1263


ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

 523


SÉNAT

 

SESSION ORDINAIRE DE 2024 - 2025

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale
le 8 avril 2025

 

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 avril 2025

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission mixte paritaire (1) chargÉe de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire

 

par M. Stéphane TRAVERT
Rapporteur,

Député

 

par M. Daniel GREMILLET
et Mme Anne-Catherine LOISIER
Rapporteurs,

Sénateurs

 

(1) Cette commission est composée de : Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente, Mme Dominique Estrosi Sassone, sénatrice, vice-présidente; M. Stéphane Travert, député, rapporteur ; M. Daniel Gremillet, Mme Anne-Catherine Loisier, sénateurs, rapporteurs.

 

Membres titulaires : Mme Hélène Laporte, M. Robert Le Bourgeois, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, Mme Mélanie Thomin, M. Julien Dive, M. Boris Tavernier députés ; Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet, M. Pierre Cuypers, Mme Anne-Catherine Loisier, M. Serge Merillou, M. Jean-Claude Tissot et M. Frédéric Buval, sénateurs.

 

Membres suppléants : M. Patrice Martin, Mme Anne-Sophie Ronceret, Mme Mathilde Hignet, M. Dominique Potier, M. Thierry Benoit, M. Julien Brugerolles, députés ; M. Olivier Rietmann, Mme Brigitte Hybert, M. Franck Menonville, M. Franck Montaugé, M. Fabien Gay, M. Vincent Louault et M. Henri Cabanel, sénateurs.

 

 

 

 

_______________

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 954, 1104 et T.A. 74.

Sénat : 451, 484, 485 et T.A. 95 (2024‑2025).

Commission mixte paritaire : 524.


SOMMAIRE

___

 Pages

travaux de la commission

TABLEAU COMPARATIF

Article 1er

Article 1er

Article 1er bis (nouveau)

Article 1er bis

Article 2 (nouveau)

Article 2


   travaux de la commission

 

Conformément au deuxième alinéa de l’article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, une commission mixte paritaire (CMP) chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire s’est réunie à l’Assemblée nationale le mardi 8 avril 2025.

Elle a procédé à la désignation de son bureau, qui a été ainsi constitué :

– Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente ;

– Mme Dominique Estrosi Sassone, sénatrice, vice-présidente.

Elle a également désigné :

– M. Stéphane Travert, député, rapporteur pour l’Assemblée nationale ;

– M. Daniel Gremillet, sénateur, rapporteur pour le Sénat ;

– Mme Anne-Catherine Loisier, sénatrice, rapporteure pour le Sénat ;

*

*     *

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. La proposition de loi qui nous est soumise a été adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 17 mars dernier et par le Sénat le 1er avril.

Même si la procédure des CMP nous est familière, je tiens à en rappeler les règles. Une CMP ne constitue pas une seconde lecture, mais une parenthèse dans la navette parlementaire. Elle a pour base de discussion le texte adopté par l’Assemblée et celui voté par le Sénat, considérés de façon égale. Un tableau comparatif des textes adoptés par chaque assemblée vous a été transmis. Une CMP examine les seules dispositions restant en discussion après lecture du texte dans chaque assemblée.

Lors de son dépôt à l’Assemblée nationale par ses auteurs, MM. Stéphane Travert et Julien Dive, la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire comportait un article unique. Lors de son examen, l’Assemblée a adopté trois articles additionnels, les articles 1er bis, 2 et 3, portant à quatre le nombre d’articles. Le Sénat en a adopté un conforme, l’article 3, qui se trouve ainsi exclu du champ de la présente CMP.

Aucun accord partiel n’est envisageable. La CMP a pour objet de parvenir à une rédaction conforme des articles restant en discussion. L’élaboration d’un texte par la CMP n’a de sens que s’il est susceptible d’être adopté par les deux assemblées. Si des scrutins sont organisés pendant notre réunion, en cas de divergences insurmontables, les suppléants ne pourront y prendre part. En cas d’égalité des voix, la proposition de rédaction est rejetée.

Dans le tableau comparatif, les articles que les rapporteurs des deux assemblées proposent conjointement d’adopter sont surlignés. Pour certains articles, nous serons amenés à examiner des propositions de rédaction concurrentes, transmises par les membres de la CMP. En cas de propositions de rédaction globales concurrentes sur certains articles, celles-ci feront l’objet d’une discussion commune, la proposition des rapporteurs étant présentée en premier.

La proposition de loi traite de l’encadrement des promotions et des pratiques commerciales, notamment dans le domaine alimentaire, et vise à éviter qu’elles ne soient trop agressives, en tenant compte des intérêts des fournisseurs, des producteurs et des consommateurs. L’article 1er vise à prolonger le relèvement du seuil de revente à perte et l’encadrement des promotions. L’article 1er bis, introduit par l’Assemblée et supprimé par le Sénat, vise à encadrer les marges des acteurs de la chaîne agroalimentaire en appliquant le principe du coefficient multiplicateur. L’article 2 prévoit que l’interdiction de revente à perte s’applique également aux produits vendus sous marque de distributeur (MDD).

Mme Catherine Estrosi Sassone, sénatrice, vice-présidente. La proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire a été adoptée il y a exactement une semaine par le Sénat, par 246 voix pour et aucune voix contre. Dans la continuité des lois Égalim du 30 octobre 2018, du 18 octobre 2021 et du 30 mars 2023, tandis que perdure la guerre des prix dans la filière agroalimentaire au détriment de nos producteurs, elle vise à offrir aux acteurs de la filière un cadre aussi stable que possible, ce qui plaide en faveur du maintien du relèvement du seuil de revente à perte de 10 %, dit « SRP + 10 », et de l’encadrement des promotions.

Si la commission des affaires économiques du Sénat soutient celui-ci, elle demeure réservée sur celui-là. Toutefois, son abandon serait un très mauvais signal, qui aggraverait la guerre des prix. Surtout, nous devons légiférer en urgence. Le SRP + 10 arrive à échéance le 15 avril 2025, ce qui plaide pour l’adoption immédiate d’un vecteur législatif permettant de le prolonger. La poursuite de l’expérimentation introduite par la loi Égalim 1 fait consensus, dont nous avons la responsabilité de tenir compte. Il importe que notre CMP aboutisse à une proposition de loi garantissant sa prorogation effective.

