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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 mars 2025.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l’article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières,
(Procédure accélérée)
PAR M. Xavier LACOMBE,
Député
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Voir les numéros :
Assemblée nationale : 942.
SOMMAIRE
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Pages
1. La convention de Londres de 1972
2. Le protocole de Londres de 1996
1. La résolution LP.1(1) de 2006 autorise le stockage off-shore du dioxyde de carbone
A. La maîtrise du CSC constitue un quadruple défi technique, environnemental, économique et social
2. Les préoccupations environnementales
B. Les perspectives de développement des projets de csc : une opportunité à saisir
1. Des capacités de stockage opérationnelles à l’étranger
2. Accélérer la mise en place d’une filière française de CSC
Annexe 1 : Texte de la commission des affaires étrangères
Annexe 2 : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur
Adoptée le 30 octobre 2009, la résolution LP.3(4) autorise l’exportation de dioxyde de carbone à des fins de séquestration géologique sous-marine. Ouverte depuis l’entrée en vigueur en 2006 de la résolution LP.1(1), cette possibilité de stockage off-shore du CO2 s’inscrit dans le cadre des engagements climatiques auxquels ont souscrit les États parties à l’accord de Paris conclu en décembre 2015 ([1]) dans le but de réduire leurs émissions atmosphériques de CO2. La France a ainsi mis en place une « stratégie nationale bas carbone » (SNBC) visant à réduire de 35 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 et atteindre la neutralité carbone en 2050, conformément à l’objectif fixé par l’Union européenne ([2]).
Les technologies de captage et de séquestration du carbone (CSC) constituent un levier essentiel afin de poursuivre ces ambitions. Si d’autres solutions existent pour réduire drastiquement les émissions atmosphériques de CO2, le développement du CSC au cours des prochaines années soulève d’importants défis techniques, environnementaux et socio-économiques qu’il convient de relever, tant à l’échelle nationale qu’européenne.
I. La Convention et le Protocole de Londres : un cadre juridique international visant à garantir la protection du milieu marin
La convention de 1972 et le protocole de 1996 forment le cadre juridique international applicable à la prévention de la pollution marine et océanique. Celui‑ci a été progressivement complété par des résolutions visant à autoriser la séquestration off-shore puis l’exportation à cette fin de dioxyde de carbone.
A. La Convention de 1972 et le Protocole de 1996 ont pour but de prévenir la pollution des mers et des océans
Si la Convention de 1972 prévoit un contrôle des facteurs de pollution en fixant notamment une liste de déchets dont l’enfouissement est interdit, le protocole de 1996 inverse cette logique en interdisant, par principe, l’immersion de déchets, sous réserve d’exceptions limitativement énumérées.
1. La convention de Londres de 1972
Conclue à Londres le 29 décembre 1972, la convention sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets vise à garantir la protection des milieux marins et océaniques quant aux risques qu’engendrent les activités humaines. Impulsée lors de la Conférence des Nations unies organisée à Stockholm en juin 1972, son adoption s’inscrit dans un contexte de prise de conscience croissante des enjeux environnementaux à la suite de plusieurs accidents majeurs de pollution marine ([3]).
La convention de Londres prévoit la mise en place d’un contrôle destiné à prévenir la pollution des mers et des océans en interdisant spécifiquement l’immersion ([4]) de déchets et autres matières ([5]) considérées comme dangereuses et dont la liste lui est annexée. Les déchets et matières ne figurant pas dans la liste précitée peuvent faire l’objet d’une immersion sous réserve de l’obtention d’un permis délivré par les autorités compétentes.
Entrée en vigueur le 30 août 1975, cette convention a été ratifiée par 87 États à ce jour. Sous l’égide de l’Organisation maritime internationale (OMI), les États parties se réunissent régulièrement afin d’assurer le suivi de ses stipulations. Parmi les principales avancées réalisées en matière de protection des mers et des océans, elle interdit, par exemple, l’immersion des déchets faiblement radioactifs ou l’incinération des déchets industriels. La convention établit également un cadre de coopération inter-étatique en imposant aux États parties de prendre toute mesure efficace afin de prévenir la pollution marine ([6]) et en encourageant la conclusion d’accords régionaux complémentaires ([7]).
2. Le protocole de Londres de 1996
Signé le 7 novembre 1996, le protocole de Londres prévoit un principe général d’interdiction d’immersion de déchets et de matières dans les milieux marins et océaniques, à l’exception des déchets et matières limitativement énumérés à son annexe 1 ([8]). Ratifié par 55 États à ce jour ([9]), ce protocole est entré en vigueur le 24 mars 2006. Destiné à moderniser et, à terme ([10]), se substituer à la convention de 1972, il s’inscrit dans le sillage de « l’Agenda 21 » relatif au plan d’action adopté lors du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992 dans le but de promouvoir un développement durable à l’échelle mondiale.
Dans sa rédaction initiale, la liste figurant à son annexe 1 ne mentionne pas le dioxyde de carbone parmi les déchets dont l’immersion est autorisée. En outre, l’article 6 du protocole interdit expressément l’exportation de déchets ou autres matières vers d’autres pays aux fins d’immersion ou d’incinération en mer.
La mise en place de marchés de quotas d’émission de carbone ([11]), conjuguée à la conclusion d’engagements multilatéraux visant à réduire ces émissions, a favorisé le développement de recherches sur les moyens de réaliser le captage et la séquestration du carbone (CSC) dans des zones de stockage terrestres ou maritimes. Ces évolutions règlementaires et technologiques rendent ainsi nécessaire la modification des stipulations du protocole de Londres et de son annexe 1 afin de permettre l’exportation et la séquestration off-shore du dioxyde de carbone.
B. La résolution LP.3(4) représente une évolution nécessaire pour faciliter la séquestration géologique sous-marine du dioxyde de carbone
La résolution LP.3(4) dont le projet de loi autorise la ratification s’inscrit dans le prolongement de la résolution LP.1(1) adoptée dès 2006.
1. La résolution LP.1(1) de 2006 autorise le stockage off-shore du dioxyde de carbone
Adoptée le 2 novembre 2006, la résolution LP.1(1) ajoute le dioxyde de carbone à la liste des déchets et matières dont l’immersion est autorisée. Cette modification de l’annexe 1 du protocole de Londres ([12]) autorise les États parties à procéder au stockage off-shore du dioxyde de carbone préalablement capté.
S’agissant des États membres de l’Union européenne (UE), la séquestration géologique du CO2 est régie par la directive du 23 avril 2009 ([13]) dont les dispositions ont été transposées en droit interne aux articles L. 229-27 à L. 229-57 du code de l’environnement ([14]). Le cadre juridique européen détermine ainsi les règles applicables au respect des exigences environnementales et financières ([15]) propres à sécuriser le captage, l’acheminement et la séquestration du dioxyde de carbone.
2. La résolution LP.3(4) de 2009 permet le transfert transfrontalier de dioxyde de carbone afin de procéder à son stockage off-shore
La résolution LP.3(4) adoptée le 30 octobre 2009 modifie l’article 6 du protocole de Londres afin d’autoriser l’exportation – ou l’importation – de dioxyde de carbone dans la perspective de sa séquestration géologique sous-marine. Cette résolution n’a été ratifiée que par 12 États parties à ce jour ([16]) et n’est donc pas encore entrée en vigueur ([17]). Cependant, la résolution LP.5(14) a été adoptée le 11 octobre 2019 pour permettre l’application provisoire de la résolution LP.3(4) par les États parties dont la France désireux de recourir dès que possible au transfert transfrontalier de dioxyde de carbone.
Le rapporteur s’est interrogé sur le délai de quinze ans séparant l’adoption de la résolution LP.3(4) du dépôt du projet de loi de ratification. Lors de leur audition, les représentants du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) ont indiqué que la longueur de ce délai s’expliquait essentiellement par le développement très récent des projets d’exportation de dioxyde de carbone à des fins de stockage off-shore, cette technologie n’ayant véritablement émergé qu’à la fin des années 2010. En outre, la volonté de ratifier la résolution LP.3(4) s’explique également par la hausse progressive du coût des quotas d’émission de carbone au cours des dernières années, ce qui tend à renforcer la rentabilité du CSC et, ainsi, à rendre cette technologie plus attractive pour les entreprises industrielles dont l’activité reste, à ce jour, insusceptible de faire l’objet d’une décarbonation totale ou même partielle.
Conformément aux prescriptions prévues par la résolution LP.3(4), l’exportation ou l’importation de dioxyde de carbone demeure subordonnée à la conclusion d’un accord préalable entre l’État exportateur et l’État importateur. Cet accord définit la répartition des responsabilités relatives à l’octroi des permis et autorisations nécessaires, conformément aux règles fixées par le protocole et par la directive européenne du 23 avril 2009 ([18]).
La France a récemment conclu deux accords bilatéraux avec la Norvège, d’une part, en janvier 2024 ([19]) et avec le Danemark, d’autre part, en mars 2024. Si l’accord avec la Norvège concerne essentiellement la mise en œuvre d’une coopération commerciale visant à faciliter la mise en relation des entreprises spécialisées dans le CSC, l’accord franco-danois prévoit explicitement le transport transfrontalier de CO2 à des fins de stockage géologique permanent.
Ces perspectives constituent une opportunité que la France doit saisir au cours des prochaines années afin de développer une filière nationale du CSC, qu’il s’agisse du captage, de l’acheminement ou du stockage terrestre ou sous-marin du dioxyde de carbone. Vecteur important de la transition écologique, le CSC soulève cependant des enjeux multiformes qu’il convient de prendre en compte dans leur globalité.
