N° 2696

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 mai 2024.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

En application de l’article 145-7 du Règlement

PAR LA MISSION D’INFORMATION
sur l’évaluation de l’impact de la loi n° 2020105 du 10 février 2020
relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

ET PRÉSENTÉ PAR

 

Mme Véronique RIOTTON et M. Stéphane DELAUTRETTE,

Corapporteurs,
Députés

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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

Évaluation des objectifs de la loi Agec

Synthèse des propositions

Première Partie : Mieux consommer : responsabiliser le consommateur, favoriser le réemploi et la réutilisation, limiter le gaspillage des ressources

I. Un consommateur mieux informé et incité à privilégier des achats durables

A. Une meilleure information sur les qualités environnementales des produits

1. La mention des caractéristiques environnementales des produits, une avancée dans la lutte contre le greenwashing

2. L’expérimentation de l’affichage environnemental : une méthode et des résultats encourageants

a. Des expérimentations encourageantes dans les secteurs de l’alimentation et du textile

b. Une méthodologie de calcul reposant principalement sur l’analyse du cycle de vie

c. Vers une évolution des produits et des choix de consommation ?

3. Des campagnes de communication en faveur de modes de consommation plus responsables à renforcer

B. Des incitations en faveur de l’allongement de la durée de vie des produits

1. Les indices de réparabilité et de durabilité influencent les décisions d’achat

a. Un premier bilan encourageant

i. Impact de l’indice de réparabilité sur les pratiques des fabricants et des distributeurs

ii. Impact de l’indice de réparabilité sur les choix des consommateurs

b. Des demandes entendues en faveur de davantage de transparence et de discrimination entre les produits

i. Des modalités de calcul de l’indice jugées trop peu discriminantes, améliorées dans le cadre de la mise en place de l’indice de durabilité

ii. Une transparence à améliorer

iii. Des contrôles à renforcer

c. L’abandon de l’indice de durabilité des smartphones, un recul important au profit de dispositions européennes moins ambitieuses

2. Après un démarrage décevant, le « bonus réparation » a fait l’objet d’ajustements

a. Le déploiement décevant du bonus réparation

b. Une réforme des fonds réparation en 2024 afin de remédier aux principaux écueils du dispositif

i. Améliorer la communication et l’information des consommateurs

ii. Rendre le dispositif plus attractif pour les consommateurs

iii. Renforcer le maillage territorial et le nombre de réparateurs agréés

iv. Renforcer les contrôles pour éviter les effets d’aubaine

II. Les débuts timides de la transition du « tout jetable » vers le réemploi et la réutilisation

A. Vers une réduction des emballages et des produits en plastique à usage unique

1. La limitation de la mise sur le marché de produits ou d’emballages en plastique à usage unique

2. Des dispositions partiellement appliquées

a. L’interdiction de la vaisselle jetable dans la restauration

i. Une mesure encore peu appliquée

ii. Une mesure préservée par le règlement européen « Emballages »

b. L’interdiction de la vente de fruits et légumes sous emballage plastique

c. Les autres dispositions soulevant des difficultés d’application

i. L’interdiction d’apposer des étiquettes non compostables sur les fruits et légumes

ii. La mise à disposition de fontaines à eau dans les établissements recevant du public

iii. L’interdiction des contenants alimentaires de cuisson, de réchauffage et de service en plastique dans les services médicaux et paramédicaux

d. Un changement de modèle économique difficile à opérer

e. Des contrôles à renforcer

3. Le ralentissement du développement de la vente de produits en vrac

B. Le développement du réemploi suppose un changement de paradigme qui peine à émerger

1. Les premiers objectifs de réemploi ne devraient pas être atteints

a. Les objectifs de réemploi prévus par la loi Agec

b. Des objectifs dont on constatera qu’ils n’ont pas été atteints en 2023

2. L’essor du réemploi se heurte à plusieurs difficultés

a. Un prisme accordé au recyclage au détriment du réemploi

b. Des initiatives qui restent locales ou à un stade expérimental

c. Un gisement de produits et des infrastructures encore insuffisants

3. La massification du réemploi suppose d’agir sur différents leviers

a. Disposer de données fiables et actualisées sur le réemploi et ses possibilités de développement

b. Développer des infrastructures et une logistique adaptées sur les territoires

c. Mettre en place une instance de coordination et de pilotage du réemploi

d. Rehausser les objectifs et le financement du réemploi

C. La poursuite de la lutte contre le gaspillage et l’essor du don

1. Les objectifs de réduction de moitié du gaspillage alimentaire

2. Le label anti-gaspillage, un nouvel outil pour le secteur de la distribution

3. La délivrance de médicaments à l’unité est peu pratiquée

4. Le don de produits non alimentaires invendus se développe

a. Des dons en augmentation depuis la loi Agec

b. Le don de matériels médicaux est mieux encadré

Deuxième Partie : Mieux produire : limiter la production de déchets et intégrer les impacts environnementaux de la fin de vie d’un produit dès sa conception

I. Le déploiement des filières REP, axe majeur de la loi Agec, est engagé

A. La mise en place complexe des nombreuses filières REP

1. Une mise en place retardée de la filière REP « bâtiment »

a. Un volume de déchets particulièrement important à collecter et un faible taux de collecte observé

b. Un maillage des points de reprise qui se déploie rapidement, mais avec des disparités

c. Une reprise sans frais des déchets encore en expérimentation

d. Le rôle de l’organisme coordonnateur peut être élargi pour simplifier les démarches des différents acteurs

2. Les filières REP dédiées au réemploi, à la réutilisation ou au recyclage montent en puissance progressivement

a. Les filières des articles de sport et de loisirs, des articles de bricolage et de jardin, et des jouets, créées concomitamment visent le réemploi et la réutilisation

b. La filière REP des « huiles et lubrifiants », s’appuyant sur une filière préexistante, fonctionne

c. Les filières REP « engins de pêche » et « aides techniques » encore au stade de l’étude de préfiguration

3. Les filières REP dédiées au nettoyage et au traitement de déchets font leur apparition

a. La filière REP des produits du tabac, première filière dédiée au nettoyage

b. Les filières REP des textiles sanitaires et gommes à mâcher ne sont pas encore mises en place

4. Certaines filières REP préexistantes, dont le périmètre a été étendu par la loi Agec, font face à des retards de mise en place

a. La filière REP des véhicules est propice aux systèmes individuels

b. La filière REP des emballages professionnels et de restauration n’est pas encore mise en place

B. Une gouvernance et un mode de fonctionnement remis en question

1. Une gouvernance à repenser

a. Les metteurs sur le marché, uniques décideurs ?

b. La Commission inter-filières REP (Cifrep), instance indispensable à la concertation de toutes les parties prenantes, est saturée

c. Vers une nouvelle gouvernance inter-filière REP, et au sein des filières REP

2. La multiplicité des filières REP, et des éco-organismes ou systèmes individuels au sein d’une filière REP, complexifie leur mise en place

a. L’augmentation du nombre de filières REP ne doit pas accroître la complexité des démarches pour les producteurs et les places de marché

i. Une identification laborieuse des filières REP et des éco-organismes par les producteurs

ii. Une mutualisation de l’adhésion aux éco-organismes et des déclarations de mises sur le marché

iii. Les difficultés rencontrées par les places de marché et la vente à distance

b. Une concurrence s’installe entre éco-organismes, et systèmes individuels, agréés pour une même filière REP

c. Des synergies sont possibles pour les éco-organismes agréés pour différentes filières REP

C. Un suivi et un contrôle des filières REP qui restent à renforcer

1. La direction de supervision des filières REP de l’Ademe permet d’obtenir et de fiabiliser les données de suivi

2. Les contrôles et mises en œuvre des sanctions sont insuffisants

a. Des sanctions peu appliquées

b. Des moyens humains insuffisants

c. Un accompagnement indispensable des éco-organismes dans la lutte contre les « passagers clandestins »

II. L’écoconception, premier levier à l’origine d’une transformation des modes de production, s’enracine chez les producteurs

A. Les plans quinquennaux d’écoconception, outils nécessaires à la prise de conscience environnementale des producteurs

1. Des plans d’écoconception pas toujours transmis, avec des contenus hétéroclites

2. Un accompagnement spécifique dans la rédaction des plans d’écoconception du secteur des emballages

B. La mise sur le marché de produits plus respectueux de l’environnement est encouragée via un système de bonus-malus

1. La définition d’éco-modulations incitatives, un enjeu pour l’écoconception

2. Des risques de fraudes et de distorsions de concurrence

C. La lutte contre l’obsolescence programmée reste difficile à mesurer

1. Les pratiques empêchant la réparabilité ou le reconditionnement d’un produit existent encore malgré leur interdiction

2. L’obligation de la disponibilité des pièces détachées n’est pas toujours respectée

3. L’obsolescence logicielle, difficile à identifier

III. Massifier et diversifier les débouchés des biens issus de l’économie circulaire reste indispensable pour assurer leur développement

A. L’incorporation de matières recyclées doit être assurée et rester compétitive par rapport à la matière première vierge

1. Une incorporation prévue par la réglementation pour les bouteilles plastiques, et favorisée par l’éco-modulation des éco-contributions

2. La matière première issue du recyclage subit la concurrence des matières premières vierges

B. L’achat public doit être exemplaire

1. La part minimale des achats publics devant être issue de l’économie circulaire, un levier puissant sur l’offre

2. Le don et la réparabilité sont désormais pris en compte dans les marchés publics

3. Pour répondre aux enjeux de l’économie circulaire, l’achat local dispose de peu de marge de manœuvre dans la commande publique

4. La formation des fonctionnaires et des élus doit continuer et s’accentuer

C. La transition attendue vers une économie de la fonctionnalité peine à s’engager

Troisième Partie : Mieux trier, collecter et valoriser les déchets

I. Le tri à la source, étape indispensable pour massifier les gisements de déchets à valoriser, est encore balbutiant

A. Les logos « Tri-man » et « info-tri » déployés, mais remis en cause au niveau européen

B. L’accessibilité aux poubelles de tri reste un enjeu majeur sur le territoire

1. Une harmonisation des modalités de tri et de collecte sur le territoire majoritairement effective

2. Les débuts timides du déploiement du tri hors foyer

C. Le tri des biodéchets se heurte à de nombreux freins

1. Un déploiement progressif, présentant encore des disparités sur le territoire

2. Des freins réglementaires, financiers et sociaux restent présents

II. Les objectifs de la loi Agec ne pourront pas être atteints sans une amélioration des performances de collecte des produits en fin de vie

A. La consigne pour recyclage : un dispositif clivant

1. L’atteinte des objectifs de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique sera difficile, avec ou sans consigne

a. Le scénario sans consigne pour recyclage

b. Le scénario avec consigne pour recyclage

c. Un coût deux fois plus élevé

2. Le choix de ne pas généraliser, dans l’immédiat, la consigne pour recyclage en France

a. En l’absence de consensus, l’absence de mise en place, à ce jour, de la consigne pour recyclage

b. Le développement d’une logique de performance

c. Le nécessaire déploiement de la tarification incitative

B. Les charges des collectivités consacrées à la collecte ne sont pas totalement couvertes par les écocontributions des filières REP

C. Les dépôts sauvages sont mieux pris en charge, mais leur réduction se heurte à des difficultés

1. La mise en place des filières REP a encore peu d’impact sur la réduction des dépôts sauvages

a. La prise en charge de la résorption des dépôts sauvages par les éco-organismes reste peu applicable

b. La reprise gratuite par les filières REP n’a pour l’instant que peu d’effets sur les dépôts sauvages

c. Le soutien des éco-organismes à la prévention dans la lutte contre les dépôts sauvages

2. Un accueil positif du renforcement des pouvoirs du maire et des sanctions

III. En l’absence de possibilités de réemploi ou de réutilisation, La valorisation des déchets doit être privilégiée

A. La mise en décharge des déchets diminue

B. La filière du recyclage du plastique fait face à des difficultés et mise sur de nouvelles technologies

1. La collecte, frein majeur pour tendre vers l’objectif de 100 % plastique recyclé

2. Le recyclage des plastiques reste fortement dépendant de l’écoconception et de la demande en matières premières issues du recyclage

3. Face à des freins techniques, de nouvelles technologies se mettent en place…

4. … et font l’objet d’un accompagnement de l’État

C. La valorisation des déchets organiques, un chantier encore en construction

1. La réglementation liée à la valorisation des boues d’épuration crée des frustrations

a. La révision du référentiel d’usage au sol des boues d’épuration fait l’objet d’oppositions fortes

b. La définition des conditions de compostage des boues d’épuration crée des incertitudes

c. L’interdiction d’importation des boues d’épuration remise en cause au niveau européen

2. Les biodéchets peinent à trouver une voie de valorisation stabilisée

a. Les débouchés pour la valorisation des biodéchets restent insuffisants

b. Les restrictions sur le tri mécano-biologique ne font pas consensus

EXAMEN EN COMMISSION

Liste des personnes auditionnées

Liste des contributions Écrites

 

 


   Introduction

  1.   Une loi ambitieuse de transformation de l’économie linéaire en économie circulaire

La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite « loi Agec », vise à transformer notre modèle de production et de consommation en un modèle circulaire, efficient et respectueux de l’environnement. Il ne s’agit plus de produire, consommer et jeter, mais de limiter au maximum la production de déchets, tout en favorisant le réemploi et la réutilisation, ou le recyclage, afin de préserver les ressources naturelles et réduire l’impact environnemental de la gestion des déchets.

La loi Agec, constituée de 130 articles, propose de nombreuses mesures permettant d’engager la transition vers l’économie circulaire, réparties en cinq axes majeurs : mieux produire, mieux informer les consommateurs, sortir du plastique jetable, lutter contre le gaspillage et pour le réemploi, et agir contre l’obsolescence programmée.

Cette loi renforce considérablement la responsabilité des producteurs, en mettant en place de nouvelles filières à responsabilité élargie du producteur (REP) pour plusieurs catégories de produits, notamment les déchets du secteur du bâtiment, ou en étendant certaines filières REP existantes. La prise en compte de la fin de vie des produits par les producteurs est l’un des éléments clés de l’économie circulaire. L’écoconception constitue donc un enjeu majeur, au travers des plans quinquennaux d’écoconception et d’un système de bonus-malus, pour encourager l’utilisation de produits plus vertueux sur le plan environnemental et faciliter leur réemploi, leur réutilisation ou leur recyclage. La lutte contre l’obsolescence programmée contribue également à allonger la durée de vie des produits en améliorant leur réparabilité, notamment grâce à la disponibilité des pièces détachées et à la possibilité de mises à jour logicielles.

Cette transformation écologique nécessite d’initier un changement de comportement des consommateurs afin de les responsabiliser davantage. À cette fin, la loi Agec propose des mesures visant à apporter une meilleure information aux consommateurs sur les qualités environnementales des produits, grâce à l’affichage environnemental, sur leur caractère réparable et leur solidité au travers des indices de réparabilité et de durabilité, ou sur les règles de tri applicables.

Si de telles informations incitent les consommateurs à privilégier des achats plus durables, elles poussent également les fabricants à mettre sur le marché des produits plus vertueux sur le plan environnemental. Car la mise en place d’une économie circulaire, d’une transition du « tout jetable » vers le réemploi et la réutilisation supposent aussi et avant tout d’impliquer les industriels. Des fonds dédiés à la réparation (« bonus réparation ») et au réemploi et à la réutilisation sont créés au sein des filières REP, le fonds dédié au réemploi visant à soutenir plus particulièrement les acteurs de l’économie sociale et solidaire. L’un des leviers principaux considéré pour enclencher cette transition vers l’économie circulaire est la commande publique, qui permet le développement de nouvelles offres de biens issus du réemploi et de la réutilisation, ou du recyclage.

Pour lutter contre la pollution des plastiques, souvent abandonnés dans la nature et les océans, la loi Agec instaure un objectif ambitieux de fin de mise sur le marché des emballages en plastique à usage unique d’ici 2040. Parallèlement, elle prévoit une réduction de l’utilisation du plastique au quotidien, par un certain nombre de mesures d’interdiction de plastiques à usage unique, par le déploiement de la vente de produits en vrac et par l’étude d’une éventuelle mise en place d’une consigne pour recyclage ou réemploi. Elle apporte en sus des outils à destination des collectivités territoriales pour lutter contre les dépôts sauvages et les pollutions associées. Cette loi porte également diverses mesures de lutte contre le gaspillage de produits, qu’ils soient alimentaires ou non : elle limite l’élimination des invendus non-alimentaires, tout en encourageant le don en faveur d’associations et des structures de l’économie sociale et solidaire, et renforce la lutte contre le gaspillage alimentaire en rehaussant ses objectifs.

Depuis sa promulgation en 2020, d’autres lois sont venues poursuivre les ambitions de la loi Agec. Ainsi, la loi « climat et résilience » ([1]) complète la loi Agec sur diverses thématiques, telles que l’affichage environnemental, la vente en vrac, la commande publique, ou l’utilisation de pièces détachées. Elle reporte aussi des échéances programmées initialement dans la loi Agec, notamment pour la mise en place de l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation ou de la filière REP des emballages de restauration. D’autres lois contribuent par ailleurs au panorama législatif actuel de l’économie circulaire, et plus particulièrement la loi « Reen » ([2]) s’attachant au sujet de l’obsolescence programmée, et la loi « industrie verte » ([3]), sur la prise en compte des enjeux environnementaux de la commande publique ou le rehaussement des sanctions en cas de déchets abandonnés.

Quatre ans après la promulgation de la loi Agec, le présent rapport d’évaluation dresse le bilan de sa mise en œuvre et notamment de ses conséquences environnementales, économiques, financières ou sociales, à la fois pour les industriels, les consommateurs et les collectivités territoriales.

Comme en témoignent les nombreuses auditions menées par les rapporteurs, cette loi est globalement saluée par les différents acteurs, qu’il s’agisse des consommateurs, des industriels ou des collectivités territoriales. Bien que complétée depuis par d’autres dispositions législatives, elle reste structurante et a permis de mettre la France sur la voie d’un changement de paradigme en faveur de l’économie circulaire. On assiste ainsi depuis 2020 aux prémices de nouveaux modes de consommation et de production durables.

Pour autant, force est de constater que plusieurs dispositions de la loi sont peu appliquées, voire pas du tout appliquées, ne font pas l’objet de mesures de suivi ou de contrôle, ou se heurtent à divers blocages, que ce soit à l’échelle locale, nationale ou européenne. La loi Agec, souvent considérée comme « ambitieuse » et « pionnière », a créé de grandes attentes chez l’ensemble des acteurs français de l’économie circulaire. Elle doit pourtant encore faire ses preuves. Le rapport d’évaluation formule ainsi des recommandations pour rendre la loi Agec plus effective dans la transformation de notre société vers un modèle d’économie circulaire.

  1.   Des données encore parcellaires pour évaluer la mise en œuvre de la loi

Afin d’évaluer les impacts de la loi Agec, par une vérification de l’atteinte des objectifs ou par l’identification des tendances qui se dessinent, il est primordial de disposer des données relatives à l’économie circulaire depuis la promulgation de la loi en 2020.

Cependant, obtenir des données fiables, les analyser et les publier suppose un décalage d’accès à ces données de quelques années. Le retard de mise en place de nombreuses dispositions de la loi, couplé à des échéances échelonnées sur plusieurs années, décalent d’autant plus la disponibilité des données recherchées. Les dernières données transmises par l’administration ou par l’Agence de la transition écologique (Ademe) concernent ainsi l’année 2020 sur les déchets, et l’année 2021 sur les filières REP. Les données à disposition de la mission d’évaluation ne permettent donc pas toujours d’obtenir le recul nécessaire pour confirmer l’atteinte des objectifs ou mesurer l’impact des dispositions mises en œuvre dans le cadre de la loi Agec. Celle-ci contribue toutefois incontestablement à accélérer et améliorer la surveillance et la collecte des données relatives à l’économie circulaire, ainsi que leur fiabilité, notamment au travers des données récoltées par l’Ademe.

Outre les difficultés d’accès aux données, l’évaluation de l’atteinte des objectifs dépend de leur définition propre. En effet, les objectifs qualitatifs de la loi Agec ne sont pas toujours clairement définis. L’absence d’indicateurs de suivi rend ainsi plus difficile l’appropriation de ces objectifs par les acteurs, et leur contrôle par l’administration. Les objectifs quantitatifs ne sont quant à eux pas tous mesurables ni mesurés à l’heure actuelle.

  1.   Une mise en œuvre de la loi focalisée sur la collecte, le tri et le recyclage, au détriment d’une approche globale de l’économie circulaire

La loi Agec a entériné la création de nouvelles filières REP ou l’extension de filières pré-existantes, entraînant un doublement du nombre de ces filières. Leur déploiement, de manière presque concomitante, a conduit à une charge de travail supplémentaire importante pour l’ensemble des acteurs. De ce fait, elles se sont mises en place avec des retards, et pour certaines, n’atteignent pas encore les objectifs définis dans les cahiers des charges. Il est cependant attendu une montée en puissance de ces filières dans les prochaines années, qui devrait permettre l’atteinte de ces objectifs.

La loi Agec a favorisé une prise de conscience par les producteurs des enjeux de l’économie circulaire, avec l’apparition progressive de changements de pratiques profonds. Pour autant, leur organisation reste largement concentrée sur l’aval du cycle de vie d’un produit, et notamment sur le tri, la collecte, et le recyclage des déchets. La prévention de la production de déchets, l’écoconception, et le réemploi ou la réutilisation restent ainsi les parents pauvres de la loi Agec, alors que la hiérarchie des modes de traitement des déchets impose de privilégier d’abord la réduction, le réemploi et la réparation, avant d’améliorer le recyclage des déchets. Si la loi Agec a incontestablement permis d’enclencher des investissements en faveur de modes de production circulaires, elle est restée au milieu du gué en termes de transition vers des infrastructures et des systèmes à même de généraliser ces modes de production à grande échelle. Les transformations actuelles, encore balbutiantes, devront s’accélérer pour permettre un véritable changement de modèle économique vers l’économie circulaire.

Il reste donc indispensable de développer une vision globale et partagée visant la prévention de la production de déchets, au travers à la fois d’une réduction des mises sur le marché, mais aussi du réemploi et de la réutilisation, et de l’allongement de la durée de vie des produits. Le fonctionnement de l’économie circulaire doit encore se démocratiser et embarquer l’ensemble des parties prenantes vers l’intérêt général et vers une exemplarité française et européenne.

  1.   Une gouvernance des filières à responsabilité élargie du producteur à repenser et des contrôles à renforcer

La forte montée en puissance des filières REP dans les prochaines années devrait conduire à ce que près de 7 milliards d’euros de contributions financières soient versés aux éco‑organismes en 2029, contre 2,4 milliards d’euros en 2023. Ce poids grandissant des filières REP pose inévitablement la question de leur gouvernance et de l’atteinte de la performance environnementale requise, notamment en termes de réduction de la production de déchets. À ce titre, diverses questions ont émergé tout au long des auditions de la mission d’évaluation :

– Faut-il conserver la gouvernance actuelle des filières REP, au regard notamment des enjeux de structuration de ces filières en faveur de la prévention de la production de déchets, du réemploi et de la réutilisation ou de l’écoconception ?

– Comment peut-on renforcer le rôle du comité des parties prenantes et de la Commission inter-filières REP (Cifrep) ?

– Faut-il instaurer une autorité indépendante, chargée de suivre l’application des cahiers des charges par les éco-organismes ou systèmes individuels, et de mettre en œuvre des sanctions ?

Le rapport d’évaluation se propose d’apporter des réponses à ces questions, mais aussi à la complexité croissante due à la multiplication des filières REP et des éco-organismes, en termes de surcharge administrative ou de concurrence.

Le suivi de l’atteinte des objectifs de ces filières et leur contrôle constituent un enjeu majeur. Pourtant, il a été constaté un manque manifeste de sanctions mises en œuvre lorsque les objectifs d’un éco-organisme ou d’un système individuel définis dans son cahier des charges ne sont pas atteints. La question des « passagers clandestins », producteurs qui ne paient pas de contributions financières alors qu’ils sont soumis à une filière REP, prend également de l’ampleur. Un accompagnement des éco-organismes par l’administration doit être consolidé afin de permettre l’identification de ces producteurs et la mise en œuvre de sanctions.

La question du renforcement des contrôles dépasse le cadre des filières REP. Elle s’inscrit dans une dynamique plus globale, pour assurer l’atteinte de l’ensemble des objectifs de la loi Agec et éviter les distorsions de concurrence. Il doit ainsi être accordé des moyens humains suffisants à la direction générale de la prévention des risques (DGPR), à la direction générale des entreprises (DGE) et à la direction générale de la compétitivité, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) et à leurs services déconcentrés pour remplir les missions qui leur incombent.

  1.   Des dispositions précurseures que la France peine à imposer au niveau européen

Précurseure sur de nombreux sujets, la loi Agec cristallise l’engagement à opérer pour transformer l’économie européenne en économie circulaire. Ses avancées inspirent la réglementation européenne.

Elle est tout d’abord une source d’inspiration dans le cadre de la révision de la directive-cadre « déchets ». Le projet de texte prévoit la mise en place d’une filière REP pour les produits textiles et chaussures, déjà présente en France, et l’instauration d’objectifs pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Le futur règlement « écoconception » traite de l’obsolescence programmée et prévoit une interdiction européenne de destruction des textiles et chaussures invendus. Un projet de directive sur le droit à la réparation vise à renforcer l’information du consommateur, proposer un bonus réparation européen et garantir la qualité des réparations. Enfin le règlement sur les emballages et les déchets d’emballages instaure notamment des trajectoires de diminution de production de déchets d’emballages, des interdictions de certains emballages en plastique à usage unique, des objectifs de réemploi, ou la mise en place d’une signalétique de tri sur les produits.

Pour autant, plusieurs mesures phares de la loi Agec sont menacées par la réglementation européenne. Alors que certaines avancées nationales n’ont pas su s’imposer auprès des institutions européennes, en particulier l’indice de durabilité pour les smartphones, d’autres peuvent encore être préservées, voire servir de modèle à la règlementation européenne à venir. La France doit promouvoir et défendre efficacement la loi Agec au niveau européen pour conserver les avancées obtenues et préserver les investissements engagés par l’ensemble des acteurs afin de se mettre en conformité avec la réglementation nationale.

 


   Évaluation des objectifs de la loi Agec

Institué par l’article 26 de la loi « climat et résilience » ([4]), dans le prolongement de la loi Agec, le Conseil national de l’économie circulaire (CNEC) est une instance administrative consultative chargée de participer à l’élaboration et au suivi des stratégies nationales en matière d’économie circulaire. Il effectue à ce titre un suivi des objectifs et de la mise en œuvre de la loi Agec. Composé de quarante-deux membres répartis en six collèges, il constitue une véritable instance de dialogue entre les différentes parties prenantes (État, élus locaux, associations, entreprises, salariés, parlementaires).

Les travaux du CNEC constituent une source d’information utile pour les rapporteurs. Son groupe de travail n° 7 est dédié à l’évaluation des lois relatives à l’économie circulaire. Un rapport de Mme Dominique Mignon et de M. Matthieu Glachant ([5]), communiqué aux rapporteurs, évalue notamment le nombre d’objectifs fixés dans la loi Agec et leurs caractéristiques (objectif quantitatif, qualitatif, contrôlable, mesuré…).

Ce rapport fait état de 81 objectifs instaurés par la loi Agec. Ce nombre important dénote une inflation normative particulièrement caractéristique de la loi Agec, par comparaison avec d’autres lois traitant des questions d’économie circulaire, telles que les lois « Grenelle 1 » ([6]) et « Grenelle 2 » ([7]), la loi de transition énergétique pour la croissance verte ([8]) (LTECV), ou encore la loi « climat et résilience ».

Objectifs liÉs à l’Économie circulaire dans les derniÈres lois

Source : rapport du groupe de travail évaluation n° 7, CNEC

Les objectifs quantitatifs sont des « objectifs chiffrés, de réduction ou d’augmentation, exprimés le plus souvent en pourcentage et donc théoriquement adossés à un indicateur mesurable ».

Le CNEC a dénombré 11 objectifs quantitatifs au sein de la loi Agec. Parmi eux, 7 objectifs sont mesurables et mesurés, 2 sont mesurables mais non mesurés, et 2 ne sont pas mesurables.

Les objectifs de la loi Agec mesurables, mais non mesurés sont les suivants :

– à l’article 4, « Développer le réemploi et augmenter la quantité de déchets faisant l’objet de préparation à la réutilisation, notamment des équipements électriques et électroniques, des textiles et des éléments d’ameublement afin d’atteindre l’équivalent de 5 % du tonnage de déchets ménagers en 2030 » ;

– à l’article 110, « Assurer la valorisation énergétique d’au moins 70 % des déchets ne pouvant faire l’objet d’une valorisation matière d’ici 2025 ».

Selon le CNEC, les deux objectifs suivants ne sont actuellement pas mesurables :

– à l’article 9, « La France se dote d’une trajectoire nationale visant à augmenter la part des emballages réemployés mis en marché par rapport aux emballages à usage unique, de manière à atteindre une proportion de 5 % des emballages réemployés mis en marché en France en 2023, exprimés en unité de vente ou équivalent unité de vente, et de 10 % des emballages réemployés mis en marché en France en 2027, exprimés en unité de vente ou équivalent unité de vente. Les emballages réemployés doivent être recyclables. »

– à l’article 11, « Réduire le gaspillage alimentaire, d’ici 2025, de 50 % par rapport à son niveau de 2015 dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective et, d’ici 2030, de 50 % par rapport à son niveau de 2015 dans les domaines de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale ».

La loi Agec atteint de ce fait un taux de mesurabilité de 81 % pour ses objectifs quantitatifs.

Les objectifs qualitatifs sont des « objectifs non chiffrés, majoritairement des interdictions ou des obligations ».

Le CNEC a dénombré 70 objectifs qualitatifs, qui apparaissent donc très majoritaires par rapport aux objectifs quantitatifs. On note une prédominance des obligations et des interdictions, avec 40 objectifs sur 70 correspondant à une « obligation », 18 à une « interdiction », 7 à une « création », 4 à une « possibilité » et un objectif ayant une autre thématique spécifique. La loi Agec s’inscrit donc dans la même lignée que les lois « Grenelle 2 » et « climat et résilience » par la prédominance d’obligations, contrairement à la loi « LTECV » présentant davantage d’interdictions que d’obligations.

Des contrôles de ces objectifs peuvent être effectués par l’administration, dans le cadre, par exemple, des procédures d’inspection des installations classées pour la protection de l’environnement, ou des procédures d’agrément des filières à responsabilité élargie du producteur. Cependant, tous les objectifs ne sont pas contrôlés.

Le CNEC a identifié 17 objectifs contrôlés sur les 70 objectifs qualitatifs prévus dans la loi. Seuls 24,2 % d’entre eux sont ainsi contrôlés. Les contrôles ciblent 9 objectifs d’« interdiction », 7 objectifs d’« obligation » et un objectif de « possibilité ». Les objectifs non contrôlés sont donc au nombre de 53, dont 32 portant sur une « obligation », 9 sur une « interdiction », 8 sur une « création », 3 sur une « possibilité » et un sur une autre thématique.

Le CNEC appelle ainsi à « suivre et contrôler davantage ces objectifs qualitatifs ».

La majorité des rapports du Gouvernement ont été transmis au Parlement, souvent après les délais fixés par la loi Agec. Le rapport du CNEC fait état de plusieurs rapports du Gouvernement non transmis au Parlement. Depuis, seuls les rapports mentionnés ci-dessous n’ont pas été transmis :

– à l’article 73, « il est créé, à titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication du décret prévu au deuxième alinéa du présent article, un dispositif de médiation visant à améliorer les relations et résoudre les différends éventuels au sein des filières concernées, notamment entre les éco-organismes, les opérateurs de la prévention et de la gestion des déchets, les structures de réemploi et de réutilisation ainsi que les collectivités territoriales. Un décret détermine les modalités de cette expérimentation. L’expérimentation fait l’objet d’une évaluation dont les résultats sont transmis au Parlement ».