Je remercie les rapporteurs de leur travail, réalisé dans des délais très contraints, notamment ceux du Sénat, Mme Anne-Catherine Loisier et M. Daniel Gremillet, qui travaillent sur ces sujets depuis de très nombreuses années. Ils ont notamment créé un groupe de suivi des lois Egalim, qui leur permet d’étoffer leurs travaux. Ils sont parvenus, me semble-t-il, à recentrer la proposition de loi sur la prolongation du SRP + 10 et à harmoniser les durées d’expérimentation des dispositions concernées jusqu’au 15 avril 2028.

Ils n’ont pas ménagé leurs efforts pour parvenir à un texte consensuel, répondant vraiment à l’enjeu de l’urgence de la prolongation du SRP + 10. Par ailleurs, ils ont obtenu, lors de l’examen du texte en séance publique, l’engagement du gouvernement de travailler avec les distributeurs à l’élaboration d’une méthodologie en vue de clarifier les informations, exigées des entreprises, relatives à leurs usages des surplus de marges dues à l’application du SRP + 10. J’espère que cet esprit constructif présidera aux travaux de la CMP. Je ne doute pas que, sur les dispositions restant en discussion, nous parviendrons, avec sagesse, à un accord raisonnable, afin que le texte puisse entrer en vigueur dans les prochains jours.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Notre collègue député Julien Dive et moi-même avions, en déposant la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire, une préoccupation de court terme : le renouvellement du SRP + 10 sur les produits alimentaires, qui arrive à échéance le 15 avril 2025 (c’est-à-dire dans une semaine), conformément aux dispositions de la loi Égalim 1, que j’ai eu l’honneur de défendre en 2018 en tant que ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Une disposition complémentaire du SRP + 10, l’encadrement des promotions en valeur et en volume, arrive à échéance un an plus tard, le 15 avril 2026.

Dans sa rédaction initiale, la proposition de loi prévoyait de prolonger le SRP + 10 et l’encadrement des promotions sur les seuls produits alimentaires jusqu’au 15 avril 2028. L’élargissement de l’encadrement des promotions aux produits de droguerie, parfumerie et hygiène (DPH), entré en vigueur le 1er mars 2024 en application de la loi dite « Descrozailles », aurait donc été abandonné. Lors de l’examen du texte par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, le maintien de l’encadrement des promotions sur les produits DPH jusqu’au 15 avril 2026 a été adopté à mon initiative, au nom de la stabilité des règles.

Le texte adopté par l’Assemblée nationale a renversé ce calendrier, limitant au 15 avril 2026 la prolongation du SRP + 10 et prolongeant jusqu’au 15 avril 2028 l’encadrement des promotions sur les seuls produits DPH. Le Sénat a remis de l’ordre dans ce calendrier, en fixant au 15 avril 2028 l’échéance du SRP + 10 et de l’encadrement des promotions pour tous les produits de grande consommation. Il me semble que, sur ce point, le texte du Sénat doit être retenu.

J’aurais préféré, à titre personnel, que l’encadrement des promotions sur les seuls produits DPH ne soit pas prolongé avant d’en dresser un premier bilan. Toutefois, tant l’Assemblée nationale que le Sénat se sont prononcés en faveur de l’échéance de 2028. Quant au maintien du SRP + 10 et à l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires, il ne faut pas se mettre en situation de devoir à nouveau légiférer dans quelques mois ou au printemps 2027, ce qui serait impossible. Il est donc logiquement proposé une date commune d’échéance au 15 avril 2028 pour tous les produits visés par les dispositions de l’article 125 de la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l’action publique, dite loi « Asap ».

S’agissant des promotions sur les produits DPH, le taux maximal de 40 % pour les promotions envisagé à l’Assemblée nationale peut se lire comme un compromis vis-à-vis du consommateur, visant à rendre plus acceptable la prolongation du dispositif. Toutefois, il est vrai que le taux de 34 % obéit à une logique commerciale, celle du « deux achetés, un gratuit », et que l’argument de la stabilité des règles joue en faveur de son maintien.

Les députés ont exprimé leur insatisfaction concernant l’évaluation du SRP + 10 menée jusqu’à ce jour. Cette insatisfaction est venue de tous les bords, notamment lors de l’examen du texte en commission, laquelle a donc adopté plusieurs amendements permettant de renforcer l’évaluation du SRP + 10 et de l’encadrement des promotions avec la création d’une sanction.

En cas d’absence de transmission par les distributeurs des documents permettant de mesurer les effets de ces mesures, une sanction de 75 000 euros pour les personnes physiques et de 375 000 euros pour les personnes morales a été créée. Il s’agit du niveau de sanction prévu à l’article 125 de la loi Asap en cas de non-respect de l’encadrement des promotions. Ce niveau de sanction a été largement relevé en séance publique, à un montant maximum de 1 % du chiffre d’affaires annuel pour les PME et de 4 % du chiffre d’affaires annuel pour les grandes entreprises.

Par ailleurs, l’obligation de remettre des éléments chiffrés permettant de mesurer les effets du SRP + 10 a été étendue, avec les mêmes sanctions, aux industriels, à l’exclusion des PME. Le Sénat n’a pas retenu cette disposition, conservant la sanction pour absence de transparence uniquement pour les distributeurs, à la même hauteur que celle prévue pour le non-respect de l’interdiction de la revente à perte, soit 100 000 euros pour les personnes physiques et 500 000 euros pour les personnes morales. La rédaction adoptée par le Sénat, sans préjudice d’un débat sur le niveau de la sanction, me semble constituer un compromis acceptable entre celles respectivement retenues, à l’Assemblée, en commission et dans l’hémicycle.

Quant à l’obligation de transparence mise à la charge du fournisseur par l’Assemblée nationale, les sénateurs l’ont jugé peu opérante. Il est vrai que le fournisseur ne fixe pas le prix de vente au consommateur et peut donc difficilement faire la lumière sur l’utilisation de la « manne » générée par le dispositif SRP + 10. Si un pas devait être fait en direction de l’Assemblée nationale, il pourrait l’être dans le domaine de la transparence sur la sanctuarisation de la matière première agricole par les fournisseurs.