II. Le captage, l’acheminement et le stockage du dioxyde de carbone : une technologie essentielle afin de respecter nos engagements climatiques
Solution d’avenir pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, le CSC est confronté à des défis d’ordres technique, environnemental et socio-économique que la France et ses partenaires européens doivent relever dès aujourd’hui.
Le développement du CSC implique de prendre en compte une pluralité de contraintes techniques, de préoccupations environnementales, d’enjeux économiques et d’acceptabilité sociale.
Qualifié par le gouvernement en décembre 2018 de « technologies non matures à ce stade » ([20]), les procédés de CSC font désormais l’objet d’une maîtrise avérée mais demeurent confrontés à des contraintes techniques qui concernent principalement les phases de transport et de stockage terrestre ou sous-marin du dioxyde de carbone.
Le captage du CO2 sur un site industriel, qui vise à extraire le dioxyde de carbone issu du processus industriel et à le concentrer, ne soulève pas de difficulté particulière. Plusieurs technologies de captage peuvent être mises en œuvre ([21]). Leur utilisation dépend de la nature et de la concentration en CO2 de la source d’émission.
Le transport du CO2 capté vers des lieux de stockage, situés en mer ou sur terre, implique le déploiement d’infrastructures de transport et de conditionnement similaires à celles utilisées pour le transport de gaz ou du pétrole. Le dioxyde de carbone doit être comprimé et liquéfié pour faciliter son transport qui peut ensuite s’effectuer, s’agissant de la séquestration sous-marine, par canalisations terrestres jusqu’aux terminaux d’exportation portuaires, puis par navires spécialisés jusqu’aux sites de stockage. Ces navires doivent être équipés pour maintenir le CO2 à l’état liquide dans des conditions de pression et de température strictement contrôlées. Selon la distance à parcourir entre le lieu de captage et la zone de stockage, cet acheminement présente une certaine complexité au regard des exigences d’étanchéité des contenants utilisés, qu’il s’agisse des cuves dont disposent les bateaux ou de la résistance des canalisations à la pression sous-marine.
Le stockage géologique de CO2 peut être réalisé dans des champs d’hydrocarbures déplétés – c’est-à-dire des zones dans lesquelles des hydrocarbures ont déjà été extraits – ou dans des aquifères salins qui correspondent à des couches géologiques profondes et poreuses situées à une profondeur minimale de 800 mètres. Lors de leur audition, les représentantes de l’Agence de la transition écologique (ADEME) ont souligné le caractère avantageux des champs déplétés en ce qu’ils permettent une reconversion des infrastructures ayant été préalablement mises en place afin d’exploiter les hydrocarbures.
Dans sa réponse ministérielle publiée le 13 février 2025, le gouvernement rappelle que « le stockage consiste à avoir une structure géologique réservoir fermée d’un certain volume, recouverte par une couche imperméable au passage du CO2 et qui permet de piéger de façon sûre et permanente le CO2 » ([22]). Cette imperméabilité doit donc être démontrée afin de garantir le succès de la séquestration du dioxyde de carbone, ce qui suppose également de conduire des analyses sismiques afin de vérifier qu’il n’existe pas de faille majeure sur les zones concernées.
Après une procédure d’instruction, l’octroi d’un permis d’exploration et de recherche aux entreprises intéressées permet la réalisation d’« essais pilotes » afin d’évaluer la validité des hypothèses envisagées. La séquestration off-shore du CO2 implique au préalable de réaliser le forage d’un puits et de tests d’injection de dioxyde de carbone, dans le but de démontrer la capacité de stockage de la zone ciblée.
Si elles n’apparaissent pas insurmontables, l’ensemble des contraintes techniques afférentes au transport et au stockage du dioxyde de carbone se conjuguent à la nécessaire prise en compte de préoccupations environnementales quant à l’efficacité du CSC et aux risques que ces technologies peuvent engendrer.
Selon le MEAE et le MTES, le CSC représente une « composante significative » ([23]) de la stratégie globale de lutte contre le réchauffement climatique et l’atteinte de la neutralité carbone en 2050. En termes quantitatifs, la contribution du CSC au respect des engagements climatiques pris par la France n’est pas négligeable. Dans le cadre de sa stratégie nationale publiée en juillet 2024 ([24]), le gouvernement a ainsi établi des objectifs de captage de dioxyde de carbone compris entre 4 et 8 millions de tonnes de CO2 en 2030, et entre 30 et 50 millions de tonnes en 2050 ([25]). Selon les estimations des représentants de l’IFP Énergies nouvelles auditionnés par le rapporteur, il conviendrait de capter annuellement entre 5 et 6 milliards de tonnes de CO2 afin d’atteindre la neutralité carbone en Europe d’ici 2050.
Le CSC se révèle aujourd’hui indispensable à la réduction d’émissions atmosphériques issues de secteurs d’activité dont la production aboutit à des émissions considérées, en l’état des procédés industriels, comme étant « incompressibles ». C’est notamment le cas de la production de ciment et d’acier dont l’essentiel des émissions ne peuvent pas être réduites « à la source » par d’autres leviers de décarbonation tels que l’électrification, le recours à la biomasse, le recyclage ou le développement d’une « sobriété » énergétique.
Pour autant, le recours au CSC suscite également diverses préoccupations quant aux éventuelles conséquences préjudiciables de son déploiement sur l’environnement :
– d’une part, le transport du dioxyde de carbone entre son lieu de captage et sa zone de stockage induit subséquemment des émissions de CO2, de surcroît dans l’hypothèse d’exportations à longue distance. Cependant, l’étude d’impact annexée au projet de loi relativise cet inconvénient en estimant que les émissions de dioxyde de carbone engendrées par le transport maritime n’excèderaient pas 2 % du volume de CO2 transporté sur 1 000 kilomètres ([26]) ;
– d’autre part, les risques de fuite du CO2 constituent l’un des principaux dangers inhérents au CSC, s’agissant singulièrement de la séquestration off-shore. En effet, en cas de fuite, le CO2 peut provoquer une acidification locale de l’eau de mer, entraînant des conséquences potentiellement graves pour les organismes calcifiants comme les coraux, les mollusques et certains planctons. Cette acidification peut ainsi perturber la chaîne alimentaire marine et affecter la biodiversité locale. Ces fuites pourraient survenir en raison de failles géologiques non détectées, de puits « mal scellés » ou de surpression dans le réservoir ([27]).
Les auditions conduites par le rapporteur ont néanmoins fait état de risques considérés comme faibles, tant au regard de la maîtrise des mesures de prévention que de la toxicité limitée des émissions de CO2.
L’attractivité du CSC dépend en grande partie du coût global que représente la mise en œuvre de ces technologies, en comparaison avec le prix des quotas d’émission de la tonne de CO2 sur le marché du carbone. Ainsi, plus le prix des quotas est élevé, plus le recours au CSC sera envisagé par les acteurs industriels qui y sont assujettis, sous réserve que le coût du CSC s’établisse à un niveau compétitif.
Le système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre au sein de l’UE (SEQE-UE)
Le système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre (SEQE-UE, également appelé « marché du carbone ») repose sur le plafonnement et l’échange de permis d’émissions de gaz à effet de serre, appelés « quotas carbone », chaque quota correspondant à l’émission d’une tonne de CO2.
Il vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre en introduisant une incitation économique pour les acteurs assujettis, soit l’industrie et les énergéticiens européens, ainsi que les compagnies aériennes et les compagnies maritimes. Les acteurs qui disposent de potentiels de réduction d’émissions à un coût inférieur au prix du quota sont incités à réduire leurs émissions pour bénéficier de la vente des quotas, et les autres devront se procurer des quotas pour obtenir le droit d’émettre.
Le marché du carbone a connu plusieurs évolutions depuis son entrée en vigueur en 2005, la dernière résultant de l’entrée en vigueur des directives 2023/958 et 2023/959 publiées en mai 2023 dans le cadre du paquet « Fit for 55 » dont l’objectif consiste à réduire les émissions de dioxyde de carbone d’au moins 55 % d’ici 2030.
Le prix du quota atteint en mars 2025 environ 70 euros par tonne de CO2. Le prix futur du marché est soumis à de nombreuses incertitudes mais la plupart des analystes prévoient un prix situé autour de 100 à 110 euros d’ici à la fin de l’année 2025 et entre 120 et 150 euros à l’horizon 2030. Cette tendance à la hausse est essentielle pour garantir l’efficacité du système en tant qu’incitation à la décarbonation.
La hausse du prix du carbone a contribué à diminuer les émissions des secteurs du marché du carbone au niveau européen de façon significative, soit une baisse de 47 % d’émissions de CO2 entre 2005 et 2023.
La hausse du prix du carbone a également entraîné la hausse des recettes d’enchères pour l’Union européenne et les États-membres, avec 38,8 milliards d’euros collectés en 2022 et 43,5 milliards d’euros collectés en 2023, dont la majorité ont ensuite été réaffectés vers la transition écologique. La majeure partie de ces revenus alimente les budgets des États-membres (environ 75 %) et le reste finance des fonds européens pour la décarbonation (fonds innovation et fonds de modernisation).
Source : réponses écrites du MEAE et du MTES au questionnaire du rapporteur.