Le dispositif de médiation visant à améliorer les relations et résoudre les différends éventuels au sein des filières à responsabilité élargie du producteur (REP) a été présenté à la Cifrep, d’après le compte rendu de ses travaux du 6 juillet 2023. Cependant, aucune évaluation n’a été transmise au Parlement ;

– à l’article 129, « Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en place d’un cadre réglementaire adapté pour le recyclage des métaux stratégiques et critiques par agromine ».

 


   Synthèse des propositions

Axe n° 1 : Améliorer l’information du consommateur et inciter aux achats durables en favorisant la réparation

Proposition

Support

Proposition n° 1 : Mener des campagnes de communication nationales afin de mieux faire connaître la plateforme « SignalConso » qui permet aux consommateurs de signaler les contenus frauduleux ou mensongers et les manquements aux obligations prévues par la loi Agec. Prévoir des supports de communication adaptés, avec des canaux de diffusion variés (spots télévisés, réseaux sociaux, affichages publics, encarts réservés dans la presse écrite…), sur une durée suffisante.

Campagne de communication

Proposition n° 2 : Accélérer le déploiement de l’affichage environnemental dans les secteurs de l’ameublement et des cosmétiques, en précisant le calendrier des travaux et en engageant, dès maintenant, des échanges avec les acteurs de ces filières.

Études et concertation avec les acteurs

Proposition n° 3 : Privilégier une méthodologie de calcul de l’affichage environnemental reposant sur l’analyse du cycle de vie, tout en veillant à ce que les scores environnementaux des produits soumis à affichage soient suffisamment discriminants. Pour cela, définir des critères de notation permettant de distinguer clairement les produits entre eux, en utilisant un large spectre de notation allant, par exemple, de la lettre A à la lettre F.

Décret, arrêté

Proposition n° 4 : Mener des campagnes de communication nationales afin de mieux faire connaître l’affichage environnemental auprès des consommateurs. Prévoir des supports de communication adaptés, avec des canaux de diffusion variés (spots télévisés, réseaux sociaux, affichages publics, encarts réservés dans la presse écrite…), sur une durée suffisante.

Campagnes de communication

Proposition n° 5 : Renforcer les contrôles de la mise en œuvre de l’indice de réparabilité :

– en privilégiant des contrôles sur place par rapport aux contrôles documentaires ;

– en prévoyant des pénalités financières, versées par les producteurs à leur éco-organisme, en cas d’absence de mise en place de l’indice de réparabilité ou d’irrégularités constatées ;

– en prévoyant que l’administration en charge du contrôle informe directement les éco-organismes lorsque les indices affichés par leurs adhérents ne respectent pas la règlementation.

Circulaire, cahier des charges des filières REP

Proposition n° 6 : Dans le cadre d’éventuelles négociations en vue de la mise en place d’un indice de réparabilité européen pour les lave-linge et les téléviseurs, veiller à ce que celui-ci comporte un critère relatif au coût de la réparation, comme c’est aujourd’hui le cas pour l’indice de réparabilité français.

Règlement européen

Proposition n° 7 : Mieux défendre les avancées issues de la loi Agec auprès des institutions européennes afin qu’elles puissent servir de modèle en vue d’une évolution de la règlementation européenne :

– en organisant des échanges réguliers entre la France et les institutions européennes, dès que la Commission européenne annonce son intention de légiférer ;

– en associant à ces discussions à la fois les acteurs administratifs (services techniques et administratifs du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires), le secrétariat général aux affaires européennes et la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne, ainsi que les décideurs politiques (ministres et secrétaires d’État concernés) ;

– en veillant à ce que les acteurs de l’économie circulaire soient associés aux forums de consultation de la Commission européenne ;

– en mettant en place des coalitions avec d’autres États membres pour défendre les avancées nationales en matière d’économie circulaire.

Négociations européennes

Proposition n° 8 : Renforcer les campagnes d’information sur le bonus réparation :

– en prévoyant que l’éco organisme y consacre, au cours des trois prochaines années, au moins 2 % du montant total des contributions financières perçues ;

– en coordonnant les actions de sensibilisation menées pour les différents types de bonus réparation ;

– en adaptant chaque campagne aux spécificités locales (notamment le nombre et la densité de réparateurs), en partenariat avec les chambres consulaires et les chambres régionales de l’économie sociale et solidaire.

Cahier des charges des filières REP, campagne de communication

Proposition n° 9 : Augmenter les montants du bonus réparation afin que le coût de la réparation d’un produit pour le consommateur ne dépasse pas le tiers du prix du même produit vendu neuf.

Arrêté

Proposition n° 10 : Simplifier le processus de labellisation des professionnels de la réparation afin de permettre à davantage de petites et moyennes entreprises (PME) et de très petites entreprises (TPE) de bénéficier du bonus réparation, en prévoyant :

– de réduire les coûts de labellisation pour les artisans indépendants ;

– de raccourcir le délai de délivrance du label en deçà de trois mois.

Décret, arrêté

Proposition n° 11 : Prévoir que les ressources financières allouées aux fonds réparation des filières des textiles d’habillement, linge de maison et chaussures, des jouets, des articles de sport et loisir et des articles de bricolage et de jardin puissent être utilisées par les éco-organismes pour cofinancer la formation au métier de réparateur (cette possibilité étant aujourd’hui limitée à la filière des équipements électriques et électroniques).

Arrêté

Proposition n° 12 : À partir d’une cartographie des besoins des filières, définir une feuille de route des métiers de l’économie circulaire qui prévoit notamment :

– un travail mené conjointement par l’établissement France Travail, les opérateurs de formation, les conseils régionaux et le ministère de l’éducation nationale afin de faire connaître les métiers de l’économie circulaire au public, de créer davantage d’offres de formations, d’adapter ces formations aux besoins et aux particularités territoriales et de faciliter les recrutements ;

– des campagnes massives de communication pour attirer de nouveaux profils, notamment à travers l’organisation d’une semaine nationale des métiers de l’économie circulaire ;

– des actions de France Travail en faveur de la reconversion des demandeurs d’emploi vers les métiers de l’économie circulaire en tension (réparateurs, reconditionneurs…).

Feuille de route interministérielle, concertation

Proposition n° 13 : Confier à l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation la mission de veiller à ce que les prix pratiqués par les réparateurs labellisés ne soient pas surévalués par rapport aux prix moyens habituellement constatés.

Loi

 

Axe n° 2 : Réduire les emballages en plastique à usage unique

Proposition

Support

Proposition n° 14 du rapporteur Stéphane Delautrette : Étendre l’obligation d’utiliser de la vaisselle réemployable, et de procéder à sa collecte en vue de son réemploi, à l’ensemble des services de livraison de repas à domicile.

Loi

Proposition n° 15 : Mener des études complémentaires sur la pertinence des exemptions à l’interdiction de la vente de fruits et légumes sous emballage plastique afin de réduire, chaque fois que cela sera justifié, la liste des dérogations.

Études

Proposition n° 16 : Permettre à la DGCCRF de contrôler l’application des dispositions non codifiées de la loi Agec, en particulier l’interdiction d’apposer des étiquettes non compostables sur les fruits et légumes et celle des jouets en plastique dans les menus enfants.

Loi

Proposition n° 17 : Prévoir la réalisation, par les producteurs, de plans de réduction de la production de bouteilles en plastique à usage unique pour boisson.

Cahier des charges de la filière REP des emballages ménagers

Proposition n° 18 : Renforcer les contrôles, par les services de l’État, du respect de l’application des dispositions de la loi Agec relatives à l’interdiction ou à la restriction des produits ou emballages en plastique à usage unique ; mettre en place prioritairement un contrôle de l’obligation de vaisselle réemployable dans la restauration et de la mise en place de fontaines à eau dans les établissements recevant du public.

Circulaire

Proposition n° 19 : Au titre de leur action de prévention et de réduction des déchets d’emballages, prévoir un soutien dédié des éco-organismes de la filière REP des emballages ménagers à la promotion de la vente en vrac, indépendamment des actions de soutien au réemploi.

Cahier des charges de la filière REP des emballages ménagers

 

Axe n° 3 : Faire du réemploi une priorité

Proposition

Support

Proposition n° 20 : Confier à l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation la réalisation d’études régulières et actualisées, afin de disposer d’informations fiables sur l’état du gisement de produits réemployables et sur les infrastructures de réemploi sur le territoire.

Feuille de route de l’observatoire

Proposition n° 21 : Renforcer les moyens financiers de l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation en augmentant le montant des crédits du fonds « Économie circulaire » qui lui sont consacrés.

Loi de finances

Proposition n° 22 : Adapter les modes de production et la logistique des entreprises du secteur des emballages afin de permettre le déploiement massif du réemploi dans tous les territoires :

 en poursuivant la réflexion autour de la définition de standards d’emballages réemployables ou de spécifications techniques communes ;

– en adaptant les lignes de production au conditionnement et au reconditionnement de ces emballages standardisés ;

– en mettant en place des lieux de collecte, des centres de tri, de lavage et de stockage des emballages.

Concertation avec les acteurs, appels à projets

Proposition n° 23 : Mettre en place un dispositif de consigne pour réemploi des emballages en verre, assorti d’une obligation pour les supermarchés et les hypermarchés de reprendre ces contenants.

Loi

Proposition n° 24 : Déployer des points de reprise des produits usagés sur l’ensemble du territoire, à la fois en magasin, dans des lieux mutualisés ou sur l’espace public ; renforcer le contrôle du respect de l’obligation de reprise des produits usagés ; instaurer des sanctions pour non-respect de cette obligation.

Circulaire

Proposition n° 25 : Autoriser le réemploi des emballages destinés aux patients en auto-traitement et de certains dispositifs médicaux comme les lecteurs de glycémie.

Loi

Proposition n° 26 : Organiser des Assises du réemploi réunissant l’ensemble des acteurs concernés (État, collectivités territoriales, industriels, éco-organismes, associations environnementales et de consommateurs) afin de réfléchir à la mise en place d’une structure de pilotage chargée de coordonner les transformations à mettre en place et d’accompagner les acteurs.

Assises du réemploi

Proposition n° 27 : Élaborer une Stratégie nationale du réemploi, distincte de la Stratégie nationale pour la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique (SN3R).

Stratégie nationale du réemploi

Proposition n° 28 : Élaborer des schémas directeurs régionaux du réemploi, permettant d’évaluer les besoins spécifiques de chaque territoire et d’adapter en conséquence les modes de production, la logistique et les infrastructures à l’échelle régionale.

Schémas directeurs régionaux

Proposition n° 29 : Renforcer les objectifs de réemploi des emballages dans le prochain décret « 3R », qui couvrira la période 2025-2030 ; prévoir une trajectoire de développement du réemploi sur le long terme en fixant des objectifs évolutifs jusqu’en 2040.

Loi, décret

Proposition n° 30 : Doubler les ressources du fonds dédié au financement du réemploi et de la réutilisation pour les porter au minimum à 10 % du montant des contributions reçues.

Loi

 

Axe n° 4 : Poursuivre la lutte contre le gaspillage

Proposition

Support

Proposition n° 31 : Mettre en place des indicateurs et un suivi par l’Ademe de la réalisation des objectifs de réduction du gaspillage alimentaire dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective, ainsi que dans les domaines de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale.

Objectifs et indicateurs de suivi de l’Ademe

Proposition n° 32 : Informer les commerces de vente au détail et les restaurants de la possibilité, pour le consommateur :

– d’être servi dans un contenant apporté par ses soins dans les commerces de vente au détail ;

– d’apporter son propre contenant pour emporter les aliments non consommés sur place dans les restaurants.

Faire respecter l’obligation d’affichage en magasin et en établissement de cette possibilité offerte au consommateur.

Campagnes d’information, contrôles administratifs

Proposition n° 33 : Réviser la grille de notation du référentiel anti-gaspillage en relevant les seuils de passage d’un niveau à l’autre du label anti-gaspillage alimentaire, afin que ce label constitue un instrument pertinent de mesure et de comparaison des efforts déployés par les établissements.

Arrêté

Proposition n° 34 : Aller vers une généralisation de la délivrance de médicaments à l’unité :

– en levant les freins d’ordre logistique et informatique rencontrés par les pharmaciens ;

– en adaptant les conditionnements des médicaments ;

– en développant des actions de communication et de sensibilisation sur les conséquences positives de la dispensation à l’unité sur les plans environnemental, sanitaire et financier.

Loi

Proposition n° 35 du rapporteur Stéphane Delautrette : Étendre l’obligation de réemploi, notamment par le don, ou de réutilisation des produits non alimentaires invendus, au-delà des seuls produits d’hygiène et de puériculture ; prévoir des sanctions financières à l’encontre des entreprises qui ne respecteraient pas cette obligation.

Loi

Proposition n° 36 : Prévoir une déclaration annuelle obligatoire, par les entreprises, des quantités de produits non alimentaires invendus.

Décret

 

Axe n° 5 : Accompagner la mise en place de la filière REP bâtiment et de la filière REP des véhicules

Proposition

Support

Proposition n° 37 : Dans le cahier des charges de la filière REP bâtiment, repenser le maillage des points de reprise des déchets :

– en assurant une répartition géographique équitable des points de reprise, notamment dans les zones rurales ou dans les territoires ultramarins ;

– en densifiant les points de reprise qui acceptent les « grands chantiers », présentant des volumes importants de déchets ;

– en densifiant les points de reprise qui acceptent les déchets non inertes ;

– en facilitant le dépôt de matériaux ou de déchets dans un même point de collecte.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 38 : En complément des campagnes de communication menées par l’organisme coordonnateur et les éco-organismes, mobiliser les fédérations professionnelles et les chambres compétentes pour promouvoir les consignes de tri relatives à la filière REP bâtiment.

Campagne de communication

Proposition n° 39 : Imposer à l’organisme coordonnateur de la filière REP bâtiment, au travers du cahier des charges de la filière REP bâtiment, d’assurer la visibilité des recycleurs sur les cartes qu’il publie, y compris des recycleurs indépendants et de ceux n’ayant pas de contrats avec un éco-organisme.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 40 : Renforcer le rôle de guichet unique de l’organisme coordonnateur de la filière REP bâtiment, en lui imposant dans le cahier des charges la mise en place d’une plateforme unique de traçabilité des déchets, commune aux quatre éco-organismes, en vue d’améliorer la traçabilité et de simplifier les procédures pour les détenteurs de déchets.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 41 : Fixer, dans le cahier des charges de la filière REP bâtiment, un délai minimal de six mois entre la publication des barèmes des éco-contributions par les éco-organismes et leur mise en application effective.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 42 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport sur les conséquences associées à une prédominance des systèmes individuels par rapport aux éco-organismes, agréés pour la filière REP des véhicules, en terme notamment d’atteinte des performances environnementales, et de complexité de mise en œuvre.

Rapport du Gouvernement au Parlement

 

Axe n° 6 : Renforcer la prévention de la production de déchets

Proposition

Support

Proposition n° 43 : Renforcer la prévention de la production des déchets au sein de l’ensemble des filières REP, en intégrant dans les cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels :

– des objectifs globaux de réduction de la production de déchets, instaurant une trajectoire de réduction à court, moyen et long terme :

– des pénalités liées aux quantités de produits mis sur le marché, dans le cadre des éco-modulations des contributions financières.

Cahier des charges des filières REP

 

Axe n° 7 : Revoir la gouvernance des filières REP

Proposition

Support

Proposition n° 44 : Revoir la gouvernance pour faire évoluer les « filières à responsabilité élargie du producteur » vers les « filières de l’économie circulaire » sans remettre en cause le principe de « pollueur-payeur » :

– à l’échelon inter-filières REP, en redonnant un rôle de planification à la Cifrep afin que cette dernière élabore les stratégies de filière ;

– à l’intérieur de chaque filière REP, en transformant le « comité des parties prenantes » en un « conseil de la stratégie industrielle », géré par la Cifrep.

Décret

Proposition n° 45 : Transformer la Cifrep en « Commission transversale des filières REP », guichet unique de l’ensemble des filières REP, chargé d’harmoniser et de faciliter les démarches des différents acteurs, en complément de son rôle de structuration des filières.

Décret

Proposition n° 46 : Intégrer l’approche régionale dans les cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels :

– en fixant, en concertation avec les régions, des objectifs ou valeurs cibles régionaux, en vue d’atteindre les objectifs nationaux ;

– en établissant, en concertation avec les régions, des feuilles de route régionalisées dans le cadre de la planification régionale ;

– en coordonnant des campagnes régionales d’information et de communication avec les régions ;

– en organisant des réunions semestrielles entre les éco-organismes et les régions.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 47 : Charger la Cifrep ou la direction de supervision des filières REP (DSREP) de l’Ademe de mettre en place une interface lisible, facilement accessible, et multilingue, visant à simplifier l’identification par un producteur des filières REP et des éco-organismes responsables des produits mis sur le marché.

Décret

Proposition n° 48 : Charger l’Ademe de créer un guichet unique pour l’adhésion des producteurs aux éco-organismes, l’obtention de l’identifiant unique et les déclarations de mises sur le marché, en vue de simplifier les démarches pour les producteurs.

Loi, décret, arrêté

Proposition n° 49 : Défendre les dispositions de la loi Agec en portant au niveau européen le principe attribuant aux places de marché la responsabilité d’assumer les obligations relatives aux filières REP pour le compte des vendeurs non-conformes.

Négociations européennes

Proposition n° 50 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport au Parlement sur les effets réels de la concurrence entre éco-organismes, en ciblant notamment la filière REP dédiée au bâtiment.

Rapport du Gouvernement au Parlement

 

Axe n° 8 : Renforcer le suivi et le contrôle des filières REP

Proposition

Support

Proposition n° 51 : Contrôler le respect des objectifs par les systèmes individuels, au même titre que les éco-organismes, pour lutter contre la distorsion de concurrence.

Circulaire

Proposition n° 52 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport sur les bénéfices et les limites associés à la mutualisation des filières REP, notamment en vue de leur mise en œuvre dans les outre-mer.

Rapport du Gouvernement au Parlement

Proposition n° 53 : Charger l’Ademe d’assurer la gestion des données dans le cadre de son rôle de guichet unique (adhésion des producteurs aux éco-organismes, obtention de l’identifiant unique et déclarations de mises sur le marché), tout en garantissant un accès aux données pertinentes aux éco-organismes et la confidentialité des données.

Loi, décret, arrêté

Proposition n° 54 : Renforcer l’accessibilité et la lisibilité des données des éco-organismes, de l’État et de l’Ademe utilisées pour la prise de décision.

Mise à jour des sites internet

Proposition n° 55 : Effectuer le pilotage des effectifs dédiés au suivi des filières REP au sein de la direction de supervision des filières REP de l’Ademe, dans le cadre du budget annexe dédié, au travers de la masse salariale votée par le conseil d’administration, et non au travers du plafond d’emploi tel que prévu actuellement dans la loi.

Loi de finances

Proposition n° 56 : Assurer la mise en œuvre des sanctions :

– en appliquant systématiquement les sanctions prévues par la réglementation, dès qu’un manquement d’un éco-organisme ou d’un système individuel est constaté vis-à-vis des obligations présentes dans son cahier des charges ;

– en renforçant les montants des sanctions financières, pour inciter davantage les éco-organismes et les systèmes individuels à atteindre les performances environnementales attendues des filières REP.

Loi

Proposition n° 57 : Mettre en application la suspension ou le retrait de l’agrément à un éco-organisme ou à un système individuel en cas de manquement avéré, y compris lorsqu’il n’existe qu’un seul éco-organisme agréé pour une filière REP, en prévoyant la mise en place d’un système temporaire palliatif ou d’accompagnement renforcé de l’éco-organisme pour maintenir un fonctionnement continu des filières REP.

Décret, arrêté

Proposition n° 58 : Instaurer un dialogue constructif entre l’État et les éco-organismes en vue de dresser un état des lieux partagé et de parvenir à l’élaboration d'indicateurs de succès communs.

Mise en place de groupes de travail

Proposition n° 59 : Mettre en place une instance indépendante de contrôle et de régulation des filières REP en charge notamment :

– de contrôler l’atteinte des objectifs par les éco-organismes et les systèmes individuels, définis dans les cahiers des charges des filières REP ;

– de prononcer les sanctions en cas de manquement d’un éco-organisme ou d’un système individuel aux obligations prévues par son cahier des charges ;

– d’accompagner les éco-organismes dans la lutte contre les « passagers clandestins », et prononcer les sanctions associées ;

– d’accompagner les parties prenantes des filières REP vers la résolution d’éventuels litiges.

Loi

Proposition n° 60 : Renforcer les effectifs pour le suivi, le contrôle et la régulation des filières REP au sein des services des ministères compétents (DGPR, DGE et DGCCRF) et de leurs services déconcentrés.

Loi de finances

Proposition n° 61 : Instaurer un interlocuteur privilégié au sein des services des ministères compétents (DGPR, DGCCRF et douanes) chargé :

– d’accompagner les éco-organismes dans la procédure d’identification des « passagers clandestins » ;

– d’étudier les signalements des éco-organismes ;

– d’appliquer les sanctions associées.

Organisation administrative

Proposition n° 62 : Introduire dans la loi la visibilité du montant de l’éco-contribution sur les factures des produits vendus entre professionnels soumis aux filières REP.

Loi

 

Axe n° 9 : Inciter davantage à l’écoconception et à l’allongement de la durée de vie des produits

Proposition

Support

Proposition n° 63 : Charger l’Ademe de l’évaluation du contenu des plans quinquennaux d’écoconception et notamment :

– d’harmoniser les trames à compléter par les producteurs pour chaque filière REP, en s’appuyant sur les trames déjà créées par les éco-organismes, en concertation avec les éco-organismes et les services de l’État ;

– d’imposer dans chacune de ces trames la définition obligatoire par les producteurs d’objectifs de prévention à la production de déchets et d’écoconception, basés sur des indicateurs de performance mesurables, et un calendrier progressif pour les atteindre ;

– de publier tous les trois ans une synthèse du contenu de ces plans pour chaque filière REP, ainsi qu’une synthèse globale inter-filières REP ;

– de transmettre la liste des producteurs n’ayant pas transmis de plans quinquennaux d’écoconception aux services de l’État en charge du contrôle et de la régulation des filières REP, afin que les producteurs ne respectant pas cette obligation soient sanctionnés.

Donner à l’Ademe des moyens suffisants pour la mise en place de cette évaluation.

Loi, décret

Proposition n° 64 : Introduire dans les cahiers des charges des filières REP des primes et des pénalités, dans le cadre des éco-modulations des contributions financières, relatives à l’utilisation de pièces issues de l’économie circulaire, en vue de favoriser le développement de ce marché.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 65 : Introduire dans les cahiers des charges des filières REP le déclenchement automatique d’un malus dans les cahiers des charges des filières REP pour les éco-organismes et les systèmes individuels qui n’atteignent pas leurs objectifs de recyclage ou de réemploi et de réutilisation.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 66 : Introduire dans la loi le principe qu’un niveau minimal d’éco-contribution et d’éco-modulation doit être respecté pour chaque filière REP, ce niveau minimal étant fixé par voie réglementaire.

Loi, décret

Proposition n° 67 : Imposer aux éco-organismes dans les cahiers des charges des filières REP la conduite d’études d’élasticité-prix, en vue de mieux calibrer les éco-modulations et d’améliorer l’incitation vers une économie circulaire.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 68 : Mettre en place des plateformes de vente de pièces détachées génériques et de pièces détachées reconditionnées. Cette mise en place doit faire l’objet d’études de l’État, et être soutenue au travers d’investissements financiers par l’État, et par les éco-organismes.

Associer un label de qualité à ces pièces détachées.

Cahier des charges des filières REP, appels à projets

Proposition n° 69 : Rendre les pannes logicielles éligibles à un financement par les fonds dédiés à la réparation, au sein des cahiers des charges des filières REP.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 70 : Dans le cadre de la révision des directives « vente de biens », « contenus numériques et services numériques », et « écoconception », porter au niveau européen l’obligation pour les fabricants de fournir gratuitement les mises à jour nécessaires au maintien de la conformité d’un produit pendant sa durée d’usage attendue.

Négociations européennes

Proposition n° 71 : Étendre les obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées à tous les secteurs d’activité :

– en demandant au Gouvernement la remise d’un rapport sur la possibilité, au niveau national, de mettre en place des obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées. Ce rapport évaluera les secteurs pertinents à cette fin, et proposera un calendrier progressif relatif aux obligations d’incorporation envisagées ;

– en soutenant au niveau européen l’introduction d’obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées pour l’ensemble des produits en plastique soumis à une filière REP, notamment dans le cadre de la révision de la directive « plastiques à usage unique » et du règlement « emballages ».

Négociations européennes, rapport du Gouvernement au Parlement

 

Axe n° 10 : Mettre la commande publique au service de l’économie circulaire

Proposition

Support

Proposition n° 72 : Étendre l’application de l’article 58 de la loi Agec à tous les acheteurs soumis au code de la commande publique.

Loi

Proposition n° 73 : Préciser le périmètre applicable à l’indice de réparabilité et de l’indice de durabilité, à l’article L. 541-9-2 du code de l’environnement, pour y inclure explicitement :

– les produits destinés exclusivement à la vente aux consommateurs ;

– les produits destinés exclusivement à la vente aux professionnels ;

– les produits destinés à la vente à des consommateurs et à des professionnels.

Loi

Proposition n° 74 : Renforcer l’accompagnement des fonctionnaires et des élus vers une appropriation générale de l’économie circulaire, et des acheteurs publics vers des connaissances plus ciblées, notamment pour la mise en œuvre de l’article 58 de la loi Agec :

– en rendant obligatoire une formation transversale sur l’économie circulaire, s’appuyant notamment sur le déploiement du plan national des achats durables 2022-2025 et les actions mises en œuvre dans ce cadre.

– en proposant des formations thématiques spécifiques sur la mise en œuvre de l’article 58 de la loi Agec, en vue d’améliorer la connaissance sur les caractéristiques des produits de l’économie circulaire, notamment en termes de sécurité et de qualité, et en rendant ces formations obligatoires pour les acheteurs publics.

Plan national des achats durables

Proposition n° 75 : Favoriser le développement de l’économie de la fonctionnalité dans la commande publique en introduisant dans la loi une part minimale d’achats publics de services ou de prestations issue de l’économie de la fonctionnalité.

Loi

Proposition n° 76 du rapporteur Stéphane Delautrette : Considérer les dépenses des collectivités territoriales liées à l’économie de la fonctionnalité comme des dépenses d’investissement, plutôt que des dépenses de fonctionnement.

Loi

Proposition n° 77 de la rapporteure Véronique Riotton : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport au Parlement sur les solutions pour considérer les dépenses des collectivités territoriales liées à l’économie de la fonctionnalité comme des dépenses d’investissement, plutôt que des dépenses de fonctionnement.

Rapport du Gouvernement au Parlement

Proposition n° 78 : Instaurer une « TVA circulaire » dans la loi de finances pour 2025 :

– en adoptant une TVA à taux réduit à 5,5 % pour le secteur de l’économie de la fonctionnalité ;

– en adoptant une TVA à taux réduit à 5,5 % sur les opérations de réparation de l’électroménager, des chaussures et articles en cuir et des vêtements et du linge de maison ;

– en demandant au niveau européen une révision de la directive européenne réglementant les taux de TVA pour inclure, au sein de la liste des biens et des prestations de service pouvant faire l’objet de taux réduit, d’autres secteurs de la réparation, tels que l’ameublement ou l’outillage.

Loi

 

Axe n° 11 : Améliorer le tri et la collecte des déchets

Proposition

Support

Proposition n° 79 : Accélérer le déploiement du tri hors foyer :

– en imposant aux collectivités territoriales d’avoir engagé une démarche de mise en place du tri hors foyer en 2024 ;

– en augmentant le montant du financement accordé par les appels à projets ;

– en créant un groupe de travail dédié, avec les collectivités territoriales, les services de l’État, l’Ademe et les éco-organismes concernés ;

– en proposant un transfert de compétences, le cas échéant, entre la commune et un établissement public de coopération intercommunale (EPCI)

Décret, arrêté, cahier des charges des filières REP

Proposition n° 80 : Charger l’Ademe de mettre en place des indicateurs de suivi, permettant d’évaluer la pratique de compostage de proximité.

Organisation administrative

Proposition n° 81 : Renforcer les financements de l’État à destination des collectivités territoriales afin de les accompagner davantage dans la mise en place du tri à la source des biodéchets.

Loi de finances

Proposition n° 82 : Mener des campagnes de communication nationales, ainsi que des campagnes de communication locales pour sensibiliser plus largement la population aux gestes adéquats de tri à la source des biodéchets, dans le cadre de la collecte séparée et de la gestion de proximité des biodéchets.

Campagne de communication

Proposition n° 83 : Revoir les règles applicables à la valorisation conjointe de matières plastiques et des biodéchets triés à la source dans les composts domestiques :

– en modifiant la réglementation afin d’interdire toute allusion à l’insertion de matières plastiques dans un compost domestique, y compris les sacs de collecte de biodéchets composés de plastique ;

– en sensibilisant la population à ne pas introduire de matières plastiques, même libellées biodégradables, dans un compost domestique ;

– en demandant la remise d’un rapport du Gouvernement sur la nécessité de modifier, voire d’interdire, la mention « compostable » sur les produits composés de matières plastiques utilisés dans un compost domestique.

Arrêté, campagne de communication

Proposition n° 84 : Introduire dans la loi des objectifs de réduction progressive du poids des biodéchets dans les ordures ménagères résiduelles, et établir une trajectoire jusqu’à l’interdiction des biodéchets dans les ordures ménagères résiduelles.

Loi

Proposition n° 85 de la rapporteure Véronique Riotton : Poursuivre les réflexions et les travaux engagés en vue de la mise en place d’un dispositif de consigne des bouteilles en plastique pour recyclage. Dans ce cadre, s’assurer que les conditions suivantes soient remplies :

– la réalisation d’une étude sur le financement de ce mode de collecte, qui permette d’envisager un nouveau modèle économique pour les collectivités territoriales, en tenant compte de la nécessité de compenser financièrement les surcoûts auxquels elles feront face ;

– un montant de la consigne suffisamment incitatif, à savoir au moins 20 cents pour les bouteilles en plastique et, en cas d’extension du dispositif aux canettes, au moins 15 cents pour celles-ci ;

– un dispositif de reprise performant en termes de maillage et d’équipements de reprise, avec des points de reprise suffisamment denses et répartis partout sur le territoire, équipés le cas échéant de déconsigneurs en taille et en nombre suffisants ;

– un système de marquage lisible pour les consommateurs, avec un logo visuel et un code-barres apposés sur chaque emballage ;

– des actions de communication et de sensibilisation auprès des consommateurs afin de faciliter l’adhésion et la compréhension du dispositif ;

– un plan de déploiement du dispositif de consigne qui permette sa mise en place dans un délai de deux ans.

Concertation, étude d’impact financier

Proposition n° 86 : En l’absence de consigne pour recyclage, mettre en place immédiatement et dans toutes les collectivités les douze actions identifiées par l’Ademe pour respecter l’objectif européen d’un taux de collecte de 90 % des bouteilles en plastique et des canettes en 2029 (tarification incitative, tri à la source des biodéchets, amélioration des services de collecte en porte à porte, développement du tri dans les espaces publics, collecte sélective en entreprise…).

Loi, décret, arrêté, circulaire

Proposition n° 87 : Alléger le coût de déploiement de la tarification incitative pour les communes et les intercommunalités en prévoyant un financement complémentaire de l’État porté à 80 % des coûts correspondants sur les premiers exercices, grâce à :

– des subventions directes de l’Ademe, via le fonds « Économie circulaire » ;

– une atténuation supplémentaire des frais de gestion grevant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMI).

Loi de finances

 

Axe n° 12 : Poursuivre la lutte contre les dépôts sauvages

Proposition

Support

Proposition n° 88 : Abaisser le seuil de cent tonnes à vingt tonnes à partir duquel les dépôts sauvages sont pris en charge par les filières REP, en modifiant l’article R. 541-111 du code de l’environnement.

Décret

Proposition n° 89 : Sécuriser la collecte des déchets d’activités de soins à risques infectieux (DASRI) vis-à-vis des opérateurs de gestion de déchets qui opèrent hors du cadre des filières REP, en imposant à ces derniers une contractualisation avec les éco-organismes ou systèmes individuels.