Par ailleurs, les députés ont voté de nombreuses dispositions éloignées du cœur du texte pour envisager la transparence sur les marges de façon générale et même, à l’article 1er bis, l’encadrement des marges. Il n’est pas proposé de reprendre ces dispositions, que le Sénat a supprimées et qui le demeurent donc dans le texte de compromis. La recherche d’un compromis suppose en effet de s’en tenir au périmètre strictement limité du SRP + 10 et de l’encadrement des promotions.

En revanche, un ajout au texte voté en commission et maintenu en séance publique à l’Assemblée nationale n’a pas été repris par le Sénat, alors même qu’il est au cœur du sujet : expliciter l’applicabilité de l’interdiction de la revente à perte aux produits vendus sous MDD en l’état au consommateur. Il vous appartiendra de vous exprimer sur votre souhait de faire figurer ce point dans le texte final.

En conclusion, le texte voté par le Sénat permet d’atteindre l’objectif principal, qu’il faut d’autant moins perdre de vue qu’il est attendu par la très grande majorité des acteurs économiques, notamment les agriculteurs : reconduire le SRP + 10, qui arrive à échéance le 15 avril prochain. Ce texte permet d’harmoniser les calendriers du SRP + 10 et de l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires et sur les produits DPH, en prévoyant une échéance commune au 15 avril 2026.

Cette échéance permettra au gouvernement de réaliser un travail d’évaluation plus complet que celui livré jusqu’à ce jour. L’objectif est d’avoir une vision aussi précise que possible de l’utilisation du surplus de marge obtenu sur certains produits grâce au SRP + 10. Il s’agit de déterminer dans quelle mesure ces dispositifs permettent de défendre la valeur de nos productions agricoles et alimentaires et, in fine, d’améliorer le revenu de nos agriculteurs.

Pour ce faire, le texte offre des garanties supplémentaires en faveur de la transparence sur les effets des dispositions que doivent prendre les acteurs économiques. L’administration, quant à elle, devra se saisir des dispositions nouvelles pour accompagner ces derniers dans la mise en conformité avec ces exigences de transparence et, s’ils font preuve de mauvaise volonté, pour les sanctionner.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. La proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire a fait l’objet d’échanges nourris entre Anne-Catherine Loisier, qui présentera le détail de nos travaux, Stéphane Travert et moi-même.

Depuis l’adoption des lois Égalim en 2018, 2021 et 2023, tandis que perdure la guerre des prix dans la filière agroalimentaire au détriment des producteurs, les dispositions que nous avons votées demeurent peu appliquées, voire contournées. Mieux vaut en renforcer l’application et en améliorer l’évaluation qu’en modifier chaque année la teneur et les périmètres.

Tel est l’enseignement qu’Anne-Catherine Loisier et moi-même retirons des travaux du groupe de suivi des lois Égalim. Nous avons constaté que les acteurs font preuve d’une capacité d’adaptation. Nous sommes plus souvent en retard qu’en avance sur les pratiques du secteur. Les lois Égalim ont apporté de la stabilité aux consommateurs – elles n’ont pas eu d’effet inflationniste – et de la sécurité aux acteurs de la chaîne agroalimentaire par rapport à leurs concurrents européens.

L’expérimentation du SRP + 10, qui prévoit des conditions de négociation plus favorables aux fournisseurs, arrive à échéance le 15 avril prochain. À l’exception d’un groupe, tous les acteurs soulignent la nécessité de le prolonger, car sa disparition conduirait à relancer la guerre des prix.

Lors de l’examen du texte, notre fil rouge fut l’efficacité dans un contexte d’urgence et la volonté de parvenir à une rédaction consensuelle. Dans un avenir proche, nous travaillerons de nouveau sur ces sujets à l’occasion de l’examen d’un projet de loi « Egalim 4 », en cours de préparation par le gouvernement.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. Nous avons essayé avec Daniel Gremillet et mes collègues sénateurs de travailler ensemble en vue de recentrer la proposition de loi sur son objectif initial, à savoir prolonger le SRP + 10, dispositif français inédit, tout en évitant de complexifier les dispositions, dans un contexte d’instabilité des marchés.

À cet égard, nous avons veillé à harmoniser les durées d’expérimentation des dispositifs existants afin de maintenir l’équilibre global des lois égalim. Nous proposons donc de prolonger la durée d’expérimentation des dispositifs jusqu’en 2028 afin d’éviter une instabilité dommageable à l’ensemble des acteurs économiques.

Dans un esprit constructif, nous devons essayer de trouver une solution afin d’éviter que ce dispositif s’arrête la semaine prochaine. Mme la ministre déléguée s’est engagée à définir, avec l’ensemble des parlementaires, les contours et le cahier des charges du rapport sur les marges que remettra l’Inspection générale des finances (IGF), afin d’améliorer la transparence. Ce rapport alimentera le débat sur cette question qui fut riche à l’Assemblée nationale.

Nous proposons le maintien de l’ensemble des dispositifs existants – SRP + 10, encadrement des promotions sur les produits alimentaires et DPH. L’encadrement des produits DPH est absolument essentiel pour protéger le tissu des ETI – entreprises de taille intermédiaire – et des PME – petites et moyennes entreprises –, très nombreuses dans ce secteur. On constate non pas une inflation, mais une baisse des prix de l’ordre de 2 % entre les mois de mars et de novembre 2024 et l’effondrement des volumes parfois évoqué existe depuis dix ans, soit bien avant l’instauration du dispositif d’encadrement il y a un an.

Il est essentiel de maintenir l’ensemble de ces dispositifs qui constituent l’armature d’Egalim et garantissent son équilibre global. Remettre en cause le taux s’appliquant aux promotions sur les produits DPH reviendrait à faire un nouveau cadeau aux distributeurs sans que les consommateurs n’en tirent le moindre bénéfice.

 

La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l’examen des dispositions restant en discussion.

 

 

Article 1er

 

Propositions de rédaction n° 1A de M. Robert Le Bourgeois et de Mme Hélène Laporte, n° 1 de Mme Mathilde Hignet, n° 2 de M. Julien Dive et n° 3 de Mme Mélanie Thomin et de M. Dominique Potier

M. Robert Le Bourgeois, député. Le SRP + 10 n’a pas d’effet bénéfique ; il aurait même un effet inflationniste. L’harmonisation des durées d’expérimentation des différents dispositifs et l’existence d’une échéance au 15 avril sont des arguments légers.

