m’associe à votre appel. Boualem Sansal doit être libéré sans délai. Non aux prisonniers politiques partout où ils se trouvent.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je me réjouis de ces mots forts pour le soutien sans réserve à cette proposition de résolution européenne.

Mme Manon Bouquin (RN). Les évènements récents comme l’emprisonnement par le régime algérien de l’écrivain français Boualem Sansal ou l’empêchement de l’expulsion de délinquants algériens doivent nous éveiller sur la nature des relations entre la France et l’Algérie. Celles-ci ne sont pas en évolution, ni en construction, ni même dégradées : elles sont hostiles.

L’Algérie, sous son régime actuel, est hostile envers la France et cultive cette hostilité en raison de ses propres revers. Le culte de la haine de la France est l’horizon indépassable de la clique au pouvoir depuis la séparation entre nos deux pays. Elle entretient par ce procédé une rente mémorielle dont elle se sert pour justifier son échec à développer l’Algérie, où les Français avaient pourtant, un siècle durant, construit un héritage conséquent.

Qu’ont-ils fait de ces infrastructures routières, ferroviaires, électriques ? Qu’ontils fait du vaste appareil industriel que nous leur avons cédé, clés en main, pour la mise à profit des ressources naturelles abondantes, celles qui auraient dû promettre à l’Algérie une destinée de Norvège du Maghreb ? Ils l’ont dilapidé, plongeant les Algériens dans la pauvreté, qu’ils transforment en rancœur.

Face à cette hostilité, nos gouvernements, souvent encouragés, plus ou moins courtoisement, par nos partenaires européens, ont choisi depuis des décennies la voie de la soumission. Une soumission à l’injonction du repentir, justifiée ou non, comme à l’usage par le régime algérien de flux migratoires pour déstabiliser la France et en capter les richesses.

Nous soumettons deux amendements à votre attention afin de prendre ces réalités morales et politiques en considération et exprimer clairement la nécessité d’une normalisation des rapports diplomatiques avec l’Algérie, ou du moins, un rééquilibrage. Plus d’un demi-siècle après la séparation de nos pays, la France doit pouvoir s’estimer légitimement libérée des obligations qu’elle a pu jadis avoir envers l’Algérie et les Algériens.

Ce pays, conformément aux volontés du Front de libération nationale (FLN), n’est plus français, mais Boualem Sansal l’est. Nous avons des obligations envers et pour lui et nos concitoyens. Nous devons montrer que tout n’est plus permis au régime algérien.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je ne peux pas souscrire à l’intégralité des propos tenus au nom de votre groupe. Ce projet de résolution est porté pour un homme, un écrivain de langue française, un penseur, un intellectuel engagé, pour la défense des libertés, des valeurs républicaines, de l’universalisme.

Ce n’est pas une résolution contre. Je n’esquive pas les fortes tensions et la dégradation des relations franco-algériennes et entre les autorités de nos deux pays. Nous déplorons. Cependant, il s’agit ici de se montrer fermes et opiniâtres dans la défense des valeurs de libertés pour un homme âgé et malade.

Mme Caroline Yadan (EPR). Le groupe Ensemble pour la République, à l’initiative de cette proposition de résolution européenne portée par notre collègue Constance Le Grip que je félicite pour son excellent travail, réaffirme avec force son soutien à cet appel à la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal. La France, patrie des droits de l’Homme, ne transigera jamais sur la liberté de penser et de parler et se tiendra toujours aux côtés de ses plus grandes figures et fervents défenseurs à l’image de Boualem Sansal. La liberté d’expression constitue le socle de notre République qui irrigue notre engagement international. Nous devons la défendre sans relâche avec force et détermination face à l’obscurantisme qui tente de la piétiner.

La représentation nationale ne peut rester passive face au sort de Boualem Sansal, cet immense écrivain, honoré par de nombreux prix littéraires en France, cet esprit libre qui éclaire le monde par ses mots et ses idées face au danger de l’islamisme qu’il ne cesse de dénoncer et qui incarne avec un courage exemplaire nos valeurs républicaines de laïcité, de démocratie et de liberté.

Boualem Sansal est aujourd’hui en danger, âgé et malade, il est cyniquement et injustement privé de sa liberté par le pouvoir algérien qui veut faire payer à la France des différends diplomatiques entre nos deux pays. Nous ne pouvons rester silencieux face à cette détention arbitraire qui plus est dans des conditions très éprouvantes. Les divergences diplomatiques entre la France et l’Algérie ne sauraient en aucun cas justifier la violation des droits fondamentaux de l’un de nos compatriotes. Boualem Sansal paie sa nationalité française de sa liberté et c’est inacceptable.

Le Parlement européen a montré la voie en votant à une très large majorité le 23 janvier dernier la résolution appelant à sa libération immédiate et inconditionnelle bien qu’une partie de l’extrême gauche, de manière indigne mais si prévisible, se soit opposée à ce texte.

Nous, représentants de la Nation, au-delà de nos appartenances politiques avons le devoir moral de réaffirmer d’une seule voix nos principes républicains en exigeant la délivrance de Boualem Sansal. Si cette demande de libération n’est pas satisfaite, la France et l’Union européenne devront tirer toutes les conséquences de cet affront aux droits humains et suspendre toutes les avancées favorables à l’Algérie dans le cadre de la renégociation de l’accord d’association Union européenne-Algérie. Nous, députés EPR, ne cesseront de nous battre jusqu’à La libération immédiate et sans condition de Boualem Sansal parce que la dignité de la représentation nationale est à ce prix.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je vous remercie pour vos propos très forts et engagés et je suis heureuse que nous nous retrouvions là aussi dans ce combat très fondamental que nous partageons et que l’ensemble des membres de la famille politique, Ensemble pour la République, à laquelle nous appartenons partage. Je ne peux que me réjouir de cette identité de vue et encore une fois souscrire tout à fait à votre engagement et aux paroles très fortes que vous avez prononcées pour la défense des valeurs républicaines qui je crois sont parfaitement incarnées par ce grand écrivain franco-algérien, Boualem Sansal.

M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Nous condamnons l’arrestation de Boualem Sansal. Chacun sait nos désaccords avec lui. Depuis des années, il défend des positions proches de l’extrême droite française qui attise la peur d’une prétendue islamisation et le fantasme d’un grand remplacement. Mais c’est pour nous une question de principe : les droits et libertés fondamentales doivent être défendus partout et toujours. Boualem Sansal doit donc être libéré.

Mais nous ne pouvons pas voter votre texte en l’état. Pourquoi ? D’abord en raison de la méthode : obtenir la libération de prisonniers détenus par un état étranger passe nécessairement par le dialogue, la négociation, la discrétion, bref, la diplomatie et à plus forte raison dans le cas d’une relation franco-algérienne sensible, marquée par une histoire douloureuse. Vous faites tout l’inverse, une escalade inconsidérée tout en déclarations fracassantes et en menaces. Vous allez jusqu’à appeler à remettre en cause la renégociation de l’accord d’association UE-Algérie. Avec de tels procédés, le résultat est couru d’avance. Le dialogue avec Alger est rompu, les peuples en payent le prix et la libération de Boualem Sansal, tout comme la cause des libertés publiques et des droits de l’homme, n’auront pas avancé d’un iota.

Mais cette cause vous préoccupe-t-elle vraiment ? Non, bien sûr. Seul compte en réalité à vos yeux l’usage politique que vous pouvez en faire. Le caractère sélectif de votre indignation parle de lui-même. Vous inquiétez vous de la situation des droits humains au Soudan, en Libye, en Arabie saoudite ? Interrogez-vous sur les conditions de mise en œuvre des accords conclus par l'Union européenne avec l’Égypte, avec Israël ? Non, bien sûr. Et, en France quand des gilets jaunes, des manifestants sont éborgnés, quand la jeunesse des quartiers populaires subit des violences policières, quand des indépendantistes Kanak, tels que Christian Tein sont arrêtés et détenus comme prisonniers politiques, où sont vos envolées pour défendre les libertés, les valeurs ? Nulle part, bien sûr.

Une seule intention vous habite en vérité : faire de l’Algérie, le bouc émissaire de vos problèmes, comme le résume parfaitement Dominique de Villepin. Car nous ne sommes pas naïfs, votre texte ne sort pas de nulle part, il survient après des semaines de surenchère, alimentée au premier chef par votre ministre de l’Intérieur, M. Retailleau : montée de la tension diplomatique avec Alger, campagne de stigmatisation contre les Algériens et les Français d’origine algérienne. Vous ravivez les préjugés irrités du passé colonial. Vous rejouez sans cesse la guerre d’Algérie. Vous soufflez sur les braises de la xénophobie de l’islamophobie et du racisme dans l’espoir de racoler à l’extrême droite. Si vous empruntez ce chemin, vous nous trouverez toujours sur votre route.

Vous cherchez à diviser et à fracturer les peuples français et algériens. Nous voulons au contraire emprunter la voie de l’apaisement et traiter les différends par le dialogue pour bâtir une relation de respect mutuel et d’amitié entre deux peuples frères. La cause des libertés publiques et des droits humains mérite mieux que votre instrumentalisation grossière. Nous disons donc oui à la libération de Boualem Sansal et non à l’algérophobie. C’est pourquoi si le texte reste en l’état, nous devrons nous abstenir.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je vous ai écouté avec beaucoup d’attention et vous ne serez certainement pas étonné que je trouve dans vos propos beaucoup d’aspects extrêmement caricaturaux et excessifs comprenant des mises en cause – y compris des mises en cause personnelles grossières – sur lesquelles je ne vais pas revenir en détail mais que je voulais quand même dénoncer. Vous avez tout de même cru bon d’appeler à la libération immédiate de Boualem Sansal, à la reconnaissance de ses droits. En outre, vous avez souligné que les droits et libertés fondamentales ne sauraient être bafoués par un régime quel qu’il soit s’agissant en plus de l’un de nos compatriotes. Je vous en donne acte.

Mais vous avez dans le même temps cru bon de mentionner, dans votre acception des positions de M. Boualem Sansal, que celui-ci – je vous cite – serait proche de l’extrême droite. Cela s’apparente un peu à un « oui mais ». Je tenais quand même à souligner que le sujet n’est pas de juger de la pertinence de telle ou telle prise de position : il est de se mobiliser en permanence pour la liberté d’expression et d’opinion sans « oui mais ».