Loi

Proposition n° 90 : Inclure des campagnes de sensibilisation des citoyens sur les conséquences environnementales des dépôts sauvages, au sein des actions de communication inter-filières prévues par l’article L. 541‑10-2-1 du code de l’environnement.

Campagne de communication

Proposition n° 91 : Mettre en place une base de données électronique centralisée d’identification et de suivi des dépôts sauvages sur le territoire national, accessible et modifiable par les collectivités territoriales.

Décret

 

Axe n° 13 : Améliorer le recyclage des plastiques

Proposition

Support

Proposition n° 92 : Rendre la mise sur le marché de produits en plastique non recyclable plus dissuasive en introduisant des pénalités dans le cadre de l’éco-modulation des contributions financières, au sein des cahiers des charges de l’ensemble des filières REP, afin de tendre vers l’objectif de 100 % de plastique recyclé d’ici le 1er janvier 2025.

Cahier des charges des filières REP

Proposition n° 93 : Rendre la mise sur le marché d’emballages en plastique non recyclable plus dissuasive en les interdisant à terme, selon un calendrier progressif qui doit être défini en concertation avec les industriels des secteurs concernés.

Loi

Proposition n° 94 : Considérer, au sein des appels d’offres, le recyclage chimique comme une solution complémentaire au recyclage mécanique, dans le cas où le recyclage mécanique n’est pas une option possible.

Appels d’offres

 

Axe n° 14 : Accompagner la valorisation des biodéchets

Proposition

Support

Proposition n° 95 du rapporteur Stéphane Delautrette : Créer un observatoire national des sols, en charge d’effectuer le suivi et d’accompagner le développement des solutions de valorisation des boues d’épuration sur l’ensemble du territoire national.

Loi

Proposition n° 96 de la rapporteure Véronique Riotton : Charger l’observatoire du réemploi et de la réutilisation d’effectuer le suivi et d’accompagner le développement des solutions de valorisation des boues d’épuration sur l’ensemble du territoire national.

Loi

Proposition n° 97 : Afin d’assurer la valorisation des boues d’épuration, introduire dans la loi :

– une hiérarchisation de la gestion des boues, privilégiant le retour au sol par rapport à l’incinération ;

– un objectif ambitieux de retour au sol des boues produites en France.

Loi

Proposition n° 98 : Charger l’Ademe, dans le cadre du rapport prévu par l’article R. 543-313 du code de l’environnement, transmis au plus tard le 1er janvier 2026, de surveiller et d’analyser les conséquences sur le processus de compostage de la mise en place depuis le 1er janvier 2024 d’une masse de déchets verts utilisés comme structurants n’excédant pas 80 % de la masse de boues d'épuration et de digestats de boues d'épuration utilisée dans le mélange.

Décret

Proposition n° 99 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport sur les bénéfices et les limites associés à la mise en place d’une valorisation conjointe de différents types de déchets organiques, notamment des biodéchets et des boues d’épuration.

Rapport du Gouvernement au Parlement

Proposition n° 100 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport visant à :

– évaluer l’intérêt environnemental et économique du développement d’installations de tri mécano-biologique en parallèle de la montée en puissance du tri à la source des biodéchets ;

– évaluer la possibilité d’avancer la date du 1er janvier 2027, prévue par l’article 87 de la loi Agec, concernant l’interdiction d’utiliser la fraction fermentescible des déchets issus des installations de tri mécano-biologique dans la fabrication de compost.

Rapport du Gouvernement au Parlement

 


   Première Partie :
Mieux consommer : responsabiliser le consommateur, favoriser le réemploi et la réutilisation,
limiter le gaspillage des ressources

I.   Un consommateur mieux informé et incité à privilégier des achats durables

Plusieurs dispositions de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite « loi Agec », ont permis d’améliorer l’information du consommateur sur les qualités environnementales des produits. Si certaines, comme l’affichage environnemental, sont encore au stade de l’expérimentation, les premières études disponibles montrent que ces dispositifs jouent un rôle majeur dans le développement de modes de consommation durables.

A.   Une meilleure information sur les qualités environnementales des produits

1.   La mention des caractéristiques environnementales des produits, une avancée dans la lutte contre le greenwashing

L’article 13 de la loi Agec a créé un nouvel article L. 541-9-1 du code de l’environnement prévoyant que les producteurs et importateurs de produits générateurs de déchets informent les consommateurs, par voie de marquage, d’étiquetage, d’affichage ou par tout autre procédé approprié, sur leurs qualités et caractéristiques environnementales. Celles-ci, établies en privilégiant une analyse de l’ensemble du cycle de vie des produits, portent notamment sur l’incorporation de matière recyclée, l’emploi de ressources renouvelables, la durabilité, la compostabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi, la recyclabilité et la présence de substances dangereuses, de métaux précieux ou de terres rares. En outre, cet article encadre la possibilité d’indiquer qu’un produit ou un emballage est compostable, interdit de faire figurer sur un produit ou un emballage les mentions « biodégradable », « respectueux de l’environnement » ou toute autre mention équivalente et, lorsqu’il est fait mention du caractère recyclé d’un produit, impose que le pourcentage de matières recyclées effectivement incorporées soit précisé.

Les dispositions de l’article 13 précité, précisées par le décret n° 2022-748 du 29 avril 2022 relatif à l’information du consommateur sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits générateurs de déchets, ont contribué à limiter les allégations environnementales. Elles ont permis de répondre à une demande grandissante des consommateurs d’avoir accès à une information fiable, complète et harmonisée à propos des impacts environnementaux des produits qu’ils consomment.

Alors que les dispositions de l’article 13 n’étaient pas encore entrées en vigueur, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a mené en 2021 et 2022 une enquête d’une ampleur inédite, dédiée au contrôle des allégations environnementales utilisées pour valoriser les produits nonalimentaires et les services. Au total, un établissement sur quatre, sur les 1 100 établissements contrôlés, recourait à des pratiques commerciales d’écoblanchiment des produits ou des services, ce qui a conduit les enquêteurs de la DGCCRF à dresser 141 avertissements, 114 injonctions et 18 procès-verbaux pénaux ou administratifs. La DGCCRF a indiqué aux rapporteurs que ces contrôles seraient étendus en 2024.

Selon le commissariat général au développement durable (CGDD), certains industriels et producteurs ont pu exprimer des réticences à appliquer de manière pleine et entière les dispositions prévues par l’article 13 de la loi Agec en raison, notamment, d’une mauvaise connaissance de leur propre chaîne de valeur. Ces réticences ont plus particulièrement concerné la mention de la traçabilité géographique pour les produits textiles et celle des proportions de matière recyclée incorporées aux produits. Certains acteurs ont également fait part de leur opposition à l’interdiction des mentions « biodégradables » ou « respectueux de l’environnement », souhaitant continuer à en faire un usage commercial en dépit du caractère trompeur de ces allégations.

Près de deux ans après son entrée en vigueur, le bilan de l’article 13 de la loi Agec est toutefois positif. Selon le CGDD, ces obligations nouvelles sont à l’origine d’une dynamique positive qui a conduit de nombreux acteurs à mieux connaître leur propre chaîne de valeur. Elles contribuent à une plus grande transparence et une meilleure traçabilité environnementale des produits.

Afin d’intégrer les avancées de la loi Agec, mais également celles de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience », le Conseil national de la consommation (CNC) a mis à jour son guide pratique des allégations environnementales ([9]) en mai 2023, la précédente version datant de 2010. Élaboré sous l’égide de la DGCCRF et du CGDD, ce guide précise les conditions d’utilisation, par les professionnels, d’allégations environnementales qui ne sont pas toutes encadrées juridiquement. Vademecum de la consommation responsable, ce guide favorise la loyauté des pratiques des entreprises en protégeant les plus vertueuses contre une distorsion de concurrence liée à des allégations infondées, tout en permettant au consommateur de disposer d’une information précise et fiable, à même d’en faire un acteur majeur de la transition écologique.

Les consommateurs se révèlent de plus en plus sensibilisés à la question des allégations environnementales, comme l’ont souligné les associations de consommateurs auditionnées. En cas de doute sérieux sur la véracité d’une allégation, la plateforme « SignalConso » permet aux consommateurs de signaler les contenus frauduleux ou mensongers ([10]). Cet outil reste toutefois mal connu du grand public, peu de campagnes de communication ayant été menées, hormis sur les réseaux sociaux.

Les rapporteurs estiment que des campagnes de communication doivent être lancées afin d’informer les consommateurs de l’existence de cette plateforme et de leur permettre de participer ainsi à la lutte contre le « greenwashing ». Afin de toucher un public large, ces campagnes doivent utiliser des supports adaptés, avec des canaux de diffusion variés (spots télévisés, réseaux sociaux, affichages publics, encarts réservés dans la presse écrite…) et être menées sur une durée suffisante.

Proposition n° 1 : Mener des campagnes de communication nationales afin de mieux faire connaître la plateforme « SignalConso » qui permet aux consommateurs de signaler les contenus frauduleux ou mensongers et les manquements aux obligations prévues par la loi Agec. Prévoir des supports de communication adaptés, avec des canaux de diffusion variés (spots télévisés, réseaux sociaux, affichages publics, encarts réservés dans la presse écrite…), sur une durée suffisante.

Les consommateurs peuvent également saisir le jury de déontologie publicitaire de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), chargé de se prononcer sur des plaintes émises contre des publicités. Ainsi, dans un avis du 8 septembre 2023, le jury a jugé que la promotion du produit Colissimo par la société La Poste, dont les messages indiquaient que celui-ci était neutre en émission carbone, et étaient suivis de l’image d’une tige avec deux feuilles vertes, n’était pas conforme aux règles déontologiques en vigueur applicables à une publicité ([11]).

2.   L’expérimentation de l’affichage environnemental : une méthode et des résultats encourageants

a.   Des expérimentations encourageantes dans les secteurs de l’alimentation et du textile

L’article 15 de la loi Agec prévoyait un dispositif volontaire d’affichage environnemental ou d’affichage social et environnemental, avant d’être abrogé et remplacé par un dispositif similaire, prévu à l’article 2 de la loi « climat et résilience ». Codifié à l’article L. 541-9-11 et suivants du code de l’environnement, cet affichage s’effectue par voie de marquage ou d’étiquetage ou par tout autre procédé adapté. Il est visible ou accessible pour le consommateur, en particulier au moment de l’acte d’achat. L’information apportée doit faire ressortir, de façon fiable et facilement compréhensible, l’impact environnemental des biens et services considérés sur l’ensemble de leur cycle de vie. L’article 2 de la loi « climat et résilience » prévoit de rendre l’affichage environnemental obligatoire à l’issue d’une période d’expérimentation d’une durée maximale de cinq ans et après évaluation de cette expérimentation.

Des expérimentations ont été menées de manière prioritaire dans les secteurs de l’alimentation et du textile. Les produits alimentaires ont fait l’objet de dix-huit expérimentations dont le bilan figure dans un rapport du Gouvernement remis au Parlement en janvier 2022 ([12]). Onze expérimentations ont été conduites dans le secteur du textile et un rapport a été remis au Parlement en mars 2022 ([13]). Les services du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires et l’Agence de la transition écologique (Ademe) travaillent désormais à la finalisation du cadre réglementaire pour permettre le déploiement de l’affichage environnemental dès 2024, de façon volontaire et encadrée.

D’après les informations initialement communiquées aux rapporteurs, les textes d’application pour les secteurs de l’alimentation et du textile étaient en cours de rédaction fin 2023 pour une publication prévue au cours du premier semestre 2024. Début mai 2024, ces textes n’avaient toujours pas été publiés. Interrogée à nouveau par les rapporteurs sur le calendrier d’application, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) a précisé que les textes d’application concernant le secteur textile doivent être présentés au mois de mai, avant leur notification à la Commission européenne. Pour les produits alimentaires, le calendrier d’élaboration des textes d’application n’avait pas encore été présenté début mai.

Les prochains secteurs concernés par l’affichage environnemental seraient, selon un calendrier publié par le secrétariat général à la planification écologique (SGPE), ceux de l’ameublement et des cosmétiques. Il a toutefois été convenu d’attendre la conclusion des travaux sur les produits alimentaires et textiles avant de mobiliser de nouveaux acteurs.

Les rapporteurs considèrent cependant que les échanges avec les acteurs des filières de l’ameublement et des cosmétiques devraient débuter le plus rapidement possible afin d’accélérer la mise en place de cet affichage dans ces filières.

Proposition n° 2 : Accélérer le déploiement de l’affichage environnemental dans les secteurs de l’ameublement et des cosmétiques, en précisant le calendrier des travaux et en engageant, dès maintenant, des échanges avec les acteurs de ces filières.

La méthode privilégiée, à savoir une expérimentation du dispositif avant sa généralisation, et le calendrier de mise en place de l’affichage dans les secteurs de l’alimentation et du textile, qui repose dans un premier temps sur le volontariat, ont été appréciés par les industriels. L’Union des industries textiles (UIT) a ainsi salué « l’écoute et la prise en compte du travail réalisé par les différents acteurs par le ministère ». Concernant les produits alimentaires, l’Association nationale des industries alimentaires (Ania) et ses adhérents ont indiqué avoir été « très engagés et impliqués dans le processus de discussion initié sur ce sujet à la suite de la promulgation du texte » et ont tenu à « saluer l’approche pragmatique du dispositif visant à expérimenter avant de passer à un déploiement plus concret ».

Déployé dans un premier temps de manière volontaire, l’affichage environnemental pourrait devenir obligatoire, pour les deux premiers secteurs concernés, sans qu’un calendrier précis n’ait encore été validé au niveau interministériel. La DGCCRF a indiqué aux rapporteurs que la direction des affaires juridiques du ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique a relevé la probable incompatibilité d’un dispositif obligatoire avec le principe de libre circulation des biens au sein de l’Union européenne.

C’est donc à juste titre que le CGDD évoque « un temps de préparation et de concertation important, avec notamment des discussions au niveau de l’Union européenne ». Ce temps de consolidation est d’autant plus important que l’affichage environnemental pourrait ensuite servir de base à différentes régulations.

Les rapporteurs souhaitent néanmoins que la généralisation de l’affichage environnemental soit pleinement défendue au niveau européen. Dans l’attente d’un dispositif harmonisé, ils soulignent l’importance de maintenir un dialogue avec les industriels des deux secteurs concernés pour s’assurer du déploiement à grande échelle de cet affichage.

b.   Une méthodologie de calcul reposant principalement sur l’analyse du cycle de vie

Les travaux menés par l’Ademe l’ont conduit à identifier les caractéristiques d’un bon indicateur. Celui-ci doit être scientifiquement robuste, neutre, accessible aux petites et moyennes entreprises et cohérent avec le cadre réglementaire européen. Les indicateurs suivants ont été privilégiés :

– en matière d’alimentation, l’indicateur « Agribalyse », fondé sur l’analyse du cycle de vie. Cette approche, plébiscitée par la Commission européenne, constitue un outil partagé permettant les comparaisons internationales ;

– en matière d’habillement, l’indicateur de performance environnementale des produits (product environmental footprint - PEF), testé par Décathlon, Promod, Bonne Gueule, Hermès, ou encore Louis Vuitton. Les représentants du secteur textile ont fait part du défi de la traçabilité des produits, rendue difficile en raison de la très longue chaîne de valeur de ce secteur.

Conscient du défi que constitue l’adoption d’un dispositif d’affichage environnemental au niveau européen, le CGDD a veillé à ce que les travaux d’expertise soient cohérents avec la méthode de calcul développée par la Commission européenne depuis décembre 2021, qui privilégie une approche en termes d’analyse du cycle de vie.

Il convient également de veiller à ce que des correctifs soient adoptés lorsque cette méthode sous-estime certains impacts ou certaines spécificités sectorielles.

En effet, les concertations menées par l’Ademe dans le cadre de ses travaux d’expérimentation ont mis en lumière les réserves de certaines associations de protection des consommateurs, en particulier l’UFC-Que Choisir, quant à la possibilité d’établir un outil réellement neutre. L’indicateur « Agribalyse » présente ainsi des limites dans la mesure où certains aspects sont insuffisamment pris en compte, comme la production intensive et l’impact des pesticides sur l’environnement. Face à ces limites, des correctifs ont été apportés afin de mieux prendre en compte les aspects environnementaux minorés par l’analyse du cycle de vie. Des indicateurs alternatifs, comme le « Planet‑Score », développé par l’institut technique de l’agriculture biologique, prennent en compte davantage de critères.

Une autre difficulté tient à la nécessité de trouver un équilibre entre un indicateur qui soit à la fois robuste et exhaustif, mais également facilement compréhensible par les consommateurs et accessible pour les entreprises. Comme indiqué par le CGDD, pour que le calcul soit accessible aux petites et moyennes entreprises, il convient de proposer un premier niveau de calcul, à partir de quelques paramètres simples : la recette d’un produit alimentaire, la composition d’un vêtement, les pays dans lesquels sont réalisées les différentes étapes de la production, les éventuels labels… L’outil de calcul « Ecobalyse », mis en place par l’Ademe et accessible gratuitement en ligne, répond à cet enjeu et permet à chacun de s’approprier les travaux en cours ([14]). En ne mobilisant que peu de paramètres, ce premier niveau de calcul permet d’envisager un déploiement à grande échelle. La DGCCRF a précisé qu’une partie des critères qui seraient pertinents (durabilité physique des textiles, prise en compte de la biodiversité dans les impacts des productions agricoles…) ne seraient intégrés que postérieurement, une fois un consensus scientifique trouvé.

Le CGDD a précisé que les travaux sont conduits en s’appuyant sur un comité scientifique pour les produits alimentaires et en réunissant un maximum d’experts pour le textile, afin d’assurer la robustesse de l’indicateur proposé. Les rapporteurs saluent cette méthode de travail qui doit permettre d’aboutir à un dispositif d’affichage à la fois lisible et robuste.

Enfin, les rapporteurs considèrent que les scores environnementaux obtenus par les différents produits soumis à l’affichage environnemental doivent être suffisamment discriminants afin d’avoir un réel impact sur les choix des consommateurs. Un même score ne doit pas pouvoir s’appliquer à deux produits de la même catégorie dès lors que leur impact environnemental est différent. L’échelle de notation doit donc être suffisamment étendue, par exemple en allant de la lettre A à la lettre F, et les fourchettes correspondant à chaque score doivent être suffisamment resserrées pour permettre de distinguer véritablement les produits entre eux.

Proposition n° 3 : Privilégier une méthodologie de calcul de l’affichage environnemental reposant sur l’analyse du cycle de vie, tout en veillant à ce que les scores environnementaux des produits soumis à affichage soient suffisamment discriminants. Pour cela, définir des critères de notation permettant de distinguer clairement les produits entre eux, en utilisant un large spectre de notation allant, par exemple, de la lettre A à la lettre F.

c.   Vers une évolution des produits et des choix de consommation ?

Les différentes expérimentations d’un affichage environnemental pour certains produits et services montrent que cet affichage pourrait contribuer à un changement des comportements, à la fois de la part des industriels et des consommateurs.

En effet, les fabricants sont incités à faire évoluer leurs produits et à privilégier des modes de production plus durables. Selon l’Ademe, les expérimentations menées ont contribué à développer des modèles reposant sur l’écoconception et incitent les entreprises à réfléchir à la composition des produits, leur durabilité ou encore, en ce qui concerne le secteur de l’habillement, à la question des volumes de vente et de la fréquence de renouvellement des collections.

L’affichage environnemental contribue en outre à orienter les choix des consommateurs. Le CGDD a ainsi indiqué que, dans le cadre des expérimentations conduites sur les produits alimentaires, le conseil scientifique a procédé à des tests qui ont permis d’observer que, sur un panel restreint de consommateurs et de produits, l’affichage environnemental s’est traduit par une évolution du panier de consommation. Les rapporteurs soulignent toutefois que, pour entraîner de réels changements de consommation, cet affichage devra être présent sur une grande diversité de catégories de produits. Ils souhaitent, à cet égard, que son déploiement dans les secteurs de l’ameublement et des cosmétiques puisse intervenir rapidement (voir proposition n° 2). Les rapporteurs insistent également sur la nécessité de lancer des actions de communication, de sensibilisation et de pédagogie. Afin de toucher un large public, ces campagnes d’information devront recourir à des supports variés (spots télévisés, réseaux sociaux, affichages publics, encarts réservés dans la presse écrite…) et être menées sur une durée suffisante.

Proposition n° 4 : Mener des campagnes de communication nationales afin de mieux faire connaître l’affichage environnemental auprès des consommateurs. Prévoir des supports de communication adaptés, avec des canaux de diffusion variés (spots télévisés, réseaux sociaux, affichages publics, encarts réservés dans la presse écrite…), sur une durée suffisante.

Le précédent du Nutri-Score invite à un certain optimisme quant à l’impact de l’affichage environnemental sur les choix de production et de consommation. D’après une étude de l’UFC-Que Choisir d’avril 2023 ([15]), une amélioration très significative de la qualité nutritionnelle des aliments a été constatée pour trois familles d’aliments où le Nutri-Score est le plus souvent affiché : les barres céréalières (43 % d’affichage), les pains spéciaux et biscottes (61 %) et les céréales du petit-déjeuner (97 %). En sept ans, la proportion de Nutri‑Score favorable A, B et C pour les barres céréalières a été multipliée par deux, passant de 25 % à 49 %. Dans le même temps, la part des Nutri-Score A et B a été multipliée par près de cinq pour les céréales du petit-déjeuner (de 8 % à 38 %) et est passée de 40 % à 62 % pour les pains spéciaux et les biscottes. Ainsi, de la même manière que les producteurs ont amélioré la qualité nutritionnelle de leurs recettes pour obtenir un Nutri-Score plus avantageux, ils pourraient, demain, privilégier des produits plus durables pour réduire les impacts environnementaux de leurs produits.

3.   Des campagnes de communication en faveur de modes de consommation plus responsables à renforcer

Si elle n’est pas, à elle seule, suffisante pour opérer la transition d’une économie linéaire vers une économie circulaire, la sensibilisation des consommateurs n’en reste pas moins indispensable à la réussite de cette transition.

Or, les pratiques commerciales actuelles sont loin d’être cohérentes avec les dispositions de la loi Agec en faveur d’un changement de modèles de production et de consommation. Si des bonnes pratiques ont pu être identifiées en faveur de l’achat de produits plus durables, cette approche reste très marginale. Comme le note la DGCCRF, certains aspects de l’économie circulaire sont encore globalement invisibles dans les communications commerciales, comme l’économie de la fonctionnalité ou la sobriété.

Pourtant, des enquêtes récentes montrent que l’intérêt des consommateurs pour une consommation plus responsable ne cesse de croître. Ainsi, près de trois Français sur quatre affirment changer leurs pratiques au quotidien pour réduire l’impact de leur consommation ([16]) et une proportion similaire demande à disposer d’une meilleure information sur l’impact environnemental et social des produits qu’ils achètent ([17]). Les consommateurs sont sensibles aux campagnes menées par l’Ademe, comme le montrent les résultats de l’enquête réalisée en 2021 sur la campagne « Nos objets ont plein d’avenir », lancée en 2019 auprès d’un échantillon représentatif de plus de 1 000 personnes. Cette campagne plaît à 81 % des personnes interrogées et les incite à agir dans 94 % des cas. Les retours concernant la campagne « Numérique responsable », diffusée uniquement via des canaux digitaux, sont similaires (la campagne plaît : 83 % ; incite à agir : 92 %).

Plus récemment, les nombreuses réactions à la campagne de publicité de l’Ademe mettant en scène un « dévendeur », diffusée en novembre 2023 ([18]), témoignent d’une interrogation nouvelle autour de la remise en cause du modèle consumériste de l’économie linéaire. Les controverses suscitées par cette publicité mettent toutefois en lumière la difficile modification des schémas de représentation de la société en faveur d’un modèle de consommation responsable et durable.

Les travaux sur les imaginaires collectifs et la désirabilité du modèle d’économie circulaire doivent donc être poursuivis et renforcés, dans le prolongement des avancées permises par la loi Agec.

Deux missions ont été lancées par le Gouvernement en ce sens :

– La mission confiée à M. Bruno Heilbrunn par Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation, de constituer un groupe d’experts sur les conditions d’une consommation durable et équitable, dont les conclusions étaient initialement attendues début décembre 2023, devrait permettre d’approfondir ces aspects. Interrogée par les rapporteurs, la DGPR leur a indiqué début mai 2024 que le rapport de la mission n’avait pas encore été remis à la ministre ;

– Le SGPE a par ailleurs annoncé le lancement d’une mission inter‑inspections ([19]) sur la régulation de la publicité, dont la lettre de mission est en cours de finalisation. Cette mission serait chargée de traiter des sujets suivants : la fixation des règles et la régulation des contenus, notamment l’encadrement des publicités sur les produits à fort impact environnemental ; l’articulation des niveaux de régulation et de contrôle que sont l’autorégulation de l’ARPP, le contrôle des contrats-climat par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), celui des allégations et informations environnementales par la DGCCRF et l’interdiction de certaines publicités ; les possibilités de mise à contribution du secteur publicitaire pour financer des campagnes de sensibilisation aux impacts de la surconsommation et promouvoir des modèles économiques soutenus dans le cadre de la transition écologique ; un focus sectoriel sur les enjeux de régulation de la publicité dans le secteur de la fast fashion.

Les conclusions de ces travaux devraient donc donner lieu à de nouvelles mesures en matière d’information du consommateur, dans le prolongement des avancées de la loi Agec.

B.   Des incitations en faveur de l’allongement de la durée de vie des produits

1.   Les indices de réparabilité et de durabilité influencent les décisions d’achat

Créé par l’article 16 de la loi Agec, l’article L. 541-9-2 du code de l’environnement met en place un indice de réparabilité afin d’informer les consommateurs sur la capacité à réparer les équipements électriques et électroniques. Depuis le 1er janvier 2024, un indice de durabilité, incluant de nouveaux critères tels que la fiabilité et la robustesse du produit, est supposé compléter ou remplacer l’indice de réparabilité lorsque celui-ci existe.

La méthode de calcul et les modalités d’affichage de cet indice, définies par le décret n° 2020‑1757 du 29 décembre 2020 relatif à l’indice de réparabilité des équipements électriques et électroniques, ont fait l’objet de larges concertations avec l’ensemble des parties prenantes (fédérations de fabricants, de distributeurs‑vendeurs, associations de consommateurs et associations environnementales). Depuis le 1er janvier 2021, l’obligation porte sur les lave-linge hublot, les smartphones, les ordinateurs portables, les téléviseurs et les tondeuses à gazon électriques. Elle a été étendue en novembre 2022 aux lave-linge front, lave‑vaisselle, aspirateurs et nettoyeurs à haute pression.

a.   Un premier bilan encourageant

Un bilan de la mise en œuvre de l’indice de réparabilité a été réalisé par l’Ademe en juin 2022 ([20]). Les retours des différents acteurs permettent de conclure globalement à une réussite de la première phrase de déploiement du dispositif, qui remporte l’adhésion des professionnels et est déjà bien connu des consommateurs.

i.   Impact de l’indice de réparabilité sur les pratiques des fabricants et des distributeurs

L’Ademe note dans son bilan précité que les fabricants sont, dans leur ensemble, favorables à l’indice de réparabilité.

Certains d’entre eux font de leur service après-vente (SAV) un fer de lance de leur positionnement en faveur de la réparation des équipements. Par exemple, un fabricant a décidé de maintenir son SAV au résultat financier négatif dans le seul but de valoriser la qualité de ses produits.

L’indice de réparabilité commence à être intégré aux pratiques d’achats des distributeurs, certains prévoyant même de déréférencer les produits n’ayant pas obtenu une note suffisante ou d’interpeller les fabricants pour qu’ils améliorent leurs pratiques. Dans ce contexte, la réparation sur site pourrait se développer en s’ancrant dans une compétition entre distributeurs pour satisfaire au mieux les attentes des consommateurs. Cela pourrait permettre d’enrayer la perte de compétences observée depuis plusieurs années dans la grande distribution sur la réparation, la plupart des distributeurs se contentant aujourd’hui de réceptionner les équipements défectueux et de les renvoyer aux fabricants ou aux réparateurs.

Enfin, la mise en place de l’indice de réparabilité a permis d’encourager l’écoconception, même si la plupart des acteurs déclarent qu’il reste encore beaucoup de marge de manœuvre en interne. La durée de disponibilité des pièces détachées et la mise à disposition de documentations techniques ont été améliorées afin d’augmenter les notes de certains produits. Interrogée par les rapporteurs, l’Ademe a confirmé que certains professionnels ont déjà modifié leurs pratiques afin d’améliorer la notation de leurs produits. Par exemple, depuis la mise en œuvre de l’indice de réparabilité, Samsung met l’ensemble de sa documentation à disposition des réparateurs, ce qui n’était pas le cas précédemment, et Apple a modifié la conception de l’iPhone 15 afin de le rendre plus facilement réparable.

ii.   Impact de l’indice de réparabilité sur les choix des consommateurs

L’Ademe note dans son bilan précité de juin 2022 que plusieurs acteurs ont observé une hausse du recours à la réparation au cours des dernières années (doublement des commandes de pièces détachées chez Spareka, 10 % d’augmentation du chiffre d’affaires hors garantie chez Acer, augmentation des demandes de réparation chez Fnac-Darty...). Selon l’agence, cette hausse est associée à plusieurs phénomènes indissociables : une prise de conscience globale et croissante des enjeux environnementaux par les consommateurs, un recours accru à l’auto-réparation lors du premier confinement de mars 2020, un travail important de communication des pouvoirs publics et des associations en faveur de la réparation (campagne « Longue vie aux objets », Répar’Acteurs, Repair Café…).

Dans une étude d’octobre 2023, la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) a évalué l’impact de l’indice de réparabilité sur le comportement d’achat des consommateurs à partir des données réelles de ventes de grands distributeurs français ([21]). L’étude, qui s’appuie sur les sciences comportementales, montre une association positive entre l’indice de réparabilité et les ventes de produits plus réparables, en particulier dans le cadre des ventes en ligne. Elle montre également que les notes des produits augmentent, ce qui illustre une tendance à proposer des modèles de plus en plus réparables. Ces résultats témoignent d’un cercle vertueux : les consommateurs s’orientent vers des produits davantage réparables, et les produits mis sur le marché sont euxmêmes de plus en plus réparables.

Toutefois, au-delà d’un accueil globalement favorable, il ressort des données analysées par l’Ademe une certaine difficulté des Français à s’approprier l’indice de réparabilité. En effet, la notion de réparabilité est peu usuelle, peu parlante et renvoie à une activité technique ou de « bricolage » que les consommateurs craignent de devoir assumer. En outre, le recours aux réparateurs professionnels est parfois difficile : certains territoires en sont dépourvus, le temps de réparation peut être long et son coût élevé. Ainsi, les acteurs interrogés dans le cadre de l’enquête de l’Ademe de juin 2022 considèrent que la grande majorité des consommateurs reste faiblement engagée sur les démarches de réparation, en particulier lorsque le coût de réparation représente plus de 30 % du coût d’achat, pour les équipements les moins chers et pour ceux qui présentent de fortes évolutions technologiques. Enfin et surtout, l’indice de réparabilité ne constitue pas un strict indicateur de durée de vie du produit.

b.   Des demandes entendues en faveur de davantage de transparence et de discrimination entre les produits

i.   Des modalités de calcul de l’indice jugées trop peu discriminantes, améliorées dans le cadre de la mise en place de l’indice de durabilité

L’étude précitée de l’Ademe montre que si la plupart des fabricants considèrent que les indices de réparabilité actuellement publiés sont bien représentatifs de la réalité, d’autres acteurs (réparateurs, distributeurs, associations) estiment que les notes obtenues par certains produits sont relativement élevées, en particulier ceux réputés difficilement réparables comme les smartphones (92 % des notes sont supérieures à 6) ou les petits téléviseurs. Un distributeur a également calculé que 70 % des produits qui le concernent (hors tondeuses à gazon électriques) ont une note comprise entre 6 et 7,9. Il constate que les notes ne sont pas toujours différenciantes et ne permettent pas au consommateur de discerner les produits les plus réparables ou les efforts d’écoconception. Si ces acteurs ne remettent pas radicalement en cause les critères de l’indice de réparabilité, ils estiment que l’échelle de notation, la pondération ou la construction de l’indice pourraient être améliorées. Ils considèrent que certains enjeux liés à la réparabilité ne sont pas suffisamment visibles dans le calcul actuel, comme le coût de déplacement et de main-d’œuvre des réparateurs ou le rapport entre coût de réparation et coût d’achat.