Compte tenu de la conjoncture, nous ne souhaitons pas relancer une guerre des prix. Nous attendons donc le dépôt du projet de loi Égalim 4 qui, annoncé pour le mois de juin par le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, permettra à la fois de valoriser la matière première alimentaire et d’augmenter le revenu des agriculteurs.

Nous proposons donc de mettre un terme en 2026 au SRP + 10 et à l’encadrement des promotions sur les produits DPH.

Mme Mathilde Hignet, députée. La proposition de rédaction vise à faire coïncider la fin de l’expérimentation sur l’encadrement des promotions sur les produits DPH avec la fin de l’expérimentation relative au SRP + 10. Elle tend aussi à rétablir dans la rédaction de l’Assemblée nationale les dispositions relatives au taux de marge brute des produits bio ; à la publication des documents transmis par les distributeurs et les industriels ; à la sanction des acteurs économiques, fixée de manière progressive en fonction de leur chiffre d’affaires, qui n’auraient pas communiqué les éléments permettant d’apprécier la pertinence des mesures prises.

Avec le groupe LFI-NFP, nous avions voté en faveur du texte à l’Assemblée nationale, car il nous semblait plus ambitieux.

M. Julien Dive, député. Le rapporteur Stéphane Travert et moi-même sommes à l’initiative de cette proposition de loi qui a un double objet : prolonger l’expérimentation du SRP + 10 et supprimer, dès 2026, l’encadrement des promotions sur les produits DPH afin d’améliorer le pouvoir d’achat de nos compatriotes.

Or ce texte n’est plus conforme à l’esprit de proposition de loi initiale ; je ne m’y retrouve pas. C’est la raison pour laquelle, en commission et en séance, j’avais déposé un amendement, qui fut d’ailleurs adopté, visant à supprimer le dispositif relatif aux produits DPH en 2028 et prévoyant, en contrepartie, d’augmenter le seuil d’encadrement à 40 %. Vu la fin de non-recevoir que m’ont opposée nos collègues sénateurs, je propose que ce dispositif soit maintenu jusqu’en 2026 et que le seuil soit rehaussé à 50 % de 2026 à 2028.

Mme Mélanie Thomin, députée. Nous souhaitons que le dialogue soit le plus fructueux possible. L’objet de ce texte, qui encadre le seuil de revente à perte, est de défendre le revenu agricole. Cette proposition de loi suscite beaucoup d’attentes dans le monde agricole ; nous sommes réunis ici pour le servir.

Le texte adopté à l’Assemblée nationale le 17 mars comporte des avancées. Nous avons exigé davantage de transparence concernant l’encadrement des marges dans la grande distribution. Dans un même souci de transparence, l’Inspection générale des finances remettra chaque année un rapport sur les marges brutes réelles des distributeurs.

La proposition de rédaction vise à fixer le montant de la sanction à hauteur de 0,4 % du chiffre d’affaires annuel des acteurs de la grande distribution, dans l’esprit du texte adopté par l’Assemblée nationale, qui prévoyait un plafond de 1 %.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Avis défavorable sur la proposition de rédaction de M. Le Bourgeois et de Mme Laporte. Nous souhaitons aligner les durées d’expérimentation des dispositifs SRP + 10 et DPH, qui arriveraient à échéance au mois d’avril 2028, afin de disposer de données.

Avis défavorable également sur la proposition de rédaction de Mme Hignet. Le plafonnement des promotions sur les produits DPH à 34 % jusqu’en 2028 est déjà satisfait dans la rédaction du Sénat. La proposition relative aux marges sur les produits bio réalisées par les distributeurs nous éloigne de l’objet de ce texte, sur lequel nous devons nous concentrer si nous voulons trouver un compromis. Enfin, s’il est indispensable que le rapport établi à partir des documents remis par les distributeurs soit rendu public, la publicité desdits documents porterait atteinte au secret des affaires.

Avis défavorable, enfin, sur la proposition de rédaction de M. Dive. Cela étant, je comprends sa position car, dans le texte initial, nous avions choisi d’exclure le dispositif DPH. Toutefois, les auditions m’ont fait cheminer sur ce sujet. Force est de constater que l’Assemblée nationale comme le Sénat ont voté pour le maintien de l’encadrement des promotions sur les produits DPH jusqu’en 2028. Je propose d’en rester là.

J’émettrais en revanche un avis favorable sur la proposition de Mme Thomin et de M. Potier, ce qui nous conduirait à adapter sur ce point le texte du Sénat que nous propositions initialement de retenir pour cet article. Il est nécessaire de renforcer les sanctions en cas de non-respect du dispositif SRP + 10 et en l’absence de publication des documents demandés. Le plafond de 0,4 % du chiffre d’affaires annuel hors taxes, pourcentage qui peut être modulé en fonction du manquement, est raisonnable et il permet de renforcer la pression sur la grande distribution.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. Si nous nous interrogeons tous sur les effets positifs du SRP + 10, nous avons tous identifié l’effet négatif de sa disparition. Si les distributeurs ne bénéficient plus de cette manne, ils la récupéreront en amont, sur les transformateurs ou les producteurs. Il n’est pas souhaitable de mettre un terme aussi rapidement à un dispositif aussi important. Avis défavorable donc sur la proposition de rédaction de M. Le Bourgeois et de Mme Laporte.

Nous sommes en revanche d’accord avec l’idée que le rapport soit rendu public.

Nous sommes défavorables à la proposition de M. Dive, qui est contraire à l’équilibre global des lois Égalim. Dissocier le dispositif de promotion sur les produits alimentaires de celui sur les produits DPH bénéficierait également aux distributeurs.

Enfin, nous demandons une suspension pour examiner la proposition de rédaction de Mme Thomin et de M. Potier.

 

La réunion est suspendue de dix-sept heures dix à dix-sept heures quarante.

 

Proposition commune de rédaction n° 3 bis des rapporteurs

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. Au terme de nos échanges, nous avançons une proposition qui se décompose en quatre points. Le premier porte sur les sanctions, que pour notre part nous souhaitons ne pas revaloriser au-delà de de 0,1 % du chiffre d’affaires. Le second concerne les rapports, dont nous souhaitons préciser qu’ils « peuvent être rendus publics ».