Je crois vraiment, si vous avez écouté attentivement mon propos que je suis très loin des caricatures et des excès que vous avez cru dénoncer. Au contraire, j’ai tenu à dire à quel point il me semblait important, compte tenu de l’histoire ancienne, riche, passionnelle, intense qui a connu des moments de très grandes tensions, y compris ces dernières années, que nos deux pays, nos deux peuples trouvent les voies et moyens d’un dialogue. Je crois donc qu’il n'y a rien d’excessif dans la prise de position que nous défendons. Si vous avez lu mon rapport, vous verrez que j’ai toujours présent à l’esprit la jeunesse algérienne quand je parle de ce pays et des libertés d’expression et d’opinion. Je connais les aspirations de la jeunesse algérienne et de beaucoup d’autres algériens à une vie meilleure et une vie avec plus de liberté.

Mme Colette Capdevielle (SOC). Nous examinons une proposition de résolution appelant à la libération immédiate et inconditionnelle de M. Boualem Sansal. L’écrivain franco-algérien a été arrêté le 16 novembre 2024 après des propos tenus concernant l’appartenance de l’ouest algérien au Maroc. Une déclaration considérée par l’Algérie comme une attaque attentatoire à l’intégrité du territoire. Ces prétendues accusations de déstabilisation cachent en fait la réalité : le pouvoir des mots et le droit fondamental à la libre expression des opinions font toujours peur aux régimes autoritaires. Nous pouvons adhérer aux propos ou les critiquer, peu importe. Mais nous ne pouvons pas réduire au silence un écrivain au motif que ses écrits gênent, plaisent ou déplaisent.

De plus, nous ne pouvons pas empêcher un homme privé de liberté d’être défendu équitablement. Il n’est pas acceptable que l’avocat choisi ne puisse exercer pleinement les droits de la défense auprès de son client : ceci constitue une atteinte au droit fondamental qui est celui de pouvoir s’entretenir librement avec l’avocat de son choix.

Ne pas exiger la libération d’un écrivain emprisonné, ne pas demander qu’il soit reconnu dans ses droits fondamentaux, ce serait finalement renoncer à la liberté et à la démocratie. Le contexte diplomatique tendu entre la France et l’Algérie ne doit pas occulter l’essentiel qui doit rassembler, c'est-à-dire obtenir la libération de M. Boualem Sansal. Il est inacceptable d’emprisonner un homme pour ses opinions. Le groupe socialiste et apparenté votera en faveur de cette proposition de résolution et nous déposerons un amendement.

En effet, il est paradoxal d’appeler dans le titre de la résolution, à une libération inconditionnelle de M. Boualem Sansal, ce que nous partageons, alors que, Madame la rapporteure, vous proposez de conditionnaliser le versement d’aides européennes à la libération de l’écrivain. Cette conditionnalité pourrait être contre-productive. D'une part, elle pourrait entraver les efforts diplomatiques déployés pour la libération du prisonnier. D’autre part, elle pourrait aussi pénaliser le peuple algérien, chose que nous ne souhaitons pas.

Mme Constance le Grip, rapporteure. Je vous remercie pour vos propos et pour ce que vous avez dit concernant l’essentiel que nous partageons, la libération de M. Boualem Sansal. Je prends note de votre engagement et de votre soutien à la présente proposition et du message que vous souhaitez porter.

Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). Le sujet débattu cet après-midi mérite sérieux, profondeur et sérénité. Tout ce qui manque au fond à votre proposition de résolution, que je qualifierai d’opportuniste.

Opportuniste car la demande de libération de M. Boualem Sansal a déjà été demandée par l’Union européenne et votée à une très large majorité.

Opportuniste car elle inclut dans ses termes la suspension d’avancée concernant les futurs accords d’associations entre l’Algérie et la France tant que M. Boualem Sansal n’est pas libéré.

Outre le manque de diplomatie, je constate, Madame la rapporteure, que vous avez peine à vous relire. Comment demander une libération inconditionnelle et conditionner celle-ci à une quelconque avancée ?

Enfin, opportuniste car elle participe tristement à la diplomatie du spectacle, celle des plateaux C-News qui sort des poncifs un jour sur deux, et celle qui donne des coups de menton à la relation franco-algérienne. Cette diplomatie, je l’affirme, n’est pas la nôtre.

Nous sommes pour la liberté d’expression, mais aussi pour toutes les libertés d’expression. Celle de M. Boualem Sansal, bien sûr, et également celles de tous les prisonniers politiques à travers le monde, y compris ceux en France, comme Christian Tien, leader indépendantiste kanak emprisonné à Mulhouse depuis l’an dernier.

À l’international, il n’est pas acceptable d’avoir une politique à géométrie variable qui prend la mesure des sentiments et des polémiques du moment. Porter cette résolution avec les mots que vous lui conférez, dans le climat actuel d’attaque constante contre l’Algérie et ses ressortissants, ne va pas dans le sens d’une diplomatie apaisée. Pire, elle contribue à alimenter l’esprit colonial d’ingérence face à l’État algérien avec lequel nous avons des intérêts en commun. La rédaction de la proposition de résolution apparaît, et particulièrement dans ses derniers alinéas, comme une pensée néo-colonialiste dans la droite ligne des adeptes de l’existence d’une prétendue rente mémorielle ou des bienfaits de la colonisation. Nous porterons ainsi un amendement visant à supprimer ces alinéas, les plus problématiques de votre résolution, à savoir ceux conditionnant les accords de libre-échange à la libération de M. Boualem Sansal.

De plus, nous vous demandons de retirer cette proposition de résolution qui ne va absolument pas dans le sens des intérêts de la France dans la région. Franchement, il faut cesser la diplomatie des plateaux, celle qui court derrière M. Pascal Praud et les anathèmes de l’extrême droite.

Oui à la liberté de M. Boualem Sansal, et non à son instrumentalisation.

Mme Constance le Grip, rapporteure. Madame Sebaihi, j’ai écouté avec beaucoup d’attention votre intervention, comme je le fais pour tous les intervenants.

Je vais exprimer un premier point de désaccord avec vous. Je souhaite rappeler qu’ici, nous sommes à l’Assemblée nationale française, nous sommes en réunion de la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale française, nous ne sommes pas sur un plateau de télévision. Je m’exprime en tant que députée, représentante de la Nation, tout comme vous. Il ne faut pas confondre les exercices, et éviter de caricaturer et de stigmatiser en permanence.

Deuxième point de désaccord que nous avons, Madame Sebaihi : il n’y a pas de prisonnier politique en France. Ce point de désaccord est majeur. Il est possible de penser ce que l’on veut de la politique du gouvernement, mais il n’y a pas de prisonnier politique en France.

Je comprends que vous appelez aussi à la libération de M. Boualem Sansal et que vous soutenez les droits fondamentaux et la liberté d’expression.

Concernant le fond, mon projet de résolution est aligné avec la résolution votée par le Parlement européen. Grâce à cette prise de position européenne, le cas de M. Boualem Sansal a été européanisé. Suite à cela, il est devenu nécessaire de pouvoir offrir à l’Assemblée nationale française la possibilité de voter un texte qui reprend, de manière extrêmement fidèle, les préconisations de la résolution du Parlement européen en s’inscrivant dans la continuité des droits protégés par la charte européenne des droits fondamentaux. La résolution du Parlement européen a été très largement votée par les députés européens appartenant à des groupes politiques très différents. Ce soutien transpartisan s’exprime aussi au travers des différentes personnalités qui souhaitent voir M. Boualem Sansal libéré, dont notamment des députés, des sénateurs, des anciens présidents, des anciens premiers ministres, des intellectuels, et de nombreux femmes et hommes politiques.

Mme Nathalie Colin-Oesterlé (HOR). La proposition de résolution qui nous réunit résonne comme un appel à la conscience européenne. Il s’agit de condamner fermement l’arrestation et la détention arbitraire de l’écrivain franco-algérien M. Boualem Sansal, un homme malade et âgé, et d’exiger sa libération immédiate et inconditionnelle.

Ingénieur, enseignant, écrivain, lauréat de prestigieux prix littéraires, M. Boualem Sansal incarne la défense de la liberté. Son seul tort est d’avoir exercé un droit fondamental : la liberté d’expression. Son inculpation pour atteinte à la sûreté de l’État au titre de l’article 87 bis du Code pénal algérien témoigne de la dérive répressive d’un régime qui fait fi de ses engagements constitutionnels et internationaux. Cet acharnement s’inscrit dans un contexte où les voix critiques des journalistes et des militants sont soumises à une pression croissante. Malgré la gravité de ces atteintes, l’Algérie demeure un partenaire de l’Union européenne. Il nous appartient donc de rappeler qu’aucun accord d’association, ni aucun versement de fonds européens, ne saurait s’affranchir du respect effectif de l’état de droit et des libertés fondamentales.

En soutenant cette proposition, le groupe Horizon et indépendants réaffirme sa solidarité envers M. Boualem Sansal, ainsi qu’avec tous les prisonniers d’opinion en Algérie. Les autorités françaises et européennes doivent poursuivre leurs efforts pour garantir la protection consulaire à notre compatriote et obtenir sa libération. L’Europe ne peut rester silencieuse face à une telle injustice, à une telle violation de l’état de droit et des libertés fondamentales. Cette proposition de résolution rappelle ainsi la nécessité de défendre nos valeurs. Elle condamne la détention de tous les prisonniers d’opinion, et soutient la liberté de la presse, mise à mal par l’usage détourné de l’article 87 bis du Code pénal algérien.

Enfin, cette proposition de résolution exhorte le gouvernement français et la commission européenne à conditionner tout soutien financier à Alger à des progrès concrets en matière de droits humains. Le groupe Horizons et indépendants votera bien évidemment, et sans réserve, en faveur de cette proposition.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Vous avez eu parfaitement raison de placer ce texte dans le cadre européen et à appeler l’Europe tout entière à se mobiliser par-delà nos collègues du Parlement européen pour faire prévaloir le droit à la liberté d’opinion et à la liberté d’expression. Je pense comme vous qu’il est important que les élus que nous sommes, les représentants de la Nation, soient particulièrement mobilisés s’agissant des violations flagrantes des droits d’un homme, d’un écrivain, d’un citoyen et d’un compatriote.