L’étude de l’Ademe montre en effet que la plupart des équipements obtiennent une note comprise entre 6 et 8, ce qui correspond au logo vert clair de l’indice de réparabilité. C’est notamment le cas de la grande majorité des tondeuses, si bien que l’information ne permettrait pas véritablement de guider le choix du consommateur.

Cette limite de l’indice de réparabilité, dans sa première version, a également été mise en avant par l’association Halte à l’obsolescence programmée (HOP) dans une étude de mars 2022 ([22]). Comme la plupart des acteurs, HOP juge que l’indice constitue « un bon outil » mais qu’il ne distingue pas suffisamment les critères les plus pertinents. Cet avis est conforme à celui exprimé par l’association de consommateurs UFC-Que Choisir dans un rapport de décembre 2021 ([23]) qui estime ainsi que l’indice a « une efficacité mitigée », notamment parce qu’« il propose une moyenne basée sur plusieurs critères évalués à la même importance ».

Plusieurs demandes ont été formulées par les associations comme HOP, l’UFC-Que Choisir et Murfy afin d’améliorer l’efficacité de l’indice de réparabilité. Elles réclament notamment une plus grande transparence du dispositif, les producteurs ne fournissant pas toujours le détail des notes qu’ils sont pourtant censés mettre à disposition des consommateurs. Les associations se sont également prononcées en faveur d’une plus grande discrimination dans les notations. Murfy a notamment indiqué aux rapporteurs que « l’indice de réparabilité, tel qu’il avait été élaboré dans sa première version, était effectivement trop peu discriminant entre les différents appareils. Les notes de réparabilité s'échelonnaient entre 5 et 8/10, quasiment aucune sous la moyenne, ce qui ne permettait pas aux consommateurs de privilégier ou d’exclure certains appareils ».

Ces critiques ont été reprises et partagées lors du cinquième comité de suivi de l’indice de réparabilité qui s’est tenu en octobre 2022. Des pistes d’amélioration ont été formulées sur la base de ces éléments, dans le cadre de la création de l’indice de durabilité.

L’indice de durabilité, dont la mise en place était prévue à compter du 1er janvier 2024, repose sur trois critères :

– la fiabilité, traduisant la capacité du produit à fonctionner le plus longtemps possible avant la première panne ou casse. Il est composé de trois sous‑critères : la résistance aux contraintes et/ou à l’usure, la possibilité d’entretien et de maintenance, y compris logicielle, l’engagement du fabricant via des extensions de garantie commerciale de durabilité et une démarche qualité interne ;

– l’amélioration ou l’évolutivité logicielle et/ou matérielle, prévenant la mise au rebut liée à l’obsolescence culturelle et/ou technologique tout au long de la vie du produit. Ce critère ne s’applique qu’aux produits informatiques ;

– la réparabilité, reprenant les critères de l’indice de réparabilité tout en les améliorant pour tenir compte des retours d’expérience reçus.

ii.   Une transparence à améliorer

Afin d’améliorer l’information des consommateurs, le Groupement des marques d’appareils pour la maison (Gifam) a créé un site internet « monindicedereparabilite.fr » ([24]) qui compile l’ensemble des indices de réparabilité des appareils et permet de les comparer entre eux.

Cette mission d’information, initiée par un acteur privé, a ensuite été développée par les pouvoirs publics. Dans le but de constituer un répertoire national de données relatif à l’indice de réparabilité, ouvert et accessible à tous, les fabricants ou metteurs sur le marché des produits concernés ont désormais la possibilité de publier les données ayant permis le calcul de l’indice sur la plateforme d’État en libre accès « data.gouv.fr » ([25]). Le renseignement du répertoire national relatif à l’indice de réparabilité, dans un premier temps volontaire, doit devenir obligatoire avec la mise en œuvre de l’indice de durabilité. Cette base de données nationale a pour objectif d’améliorer l’information du consommateur, de faciliter les contrôles de la DGCCRF et de simplifier la transmission des données entre les fabricants et les distributeurs.

Cet enjeu de transparence est d’autant plus important que l’Ademe, dans son étude de juin 2022 précitée, note que de nombreux acteurs se sont inquiétés de la crédibilité des notes alors que les fabricants s’auto-évaluent.

iii.   Des contrôles à renforcer

Sur les 523 établissements contrôlés par la DGCCRF en 2022, 341 ne respectaient pas les règles qui encadrent l’indice de réparabilité, soit 65 % d’entre eux. L’absence de mise à disposition des paramètres de calcul constitue l’anomalie la plus fréquemment constatée : elle représente 73 % du total des anomalies pour les magasins physiques et 52 % pour les sites de vente en ligne. À l’issue de ces contrôles, 256 établissements ont reçu des avertissements et 89 une injonction. Les manquements les plus sérieux ont donné lieu à cinq amendes administratives infligées à un commerce de détail d’appareils ménagers et de multimédia, un réparateur d’équipements de communication, une quincaillerie et deux hypermarchés. Dans la plupart des cas, les professionnels se sont engagés à procéder aux modifications nécessaires et à l’affichage des éléments prévus par la loi. Des mises en conformité ont été effectuées au cours même des contrôles.

Les contrôles menés par la DGCCRF en 2022 ont permis de rappeler aux professionnels les modalités d’application de la réglementation relative à l’indice de réparabilité et les sanctions encourues en cas de pratiques non conformes, un rappel d’autant plus utile que cette réglementation est relativement nouvelle et évolutive.

Devant le nombre particulièrement élevé de cas de non-respect de la réglementation, les rapporteurs considèrent qu’il convient de renforcer le contrôle de la mise en œuvre de l’indice de réparabilité. En effet, alors que les sanctions sont applicables depuis le 1er janvier 2022, plusieurs acteurs auditionnés ont fait part de leurs doutes quant à la capacité de vérification de la DGCCRF, en termes de moyens humains comme de compétences techniques.

Pour les rapporteurs, il est important que les services administratifs de contrôle effectuent des contrôles sur place, et non uniquement des contrôles documentaires. Ces contrôles sur les lieux de vente sont particulièrement justifiés dans la mesure où la plupart des irrégularités sont constatées dans les magasins physiques, bien plus que sur les sites de vente en ligne (voir chiffres ci-dessus).

En outre, les rapporteurs proposent que l’absence de mise en place de l’indice de réparabilité, lorsqu’elle est obligatoire, ou sa mise en œuvre partielle, donne lieu à des pénalités financières versées par les producteurs à leur écoorganisme. Le cahier des charges des éco-organismes concernés pourrait être modifié en ce sens. Il faudrait en outre, pour que cette proposition soit effectivement applicable, que les écoorganismes soient directement informés lorsque les indices affichés par leurs adhérents ne respectent pas la réglementation.

Proposition n° 5 : Renforcer les contrôles de la mise en œuvre de l’indice de réparabilité :

– en privilégiant des contrôles sur place par rapport aux contrôles documentaires ;

– en prévoyant des pénalités financières, versées par les producteurs à leur éco-organisme, en cas d’absence de mise en place de l’indice de réparabilité ou d’irrégularités constatées ;

– en prévoyant que l’administration en charge du contrôle informe directement les éco-organismes lorsque les indices affichés par leurs adhérents ne respectent pas la réglementation.

c.   L’abandon de l’indice de durabilité des smartphones, un recul important au profit de dispositions européennes moins ambitieuses

Dès juin 2022, l’Ademe considérait que l’appropriation de l’indice de réparabilité par les consommateurs pourrait être facilitée par le fait qu’il intègre un critère de durabilité. D’après un sondage Harris réalisé par l’Ademe en mai 2023 ([26]), ce critère est considéré comme important ou très important par 84 % des consommateurs, devant d’autres critères comme le prix, la consommation d’énergie, la facilité d’utilisation, les performances techniques, la marque, l’esthétique ou le pays de fabrication.

La mise en place de l’indice de durabilité, plébiscitée par les consommateurs, se heurte toutefois au droit de l’Union européenne.

Dans le cadre de la notification des textes réglementaires relatifs à l’indice de durabilité, la Commission européenne a émis un avis sur la mise en place de cet indice pour trois catégories de produits : les téléviseurs, les lave‑linge et les smartphones.

● Pour les téléviseurs et les lave-linge, la Commission a simplement émis des observations et a confirmé au Gouvernement français que les travaux en vue de l’adoption des textes réglementaires pouvaient être poursuivis, faute de norme européenne qui prévaut pour ces deux produits. La Commission a toutefois prévenu qu’en cas de norme harmonisée à l’avenir, la France « devra être prête à [s’] aligner » sur le droit de l’Union européenne.

L’indice de durabilité des équipements électriques et électroniques est précisé par quatre textes réglementaires. Un décret et un arrêté « chapeau » du 5 avril 2024 ([27]) fixent les modalités d’affichage et de transmission du détail des notes, ainsi que les critères et sous-critères retenus pour le calcul de l’indice. Deux arrêtés du 5 avril 2024 ([28]) déclinent le dispositif pour les téléviseurs et les lavelinge. Ils entreront en vigueur neuf mois après leur publication, soit début 2025.

● Les réserves de la Commission européenne portent sur l’indice de durabilité des smartphones en raison de la publication du règlement (UE) 2023/1670 du 16 juin 2023 établissant des exigences en matière d’écoconception applicables aux smartphones, aux téléphones portables autres que des smartphones, aux téléphones sans fil et aux tablettes. La mise en place de l’indice de durabilité pour les smartphones n’est pas compatible avec l’affichage de la future étiquette énergie qui intégrera un indice de réparabilité européen, obligatoire à compter de juin 2025 ([29]). La Commission a donc émis, le 27 octobre 2023, un avis circonstancié sur les projets de décret et d’arrêtés présentés par la France.

Dans leur réponse à cet avis, les autorités françaises ont indiqué qu’elles ne « procéderont pas à la publication des textes en question, afin de tenir compte des préoccupations de la Commission » ([30]).

Les rapporteurs regrettent vivement l’abandon de l’indice de durabilité des smartphones au profit de l’étiquetage énergétique européen, qui marque un recul important par rapport à l’ambition initiale de la loi Agec.

L’indice de réparabilité européen est en effet moins ambitieux que l’indice de durabilité français.

Pourtant, la prise en compte de la durabilité est cruciale dans la mesure où près de 80 % de l’empreinte carbone d’un smartphone est liée à sa phase de fabrication, le reste étant lié à sa phase d’usage. En outre, une étude de l’Ademe montre qu’un ménage qui prolongerait d’un an la durée de vie de ses onze principaux appareils domestiques économiserait 96 euros par an et 22 kilogrammes d’équivalent CO2 par an ([31]). Pour réduire son empreinte carbone tout en réalisant des économies, le levier le plus important est donc un usage plus long des équipements, ce qui suppose de les rendre plus robustes, plus fiables, plus réparables, de faciliter la maintenance, l’entretien et les mises à jour. L’indice de durabilité français répond à l’ensemble de ces problématiques, alors que l’indice de réparabilité européen n’y répond que très partiellement.

Moins disant par rapport à l’indice de durabilité français, l’indice de réparabilité européen est également moins ambitieux que l’indice de réparabilité français, comme le montre le tableau suivant.

Différences entre les indices de réparabilité français et européen
des Smartphones

Critère

Indice de réparabilité français

Indice de réparabilité européen

1. Documentation

1.1. Durée de disponibilité de la documentation technique et relative aux conseils d’utilisation et d’entretien en fonction de la typologie d’acteurs

Typologie d’acteur pour laquelle la documentation est disponible

2. Démontabilité et accès, outils, fixations

2.1. Facilité de démontage des pièces figurant sur la liste 2

Facilité de démontage

2.2. Outils nécessaires (liste 2)

Outils nécessaires

2.3. Caractéristiques des fixations entre les pièces de la liste 1 et de la liste 2

Caractéristiques des fixations

3. Disponibilité des pièces détachées

3.1. Durée de disponibilité des pièces de la liste 2 en fonction de la typologie d’acteur

Typologie d’acteur pour laquelle les pièces détachées sont disponibles

3.2. Durée de disponibilité des pièces de la liste 1

 

3.3. Délai de livraison des pièces de la liste 2

 

3.4. Délai de livraison des pièces de la liste 1

 

4. Prix des pièces détachées

4.1. Rapport prix des pièces de la liste 2 sur prix de l’équipement neuf

 

5. Critère spécifique

(exemple avec 3 sous-critères)

5.1. Informations sur la nature différenciée des mises à jour : correctives (bugs ou failles de sécurité), évolutives ou mixtes

Durée des mises à jour logicielles

5.2. Type d’assistance à distance

 

5.3. Réinitialisation de la carte électronique

Réinitialisation des micro-logiciels

 

Source : Ademe.

Il est particulièrement regrettable que l’indice européen ne prenne pas en compte le coût de la réparation, alors que celui-ci constitue un élément primordial dans la décision du consommateur. Les études de l’Ademe montrent en effet que ce dernier n’est pas incité à faire réparer son produit si le montant de la réparation dépasse de plus d’un tiers le prix du même produit neuf. L’indice européen ne prend pas non plus en compte les durées de disponibilité et les délais de livraison des pièces détachées.

Afin d’éviter un nouveau recul par rapport aux dispositions prévues par la loi Agec, la France doit veiller, a minima, à ce que le critère relatif au coût de la réparation figure dans le futur indice de réparabilité européen des lavelinge et des téléviseurs, si celui-ci devait être mis en place.

Proposition n° 6 : Dans le cadre d’éventuelles négociations en vue de la mise en place d’un indice de réparabilité européen pour les lave-linge et les téléviseurs, veiller à ce que celui-ci comporte un critère relatif au coût de la réparation, comme c’est aujourd’hui le cas pour l’indice de réparabilité français.

Pour cela, la France doit mieux défendre les avancées de la loi Agec auprès des instances de négociations européennes.

Interrogée sur les lacunes en matière de défense des positions françaises, la DGPR soutient toutefois que « les avancées concernant l’indice de réparabilité au niveau européen montrent que le dispositif français a su être un réel aiguillon de la politique européenne ». Les rapporteurs considèrent quant à eux que les résultats obtenus sont décevants : non seulement l’indice de durabilité n’a pas été repris, mais l’indice de réparabilité européen est moins ambitieux que l’indice de réparabilité français.

Les rapporteurs estiment que des échanges plus fluides et plus fréquents, impliquant l’ensemble des parties prenantes, auraient peut-être permis de faire prévaloir l’indice de durabilité français.

À l’avenir, les avancées françaises doivent servir de modèle en vue d’une évolution de la réglementation européenne. Pour cela, les rapporteurs préconisent :

– de mettre en place des échanges réguliers entre la France et les institutions européennes, dès que la Commission européenne annonce son intention de légiférer ;

– d’associer à ces discussions à la fois les acteurs administratifs (services techniques et administratifs du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires), le secrétariat général aux affaires européennes et la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne, ainsi que les décideurs politiques (ministres et secrétaires d’État concernés) ;

– de veiller à ce que les acteurs de l’économie circulaire soient associés aux forums de consultation de la Commission européenne ;

– de mettre en place des coalitions avec d’autres États membres pour défendre les avancées nationales en matière d’économie circulaire.

Proposition n° 7 : Mieux défendre les avancées issues de la loi Agec auprès des institutions européennes afin qu’elles puissent servir de modèle en vue d’une évolution de la réglementation européenne :

– en organisant des échanges réguliers entre la France et les institutions européennes, dès que la Commission européenne annonce son intention de légiférer ;

– en associant à ces discussions à la fois les acteurs administratifs (services techniques et administratifs du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires), le secrétariat général aux affaires européennes et la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne, ainsi que les décideurs politiques (ministres et secrétaires d’État concernés) ;

– en veillant à ce que les acteurs de l’économie circulaire soient associés aux forums de consultation de la Commission européenne ;

– en mettant en place des coalitions avec d’autres États membres pour défendre les avancées nationales en matière d’économie circulaire.

2.   Après un démarrage décevant, le « bonus réparation » a fait l’objet d’ajustements

a.   Le déploiement décevant du bonus réparation

Créé par l’article 62 de la loi Agec, l’article L. 541-10-4 du code de l’environnement prévoit que chaque éco-organisme et chaque producteur en système individuel créent un fonds dédié au financement de la réparation, afin de participer au financement des coûts de réparation effectuée par un réparateur labellisé des produits détenus par des consommateurs. Le « bonus réparation » permet ainsi de réduire le coût de la réparation pour le consommateur à travers une déduction sur sa facture. Ce dispositif, déployé fin 2022 pour les produits électriques et électroniques et en novembre 2023 pour les textiles, linge de maison et chaussures, vise à encourager la réparation des produits usagés et la création d’emplois locaux non délocalisables.

● Le bonus réparation de la filière des équipements électriques et électroniques a été mis en place le 15 décembre 2022. D’après les données communiquées à l’Ademe par les éco-organismes, 1 875 sites étaient labellisés en septembre 2023, soit une moyenne de 18 sites labellisés par département, ce qui reste faible au regard des 22 330 établissements de réparation d’équipements électriques et électroniques recensés en France dans le dernier « Panorama de l’offre de la réparation en France », réalisé par l’Ademe et portant sur les données de 2022. Le nombre de réparateurs labellisés représente ainsi à peine 8 % du total des réparateurs d’équipements électriques et électroniques. En outre, il s’agit principalement de réparateurs multi‑sites, et non de réparateurs indépendants de plus petite taille.

Le faible nombre de réparateurs labellisés s’accompagne logiquement d’un montant réduit de bonus versés. Mi-2023, le fonds de la filière à responsabilité élargie du producteur (REP) des déchets des équipements électriques et électroniques n’avait versé que 1,2 million d’euros de soutien financier, alors que 63 millions étaient budgétisés pour la période 2022-2023.

Il convient toutefois de souligner que ce bilan décevant a été réalisé seulement quelques mois après le lancement du fonds réparation de la filière des équipements électriques et électroniques. Selon la direction générale des entreprises (DGE), ce premier bilan mitigé s’expliquerait par trois facteurs majeurs : la faible communication sur les bonus mis en place, les barrières à l’entrée pour les petits réparateurs afin de se faire labelliser, liées notamment au coût élevé et à la lourdeur administrative de la labellisation, et des montants de bonus qui ne seraient pas assez incitatifs pour les consommateurs.

● Le bonus réparation de la filière des textiles, linge de maison et chaussures a été lancé le 7 novembre 2023. On recense actuellement plus de 650 sites de réparateurs labellisés répartis dans toutes les régions françaises, ce qui correspond à environ 6 % des près de 10 400 établissements de réparation recensés. Bien qu’il soit trop tôt pour dresser un bilan de la mise en place de ce bonus, les premiers retours sont encourageants. L’Ademe relève ainsi « une très bonne communication sur ce fonds dans les médias et sur les réseaux sociaux grand public » et note que « la labellisation est facilitée pour les réparateurs de cette filière de produits (labellisation gratuite, standard téléphonique gratuit pour accompagner les réparateurs vers la labellisation, mise à disposition d’une FAQ détaillée et pédagogique sur le site de l’éco-organisme Refashion…) ». La DGE indique toutefois qu’il sera crucial d’accroître, dans les mois à venir, le nombre de réparateurs agréés pour atteindre l’objectif fixé par l’éco-organisme Refashion d’une augmentation de 35 % du nombre de réparations de textiles.

b.   Une réforme des fonds réparation en 2024 afin de remédier aux principaux écueils du dispositif

Les premiers résultats décevants du bonus réparation ont conduit Mme Bérangère Couillard, alors secrétaire d’État à l’Écologie, à engager une réforme des fonds réparation dès avril 2023. Après d’importantes concertations, un décret du 20 février 2024 ([32]), qui entrera en vigueur le 1er juillet 2024, sanctuarise les moyens alloués aux fonds réparation, renforce le rôle des pouvoirs publics dans la fixation du montant des bonus et simplifie le versement de ces bonus et la labellisation des réparateurs. Ce décret fait suite à un premier arrêté, publié le 10 novembre 2023 ([33]), qui comportait une première série de mesures destinées à augmenter le nombre de réparateurs agréés et à accélérer le versement des bonus.

Les rapporteurs ont constaté lors des auditions consacrées aux fonds réparation que le dispositif actuel est loin de répondre aux objectifs attendus, notamment au regard des fortes attentes citoyennes. De nombreux freins font que la réparation reste un effort contraignant par rapport au renouvellement d’un bien.

Attentifs aux critiques formulées par les personnes auditionnées, les rapporteurs considèrent que différentes mesures permettraient d’améliorer le déploiement et l’efficacité du bonus réparation :

– les dispositions prévues par le décret du 20 février 2024 et l’arrêté du 10 novembre 2023 précités devraient permettre de répondre aux principales lacunes identifiées, même s’il est trop tôt pour évaluer la capacité de ces deux textes réglementaires à remédier aux premiers résultats décevants des fonds réparation (l’entrée en vigueur du décret n’étant prévue qu’en juillet 2024) ;

– les rapporteurs souhaitent toutefois aller plus loin, en formulant de nouvelles recommandations.

i.   Améliorer la communication et l’information des consommateurs

Le bonus réparation n’est actuellement pas suffisamment connu des consommateurs.

D’après une enquête de l’Institut national de la consommation (INC) menée en février 2023 sur la loi Agec, 94 % des consommateurs estiment qu’il est important que le fabricant propose un service de réparation des produits achetés. Pourtant, au moment de l’enquête, seulement un consommateur sur trois semblait connaître l’existence des fonds réparation. Ce constat est partagé par l’association HOP dans un rapport publié le 31 janvier 2024 sur l’impact du bonus réparation applicable aux équipements électriques et électroniques ([34]). L’étude pointe un important déficit de communication autour du dispositif. Parmi les personnes interrogées, 88 % ne le connaissaient pas avant de répondre à l’étude et seules 10 % d’entre elles en ont bénéficié.

Après une année de retours d’expérience, la DGPR regrette également une communication des éco‑organismes de la filière des déchets d’équipements électriques et électroniques « en retenue ».

Les textes réglementaires adoptés récemment comportent des dispositions destinées à améliorer la communication autour du bonus réparation. Le décret du 20 février 2024 précité impose aux distributeurs de produits concernés de « [communiquer] au consommateur, de manière visible, lisible et facilement accessible, les informations relatives [au bonus réparation] ». Cette disposition doit notamment permettre de remédier au fait que certains distributeurs de produits électroniques préfèrent vendre leur offre d’extension de garantie plutôt que de mettre en avant le bonus réparation, les deux dispositifs ne pouvant pas se cumuler. L’arrêté du 10 novembre 2023 précité prévoit quant à lui que l’éco‑organisme consacre chaque année au moins 1 % du montant total des contributions financières qu’il perçoit à la réalisation de campagnes d’information et de sensibilisation d’envergure nationale et locale portant sur le fonds réparation.

Si ces dispositions réglementaires vont dans le bon sens, les rapporteurs considèrent que les actions de communication autour du bonus réparation et, au‑delà, de l’intérêt de recourir à la réparation, doivent être renforcées. Afin de permettre aux éco-organismes de renforcer les campagnes de promotion du bonus, les rapporteurs proposent qu’ils y consacrent, au cours des trois prochaines années, au moins 2 % du montant des contributions financières perçues, contre seulement 1 % aujourd’hui. Pour une meilleure efficacité, ces campagnes de communication pourraient être coordonnées entre les différents types de bonus (appareils électriques et électroniques et textile). En outre, Régions de France a insisté lors de son audition sur la nécessité de mettre en place des campagnes locales de communication, en partenariat avec les chambres consulaires et les chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (Cress).

Proposition n° 8 : Renforcer les campagnes d’information sur le bonus réparation :

– en prévoyant que l’éco‑organisme y consacre, au cours des trois prochaines années, au moins 2 % du montant total des contributions financières perçues ;

– en coordonnant les actions de sensibilisation menées pour les différents types de bonus réparation ;

– en adaptant chaque campagne aux spécificités locales (notamment le nombre et la densité de réparateurs), en partenariat avec les chambres consulaires et les chambres régionales de l’économie sociale et solidaire.

ii.   Rendre le dispositif plus attractif pour les consommateurs

Pour convaincre les consommateurs, il est essentiel que le recours à la réparation ne soit pas source de difficultés ou de dépenses supplémentaires. Or, les montants de prise en charge restent encore assez faibles au regard du coût de la réparation. Ce dernier reste le premier frein à la réparation pour un peu plus de six consommateurs sur dix, l’après l’enquête de l’INC de février 2023 précitée.

Afin d’améliorer l’attractivité du bonus réparation pour les consommateurs, l’État avait initialement envisagé de fixer lui-même le montant des bonus versés pour certaines réparations, avec pour ambition de créer des « super bonus » deux fois plus élevés que ceux proposés par les éco-organismes. L’État et les éco‑organismes de la filière REP des déchets d’équipements électriques et électroniques se sont finalement entendus sur des « super bonus », sans que les pouvoirs publics n’aient à prendre un arrêté. Le montant de cinq bonus réparation a ainsi été doublé depuis janvier 2024 : la réduction accordée pour la réparation d’un téléviseur atteint 60 euros, celle accordée pour un lave-linge, un lave-vaisselle et un sèche-linge passe à 50 euros et celle applicable à un aspirateur à 40 euros. Une hausse de 5 euros des bonus accordés pour la réparation de vingt‑et‑un équipements a également été actée. Par ailleurs, afin de s’assurer que les montants des bonus restent incitatifs, le décret du 20 février 2024 précité prévoit que lorsque l’intégralité du montant du fonds n’est pas dépensée, le niveau des bonus (appelé « la part minimale de financement de la réparation ») pourra être fixé par un arrêté du ministre chargé de l’environnement. Enfin, le décret du 20 février 2024 sanctuarise les budgets en prévoyant que lorsque le montant annuel d’un fonds réparation n’est pas intégralement dépensé au cours d’un exercice, le reliquat est réaffecté l’année suivante.

Les rapporteurs saluent la mise en place de ces « super bonus » ainsi que la possibilité pour l’État de fixer lui-même le montant des bonus.

Pour être efficace, ils considèrent que ces hausses doivent rendre la réparation financièrement intéressante pour le consommateur. Or, selon l’Ademe, le coût de la réparation d’un produit ne doit pas excéder le tiers du montant du même produit vendu neuf pour être suffisamment incitative. Les rapporteurs souhaitent donc que l’augmentation des différents montants de bonus réparation permette de réduire le coût de la réparation d’un produit à un tiers du prix du même produit neuf.

Proposition n° 9 : Augmenter les montants du bonus réparation afin que le coût de la réparation d’un produit pour le consommateur ne dépasse pas le tiers du prix du même produit vendu neuf.

iii.   Renforcer le maillage territorial et le nombre de réparateurs agréés

Le maillage territorial et le nombre de réparateurs labellisés restent largement insuffisants, ce qui est susceptible de provoquer une déception des consommateurs qui ont entendu parler du bonus réparation mais ne peuvent en bénéficier. C’est pourquoi toute action de communication en faveur du bonus doit s’accompagner d’un renforcement de l’offre existante. À cet égard, le déploiement des points de réparation fait partie des politiques prioritaires du gouvernement (PPG), avec un objectif de près de 3 500 points de réparation ouverts aux bonus (toutes filières confondues) fin 2023 et une cible de près de 22 000 points de réparation pour fin 2026.

Interrogée par les rapporteurs, la DGPR a indiqué que l’objectif de 2023 a été dépassé. Au 31 décembre 2023, 5 625 réparateurs étaient labellisés sur le territoire national, répartis de la manière suivante :

Répartition géographique des réparateurs labellisés fin 2023

Source : DGPR.

Selon les rapporteurs, différents freins doivent encore être levés pour atteindre l’objectif ambitieux de 2026.

● La complexité des démarches nécessaires à l’obtention de l’agrément est susceptible de rebuter de nombreux réparateurs. Comme le note l’entreprise de réparation d’appareils électroménagers Murfy, ces difficultés concernent d’abord les réparateurs indépendants, qui représentent une part très importante de la profession. L’association France urbaine a également indiqué « qu’aujourd’hui, la demande de la qualification QualiRépar ne permet pas aux artisans et aux petites structures, notamment de l’économie sociale et solidaire, de se positionner. Le déploiement actuel du bonus réparation se fait surtout au bénéfice des grandes enseignes qui proposent des services de réparation ». Ce constat s’étend aux textiles, linge de maison et chaussures. Selon l’Union des industries textiles (UIT), « il semble que la procédure pour s’identifier auprès de l’éco-organisme Refashion soit particulièrement complexe, et le temps pris par les démarches administratives quotidiennes de remboursement freine un certain nombre de réparateurs ».

Afin de rendre le dispositif plus attractif pour les réparateurs indépendants, le décret du 20 février 2024 précité comprend plusieurs mesures visant à faciliter l’accès des réparateurs aux fonds réparation :

– il accélère la délivrance du label de réparateur agréé pour le bonus : le délai de réponse d’un éco-organisme à une demande de labellisation d’un réparateur est fixé à trois mois à compter de la date de réception d’un dossier complet. Passé ce délai, la labellisation est réputée accordée.

– il impose la mutualisation du versement de certains bonus. Les éco‑organismes agréés pour les filières des équipements électriques et électroniques, des jouets, des articles de sport et loisir et des articles de bricolage et de jardin doivent ainsi mettre en place une plateforme unique, commune à l’ensemble de ces catégories, permettant le versement des bonus réparation aux réparateurs labellisés ;

– il raccourcit le délai de versement qui passe à quinze jours à partir de la réception du duplicata de la facture acquittée de la réparation, contre trente jours auparavant ;

L’arrêté du 10 novembre 2023 précité prévoit quant à lui que le coût de la labellisation ne peut excéder 200 euros hors taxe pour trois ans pour les petits réparateurs, le reste des coûts étant supporté par l’éco organisme.

Les rapporteurs saluent la mise en place de ces mesures réglementaires qui constituent un premier pas en faveur de la simplification des démarches d’accès et de délivrance du bonus réparation. Ils souhaitent que l’accès des petits réparateurs indépendants soit encore facilité, notamment en réduisant encore le coût de la labellisation ou en raccourcissant le délai de délivrance du label en deçà de trois mois. Il conviendra toutefois de veiller à ce que ces mesures n’entraînent pas de baisse de la qualité des réparations proposées.

Proposition n° 10 : Simplifier le processus de labellisation des professionnels de la réparation afin de permettre à davantage de petites et moyennes entreprises (PME) et de très petites entreprises (TPE) de bénéficier du bonus réparation, en prévoyant :

– de réduire les coûts de labellisation pour les artisans indépendants ;

– de raccourcir le délai de délivrance du label en deçà de trois mois.

● Le nombre insuffisant de points de réparation agréés s’explique également par le fait que certaines grandes enseignes refusent de s’engager dans le dispositif de bonus car celui-ci concurrence leurs propres offres assurantielles, comme l’a notamment indiqué le groupe Fnac/Darty à la presse ([35]).

Comme cela a été indiqué supra, le décret du 20 février 2024 précité impose aux distributeurs de produits concernés de communiquer au consommateur, de manière visible, lisible et facilement accessible, les informations relatives au bonus réparation. Le respect de cette disposition devra s’accompagner de contrôles pour s’assurer de sa mise en œuvre, certains distributeurs préférant proposer à leurs clients leur offre d’extension de garantie.

● D’une manière plus générale, le renforcement du maillage territorial se heurte à la pénurie de réparateurs.

France Travail indique ainsi, dans un dossier intitulé « Réparateur d’appareils électroménagers : un métier d’avenir pour un avenir durable » que l’on compte aujourd’hui près de 5 000 réparateurs d’appareils électroménagers en France et qu’il en faudra, dans les années à venir, sans doute 2 000 à 3 000 de plus ([36]). Selon l’entreprise Murfy, les capacités de formation en techniciens réparateurs et reconditionneurs d’appareils électroménagers sont de l’ordre de 500 techniciens par an, alors qu’il faudrait en former cinq fois plus pour répondre aux besoins. Comme cela a été indiqué aux rapporteurs, cette entreprise, créée fin 2018 et qui emploie aujourd’hui près de 300 salariés, peine à recruter. Elle a donc choisi de créer sa propre formation de réparation et reconditionnement, d’une durée de trois mois, destinée à des demandeurs d’emploi. Sur les 220 réparateurs formés, 180 ont été directement embauchés par Murfy ([37]).