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. Le troisième a trait aux MDD, qui pourront être concernées par le SRP + 10, et le quatrième porte sur les promotions applicables au secteur du DPH, qui pourront atteindre 40 % du prix, et ce jusqu’en 2028. Cette échéance sera un gage de stabilité et nous donnera surtout le temps nécessaire pour travailler à un nouveau texte : nous ne pouvons pas continuer à légiférer sans cesse dans l’urgence.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Je rappelle que le troisième point ne concernant pas l’article 1er, il ne pourra être abordé que dans le cadre de l’article 2. Il fera donc l’objet d’une proposition de rédaction spécifique.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Je remercie les rapporteurs du Sénat pour cette proposition. S’agissant de la revalorisation des sanctions encourues en cas de non-respect de l’obligation de publication des informations et de manquement à l’utilisation du SRP, je suggère de prévoir qu’elles pourront atteindre 0,4 % du chiffre d’affaires.

Je soutiens en revanche les propositions relatives à la publication des rapports et à l’intégration des MDD dans le dispositif du SRP + 10. Dans un esprit de compromis, je suis également favorable à ce que nous ramenions le taux de promotion maximal pour les produits du DPH à 40 % (contre 50 % dans la proposition de M. Dive), jusqu’en 2028.

M. Julien Dive, député. La version issue des travaux de l’Assemblée nationale prévoyait bien un encadrement des promotions sur le DPH prorogé jusqu’en 2028, avec un niveau maximal de 40 %. Il s’agissait là d’une avancée destinée à préserver les entreprises tout en redonnant du pouvoir d’achat à nos concitoyens. Il fallait répondre à cette aspiration de nos compatriotes, mais aussi tirer les conséquences du fait que l’encadrement des promotions a permis à des enseignes et à des centrales d’achat étrangères de tirer leur épingle du jeu en contournant le dispositif.

Dans sa version initiale, la proposition de loi prévoyait la fin pure et simple de l’encadrement des promotions sur le DPH. Chacun a donc fait un pas vers l’autre. Je soutiens la rédaction de compromis présentée par les rapporteurs du Sénat.

M. Boris Tavernier, député. Quel serait le niveau minimal des sanctions et comment seront-elles appréciées ?

Je regrette que nous ne progressions pas davantage en matière de transparence, alors même que cette exigence nous est fréquemment rappelée. En ce sens, peut-être aurait-il été judicieux de retenir la proposition de rédaction présentée par Mme Hignet.

Mme Mélanie Thomin, députée. Nous nous réjouissons des avancées proposées. Le groupe Socialistes et apparentés est particulièrement attaché à ce que le montant des sanctions puisse atteindre 0,4 % du chiffre d’affaires annuel, afin d’imposer réellement à la grande distribution le respect de la publication des marges liées au SRP + 10.

Nous devons également trouver un compromis entre l’intérêt des consommateurs et la défense de nos PME et de notre industrie. L’encadrement des promotions à hauteur de 40 % pour le secteur du DPH nous semble de nature à assurer cet équilibre tout en réintroduisant un peu de justice dans notre droit.

Je regrette simplement que nous manquions de temps et de stabilité pour pouvoir cheminer collectivement sur cette question. En tout état de cause, l’Assemblée nationale et le groupe Socialistes et apparentés ont fait plusieurs efforts pour rejoindre les positions du Sénat, en renonçant à la transparence des fournisseurs et en acceptant de proroger le dispositif jusqu’en 2028.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Quel que soit le plafond retenu, il reviendra à l’administration de déterminer le seuil de la sanction infligée, en fonction de la gravité de la faute et de l’importance du distributeur concerné – d’où ma volonté de porter le niveau maximal à 0,4 %.

Quant à la proposition de Mme Hignet, j’y vois un certain intérêt, mais nous devons avancer. D’autres outils nous permettront d’obtenir les éléments dont nous avons besoin, notamment à travers le rapport qui sera demandé par la ministre déléguée.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. Nous acceptons que l’amende puisse atteindre jusqu’à 0,4 % du chiffre d’affaires, à condition que les trois autres points présentés précédemment soient adoptés également.

M. Boris Tavernier, député. Peut-on imaginer prévoir un régime de sanctions compris entre 0,1 % et 0,4 % du chiffre d’affaires, pour s’assurer qu’un niveau plancher suffisamment élevé s’applique ?

Mme Mélanie Thomin, députée. Le rapport que la ministre Véronique Louwagie s’est engagée à demander à l’Inspection générale des finances est le fruit d’une proposition de mon collègue Dominique Potier, formulée lorsque le groupe socialiste s’est interrogé sur la meilleure construction possible du SRP + 10. Dans l’attente de la future loi Égalim 4, la ministre déléguée s’est par ailleurs engagée à ce que soit produit un rapport intermédiaire qui nous permettra de faire un point d’étape sur le respect du dispositif par la distribution et les industriels.

M. Robert Le Bourgeois, député. Pourquoi étendre l’application du SRP + 10 aux MDD ? Je n’en vois pas l’intérêt.

Mme Mathilde Hignet, députée. Je rejoins mon collègue Boris Tavernier sur la nécessité de fixer un niveau minimal de sanctions. Le terme « jusqu’à » est en effet tout à fait libre d’interprétation, tout comme l’alinéa disposant que les rapports « peuvent être » rendus publics : si des données peuvent être publiées, elles peuvent aussi ne pas l’être.

Les deux autres points ne me posent aucune difficulté.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. L’application du SRP + 10 aux MDD, qui revient aux dispositions adoptées à l’Assemblée nationale, est une concession de notre part.

Nous tenons à prévoir que les sanctions pourront atteindre 0,4 % du chiffre d’affaires au maximum, car il sera de la responsabilité du juge de pondérer la sanction en fonction des cas de figure.

De la même façon, la publication des données sera laissée à l’appréciation du ministre, qui s’assurera par exemple qu’elle ne remet pas en cause le secret des affaires. L’objectif est que nous puissions avancer dans notre réflexion et aboutir à une meilleure répartition des valeurs ajoutées sans pour autant dévoiler des informations qu’il ne serait pas forcément souhaitable de divulguer sur la place publique.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l’Assemblée nationale. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et le ministère peuvent demander que certaines informations soient rendues publiques, dans le respect du secret des affaires : en la matière, il faut faire preuve de discernement.