M. Guillaume Bigot (RN). Dans un entretien au journal L’Opinion, le président algérien Tebboune a comparé l’expulsion d’un blogueur algérien appelant aux meurtres de ressortissants français à la Rafle du Vel d’Hiv. Cette scandaleuse banalisation de la Shoah est indigne d’un chef de l’État et témoigne d’un antisémitisme d’atmosphère dont la kleptocratie d’Alger est coutumière hélas. Dans cet entretien, le président Tebboune exige l’extradition d’opposants politiques réfugiés en France. A-t-il seulement entendu parler des droits de l’homme ? Il s’oppose à la prolongation de l’accord de 1968 qu’il qualifie pourtant de « coquille vide » s’affranchissant ainsi du principe de non-contradiction. Il justifie l’emprisonnement de Boualem Sansal parce que ce dernier a dîné avec l’ancien ambassadeur de France. Il refuse enfin de reprendre ses ressortissants expulsés par nous car « la France est l’ancienne puissance coloniale ». Ses affirmations seraient presque burlesques si elles n’avaient pas d’effet tragique. Face aux provocations d’un satrape n’ayant manifestement plus toutes ses facultés, ma question est simple : 81 % des Français réclamant l’instauration de sanctions économiques, seront-ils enfin écoutés afin que la France se fasse enfin à nouveau respecter ?

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je ne souhaite pas rebondir ou commenter vos propos M. Bigot.

M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Madame la rapporteure nulle attaque personnelle mais juste un constat de désaccord sur la question des prisonniers politiques en France. Vous ne pouvez pas dire qu’il n’y a pas de prisonniers politiques dans ce pays. M. Christian Tein et les autres indépendantistes kanaks emprisonnés en France, transférés depuis l’autre bout du monde en France, sont des prisonniers politiques. Quand le Président du Front de libération nationale kanake et socialiste (FLNKS), la principale organisation de décolonisation et d’indépendance du peuple premier dont la France a reconnu les droits sur le territoire de Kanaky-Nouvelle Calédonie, est emprisonné, c’est un prisonnier politique. Le FLNKS réclame qu’il participe aux négociations et aux discussions qui commencent actuellement : cela fait de lui un prisonnier politique et cela est un sujet politique que le gouvernement va devoir trancher pour savoir si M. Tein peut participer aux discussions.

Mme Constance Le Grip : Monsieur Lachaud, je ne souhaite pas polémiquer sur la Nouvelle Calédonie.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Je souhaiterais que nous restions sur l’objet du texte et que nous ne dévions pas sur la Nouvelle Calédonie.

Mme Caroline Yadan (EPR). Arrêtons de dire n’importe quoi ! il n’y a pas de prisonniers politiques en France ! La France est un état de droit et les prisonniers y bénéficient d’un procès équitable et du droit à la défense. Ils ne sont pas détenus arbitrairement sans aucun respect de leurs droits fondamentaux et bénéficient d’une protection médicale. Il n’y a donc rien de comparable avec la détention de M. Boualem Sansal qui fait l’objet d’une séquestration contrairement aux droits fondamentaux édictés par l’article 3 de la Charte européenne des droits de l’homme qui proscrit des traitements inhumains et dégradants.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je partage les propos de Mme Yadan.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Nous en venons à l’examen de la proposition de résolution européenne et des amendements qui ont été déposés.

Amendement n° 3 de Mme Constance Le Grip

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Par cet amendement, je souhaite rajouter un visa pour enrichir le cadre de référence.

L’amendement n° 3 est adopté.

Amendement n° 12 de Mme Nathalie Oziol

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). Notre groupe, la France Insoumise, propose une formule unique qui lève toute ambiguïté dans cette proposition de résolution sur la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal. Par cet amendement, nous appelons à la libération immédiate de Boualem Sansal au nom des idéaux universels portés par la déclaration des droits de l’homme et indépendamment de toute instrumentalisation de ces principes à des fins politiques. L’incarcération de l’auteur a en effet été instrumentalisée par l’extrême droite et le gouvernement français afin d’alimenter les tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie et leur rhétorique xénophobe. Cette proposition de résolution s’inscrit dans ce contexte et vise, sous couvert de défense des libertés fondamentales de Boualem Sansal et des droits inhérents à sa personne, à exacerber les tensions politiques avec le gouvernement algérien. La dissémination d’arguments et de mesures à visée politicienne au milieu des déclarations et des attachements de principe aux droits humains et fondamentaux garantis par la déclaration universelle des droits de l’homme est de nature à semer le doute quant aux véritables intentions des auteurs de cette proposition de résolution. En supprimant les alinéas mentionnés, c’est-à-dire de 19 à 33 inclus, et les arguments politiciens qu’ils contiennent, nous voulons réaffirmer clairement et sans ambigüité que les libertés fondamentales et notre attachement aux droits contenus dans la déclaration universelle des droits de l’homme motivent notre action et notre appel à la libération immédiate et sans conditions de Boualem Sansal.

Mme Constance le Grip, rapporteure. Je suis défavorable à votre amendement qui vise à réécrire intégralement la proposition de résolution et à proposer une rédaction alternative mais extraordinairement compressée. Même si je partage ce que vous dites, l’attachement aux droits fondamentaux et aux textes qui les rappellent figurent déjà dans le texte de la résolution. Je ne peux pas souscrire à une réécriture sèche qui vise à dénaturer et à réécrire ainsi qu’à appauvrir l’ensemble des messages.

Mme Caroline Yadan (EPR). Si j’ai bien compris, par cet amendement, vous voulez supprimer tout ce qui fait référence à la liberté d’expression et à la nécessité de la garantir en Algérie, tout ce qui fait référence aux droits de la défense ainsi qu’à l’inculpation au nom de l’atteinte à la défense de la sécurité nationale selon le Code pénal algérien. Vous voulez supprimer tout ce qui concerne l’âge et la fragilité de l’état de santé de Boualem Sansal. En tout état de cause, vous voulez supprimer tout ce qui paraît essentiel à dire parce que c’est justement en n’employant pas les mots qui conviennent qu’on fait du mal à notre République, à notre démocratie et que l’on donne un blanc-seing à un pouvoir qui a aujourd’hui l’impression d’être un pouvoir qui fait ce qu’il veut avec nos libertés fondamentales.

L’amendement n° 12 n’est pas adopté

Amendement n °9 de M. Bastien Lachaud

M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Cet amendement vise à rappeler les liens d’amitié et de respect qui lient les peuples algériens et français. Madame la rapporteure, vous insistez, dans votre rapport, sur ces liens qui sont actuellement abîmés. Il me semble indispensable que nous, parlementaires, puissions rappeler l’importance de ces liens à nos yeux.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. J’émets un avis favorable à cet amendement. Je pense qu’il peut être judicieux, opportun, utile et bienvenu, pour trouver un chemin de dialogue et de respect mutuel, d’inscrire l’alinéa que vous proposez qui rappelle les liens d’amitié et de respect liant les peuples algériens et français. Je trouve cependant la rédaction de l’exposé des motifs de votre amendement assez caricatural. Si j’ai souscrit aux termes « rappelle les liens d’amitié et de respect qui lient les peuples algériens et français », je ne saurais cautionner les termes de l’exposé des motifs.

M. Guillaume Bigot (RN). Notre avis est défavorable pour une raison simple : la politique est l’art du moment et ce n’est sûrement pas le moment de rappeler des liens d’amitié. Nous voulons faire pression sur le gouvernement algérien et pas sur le peuple algérien. En l’état de la démocratie en Algérie, je ne crois pas que le gouvernement algérien représente réellement le peuple algérien. Il n’est donc ni question de faire pression sur le peuple algérien, ni de rappeler des liens d’amitié qui sont évidents.

Mme Colette Capedevielle (SOC). Nous voterons en faveur de cet amendement parce qu’il vient rappeler une partie de notre histoire. Même si la situation s’aggravait, nos deux peuples entretiennent historiquement des liens d’amitié ancrés dans l’histoire qu’il est opportun de rappeler dans les considérants.

L’amendement n° 9 est adopté

Amendement n° 8 de Mme Nathalie Oziol

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). Depuis le début de la crise avec Alger, le gouvernement français utilise une rhétorique guerrière, qui n’a pas sa place dans les relations internationales et qui ne peut contribuer à instaurer un dialogue constructif avec Alger, pourtant nécessaire à la libération de Boualem Sansal. Au contraire, cette approche risque d’entretenir des tensions entre les deux capitales à des fins de politique intérieure. Par cet amendement, nous voulons rappeler qu’un dialogue constructif, la diplomatie et le respect mutuel sont les seuls moyens d’obtenir la libération de Boualem Sansal.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je ne suis pas favorable à cet amendement. Je pense qu’il faut rester sur la raison d’être de cette proposition de résolution qui est de porter des valeurs, d’affirmer des convictions, d’appeler à la libération d’un homme et de rappeler les principes, l’état de droit et les engagements internationaux pris par l’Algérie. Tout en rappelant la position exprimée par le chef de l’État, qui est de considérer Boualem Sansal comme un combattant de la liberté que nous appelons à libérer, le ministre des Affaires étrangères français a fait savoir qu’il était prêt à se rendre à Alger pour reprendre le fil du dialogue et de la discussion. Je crois qu’il n’est pas nécessaire d’affadir le propos ou de rappeler quelque chose qui va de soi et qui relève du travail des diplomates.

M. Guillaume Bigot (RN). Nous voterons contre cet amendement. La diplomatie n’est pas l’art de prendre le thé, ni de casser la vaisselle. Dans une négociation, il faut exercer un rapport de force et ne pas se coucher en permanence. Si vous adoptez cet amendement, vous vous auto-insultez. En effet, il est question des invectives xénophobes du gouvernement, qui seraient contre-productives. Je sais bien que nous sommes à l’ère où la politique s’affranchit du principe de non-contradiction, mais défendre un écrivain franco-algérien nommé Boualem Sansal serait de la xénophobie ? Une telle affirmation est totalement insensée.