Dans ce contexte, et alors que les montants versés par les éco-organismes aux réparateurs labellisés représentent la quasi-totalité des montants alloués aux fonds réparation, il est apparu nécessaire de prévoir que, de façon temporaire, ces fonds puissent aussi aider à la formation des réparateurs. L’arrêté du 10 novembre 2023 précité prévoit ainsi que, pour la filière des équipements électriques et électroniques, les ressources financières allouées au fonds peuvent être utilisées par l’éco-organisme pour cofinancer la formation au métier de réparateur. Ce cofinancement ne peut excéder un montant de cinq millions d’euros par an pendant trois ans. La prorogation de cette possibilité de cofinancement pourra être décidée à l’issue de cette période de trois ans, si son bilan est positif.

Les rapporteurs se félicitent de cette disposition qui améliorera le financement de la formation des réparateurs de la filière des équipements électriques et électroniques. Ils souhaitent qu’une telle possibilité de financement de la formation soit étendue aux filières des textiles d’habillement, linge de maison et chaussures, des jouets, des articles de sport et loisir et des articles de bricolage et de jardin.

Proposition n° 11 : Prévoir que les ressources financières allouées aux fonds réparation des filières des textiles d’habillement, linge de maison et chaussures, des jouets, des articles de sport et loisir et des articles de bricolage et de jardin puissent être utilisées par les éco-organismes pour cofinancer la formation au métier de réparateur (cette possibilité étant aujourd’hui limitée à la filière des équipements électriques et électroniques).

Plus généralement et au-delà de la seule question de la réparation, le manque d’attention porté à la structuration de l’offre se reflète dans la place occupée par la question de la formation aux « nouveaux » métiers de l’économie circulaire. Malgré les questions récurrentes des rapporteurs, le sujet n’a été que très peu abordé. Pour cause, la compétence en matière de formation ne semble pas avoir été suffisamment traitée dans la loi Agec, afin que les régions et les établissements de formation orientent une partie de leur offre vers les métiers de l’économie circulaire et tout particulièrement vers les métiers de la réparation et du réemploi.

Afin de répondre aux besoins croissants nés de la loi Agec, les formations et l’attractivité des métiers de l’économie circulaire doivent être largement développées. Dans cette optique, les besoins des différentes filières de l’économie circulaire doivent être clairement identifiés afin d’aboutir à une feuille de route des métiers de l’économie circulaire.

Les rapporteurs souhaitent en outre que l’établissement France Travail, les régions, les opérateurs de formation et le ministère de l’éducation nationale travaillent ensemble pour faire connaître les métiers de l’économie circulaire au public, adapter les formations aux besoins des entreprises de la filière et aux particularités territoriales et faciliter les recrutements. Ces formations devront également être adaptées aux besoins de chaque territoire.

Des campagnes massives de communication doivent être menées pour attirer les talents et accueillir de nouveaux profils, notamment des personnes en reconversion professionnelle. Afin de sensibiliser le public le plus large possible, une semaine nationale des métiers de l’économie circulaire, comportant des actions de communication et d’information (affiches, salons spécialisés…), pourrait être organisée chaque printemps, avant la période d’inscription en formation.

Les rapporteurs considèrent par ailleurs que les équipes de France Travail ont un rôle majeur à jouer afin de faciliter la reconversion des demandeurs d’emploi vers les métiers en tension (réparateurs, reconditionneurs…).

Proposition n° 12 : À partir d’une cartographie des besoins des filières, définir une feuille de route des métiers de l’économie circulaire qui prévoit notamment :

– un travail mené conjointement par l’établissement France Travail, les opérateurs de formation, les conseils régionaux et le ministère de l’éducation nationale afin de faire connaître les métiers de l’économie circulaire au public, de créer davantage d’offres de formations, d’adapter ces formations aux besoins et aux particularités territoriales et de faciliter les recrutements ;

– des campagnes massives de communication pour attirer de nouveaux profils, notamment à travers l’organisation d’une semaine nationale des métiers de l’économie circulaire ;

– des actions de France Travail en faveur de la reconversion des demandeurs d’emploi vers les métiers de l’économie circulaire en tension (réparateurs, reconditionneurs…).

iv.   Renforcer les contrôles pour éviter les effets d’aubaine

Les rapporteurs ont été alertés par M. Jacques Vernier, président de la Commission inter-filières REP (Cifrep) sur les risques de fraudes, dont les éco‑organismes sont tout à fait conscients, qui peuvent prendre la forme de réparations non réalisées mais facturées, ou de prestations surfacturées. L’Ademe note également que la mise en place du bonus réparation a entraîné des effets d’aubaine, comme par exemple une augmentation du coût de certaines pièces détachées pour s’aligner avec le montant du bonus réparation.

De telles pratiques doivent pouvoir être sanctionnées.

Afin que les éco-organismes puissent s’assurer que les réparations ont bel et bien été effectuées, le décret du 20 février 2024 prévoit que le versement du bonus réparation par l’éco-organisme est conditionné à la fourniture, par le réparateur, d’une facture acquittée attestant de la réalisation de la réparation.

Par ailleurs, les rapporteurs souhaitent relayer une recommandation formulée par l’Ademe visant à mettre en place un observatoire des coûts de la réparation, porté par les acteurs de la filière et dont les résultats seraient communiqués à l’Agence chaque année. Les rapporteurs sont favorables à cette idée mais, plutôt que de créer une nouvelle instance, proposent d’étendre les missions de l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation, créé par la loi Agec. Celui-ci pourrait ainsi être chargé de veiller à ce que les prix pratiqués par les réparateurs labellisés ne soient pas surévalués par rapport aux prix moyens habituellement constatés.

Proposition n° 13 : Confier à l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation la mission de veiller à ce que les prix pratiqués par les réparateurs labellisés ne soient pas surévalués par rapport aux prix moyens habituellement constatés.

II.   Les débuts timides de la transition du « tout jetable » vers le réemploi et la réutilisation

« La France se donne pour objectif d’atteindre la fin de la mise sur le marché d’emballages en plastique à usage unique d’ici à 2040 », conformément à l’article L. 541-10-17 du code de l’environnement, créé par l’article 7 de la loi Agec.

Des décrets périodiques, prévus tous les cinq ans, et une Stratégie nationale doivent permettre d’atteindre cet objectif de long terme :

– le décret n° 2021-517 du 29 avril 2021, dit « décret 3R », fixe des objectifs intermédiaires de réduction, de réutilisation et de réemploi, et de recyclage des emballages en plastique à usage unique pour la période 2021-2025 ;

– publiée en avril 2022, la Stratégie nationale pour la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique, dite « SN3R », définit les mesures sectorielles ou de portée générale nécessaires pour atteindre les objectifs définis dans le décret.

Cette stratégie comporte notamment un plan d’actions constitué de dix axes, dont le pilotage a été confié aux pouvoirs publics, éco-organismes, fédérations professionnelles, distributeurs, metteurs sur le marché et fabricants d’emballages. Le suivi du plan d’action est désormais assuré par la DGPR, en collaboration avec la DGE et en lien avec le Conseil national de l’économie circulaire (CNEC).

Selon les informations communiquées par la DGPR, si soixante actions sur soixante-dix ont à ce jour été réalisées ou engagées, le bilan est plus mitigé concernant l’élaboration des feuilles de route sectorielles par les fédérations professionnelles, dont la publication était attendue avant l’été 2023. Un accompagnement de l’Ademe, proposé fin 2022 dans le cadre d’un appel à projets dédié, a toutefois permis le financement de 24 feuilles de route pour un montant total de 2,2 millions d’euros.

Afin d’évaluer l’atteinte des objectifs du décret 3R, l’Ademe a réalisé un « Bilan 3R en 2023 pour les emballages en plastique à usage unique en France » ([38]), rendu public le 26 avril 2024. Ce bilan d’étape montre que les tonnages d’emballages en plastique à usage unique mis sur le marché (ménagers et professionnels) augmentent de 3,3 % entre 2018 et 2021. Cette tendance à la hausse ne suit donc pas la trajectoire de réduction de 20 % en tonnage fixée pour 2025 et ne va pas dans le sens de l’objectif de fin de mise sur le marché des emballages en plastique à usage unique en 2040, prévu par la loi Agec.

Le bilan intermédiaire de l’Ademe, qui repose sur des données 2018‑2021, préfigure le bilan à mi-parcours de la SN3R, réalisé par la DGPR en collaboration avec la DGE et le CNEC, qui devrait être publié d’ici l’été 2024. Ce bilan comportera un suivi des actions définies dans le plan d’actions de la SN3R, avec des indicateurs qualitatifs assignés, la synthèse des engagements des secteurs transmis au préalable par les éco-organismes, et la mise à jour des indicateurs de performance par l’Ademe.

Enfin, la SN3R prévoit qu’un bilan final des actions de la stratégie soit réalisé en 2025, à la fois de façon rétrospective (analyse des résultats, identification des freins et des leviers), et de façon prospective (analyse des perspectives d’évolution, mise à jour des potentiels 3R pour la période 2026-2030), en tenant compte de ses impacts environnementaux, économiques et sociaux notamment.

Chronologie des objectifs 3R sur les emballages en plastique
à usage unique

Source : Ademe.

A.   Vers une réduction des emballages et des produits en plastique à usage unique

1.   La limitation de la mise sur le marché de produits ou d’emballages en plastique à usage unique

Les articles 77 à 83 de la loi Agec comportent de nombreuses dispositions destinées à réduire l’utilisation du plastique au quotidien.

Depuis le 1er janvier 2021, sont interdits les pailles, les confettis, les piques à steak, les couvercles à verre jetables, les couverts, les bâtonnets mélangeurs pour boissons en plastique, les boîtes en polystyrène expansé, la fabrication et l’importation de sacs en plastique à usage unique, les produits fabriqués à base de plastique oxodégradable, la distribution gratuite de bouteilles en plastique dans les établissements recevant du public ou dans les locaux professionnels, ou encore le fait pour les sponsors d’imposer l’utilisation de bouteilles en plastique lors d’événements festifs, culturels ou sportifs.

Depuis le 1er janvier 2022, sont interdits le suremballage plastique des fruits et légumes frais de moins de 1,5 kilogramme, les emballages plastiques des publications de presse expédiées, les sachets de thé et de tisane en plastique non biodégradable, les jouets en plastique proposés gratuitement aux enfants dans le cadre de menus, les étiquettes collées sur les fruits et légumes sauf si elles sont compostables et constituées en tout ou partie de matières biosourcées, l’achat par l’État de plastique à usage unique en vue d’une utilisation sur les lieux de travail et dans les évènements qu’il organise. En outre, les établissements recevant plus de 300 personnes simultanément sont tenus d’être équipés d’au moins une fontaine d’eau potable accessible au public.

Depuis le 1er janvier 2023, la vaisselle jetable est interdite dans les établissements de restauration rapide servant plus de vingt couverts simultanément, pour les consommations sur place.

La loi Agec prévoit également qu’il soit mis fin, au plus tard le 1er janvier 2025, à l’utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffage et de service en plastique dans les services de pédiatrie, d’obstétrique et de maternité, les centres périnataux de proximité ainsi que les services de protection maternelle et infantile.

Ces interdictions ciblent à la fois des produits, comme les pailles, les confettis ou les piques à steak et des emballages en plastique à usage unique, comme les récipients en polystyrène expansé ou les bouteilles en plastique.

Elles sont cohérentes avec l’attente des citoyens de limiter le recours au plastique pour des usages où son utilisation ne semble pas indispensable.

Interrogée par les rapporteurs, l’Ademe a indiqué que l’impact global des dispositions de l’article 77 de la loi Agec sur la réduction des déchets plastiques, incluant tous les secteurs y compris les emballages, n’a pas été quantifié. Le bilan réalisé par l’Ademe et rendu public en avril 2024 ([39]), porte uniquement sur les emballages, dans le cadre du suivi de la SN3R.

Bien qu’il n’existe pas d’évaluation de l’impact global de ces mesures en termes de réduction des déchets plastiques, celui-ci pourrait être majeur, comme le suggèrent les quelques exemples présentés par la DGPR. Ainsi, la mise en place d’une fontaine à eau en gare de Paris Saint-Lazare a permis d’économiser en dix mois l’équivalent de 28 000 bouteilles d’eau en plastique. Le déploiement de la vaisselle réemployable pourrait quant à lui permettre de réduire de 60 à 85 % la quantité de déchets de certains établissements recevant du public, soit environ cinq tonnes de déchets évités par an pour une enseigne de quinze restaurants et jusqu’à 130 000 tonnes par an au total, selon l’Ademe. La fin de la distribution de bouteilles gratuites et la mise en place d’un système de gourdes et de fontaines à eau à destination des athlètes dans le cadre du tournoi de Roland‑Garros auraient quant à elles permis d’éviter la distribution de plus de 90 000 bouteilles, ce qui correspond à environ dix tonnes de déchets.

2.   Des dispositions partiellement appliquées

Plusieurs mesures visant à réduire les produits ou emballages en plastique jetable rencontrent des difficultés particulières d’application, sur lesquelles les rapporteurs souhaitent revenir.

a.   L’interdiction de la vaisselle jetable dans la restauration

Créé par l’article 77 de la loi Agec, l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement prévoit qu’« à compter du 1er janvier 2023, les établissements de restauration sont tenus de servir les repas et boissons consommés dans l’enceinte de l’établissement dans des gobelets, y compris leurs moyens de fermeture et couvercles, des assiettes et des récipients réemployables ainsi qu’avec des couverts réemployables ». Cette interdiction de la vaisselle jetable s’applique aux établissements pouvant servir vingt couverts simultanément, en application du décret n° 2020-1724 du 28 décembre 2020 relatif à l’interdiction d’élimination des invendus non alimentaires et à diverses dispositions de lutte contre le gaspillage.

L’impact de cette interdiction est loin d’être anecdotique : en 2022, près de vingt milliards de contenants et couverts jetables ont été utilisés dans la restauration, ce qui représente 200 000 tonnes de déchets, d’après la DGPR.

i.   Une mesure encore peu appliquée

La DGPR a indiqué aux rapporteurs effectuer un suivi des plans d’actions des enseignes de restauration, ainsi que des contrôles de terrain ciblés. Près de 300 visites ont ainsi été réalisées par les inspecteurs d’installations classées pour la protection de l’environnement. Minovembre 2023, 38 % des établissements contrôlés ne respectaient pas la réglementation. De nombreux rappels à la loi ont été effectués et 25 procès‑verbaux ont été dressés.

Les résultats de ces contrôles sont cohérents avec ceux d’une enquête menée par l’UFC-Que Choisir en 2023 auprès de grandes chaînes de restauration rapide (McDonalds, Starbucks, Burger King, KFC, etc.). Sur 180 lieux visités, seul un établissement sur deux servait des boissons dans un verre réemployable et 46 % des restaurants servaient encore les boissons dans des verres non‑réutilisables (en partie pour 27 % d’entre eux et en totalité pour 19 % d’entre eux).

Selon la DGPR, le retard constaté dans la mise en œuvre de cette disposition de la loi Agec s’explique par des délais de livraison des équipements (vaisselle, mais aussi lave-vaisselle) et par le fait que certains établissements ont dû mettre en œuvre des travaux de grande envergure, nécessitant parfois l’obtention d’un permis de construire.

En 2023, M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, et Mme Bérangère Couillard, alors secrétaire d’État chargée de l’écologie, ont réuni à deux reprises les principaux acteurs de la restauration rapide et de la restauration collective afin de faire le point sur la mise en œuvre de cette obligation de la loi Agec. Ces derniers ont été chargés d’élaborer des plans d’actions correctives et un calendrier de déploiement de la vaisselle réutilisable dans leurs établissements afin que tous les restaurants respectent l’obligation prévue par la loi d’ici la fin de l’année 2023.

Pour les rapporteurs, les contrôles doivent être largement accrus afin d’améliorer l’application de cette disposition, entrée en vigueur il y a plus d’un an (voir infra). La DGPR leur a indiqué que l’État renforcerait ses contrôles sur le terrain et appliquerait les sanctions prévues en 2024.

ii.   Une mesure préservée par le règlement européen « Emballages »

L’application encore partielle de l’interdiction de la vaisselle jetable dans les établissements de restauration peut également s’expliquer par la révision du règlement européen sur les emballages et les déchets d’emballages (PPWR - Proposal packaging and packaging waste regulation).

Le projet de règlement publié par la Commission européenne en novembre 2022 prévoyait l’interdiction des emballages à usage unique pour la consommation sur place dans le secteur de la restauration, reprenant ainsi la disposition de la loi Agec. Le projet proposé début décembre 2022 aux États membres par la présidence espagnole du Conseil conservait l’essentiel du texte initial de la Commission, en ajoutant la publication de lignes directrices pour aider les acteurs économiques dans leur démarche de réemploi. Toutefois, dans le texte de compromis voté par le Parlement européen le 22 novembre 2023, la proposition visant à interdire la vaisselle jetable de la restauration rapide a été revue à la baisse.

Interrogés par les rapporteurs fin 2023, le secrétariat général des affaires européennes (SGAE) et la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne ont indiqué, dans leur réponse commune au questionnaire, que « les autorités françaises œuvrent activement à ce que cette disposition ne soit pas remise en cause. L’orientation générale adoptée lors du Conseil « Environnement » du 18 décembre 2023 préserve le droit national existant. Les discussions se poursuivent désormais durant la phase de trilogue entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen ». La DGPR a quant à elle indiqué fin 2023 que l’issue des négociations européennes pourrait menacer les dispositions nationales, en particulier celle liée à l’obligation d’utiliser de la vaisselle réutilisable, même si tous les efforts étaient déployés pour les préserver.

Les eurodéputés et les États membres sont finalement parvenus à un accord le 4 mars 2024. À compter de 2030, le secteur de la restauration devra bien renoncer à une série d’emballages à usage unique en plastique pour la consommation sur place, les emballages en carton ou en papier n’étant pas concernés. Le règlement prévoit toutefois que les États membres peuvent maintenir des dispositions nationales restreignant la mise sur le marché d’emballages à usage unique utilisés dans la restauration sur place, qu’ils soient en plastique ou dans d’autres matériaux ([40]).

Ainsi, les dispositions nationales mises en œuvre depuis le 1er janvier 2023 pour la restauration sur place resteront bien applicables. De nombreux acteurs du secteur, très mobilisés au niveau européen, ont probablement attendu de disposer de la version définitive du règlement européen pour appliquer les mesures prévues par la loi Agec.

Enfin, la loi Agec a étendu l’obligation d’utiliser de la vaisselle réemployable à certains cas de livraison de repas à domicile. L’article L. 541‑15‑10 du code de l’environnement prévoit ainsi que les gobelets, les couverts, les assiettes et les récipients utilisés dans le cadre d’un service de portage quotidien de repas à domicile sont réemployables et font l’objet d’une collecte. Les modalités d’application de cette disposition, applicable depuis le 1er janvier 2022, ont été précisées par le décret n° 2020-1724 du 28 décembre 2020 relatif à l’interdiction d’élimination des invendus non alimentaires et à diverses dispositions de lutte contre le gaspillage. Ainsi, l’obligation d’utiliser de la vaisselle réemployable et collectée s’applique aux services de restauration à domicile qui proposent un abonnement à des prestations de repas préparés qui sont livrés au moins quatre fois par semaine.

Le rapporteur Stéphane Delautrettre souhaite étendre cette obligation à l’ensemble des services de livraison de repas à domicile.

Proposition n° 14 du rapporteur Stéphane Delautrette : Étendre l’obligation d’utiliser de la vaisselle réemployable, et de procéder à sa collecte en vue de son réemploi, à l’ensemble des services de livraison de repas à domicile.

b.   L’interdiction de la vente de fruits et légumes sous emballage plastique

Conformément à l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement, créé par l’article 77 de la loi Agec, « tout commerce de détail exposant à la vente des fruits et légumes frais non transformés est tenu de les exposer sans conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique » à compter du 1er janvier 2022. Cette obligation n’est pas applicable aux fruits et légumes conditionnés par lots de 1,5 kilogramme ou plus, ainsi qu’aux fruits et légumes présentant un risque de détérioration lors de leur vente en vrac, dont la liste est fixée par décret.

Cette mesure a fait l’objet d’importantes contestations. Un premier décret, pris le 8 octobre 2021 afin de préciser la liste des fruits et légumes exemptés de l’interdiction de conditionnement sous emballage plastique, prévoyait une mesure d’extinction progressive des exemptions jusqu’en 2026 ([41]). Cette progressivité, non prévue par l’article 77 de la loi Agec, avait été concédée par le Gouvernement en 2020 lors de la concertation avec les représentants des filières des fruits et légumes dans le cadre du Conseil national de l’Alimentation. Malgré cette concession, ces filières ainsi que certaines fédérations de l’industrie plastique ont attaqué le décret au contentieux, au motif que la progressivité de la fin des dérogations n’était pas prévue par la loi Agec. Considérant qu’il existait bien un vice de forme, le Conseil d’État a annulé ce premier décret.

Un nouveau projet de décret tenant compte de la décision du Conseil d’État a été notifié à la Commission européenne, qui a prolongé le statu quo sine die, une disposition similaire figurant dans le projet de règlement européen sur les emballages et les déchets d’emballages. Toutefois, constatant la reprise du développement des emballages en plastique, le Gouvernement a souhaité que la mesure puisse être appliquée sans attendre l’achèvement des travaux européens, ce qui a conduit à la publication du décret n° 2023-478 du 20 juin 2023 relatif à l’obligation de présentation à la vente des fruits et légumes frais non transformés sans conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique.

La mesure générale d’interdiction des emballages en plastique prévue par ce nouveau décret s’accompagne de nombreuses dérogations. Selon le rapporteur Stéphane Delautrette, la liste des exemptions comprend des fruits et légumes ne semblant pas présenter de risques avérés de détérioration lors de leur vente en vrac, comme les endives, les asperges, les brocolis, les champignons, les pommes de terre ou les carottes. La vente de ces légumes est d’ailleurs régulièrement assurée sans emballage, tant sur les marchés que dans la grande distribution, sans que cela ne soulève de difficulté sanitaire.

Dans ce contexte, et sans aller jusqu’à remettre en cause le décret du 20 juin 2023 précité, qui a fait l’objet de nombreuses concertations, les rapporteurs estiment qu’il conviendrait a minima de disposer d’études complémentaires. Sur la base de ces études, il pourrait être envisagé de réduire la liste des fruits et légumes bénéficiant d’une dérogation à l’interdiction de la vente sous emballage plastique.

Proposition n° 15 : Mener des études complémentaires sur la pertinence des exemptions à l’interdiction de la vente de fruits et légumes sous emballage plastique afin de réduire, chaque fois que cela sera justifié, la liste des dérogations.

Malgré son caractère peu ambitieux, pointé tant par la DGCCRF que par les associations de consommateurs auditionnées, une requête en annulation contre ce décret a toutefois été déposée en juillet 2023 par le syndicat « Alliance plasturgie et composites du futur », au motif qu’il méconnaîtrait les dispositions du droit de l’Union européenne relatives aux emballages. En effet, si le projet de règlement européen s’est inspiré de cette mesure pour l’élargir au niveau européen, elle reste très contestée par certains États membres et son maintien n’était pas acquis dans le texte définitif.

Finalement, l’accord trouvé entre le Parlement et le Conseil le 4 mars 2024 prévoit bien d’interdire les emballages en plastique à usage unique pour les fruits et légumes non transformés à partir du 1er janvier 2030. Il convient de noter que les révisions apportées à la proposition initiale ont remplacé l’interdiction initiale de tous les emballages à usage unique pour les fruits et légumes par une interdiction plus ciblée des seuls emballages en plastique. Le bois léger, le liège et le textile ne sont donc pas ciblés par l’interdiction européenne.

c.   Les autres dispositions soulevant des difficultés d’application

i.   L’interdiction d’apposer des étiquettes non compostables sur les fruits et légumes

L’article 80 de la loi Agec prévoit qu’il est mis fin à l’apposition d’étiquettes directement sur les fruits et légumes, à l’exception des étiquettes compostables en compostage domestique et constituées en tout ou partie de matières biosourcées.

La mise en œuvre de cette disposition, initialement prévue au plus tard le 1er janvier 2022, a été retardée en raison d’une contestation des professionnels de la filière des fruits et légumes.

L’interdiction d’apposer des étiquettes non compostables sur les fruits et légumes a néanmoins été jugée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, dans une décision du 16 juin 2023 rendue dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par l’Association interprofessionnelle des fruits et légumes frais (Interfel), à l’appui d’une requête visant à faire annuler une disposition du décret d’application ([42]). En adoptant ces dispositions, le juge constitutionnel a considéré que le législateur a entendu « favoriser le compostage des biodéchets et la réduction des déchets plastiques pour mettre en œuvre les objectifs de réduction et de valorisation des déchets ménagers ». Il a ainsi poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement. En outre, en limitant l’interdiction à certains types d’étiquettes, « le législateur a apporté aux conditions d’exercice de l’activité économique des entreprises commercialisant des fruits et légumes une restriction qui n’est pas manifestement disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi » ([43]).

Le respect de cette interdiction n’a jamais fait l’objet de contrôles, d’après les informations communiquées aux rapporteurs. Selon la DGPR, « les contrôles menés par l’inspection de l’environnement avec les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) ont été concentrés en 2023 sur la mesure de fin de la vaisselle jetable en restauration sur place. Le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires ne dispose donc pas d’information sur cette mesure des étiquettes des fruits et légumes ». La DGCCRF a quant à elle indiqué qu’« aucun contrôle n’a été mené », tout en soulevant un problème de répartition des compétences entre les différentes administrations chargées du contrôle. Ainsi, l’article 80 de la loi Agec n’étant pas codifié, la DGCCRF considère que si l’on s’en tient au principe d’interprétation stricte de la loi pénale, ses agents ne sont pas habilités à rechercher et à constater l’infraction prévue et réprimée par l’article R. 543-73 du code de l’environnement. La même difficulté s’applique au contrôle de l’interdiction de jouets en plastique dans le cadre de menus destinés aux enfants, prévue par l’article 81 de la loi Agec.

Les rapporteurs appellent à ce que les compétences des différentes administrations soient clarifiées. Ils considèrent que la DGCCRF doit pouvoir être habilitée à contrôler le respect des dispositions des articles 80 et 81 de la loi Agec, relatifs à l’interdiction, respectivement, des étiquettes non compostables sur les fruits et légumes et des jouets en plastique dans les menus enfants.

Proposition n° 16 : Permettre à la DGCCRF de contrôler l’application des dispositions non codifiées de la loi Agec, en particulier l’interdiction d’apposer des étiquettes non compostables sur les fruits et légumes et celle des jouets en plastique dans les menus enfants.

ii.   La mise à disposition de fontaines à eau dans les établissements recevant du public

En application de l’article 66 de la loi Agec, codifié à l’article L. 541‑10‑11 du code de l’environnement, « la France se donne pour objectif de réduire de 50 % d’ici à 2030 le nombre de bouteilles en plastique à usage unique pour boisson mises sur le marché ». Or, le nombre de bouteilles mises sur le marché continue de croître, à rebours de l’objectif affiché. Selon l’Ademe, les ventes ont progressé de 3,9 % en 2022, passant de 347 100 tonnes à 360 700 tonnes ([44]). L’augmentation pourrait même être plus importante dans la mesure où l’objectif de réduction national est formulé en nombre de bouteilles et que leur poids a tendance à baisser.

Dans ce contexte, les rapporteurs souhaitent mettre en place une obligation, pour les producteurs de bouteilles en plastique à usage unique pour boissons, de réaliser des plans de réduction de la production de ces bouteilles. Cela favoriserait une réduction du plastique mesurée en unité de bouteille produite, et non pas uniquement en quantité de matière plastique utilisée par bouteille. En effet, la réduction des quantités de plastique par bouteille a atteint ses limites et, en tout état de cause, ne permet pas de répondre à l’objectif de réduction de la quantité de bouteilles mises sur le marché, prévu par la loi Agec.

Proposition n° 17 : Prévoir la réalisation, par les producteurs, de plans de réduction de la production de bouteilles en plastique à usage unique pour boisson.

Afin d’atteindre l’objectif de réduction de 50 % du nombre de bouteilles en plastique à usage unique, l’article 77 de la loi Agec prévoit qu’à compter du 1er janvier 2022, les établissements recevant du public (ERP) d’une capacité de plus de 300 personnes sont tenus d’être équipés d’au moins une fontaine d’eau potable accessible au public.

L’organisation non gouvernementale No Plastic in my sea a publié en janvier 2024 les résultats d’une enquête intitulée « Réduction des bouteilles plastiques et points d’eau dans les ERP : la loi Agec est-elle appliquée ? » ([45]). L’ONG constate d’abord que, contrairement à d’autres mesures de la loi Agec comme l’interdiction de la vaisselle jetable dans les établissements de restauration, l’État n’a dressé aucun bilan de la mise en œuvre de la mesure de mise à disposition de fontaines d’eau potable, qui s’applique à près de 68 500 ERP. Sur les 218 établissements ERP visités par l’organisation, 163 (soit 75 % d’entre eux) ne disposent pas de point d’eau. C’est notamment le cas de 88 % des stations de métro et de 84 % des gares SNCF. Quant aux 55 ERP dotés de points d’eau, ils sont 62 % à ne disposer d’aucune signalétique et 75 % à ne pas disposer de signalétique directionnelle. Par ailleurs, seulement douze des 129 établissements et organisations professionnelles interrogés ont répondu au questionnaire adressé par l’ONG, soit 9 % d’entre eux. Certaines réponses ne sont pas satisfaisantes : les professionnels des centres commerciaux considèrent ainsi remplir leur obligation du fait de la présence de toilettes publiques, alors même que l’eau n’y est pas toujours tempérée, que les lavabos ne permettent pas de remplir une gourde, ou que certaines toilettes sont payantes.

Les réponses aux questionnaires des rapporteurs confirment que la mesure n’est encore que partiellement appliquée. Parmi les représentants des collectivités territoriales interrogés, l’association Régions de France a indiqué que cette disposition n’était pas mise en œuvre de manière uniforme. En ce qui concerne l’installation de fontaines d’eau potable au sein des établissements hospitaliers, la direction générale de l’offre de soins (DGOS) a indiqué que les centrales d’achats se sont emparées du sujet et proposent d’ores et déjà d’équiper les établissements en ce sens. Selon les données non exhaustives qui ont pu être récupérées auprès d’elles, 519 fontaines à eau ont été achetées par les établissements hospitaliers de treize régions ([46]) sur la plateforme d’achats publics Ugap (Union des groupements d’achats publics) depuis 2022. La plateforme d’achats ResaH (Réseau des acheteurs hospitaliers) a indiqué quant à elle publier en février 2024 un appel d’offres pour l’achat, la location et la maintenance de fontaines à eau pour un montant estimé à six millions d’euros sur quatre ans.

iii.   L’interdiction des contenants alimentaires de cuisson, de réchauffage et de service en plastique dans les services médicaux et paramédicaux

L’article L. 541-15-10 du code de l’environnement, créé par l’article 77 de la loi Agec, interdit l’utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffage et de service en plastique dans les services de pédiatrie, d’obstétrique et de maternité, les centres périnataux de proximité ainsi que les services de protection maternelle et infantile, au plus tard le 1er janvier 2025.

Selon la DGOS, la suppression des contenants alimentaires en plastique dans les services hospitaliers constitue un changement organisationnel et financier d’envergure. L’ampleur de la transformation de l’organisation des cuisines et du service dans les établissements concernés rend la mise en œuvre de cette disposition relativement difficile dans les délais réglementaires impartis, en raison notamment de la crise du covid-19 qui a sensiblement ralenti les capacités d’adaptation du secteur à ce type d’enjeu. En outre, la transition vers de la vaisselle durable représente un investissement au coût non négligeable pour des établissements qui peinent déjà à faire face à l’inflation.