Face à la relative volatilité du prix de la tonne de CO2, l’estimation du coût global du captage et de la séquestration géologique d’une tonne de CO2 fluctue du simple au double, soit un montant compris entre 100 et 200 euros la tonne, selon les différentes modalités de captage, d’acheminement et de stockage. La maîtrise croissante des procédés de CSC, le développement de coopérations industrielles inter-étatiques et le versement de subventions publiques ont cependant vocation à rendre ces technologies compétitives. Au regard de la hausse prévisionnelle du prix des quotas d’émission, leur rentabilité s’avère crédible à court ou moyen terme.
En outre, la valorisation du dioxyde de carbone capté ouvre des perspectives économiques majeures. Sa réutilisation dans la chaîne de valeur fait l’objet de recherches relatives à la production de carburants d’aviation durable et d’électrocarburants, bien que son incorporation présente une certaine complexité technique ([28]). Ces évolutions suscitent un fort intérêt eu égard aux règles fixées par l’UE ([29]) visant à imposer l’incorporation progressive du carburant durable d’aviation dans le kérosène utilisé par les compagnies aériennes européennes, suivant un objectif fixé à hauteur de 2 % en 2025, 6 % en 2030, 25 % en 2035, 34 % en 2040 et 42 % en 2045.
Au-delà des seuls enjeux techniques, environnementaux et économiques, le déploiement du CSC soulève des interrogations quant à son acceptabilité sociale, s’agissant en premier lieu des séquestrations terrestres de CO2 envisagées dans des zones habitées ou situées à proximité d’importants foyers de population.
Dans une question écrite publiée le 3 octobre 2024, le sénateur Aymeric Durox évoque ainsi le projet de stockage on-shore de 300 000 à 400 000 tonnes de dioxyde de carbone dans le sous-sol de la commune de Grandpuits-Bailly-Carrois et ses environs, à l’horizon 2026, soulignant l’existence de « nombreuses inquiétudes formulées par les habitants mais aussi les élus locaux qui n’ont pas accès aux informations pourtant rendues nécessaires au regard de l’ampleur du projet ». La réponse ministérielle mentionne la mise en place d’une prochaine consultation du public destinée à garantir l’accès des habitants aux informations souhaitées ([30]).
Le rapport publié en septembre 2024 par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) sur le captage et la chaîne de valeur du dioxyde de carbone rappelle à juste titre la sensibilité de cette problématique : « L’une des conditions essentielles à la réalisation des projets de chaînes de [CSC] tient à la nécessité de construire leur acceptation sociale. Ce besoin qui s’exprime d’abord au niveau local, s’inscrit également dans un contexte national qui doit être plus généralement pris en compte par les autorités publiques. L’organisation d’un débat national sur la transition énergétique, incluant le [CSC], peut permettre de sensibiliser le public sur les enjeux auxquels il entend répondre dans le cadre de la décarbonation et son utilité pour la transition énergétique, en sorte de la “ déconfiner ”. Une meilleure connaissance de cette technologie contribue à ce que, dans un second temps, les projets de chaînes de [CSC] menés localement puissent être mieux acceptés par les populations. ». ([31])
Le rapporteur considère que ces enjeux d’acceptabilité sociale des projets de CSC ne doivent pas être mésestimés au regard de l’impératif de transparence qui régit les décisions prises en matière environnementale, dans un souci légitime de proximité et d’accès à l’information.
B. Les perspectives de développement des projets de csc : une opportunité à saisir
Si l’identification de capacités de stockage s’accélère en Europe du Nord, les projets français de séquestration géologique du CO2 restent inaboutis à ce jour. Pour autant, la mise en place d’une filière nationale de CSC se révèle nécessaire afin d’atteindre les objectifs de neutralité carbone que la France s’est fixée et de garantir l’exercice d’une véritable souveraineté industrielle en la matière.
1. Des capacités de stockage opérationnelles à l’étranger
L’expertise historique relative à l’exploitation pétrolière et gazière offre un avantage significatif aux États désireux de développer le CSC, à l’image de la Norvège, du Royaume-Uni, du Danemark et des Pays-Bas, dont les autorités publiques et les entreprises privées disposent de connaissances précieuses sur les spécificités géologiques de leurs espaces maritime et terrestre. Les études menées dans les zones abritant des gisements pétroliers et gaziers en mer du Nord ont ainsi démontré l’existence de capacités de stockage importantes et étanches.
Les investissements considérables réalisés par la Norvège ([32]) et le Royaume‑Uni ([33]) ont donné lieu au déploiement d’infrastructures de CSC prochainement opérationnelles, à l’instar du projet « Northern Lights » en mer du Nord ([34]). Ces avancées récentes dans les États d’Europe du Nord constituent des débouchés à l’exportation de CO2 susceptible d’être capté et acheminé depuis la France à partir de 2028, au regard des larges capacités théoriques de stockage off‑shore dont bénéficient ces pays ([35]).
Cependant, le développement d’une filière française de CSC apparaît désormais incontournable, tant au regard de nos engagement, climatiques que de notre souveraineté industrielle.
2. Accélérer la mise en place d’une filière française de CSC
À ce jour, la France n’a pas identifié de capacités souveraines de stockage on-shore ou off-shore exploitables à court terme, bien que plusieurs projets de captage et d’acheminement soient envisagés. L’étude « EVASTOCO 2 » coréalisée par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et publiée en février 2025 a recensé les potentialités de stockage métropolitain terrestre et sous‑marin : jusqu’à 1,1 milliard de tonnes de CO2 pourraient ainsi être séquestrées ([36]) sous réserve de s’assurer de l’étanchéité des capacités de stockage.
Si aucun projet ne semble opérationnel avant l’horizon 2028-2030, une demi-douzaine de projets de CSC sont aujourd’hui étudiés, principalement aux fins d’exportation, sous la forme de « hubs CO2 » situés dans des zones industrialo‑portuaires.
Les principaux projets français de CSC à l’horizon 2028-2030
Projet d’Artagnan : projet dunkerquois afin de créer un réseau de canalisations pour acheminer 1,5 million de tonnes de CO2 par an à destination du futur terminal d’export CO2 avant leur exportation aux fins de séquestration off-shore en mer du Nord. Le projet d’Artagnan a été sélectionné en 2024 par le fonds européen « Connecting Europe Facilities – Energy » et recevra une subvention de 161 millions d’euros, dans la perspective d’un démarrage en 2028.
Projet EU2NSEA : projet de canalisation off-shore au départ de Dunkerque vers la Belgique, qui se raccorderait à une canalisation off-shore de plus de 1 000 km au départ de Zeebrugge vers un cluster de sites de stockage en mer du Nord. Le calendrier annoncé permettrait à des émetteurs dunkerquois participant au projet d’exporter annuellement 5 millions de tonnes de CO2 dès 2030.
Projet ECO2NORMANDY : projet d’infrastructures partagées pour le transport vers la zone portuaire du Havre de tonnes de CO2 émises par différents émetteurs du bassin de la Seine normande, avant leur liquéfaction et leur stockage temporaire préalablement à leur exportation par voie maritime. D’ici 2030, le hub normand espère atteindre une capacité de 1,2 million de tonnes de CO2 par an, puis le double en 2033.
Projet Callisto : projet d’exportation depuis Fos-sur-Mer de CO2 capté sur des sites cimentiers et pétrochimiques de la vallée du Rhône vers des stockages off-shore en mer Adriatique, à hauteur de 1,6 million de tonnes de CO2 par an dès 2028-2030 et de 4 millions de tonnes par an à partir de 2035.
Projet GOCO2 : projet d’exportation depuis Saint-Nazaire de CO2 capté sur des sites cimentiers et de production de chaux vers des stockages off-shore néerlandais, à hauteur de 2,3 millions de tonnes de CO2 par an dès 2030.
Projet Pycasso : projet de stockage terrestre dans le Piémont pyrénéen à hauteur de 1,5 million de tonnes de CO2 capté par an dès 2030.
Source : réponses écrites du MEAE et du MTES au questionnaire du rapporteur.
Outre les projets précités, un appel d’offres a été lancé le 31 décembre 2024. Le dépôt des candidatures est attendue d’ici le 15 mai 2025. Cet appel d’offre permettra de participer au financement de grands projets de décarbonation dont les besoins en soutien public sont supérieurs à 20 millions d’euros, incluant les projets CSC. Ce soutien consistera dans le versement de subventions aux projets industriels permettant de réduire les émissions de CO2. Il visera à stimuler les investissements dans un contexte où les incitations financières liées au marché du carbone ne sont pas encore suffisantes pour permettre le financement de projets de grande envergure.
La création d’une filière française de CSC nécessite l’implication de tous les acteurs publics et privés, à l’échelle française et européenne, au regard de l’émergence de concurrents industriels asiatiques spécialisés dans la construction de navires destinés à assurer l’acheminement de CO2 vers des sites de stockage off‑shore. Cette ambition de développement industriel doit pleinement s’inscrire dans les conclusions du rapport remis par Yannick Chenevard en juillet 2023 sur la réévaluation du dispositif de flotte stratégique ([37]).
Dans son rapport sur le captage et la chaîne de valeur du dioxyde de carbone, la CRE souligne ainsi l’importance cruciale de créer les conditions d’un écosystème robuste compte tenu des perspectives économiques qu’offre le développement du CSC : « Solution a priori de seul ou de dernier recours face aux autres moyens technologiques permettant de réduire ou d’éliminer les émissions de gaz à effet de serre, le [CSC] constitue cependant une opportunité de décarbonation importante, voire déterminante, pour le maintien de la compétitivité industrielle et plus largement pour la réussite de la transition énergétique. Il est ainsi primordial d’en accélérer la progression pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, ce qui passe par un renforcement des moyens mis en œuvre à cette fin. Le [CSC] trouve donc toute sa place dans la transition écologique.