Mme Caroline Yadan (EPR). Il ne faut pas oublier qu’en emprisonnant Boualem Sansal pour une opinion parfaitement libre et légale dans le pays où il l’a exprimée et dont il porte la nationalité, le pouvoir algérien a engagé un bras de fer avec la France. Le pouvoir algérien l’a qualifié de voleur. Cet écrivain a perdu sa liberté et a été emprisonné suite aux propos du Président de la République sur l’autonomie du Sahara occidental sous souveraineté marocaine. Boulaem Sansal paie les prises de position de la France. Dire cela n’empêche pas l’exercice de la diplomatie, mais lui permet de s’exercer dans une vérité.

Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). Vous avez indiqué les propos du ministre des affaires étrangères qui essaye de nouer le dialogue diplomatique. Mais vous ne pouvez pas faire comme si les propos du ministre de l’intérieur ne sont pas en totale contradiction avec ceux du ministre des affaires étrangères. Tout cela met à mal le travail de diplomatie qui est en cours. Il serait au contraire nécessaire de réaffirmer que nous avons une diplomatie qui travaille et fait correctement son travail. C’est grâce à cela que les dossiers avancent et non par le chantage prévu par cette résolution.  Je m’exprime en tant que députée française pour vous dire que notre diplomatie fait un travail remarquable et qu’il est important de la soutenir et pas de la neutraliser.

Mme Colette Capedevielle (SOC). C’est une résolution pour la libération d’un homme emprisonné. Il faut revenir au cœur du sujet de la résolution. La diplomatie ne doit pas être gênée. Nous nous abstiendrons sur cet amendement car si la négociation et les discussions appartiennent aux diplomates, il est insultant de le noter dans la résolution. Nous devons être vigilants dans la rédaction. Les diplomates jouent un rôle fondamental et nous espérons une normalisation des relations entre nos deux pays. Nous comprenons le fondement du rappel opéré par cet amendement, cependant, nous estimons qu’il n’est pas opportun, au regard de la situation actuelle, de l’introduire à ce stade et à cet endroit du texte.

L’amendement n° 8 n’est pas adopté

Amendement n° 7 de M. Bastien Lachaud.

M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, cette résolution prend place dans un enchaînement d’agressivité et d’escalades verbales, notamment portées par le ministre de l’Intérieur, sans que le ministre des Affaires étrangères ne parvienne à s’y opposer. En effet, pour le moment, c’est la position du ministre de l’Intérieur qui est la plus audible.

Il s’agit, par le présent amendement, de condamner l’ensemble de cette escalade. Elle est condamnée dans la résolution pour la partie algérienne. Mais il me semble qu’elle est aussi alimentée côté français et qu’il est de notre rôle de la condamner.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement que je juge inopportun. Les derniers développements ont montré les tentatives françaises d’aller vers la reprise du dialogue.

Mme Caroline Yadan (EPR). Cet amendement est très dangereux : il procède à un renversement des valeurs et à une inversion accusatoire comme si c’était la séquestration de Boualem Sansal qui était à l’origine des tensions entre la France et l’Algérie.

Vous écrivez dans l’exposé sommaire de l’amendement précédent que le gouvernement français utilise une « rhétorique martiale délétère » et vous dénoncez les « invectives xénophobes du gouvernement ». Ce sont des termes absolument incroyables.

Nous sommes dans une situation indigne : c’est presque comme si vous rendiez responsable le gouvernement français de la séquestration inacceptable par le pouvoir algérien de Boualem Sansal pour ses opinions.

L’amendement n° 7 n’est pas adopté.

Amendement n °4 de Mme la rapporteure.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. J’ai souhaité amender mon texte en rajoutant un alinéa qui appelle à la mise en place d’une mission médicale internationale afin d’évaluer l’état de santé de Boualem Sansal.

Monsieur Sansal est un homme âgé et malade. Il a fait des allers-retours entre l’hôpital et la prison où il est toujours détenu. Il aurait subi des examens médicaux – on parle de radiothérapie – dans le cadre du cancer de la prostate dont il est affecté, mais en réalité personne ne sait rien de son état de santé réel.

La protection consulaire ne lui a pas été accordée : ni le consul ni l’ambassadeur de France en Algérie ne peuvent le voir. Il a tout au plus un contact hebdomadaire avec son épouse et ses avocats algériens commis d’office – mais qui évidemment ne sont pas médecins. Les proches de Boualem Sansal ont de très fortes inquiétudes quant à la dégradation de son état de santé.

Nous souhaiterions donc, pour des raisons humanitaires, et comme les députés européens l’ont exprimé dans leur résolution adoptée le 23 janvier, la mise en place d’une mission médicale.

Un certain nombre de praticiens français ont d’ailleurs récemment écrit à Médecins du monde et à Médecins sans frontières pour faire part de leurs inquiétudes et demander la mise en place de cette mission médicale.

L’amendement n° 4 est adopté.

Les amendements n° 1, 2, 10 et 11 sont soumis à une discussion commune.

Amendement n °1 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). Cet amendement propose la suppression des alinéas 32 et 33 qui sont les plus problématiques de notre point de vue dans l’écriture de cette résolution, pour plusieurs raisons.

D’abord, il y a une incohérence entre le titre de la résolution qui indique une demande « inconditionnelle » de libération de Boualem Sansal alors que, dans le même temps, vous écrivez ces alinéas qui posent des conditions pour sa libération. Il convient donc de simplifier et clarifier la rédaction par la suppression de ces alinéas.

Ensuite, cette résolution a été déposée par des groupes d’extrême droite au Parlement européen et je crois que nous gagnerions à ne pas adhérer aux thèses et à la colère dont ils usent à chaque fois pour parler de l’Algérie.

Enfin, je pense que ce n’est pas en pénalisant l’entièreté de la société algérienne, en conditionnant les aides dans l’accord d’association de l’Union européenne avec l’Algérie, qu’on réussira à obtenir la libération de Boualem Sansal.

Je peux entendre les relents de certains pans de cet hémicycle qui sont nostalgiques de l’Algérie française, de l’OAS, et qui voudraient se croire encore colonisateurs d’un État souverain. Mais je pense que ce n’est pas votre cas et que l’on gagnerait en cohérence avec la suppression de ces deux alinéas.

Mme Colette Capdevielle (SOC). Si l’on veut vraiment obtenir la libération rapide de Boualem Sansal, il faut que l’on aboutisse à des relations apaisées avec le gouvernement algérien.

Or ces deux derniers alinéas sont en contradiction, d’une part, avec le titre de la résolution – « libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal » – et, d’autre part, avec l’esprit de cette résolution, qui est d’obtenir la libération de Boualem Sansal et de ne pas entraver le travail diplomatique de négociation.

Cette rédaction est de nature à crisper et à être mal reçue. Nous vous remercions donc, chers collègues, de bien vouloir voter cet amendement et de permettre la suppression de ces alinéas qui sont de nature à tendre les relations diplomatiques.

D’autant que, comme Mme Sabrina Sebaihi l’a dit, cette rédaction a été inspirée par les groupes d’extrême droite du Parlement européen. Nous souhaiterions donc faire litière de ces références-là.

Amendement n° 10 de Mme Nathalie Oziol.

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). Ces amendements proposent de supprimer les alinéas 32 et 33 qui pénaliseraient le peuple algérien et la coopération entre l’Union européenne (UE) et l’Algérie, tout en aggravant les tensions diplomatiques entre Européens et algériens.

L’Union européenne finance, via la politique européenne de voisinage, des projets de coopération avec le gouvernement algérien, sur de nombreuses thématiques, dont notamment la transition énergétique, l’action climatique et le développement économique local. Ces projets de coopération bénéficient directement aux populations et visent précisément à faire émerger des conditions matérielles, sociales et politiques permettant de réaliser des progrès substantiels en matière d’État de droit et de libertés fondamentales. Conditionner le financement de ces programmes à des critères politiques reviendrait donc à exiger dès le départ que les actions de coopération de l’UE remplissent les critères que la Commission européenne lui a précisément fixés comme objectifs finaux. Il convient également de noter que l’Europe n’est pas exempt d’atteintes aux libertés individuelles comme le prouve la situation en Hongrie où la dégradation des libertés fondamentales est flagrante. Tout cela va dans le sens d’une escalade diplomatique qui est le contraire de ce qui doit être visé.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je suis défavorable à ces amendements. J’entends bien les différents arguments que vous déployez. S’agissant de la critique de nature sémantique qui m’est faite sur la discordance qu’il y aurait entre le contenu de ladite proposition de résolution et le titre, je précise que ce n’est pas la demande qui est inconditionnelle, mais la libération. Cela n’a rien à voir. La demande est donc faite avec fermeté, avec opiniâtreté, dans la droite ligne de ce que les parlementaires européens, de toute nationalité et de très nombreuses obédiences politiques différentes ont demandé.

Il s’agit de la liberté d’un compatriote qui écrit en français et dont nous souhaitons obtenir la libération. Je rappelle qu’il y a des comités d’écrivains et d’intellectuels, d’hommes et de femmes politiques qui se mettent en place. Un véritable mouvement prend forme dans la société civile, en France, en Europe, et dans d’autres régions du monde comme l’Amérique latine, comme en témoignent ces mairies, administrées par des maires de couleurs politiques différentes, qui font des banderoles appelant à sa libération, ou encore ces opérations envisagées pour obtenir sa libération. Il est important que nous allions au-delà d’une déclaration de principes. Il est important de montrer que nous appelons la France et l’Union européenne à ne pas se priver d’utiliser tous les leviers de pression diplomatiques pour parvenir à l’objectif. Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. Guillaume Bigot (RN). En réalité je ne comprends pas très bien pourquoi il faudrait supprimer des amendements inutiles s’ils sont inutiles.

D’abord, vous nous expliquez que la France ne doit pas rentrer dans un bras de fer alors qu’elle l’est déjà, suite l’arrestation inique de notre compatriote. À partir du moment où quelqu’un exerce un bras de fer, si vous refusez d’utiliser des leviers pour le gagner, vous vous couchez.

Ensuite il faut rappeler quand même le droit international et en l’occurrence le traité signé par l’Union européenne et l’Algérie en 2005 dont l’article 84 dispose que l’Algérie doit accepter de garder sur son sol ses nationaux lorsqu’ils sont expulsés par un pays de l’Union européenne.