Il faut cependant souligner qu’à terme, la mise en œuvre de cette obligation revêt un intérêt écologique et économique fort pour les établissements hospitaliers. Ainsi, le centre hospitalier universitaire (CHU) de Limoges a observé un retour sur investissement positif en cinq ans grâce à l’usage d’assiettes en porcelaine. Un impact positif d’un point de vue hôtelier a par ailleurs été observé au CHU de Nancy : la satisfaction des patients a augmenté de 20 % sans modification des menus, grâce au recours à de la vaisselle non plastique. Enfin, les centrales d’achats hospitalières offrent déjà des solutions de vaisselle non plastique dans la majorité des cas et pourront soutenir cette transition. Si certains contenants alimentaires, notamment pédiatriques, pourraient faire l’objet d’une dérogation par décret en Conseil d’État dans les prochains mois, la suppression large des contenants alimentaires en plastique constitue une transformation positive et souhaitable.

Par ailleurs, comme le note la DGOS, l’application de cette obligation ne pourra probablement pas se limiter à la patientèle ciblée par l’article 77 de la loi Agec. Dans les services accueillant des patients d’âges variés, il sera difficile de proposer un type de contenant en fonction de l’âge. L’extension du dispositif à l’ensemble des services de l’établissement est souhaitable et pourra être envisagée sur plusieurs années.

d.   Un changement de modèle économique difficile à opérer

L’interdiction de différents produits en plastique à usage unique, prévue aux articles 77 à 83 de la loi Agec, a permis d’accélérer le développement d’entreprises de l’économie circulaire. En particulier, l’interdiction des gobelets à usage unique, des couverts en plastique ou de la mise à disposition gratuite de bouteilles jetables a créé une forte demande en faveur d’alternatives réutilisables.

Cette évolution positive suppose toutefois de rester vigilant quant aux effets réels des mesures d’interdiction, en tenant compte de l’empreinte carbone des produits de substitution. En effet, comme le note l’association EC2027, ces mesures ont aussi créé un appel d’air pour des produits fabriqués en Chine dont le coût carbone est parfois supérieur aux gains liés à la suppression des produits jetables en plastique. Une analyse des produits sur l’ensemble de leur cycle de vie est donc nécessaire. L’association dénonce par ailleurs un retour en force, depuis environ deux ans, de produits jetables ou qui constituent de faux produits réutilisables, comme les gobelets en carton, les couverts en bambou ou les gourdes en polytéréphtalate d’éthylène (PET) ou en matériaux biosourcés qui ne passent pas au lave-vaisselle et qui ne sont pas pensés pour durer.

Au-delà de ces points de vigilance, les rapporteurs soulignent que le changement de modèle de production et de consommation induit par les mesures de restrictions et d’interdictions de mise sur le marché de certains produits ou emballages en plastique à usage unique, constitue, encore aujourd’hui, un frein majeur à la mise en œuvre de ces dispositions par les entreprises et les industriels. Comme indiqué par la DGPR, des entreprises, qu’elles soient fournisseuses ou utilisatrices de ces produits, se retrouvent parfois sans possibilité de conversion vers de nouveaux modes de production à court ou moyen terme. C’est par exemple le cas des entreprises spécialisées dans les produits en plastique ou des coopératives de fruits et légumes ayant déjà investi dans des chaînes de conditionnement en plastique.

Dans ce contexte, et malgré des aides accrues du fonds « Économie circulaire » de l’Ademe, certaines dispositions de la loi Agec, en particulier concernant les emballages et les étiquettes apposées sur les fruits et légumes, font régulièrement l’objet de contentieux engagés par les fédérations professionnelles. Quelle que soit leur issue, ces contentieux tendent à fragiliser le socle de mesures destinées à réduire la production de déchets et à lutter contre la pollution plastique de l’environnement.

En outre, les secteurs qui, comme les industries sportives et culturelles, se mettent en conformité avec leurs nouvelles obligations sont confrontés à la difficulté de repenser l’organisation de leurs événements autour notamment de l’accès à l’eau ou de la mise en place de consignes de contenants.

e.   Des contrôles à renforcer

Le cycle d’auditions a permis de mettre en évidence la faiblesse du contrôle de l’application des différentes dispositions de la loi Agec relatives à l’interdiction ou à la restriction des produits ou emballages en plastique à usage unique.

D’après les informations recueillies par les rapporteurs, certaines dispositions n’ont fait, à ce jour, l’objet d’aucun contrôle. Il en est ainsi de l’interdiction d’apposer des étiquettes non compostables sur les fruits et légumes ou de la mise à disposition de fontaines à eau dans les ERP. D’autres dispositions sont insuffisamment contrôlées, comme l’interdiction de la vaisselle jetable dans la restauration.

La mise en œuvre effective de ces mesures d’interdiction et de restriction nécessite donc de renforcer les dispositifs de contrôle. Il est en effet indispensable de s’assurer que ceux qui font des efforts et qui investissent pour se conformer à la loi ne soient pas pénalisés par rapport à ceux qui n’appliquent pas la loi. À cet égard, la DGPR a indiqué aux rapporteurs que des contrôles portant sur l’absence d’emballages en plastique pour les fruits et légumes ou sur la mise en place de vaisselle réemployable dans les établissements de restauration sont prévus en 2024 dans le cadre des actions nationales de l’inspection de l’environnement.

Enfin, les périmètres des contrôles effectués par l’inspection de l’environnement, l’inspection de la consommation et de la répression des fraudes et les douanes mériteraient d’être clarifiés, comme cela a été indiqué aux rapporteurs (voir proposition n° 16).

Proposition n° 18 : Renforcer les contrôles, par les services de l’État, du respect de l’application des dispositions de la loi Agec relatives à l’interdiction ou à la restriction des produits ou emballages en plastique à usage unique ; mettre en place prioritairement un contrôle de l’obligation de vaisselle réemployable dans la restauration et de la mise en place de fontaines à eau dans les établissements recevant du public.

3.   Le ralentissement du développement de la vente de produits en vrac

L’article 41 de la loi Agec définit la vente en vrac comme « la vente au consommateur de produits présentés sans emballage, en quantité choisie par le consommateur, dans des contenants réemployables ou réutilisables » et précise que « tout produit de consommation courante peut être vendu en vrac, sauf exceptions dûment justifiées par des raisons de santé publique ».

Le décret n° 2023-837 du 30 août 2023 dresse la liste des produits interdits à la vente en vrac ou dont la vente sans emballages doit être encadrée par des dispositions particulières. Le plus souvent, ces interdictions renvoient directement à la réglementation européenne qui impose la vente des produits concernés sous emballage. D’ailleurs, de manière très générale, le décret impose la vente emballée de « tout produit dont la vente en vrac est incompatible avec les obligations de santé publique prévues par les règlements et directives [européens] ». Le Réseau Vrac et Réemploi a déploré lors de son audition des exemptions particulièrement larges, qui ne seraient pas toujours justifiées par des risques pour la santé publique, notamment pour les laits pasteurisés ou UHT, les produits surgelés ou les compléments alimentaires, dont la vente en vrac est interdite par le décret. Selon l’association, « certains de ces produits sont déjà proposés à la vente en vrac dans d’autres pays notamment en Europe, sans aucun incident sanitaire enregistré ». Ainsi, la pratique de la vente en vrac de produits surgelés serait répandue en Espagne et dans les pays scandinaves, selon M. Didier Onraita-Bruneau, président de My Retail box ([47]).

L’Ademe, dans une étude de novembre 2021 intitulée « Panorama et évaluation environnementale du vrac en France » ([48]) , montre que le secteur de la vente en vrac connaît une croissance considérable sur le marché des produits de grande consommation depuis 2013. Le chiffre d’affaires du secteur est passé de 100 millions d’euros en 2013 à 1,2 milliard d’euros en 2019, soit une multiplication par douze en six ans. Cette croissance s’est poursuivie jusqu’en 2022. Le député Philippe Bolo, dans une communication du 22 février 2022 sur les conditions de développement de la vente en vrac ([49]), note que le chiffre d’affaires réalisé par les épiceries spécialisées et les rayons vrac peut être estimé à 1,32 milliard d’euros en 2021. Sa croissance a atteint 8 % entre 2019 et 2020. Toutefois, les données plus récentes rendent compte d’un ralentissement assez marqué, à la faveur de la crise sanitaire provoquée par l’épidémie de covid-19. Selon le Réseau Vrac et Réemploi, le chiffre d’affaires de la vente en vrac représentait 878 millions d’euros en 2023.

Dans le prolongement de la loi Agec, la loi « climat et résilience » apporte une nouvelle impulsion au développement de la vente en vrac. Son article 23 prévoit, à compter du 1er janvier 2030, que les commerces de vente au détail dont la surface est supérieure ou égale à 400 mètres carrés consacrent à la vente de produits présentés sans emballage primaire, y compris la vente en vrac, soit au moins 20 % de leur surface de vente de produits de grande consommation, soit un dispositif d’effet équivalent exprimé en nombre de références ou en proportion du chiffre d’affaires.

Afin de respecter l’obligation de consacrer 20 % de leur surface de vente à des produits en vrac d’ici 2030, les metteurs en marché et les distributeurs ont créé en 2022 le collectif « En Avant Vrac » qui fédère une soixantaine d’enseignes, de marques et d’organisations, notamment l’Ademe, Citeo et le Réseau Vrac et Réemploi, avec pour objectif de développer un modèle de vrac adapté aux grandes et moyennes surfaces. Ce collectif a présenté, le 30 janvier 2024, un registre de solutions harmonisées afin d’envisager le déploiement de mobiliers et de contenants standardisés, ainsi qu’une solution de traçabilité unique ([50]).

Le cahier des charges des éco‑organismes de la filière REP des emballages ménagers prévoit quant à lui que « l’écoorganisme consacre chaque année au moins 0,5 % du montant total des contributions financières qu’il perçoit au soutien d’actions d’information et de sensibilisation réalisées par ses adhérents visant à promouvoir la vente en vrac ou dans des emballages réemployables ». Afin de donner un nouvel élan au développement de la vente en vrac, les rapporteurs proposent de modifier le cahier des charges afin de prévoir un soutien dédié des éco-organismes à la promotion de la vente en vrac, indépendamment du soutien à la vente dans des emballages réemployables.

Proposition n° 19 : Au titre de leur action de prévention et de réduction des déchets d’emballages, prévoir un soutien dédié des éco-organismes de la filière REP des emballages ménagers à la promotion de la vente en vrac, indépendamment des actions de soutien au réemploi.

B.   Le développement du réemploi suppose un changement de paradigme qui peine à émerger

1.   Les premiers objectifs de réemploi ne devraient pas être atteints

a.   Les objectifs de réemploi prévus par la loi Agec

Le réemploi est défini à l’article L. 541‑1‑1 du code de l’environnement comme « toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus ».

La France s’est donné pour objectif d’atteindre la fin de la mise sur le marché d’emballages en plastique à usage unique d’ici à 2040, conformément à l’article L. 541-10-17 du code de l’environnement, créé par l’article 7 de la loi Agec. Pour atteindre cet objectif de long terme, le décret n° 2021-517 du 29 avril 2021, dit « décret 3R », fixe des objectifs intermédiaires de réduction, de réutilisation et de réemploi, et de recyclage des emballages en plastique à usage unique pour la période 2021‑2025. L’objectif de réduction « est fixé pour l’ensemble des metteurs sur le marché d’emballages en plastique à usage unique, à 20 %, dont au moins 50 % obtenus par recours au réemploi et à la réutilisation d’emballages, à l’échéance du 31 décembre 2025, en tenant compte du potentiel propre aux catégories de produits auxquelles sont destinés ces emballages ».

Publiée en avril 2022, la Stratégie nationale pour la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique, dite « SN3R », définit les mesures sectorielles ou de portée générale nécessaires pour atteindre les objectifs définis dans le décret.

En outre, l’article 9 de la loi Agec complète l’article L. 541-1 du code de l’environnement pour prévoir que la France se dote d’une trajectoire nationale visant à augmenter la part des emballages réemployés mis en marché par rapport aux emballages à usage unique, de manière à atteindre une proportion de 5 % des emballages réemployés mis en marché en France en 2023 et de 10 % en 2027.

La proportion minimale d’emballages réemployés à mettre sur le marché annuellement en France pour atteindre ces objectifs nationaux de réemploi est définie dans le décret n° 2022‑507 du 8 avril 2022 ([51]). Celui-ci fixe une première trajectoire de réemploi applicable aux producteurs dont le chiffre d’affaires annuel est supérieur à 50 millions d’euros : au moins 5 % d’emballages réemployés ou réutilisés à mettre sur le marché en 2023, 6 % en 2024, 7 % en 2025, 8 % en 2026 et 10 % en 2027. En 2025, les entreprises dont le chiffre d’affaires est compris entre 20 et 50 millions d’euros seront concernées mais avec, pour les deux premières années, des objectifs moins exigeants que ceux applicables aux premiers metteurs sur le marché assujettis : 5 % en 2025 (au lieu de 7 %) et 7 % en 2026 (au lieu de 8 %). L’objectif final de 10 % en 2027 est identique. Enfin, les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 20 millions d’euros seront concernées en 2026, avec un objectif de seulement 5 % en 2026, mais de 10 % d’emballages réemployés ou réutilisés l’année suivante.

Le décret précise que les éco-organismes doivent appliquer des éco‑modulations fondées sur le réemploi et contribuer au développement de solutions de réemploi, notamment en les finançant.

Enfin, l’article 62 de la loi Agec précise que les cahiers des charges des éco‑organismes fixent « des objectifs distincts de réduction des déchets, de réemploi, de réutilisation, de réparation, d'intégration de matière recyclée, de recyclabilité et de recyclage ». Ces objectifs doivent être en cohérence avec les objectifs mentionnés à l’article L. 541-1 du code de l’environnement précité.

Les objectifs de réemploi fixés aux filières REP par la loi ou dans les cahiers des charges des éco-organismes sont précisés dans le tableau suivant.

Objectifs de réemploi ou de réutilisation au sein des filières REP

Objectifs de réemploi et/ou réutilisation

(Cf. loi ou cahiers des charges des éco-organismes)

Filières REP concernées

2023

2024

2025

2026

2027

2028

2029

1° Emballages ménagers

5 %

 

 

 

10 %

 

 

2° Emballages de la restauration et emballages industriels et commerciaux (REP à venir)

4° Produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment

 

2 %

 

 

4 %

5 %

 

5° Équipements électriques et électroniques

2 % *

 

 

 

 

 

 

10° Éléments d’ameublement

 

60 000 t

70 000 t

80 000 t

90 000 t

100 000 t

110 000 t

11° Textiles, linge de maison et chaussures

 

120 000 t

 

 

 

 

 

8 %

 

 

15 %

 

 

12° Jouets

 

6 %

 

 

9 %

 

 

13° Articles de sport et de loisirs (ASL)

Cycles, EDP non motorisés (trottinettes, skates…)

 

9 %

 

 

14 %

 

 

Autres ASL

 

4 %

 

 

5 %

 

 

14° Articles de bricolage et de jardin

Machines thermiques

 

5 %

 

 

11 %

 

 

Matériels de bricolage

 

4 %

 

 

10 %

 

 

Matériel de jardin

 

2 %

 

 

5 %

 

 

15° Véhicule

Catégorie M ou N (<3,5t) - pièces de réutilisation

 

8,50 %

 

10 %

 

16 %

 

Catégorie L (hors L6e) - pièces de réutilisation

 

26 %

 

31 %

 

40 %

 

Catégorie L6e - pièces de réutilisation

 

3 %

 

4 %

 

6 %

 

16° Pneumatiques

Réutilisation (occasion + rechapage)

 

17 %

 

18 %

 

19 %

 

Catégorie VL - rechapage

 

4 %

 

6 %

 

10 %

 

Catégorie PL – rechapage (dont nominatif)

 

 

 

 

 

50 %

 

18° Navires de plaisance et de sport

 

 

32 t

 

54 t

 

75 t

* Objectif établi pour 2023 uniquement. Les éco-organismes doivent élaborer une proposition d’évolution de cet objectif de réemploi et réutilisation après réalisation d’une étude complémentaire (21 mois après l’agrément, soit le 21 septembre 2023, date finalement repoussée à mi-2024).

Source : DGPR à partir des données de l’Ademe.

Par défaut, les objectifs de réemploi des éco‑organismes sont révisés tous les six ans à l’occasion de la délivrance d’un nouvel agrément. Toutefois, dans certains cas, des clauses de revoyure ont été prévues afin de renforcer les ambitions en matière de réemploi. C’est en particulier le cas de la filière des équipements électriques et électroniques, pour laquelle l’objectif fixé à 2 % de réemploi est jugé trop peu ambitieux. Le cahier des charges prévoyait une révision en 2023 de cet objectif sur la base d’une étude sectorielle des éco-organismes. Cette étude a pris du retard et devrait être disponible à l’été 2024.

b.   Des objectifs dont on constatera qu’ils n’ont pas été atteints en 2023

Comme cela a été indiqué aux rapporteurs par l’Ademe et la DGE, les données relatives au réemploi des emballages ne sont pas encore disponibles car la méthodologie de calcul n’a été finalisée qu’en 2023. L’observatoire national du réemploi et de la réutilisation a en effet publié en février 2023 un guide intitulé « Comptabilisation du réemploi des emballages en France » ([52]) destiné aux producteurs afin de les aider dans le suivi des données d’emballages et le calcul de la proportion annuelle d’emballages réemployés mis sur le marché.

Les premières données concernant les mises sur le marché de 2023 doivent être remontées à l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation courant 2024 pour être consolidées au troisième trimestre 2024. La DGE a toutefois indiqué aux rapporteurs que le taux de réemploi est estimé à 0,3 % dans la filière des emballages ménagers, bien loin de l’objectif de 5 % prévu pour 2023 par la loi Agec.

L’Ademe se montre davantage optimiste pour les années à venir. L’Agence a ainsi indiqué qu’à horizon 2027, le réemploi des emballages par rapport à la totalité des emballages à destination du consommateur pourrait atteindre 10 %, répondant ainsi à l’objectif que la France s’est donné. Cet objectif représente un potentiel de réemploi annuel de plus de onze milliards d’emballages.

2.   L’essor du réemploi se heurte à plusieurs difficultés

a.   Un prisme accordé au recyclage au détriment du réemploi

La politique de prévention des déchets définie à l’article L. 541-1 du code de l’environnement repose sur « une hiérarchie des modes de traitement des déchets consistant à privilégier, dans l’ordre :

a) La préparation en vue de la réutilisation ;

b) Le recyclage ;

c) Toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique ;

d) L’élimination ».

Cette hiérarchie impose de privilégier d’abord la réduction, le réemploi et la réparation, avant d’améliorer le recyclage des déchets. Or, les moyens déployés ces trois dernières années pour appliquer la loi Agec ont porté de manière prioritaire sur le recyclage.

De nombreux acteurs auditionnés considèrent que le réemploi ne constitue pas une priorité de la loi. Pour le collectif EC2027, « les acteurs économiques du réemploi n’arrivent pas à tirer parti de la loi Agec. Cette dernière a en effet déséquilibré l’application de la hiérarchie des 3R (réduire, réemployer/réutiliser et recycler) [et] a délaissé le réemploi au profit de du recyclage ». Il dénonce en particulier la faiblesse des objectifs de réemploi dans les cahiers des charges des éco‑organismes, qui s’élèvent par exemple à seulement 2 % pour les équipements électriques et électroniques, comparés aux objectifs de recyclage. L’association France urbaine note quant à elle que « même si nous notons des avancées sur le réemploi, la loi Agec reste marquée par un fort prisme sur le recyclage […]. Ce qui remonte des collectivités, c’est que les modèles actuels favorisent le recyclage et pas assez le réemploi ». L’entreprise Murfy, qui propose un service de réparation d’appareils électroménagers, considère également que le réemploi est « le grand oublié de la loi Agec, à la fois dans les ressources attribuées mais également dans les objectifs du cahier des charges des éco-organismes dont les niveaux (2 % !!!) ne sont pas en cohérence avec l’ambition de la loi Agec en matière de réemploi. Avec ces faibles objectifs et moyens, les éco-organismes ne sont ni poussés à rééquilibrer la priorisation des flux vers le réemploi au détriment du recyclage, ni poussés à s’appuyer sur de nouveaux acteurs du réemploi ».

M. Jacques Vernier, président de la Cifrep, a toutefois dressé un tableau moins sévère lors de son audition. Il a rappelé qu’il n’existait aucun objectif de réemploi dans les cahiers des charges des éco‑organismes avant la loi Agec, à l’exception de la filière des éléments d’ameublement. En outre, comme l’a indiqué l’Ademe, il convient de ne pas sous‑estimer le « choc » que représente le fait de s’emparer des sujets d’éco‑conception et de réemploi pour les producteurs, et notamment les petites structures.

b.   Des initiatives qui restent locales ou à un stade expérimental

Même si elles représentent aujourd’hui des parts de marché très relatives, des initiatives en faveur du réemploi émergent localement, encouragées par la loi Agec. Les dispositifs de réemploi sont particulièrement matures pour les emballages industriels et commerciaux (palettes, fûts, caisses-cagettes). Pour les emballages ménagers et de restauration, des projets sont menés à l’échelle locale, comme par exemple Loop, Uzaje, Bout’à Bout’ en Pays de la Loire, Alsace consigne, Rebooteille à Lyon, Consign’up à Toulouse. Trente-quatre projets de réemploi sont actuellement financés par l’éco-organisme Citeo dans le cadre du programme « ReUse ».

Au-delà du seul réemploi des emballages, le groupe de travail du CNEC consacré à l’innovation et aux nouveaux modèles économiques observe un renforcement des activités liées au réemploi, qui se développent et changent d’échelle. Le groupe de travail note que « des concepts liés au réemploi, à la réutilisation et, de manière générale, d’économie circulaire ont été intégrés dans des activités jusqu’alors uniquement basées sur des modèles d’économie linéaire (écoconception, rachat et reprise, économie de fonctionnalité, location, systèmes de consigne, services après-vente, offres de seconde main, reconditionnement, etc.) ».

Toutefois, le développement de ces projets à l’échelle nationale se heurte à des enjeux importants de logistique et de coordination entre les acteurs.

c.   Un gisement de produits et des infrastructures encore insuffisants

Les acteurs du secteur du réemploi font face à des contraintes liées à l’accès au gisement de produits usagés, marqué à la fois par de faibles quantités disponibles et par une qualité souvent dégradée. Cette difficulté est aggravée par une « course au gisement » entre les acteurs « historiques » et de nouveaux acteurs concurrents qui fragilisent les acteurs à vocation sociale.

Selon le collectif EC2027, les produits usagés sont très minoritairement orientés vers les acteurs du réemploi, en particulier pour les filières des déchets d’équipements électriques et électroniques et des déchets d’activités économiques. Une immense partie des gisements est directement orientée vers le recyclage, si bien que les acteurs du réemploi peinent à dégager des modèles économiques rentables et/ou sont contraints d’importer des produits d’occasion, en particulier pour le reconditionnement des appareils informatiques et électroménagers. Ainsi, d’après les données sur les déchets d’équipements électriques et électroniques gérés par l’éco-organisme Ecosystem, l’écart entre les volumes collectés (625 000 tonnes), les volumes étudiés pour réemploi (45 000 tonnes, soit 7 % de la collecte) et les volumes réellement réemployés (9 000 tonnes, soit 1,4 % de la collecte) ([53]) met en évidence la priorité accordée au recyclage par rapport au réemploi. En outre, d’après les principaux distributeurs d’appareils électroménagers français, deux tiers des flux qu’ils collectent partent directement dans les filières de recyclage, sans faire l’objet d’une étude et d’un tri pour réemploi. Enfin, dans le domaine des appareils médicaux, la fédération Envie Autonomie estime que 30 % à 40 % des aides techniques qui sont aujourd’hui jetées pourraient être réemployées.

D’une manière plus générale, le groupe de travail « Innovation et nouveaux modèles économiques » du CNEC note qu’une grande partie des volumes de certains produits reste stockée chez les consommateurs et qu’une autre partie est souvent directement orientée vers le recyclage sans tri approprié, sans que l’on connaisse précisément la quantité exacte ou le potentiel de réemploi de ces produits.

Une partie de ces produits pourrait être préparée au réemploi et réemployée, à condition que les conditions de collecte, de stockage et de transport ne dégradent pas les produits (pollution, casse, dégradation par la pluie ou le soleil…).

Or, l’obligation de reprise des produits usagers, prévue par la loi Agec, est peu appliquée.

L’obligation de reprise des produits usagers, une disposition peu appliquée

L’article 62 de la loi Agec a élargi l’obligation pour les distributeurs de reprendre les produits usagés en magasin, qui s’appliquait déjà aux produits électriques et électroniques. Désormais, cette obligation de reprise concerne les magasins de produits chimiques de bricolage (colles, peintures), les cartouches de gaz combustible (type camping), les meubles, les articles de sport (dont les vélos), les articles de bricolage et de jardin, les jouets et, depuis 2024, les produits et matériaux du secteur de la construction. Cette obligation de reprise a également été étendue à la vente en livraison.

La mise en œuvre de cette disposition, codifiée à l’article L. 541-10-8 du code de l’environnement, fait l’objet de retards de la part de certains distributeurs.

Elle reste en outre largement perfectible en ce qui concerne la vente de produits en livraison. La loi précise que cette reprise se fait « auprès d’un point de collecte de proximité lorsqu’il s’agit de produits transportables sans équipement » mais les notions de proximité et de produits transportables sans équipement n’ont pas encore pu faire l’objet d’une définition claire et consensuelle avec les acteurs du commerce à distance. En l’absence d’une telle définition, cette reprise n’est pas déployée.

L’absence de collecte préservante généralisée ne permet ni de maximiser les volumes collectés, ni de garantir la réemployabilité des produits. Certaines initiatives sont à l’œuvre ([54]), mais force est de constater qu’elles ne permettent pas d’atteindre les objectifs de collecte et de réemploi prévus par la loi, pourtant relativement faibles.

Au final, de nombreux acteurs auditionnés considèrent que les volumes destinés au réemploi sont trop faibles pour alimenter tous les acteurs du réemploi, qu’il s’agisse des acteurs historiques ou des acteurs nouveaux, et pour permettre leur développement. Les rapporteurs ont été particulièrement alertés par certaines entreprises, contraintes de déposer le bilan en raison d’un gisement de produits insuffisant. Afin de ne pas mettre en péril l’activité de ces entreprises, il est urgent de développer un nouveau modèle économique favorable au réemploi, en agissant sur différents leviers.

3.   La massification du réemploi suppose d’agir sur différents leviers

a.   Disposer de données fiables et actualisées sur le réemploi et ses possibilités de développement

La question de la disponibilité des données est apparue centrale tout au long du cycle d’auditions mené par les rapporteurs. Les acteurs du réemploi doivent pouvoir s’appuyer sur des données fiables et actualisées afin de développer une stratégie industrielle adaptée.

À cet égard, l’article 9 de la loi Agec a prévu la mise en place d’un observatoire national du réemploi et de la réutilisation « chargé d’évaluer la pertinence des solutions de réemploi et de réutilisation d’un point de vue environnemental et économique, de définir la trajectoire nationale visant à augmenter la part des emballages réutilisés et réemployés mis en marché par rapport aux emballages à usage unique et d’accompagner, en lien avec les écoorganismes, les expérimentations et le déploiement des moyens nécessaires à l’atteinte des objectifs définis dans les cahiers des charges de ces derniers ».

Comme cela a été rappelé aux rapporteurs lors de l’audition consacrée à cet observatoire, son rôle n’est pas d’être producteur, mais agrégateur de données. Il est chargé de collecter, d’analyser, de synthétiser et de valoriser les données relatives au réemploi et à la réutilisation fournies par les acteurs, d’élaborer des outils méthodologiques pour harmoniser les pratiques de comptabilisation des flux ainsi que des outils d’évaluation de l’impact des financements alloués, et de diffuser à l’ensemble des parties prenantes les éléments nécessaires pour les aider dans leurs décisions de déploiement du réemploi et de la réutilisation en France.

La création de cet observatoire, très attendue, a toutefois pris du retard, la loi Agec prévoyant qu’elle devait intervenir avant le 1er janvier 2021, ce délai ayant été reporté à février 2022 par la loi « climat et résilience ». La mise en place de l’observatoire a finalement été officialisée en septembre 2022 et sa première feuille de route, précisant son périmètre de compétences, ses missions, son fonctionnement ainsi que son programme de travail pour 2023, a été publiée en décembre 2022.

Depuis, l’observatoire a pu mener de nombreux travaux, notamment des études sur la définition de méthodologies de comptabilisation du réemploi et de la réutilisation, menées en février 2023 pour les emballages, en octobre 2023 pour les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB) et en novembre 2023 pour les équipements électriques et électroniques, les éléments d’ameublement, les textiles, linge et chaussures, les articles de bricolage et de jardin et les jouets. Par ailleurs, une étude de l’observatoire sur les potentiels de développement du réemploi des emballages par secteur est parue en septembre 2023 ([55]).

Ces travaux doivent se poursuivre afin de disposer d’informations régulières et fiables sur l’état du gisement de produits réemployables et sur les infrastructures de réemploi sur le territoire. Il serait notamment opportun de mener des études économiques pour connaître les besoins en matière de formations et d’emplois liés au développement des activités de réemploi. Il est également urgent de mettre à jour le Panorama du réemploi de l’Ademe, dont la dernière édition date de 2017 ([56]). Il a été indiqué aux rapporteurs qu’une actualisation de ce guide était prévue en 2024 et serait finalisée au deuxième trimestre 2025.

Proposition n° 20 : Confier à l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation la réalisation d’études régulières et actualisées, afin de disposer d’informations fiables sur l’état du gisement de produits réemployables et sur les infrastructures de réemploi sur le territoire.

Les moyens humains et financiers dont dispose l’observatoire ne paraissent pas en adéquation avec les enjeux et les fortes attentes des parties prenantes. Placé au sein de la direction de la supervision des filières REP de l’Ademe, il est aujourd’hui doté de seulement deux équivalents temps plein (ETP). Les dépenses liées à ses travaux sont financées par le fonds « Économie circulaire » de l’Ademe. Afin de mener à bien ses différentes missions, il conviendrait d’augmenter les crédits du fonds « Économie circulaire ».

Proposition n° 21 : Renforcer les moyens financiers de l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation en augmentant le montant des crédits du fonds « Économie circulaire » qui lui sont consacrés.

b.   Développer des infrastructures et une logistique adaptées sur les territoires

La multiplicité des initiatives locales en faveur du réemploi ne doit pas laisser penser à la maturité de son modèle économique. Comme indiqué dans la SN3R, « les vertus du réemploi ne s’apprécient qu’avec un taux de pénétration important, permettant d’en optimiser le bénéfice environnemental et le modèle économique, en maximisant notamment le nombre de rotations et la proximité des installations. Le réemploi est donc un choix : en faire beaucoup ou ne pas parvenir à optimiser le modèle ».

Les actions en faveur du réemploi sont particulièrement difficiles à mettre en œuvre car elles nécessitent une restructuration profonde des modes de production des entreprises. Or, si la loi Agec a permis d’enclencher des investissements en faveur de modes de production circulaires, elle est restée au milieu du gué en termes de transition vers des infrastructures et des systèmes à même de généraliser ces modes de production à grande échelle. Il convient aujourd’hui de changer d’échelle, ce qui soulève des enjeux logistiques importants, pour les emballages comme pour les autres produits ou matériaux réemployables. C’est toute une industrie qui doit se réorganiser en amont et en aval de la production pour développer l’écoconception, construire une chaîne logistique et de nettoyage, installer des lieux de collecte et veiller à ce que le réemploi reste une solution pratique pour le consommateur.

Le réemploi des emballages, tout d’abord, suppose de développer une gamme d’emballages types par catégorie ou famille de produits. En effet, un emballage réemployable diffère d’un emballage jetable : il doit se prêter à de multiples cycles d’utilisation, de lavage, de décontamination et résister aux détériorations. Le réemploi pose donc la question des standards d’emballages réemployables ou de spécifications techniques communes. Les éco‑organismes de la filière des emballages ont réfléchi à une définition de standards pour les produits frais, les boissons et la restauration. Ces travaux ont permis de créer des lignes directrices et de faire émerger des impératifs, mais ils doivent encore être approfondis afin de définir les caractéristiques qui permettront l’utilisation effective d’une gamme d’emballages standardisés. Certains freins culturels et commerciaux, notamment pour les bouteilles de vin, doivent encore être surmontés.