Quant au niveau de la sanction et même si nous ne fixons pas de plancher, par définition, dès lors qu’une sanction est prononcée, elle ne saurait être nulle. Il reviendra au juge d’en déterminer le niveau en fonction de l’infraction commise. Je remercie les sénateurs d’avoir accepté de porter le niveau maximal à 0,4 %. Chacun a fait des concessions et nous aurons l’occasion d’avancer ensemble en vue d’une loi Égalim 4.

J’entends la remarque de M. Le Bourgeois. Dès lors que le Rassemblement national est opposé au principe même du SRP, elle n’a rien de surprenant.

 

La proposition de rédaction n° 3 bis est adoptée, les autres propositions de rédaction tombent et l’article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

 

 

Article 1er bis

 

Proposition commune des rapporteurs tendant à la suppression de l’article, proposition de rédaction n° 4 de Mme Mathilde Hignet

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Mme Hignet souhaite revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale, issue d’un amendement qui, voté en séance publique à l’initiative de notre ancien collègue André Chassaigne, concerne l’encadrement des marges. Nous proposons de retenir plutôt la suppression de cet article en suivant ici la position du Sénat.

Mme Mathilde Hignet, députée. L’amendement que l’Assemblée avait adopté était important, car il garantissait un prix rémunérateur au producteur et, ainsi, une cohérence à la chaîne de production. Il était cher au cœur de notre ancien collègue.

Comme l’explosion des marges n’a pas bénéficié aux producteurs, il est opportun de déployer des coefficients multiplicateurs, instrument à même d’accroître leur rémunération.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. Nous avons déjà exprimé notre opposition à cette mesure.

M. Julien Brugerolles, député. Je vais bien entendu défendre la proposition de rédaction de Mme Hignet. L’adoption de l’amendement d’André Chassaigne correspondait à l’accomplissement d’un pas de géant. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) se bat depuis 1986, date de la suppression du coefficient multiplicateur, pour la réintroduction de ce mécanisme. Le simple approfondissement du droit commercial ne réglera pas la question de la répartition de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne de production. Les dispositions dont nous débattons aujourd’hui, comme le SRP + 10, sont très limitées.

Les objections aux coefficients multiplicateurs sont toujours les mêmes : cette mesure serait complexe et relèverait de l’économie administrée. Néanmoins, si nous voulons faire évoluer la répartition de la valeur ajoutée au bénéfice des producteurs, il est indispensable de déployer des instruments coercitifs et puissants.

La proposition commune des rapporteurs tendant à supprimer l’article 1er bis est adoptée.

En conséquence, l’article 1er bis est supprimé.

 

 

Article 2

 

Proposition commune de rédaction n° 6 des rapporteurs, proposition de rédaction n° 5 de Mme Mélanie Thomin et de M. Dominique Potier

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Notre proposition de rédaction concerne l’intégration des MDD dans le dispositif du SRP + 10 et la sanction encourue par un distributeur qui ne respecterait pas l’obligation de remettre, chaque année, un document décrivant l’utilisation qu’il a faite du surplus de marge ainsi généré. Nous souhaitons que l’amende frappant le distributeur s’établisse à 0,4 % de son chiffre d’affaires annuel hors taxes, afin d’aligner l’ensemble des sanctions sur ce taux.

Mme Mélanie Thomin, députée. Notre proposition de rédaction vise à établir le montant des sanctions frappant les distributeurs ne jouant pas le jeu du dispositif à 0,6 % du chiffre d’affaires annuel, mais je rejoins le souhait exprimé par les rapporteurs d’aligner l’ensemble des sanctions sur le taux de 0,4 %. Je retire donc notre proposition de rédaction au profit de celle des rapporteurs.

La proposition de rédaction n° 5 est retirée.

La proposition commune de rédaction des rapporteurs est adoptée.

 

L’article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

 

Mme Mathilde Hignet, députée. Le groupe La France insoumise ne soutiendra pas le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Nous tenions aux coefficients multiplicateurs et à l’encadrement des marges. La version de l’Assemblée nationale était plus ambitieuse. Notre objectif étant de garantir aux producteurs des prix rémunérateurs, la suppression du rétablissement des coefficients multiplicateurs est à nos yeux une ligne rouge. Enfin, la transmission des données et les sanctions nous posent question.

 

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l’ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire.

 

*

*     *

 

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. Si nos deux assemblées adoptent le texte sur lequel nous venons de nous mettre d’accord, nous gagnerons de la stabilité et nous pourrons travailler sereinement à l’élaboration du projet de loi Égalim 4. L’expérience nous enseigne qu’il est nécessaire de consacrer du temps à ces sujets complexes.

N’oublions pas que le cadre législatif des lois Égalim s’inscrit dans un contexte européen : nous devons veiller à ne pas fragiliser nos agriculteurs par rapport à leurs concurrents du continent. L’Allemagne ne s’est pas dotée d’un dispositif comparable à Égalim et le prix moyen des 1 000 litres de lait y est supérieur au prix français de près de 50 euros.

Je me réjouis que nous ayons choisi la lisibilité au détriment des rendez-vous annuels, pratique en vogue mais éloignée de tout travail sérieux. L’accord auquel nous sommes parvenus n’était pas écrit d’avance et nous avons tous cheminé pour atteindre stabilité et lisibilité. C’était essentiel pour le monde économique, les consommateurs et les agriculteurs.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. Je salue la recherche d’équilibre qui nous a animés. L’ensemble des acteurs et des filières pourront se projeter dans la durée. Les lois Égalim forment le point d’arrivée d’un long parcours semé d’obstacles : nous y revenons régulièrement, dans le souci de parfaire les dispositifs tout en conservant leur simplicité et leur adaptabilité, triple objectif qu’il n’est pas toujours aisé d’atteindre.

Le prochain rendez-vous sera l’établissement du cahier des charges en vue du rapport pour lequel Mme la ministre déléguée s’est engagée à nous solliciter. Égalim est un grand Meccano qui nous oblige à toujours penser aux conséquences qu’une mesure pour l’aval aura sur l’amont et réciproquement. Le texte porte sur l’aval, mais nous devons toujours réfléchir à la complémentarité des dispositifs si nous voulons en assurer l’efficacité.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Je ne suis pas un adepte des consensus « mous », parce qu’ils n’apportent rien. Nous avons besoin de dispositifs vertébrés et nous sommes parvenus, grâce à l’action de tous, à un compromis de bonne facture.