Enfin, le peuple algérien est un grand peuple qui a en effet arraché son indépendance au prix du sang. Ce grand peuple qui devrait être un peuple frère du peuple français mérite probablement mieux qu’une bande de cleptomanes incompétents et haineux.

Mme Colette Capdevielle (Soc). L’alinéa 33 indique que « nous appelons le gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne et le Conseil européen à suspendre toutes les avancées favorables à l’Algérie dans les discussions entre l’Union européenne et l’Algérie, dans le cas de la renégociation de l’accord d’association UE-Algérie, tant que Boualem Sansal ne sera pas libéré de prison. »

Cette rédaction constitue une forme de chantage. Nous sommes d’accord avec vous sur le terrain de la liberté d’expression et le terrain humanitaire. Mais il n’est pas possible d’affirmer que cette libération doit être inconditionnelle et en même temps poser de telles conditions au Gouvernement, à la Commission européenne et au Conseil.

Mme Sabrina Sebailhi (EcoS). Je rejoins ma collègue Mme Capdeviellle : ces articles sont en totale contradiction avec ce que vous demandez. Vous réclamez comme nous tous une libération inconditionnelle et en même temps vous posez des conditions pour cette demande de libération. Il s’agit d’une forme de chantage. Si vous demandez seulement la libération inconditionnelle, nous pourrions soutenir la rédaction.

Monsieur Bigot, vous entendre parler du droit international alors que cela fait des mois que nous demandons à ce qu’il soit appliqué partout à travers le monde de la même manière me paraît déplacé. La France se grandirait largement en appliquant le droit international partout de la même manière quel que soit l’État qu’elle a face à elle.

Enfin, les propos que vous tenez vis-à-vis de l’Algérie montrent que vous n’avez pas de respect pour ce pays, ni pour ses habitants, et que vous êtes encore dans une forme de nostalgie coloniale : l’utilisation du terme de « cleptomanes » pour qualifier des responsables est indigne de votre fonction.

Madame Caroline Yadan (EPR). Vous pensez qu’il y a une contradiction entre la demande de libération inconditionnelle et les aliénas 32 et 33. Vous faites une confusion : ces alinéas ne posent aucune condition à la libération de Boualem Sansal. Ils viennent indiquer qu’à partir du moment où le pouvoir algérien a emprisonné un homme de manière totalement arbitraire, il est de notre devoir de dire que tant que Boualem Sansal est en prison, il convient de suspendre les négociations en cours de l’accord d’association. Cela paraît légitime et ce n’est pas une condition.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je partage les propos de Caroline Yadan. Je rappelle qu’au Parlement européen, la résolution a été portée par plusieurs groupes parlementaires et qu’après avoir été amendée, elle a été adoptée à une très large majorité, de façon transpartisane, avec le soutien des Socialistes européens et des Verts. Or, elle comprend un alinéa qui appelle clairement à ce que les futurs versements de fonds de l’Union européenne tiennent compte des progrès accomplis par l’Algérie en matière de droits et libertés.

Les amendements n° 1, n° 2, n° 10 et n° 11 ne sont pas adoptés.

Amendement n° 5 de Mme Manon Bouquin

Mme Manon Bouquin (RN). L’Algérie s’autorise à ignorer ouvertement le droit international et à mépriser les décisions de justice françaises et européennes. Ce comportement n’est plus tolérable. Alors que l’influenceur algérien Doualemn, interpellé à Montpellier pour avoir diffusé une vidéo appelant à la violence, avait fait l’objet d’une décision d’expulsion, les dirigeants algériens l’ont renvoyé en France le soir même, comme si nos frontières étaient une passoire et nos décisions judiciaires de simples recommandations sans valeur. Ce n’est pas un cas isolé. Depuis trop longtemps, le régime algérien pratique une politique de refus systématique en ne délivrant pas les laissez-passer nécessaires au retour de ses ressortissants. Ils vont jusqu’à bloquer les expulsions exécutoires qui ne nécessitent aucun document. Cela constitue une véritable remise en cause de notre souveraineté nationale. Cette arrogance doit cesser.

Cet amendement appelle ainsi le Gouvernement français et les institutions européennes à exiger fermement le respect du droit international. Nous ne pouvons accepter que la sécurité de nos concitoyens et la légitimité de notre justice soit bafouées par un État partenaire qui semble se croire au-dessus des règles. L’heure est venue de rappeler que la coopération ne peut fonctionner sans respect mutuel.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. J’émets un avis défavorable. Je souhaite que la proposition de résolution demeure concentrée sur l’appel à la libération de Boualem Sansal et sur la dénonciation des violations flagrantes de ses droits fondamentaux.

Mme Caroline Yadan (EPR). La demande de Mme Bouquin me semble satisfaite par la rédaction actuelle de la proposition de résolution, qui appelle déjà à respecter le droit international. Elle invite en effet la France et l’Union européenne à mobiliser tous les leviers diplomatiques dont elles disposent pour obtenir la libération de Boualem Sansal, en conformité avec le droit international.

M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). J’ai du mal à comprendre : Mme la rapporteure s’oppose à cet amendement au motif qu’il dévoierait l’objet de la proposition de résolution, alors que Mme Yadan avance qu’il est déjà satisfait par la résolution. Il y a une incohérence. Madame la rapporteure, pourriez-vous éclaircir ce point ?

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Il n’y a aucun doute sur le fait que la proposition de résolution appelle au respect de l’État de droit, des libertés fondamentales, et des grands principes démocratiques auxquels la France et l’Union européenne sont particulièrement attachées. Je ne suis cependant pas favorable à cet amendement car il ne correspond pas exactement à ma position.

L’amendement n° 5 n’est pas adopté.

Amendement n° 6 de Mme Manon Bouquin

Mme Manon Bouquin (RN). La détention arbitraire de Boualem Sansal constitue une attaque frontale contre la liberté d’expression et les principes fondamentaux des droits humains. Au-delà d’un cas individuel, nous défendons ici le respect des valeurs démocratiques. L’Algérie ne peut bénéficier indéfiniment des avantages d’une coopération étroite avec l’Union européenne tout en foulant aux pieds ces principes. La délivrance de visas pour ses ressortissants est un privilège et non un dû. Cet amendement propose donc de suspendre cette délivrance jusqu’à ce que Boualem Sansal soit délivré.

Si cette mesure ne suffisait pas, nous disposons de bien d’autres leviers. Nous pourrions suspendre les transferts de fonds vers l’Algérie, ou geler les avoirs des dignitaires algériens résidant dans l’Union européenne. Le régime algérien doit comprendre qu’il y aura des conséquences concrètes à la répression des voix dissidentes, notamment lorsque celle-ci vise nos compatriotes français. Nous devons montrer que l’Europe ne reste pas silencieuse face à la violation des droits humains.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement.

L’amendement n° 6 n’est pas adopté.

L’article unique de la proposition de résolution européenne, ainsi modifié, est adopté.

La proposition de résolution européenne est par conséquent adoptée.

Mme Constance Le Grip, rapporteure. Je tiens à remercier l’ensemble de mes collègues qui ont pris part à ce débat très intéressant. Nous espérons que cette proposition de résolution européenne pourra être bientôt discutée dans l’hémicycle. J’observe en tout cas avec satisfaction qu’elle a suscité un fort intérêt : nos discussions ont été suivies par de nombreuses personnes qui placent les libertés d’opinion et d’expression au-dessus de toutes les contingences.

 

 


– 1 –

   proposition de rÉsolution européenne initiale

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la résolution 2025/2512 du Parlement européen sur le cas de Boualem Sansal en Algérie,

Vu la résolution 2023/2661 du Parlement européen sur la liberté des médias et la liberté d’expression en Algérie, le cas du journaliste Ihsane El‑Kadi,

Vu la résolution 2021/2055 du Parlement européen sur la persécution des minorités fondées sur les convictions ou la religion,

Vu la résolution 2020/2880 du Parlement européen sur la détérioration de la situation des droits de l’homme en Algérie, en particulier le cas du journaliste Khaled Drareni,

Vu la résolution 2019/2927 du Parlement européen sur la situation des libertés en Algérie,

Vu la résolution 2018/2160 du Parlement européen sur l’après‑printemps arabe,

Vu la résolution 2015/2665 du Parlement européen sur l’incarcération de militants des droits de l’homme et des travailleurs en Algérie,

Vu la résolution C 124 E/568 du Parlement européen sur la liberté de la presse en Algérie,

Vu les orientations et valeurs de l’Union européenne concernant les défenseurs des droits de l’homme, la peine de mort, la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la liberté d’expression en ligne et hors ligne, et les défenseurs des droits de l’homme,

Vu la charte africaine des droits de l’homme et des peuples,

Vu l’article 40 de la Constitution de l’Algérie qui proscrit toute forme de violence physique ou moral ou d’atteinte à la dignité. Cet article dénonce également tout traitement cruel, inhumain ou dégradant. Aussi, l’État algérien est garant de l’inviolabilité de la personne humaine,

Vu l’article 42 de la Constitution de l’Algérie qui consacre l’inviolabilité de la liberté de conscience et de la liberté d’opinion. Les articles 48 et 50 de cette même Constitution reconnaissent la liberté d’expression, la liberté de la presse et proscrivent toute forme de censure,

Vu l’accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne du 22 avril 2002,

Vu le rapport du 9 mars 2017 de la Commission européenne sur l’état des relation Union Européenne‑Algérie dans le cadre de la potitique européennne de voisinage rénovée,

Vu les conclusions du Conseil d’association Union Européenne‑Algérie du 7 décembre 2020,

Considérant que l’Algérie est signataire de la Déclaration universelle des droits de l’homme et qu’elle s’est engagée à garantir et à promouvoir la liberté d’expression, dans le strict respect de ses obligations internationales ;