« L’enjeu du déploiement des chaînes de valeur du [CSC] n’est pas seulement sa contribution à la décarbonation de l’économie, mais tout autant son concours à la réindustrialisation profonde de la France et à la consolidation de sa souveraineté. Enfin, le [CSC] se situe à la croisée de coûts décroissants des technologies qui la composent à mesure qu’elles se déploient, et d’une courbe de prix du CO2 qui, structurellement, est croissante. » ([38]).
Au regard des impératifs actuels de souveraineté et de transition écologique, le rapporteur partage cette analyse et considère que ce projet de loi, dont la portée peut apparaître modeste, constitue une première étape indispensable à la réalisation de nos ambitions économiques et environnementales.
Le mercredi 26 mars 2025, à 10 heures 30, la commission examine le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l’article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières (n° 942).
M. Alain David, président. L’adoption, en 1972, de la convention de Londres sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets a marqué une étape importante dans la protection des océans. Ce texte interdit en effet l’immersion de certaines matières dangereuses et subordonne celle des autres matières à la délivrance préalable d’un permis.
L’amendement à l’article 6 du protocole de Londres de 1996, qui date déjà de 2009 et qu’il nous est proposé de ratifier, est important à plusieurs titres : d’abord parce qu’il traite de la protection de 70 % de la surface du globe ; ensuite parce qu’il fait partie des outils disponibles pour atteindre nos objectifs en matière de décarbonation ; enfin car il pose de véritables questions sur l’enfouissement de notre CO2 résiduel, la France ne disposant pas à ce jour de zones de stockage opérationnelles.
Le protocole de 1996 a inversé la logique suivie par la convention de 1972 en stipulant que n’est autorisée que l’immersion de déchets et matières énumérés dans une annexe. Celle-ci a été complétée en 2006 par l’ajout des flux provenant des processus de captage du CO2. L’amendement dont il nous est demandé d’autoriser la ratification a pour objet de permettre l’exportation de CO2 vers des États riverains afin de procéder à son stockage offshore.
Le Sénat a adopté le projet de loi le 12 février. Son adoption définitive par notre Assemblée permettrait au ministre chargé de l’industrie de signer un partenariat avec la Norvège sur le captage et le stockage du carbone lors d’un prochain déplacement, prévu fin avril.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Notre commission est appelée à examiner le projet de loi autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) qui amende l’article 6 du protocole de Londres de 1996. Ce texte a déjà été adopté par nos collègues du Sénat le 12 février.
Conclu à la suite de la convention de Londres, signée en 1972, et ratifié à ce jour par cinquante-cinq États, le protocole de 1996 a pour objet de réglementer l’enfouissement des déchets dans les zones sous-marines, en posant un principe général d’interdiction du stockage offshore à l’exception de matières limitativement énumérées à l’annexe 1 au protocole.
Une première résolution, adoptée en 2006, a inséré le dioxyde de carbone parmi les matières susceptibles d’être stockées sous la mer, ce que permettent les technologies dites de captage et de séquestration de carbone (CSC). La résolution dont le projet de loi autorise la ratification a été adoptée en 2009. Elle vise à autoriser l’exportation de CO2 à des fins de séquestration géologique sous-marine. La portée de cette résolution peut paraître modeste en ce qu’elle vient simplement faciliter la mise en œuvre de la résolution de 2006. Néanmoins, au-delà de son caractère complémentaire, elle revêt une importance non négligeable et présente une pluralité d’enjeux non seulement environnementaux mais aussi techniques, industriels, économiques et sociaux.
Je me suis d’abord interrogé sur le délai de quinze ans qui sépare l’adoption de la résolution de 2009 et le dépôt de ce projet de loi en juillet dernier. Les représentants du ministère de l’Europe et des affaires étrangères et ceux du ministère de la transition écologique et solidaire, que j’ai auditionnés la semaine dernière, m’ont indiqué que ce délai s’expliquait par deux raisons.
Premièrement, les technologies de CSC, s’agissant notamment du stockage offshore du CO2, ne se sont développées que très récemment, la maîtrise de ces procédés n’ayant véritablement émergé qu’à la fin des années 2010. Deuxièmement, et c’est une dimension économique essentielle, la hausse progressive du coût des quotas d’émission de carbone au cours des dernières années a pour effet d’améliorer la rentabilité du CSC et donc son attractivité. Certaines entreprises qui ne sont pas en mesure de décarboner totalement leur activité à l’heure actuelle peuvent ainsi avoir intérêt à recourir au CSC plutôt que de payer des droits à émission sur le marché du carbone. La ratification en bonne et due forme de la résolution adoptée en 2009 se justifie donc par la volonté croissante des États parties d’en exploiter toutes les potentialités.
Ces observations m’ont naturellement conduit à analyser l’opportunité de développer le captage, le transport et la séquestration géologique du dioxyde de carbone. Comme je l’ai indiqué, cette question doit être abordée dans toutes ses dimensions, qui me paraissent relever de quatre catégories distinctes : les contraintes techniques, les préoccupations environnementales, les enjeux économiques et l’acceptabilité sociale, en particulier pour les élus locaux.
Les contraintes techniques concernent principalement les phases de transport et de stockage du CO2. L’acheminement de celui-ci, après qu’il a été capturé puis comprimé et liquéfié, nécessite le déploiement d’infrastructures de transport par canalisation ou par bateau, qui peut présenter une certaine complexité compte tenu des distances à parcourir et des exigences d’étanchéité. Ensuite, le stockage onshore ou offshore du CO2 s’effectue soit dans des champs d’hydrocarbures préexistants soit dans des couches géologiques profondes. Le stockage implique de s’assurer de l’imperméabilité des réservoirs et de l’absence de risques sismiques dans les zones concernées.
Les technologies de CSC soulèvent également des préoccupations d’ordre environnemental. Pour résumer, il s’agit d’évaluer dans quelle mesure le CSC est un moyen véritablement utile pour respecter nos engagements climatiques en matière de réduction des émissions atmosphériques de CO2 et atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Il s’agit aussi de mesurer les risques et conséquences éventuellement préjudiciables que fait peser le CSC sur l’environnement. Les auditions que j’ai conduites auprès des professionnels du secteur, acteurs publics comme privés, ont souligné la nécessité, sinon le caractère indispensable du CSC dans la poursuite de nos ambitions climatiques, telles qu’elles découlent de l’accord de Paris de 2015 et de la réglementation européenne.
Certes, le CSC ne constitue pas une solution unique au vu des autres leviers de décarbonation qui existent, comme l’électrification, le recyclage et les mesures de sobriété énergétique. Cependant, le CSC s’avère particulièrement utile pour réduire les émissions atmosphériques de CO2 de secteurs industriels dont l’usage du carbone demeure incontournable, tels que ceux de la production de ciment et d’acier.
Par ailleurs, j’ai pu constater que les inconvénients afférents à ces technologies – des risques de fuites susceptibles d’endommager les écosystèmes terrestres ou aquatiques – étaient aujourd’hui maîtrisés, notamment grâce aux mesures de prévention et de contrôle qui accompagnent le déploiement de ces procédés.
Pour compléter le tour d’horizon des défis auxquels le CSC est confronté, j’évoquerai les enjeux économiques et l’acceptabilité sociale.
D’une part, je l’ai déjà mentionné, le CSC présente un intérêt économique pour le secteur industriel. Son coût est actuellement estimé entre 100 et 200 euros la tonne de CO2, alors que le prix du quota d’émission d’une tonne de CO2 s’établit aujourd’hui autour de 75 euros. Cependant, le prix du quota augmente progressivement et devrait être compris entre 120 et 150 euros d’ici à 2030, ce qui fait que le CSC deviendra attractif et rentable à brève échéance. En outre, le dioxyde de carbone capté pourrait faire l’objet d’une valorisation très intéressante s’il était réincorporé dans le cadre de la production de carburants d’aviation durables que les compagnies aériennes européennes sont tenues d’acheter selon le droit de l’Union européenne.
D’autre part, nous devons rester vigilants quant à l’acceptabilité sociale de ces technologies pour les populations environnantes. Si les enjeux sont par nature moins sensibles dans les zones sous-marines, il convient d’informer et de consulter l’ensemble des populations concernées par les projets de CSC, en faisant preuve de pédagogie et de concertation, notamment à l’égard des élus locaux, dans un souci légitime de transparence de l’information et de démocratie de proximité.
Sur la base de ce constat, je considère que le projet de loi ouvre des perspectives et constitue une opportunité que la France doit saisir.
En premier lieu, l’exportation de CO2 dans un but de séquestration sous-marine est d’autant plus crédible que d’importantes capacités de stockage existent déjà ou sont en passe d’être pleinement opérationnelles dans plusieurs pays d’Europe du Nord. Je pense notamment au Danemark et à la Norvège, avec lesquels la France a conclu des accords de coopération au début de l’année 2024.
En second lieu, au-delà des projets d’exportation de CO2 capté et acheminé depuis la France, l’enjeu est de construire une véritable souveraineté industrielle française en matière de CSC, ce qui implique d’identifier des zones de séquestration terrestres et maritimes de CO2 sur notre territoire. Une étude menée en février 2025 a recensé des potentialités de stockage représentant 1,1 milliard de tonnes de CO2, soit presque le triple du volume des émissions actuelles en France.