Ces emballages réemployables supposent ensuite de mettre en place de nouvelles chaînes de conditionnement et de reconditionnement. Les industriels devront donc investir dans l’adaptation de leurs lignes de production. En outre, alors qu’un emballage à usage unique est acheté, utilisé, trié et recyclé, l’emballage réemployable doit être collecté, trié, nettoyé, rempli à nouveau et réacheminé. La chaîne logistique est donc fondamentalement différente. Il est nécessaire de disposer de lieux de récupération des emballages, que ce soit en magasins, dans des lieux mutualisés ou sur l’espace public. Des centres de tri, de lavage et de stockage doivent en outre être accessibles à proximité des lieux de collecte. À cet égard, une cartographie des centres de lavage a été réalisée en 2023 par l’observatoire national du réemploi et de la réutilisation ([57]) afin de permettre aux acteurs industriels de développer le réemploi lorsqu’ils ne peuvent pas ou ne souhaitent pas internaliser le lavage. Les centres répertoriés proposent un lavage mutualisé d’emballages, c’est-à-dire ayant la capacité de laver pour le compte de plusieurs clients.

Le réemploi des emballages est en outre confronté à des enjeux sanitaires, portant principalement sur l’aptitude au contact alimentaire d’emballages utilisés plusieurs fois, les exigences de lavage et de décontamination de ces emballages ou encore l’adaptation des modes de transport, qui doivent pouvoir associer le transport d’emballages souillés, d’emballages propres et de denrées alimentaires.

Pour les rapporteurs, le développement du réemploi suppose donc que des infrastructures adaptées soient présentes sur l’ensemble du territoire afin de minimiser les distances de transport et les contraintes pour les consommateurs. Les dynamiques territoriales doivent être encouragées, en lien avec les collectivités territoriales, afin de faciliter l’accès au foncier ou d’aider au lancement d’activités de réemploi.

Proposition n° 22 : Adapter les modes de production et la logistique des entreprises du secteur des emballages afin de permettre le déploiement massif du réemploi dans tous les territoires :

– en poursuivant la réflexion autour de la définition de standards d’emballages réemployables ou de spécifications techniques communes ;

 en adaptant les lignes de production au conditionnement et au reconditionnement de ces emballages standardisés ;

– en mettant en place des lieux de collecte, des centres de tri, de lavage et de stockage des emballages.

● Le développement du réemploi des emballages pose également la question de celui d’une consigne pour réemploi des emballages en verre.

D’après l’Ademe, neuf consommateurs sur dix se disent prêts au retour de cette consigne. Les projets de consignes pour réemploi se sont d’ailleurs multipliés ces dernières années, après la quasi-disparition de cette pratique dans les années 1960. Pourtant, aucune de ces initiatives n’a encore permis d’imposer ce modèle dans le paysage national.

Alors que Mme Bérangère Couillard, alors secrétaire d’État à l’écologie, avait annoncé en juin 2023 une obligation pour les grandes surfaces de reprendre les contenants en verre, le ministre M. Christophe Béchu a indiqué le 7 février 2024, lors de sa visite de l’entreprise Petrel, que la mise en place de systèmes de consigne reposerait uniquement sur le volontariat, excluant tout dispositif obligatoire.

La mise en place d’un dispositif de consigne pour réemploi présente de nombreux avantages sur le plan environnemental, mis en avant dans un rapport de l’Ademe de juin 2023 ([58]). Elle permettrait plus particulièrement d’accélérer la fin du recours aux emballages en plastique à usage unique.

Un tel dispositif ne peut se développer massivement que s’il s’accompagne d’obligations de reprise des bouteilles. Comme indiqué par le réseau Vrac et Réemploi, « le réemploi, c’est une rupture de modèle. Pour qu’il soit viable il faut embarquer tout le monde en même temps. Entreprises, pouvoirs publics et citoyens […] l’État fixe des objectifs mais n’accompagne pas suffisamment le marché. Sans contrainte, le marché n’y va pas, il attend ».

Les rapporteurs partagent cette analyse et sont favorables à la mise en œuvre d’un dispositif de consigne pour réemploi des emballages en verre, assortie d’une obligation pour les supermarchés et les hypermarchés de reprendre ces contenants. Pour les plus petites surfaces, une expérimentation devra être menée afin de les intégrer progressivement dans le champ d’application de cette généralisation de la consigne.

Proposition n° 23 : Mettre en place un dispositif de consigne pour réemploi des emballages en verre, assorti d’une obligation pour les supermarchés et les hypermarchés de reprendre ces contenants.

● En ce qui concerne les autres produits soumis à des obligations de réemploi dans les cahiers des charges des éco-organismes, il convient d’assurer une meilleure gestion du gisement disponible, notamment en évitant les risques de dégradation au moment de la collecte, du stockage et du transport, mais également en mettant en place des points de reprise partout sur le territoire.

Or, cette obligation de reprise des produits usagés, prévue par l’article 62 de la loi Agec, est peu appliquée, en particulier en ce qui concerne la vente à distance (voir l’encadré page 85. Afin de lever cette difficulté, les metteurs en marché ont prévu de mettre en place un groupe de travail au sein de la Cifrep pour définir les conditions d’utilisation des points de livraison et de retrait du type Mondial Relay comme points de retour gratuits des produits usagés.

Afin de faciliter la collecte des produits pouvant être réemployés, les rapporteurs souhaitent que des points de reprise soient déployés plus largement sur l’ensemble du territoire. La reprise des produits pourrait s’effectuer en magasin, mais également dans des lieux mutualisés ou sur l’espace public. Le respect de l’obligation de reprise doit également faire l’objet de contrôles et des sanctions doivent être mises en place lorsque celle-ci n’est pas effective.

Proposition n° 24 : Déployer des points de reprise des produits usagés sur l’ensemble du territoire, à la fois en magasin, dans des lieux mutualisés ou sur l’espace public ; renforcer le contrôle du respect de l’obligation de reprise des produits usagés ; instaurer des sanctions pour non-respect de cette obligation.

● Enfin, au-delà de la collecte, une solution pour augmenter le gisement de produits réemployables consiste à autoriser le réemploi de certains produits, ce qui vaut tout particulièrement pour le secteur médical.

Cette problématique a été soulevée par l’éco-organisme chargé de la collecte et du traitement des déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés (Dastri), qui distribue chaque année 4,3 millions de boîtes à aiguilles à usage unique. Si ces emballages sécurisés incorporent, depuis 2022, 20 % de plastique recyclé, ils restent à usage unique et sont donc à l’origine d’une production importante de déchets en plastique ayant vocation à être incinérés.

Par ailleurs, certains dispositifs médicaux comme les lecteurs de glycémie doivent aujourd’hui être détruits alors même qu’ils pourraient être réutilisés après contrôle et nettoyage, notamment pour les femmes enceintes atteintes de diabète gestationnel qui n’utilisent ces lecteurs que quelques mois.

Les rapporteurs proposent d’autoriser le réemploi des emballages destinés aux patients en auto-traitement et de certains dispositifs médicaux comme les lecteurs de glycémie.

Proposition n° 25 : Autoriser le réemploi des emballages destinés aux patients en auto-traitement et de certains dispositifs médicaux comme les lecteurs de glycémie.

c.   Mettre en place une instance de coordination et de pilotage du réemploi

Comme cela a été indiqué, le développement du réemploi suppose des transformations profondes de l’ensemble de la chaîne de production. Dans ce contexte, il semble essentiel qu’une ou plusieurs structures collectives puissent coordonner les différentes transformations à mettre en place, dans le respect des spécificités territoriales. Par ailleurs, certaines actions supposent des décisions communes aux acteurs, qu’il s’agisse de la définition de standards d’emballages, de la normalisation des pratiques de lavage, des mesures de traçabilité ou de la gestion des emballages (notamment pour définir qui en est propriétaire). En Allemagne, par exemple, la coordination passe par une coopérative de producteurs (Genossenschaft Deutscher Brunnen  GDB) qui représente différents secteurs comme l’eau minérale, les jus et le lait.

Il existe en outre des attentes fortes des collectivités territoriales en matière de soutien à la mise en place des filières de réemploi dans les territoires. Selon France urbaine, si le réemploi et la réutilisation sont à valoriser, « ils ne peuvent être considérés sans la dimension de l’accompagnement, qui est primordiale pour accélérer et rendre attractifs ces nouveaux modes de faire, impliquant de nouveaux modèles à mettre en place et à pérenniser, bien souvent au niveau local, et avec des structures de l’économie sociale et solidaire ». Les associations environnementales ont quant à elle attiré l’attention des rapporteurs sur « le manque avéré de pilotage national pour la généralisation du réemploi ».

Dans ce contexte, des Assises du réemploi pourraient être organisées dans les prochains mois. Elles réuniraient l’ensemble des acteurs concernés (État, collectivités territoriales, industriels, éco-organismes, associations environnementales et de consommateurs) afin de réfléchir à la mise en place d’une structure de pilotage chargée de coordonner les transformations à mettre en place et d’accompagner les acteurs.

Proposition n° 26 : Organiser des Assises du réemploi réunissant l’ensemble des acteurs concernés (État, collectivités territoriales, industriels, éco-organismes, associations environnementales et de consommateurs) afin de réfléchir à la mise en place d’une structure de pilotage chargée de coordonner les transformations à mettre en place et d’accompagner les acteurs.

Les rapporteurs proposent par ailleurs que le pilotage du réemploi se traduise par l’élaboration d’un schéma directeur pour les filières de réemploi, qui prendrait la forme d’une Stratégie nationale du réemploi, qui serait distincte de la SN3R.

Proposition n° 27 : Élaborer une Stratégie nationale du réemploi, distincte de la Stratégie nationale pour la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique (SN3R).

Les rapporteurs souhaitent également que ce schéma directeur puisse être décliné au niveau de chaque région afin de tenir compte de la spécificité des différents territoires. Des schémas directeurs régionaux du réemploi constitueraient ainsi des outils de planification utiles, permettant d’évaluer les besoins spécifiques de chaque région et d’adapter en conséquence les modes de production, la logistique et les infrastructures à l’échelle régionale.

Proposition n° 28 : Élaborer des schémas directeurs régionaux du réemploi, permettant d’évaluer les besoins spécifiques de chaque territoire et d’adapter en conséquence les modes de production, la logistique et les infrastructures à l’échelle régionale.

d.   Rehausser les objectifs et le financement du réemploi

Les rapporteurs considèrent que la mise en place d’une stratégie industrielle autour du réemploi, qu’ils appellent de leurs vœux, doit permettre de définir et d’atteindre des objectifs de réemploi plus ambitieux dans les prochaines années. Comme cela a été rappelé, les objectifs fixés dans les cahiers des charges des éco‑organismes sont aujourd’hui trop faibles.

En outre, la loi Agec ne prévoit pas de trajectoire de développement du réemploi sur le long terme. L’objectif de réemploi des emballages est de 10 % en 2027, mais rien n’est prévu au-delà de cette date. Les décrets d’application fixant des objectifs intermédiaires pour des périodes de cinq ans ne sont pas publiés de manière anticipée. Pourtant, les acteurs industriels ont besoin de visibilité afin de pouvoir réorganiser leur chaîne de production, ce qui suppose des investissements coûteux à court terme. C’est pourquoi les rapporteurs estiment qu’il serait opportun de définir, dès aujourd’hui, des objectifs évolutifs de développement du réemploi jusqu’en 2040.

Proposition n° 29 : Renforcer les objectifs de réemploi des emballages dans le prochain décret « 3R », qui couvrira la période 2025-2030 ; prévoir une trajectoire de développement du réemploi sur le long terme en fixant des objectifs évolutifs jusqu’en 2040.

Par ailleurs, les personnes auditionnées par les rapporteurs ont considéré à juste titre que les acteurs du réemploi bénéficient de peu d’aides financières.

Créé par l’article 62 de la loi Agec et défini à l’article L. 541-10-5 du code de l’environnement, le fonds dédié au financement du réemploi et de la réutilisation, mis en place par chaque éco-organisme ou chaque producteur en système individuel, est « doté des ressources nécessaires à l’atteinte des objectifs de réemploi et de réutilisation prévus à l’article L. 541-10 » du même code. Ces ressources ne peuvent être inférieures à 5 % du montant des contributions reçues.

Il est nécessaire d’augmenter les ressources du fonds dédié au financement du réemploi et de la réutilisation, qui ne suffisent pas aujourd’hui à garantir la pérennité économique des acteurs de l’économie sociale et solidaire.

Ces ressources pourraient être portées à 10 % du montant des contributions reçues.

Proposition n° 30 : Doubler les ressources du fonds dédié au financement du réemploi et de la réutilisation pour les porter au minimum à 10 % du montant des contributions reçues.

C.   La poursuite de la lutte contre le gaspillage et l’essor du don

1.   Les objectifs de réduction de moitié du gaspillage alimentaire

8,8 millions de tonnes de déchets alimentaires sont produites par an en France en 2021 ([59]). Ce chiffre, calculé selon une méthodologie harmonisée au niveau de l’Union européenne, inclut la part non comestible des déchets alimentaires (épluchures, os…), estimée à près de la moitié de ces déchets. Par conséquent, la quantité d’aliments réellement gaspillés s’élève à environ 4,4 millions de tonnes.

L’article 11 de la loi Agec fixe des objectifs de réduction de moitié du gaspillage alimentaire par rapport à 2015 :

– d’ici 2025 dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective ;

– d’ici 2030 dans les domaines de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale.

Afin d’atteindre ces objectifs, l’article 31 de la même loi prévoit que les opérateurs agroalimentaires mettent en place, avant le 1er janvier 2021, une démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire, qui comprend notamment la réalisation d’un diagnostic. Pour accompagner la mise en œuvre de cette obligation, l’Association des entreprises de produits alimentaires élaborés (Adepale) et le centre technique de la conservation des produits agricoles (CTCPA) ont élaboré, avec l’aide de l’Ademe, un guide d’accompagnement pour la réalisation du diagnostic des pertes et du gaspillage alimentaire. Outre ce guide, l’Ademe a mis à disposition des opérateurs agroalimentaires une boîte à outils pour la réalisation de ces diagnostics.

En revanche, lors de la table ronde consacrée au gaspillage alimentaire, l’ensemble des personnes auditionnées a indiqué aux rapporteurs qu’il n’existe pas d’indicateurs de suivi des objectifs fixés par la loi Agec en matière de réduction du gaspillage alimentaire. Pour les rapporteurs, un tel suivi, qui pourrait être assuré par l’Ademe, doit rapidement être mis en place.

Proposition n° 31 : Mettre en place des indicateurs et un suivi par l’Ademe de la réalisation des objectifs de réduction du gaspillage alimentaire dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective, ainsi que dans les domaines de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale.

Parmi les mesures permettant de réduire le gaspillage alimentaire, la possibilité, pour le consommateur, d’être servi dans un contenant apporté par ses soins doit être rendue effective.

À cet égard, l’article 41 de la loi Agec a créé un nouvel article L. 120-2 du code de la consommation prévoyant que, dans les commerces de vente au détail, le consommateur peut demander à être servi dans un contenant apporté par ses soins, dans la mesure où ce dernier est visiblement propre et adapté à la nature du produit acheté. Un affichage en magasin informe le consommateur sur les règles de nettoyage et d’aptitude des contenants réutilisables. Le consommateur est alors responsable de l’hygiène et de l’aptitude du contenant. Le commerçant peut toutefois refuser le service si le contenant proposé est manifestement sale ou inadapté.

En ce qui concerne le secteur de la restauration collective, la loi n° 2018‑938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi « Égalim 1 » a rendu le « doggy bag » obligatoire depuis le 1er janvier 2021. L’article L. 541-15-7 du code de l’environnement prévoit ainsi que les établissements de restauration commerciale et les débits de boissons à consommer sur place mettent à la disposition de leurs clients qui en font la demande des contenants réutilisables ou recyclables permettant d’emporter les aliments ou boissons non consommés sur place, à l’exception de ceux mis à disposition sous forme d’offre à volonté. Cette disposition a été complétée par l’article 44 de la loi Agec, qui étend au secteur de la restauration collective les dispositions prévues par l’article 41 de la même loi pour les commerces de vente au détail. L’article L. 541‑15-7 précité prévoit ainsi désormais que le contenant peut être apporté par le consommateur. Un affichage en établissement informe le consommateur sur les règles de nettoyage et d’aptitude des contenants. Comme pour le secteur de la vente au détail, il est précisé que « le consommateur est responsable de l’hygiène et de l’aptitude du contenant », l’établissement pouvant refuser de servir le consommateur si le contenant apporté par ce dernier est manifestement sale ou inadapté.

La responsabilité du consommateur, clairement affirmée dans la loi, est supposée faciliter l’application de ces dispositions dans la mesure où les commerçants et les restaurateurs se voient exonérés de toute responsabilité si l’hygiène du contenant n’est pas totalement irréprochable.

Pourtant, les rapporteurs ont constaté que ces dispositions n’étaient pas toujours appliquées. Il convient donc d’améliorer l’information des commerces de vente au détail et des restaurants quant à la possibilité offerte au consommateur d’apporter son propre contenant.

Proposition n° 32 : Informer les commerces de vente au détail et les restaurants de la possibilité, pour le consommateur :

– d’être servi dans un contenant apporté par ses soins dans les commerces de vente au détail ;

– d’apporter son propre contenant pour emporter les aliments non consommés sur place dans les restaurants.

Faire respecter l’obligation d’affichage en magasin et en établissement de cette possibilité offerte au consommateur.

2.   Le label anti-gaspillage, un nouvel outil pour le secteur de la distribution

L’article L. 541-15-6-1-1 du code de l’environnement, créé par l’article 33 de la loi Agec, institue un label national « anti-gaspillage alimentaire » pouvant être accordé à toute personne morale contribuant aux objectifs nationaux de réduction du gaspillage alimentaire. Le décret d’application de cet article ([60]) prévoit la mise en place d’un référentiel anti-gaspillage précisant les modalités de mise en œuvre de la labellisation, en particulier les critères que les personnes morales doivent respecter pour être labellisées, ainsi que les procédures de contrôle et de suivi associées.

Ce référentiel a été approuvé par un arrêté du 28 février 2023 ([61]) pour le secteur de la distribution. Il valorise notamment les actions de prévention du gaspillage (gestion des achats et des stocks), de valorisation des produits alimentaires et de gestion des invendus. Le logo du label est différent selon le niveau atteint dans la lutte contre le gaspillage alimentaire (1 étoile « engagement » ; 2 étoiles « maîtrise » ; 3 étoiles « exemplaire »).

Au 29 avril 2024, soixante-six établissements sont labellisés, dont cinquante-sept au niveau « exemplaire », sept au niveau « maîtrise » et deux au niveau « engagement » ([62]). Le label est surtout demandé par des grandes surfaces, alors qu’il a été conçu pour s’adapter également aux métiers de bouche (bouchers, fromagers, primeurs, boulangers…).

Bien que sa mise en œuvre soit récente, le CGDD dresse un premier bilan positif du label, dont les organismes certificateurs et les établissements labellisés se disent très satisfaits. Ces derniers apprécient de pouvoir valoriser ce label auprès de leurs clients, mais également d’en faire, en interne, un outil d’émulation des équipes et de reconnaissance des actions de lutte contre le gaspillage alimentaire mises en place parfois depuis plusieurs années. Comme pour l’affichage environnemental, le label anti-gaspillage ne permet pas uniquement d’orienter les choix ou de sensibiliser les consommateurs. Il a des effets directs sur les entreprises.

Une seconde phase de labellisation, prévue au premier semestre 2024, s’adressera aux secteurs de la restauration collective et commerciale, puis aux industries agroalimentaires en 2025.

Les rapporteurs saluent la mise en place du label anti-gaspillage et se félicitent des retours positifs dont il fait l’objet. Ils s’interrogent néanmoins sur les seuils et les critères d’obtention du label, qui pourraient ne pas être suffisamment ambitieux et discriminants pour permettre de distinguer véritablement les établissements entre eux. En effet, près d’un an après sa mise en place, près de 90 % des magasins labellisés disposent déjà de la note maximale de trois étoiles, qui correspond à un niveau « exemplaire » en matière de lutte contre le gaspillage. Il convient donc de veiller à ce que l’obtention du label reste exigeante afin d’en faire un instrument pertinent de mesure des efforts déployés par les établissements et de comparaison entre ces établissements. Pour cela, la grille de notation du référentiel anti-gaspillage pourrait être revue en relevant les seuils de passage d’un niveau à l’autre.

Proposition n° 33 : Réviser la grille de notation du référentiel anti-gaspillage en relevant les seuils de passage d’un niveau à l’autre du label anti-gaspillage alimentaire, afin que ce label constitue un instrument pertinent de mesure et de comparaison des efforts déployés par les établissements.

3.   La délivrance de médicaments à l’unité est peu pratiquée

Afin d’éviter le gaspillage des médicaments, l’article 40 de la loi Agec crée un nouvel article L. 5123-8 du code de la santé publique autorisant la délivrance de certains médicaments en officine à l’unité, lorsque leur forme pharmaceutique le permet. Les modalités particulières de conditionnement, d’étiquetage, d’information du patient et de traçabilité des médicaments délivrés à l’unité sont définies par un décret du 31 janvier 2022 ([63]). Les médicaments concernés par cette disposition sont les antibiotiques, conformément à un arrêté du 1er mars 2022 ([64]).

D’après les chiffres communiqués par la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), 341 000 médicaments ont été dispensés à l’unité et 1 812 pharmacies d’officine ont effectué au moins une délivrance entre mai 2022 et octobre 2023. Ce nombre reste donc particulièrement faible, comparé aux 20 931 pharmacies d’officine en France.

Évolution mensuelle du nombre de dispensation d’antibiotiques déconditionnés

Source : Direction générale de la santé.

La délivrance de médicaments à l’unité est donc peu mise en œuvre. Les retours obtenus par la Cnam font tout d’abord état d’un manque de connaissance de l’existence du dispositif par les pharmaciens d’officine. Par ailleurs, bien que confrontés à des pénuries récurrentes d’amoxicilline et convaincus de la nécessité de réduire les consommations d’antibiotiques pour lutter contre l’antibiorésistance et le gaspillage de comprimés, les pharmaciens d’officine peinent à mettre en place la dispensation à l’unité en raison de freins d’ordre logistique et financier, selon les syndicats de pharmaciens. Ainsi, les blisters actuels contenant les antibiotiques ne sont pas adaptés : le numéro de lot et la date de péremption ne figurant pas sur chaque alvéole d’antibiotique, le pharmacien doit inscrire ces données sur l’étiquette du sachet remis au patient. L’inscription est souvent manuscrite parce que peu de logiciels d’aide à la dispensation permettent l’impression automatique de ces étiquettes avec l’ensemble des mentions prévues par le décret. La tarification à l’unité via ces mêmes logiciels est également difficile à obtenir des éditeurs. Enfin, le pharmacien doit imprimer une notice à remettre au patient si celle contenue dans la boîte a été remise lors d’une précédente dispensation et n’est donc plus disponible.

La direction générale de la santé (DGS) soutient l’intégration de conditionnements adaptés à la délivrance à l’unité (blisters unitaires avec étiquetage sur chaque alvéole) dans le cadre de la révision de la législation pharmaceutique européenne qui s’est ouverte début 2024. Une expérimentation avec quelques laboratoires est à l’étude pour faciliter la production de ces emballages adaptés. Par ailleurs, la DGS, en collaboration avec la délégation du numérique en santé (DNS) et la Cnam, doit se rapprocher prochainement des éditeurs de logiciels d’aide à la dispensation sur les sujets d’ordre informatique restant à traiter. Enfin, un plan de communication auprès des pharmaciens et du public doit également être mis en place.

Il existe donc plusieurs leviers permettant d’aller vers une généralisation de la délivrance des médicaments à l’unité. Les rapporteurs considèrent qu’il est urgent de lever les freins d’ordre logistique et informatique rencontrés par les pharmaciens et d’adapter les conditionnements des médicaments à la vente à l’unité.

Des actions de communication doivent en outre être mises en place afin d’informer et de sensibiliser les pharmaciens et les patients sur les conséquences positives de la dispensation à l’unité sur les plans environnemental, sanitaire et financier.

Proposition n° 34 : Aller vers une généralisation de la délivrance de médicaments à l’unité :

– en levant les freins d’ordre logistique et informatique rencontrés par les pharmaciens ;

– en adaptant les conditionnements des médicaments ;

– en développant des actions de communication et de sensibilisation sur les conséquences positives de la dispensation à l’unité sur les plans environnemental, sanitaire et financier.

Deux articles de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 viennent prolonger et renforcer les dispositions de l’article 40 de la loi Agec :

– son article 53 a ouvert le dispositif de vente à l’unité aux dispositifs médicaux ;

– son article 72 prévoit la possibilité pour le ministre chargé de la santé de rendre obligatoire la vente à l’unité de certains médicaments en cas de rupture d’approvisionnement.

Ce dispositif étant déjà connu des pharmaciens, sa généralisation pour les antibiotiques en cas de pénurie permettra de garantir l’accès aux médicaments à un nombre accru de patients, tout en limitant le gaspillage, évitant ainsi le retour en officine de médicaments qui seront incinérés. La DGS a toutefois indiqué ne pas être en mesure de fournir des éléments chiffrés sur la quantité de médicaments susceptibles d’être concernés par cette obligation, dans la mesure où un arrêté limitera la durée de cette obligation à celle de la durée de la pénurie constatée.

  1.   Le don de produits non alimentaires invendus se développe

a.   Des dons en augmentation depuis la loi Agec

L’article 35 de la loi Agec crée un nouvel article L. 541-15-8 du code de l’environnement prévoyant que « les producteurs, importateurs et distributeurs de produits non alimentaires neufs destinés à la vente sont tenus de réemployer, notamment par le don des produits de première nécessité à des associations de lutte contre la précarité et des structures de l’économie sociale et solidaire […], de réutiliser ou de recycler leurs invendus, dans le respect de la hiérarchie des modes de traitement des déchets mentionnée à l’article L. 541-1 du [même] code ». Il prévoit en outre que « les produits d’hygiène et de puériculture, dont la liste est fixée par décret, demeurés invendus doivent nécessairement être réemployés ».

D’après les informations recueillies auprès de la DGPR, les principales associations récupérant et redistribuant les dons non alimentaires des entreprises témoignent d’un accroissement général de la quantité des dons de ces invendus.

Au cours de la première année de déploiement du dispositif en 2022, l’association Dons solidaires et l’Agence du don en nature ont cumulé un volume de dons équivalent à 23 000 palettes, ce qui correspond respectivement à un doublement et à une augmentation de 20 % des volumes de dons par rapport aux années précédentes. Deux raisons sont avancées par les associations pour expliquer cette augmentation : les mesures de la loi Agec d’une part et le déstockage de produits à la sortie de l’épidémie de covid-19 d’autre part.

Les associations témoignent d’un accroissement général du nombre d’entreprises effectuant des dons, en particulier de produits d’hygiène (concernés par l’obligation de don depuis le début de l’année 2022), de produits d’aménagement de la maison et de produits de bien-être. Pour les autres catégories de produits, le nombre de donateurs serait en stagnation (produits d’entretien, jouets) voire en baisse (vêtements, fournitures scolaires et produits de puériculture, ces derniers étant pourtant concernés par l’obligation du don).

Au cours de la deuxième année de déploiement du dispositif en 2023, les associations impliquées rapportent que le volume total de dons a continué à progresser et à se diversifier, mais que la quantité a baissé pour certains types d’invendus (produits d’hygiène et de puériculture, vêtements de bonne qualité). Cette évolution s’expliquerait par une meilleure gestion des stocks de produits par les fabricants via l’adaptation des volumes fabriqués et la généralisation de la pratique de déstockage faisant appel à des entreprises spécialisées dans ce nouveau commerce (comme Comerso ou Phénix). Les associations enregistrent une légère augmentation du nombre d’entreprises donatrices par rapport à 2022, en particulier pour les vêtements importés, les produits d’aménagement de la maison et les produits de bien-être.

Enfin, en ce qui concerne les invendus dont la gestion a été confiée aux éco‑organismes, les informations recueillies par la DGPR sont trop parcellaires pour pouvoir être exploitées.

Malgré des données parcellaires, les rapporteurs saluent l’augmentation des dons de produits non alimentaires ces dernières années, qui s’explique en partie par les dispositions de l’article 35 de la loi Agec.

Toutefois, le rapporteur Stéphane Delautrette considère que les dispositions législatives actuelles sont insuffisantes pour mettre véritablement fin au gaspillage des produits invendus. En effet, seuls les produits d’hygiène et de puériculture « doivent nécessairement être réemployés » selon les termes de l’article 35. Pour tous les autres produits non alimentaires invendus, cet article se cantonne en réalité à une incitation au don, sans interdire véritablement leur destruction. En indiquant que la gestion de ces produits doit respecter la hiérarchie des modes de traitement des déchets, qui privilégie la préparation en vue de la réutilisation sur le recyclage, la loi encourage à ne plus avoir recours à l’enfouissement et à l’incinération, sans toutefois exclure le recyclage de ces produits. Contrairement à ce qui est parfois annoncé, l’article 35 de la loi Agec n’interdit donc pas aux producteurs, aux importateurs et aux distributeurs de gérer leurs invendus comme des déchets ; il les incite seulement à privilégier des modes de traitement plus vertueux.

Afin d’enrayer véritablement la destruction des produits non alimentaires invendus, le rapporteur Stéphane Delautrette souhaite généraliser l’obligation de réemploi, notamment par le don, ou de réutilisation des produits non alimentaires neufs destinés à la vente, cette obligation étant aujourd’hui limitée aux seuls produits d’hygiène et de puériculture. Des sanctions financières devront en outre être prévues pour les entreprises qui ne respecteraient pas cette obligation.

Proposition n° 35 du rapporteur Stéphane Delautrette : Étendre l’obligation de réemploi, notamment par le don, ou de réutilisation des produits non alimentaires invendus, au-delà des seuls produits d’hygiène et de puériculture ; prévoir des sanctions financières à l’encontre des entreprises qui ne respecteraient pas cette obligation.

Par ailleurs, afin de ne pas privilégier la destruction par rapport au don de produits invendus, l’article 36 de la loi Agec, codifié à l’article 273 septies D du code général des impôts, a supprimé l’obligation de régulariser la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) en cas de don d’invendus alimentaires et non alimentaires neufs aux associations reconnues d’utilité publique présentant un intérêt général de caractère humanitaire, éducatif, social ou charitable. Avant l’entrée en vigueur de cette disposition, une entreprise donnant un bien devait payer la TVA, ce qui n’est pas le cas lorsqu’elle le détruit. Cette disposition fiscale constitue donc une avancée importante en faveur du don.

Enfin, les rapporteurs souhaitent qu’un suivi de l’évolution des quantités de produits non alimentaires invendus soit mis en place afin de mieux orienter ces produits vers le don. À cet effet, les entreprises pourraient déclarer à l’administration, le cas échéant via leur éco-organisme, les quantités de produits invendus chaque année.

Proposition n° 36 : Prévoir une déclaration annuelle obligatoire, par les entreprises, des quantités de produits non alimentaires invendus.

b.   Le don de matériels médicaux est mieux encadré

L’article 39 de la loi Agec crée un nouvel article L. 541-15-13 du code de l’environnement afin de permettre aux distributeurs et aux établissements de santé de conclure une convention pour le don de matériels médicaux à des associations et structures de l’économie sociale et solidaire, afin qu’elles reconditionnent ce matériel en vue de sa réutilisation ou son réemploi.

Le décret d’application de cet article ([65]) définit précisément les acteurs (établissements de santé, établissements ou services médico-sociaux destinés aux personnes âgées, prestataires de services ou distributeurs de matériels, officines de pharmacie) et les produits concernés (matériels médicaux relevant de la catégorie des aides techniques répondant à la définition de dispositifs médicaux). Il détaille également les modalités du don en précisant les dispositions de la convention établie entre le cédant et le bénéficiaire : attestation relative à la conformité et aux obligations de maintenance du matériel cédé, conditions de refus du don, engagement de signalement des incidents de matériovigilance à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Ce décret permettra également d’assurer le suivi des dons et la traçabilité du produit du cédant au bénéficiaire, via l’identifiant unique des dispositifs prévu par le règlement européen relatif aux dispositifs médicaux du 5 avril 2017, ou à défaut le numéro de série du matériel médical.