Considérant que le 16 novembre 2024, les autorités algériennes ont procédé à l’arrestation de l’écrivain franco‑algérien Boualem Sansal, connu pour ses prises de position fermes et publiques contre le régime en place, réclamant notamment la garantie de la liberté d’expression en Algérie. Il est demeuré introuvable pendant une semaine, période durant laquelle il lui a été interdit de communiquer avec sa famille et de consulter un avocat, en violation flagrante du droit international. M. Sansal a été interrogé sans la présence de son conseil juridique, portant ainsi atteinte à son droit à un procès équitable. Par la suite, il a été inculpé pour atteinte à la sûreté de l’État sur la base de l’article 87 bis du code pénal algérien, un texte souvent invoqué pour réprimer les critiques à l’égard du gouvernement, y compris celles des défenseurs des droits de l’homme ;

Considérant, au regard de son âge et la fragilité de sa santé, que les conditions dans lesquelles M. Sansal est détenu font peser un risque direct sur sa vie ;

Considérant que la liberté d’expression a régressé en Algérie. Le pays est classé à la 139ème place du classement mondial de la liberté de la presse en 2024 ;

Considérant l’adoption en Algérie en 2023 de trois lois sur les médias, dénoncées comme répressives par de nombreuses organisations non gouvernementales : la loi organique sur l’information, la loi relative à la presse écrite et électronique et la loi relative à l’activité audiovisuelle ;

Considérant, selon les chiffres des défenseurs des droits de l’homme en Algérie, que 215 personnes sont aujourd’hui détenues en Algérie comme « prisonnier d’opinion » ;

Considérant qu’entre 2021 et 2024, l’Union européenne demeure un partenaire privilégié de l’Algérie et qu’elle lui a versé 213 millions d’euros dans le cadre du programme indicatif pluriannuel ;

Considérant que les éventuelles tensions diplomatiques entre deux États souverains ne sauraient avoir des répercussions directes sur les destins et les droits des individus ;

Condamne fortement l’arrestation et la détention de Boualem Sansal et réclame sa libération immédiate et inconditionnelle ;,

Condamne la détention en Algérie des personnes considérées comme « prisonniers d’opinion », militants, journalistes, blogueurs, ou défenseurs des droits de l’homme, et réclame leur libération ;

Condamne les méthodes d’intimidation du régime algérien qui réduise, de fait, la liberté d’expression et la liberté de la presse ;

Appelle le Gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne à rappeler aux autorités algériennes le respect du droit de la défense de M. Boualem Sansal, et de permettre à son avocat de le rejoindre à Alger pour le défendre ;

Appelle le Gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne à rappeler aux autorités algériennes le respect des priorités du partenariat Union Européenne‑Algérie, et notamment la protection de l’état de droit et de la liberté d’expression ;

Appelle le Gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne à veiller à ce que les futurs versements de fonds européens à l’Algérie s’accompagnent de progrès substantiels en matière d’État de droit et de libertés fondamentales ;

Appelle le gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne et le Conseil européen à suspendre toutes les avancées favorables à l’Algérie dans les discussions entre l’Union européenne et l’Algérie, dans le cadre de la renégociation de l’accord d’association Union Européeene‑Algérie tant que Boualem Sansal ne sera pas libéré de prison.

 

 


– 1 –

   amendements examinés par la commission

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 3

 

présenté par

Constance LE GRIP, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

 

Entre l’alinéa 11 et l’alinéa 12, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement vise à rappeler que la défense des droits fondamentaux est au cœur de l’engagement européen et que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne constitue une référence incontournable lorsqu’il s’agit de protéger la liberté d’expression et les droits individuels.

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 12

 

présenté par

Mme Oziol, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot,

Mme Amrani, M. Arenas, M. Arnault, Mme Belouassa-Cherifi, M. Bernalicis, M. Bex,

M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Cadalen, M. Caron,

M. Carrière, Mme Cathala, M. Cernon, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel,

M. Coulomme, M. Delogu, M. Diouara, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Feld,

M. Fernandes, Mme Ferrer, M. Gaillard, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hamdane,

Mme Hignet, M. Kerbrat, M. Lachaud, M. Lahmar, M. Laisney, M. Le Coq,

M. Le Gall, Mme Leboucher, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lejeune,

Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Élisa Martin, M. Maudet, Mme Maximi,

Mme Mesmeur, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Nosbé, Mme Obono,

Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme,

M. Ratenon, M. Saint-Martin, M. Saintoul, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, M. Taché, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé et M. Vannier

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ARTICLE UNIQUE

Supprimer les alinéas 19 à 33 inclus.

Remplacer par: 

“Appelle à la libération immédiate de Boualem Sansal au nom de la liberté d’opinion et d’expression, garantie par la Déclaration universelle des droits de l’homme.”

EXPOSÉ SOMMAIRE

Par cet amendement, les députés LFI-NFP appellent à la libération immédiate de Boualem Sansal, au nom des idéaux universels portés par la Déclaration des droits de l’homme et indépendamment de toute tentative d’instrumentalisation de ces principes à des fins politiques. 

L’incarcération de l’auteur Boualem Sansal a en effet été instrumentalisée par l’extrême droite et le gouvernement français afin d’alimenter les tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie et leur rhétorique xénophobe.

Cette proposition de résolution s’inscrit dans ce contexte et vise, sous couvert de défense des libertés fondamentales de Boualem Sansal et des droits inhérents à sa personne, à exacerber les tensions politiques avec le gouvernement algérien.

La dissémination de mesures et d’arguments à visées politiciennes au milieu des déclarations de principe et d’attachement affiché au respect des droits humains fondamentaux garantis par la Déclaration universelle des droits de l’homme est de nature à semer le doute quant aux véritables intentions des auteurs de cette proposition.

En supprimant ces alinéas et les arguments politiciens qu’ils contiennent, les députés LFI-NFP veulent réaffirmer clairement et sans ambiguïté que le seul respect des libertés fondamentales et leur attachement aux principes contenus dans la Déclaration universelle des droits de l’homme motivent leur action et leur appel à la libération immédiate et sans condition de Boualem Sansal. 

 

Cet amendement n’a pas été adopté..

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 9

 

présenté par

M. Lachaud, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot,

Mme Amrani, M. Arenas, M. Arnault, Mme Belouassa-Cherifi, M. Bernalicis, M. Bex,

M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Cadalen, M. Caron,

M. Carrière, Mme Cathala, M. Cernon, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel,

M. Coulomme, M. Delogu, M. Diouara, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Feld,

M. Fernandes, Mme Ferrer, M. Gaillard, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hamdane,

Mme Hignet, M. Kerbrat, M. Lahmar, M. Laisney, M. Le Coq,

M. Le Gall, Mme Leboucher, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lejeune,

Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Élisa Martin, M. Maudet, Mme Maximi,

Mme Mesmeur, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Nosbé, Mme Obono,

Mme Oziol, Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme,

M. Ratenon, M. Saint-Martin, M. Saintoul, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, M. Taché, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé et M. Vannier

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 26, insérer l’alinéa suivant :

« Rappelle les liens d'amitié et de respect qui lient les peuples algériens et français ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Par cet amendement, les députés LFI-NFP proposent d’affirmer la nécessité de prendre en considération l’histoire singulière et douloureuse entre la France et l’Algérie.

Le souvenir de ce passé commun nous impose tout particulièrement de refuser le jeu des déclarations politiques incendiaires vis-à-vis de l’Algérie auquel se livrent les macronistes, la droite et l’extrême droite en France. Cette proposition de résolution, qui y participe également, est d’autant plus hypocrite qu’elle déclare que « « les éventuelles tensions diplomatiques entre deux États souverains ne sauraient avoir des répercussions directes sur les destins et les droits des individus », alors qu’en France, les Algériens et Franco-Algériens pâtissent quotidiennement des postures revanchardes des membres du gouvernement vis-à-vis de l’Algérie.

Ainsi, quand le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau évoque les « belles heures de la colonisation » ou quand le ministre des affaires étrangères Jean-Noël Barrot parle de « rente mémorielle » à propos de l'Algérie, ils cherchent en vérité à minimiser les 132 années de colonisation et de souffrances subies par le peuple algérien, opérant ainsi une intolérable déformation de notre histoire commune.

 

Cet amendement a été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 8

 

présenté par

Mme Oziol, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot,

Mme Amrani, M. Arenas, M. Arnault, Mme Belouassa-Cherifi, M. Bernalicis, M. Bex,

M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Cadalen, M. Caron,

M. Carrière, Mme Cathala, M. Cernon, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel,

M. Coulomme, M. Delogu, M. Diouara, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Feld,

M. Fernandes, Mme Ferrer, M. Gaillard, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hamdane,

Mme Hignet, M. Kerbrat, M. Lachaud, M. Lahmar, M. Laisney, M. Le Coq,

M. Le Gall, Mme Leboucher, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lejeune,

Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Élisa Martin, M. Maudet, Mme Maximi,

Mme Mesmeur, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Nosbé, Mme Obono,

Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme,

M. Ratenon, M. Saint-Martin, M. Saintoul, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, M. Taché, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé et M. Vannier

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 26, insérer l’alinéa suivant :

« Affirme que les désaccords entre Paris et Alger, ainsi qu'entre l'UE et Alger, doivent être réglés par la discussion et la diplomatie ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Par cet amendement, les députés LFI-NFP proposent d’orienter la résolution dans un sens plus constructif et qui n’incite pas à l’escalade diplomatique.

Depuis le début de la crise avec Alger, le gouvernement français utilise en effet une rhétorique martiale délétère qui n’a pas sa place dans les relations internationales, et qui ne vise nullement à instaurer un dialogue constructif avec Alger en vue d’obtenir la libération de Boualem Sansal, mais bien à entretenir des tensions entre les deux capitales à des fins de politique intérieure.

Par cet amendement, les députés LFI-NFP veulent rappeler qu’un dialogue constructif dans le respect mutuel est le seul moyen d’obtenir la libération de Boualem Sansal, et que les invectives xénophobes du gouvernement sont contre-productives à cet effet.