La mobilisation de toute la chaîne de valeur est une condition de la réussite du CSC et du développement d’une filière française capable de nouer des coopérations avec nos partenaires européens tout en garantissant notre autonomie stratégique en la matière. Je forme le vœu que ce projet de loi de ratification pose en quelque sorte la première pierre de cet édifice et vous invite donc à voter en sa faveur.
M. Alain David, président. Nous en venons aux orateurs des groupes.
M. Pierre Pribetich (SOC). Ce projet de loi relatif à l’amendement à l’article 6 du protocole de Londres de 1996 est important. Il pose en effet de nombreuses questions. Vous avez dit à juste titre que le recours aux technologies de captage et de séquestration du carbone était intégré en France dans la plupart des scénarios concernant la neutralité carbone. Il s’agit d’éviter que les émissions de CO2 soient rejetées dans l’air, en les captant directement à la source. Vous avez rappelé les secteurs industriels concernés. Je souligne toutefois l’aberration démocratique que représente un tel amendement, adopté en 2009 et provisoirement appliqué en 2019 mais qui sera peut-être ratifié en 2025. Nous ne pensons pas que ce soit une manière saine de permettre à la représentation nationale de s’exprimer.
La France n’a pas mis en œuvre de stratégie de stockage offshore et n’a rien fait pour accélérer le processus de réflexion en la matière. Certes, de premières orientations ont été fixées en juin 2023 mais elles consistaient simplement en un état des lieux et des perspectives. Nous demandons que la France se saisisse réellement de la question. L’exportation du CO2 vers des États voisins pose un problème parce que la mer ne doit pas être considérée comme un exutoire pour les déchets résultant des activités humaines.
L’élimination du carbone rejeté dans l’atmosphère est une nécessité mais elle ne peut constituer qu’un complément aux efforts de réduction des émissions : on ne peut pas considérer qu’il s’agit d’une solution alternative. Le recours au CSC doit être uniquement réservé à des usages industriels en vue de réduire des émissions résiduelles qui ne peuvent être supprimées à la source. Le CSC ne doit pas être utilisé par les industriels pour contourner la réduction des émissions qui est souhaitée.
Pour toutes ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés s’abstiendra.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Merci pour vos recommandations. La France a effectivement mis beaucoup de temps à avancer dans ce dossier et j’ai expliqué les raisons de ce retard. Par ailleurs, il ne faudrait pas que les efforts de réduction des émissions diminuent en raison des nouvelles possibilités qui s’ouvrent : le CSC viendrait en complément, nous sommes d’accord sur ce point. C’est une solution qui ne vise pas à contourner les efforts de réduction des émissions et dont nous ne pourrons pas nous passer face à la situation actuelle.
Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). Le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas. Nous ne pouvons lutter contre le réchauffement climatique avec de mauvaises solutions. C’est pourtant ce que ce texte propose : le stockage du CO2 sous les mers n’est pas une panacée mais un leurre, car ainsi on ne se confronte pas aux problèmes sous-jacents. Le texte ne remet en cause ni la production massive de déchets industriels ni les émissions à la source. Il nous demande d’accepter l’exportation de CO2 vers d’autres pays, ce qui fera peser les risques environnementaux et sanitaires sur d’autres populations – en l’occurrence, pour les projets à venir, la population italienne. La transition écologique ne consiste pas à externaliser nos responsabilités mais à actionner le vrai levier de décarbonation, qui est celui de la sobriété. Il s’agit de repenser notre modèle industriel, de réduire la production de déchets et de favoriser l’économie circulaire.
Par ailleurs, les risques liés au stockage du CO2 ne sont pas minimes. Des catastrophes sont survenues dans d’autres pays, comme en 2020 la rupture d’un carboduc aux États-Unis, qui a causé des malaises ainsi que des maladies neuronales et cardiaques chez des personnes habitant aux alentours. Qu’en sera-t-il demain dans une vallée du Rhône surpeuplée et fragilisée par les aléas climatiques, où un mégaprojet de carboduc est prévu ? Qu’en sera-t-il également en Italie, où l’enfouissement du CO2 doit avoir lieu en pleine région sismique ?
Les investissements d’aujourd’hui doivent servir à nous protéger demain en anticipant les crises et les bouleversements climatiques qui frappent nos modèles de société, de consommation et de production. Pour cela, il faut recycler les matériaux, réutiliser les déchets, électrifier les procédés et contribuer en tout temps à l’efficacité énergétique. Il faut cesser de repousser à plus tard le problème en stockant toujours plus de déchets nucléaires en sous-sol, en enfouissant les déchets ménagers et en stockant en mer les rejets de CO2. C’est tout un modèle qu’il faut changer.
Notre groupe votera contre ce projet de loi. En tant qu’écologistes, nous croyons à des choix courageux de réduction des déchets et à la transition écologique, et non à des solutions faciles au profit des industriels pollueurs. Ce texte nous semble extrêmement déséquilibré dans la mesure où il s’inscrit dans une logique de réparation ou en tout cas de comblement d’un manque de volonté politique en matière de réduction des déchets.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Je vous remercie pour votre intervention, qui fait un peu écho aux recommandations précédentes. Je précise dans mon rapport qu’il peut effectivement exister des risques environnementaux mais que les scientifiques et les spécialistes nous confirment qu’ils sont de mieux en mieux maîtrisés. Vous faites référence à un projet italien en zone sismique ; des précautions sont prises, je l’ai dit, notamment en ce qui concerne l’imperméabilité des milieux concernés, mais je n’entrerai pas dans les détails techniques car je n’en ai pas la compétence.
Il existe aussi des projets en France : nous ne ferons pas qu’exporter du CO2 vers d’autres pays. J’évoque dans mon rapport le projet d’Artagnan à Dunkerque et d’autres projets dans d’autres zones métropolitaines. Malgré le retard pris depuis quelques années, notre pays doit être à la pointe dans ce domaine.
Par ailleurs, ce qui nous est proposé dans ce texte ne sera pas au bénéfice des industriels pollueurs. Il s’agit d’essayer de trouver des solutions pour que l’industrie, sans laquelle nous ne pourrions pas vivre, puisse réduire ses émissions atmosphériques de CO2 et que ce qui peut être capté soit traité. Nous allons réaliser un pas en avant considérable en la matière.
Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). En réalité, à chaque fois qu’on propose des solutions alternatives au lieu de fixer une ambition de réduction des déchets, les industriels choisissent cette solution de facilité qu’est l’enfouissement et il en sera de même pour le CO2. Nous avons également eu le même type de débat au sujet des incinérateurs. Le présent texte est déséquilibré : il faudrait être plus ambitieux en matière de réduction des émissions pour faire en sorte que les industriels sortent des modèles actuels.
Mme Maud Petit (Dem). La France organise du 9 au 13 juin, en partenariat avec le Costa Rica, la troisième Conférence des Nations unies sur l’océan. Ce rendez-vous crucial vise à mieux protéger les océans en mettant en œuvre l’objectif de développement durable (ODD) n° 14 du Programme de développement durable des Nations unies à l’horizon 2030, qui tend à assurer la conservation et l’exploitation durable des écosystèmes marins et côtiers.
La convention de Londres relative à l’immersion de déchets en mer, qui remonte à 1972, a été l’un des premiers textes relatifs à la protection du milieu marin. Cette convention et le protocole qui a suivi en 1996 avaient pour ambition de fixer des règles en matière d’enfouissement des déchets dans les zones sous-marines. Ces textes précisaient les modalités de stockage et les types de déchets susceptibles d’être séquestrés dans les sous-sols. La grande différence entre la convention de 1972 et le protocole de 1996 réside dans le fait que la première établit une liste de déchets dont l’enfouissement est interdit alors que le second texte suit une démarche inverse en interdisant l’immersion de déchets par principe, sauf quelques exceptions.
Pour se conformer aux objectifs fixés par l’Union européenne, la France a adopté une stratégie nationale bas-carbone dont l’ambition est de réduire de 35 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 et d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Un double défi nous attend donc : réduire absolument notre production de gaz à effet de serre et nous appuyer sur les technologies de captage et de séquestration de CO2 à des fins de stockage.
La ratification de l’amendement à l’article 6 du protocole de Londres, lequel article stipule que les parties contractantes n’autorisent pas l’exportation des déchets ou autres matières vers d’autres pays aux fins d’immersion ou d’incinération en mer, revêt une importance assez particulière pour notre pays. Je formule l’espoir que la France puisse maîtriser un jour les technologies de stockage. Pour l’heure, elle a conclu en mars 2024 un accord avec le Danemark qui prévoit le transport du CO2 vers ce pays à des fins de stockage permanent. La ratification de l’amendement à l’article 6 du protocole de Londres autoriserait l’exportation de flux de dioxyde de carbone destiné à être séquestré dans les formations géologiques du sous-sol marin à la condition qu’un accord ou arrangement ait été conclu par les pays concernés.
L’amendement à l’article 6 du protocole de Londres n’est-il pas en contradiction avec l’ODD n° 14 ? Pouvez-vous également nous rassurer sur le fait que le transport transfrontalier de CO2, qui est complexe, vous l’avez dit, est parfaitement sécurisé et sans risque environnemental ? Enfin, comment se fait-il que la France, qui possède le deuxième domaine maritime mondial, ne dispose pas d’infrastructures offshore capables d’assurer le stockage de dioxyde de carbone ?