Je m’engage à saisir la ministre déléguée pour obtenir le maximum d’informations utiles à l’élaboration d’un Egalim 4. Nous avons besoin de temps : je travaille sur ces sujets depuis 2016 et la loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « Sapin 2 », dont on a beaucoup entendu parler dernièrement… Fixer le délai à 2028 nous permettra de réfléchir de manière approfondie aux dispositifs à déployer : il est nécessaire de travailler pour l’amont tout en contrôlant l’aval. L’objectif d’Egalim était bien la répartition de la valeur tout au long de la chaîne.

N’oublions pas que, derrière les fonctions de production, de transformation et de distribution, il y a des emplois. Ceux-ci contribuent à l’aménagement du territoire et à la compétitivité de l’économie. La compétitivité n’est pas un « gros mot » pour les territoires dans lesquels nous sommes élus et nous vivons.

J’espère que la stabilité promue par ce texte recueillera l’agrément de l’Assemblée nationale et du Sénat, afin que nous puissions avoir du temps pour avancer sur les sujets relatifs aux filières. La filière laitière peut s’enorgueillir de bénéficier du dispositif Egalim : il me semble que d’autres filières devraient y entrer à leur tour. Nous devons nous pencher sur l’agriculture biologique, qui traverse une crise sans précédent : dans cette optique, il existe des outils que nous pouvons actionner. Il est nécessaire de contraindre davantage les distributeurs sur les données qu’ils doivent transmettre : les marges doivent être contrôlées et le régime de sanctions appliqué.

 

En conséquence, la commission mixte paritaire vous demande d’adopter la proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

*

*     *

 

 


—  1 

   TABLEAU COMPARATIF

___
__


 


 

Texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture
 

Texte adopté par le Sénat en première lecture
 


 

 

      

      

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire

Proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire

 

 

Article 1er

Article 1er

 

I. – L’article 125 de la loi n° 2020‑1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique est ainsi modifié :

I. – L’article 125 de la loi n° 2020‑1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi modifié :

1° et 2° (Supprimés)

a) À la fin du A, les mots : « produits de grande consommation au sens du I de l’article L. 4414 du code de commerce » sont remplacés par les mots : « denrées alimentaires ou de produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie » ;

 

 

a bis) (nouveau) Le B est complété par un alinéa ainsi rédigé :

 

 

« Par dérogation au premier alinéa du présent B, jusqu’au 15 avril 2028, les avantages promotionnels, le cas échéant cumulés, pour les produits de grande consommation définis par décret, hormis les denrées alimentaires ou les produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie, accordés au consommateur pour un produit déterminé ne sont pas supérieurs à 40 % du prix de vente au consommateur ou à une augmentation équivalente de la quantité vendue. » ;

 

 

b) Au 2° du C, les mots : « produits de grande consommation » sont remplacés par les mots : « denrées alimentaires ou de produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie » ;

 

 

 Le III est ainsi modifié :

 

 

a) Au premier alinéa, les mots : « produits de grande consommation pour lesquels » sont remplacés par les mots : « denrées ou des catégories de denrées alimentaires pour lesquelles » ;

 

 

b) Au 1°, les mots : « produits de grande consommation concernés » sont remplacés par les mots : « denrées ou des catégories de denrées alimentaires concernées » ;

 

 



c) Au début de la seconde phrase du 2°, les mots : « Pour les denrées ou les catégories de denrées alimentaires, » sont supprimés ;

 

 



2° bis (nouveau) La première phrase du premier alinéa du IV est complétée par les mots : « , sur la base des documents mentionnés au présent IV et aux IV bis et IV ter » ;

2° bis La première phrase du premier alinéa du IV est complétée par les mots : « , notamment sur la base des documents mentionnés au IV bis » ;

Amdt n° 25



2° ter (nouveau) Le IV bis est ainsi modifié :

2° ter Le IV bis est ainsi modifié :



aa) La première phrase est complétée par les mots : « ainsi que son taux de marge brut et son taux de marge brut spécifiquement sur les produits biologiques, au sens de l’article L. 64113 du code rural et de la pêche maritime » ;

aa) (Supprimé)



a) Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il répond à toute demande de précisions des ministres dans un délai de quinze jours. » ;

a) Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il répond à toute demande de précisions des ministres dans un délai de quinze jours. » ;



b) À la fin de la seconde phrase, les mots : « , qui ne peut être rendu public » sont supprimés ;

b) (Supprimé)



c) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

c) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :



« Le fait, pour un distributeur, de ne pas transmettre le document mentionné au premier alinéa du présent IV bis ou de ne pas répondre à une demande de précisions des ministres chargés de l’économie ou de l’agriculture est puni d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 1 % de son chiffre d’affaires annuel hors taxes lorsque celuici est inférieur à 350 millions d’euros au cours du dernier exercice clos ou lorsque le distributeur appartient à un groupe dont le chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos est inférieur à 350 millions d’euros et 4 % de son chiffre d’affaires annuel hors taxes lorsque celuici est supérieur à 350 millions d’euros au cours du dernier exercice clos ou lorsque le distributeur appartient à un groupe dont le chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos est supérieur à 350 millions d’euros.

« Le fait, pour un distributeur, de ne pas transmettre le document mentionné au premier alinéa du présent IV bis ou de ne pas répondre à une demande de précisions des ministres chargés de l’économie ou de l’agriculture est puni d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 100 000 € pour une personne physique et 500 000 € pour une personne morale.



« Les agents mentionnés au II de l’article L. 450‑1 du code de commerce sont habilités à rechercher et à constater les manquements au présent IV bis dans les conditions prévues au livre IV du code de commerce. Il peut être fait application de l’article L. 470‑1 du même code à partir des constatations effectuées.

« Les agents mentionnés au II de l’article L. 450‑1 du code de commerce sont habilités à rechercher et à constater les manquements au présent IV bis dans les conditions prévues au livre IV du code de commerce. Il peut être fait application de l’article L. 470‑1 du même code à partir des constatations effectuées.





« L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 470‑2 dudit code. Le maximum de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision est devenue définitive. » ;

« L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 470‑2 dudit code. Le maximum de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision est devenue définitive. » ;





2° quater (nouveau) Après le même IV bis, sont insérés des IV ter A et IV ter ainsi rédigés :

2° quater (Supprimé)





« IV ter A.  Dans les conditions déterminées à l’article L. 6821 du code rural et de la pêche maritime, l’Observatoire de la formation des prix et des marges alimentaires publie trimestriellement les niveaux de marges brutes et de marges nettes réalisées individuellement par chaque entreprise fournisseur et distributeur de produits de grande consommation ayant un chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé en France supérieur ou égal à 350 millions d’euros.