 

 

Cet amendement n’a pas été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 7

 

présenté par

 

 M. Lachaud, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot,

Mme Amrani, M. Arenas, M. Arnault, Mme Belouassa-Cherifi, M. Bernalicis, M. Bex,

M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Cadalen, M. Caron,

M. Carrière, Mme Cathala, M. Cernon, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel,

M. Coulomme, M. Delogu, M. Diouara, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Feld,

M. Fernandes, Mme Ferrer, M. Gaillard, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hamdane,

Mme Hignet, M. Kerbrat, M. Lahmar, M. Laisney, M. Le Coq,

M. Le Gall, Mme Leboucher, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lejeune,

Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Élisa Martin, M. Maudet, Mme Maximi,

Mme Mesmeur, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Nosbé, Mme Obono,

Mme Oziol, Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme,

M. Ratenon, M. Saint-Martin, M. Saintoul, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, M. Taché, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé et M. Vannier

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 26, insérer l’alinéa suivant :

« Condamne l’agressivité et l'escalade irresponsable vis-à-vis de l'Algérie que s'emploient à créer depuis des mois des responsables politiques français ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Par cet amendement, les députés LFI-NFP proposent de condamner la surenchère médiatique et politique dans laquelle s’inscrit cette proposition de résolution.

La mobilisation des députés macronistes, de droite et d’extrême droite en France pour la libération de Boualem Sansal n’est pas sans arrières pensées. En effet, elle n’est pas motivée par la défense des droits humains et de la liberté d’expression en Algérie mais s’inscrit bien dans une manœuvre politique déclenchée par le gouvernement français pour accroître les tensions avec Alger afin de stigmatiser des millions d'Algériens, de binationaux, et de Français d'origine algérienne.

Par cet amendement, les députés LFI-NFP, attachés à la liberté d’expression et aux droits des opposants politiques partout dans le monde, veulent réaffirmer leur soutien à la libération de Boualem Sansal tout en se désolidarisant de la manœuvre grossière des auteurs de cette proposition de résolution visant à provoquer une crise ouverte avec le gouvernement algérien.

 

Cet amendement n’a pas été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 4

 

présenté par

Constance LE GRIP, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 30, insérer l’alinéa suivant :

« Appelle à la mise en place d’une mission médicale internationale afin d’évaluer l’état de santé de Boualem Sansal ; »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

L’état de santé de Boualem Sansal, un homme âgé de 80 ans, alarme particulièrement ses proches et tous ceux qui le soutiennent. Atteint d’un cancer de la prostate, il est détenu en prison, dans des conditions susceptibles de dégrader son état de santé. M. Sansal aurait fait des allers-retours entre la prison de Koléa et l’hôpital Mustapha, où il aurait subi des soins, notamment de radiothérapie. En vérité, ni le stade ni les symptômes de son cancer ne sont connus, pas plus que la nature et la fréquence des soins qui lui ont été ou sont prodigués. Plusieurs personnalités du monde médical français ont récemment écrit à Médecins du Monde et à Médecins Sans Frontières pour demander l’organisation d’une telle mission médicale. Cette demande figure également dans la résolution votée le 23 janvier 2025 par le Parlement européen.

 

 

Cet amendement a été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 1

 

présenté par

Sabrina Sebaihi, Benoît Biteau, Nicolas Bonnet, Sophie Taillé-Polian

 

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ARTICLE UNIQUE

 

Supprimer les alinéas 32 et 33.

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement vise à supprimer les alinéas 32 et 33, dont la rédaction s’inspire de résolutions déposées par des groupes d’extrême droite au Parlement européen[1]. Proposer au sein de cette résolution de conditionnaliser les futurs versements de fonds européens et les avancées dans le cadre de la renégociation de l’accord d’association à la libération de M. Sansal ne ferait qu’accroître les tensions non seulement entre nos deux pays mais aussi entre l’Algérie et l’Union européenne, et entraverait dès lors les efforts diplomatiques menés afin d’aboutir à l’objectif même de cette résolution : la libération de M. Sansal, le plus rapidement possible. Par ailleurs, en pénalisant avant tout la société et la population algérienne, ces alinéas se trompent de cible ; les versements de fonds européens, qu’ils aient lieu dans le cadre de la politique européenne de voisinage (PEV) ou dans celui de l’accord d’association, ayant pour but de renforcer la prospérité, la stabilité et la sécurité de tous. Enfin, ces alinéas apparaissent en contradiction avec le titre même de la résolution qui appelle à la libération « inconditionnelle » de M. Sansal, ce que nous soutenons.

 

 

 

 

Cet amendement n’a pas été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 2

 

présenté par

Colette CAPDEVIELLE, Karim BENBRAHIM, Marietta KARAMANLI, Anna PIC, Pierre PRIBETICH, Thierry SOTHER

 

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ARTICLE UNIQUE

 

Supprimer les alinéas 32 et 33.

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement vise à supprimer les alinéas 32 et 33, dont la rédaction s’inspire de résolutions déposées par des groupes d’extrême droite au Parlement européen[2]. Proposer au sein de cette résolution de conditionnaliser les futurs versements de fonds européens et les avancées dans le cadre de la renégociation de l’accord d’association à la libération de M. Sansal ne ferait qu’accroître les tensions non seulement entre nos deux pays mais aussi entre l’Algérie et l’Union européenne, et entraverait dès lors les efforts diplomatiques menés afin d’aboutir à l’objectif même de cette résolution : la libération de M. Sansal, le plus rapidement possible. Par ailleurs, en pénalisant avant tout la société et la population algérienne, ces alinéas se trompent de cible ; les versements de fonds européens, qu’ils aient lieu dans le cadre de la politique européenne de voisinage (PEV) ou dans celui de l’accord d’association, ayant pour but de renforcer la prospérité, la stabilité et la sécurité de tous. Enfin, ces alinéas apparaissent en contradiction avec le titre même de la résolution qui appelle à la libération « inconditionnelle » de M. Sansal, ce que nous soutenons.

 

 

 

 

Cet amendement n’a pas été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 10

 

présenté par

Mme Oziol, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot,

Mme Amrani, M. Arenas, M. Arnault, Mme Belouassa-Cherifi, M. Bernalicis, M. Bex,

M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Cadalen, M. Caron,

M. Carrière, Mme Cathala, M. Cernon, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel,

M. Coulomme, M. Delogu, M. Diouara, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Feld,

M. Fernandes, Mme Ferrer, M. Gaillard, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hamdane,

Mme Hignet, M. Kerbrat, M. Lachaud, M. Lahmar, M. Laisney, M. Le Coq,

M. Le Gall, Mme Leboucher, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lejeune,

Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Élisa Martin, M. Maudet, Mme Maximi,

Mme Mesmeur, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Nosbé, Mme Obono,

Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme,

M. Ratenon, M. Saint-Martin, M. Saintoul, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, M. Taché, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé et M. Vannier

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ARTICLE UNIQUE

Supprimer l’alinéa 32.

EXPOSÉ SOMMAIRE

Par cet amendement, les députés LFI-NFP appellent à supprimer cet alinéa qui pénaliserait le peuple algérien et la coopération entre l’UE et l’Algérie tout en aggravant les tensions diplomatiques entre Européens et Algériens.

L’UE finance, via la Politique européenne de voisinage, des projets de coopération sur des thématiques définies avec le gouvernement algérien dans le cadre d’un Plan Indicatif Multi-annuel (PIM) de plusieurs dizaines de millions d’euros. Sur la période 2021-2027, trois axes prioritaires ont ainsi été définis :

- La transition énergétique et l’action climatique ;

- La gouvernance économique et le développement local ;

- La croissance diversifiée, durable et inclusive, les emplois y compris verts et numériques.

Ces projets de coopération bénéficient directement aux populations locales et visent précisément à faire émerger les conditions matérielles, sociales et politiques permettant de réaliser des « progrès substantiels » en matière d’État de droit et de libertés fondamentales; conditionner le financement de ces programmes à des critères politiques reviendrait donc à exiger dès le départ que les actions de coopération de l’UE remplissent les critères que la Commission lui a précisément fixés comme objectifs finaux.

De plus, cette mesure ferait peser sur l’action de coopération extérieure de l’UE des soupçons d’ingérence politique dommageables à sa réussite et pouvant porter atteinte à la confiance des partenaires locaux à son égard.

Cet alinéa montre bien que, loin d’être préoccupés par les progrès des libertés fondamentales en Algérie, les auteurs de cette proposition de résolution sont davantage animés par la volonté de provoquer une escalade diplomatique avec ce pays par des mesures de rétorsion.

 

Cet amendement n’a pas été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 11

 

présenté par

M. Lachaud, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot,

Mme Amrani, M. Arenas, M. Arnault, Mme Belouassa-Cherifi, M. Bernalicis, M. Bex,

M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Cadalen, M. Caron,

M. Carrière, Mme Cathala, M. Cernon, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel,

M. Coulomme, M. Delogu, M. Diouara, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Feld,

M. Fernandes, Mme Ferrer, M. Gaillard, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hamdane,

Mme Hignet, M. Kerbrat, M. Lahmar, M. Laisney, M. Le Coq,

M. Le Gall, Mme Leboucher, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lejeune,

Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Élisa Martin, M. Maudet, Mme Maximi,

Mme Mesmeur, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Nosbé, Mme Obono,

Mme Oziol, Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme,

M. Ratenon, M. Saint-Martin, M. Saintoul, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, M. Taché, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé et M. Vannier

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ARTICLE UNIQUE

Supprimer l’alinéa 33.

EXPOSÉ SOMMAIRE

Par cet amendement, les députés LFI-NFP veulent dénoncer le double standard de cette mesure de rétorsion asymétrique.

En effet, la dégradation substantielle des libertés fondamentales dans de nombreux pays de l’UE, notamment en Hongrie, nous rappelle que l’Europe n’est pas exempte d’atteintes aux libertés individuelles et ne constitue pas une référence intangible. Cette attitude paternaliste et condescendante vis-à-vis de l’Algérie est dommageable pour nos relations avec ce pays.

De plus, cette proposition masque mal, derrière son apparente préoccupation pour la situation des droits humains en Algérie, sa véritable intentionnalité qui est de dégrader volontairement les relations entre ce pays et l’UE. Le double standard est flagrant : 15 mois de guerre génocidaire à Gaza n’auront pas suffi à convaincre les auteurs de cette proposition de résolution que le non-respect quotidien et manifeste du droit international par Israël dans les territoires qu’il occupe et assiège mériterait de remettre en cause l’accord entre l’UE et ce pays.