Le groupe Les Démocrates soutiendra ce texte mais appelle à des avancées françaises encore plus tangibles en ce qui concerne la réduction de notre production de gaz à effet de serre.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Merci pour votre position au sujet de ce texte.
Je ne pense pas qu’il existe véritablement une contradiction entre le protocole et l’ODD, mais il sera toujours possible de procéder aux ajustements nécessaires.
La question du transport de CO2 est désormais bien balisée techniquement, si je puis dire, ce qui permet de garantir une sécurité globale.
Quant au stockage offshore, notre connaissance des fonds marins et sous-marins n’est pas encore suffisante pour avancer de manière sécurisée. Les réponses concrètes qui devront être apportées nécessitent un peu de temps.
M. Jean-François Portarrieu (HOR). Je partage votre étonnement en ce qui concerne le calendrier : le délai de ratification est assez incroyable.
Plusieurs États européens comme la Norvège, le Royaume-Uni et les Pays‑Bas, développent depuis plusieurs années des projets de séquestration de dioxyde de carbone par injection dans d’anciens réservoirs d’hydrocarbures. Pensez-vous, notamment en tant qu’éminent connaisseur de la Corse, qu’il serait possible et souhaitable que la France mène un projet de séquestration de carbone offshore en Méditerranée ?
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Des projets menés avec d’autres pays existent, majoritairement en mer du Nord. J’estime, en tant que député de Corse, qu’il est important que des projets puissent également voir le jour en Méditerranée. Le transport est l’une des principales difficultés en matière de CSC, du fait du coût et des kilomètres à parcourir. Un projet en Méditerranée, nommé Callisto et principalement français, est notamment prévu à Fos-sur-Mer, où nos émissions sont les plus importantes. L’évacuation sera ainsi techniquement plus facile, moins risquée et économiquement plus rentable.
M. Davy Rimane (GDR). La ratification de cet amendement est présentée comme une avancée environnementale mais elle risque en réalité de consacrer une double dépendance de l’État, d’abord à des infrastructures étrangères et ensuite à une technologie qui ne réglera pas le problème de fond.
Exporter notre CO2 vers des sites de stockage norvégiens, néerlandais ou italiens revient à reporter le problème au lieu d’investir dans des solutions durables et localisées chez nous. Le CSC est un mirage technologique qui permet surtout aux industriels les plus polluants de continuer à émettre. Le risque est de se donner bonne conscience en stockant du carbone. Par ailleurs, cette solution ne porte que sur un seul gaz à effet de serre et ne résoudrait donc qu’une partie du problème.
Il existe aussi un risque important de fuite économique. Il faudra des infrastructures lourdes, comme le montrent certains projets de construction de port pour les exportations dans plusieurs villes hexagonales et nous dépendrons d’autres États pour les coûts de stockage. Et qui paiera en fin de compte ces investissements massifs ? Les citoyens, les contribuables, alors que ce sont sans doute les industriels qui en profiteront.
En quoi est-il pertinent de ratifier cet amendement et de faire de tels investissements ? Ne vaudrait-il pas mieux rediriger nos efforts et les moyens correspondants vers des solutions de réduction des émissions mieux localisées, plus fiables et plus complètes ?
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Il ne s’agit pas de se donner bonne conscience mais de trouver une solution pour atteindre nos objectifs à l’horizon 2050. Cette solution vient en complément des efforts que nous devons poursuivre.
M. Davy Rimane (GDR). Vous n’avez pas répondu à certaines de mes questions : qui payera la facture de ces investissements lourds ? Plutôt que d’exporter, nous ferions mieux d’investir dans les nouvelles technologies ; certains pays ont fait le choix d’investir par exemple dans la transformation du CO2 en matière solide pour une réutilisation au quotidien. Dans le même temps, il nous faut poursuivre nos efforts pour minimiser la production de gaz à effet de serre.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Il est effectivement possible de réutiliser le CO2 ultérieurement. Mais, en vertu du principe pollueur payeur, ce sont les industriels qui paieront.
Mme Alexandra Masson (RN). Ce projet de loi est présenté comme une avancée pour la protection du climat mais il ne faut pas se laisser tromper par des discours un peu simplistes. Derrière cette proposition de ratification se cache en réalité la banalisation de l’immersion des déchets dans les fonds marins : l’amendement autorise l’exportation du CO2 liquéfié vers des pays où cela est possible. En d’autres termes, faute d’avoir développé ses propres capacités de stockage, la France s’apprête à envoyer ses émissions sous les océans ou ailleurs. Ce qui est présenté comme une solution propre constitue en réalité une manière déguisée de repousser le problème hors de nos frontières, dans les profondeurs de la mer. Tout ceci révèle un manque criant de stratégie nationale. La France aurait dû investir depuis longtemps dans des plateformes offshores, entre autres, dans ses propres espaces maritimes.
Les océans ne doivent pas devenir les zones où l’on enfouit ce que l’on ne sait plus gérer à terre. Les fonds marins abritent une biodiversité précieuse, fragile, souvent encore méconnue et absolument essentielle à l’équilibre de notre planète. Plutôt que de valider une pratique qui institutionnalise l’enfouissement sous-marin de nos déchets atmosphériques, la France devrait porter un message clair : la mer et les océans doivent être protégés.
Il ne me semble pas pertinent de ratifier cet amendement, surtout à l’approche de la Conférence des Nations unies sur l’océan qui se tiendra à Nice : nous devons faire preuve de cohérence dans nos choix. Nous sommes évidemment ouverts à une conciliation entre développement économique et gestion des ressources, mais on ne peut pas construire une politique crédible en se contentant de déplacer les problèmes. C’est une question de vision, de responsabilité et de respect de nos engagements. Si le CSC peut constituer une solution pour nos industriels dans les zones géographiques déjà équipées, ce ne peut être que de façon restreinte et temporaire.
Nous choisirons donc de nous abstenir. Si nous reconnaissons les enjeux économiques de ce texte, nous restons très réservés sur ses implications environnementales et sur le signal qu’il envoie, à quelques mois de la Conférence des Nations unies sur les océans.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Il faut reconnaître que la France a pris du retard dans ce domaine et qu’il y a urgence à développer une filière nationale. Je comprends vos questionnements mais le recours au CSC est indispensable pour les industries dont les émissions de CO2 sont incompressibles, celles du ciment et de l’acier. Si d’autres solutions existent, nous sommes bien sûr disposés à les étudier.
M. Hervé Berville (EPR). Ce projet de loi est important à la fois pour notre stratégie climatique, pour notre stratégie bas-carbone mais aussi pour la protection des océans. Dans la perspective de l’ambition de neutralité carbone d’ici à 2050, il nous offre non pas une alternative mais une option complémentaire à explorer. Le stockage géologique du CO2 apparaît comme l’une des options technologiques qui pourraient contribuer à la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre. Son transport transfrontalier pourrait faciliter le développement de projets internationaux susceptibles d’avoir un impact sur notre bilan carbone, mais aussi de partenariats dans la bataille contre le dérèglement climatique.
L’amendement s’efforce de trouver un équilibre entre innovation technologique et protection de l’environnement, notamment des océans. Sa mise en œuvre nécessitera des infrastructures de transport – canalisations, terminaux – dont l’impact environnemental sera limité mais devra être suivi et dont le coût devra être assumé exclusivement par les industriels. L’accès au marché du stockage international pourrait offrir une alternative compétitive face à l’augmentation des quotas de carbone en Europe.
Cette solution doit s’inscrire dans une stratégie de décarbonation et ne doit pas occulter l’importance de la réduction des émissions de gaz à effet serre : celle‑ci reste la priorité pour les industriels comme pour les États. Nous devons faire preuve de vigilance en encadrant administrativement et scientifiquement l’ensemble des mesures liées au stockage du carbone afin de maîtriser l’impact à long terme de celui-ci.
Le groupe EPR votera en faveur de ce projet de loi, qui s’inscrit dans le cadre international de l’accord de Paris, du protocole de Londres – très rigoureux, s’agissant de la protection de l’environnement marin – et des directives européennes qui nous autorisent à emprunter cette voie.
Pourriez-vous nous en dire plus sur les mécanismes de surveillance qui permettront d’assurer la protection des grands fonds marins, dont nous ne connaissons qu’une infime partie mais qui constituent un écosystème crucial pour notre planète ?
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Dans un premier temps, il est prévu de réutiliser les puits d’hydrocarbures existants, déjà sous surveillance et maîtrisés.
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Les amendements au protocole de Londres racontent à eux seuls l’histoire d’une illusion. L’océan s’acidifie et se réchauffe dans des proportions considérables. Les perturbations qu’il connaît affectent profondément son fonctionnement ainsi que la vie des espèces qui y vivent. Le changement climatique s’accélère. La sixième extinction de masse des espèces a commencé. Face à ces modifications profondes de nos milieux de vie, cela vaudrait la peine de s’arrêter un instant et de réfléchir aux causes qui ont conduit à ce problème existentiel et qui l’aggravent. Au moment où Trump et l’extrême droite internationale coalisée autour de sa brutalité font l’éloge de la destruction de nos milieux de vie, la nécessité d’un modèle alternatif s’impose. Mais au lieu d’agir sur les modes de production et de consommation de l’énergie, certains se bercent d’idées saugrenues sur le salut par la séquestration du carbone. En d’autres termes, mieux vaut s’illusionner que critiquer le capitalisme et bâtir les conditions d’une autre économie ; c’est moins fatigant.