 

 



« Les fournisseurs et les distributeurs de produits de grande consommation réalisant en France un chiffre d’affaires annuel hors taxes supérieur ou égal à 350 millions d’euros sont tenus de transmettre chaque année leurs niveaux de marges nettes et brutes à l’Observatoire de la formation des prix et des marges. En cas de nonrespect de cette obligation de transmission, l’entreprise encourt une amende qui ne peut excéder 1 % de son chiffre d’affaires annuel, calculé sur la base des trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits.

 

 



« IV ter.  Chaque fournisseur de produits de grande consommation dont le chiffre d’affaires annuel hors taxes est supérieur à 350 millions d’euros au cours du dernier exercice clos ou qui appartient à un groupe dont le chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos est supérieur à 350 millions d’euros transmet aux ministres chargés de l’économie et de l’agriculture, avant le 1er septembre de chaque année, un document présentant la part du prix convenu avec les distributeurs de ses produits qu’il estime avoir obtenue du fait de l’application des I et II du présent article. Ce document présente également la part de la revalorisation des prix d’achat des produits alimentaires et des produits agricoles qui entrent dans la composition de ces produits convenue avec les producteurs du fait de l’application des mêmes I et II. Ce document présente enfin son taux de marge brute. Le fournisseur répond à toute demande de précisions des ministres dans un délai de quinze jours. Le Gouvernement transmet ce document aux présidents des commissions chargées des affaires économiques de l’Assemblée nationale et du Sénat.

 

 



« Le fait, pour un fournisseur, de ne pas transmettre le document mentionné au premier alinéa du présent IV ter ou de ne pas répondre à une demande de précisions des ministres chargés de l’économie ou de l’agriculture est puni d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 1 % de son chiffre d’affaires annuel hors taxes lorsque celuici est inférieur à 350 millions d’euros au cours du dernier exercice clos ou lorsque le fournisseur appartient à un groupe dont le chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos est inférieur à 350 millions d’euros et 4 % de son chiffre d’affaires annuel hors taxes lorsque celuici est supérieur à 350 millions d’euros au cours du dernier exercice clos ou lorsque le fournisseur appartient à un groupe dont le chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos est supérieur à 350 millions d’euros.

 

 



« Les agents mentionnés au II de l’article L. 4501 du code de commerce sont habilités à rechercher et à constater les manquements au présent IV ter dans les conditions prévues au livre IV du code de commerce. Il peut être fait application de l’article L. 4701 du même code à partir des constatations effectuées.

 

 



« L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 4702 dudit code. Le maximum de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision est devenue définitive. » ;

 

 



3° Le VIII est ainsi rédigé :

3° Le VIII est ainsi rédigé :





« VIII. – Les I, II et IV sont applicables jusqu’au 15 avril 2026. »

« VIII. – Les I, II et IV sont applicables jusqu’au 15 avril 2028. »





II. – Le 1° du I du présent article entre en vigueur le 1er juillet 2025.

II. – (Supprimé)



 

Article 1er bis (nouveau)

Article 1er bis

(Supprimé)

 

Après l’article L. 4102 du code de commerce, il est inséré un article L. 41021 ainsi rédigé :

 

 

« Art. L. 41021.  Par dérogation aux articles L. 4201 et L. 4202, les ministres chargés de l’agriculture et de l’économie définissent chaque année, après consultation et avis des conférences publiques de filière :

 

 

«  Un coefficient multiplicateur maximal entre le niveau minimal de prix d’achat et le prix de revente des produits agricoles ou des produits alimentaires comportant un ou plusieurs produits agricoles.

 

 

« Il ne peut être supérieur au taux de marge recommandé par filière, défini par l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Ce taux assure la couverture des coûts de transformation des entreprises dans le secteur d’activité considéré.

 

 

« Il s’applique aux contrats mentionnés à l’article L. 63124 du code rural et de la pêche maritime, aux acteurs mentionnés à l’article L. 631241 du même code et aux entreprises dont le chiffre d’affaires hors taxes, le cas échéant consolidé ou combiné en application de l’article L. 23316 du présent code, réalisé au cours du dernier exercice clos est supérieur ou égal à 350 millions d’euros ;

 

 

«  Un coefficient multiplicateur maximal par filière entre le prix des fournisseurs de produits agricoles ou des produits alimentaires comportant un ou plusieurs produits agricoles et le prix de vente final des denrées alimentaires ou des produits agricoles vendus dans le commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire. Le présent 2° n’est pas applicable aux entreprises dont le chiffre d’affaires annuel ou le total de bilan réalisé au cours du dernier exercice clos est inférieur à deux millions d’euros ou qui emploient moins de dix salariés.

 

 

« Tout manquement au présent article est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale.

 

 

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article et les sanctions applicables en cas de méconnaissance de ses dispositions. »

 

 

 

Article 2 (nouveau)

Article 2

 

L’article L. 4425 du code de commerce est ainsi modifié :

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase du I, les mots : « de 75 000 € d’amende » sont remplacés par les mots : « d’une amende ne pouvant excéder 1 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos » ;

1° L’article L. 4425 est ainsi modifié :

 

 

a) À la fin de la première phrase du I, les mots : « de 75 000 € d’amende » sont remplacés par les mots : « d’une amende ne pouvant excéder 100 000 € pour une personne physique et 500 000 € pour une personne morale » ;

Amdt n° 26

 

 

b) (Supprimé)

2° Il est ajouté un IV ainsi rédigé :

2° (nouveau) La trentequatrième ligne du tableau du second alinéa du 4° du I de l’article L. 9501 est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

Amdt n° 27

 

 

«

L. 442-4

l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019

 

 

L. 442-5

la loi n°    du      visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire

 

 

L. 442-6

l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019

»

 

Amdt n° 27

 

« IV.  Le I du présent article est applicable aux produits vendus sous marque de distributeur acquis dans les conditions prévues à l’article L. 4417. »

 

 

 

 

 

 

 

………………………………………………………………………………………………….