Par cet alinéa, les auteurs de la proposition montrent bien que le conditionnement de la coopération UE-Algérie à la libération de Boualem Sansal est motivée par leur volonté de confrontation avec le pouvoir algérien bien plus que par un attachement sincère au respect des libertés fondamentales, en Algérie et ailleurs. 

C’est pourquoi les députés LFI-NFP veulent lever l’ambiguïté planant sur cet alinéa en le supprimant.

 

Cet amendement n’a pas été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No 5

 

présenté par

Manon BOUQUIN,
Philippe BALLARD, Guillaume BIGOT, Nicolas DRAGON, Sylvie JOSSERAND, Hélène LAPORTE, Alexandre LOUBET, Matthieu MARCHIO, Patrice MARTIN, Yaël MENACHE, Alexandre SABATOU

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 32, insérer l’alinéa suivant :

« Appelle le gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne et le Conseil européen à faire respecter le droit international et ainsi la souveraineté des États européens dans leurs décisions de justice par le gouvernement algérien. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

La coopération migratoire entre la France et l'Algérie est marquée par des dysfonctionnements graves, notamment le refus récurrent de l’Algérie de délivrer les laissez-passer consulaires nécessaires au retour de certains de ses ressortissants ou de respecter des décisions d’expulsion immédiate pourtant exécutoires.

Un cas récent illustre ce blocage : Doualemn, influenceur algérien de 59 ans, interpellé à Montpellier pour avoir diffusé une vidéo incitant à la violence. Malgré une décision d’expulsion, l'Algérie a refusé de le recevoir et l’a renvoyé en France dès le soir même.

Ce refus manifeste de coopération porte atteinte à la souveraineté française et entrave l’application de décisions de justice nécessaires à la sécurité publique. Cette situation menace également l’autorité judiciaire des États membres de l'Union européenne, confrontés à des risques similaires.

Cet amendement vise donc à inciter le gouvernement français et les institutions européennes à exiger de l’Algérie le respect de ses obligations en matière de retour de ses ressortissants, afin de garantir l’application du droit international et la sécurité de nos concitoyens.

 

Cet amendement n’a pas été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

5 FEVRIER 2025


libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal (n° 852),

 

AMENDEMENT

No

 

présenté par

Manon BOUQUIN
Philippe BALLARD, Guillaume BIGOT, Nicolas DRAGON, Sylvie JOSSERAND, Hélène LAPORTE, Alexandre LOUBET, Matthieu MARCHIO, Patrice MARTIN, Yaël MENACHE, Alexandre SABATOU

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 33, insérer l’alinéa suivant :

« Appelle le gouvernement de la République française à défendre auprès du conseil européen une position visant à suspendre la délivrance de visas aux ressortissants algériens vers les pays de l’Union européenne tant que Boualem Sansal n’est pas libéré de prison. »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le cas de Boualem Sansal soulève une grave question de liberté d'expression et de respect des principes fondamentaux de la démocratie. Alors que Boualem Sansal est injustement privé de liberté, il est de notre devoir de prendre des mesures fermes pour exprimer notre désaveu face à cette répression.

L'Algérie bénéficie d'une relation privilégiée avec les pays de l'Union européenne, mais cette coopération ne doit pas être unilatérale. Tant que Boualem Sansal demeure en prison pour avoir exercé son droit à la parole, il est impératif de rappeler aux autorités algériennes l’importance du respect des valeurs de démocratie, auxquelles l'Union européenne et ses membres sont censés être attachés.

Une mesure concrète et immédiate que la France et l'Union européenne peuvent prendre consiste à suspendre la délivrance de visas pour les ressortissants algériens, jusqu'à ce que Boualem Sansal soit libéré. Cette mesure aurait un impact direct sur le régime algérien en lui signalant qu’il existe des conséquences tangibles à l’oppression des voix dissidentes.

Cet amendement appelle donc le gouvernement français ainsi que la Commission européenne à stopper la délivrance de visas pour les ressortissants algériens à destination des pays de l’Union européenne tant que Boualem Sansal n’est pas libéré. Une telle décision viserait à faire pression sur l'Algérie pour qu’elle mette fin à la persécution des voix critiques.

 

Cet amendement n’a pas été adopté.

 


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   proposition de résolution eurOpéenne
adoptée par la commission

Article unique

 

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la résolution 2025/2512 du Parlement européen sur le cas de Boualem Sansal en Algérie,

Vu la résolution 2023/2661 du Parlement européen sur la liberté des médias et la liberté d’expression en Algérie, le cas du journaliste Ihsane El‑Kadi,

Vu la résolution 2021/2055 du Parlement européen sur la persécution des minorités fondées sur les convictions ou la religion,

Vu la résolution 2020/2880 du Parlement européen sur la détérioration de la situation des droits de l’homme en Algérie, en particulier le cas du journaliste Khaled Drareni,

Vu la résolution 2019/2927 du Parlement européen sur la situation des libertés en Algérie,

Vu la résolution 2018/2160 du Parlement européen sur l’après‑printemps arabe,

Vu la résolution 2015/2665 du Parlement européen sur l’incarcération de militants des droits de l’homme et des travailleurs en Algérie,

Vu la résolution C 124 E/568 du Parlement européen sur la liberté de la presse en Algérie,

Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 

Vu les orientations et valeurs de l’Union européenne concernant les défenseurs des droits de l’homme, la peine de mort, la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la liberté d’expression en ligne et hors ligne, et les défenseurs des droits de l’homme,

Vu la charte africaine des droits de l’homme et des peuples,

Vu l’article 40 de la Constitution de l’Algérie qui proscrit toute forme de violence physique ou morale ou d’atteinte à la dignité. Cet article dénonce également tout traitement cruel, inhumain ou dégradant. Aussi, l’État algérien est garant de l’inviolabilité de la personne humaine,

Vu l’article 42 de la Constitution de l’Algérie qui consacre l’inviolabilité de la liberté de conscience et de la liberté d’opinion. Les articles 48 et 50 de cette même Constitution reconnaissent la liberté d’expression, la liberté de la presse et proscrivent toute forme de censure,

Vu l’accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne du 22 avril 2002,

Vu le rapport du 9 mars 2017 de la Commission européenne sur l’état des relation Union Européenne‑Algérie dans le cadre de la potitique européennne de voisinage rénovée,

Vu les conclusions du Conseil d’association Union Européenne‑Algérie du 7 décembre 2020,

Considérant que l’Algérie est signataire de la Déclaration universelle des droits de l’homme et qu’elle s’est engagée à garantir et à promouvoir la liberté d’expression, dans le strict respect de ses obligations internationales ;

Considérant que le 16 novembre 2024, les autorités algériennes ont procédé à l’arrestation de l’écrivain franco‑algérien Boualem Sansal, connu pour ses prises de position fermes et publiques contre le régime en place, réclamant notamment la garantie de la liberté d’expression en Algérie. Il est demeuré introuvable pendant une semaine, période durant laquelle il lui a été interdit de communiquer avec sa famille et de consulter un avocat, en violation flagrante du droit international. M. Sansal a été interrogé sans la présence de son conseil juridique, portant ainsi atteinte à son droit à un procès équitable. Par la suite, il a été inculpé pour atteinte à la sûreté de l’État sur la base de l’article 87 bis du code pénal algérien, un texte souvent invoqué pour réprimer les critiques à l’égard du gouvernement, y compris celles des défenseurs des droits de l’homme ;

Considérant, au regard de son âge et la fragilité de sa santé, que les conditions dans lesquelles M. Sansal est détenu font peser un risque direct sur sa vie ;

Considérant que la liberté d’expression a régressé en Algérie. Le pays est classé à la 139ème place du classement mondial de la liberté de la presse en 2024 ;


Considérant l’adoption en Algérie en 2023 de trois lois sur les médias, dénoncées comme répressives par de nombreuses organisations non gouvernementales : la loi organique sur l’information, la loi relative à la presse écrite et électronique et la loi relative à l’activité audiovisuelle ;

Considérant, selon les chiffres des défenseurs des droits de l’homme en Algérie, que 215 personnes sont aujourd’hui détenues en Algérie comme « prisonnier d’opinion » ;

Considérant qu’entre 2021 et 2024, l’Union européenne demeure un partenaire privilégié de l’Algérie et qu’elle lui a versé 213 millions d’euros dans le cadre du programme indicatif pluriannuel ;

Considérant que les éventuelles tensions diplomatiques entre deux États souverains ne sauraient avoir des répercussions directes sur les destins et les droits des individus ;

Rappelle les liens d'amitié et de respect qui lient les peuples algériens et français ;

Condamne fortement l’arrestation et la détention de Boualem Sansal et réclame sa libération immédiate et inconditionnelle ;,

Condamne la détention en Algérie des personnes considérées comme « prisonniers d’opinion », militants, journalistes, blogueurs, ou défenseurs des droits de l’homme, et réclame leur libération ;

Condamne les méthodes d’intimidation du régime algérien qui réduisent, de fait, la liberté d’expression et la liberté de la presse ;

Appelle le Gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne à rappeler aux autorités algériennes le respect du droit de la défense de M. Boualem Sansal, et de permettre à son avocat de le rejoindre à Alger pour le défendre ;

Appelle à la mise en place d’une mission médicale internationale afin d’évaluer l’état de santé de Boualem Sansal ;

Appelle le Gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne à rappeler aux autorités algériennes le respect des priorités du partenariat Union européenne‑Algérie, et notamment la protection de l’État de droit et de la liberté d’expression ;

Appelle le Gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne à veiller à ce que les futurs versements de fonds européens à l’Algérie s’accompagnent de progrès substantiels en matière d’État de droit et de libertés fondamentales ;

Appelle le gouvernement de la République française ainsi que la Commission européenne et le Conseil européen à suspendre toutes les avancées favorables à l’Algérie dans les discussions entre l’Union européenne et l’Algérie, dans le cadre de la renégociation de l’accord d’association Union européenne‑Algérie tant que Boualem Sansal ne sera pas libéré de prison.

 

 


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   annexe n° 1 :
Liste des personnes auditionnées par lA rapporteurE

 

 


[1] Motion of the PfE Group for a resolution on the case of Boualem Sansal in Algeria, 21.01.2025, url

[2] Motion of the PfE Group for a resolution on the case of Boualem Sansal in Algeria, 21.01.2025, url