Dans le cas des dispositifs de séquestration dans l’océan, l’histoire de l’illusion est d’ores et déjà bien documentée. Le temps que la connaissance scientifique met à atteindre la sphère de décision politique est souvent bien long, estimé à plusieurs décennies dans certains cas. Comme député de Brest et comme chercheur, j’ai la chance d’échanger régulièrement avec des scientifiques. À propos de la séquestration de carbone dans l’océan, un collègue a partagé avec moi sa préoccupation majeure – que l’on retrouve dans les études de l’Institute for Energy Economics and Financial Analysis – concernant les fuites du carbone injecté hors des lieux de stockage sous-marins. En mer du Nord, où des études ont été menées, on ne peut pas savoir si le carbone injecté reste bien stocké en totalité ; il est possible qu’il aille se perdre dans le reste de l’océan.
Illusion technique sans connaissance scientifique n’est que ruine absurde. L’océan n’est pas le puits de carbone sans fond que certains imaginent. L’acidification liée à la captation de carbone met en danger bien des espèces. Le moment viendra où l’océan ne pourra plus retenir le carbone, accélérant d’autant le changement climatique. La séquestration est donc valorisée économiquement sans garantie qu’elle ne renvoie le CO2 vers l’atmosphère, à rebours de l’objectif affiché.
L’histoire des illusions techniques se raconte avec pour musique d’accompagnement le bal du capital. L’amendement que nous examinons aujourd’hui prévoit la capacité d’exporter son dioxyde de carbone si l’on ne dispose pas soi-même de capacités de séquestration – ce qui est le cas de la France. L’exportation du carbone fait écho à l’export des déchets, qui est une spécialité des pays capitalistes avancés. Mais le système Terre n’a que faire de la division internationale du travail, des économies de bouts de chandelle ou des vaines tentatives pour nier la réalité des dynamiques de destruction de l’environnement.
Le dioxyde de carbone produit reste produit : il faut en produire moins. Nous n’échapperons pas à cette réalité. Si l’on s’est quelque peu renseigné sur la question, on sait que l’histoire de cette illusion a déjà pris fin. Au moment où ceux qui nient le changement climatique en interdisent jusqu’à la mention dans les publications scientifiques outre-Atlantique, l’histoire de la vérité doit inspirer des solutions plus résolues. Le dioxyde de carbone que nous n’avons pas à stocker est celui que nous ne produisons pas. Un tel changement ne peut s’opérer dans une économie reposant sur le principe d’accumulation sans fin des marchandises produites. Nous voterons donc contre ce texte.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Nous ne perdons pas de vue l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050. La solution consistant à stocker le CO2 n’est pas la meilleure mais elle n’est pas exclusive. Le but est de la sécuriser, sachant que ce gaz n’est pas le plus toxique. Cette réponse ne vous satisfera sans doute pas, mais y a-t-il d’autres solutions ?
M. Alain David, président. Nous en venons aux questions individuelles.
Mme Clémentine Autain (EcoS). Parce que les efforts consentis ne sont pas à la hauteur de la tragédie que nous sommes en train de vivre – un dérèglement climatique mettant en péril la vie sur Terre et provoquant des catastrophes naturelles en chaîne, ainsi que des déplacements de population –, on cherche à s’adapter. En l’occurrence, il s’agit avec ce projet de loi de développer le captage et le stockage du carbone – et de s’en délester dans d’autres territoires que le nôtre. C’est une fuite en avant. Pourtant, l’Agence de la transition écologique (Ademe) a souligné que, compte tenu des effets néfastes du transport au-delà de 200 kilomètres, les sites de stockage devaient être les plus proches possible de la source de CO2.
C’est parce que cette solution n’en est pas une que nous nous y opposons. Elle a par ailleurs un coût financier. Vous disiez tout à l’heure, monsieur le rapporteur, que les entreprises paieraient. Or ArcelorMittal vient d’être mis en examen pour avoir menti sur la réalité de sa pollution. Toute mesure s’appuyant sur la confiance, dans ce domaine, n’est pas sérieuse.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Je peux entendre que cette solution n’est ni suffisante ni idéale, mais elle est complémentaire : elle n’empêche pas de poursuivre les efforts en faveur de la décarbonation. Du retard a été pris, certes. Mais puisque vous évoquez l’exportation de CO2, sachez que des projets sont aussi à l’étude en France, par exemple à Fos-sur-Mer, pour que nous soyons à la hauteur et compétitifs dans ce domaine.
Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). Je voudrais justement revenir sur le projet Callisto à Fos-sur-Mer. Comme l’a rappelé ma collègue, ArcelorMittal a été mis en examen hier pour mise en danger d’autrui et pour faux et usage de faux. Une plainte a en effet été déposée par 300 riverains et par des associations contestant les allégations de la société selon lesquelles elle aurait réduit de 70 % ses émissions de gaz. J’ajoute que ce territoire est déjà très pollué et que la population y est fragilisée par des problèmes de santé : les cancers, trois fois plus nombreux qu’au niveau national, mais aussi le diabète et les maladies respiratoires. L’installation d’un stockage de gaz carbonique à proximité risque d’aggraver ces problèmes et de nuire à la qualité de vie. Il faudrait inciter les industriels à faire preuve de transparence et à réduire leurs émissions, plutôt que chercher des solutions alternatives qui pourront s’avérer dangereuses dans quelques années.
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Le projet de Fos-sur-Mer vise à stocker le CO2 dont l’émission est incompressible. Quant à la mise en examen, je ne la commenterai pas. Je laisse faire la justice sans préjuger de rien et dans le respect de la présomption d’innocence.
M. Michel Guiniot (RN). Le texte que nous examinons permettra la modification de la convention sur la prévention de la pollution des mers de 1972. Cette modification, plutôt simple, consiste en l’autorisation de l’exportation des flux de dioxyde de carbone entre pays consentants. Une question se pose toutefois au sujet de l’exportation vers des pays qui ne sont pas parties à l’accord. Quels sont les mécanismes de contrôle prévus pour garantir que l’export se fera dans le respect du milieu marin ? De quelles options les entreprises françaises disposent-elles en attendant la mise en fonctionnement des principaux sites français de captage et de stockage maritimes et terrestres en 2028-2030 ?
M. Xavier Lacombe, rapporteur. Les pays concernés doivent respecter les règles édictées par la directive européenne de 2009 sur le stockage du CO2.
M. Hervé Berville (EPR). La convention de Londres est l’une des plus protectrices de l’environnement marin : si cet amendement au protocole a été autorisé, c’est après de longues discussions entre les partenaires. Rappelons aussi qu’il s’inscrit dans le cadre d’accords internationaux et de directives européennes, et que celles-ci ont été discutées avec les scientifiques, les acteurs économiques et les États, au regard de la stratégie de ces derniers pour parvenir à la neutralité carbone.
L’un de nos collègues a souligné que le capitalisme produisait des déchets. Ce n’est pas son apanage : il me semble que le système communiste en a lui aussi produit beaucoup… Nous devons œuvrer collectivement à l’élaboration d’une stratégie reposant sur deux jambes : l’atténuation et l’adaptation. Celle-ci, d’ailleurs, n’est pas un gros mot : elle n’exclut pas que l’on agisse sur la réduction des émissions ! Il s’agit simplement de tenir compte du principe de réalité : certaines émissions sont incompressibles.
J’ajoute enfin que solution passe par des partenariats avec des pays qui sont des démocraties matures – la Norvège, le Danemark – où existent des mécanismes de surveillance. Nous n’externalisons rien : nous trouvons simplement des solutions technologiques pour répondre à un enjeu écologique majeur.
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Je voudrais réagir à l’argument par l’absurde employé par notre collègue : en considérant que l’on ne peut pas critiquer le capitalisme au motif que le communisme soviétique a détruit l’environnement, on exonère totalement les modes de production actuels de leur responsabilité décisive dans la destruction des milieux de vie ! Il est scientifiquement établi que, si nous continuons d’organiser l’économie sur le principe d’une accumulation sans fin et d’une extension de la production de marchandises, les milieux de vie ne permettront plus, à long terme, la reproduction de l’espèce humaine. Il ne s’agit pas de revenir aux débats du XXe siècle entre le capitalisme et le soviétisme : il faut aller vers des dynamiques de collectivisation pour réguler l’économie.
Le rapporteur nous dit enfin que la séquestration du carbone viendra en complément. Mais toute la littérature économique, sur les questions de l’énergie et des déchets, montre que l’optimisation des techniques de production se traduit toujours par une hausse de la quantité de déchets ou d’énergie. C’est l’effet rebond, que l’on a pu observer avec les énergies renouvelables depuis les années 1970. Il faut appuyer les décisions et les politiques publiques sur les études scientifiques et sur la connaissance produite, y compris en sciences sociales.
M. Pierre Pribetich (SOC). Il est plus que temps de dire stop à ce type de pratiques et d’abandonner l’idée que l’on ne pourrait pas faire autrement. Je voudrais rappeler, en tant que professeur des universités, qu’il existe d’autres techniques sur lesquelles mener des recherches comme la photosynthèse artificielle, l’absorption chimique ou encore la bioénergie avec captage et stockage du carbone. Mais les premières orientations stratégiques n’ont été lancées qu’en juin 2023, ce qui n’est pas acceptable. Il faut qu’un grand programme de recherche pour la capture du CO2 soit lancé, afin que nous puissions être efficients le plus rapidement possible.
Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). Le mot « adaptation » n’est pas un tabou pour nous, mais tous les scientifiques prédisent que lorsque le climat se sera réchauffé de quatre degrés, il n’y aura plus d’adaptation possible : le dérèglement climatique sera total. Il ne s’agit pas de défendre le capitalisme ou le communisme, mais de changer de modèle de transition écologique. L’adaptation, c’est maintenant : quand la température aura augmenté de deux, trois ou quatre degrés, ce sera trop tard.
M. Hervé Berville (EPR). Vous avez dit, cher collègue Cadalen, que la production de déchets était l’apanage du modèle capitaliste. Je vous réponds simplement – et cela n’a rien d’absurde – que ce n’est pas le cas.
Par ailleurs, c’est à l’horizon 2050 que nous visons la neutralité carbone. D’ici là, il faut des stratégies d’adaptation, de compensation ou d’exportation pour faire face à l’augmentation de certaines émissions. Les stratégies internationales comme l’accord de Paris ou la COP sur la diversité biologique fixent des échéances d’ici à 2030 voire à 2050. Elles nous invitent à agir maintenant mais en marchant sur deux jambes : adaptation et atténuation.
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Article unique (autorisation de la ratification la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l’article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières, adoptée le 30 octobre 2009)
La commission adopte l’article unique non modifié.
L’ensemble du projet de loi est ainsi adopté.
Annexe 1 :
Texte de la commission des affaires étrangères
Article unique
Est autorisée la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l’article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières, adoptée le 30 octobre 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi (1).
N.B. : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 942)
Annexe 2 :
Liste des personnes auditionnées par le rapporteur
M. Amaury de la Grange, conseiller juridique à la sous-direction du droit de la mer et des pôles ;
M. Pierre Dousset, conseiller juridique à la mission des accords et traités.
Mme Marine Plassier, chargée de mission décarbonation de l’industrie ;
Mme Carol Paquier, cheffe de projet ressources énergétiques du sous-sol & filière captage et stockage du carbone ;
M. Fabrice Candia, chef du bureau des ressources énergétiques du sous-sol ;
M. Frédéric Branger, chef du bureau des marchés du carbone.
Mme Marine de Carné-Trécesson, représentante permanente, ambassadrice ;
M. Maxime Legathe, attaché maritime.
Mme Sylvie Padilla, responsable du service industrie ;
Mme Solène Bouvier, ingénieure thématique captage, stockage et valorisation du carbone au service décarbonation de l’industrie & hydrogène.
Groupement des industries de construction et activités navales (GICAN)
M. Jean-Marie Dumon, délégué général-adjoint en charge de la défense et de la sécurité.
Mme Nathalie Mercier-Perrin, présidente ;
M. Pierre Léonidas, directeur général-adjoint en charge des affaires publiques et institutionnelles.
M. Arnaud Baudot, directeur ;
M. Raphaël Huyghe, responsable de programme.
([1]) 21e conférence des parties (COP21).
([2]) Règlement (UE) 2021/1119 du 30 juin 2021.
([3]) À l’image du naufrage du pétrolier « Torrey Canyon » au Sud de la Cornouaille britannique, le 18 mars 1967.
([4]) Soit le rejet délibéré dans la mer, qu’il s’agisse de déchets ou du sabordage de navires, aéronefs ou ouvrages.
([5]) L’article 3 de la convention définit ces déchets et autres matières comme l’ensemble des matériaux de tout type, de toute forme et de toute nature.
([6]) Les stipulations de la convention ne s’appliquent pas aux émissions inhérentes aux déchets résultant de l’exploration et de l’exploitation de ressources minérales maritimes ni en cas de force majeure liée au sauvetage en mer ou à la sécurité des navires.
([7]) Telles que la convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est ou la convention de Barcelone relative à la prévention de la pollution en mer Méditerranée.
([8]) Il s’agit des déblais de dragage, des boues d’épuration, des déchets de poisson ou matières résultant d’opérations de traitement industriel du poisson, de navires et plates-formes ou autres ouvrages artificiels en mer, de matières géologiques inertes et inorganiques, de matières organiques d’origine naturelle et de certains objets volumineux constitués principalement de fer, d’acier, de béton et de matériaux non-nuisibles.
([9]) La France a ratifié le protocole de Londres grâce à la loi n° 2003-985 du 16 octobre 2003.
([10]) Dès lors que tous les États parties à la convention de Londres auront ratifié le protocole de Londres.
([11]) Notamment depuis la signature du protocole de Kyoto en 1997.
([12]) L’entrée en vigueur de la résolution LP.1(1) s’est effectuée selon une procédure d’acceptation tacite, conformément à l’article 22.4 du Protocole.
([13]) Directive 2009/31/CE relative au stockage géologique du dioxyde de carbone du 23 avril 2009.
([14]) Les services de police des eaux littorales des directions départementales des territoires et de la mer sont chargés de l’instruction des dossiers de déclaration et des demandes d’autorisation d’immersion des déchets. Ces données sont rassemblées et synthétisées par site d’immersion autorisé et permettent de connaître les quantités (en tonnes de matières sèches) immergées chaque année : https://www.geolittoral.developpement-durable.gouv.fr/sites-d-immersion-des-sediments-de-dragages-a812.html
([15]) À titre illustratif, l’article 19 de la directive impose la constitution de garanties financières visant à assurer le respect d’obligations prévues par le permis de stockage délivré par les autorités compétentes s’agissant notamment de la maîtrise des risques de fuite et des coûts potentiels afférents.
([16]) L’Estonie, la Finlande, la Norvège, la Suède, les Pays-Bas, le Danemark, la Belgique, le Royaume-Uni, la République islamique d’Iran, la Suisse, l’Australie et la République de Corée.
([17]) L’article 21.3 du protocole de Londres prévoit que tout amendement à un article du protocole entre en vigueur à l’égard des États parties qui l’ont accepté le soixantième jour après que deux-tiers d’entre eux ont déposé leur instrument d’acceptation auprès de l’OMI.
([18]) La résolution LP.3(4) précise qu’en cas d’exportation de dioxyde de carbone vers des États n’ayant pas ratifié le protocole de Londres, les accords bilatéraux doivent respecter des obligations de protection du milieu marin au moins équivalentes à celles prévues par le protocole.
([19]) Partenariat stratégique pour renforcer la coopération franco-norvégienne en matière de transformation industrielle verte, signé le 16 janvier 2024.
([20]) Réponse ministérielle du 6 décembre 2018 à la question écrite de la sénatrice Isabelle Raimond-Pavero.
([21]) Selon les réponses écrites apportées par le MEAE et le ministère de la transition écologique et solidaire (MTES) au questionnaire du rapporteur, les principales technologies regroupent le captage aux amines (usage de solvants), l’oxycombustion permettant de concentrer le CO2 avant son captage ou encore le captage cryogénique (séparation du CO2 à basse température). La capture aux amines constitue aujourd’hui la solution la plus largement déployée.
([22]) Réponse ministérielle du 13 février 2025 à la question écrite du sénateur Aymeric Durox.
([23]) Réponses écrites du MEAE et MTES au questionnaire du rapporteur.
([24]) Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, « État des lieux et perspectives du déploiement du CCUS en France », juillet 2024.
([25]) Par comparaison, les émissions de CO2 en France s’élèvent à environ 400 millions de tonnes en 2024.
([26]) Étude d’impact, p. 6.
([27]) Pour détecter ces fuites, plusieurs méthodes de surveillance sont utilisées : monitoring sismique pour suivre la migration du CO2 dans le sous-sol, capteurs chimiques sur le fond marin pour détecter des anomalies de pH ou de concentration en CO2, surveillance acoustique, imagerie du sous-sol ou encore prélèvements réguliers d’échantillons. En cas de détection d’une fuite, des mesures correctives peuvent être mises en œuvre, comme la réduction de la pression d’injection, l’injection de matériaux étanchéifiants, la reprise de scellement de puits ou dans les cas extrêmes, l’extraction du CO2 stocké.
([28]) Lors de leur audition, les représentantes de l’ADEME ont ainsi rappelé la nécessité de distinguer le CO2 biogénique du CO2 fossile : seul le captage du premier permet ensuite sa réutilisation dans le cadre de la production de carburants d’aviation durable.
([29]) Règlement UE 2023/2405 ReFuelEU Aviation du 9 octobre 2023.
([30]) Réponse ministérielle du 13 février 2025 à la question écrite du sénateur Aymeric Durox.
([31]) Commission de régulation de l’énergie, rapport sur le captage et la chaîne de valeur du dioxyde de carbone, septembre 2024, p. 6.
([32]) Le CSC constitue ainsi une priorité nationale depuis 2014.
([33]) Le gouvernement britannique a annoncé en janvier 2025 un investissement de 22 milliards de livres sterling dans la filière de captage et de séquestration de CO2.
([34]) Le début des premières opérations de captage est prévu en 2025.
([35]) Selon les réponses écrites du MEAE et du MTES au questionnaire du rapporteur, le Royaume-Uni disposerait d’une capacité de stockage de 76 milliards de tonnes de CO2, contre 72 milliards pour la Norvège et 13 milliards pour le Danemark.
([36]) https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/capture-valorisation-stockage-du-carbone-cvsc-carbon-capture-utilization-and.
([37]) Rapport de Yannick Chenevard, remis à la première ministre le 17 juillet 2023, relatif à la réévaluation du dispositif de flotte stratégique.
([38]) Commission de régulation de l’énergie, rapport sur le captage et la chaîne de valeur du dioxyde de carbone, septembre 2024, p. 6.