Si de tels dons de matériels médicaux à des structures de l’économie sociale et solidaire étaient déjà mis en place, le décret du 8 mars 2024 permet de les encadrer. La DGS a indiqué ne pas disposer pas de données quantitatives sur ces dons. Cependant, dans le cadre des travaux relatifs à la remise en bon état d’usage, pilotés par la direction de la sécurité sociale, il est prévu de mettre en place une plateforme nationale afin d’assurer la traçabilité des dispositifs concernés. Ainsi, la DGS a l’intention d’intégrer à cette plateforme une option permettant de déterminer si le dispositif remis en bon état d’usage a fait l’objet d’un don.

 


   Deuxième Partie :
Mieux produire : limiter la production de déchets
et intégrer les impacts environnementaux de
la fin de vie d’un produit dès sa conception

La loi Agec vise à transformer les modes de production, d’une économie linéaire vers une économie circulaire. Pour cela, il est nécessaire de « mieux produire », c’est-à-dire de limiter au maximum la production de déchets, et de favoriser l’écoconception en vue du réemploi ou de la réutilisation des produits, et de leur recyclage. Les producteurs, sous l’égide des filières « à responsabilité élargie du producteur » (REP), doivent remplir ce rôle primordial de structuration des filières de l’économie circulaire. Cependant, les filières REP ne permettent pas encore d’opérer ce changement de modèle économique vers l’économie circulaire, encore trop focalisées sur l’aval du cycle de vie d’un produit, et notamment sur le tri, la collecte, et le recyclage des déchets. La prévention de la production de déchets, l’écoconception, et le réemploi ou la réutilisation restent ainsi les grands oubliés de la mise en œuvre de la loi Agec.

En 2020, en France, 309 millions de tonnes de déchets, incluant les déchets dangereux et non-dangereux, ont été produites ([66]). Le secteur du bâtiment et travaux publics (BTP) est le premier producteur de déchets, à hauteur de 213 millions de tonnes, suivi par les déchets ménagers avec 34 millions de tonnes. Selon la direction générale de la prévention des risques (DGPR), le bilan du plan national de prévention des déchets de la période 2014 à 2020 a démontré une réduction de la production de déchets en France en 2020 par rapport à 2010, notamment des déchets ménagers à hauteur de 10 %, ainsi que des déchets issus des activités économiques ou du secteur du BTP. Aucune donnée sur la production globale de déchets après 2020 n’a été publiée, ce qui rend difficile l’évaluation de l’impact de la loi Agec sur la trajectoire de production de déchets.

Dans un rapport ([67]) publié en mars 2024, l’Agence européenne pour l’environnement prévoit pour les prochaines années une trajectoire de réduction de la production de déchets au niveau européen, malgré une augmentation prévue de la consommation. Au sein de l’Union européenne, la production de déchets a diminué de 4,2 % entre 2010 et 2020. Cette trajectoire de réduction se poursuit mais reste cependant peu ambitieuse. En effet, l’atteinte de l’objectif de « réduction significative de la production totale de déchets » en 2030, prévu par le plan d’action « zéro pollution » de la Commission européenne, est considérée comme « peu probable ».

En France, la tendance depuis 2020 ne semble pas démontrer de poursuite de la trajectoire de réduction de la production de déchets, malgré la mise en place d’objectifs en ce sens dans la loi Agec. L’article 3, notamment, donne la priorité à la prévention et à la réduction de la production de déchets, en instaurant des objectifs de réduction de 15 % des quantités de déchets ménagers et assimilés produits par habitant et de 5 % des quantités de déchets d’activités économiques par unité de valeur produite en 2030 par rapport à 2010. Pour les déchets ménagers et assimilés, l’objectif est ainsi d’atteindre 502 kilogrammes par habitant en 2030 ([68]). L’association Amorce souligne une hausse depuis la loi Agec de la production des déchets ménagers et assimilés. Ces déchets représentent en 2021 environ 611 kilogrammes par habitant, soit une augmentation de 5 % par rapport à 2019. La production de déchets continue ainsi d’augmenter, liée principalement à une hausse de la consommation. Pour « mieux produire », il reste indéniablement nécessaire de « moins consommer ».

La prévention de la production de déchets peut être atteinte par une diminution des mises sur le marché, et par le respect la politique de prévention des déchets définie à l’article L. 541-1 du code de l’environnement. Lorsque le déchet ne peut pas être réemployé, cette politique repose sur « une hiérarchie des modes de traitement des déchets consistant à privilégier, dans l’ordre :

a) La préparation en vue de la réutilisation ;

b) Le recyclage ;

c) Toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique ;

d) L’élimination ».

Les filières REP ont la responsabilité de limiter la production des déchets, de favoriser le réemploi et la réutilisation, ainsi que l’écoconception des produits, en vue d’augmenter leur valorisation. La loi Agec a ainsi permis d’accélérer une prise de conscience chez les producteurs des enjeux de l’économie circulaire. En effet, des changements de pratiques profonds et des mutations industrielles et commerciales apparaissent progressivement, au travers par exemple de l’évolution des modèles d’affaires des entreprises qui intègrent la circularité par l’utilisation de pièces détachées ou d’occasion, ou la création de postes dans ces entreprises et de formations dédiées à l’économie circulaire.

I.   Le déploiement des filières REP, axe majeur de la loi Agec, est engagé

Le principe de la « responsabilité élargie du producteur » (REP) est apparu pour la première fois dans la loi française en 1975. Le producteur, personne physique ou morale qui met sur le marché des produits générateurs de déchets, doit prévenir et gérer les déchets issus de la fin de vie de ses produits. Cela implique donc que chaque producteur est responsable de l’ensemble du cycle de vie des produits qu’il met sur le marché, selon le principe pollueur-payeur. Le producteur peut choisir de s’occuper lui-même de ses déchets au travers d’un système individuel ou transférer cette tâche à un éco-organisme, auquel il versera un financement, l’éco-contribution. L’éco-organisme ou le système individuel doivent respecter un cahier des charges imposé par l’État et sont agréés à cet effet. Ils organisent alors la gestion des déchets issus des produits en fin de vie. Diverses tâches leur incombent : prévention de la création de déchets, collecte, transport, tri et valorisation des déchets, tout en favorisant le réemploi et la réutilisation ainsi que la réparation des produits.

Avant la publication de la loi Agec, douze filières REP obligatoires étaient en place. La loi Agec prévoit dans son article 62 une poursuite du développement des filières REP, par la création de nouvelles filières REP, ainsi que par l’extension du périmètre de certaines filières. Par ailleurs, de nouvelles obligations ont été introduites, comme l’adoption d’une démarche d’écoconception, notamment par la rédaction d’un plan d’écoconception et le renforcement des éco-modulations des éco-contributions, la reprise gratuite de certains produits par les distributeurs, et un soutien au réemploi et à l’utilisation, et à la réparation au travers de fonds dédiés pour certaines filières. Les places de marché, ou plateformes de vente à distance de produits soumis à REP sont également tenues d’acquitter les obligations qui découlent de ce principe, sauf si elles sont en mesure d’apporter la preuve que les producteurs se sont d’ores et déjà acquittés de ces dernières. Enfin, un numéro d’identification unique est mis en place pour les producteurs soumis aux filières REP, afin de faciliter le suivi et le contrôle du respect des obligations des metteurs sur le marché.

Le principe de « responsabilité élargie du producteur » existe également au niveau européen, la mise en place des filières REP étant encadrée par les articles 8 et 8 bis de la directive-cadre « déchets » ([69]). Actuellement, seules cinq filières REP sont explicitement définies au travers des directives européennes. La France constitue donc l’un des pays les plus importants en termes de nombre de filières REP mises en place parmi les États membres de l’Union européenne. Elle apporte de ce fait son expérience et inspire la réglementation européenne. Une proposition de révision de la directive-cadre « déchets » a été publiée le 5 juillet 2023, dans laquelle il est envisagé d’établir une filière REP pour les textiles et chaussures. Cette filière, déjà mise en place en France depuis 2007 deviendrait donc obligatoire à l’échelle européenne. D’autres filières européennes sont en cours de mise en place, déjà prévues dans la loi Agec, comme les textiles sanitaires et les produits du tabac.

A.   La mise en place complexe des nombreuses filières REP

La loi Agec est à l’origine de la création de nouvelles filières REP, et mène à un doublement du nombre de ces filières. Ainsi, six filières REP devaient être mises en place en 2021 ou 2022 et six doivent voir le jour entre 2023 et 2025. La majorité de ces filières ont l’objectif de collecter les produits en fin de vie en vue de leur réemploi ou réutilisation, ou recyclage. Cependant, un nouveau type de filière REP apparaît, une filière de « nettoyage », notamment pour la filière REP des produits du tabac. La filière REP de nettoyage participe à la collecte des déchets, en contribuant par exemple aux coûts de nettoiement auprès des collectivités, ainsi qu’à la réduction de l’abandon illégal des déchets.

1.   Une mise en place retardée de la filière REP « bâtiment »

Le secteur du BTP a produit 213 millions de tonnes de déchets en 2020, dont 81 % issus des travaux publics et 19 % du bâtiment ([70]). Les déchets du BTP représentent ainsi 69 % de l’ensemble des déchets français. La réduction et la valorisation de ces déchets revêtent donc une importance majeure.

Dans son article 62, la loi Agec introduit les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB), destinés aux ménages ou aux professionnels, parmi ceux relevant d’une responsabilité élargie du producteur à compter du 1er janvier 2022. Cette nouvelle filière REP, outre les objectifs de réemploi, réutilisation ou recyclage des matériaux, vise à réduire les dépôts sauvages, notamment par la reprise des déchets sans frais et à améliorer la traçabilité des déchets. Les modalités d’application ont été définies par un décret en Conseil d’État ([71]) en décembre 2021, puis par la publication du cahier des charges ([72]) en juin 2022. Suite à l’obtention des agréments par les éco-organismes en septembre et octobre 2022, la mise en place effective de la filière REP bâtiment a eu lieu le 1er mai 2023, avec un peu plus d’un an de retard. Ce retard s’explique par un retard de publication des textes réglementaires ainsi que des échéances ambitieuses proposées par la loi Agec face à un sujet complexe, nécessitant une compréhension des particularités du secteur et une formation de l’ensemble des acteurs.

Quatre éco-organismes ont été agréés ([73])  pour des catégories de produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment, mentionnées au 1° et au 2° du II de l’article R. 543-289 du code de l’environnement :

– Ecominero (PMCB de catégorie 1 : produits inertes « minéraux ») ;

– Ecomaison (PMCB de catégorie 2 : produits non-inertes) ;

– Valdelia (PMCB de catégorie 2) ;

– Valobat (PMCB de catégories 1 et 2).

Les quatre éco-organismes s’appuient sur un organisme coordonnateur « OCA Bâtiment » (Ocab) dont l’agrément a été délivré en février 2023.

a.   Un volume de déchets particulièrement important à collecter et un faible taux de collecte observé

Le potentiel de gisement de déchets de cette filière REP a été étudié dans l’étude de préfiguration de mars 2021 par l’Agence de la transition écologique (Ademe). Il concernerait environ 40 millions de tonnes, dont 30 millions de tonnes de déchets inertes, 9,7 millions de tonnes de déchets non dangereux non inertes, et de 0,9 à 1,7 million de tonnes de déchets dangereux. À titre de comparaison, la filière REP des emballages ménagers, présentant jusqu’ici la plus grosse quantité de déchets collectés atteignait 3,6 millions de tonnes en 2021 ([74]). La filière REP PMCB est donc confrontée à un important volume de déchets à collecter et à valoriser. D’après l’éco-organisme Ecominero, et la Fédération française du bâtiment, les données de référence de cette étude de préfiguration sont peu fiables, et anciennes. Elles ne sont pas représentatives de la réalité pour certains flux, notamment car le marché du secteur du bâtiment s’oriente à la baisse dans les prochaines années. Le cahier des charges fixe à ce titre aux éco-organismes l’obligation de mener une étude relative à l’évaluation des quantités de déchets, y compris dangereux, d’ici octobre 2025. Cette étude devait être engagée par l’Ocab dès janvier 2024 pour des résultats d’ici juin 2024. Les rapporteurs soulignent la nécessité d’obtenir des données fiables, et actualisées fréquemment, notamment pour les volumes de mise sur le marché et de collecte des déchets.

Cette évaluation des quantités des déchets est d’autant plus importante que la conformité aux objectifs du cahier des charges se calcule par rapport au gisement de l’étude de préfiguration. Les objectifs du cahier des charges sont ambitieux et réalistes selon des éco-organismes, mais difficilement atteignables selon des organisations professionnelles, notamment pour les produits et matériaux de catégorie 2. Les objectifs de collecte à atteindre en 2024 sont de 82 % du gisement pour la catégorie 1, soit environ 25 millions de tonnes et de 53 % du gisement pour la catégorie 2 soit environ 5 millions de tonnes. En 2023, un peu plus de 2 millions de tonnes aurait été collecté pour la catégorie 1 et moins de 20 000 tonnes pour la catégorie 2, d’après les données partielles reçues en décembre 2023 suite aux auditions ([75]). Un article d’Actu environnement d’avril 2024 ([76]) indique que la collecte des déchets de la filière REP bâtiment aurait atteint 3,2 millions de tonnes de déchets du bâtiment en 2023. L’éco-organisme Ecominero, agréé sur la catégorie 1, aurait collecté la part la plus importante avec 2,4 millions de tonnes de déchets inertes, en cohérence avec la forte représentation de ces déchets dans l’étude de préfiguration. Valobat aurait collecté 800 000 tonnes de déchets, principalement de catégorie 2, et Valdelia et Ecomaison, également agréés sur la catégorie 2 auraient respectivement collecté 5 011 tonnes et 2 118 tonnes de déchets. Ce taux de collecte est très faible par rapport aux objectifs indiqués dans le cahier des charges, mais correspond à une première année de mise en place de la filière. Ces volumes devront ainsi augmenter considérablement pour répondre aux objectifs fixés. Afin d’améliorer ce taux de collecte, des mesures sont mises en œuvre par les éco-organismes, notamment la poursuite des contractualisations pour développer le maillage territorial et la collecte des petits flux, ainsi qu’une plus large communication.

b.   Un maillage des points de reprise qui se déploie rapidement, mais avec des disparités

Le cahier des charges de la filière REP bâtiment, ainsi que l’article R. 543‑290-5 du code de l’environnement, précisent les conditions minimales du maillage des points de reprise des produits et matériaux du bâtiment. Un maillage doit être mis en place tous les 10 kilomètres en zone dense ou 20 kilomètres en cas de zone peu dense ou à faible taux d’emploi lié au secteur de la construction, d’ici le 31 décembre 2026. L’arrêté de février 2023 modifiant le cahier des charges ([77]) impose un nombre minimal de points de reprise, et vise la mise en place de 2 419 points de reprise d’ici fin 2023. Des données transmises ([78]) comptabilisent en décembre 2023 plus de 2 450 points de reprise, comprenant 1 045 plateformes inertes, 1 102 distributeurs de matériaux de construction, et 340 déchèteries professionnelles. Parallèlement, les éco-organismes contractualisent avec les déchèteries publiques pour la collecte des petits flux issus des travaux des particuliers et de certains artisans.

Le maillage territorial se déploie ainsi avec un rythme et nombre adéquats, mais des disparités géographiques et de type de déchets repris subsistent. Les zones rurales restent desservies de manière inégale sur le territoire, les points de collecte étant principalement présents en zones urbaines, chez les principaux fournisseurs de matériaux. D’après l’éco-organisme Valobat, l’Ocab propose d’appliquer des indicateurs distincts dans la définition du maillage pour le territoire métropolitain, les territoires ultramarins (à l’exception de la Guyane), et pour le territoire guyanais afin de refléter les réalités particulières de ces territoires. Selon le syndicat des entreprises de déconstruction, dépollution et recyclage (Seddre), une priorisation a été effectuée dans la mise en place du maillage sur le nombre de points de reprise, sans tenir compte des différents volumes à collecter. Ainsi, « les points de reprise acceptant les grands chantiers ne représentent que 20 % de ces points de reprise, alors que ces chantiers constituent 80 % des volumes » de déchets du bâtiment. La cartographie des volumes à collecter n’est donc pas cohérente avec la cartographie des points de collecte. Les déchets inertes sont ainsi mieux desservis que les autres déchets (bois, plâtre, verre, plastique…) notamment car certains points de reprise n’accueillent que ce type de flux. Selon la confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), les entreprises du bâtiment détentrices de déchets non inertes n’ont « aujourd’hui pas de point de collecte identifié à proximité de leur chantier ou de leur entrepôt ». La Capeb précise en complément que les distributeurs de matériaux inclus dans le maillage ne reprennent que cinq flux triés. Les entreprises du bâtiment peuvent donc disposer de plusieurs types de déchets qui ne sont pas pris en charge par certains points de reprise (briques plâtrières, isolants, emballages). Elles sont donc amenées à déposer leurs déchets d’activité dans plusieurs points de collecte, en fonction des types de déchets concernés. Lorsque cela est possible, elles privilégient un unique point de collecte acceptant l’ensemble des déchets, même si ce dernier est payant (déchèteries professionnelles ou publiques par exemple).

Le déploiement du maillage des points de collecte s’est effectué rapidement, conformément au cahier des charges de la filière REP bâtiment. Cependant, dans la définition du maillage, la priorité a été accordée au nombre de points de collecte, au détriment d’une réflexion sur les besoins territorialisés en termes de reprise des déchets, et sur la simplification du choix des points de collecte pour le détenteur de déchets. Ainsi, il apparaît indispensable d’ajouter des points de collecte ou d’adapter les points de collecte déjà existants, en ciblant leur localisation sur de nouveaux critères. Ces critères portent :

– sur la répartition géographique, pour assurer un accès aux points de collecte équitable sur l’ensemble du territoire, y compris dans les zones rurales, ou dans les territoires ultramarins ;

– sur le volume de déchets, pour ajouter des points de reprise acceptant les « grands chantiers », à l’origine de volumes importants de déchets ;

– sur le type de déchets repris, pour garantir la présence de points de reprise des déchets non inertes à proximité de tout détenteur de ce type de déchets.

Enfin, afin de simplifier la collecte auprès des artisans et des entreprises du bâtiment, la reprise des déchets doit être repensée pour faciliter le dépôt des déchets dans un unique point de collecte.

Proposition n° 37 : Dans le cahier des charges de la filière REP bâtiment, repenser le maillage des points de reprise des déchets :

– en assurant une répartition géographique équitable des points de reprise, notamment dans les zones rurales ou dans les territoires ultramarins ;

– en densifiant les points de reprise qui acceptent les « grands chantiers », présentant des volumes importants de déchets ;

– en densifiant les points de reprise qui acceptent les déchets non inertes ;

– en facilitant le dépôt de matériaux ou de déchets dans un même point de collecte.

c.   Une reprise sans frais des déchets encore en expérimentation

Afin de lutter contre les dépôts sauvages, il est prévu la mise en place d’une reprise sans frais des déchets, qui peut être effectuée sur chantier, via la reprise des déchets issus de la collecte conjointe ou dans le cadre du service public de gestion des déchets. Le cahier des charges de la filière REP bâtiment prévoit une entrée en vigueur échelonnée de l’obligation de reprise sans frais des déchets, avec la possibilité de différer la prise en charge au 1er janvier 2024.

Une étude de l’Ademe relative au seuil de reprise sans frais des déchets collectés sur chantier, initialement prévue avant le 31 décembre 2023, est repoussée au 31 décembre 2024 d’après un arrêté modificatif du cahier des charges ([79]) de février 2024. En conséquence, la reprise sans frais des déchets de chantier par les éco-organismes est reportée d'un an supplémentaire, à compter du 1er janvier 2025. Une étude a été menée en 2023, mais qui n’a selon les éco-organismes pas permis de conclure sur la pertinence du seuil de 50 mètres cubes (m3), seuil actuellement prévu par la réglementation. Elle sera donc complétée par une expérimentation réalisée en 2024 sur au moins 2 000 chantiers représentatifs des caractéristiques des chantiers du bâtiment au niveau national en termes de nature de chantier, de quantité de déchets produits, de répartition géographique, et en priorisant les chantiers dont la maîtrise d’ouvrage est une collectivité territoriale. D’après la Capeb, le seuil de 20 m3 est également considéré au travers de cette expérimentation. La Capeb appelle à la vigilance sur d’éventuels critères d’éligibilité mis en place par les éco-organismes pour bénéficier de la prise en charge de la reprise gratuite tels qu’un volume minimal de déchets, ou un nombre de rotations minimum. Ces critères peuvent priver les entreprises artisanales de la reprise sans frais, qui concernerait dès lors davantage les grandes entreprises.

La mise en place de la reprise gratuite pour les artisans et entreprises du bâtiment participe à la lutte contre les dépôts sauvages. Cependant, les rapporteurs soulignent que la reprise gratuite ne peut empêcher à elle seule les comportements délictueux. Seuls les déchets triés et faisant l’objet d’une traçabilité sont éligibles à la reprise sans frais, ce qui exclut du dispositif les entreprises effectuant du travail illégal, ou les particuliers. Les éco-organismes du secteur du bâtiment travaillent à l’établissement d’un vademecum à l’attention des collectivités locales pour les accompagner dans la lutte contre les dépôts sauvages.

d.   Le rôle de l’organisme coordonnateur peut être élargi pour simplifier les démarches des différents acteurs

L’organisme coordonnateur « OCA Bâtiment » (Ocab) a pour objectif d’assurer la coordination des travaux entre les éco-organismes, de répartir leurs obligations, et de proposer un service de guichet unique.

Afin de faciliter les démarches pour les collectivités territoriales, un guichet unique de contractualisation a été mis en place. L’Ocab, conformément au cahier des charges, a proposé un contrat-type à destination de ces collectivités. Il centralise les demandes de convention provenant des collectivités en s’appuyant sur la plateforme administrative « Territeo », commune à plusieurs filières REP. Au lieu d’échanger des informations avec chaque éco-organisme, elle permet aux collectivités territoriales de renseigner une seule fois leurs données administratives nécessaires à la contractualisation avec les éco-organismes, et de transmettre directement une demande de convention aux éco-organismes par cette interface.

L’Ocab vise également l’harmonisation des pratiques de tri, par la publication d’un guide sur les consignes de tri. L’article 74 de la loi Agec impose pour les déchets de construction et de démolition la mise en place d’un tri « 7 flux », permettant une collecte séparée du papier, du bois, des fractions minérales, du métal, du verre, du plastique et du plâtre. L’article D. 543-281 du code de l’environnement précise les conditions dans lesquelles ces déchets peuvent être collectés. La collecte conjointe dans une même benne est possible pour certains flux notamment pour le bois, les métaux et les plastiques, par exception et en cas d’un manque de place. L’Ocab a publié en novembre 2023 un guide pratique relatif aux consignes de tri pour la filière REP bâtiment. Selon la fédération française du bâtiment (FFB), ces consignes restent encore peu connues des artisans. Elles font par ailleurs l’objet de questionnements techniques et spécifiques (exclusion de certains matériaux, articulation avec les autres filières REP…) et apparaissent dès lors comme complexes. La communication de ces consignes de tri aux artisans doit ainsi être renforcée. Les questionnements techniques doivent quant à eux faire l’objet d’un accompagnement plus particulier des éco-organismes, et doivent être remontés à l’Ocab pour prise en compte en vue d’une révision du guide pratique, ou d’une mise en place d’une foire aux questions, ou de tout autre outil permettant de simplifier la mise en œuvre de ces consignes de tri. Les rapporteurs appellent à étendre les actions de communication sur ces consignes de tri, déjà engagées par l’organisme coordonnateur et les éco-organismes, au travers des fédérations professionnelles et des chambres compétentes afin d’améliorer leur connaissance par les acteurs du bâtiment.

Proposition n° 38 : En complément des campagnes de communication menées par l’organisme coordonnateur et les éco-organismes, mobiliser les fédérations professionnelles et les chambres compétentes pour promouvoir les consignes de tri relatives à la filière REP bâtiment.

L’Ocab a publié une cartographie du réseau des points de collecte en France. Ce guichet unique permet d’accéder à l’ensemble des points de collecte ayant contractualisé avec un éco-organisme de la filière REP bâtiment. À destination des particuliers et des professionnels, cette cartographie interactive permet de géolocaliser et d’identifier les points de collecte les plus proches, et les déchets qui y sont repris selon diverses catégories (bois, métal, inertes, plastique, déchets dangereux, plâtre, béton, laine de verre...).

L’association des recycleurs indépendants (ARI) a indiqué aux rapporteurs que les recycleurs indépendants ne sont pas toujours identifiés par les éco-organismes, alors qu’ils participent à la collecte et à la valorisation des déchets du bâtiment, avant et depuis la mise en place de la filière REP. En effet, Selon l’ARI, lors de l’adoption de la loi Agec « le législateur et ensuite les éco-organismes n’ont pas pris suffisamment en compte les circuits de recyclage existants ». Le déploiement de la filière REP bâtiment s’est appuyé principalement sur les grands acteurs nationaux, au détriment d’acteurs locaux déjà implantés. À ce titre, les recycleurs indépendants ne figurent pas dans les cartes territoriales de collecte. Les rapporteurs souhaitent donc étendre la visibilité des recycleurs, et notamment des recycleurs indépendants sur les cartes de points de collecte de l’Ocab, Cette visibilité peut également participer au développement du maillage des points de collecte. Le cahier des charges de la filière REP bâtiment doit ainsi être modifié pour imposer à l’Ocab d’assurer cette visibilité. Plus généralement, les rapporteurs appellent lors de la mise en place des filières REP, et notamment de celle du bâtiment, à assurer sur le long terme l’inclusion de l’ensemble des acteurs, préexistants et nouveaux, participant au fonctionnement de ces filières.

Proposition n° 39 : Imposer à l’organisme coordonnateur de la filière REP bâtiment, au travers du cahier des charges de la filière REP bâtiment, d’assurer la visibilité des recycleurs sur les cartes qu’il publie, y compris des recycleurs indépendants et ceux n’ayant pas de contrats avec un éco-organisme.

Le cahier des charges de la filière REP bâtiment prévoit que les éco-organismes mettent en place un dispositif de traçabilité des déchets dont ils assurent ou soutiennent la collecte. Il donne la possibilité à ces éco-organismes, avec l’appui de l’Ocab, de proposer un outil conjoint de traçabilité des déchets. Selon la Capeb, les démarches à effectuer afin d’assurer la traçabilité sont actuellement très chronophages et complexes, avec par exemple l’identification de l’ensemble des maîtres d’ouvrage concernés lors d’apport groupé de déchets en provenance de plusieurs chantiers. De plus, chaque éco-organisme propose des applications, procédures ou modalités différentes. Un projet d’arrêté modifiant le cahier des charges, en consultation en avril et mai 2024 ([80]) propose de transformer la possibilité de mise en place de l’outil conjoint de traçabilité des éco-organismes en une obligation. Les rapporteurs soutiennent l’inscription, dans le cahier des charges, de la mise en place obligatoire par l’Ocab d’un outil unique de traçabilité des déchets, en vue de simplifier les démarches des détenteurs de déchets.

Proposition n° 40 : Renforcer le rôle de guichet unique de l’organisme coordonnateur de la filière REP bâtiment, en lui imposant dans le cahier des charges la mise en place d’une plateforme unique de traçabilité des déchets, commune aux quatre éco-organismes, en vue d’améliorer la traçabilité et de simplifier les procédures pour les détenteurs de déchets.

Les éco-organismes sont en charge de définir les barèmes des éco-contributions, qui sont versées par les producteurs aux éco-organismes. Lors de l’audition des éco-organismes et des organisations professionnelles de la filière REP bâtiment en décembre 2023, certains barèmes des éco-contributions applicables à partir de mai 2024 n’avaient pas encore été publiés. Seul un éco-organisme aurait publié son barème au moins six mois à l’avance, tandis que les autres l’auraient publié en janvier ou février 2024. Pour la FFB et la Capeb, il est indispensable pour les artisans et entreprises du bâtiment de disposer des barèmes plusieurs mois en amont de leur entrée en vigueur. En effet, ces délais de mise en place doivent permettre aux entreprises d’intégrer les barèmes dans les devis, les travaux étant généralement réalisés plusieurs mois après la rédaction de ces devis. Selon la FFB, les chantiers peuvent être effectués six mois, neuf mois voire plus d’un an après. Les rapporteurs proposent ainsi de fixer un délai minimal de six mois pour répondre à cette problématique.

Proposition n° 41 : Fixer, dans le cahier des charges de la filière REP bâtiment, un délai minimal de six mois entre la publication des barèmes des éco-contributions par les éco-organismes et leur mise en application effective.

2.   Les filières REP dédiées au réemploi, à la réutilisation ou au recyclage montent en puissance progressivement

a.   Les filières des articles de sport et de loisirs, des articles de bricolage et de jardin, et des jouets, créées concomitamment visent le réemploi et la réutilisation

La loi Agec a introduit trois nouvelles filières REP de « réemploi ou de réutilisation » dont la mise en place devait être effectuée au 1er janvier 2022 : la filière REP des articles de sport et de loisirs (ASL), des articles de bricolage et de jardin (ABJ), et des jouets. La rédaction des textes réglementaires et leur mise en œuvre a eu lieu concomitamment. Le décret ([81]) commun a été publié en septembre 2021 et les cahiers des charges ([82]) ([83]) ([84]) en octobre 2021. Ces trois filières REP sont concernées par les fonds de réparation et de réemploi et réutilisation.

La filière REP des articles de sport et de loisirs concerne deux types de produits : les cycles et engins de déplacement non motorisés (trottinettes…), ainsi que les produits destinés à la pratique sportive (sports nautiques, de montagne, de raquettes, appareils de musculation…) ou de plein air (camping, escalade…). L’éco‑organisme Ecologic est l’unique éco-organisme de cette filière, agréé ([85]) depuis janvier 2022. La filière a été mise en place avec un léger retard, lié au retard de publication des textes réglementaires. La filière n’a été effective qu’à partir du second semestre 2022, temps nécessaire pour massifier les points de collecte et sélectionner les opérateurs de gestion des déchets.

L’étude de préfiguration de la filière REP ASL par l’Ademe fait état d’environ d’un gisement de 186 500 tonnes. Selon l’éco-organisme, cette étude a été réalisée dans des délais contraints, et n’a pas fait l’objet de vérifications « terrains ». Ainsi, ce gisement serait surévalué, ce qui rend plus difficile l’atteinte des objectifs. Les rapporteurs soulignent l’importance de l’accès de l’ensemble des parties à des données fiables, et mises à jour fréquemment afin de proposer des objectifs dans les cahiers des charges ambitieux et partagés. Ecologic évalue à 138 000 tonnes la quantité de produits mis sur le marché. En 2022, 630 tonnes ont été collectées, 6 710 tonnes en 2023 et des prévisions portent ces quantités à environ 24 840 tonnes pour l’année 2024 ([86]). Le cahier des charges impose des objectifs de collecte en 2024 de 18 % (jusqu’à 25 % en 2027) pour les cycles et engins de déplacement non motorisés, et 20 % (jusqu’à 35 % en 2027) pour les produits destinés à la pratique sportive ou de plein air, par rapport aux produits mis sur le marché l’année précédente.

Afin d’atteindre ces objectifs, divers points de collecte ont été mis en place, avec notamment plus de 920 magasins, 1 514 déchèteries, 150 lieux de pratique sportive ou d’associations, considérés comme de très bon relais d’information auprès des pratiquants. L’éco-organisme table de plus sur la communication prévue dans le cadre des Jeux Olympiques 2024 pour développer davantage le réseau de collecte. Pour les cycles et engins de déplacement, les objectifs de réemploi et réutilisation sont de 9 % en 2024 (14 % en 2027), et les objectifs de recyclage sont de 59 % en 2024 (62 % en 2027). Pour les produits destinés à la pratique sportive et de plein air, l’objectif de réemploi ou réutilisation est de 4 % en 2024 (5 % en 2027) et l’objectif de recyclage est de 35 % en 2024 (50 % en 2027). Parmi les articles de sport et loisirs collectés en 2023, toutes catégories confondues, environ 55 % ont été orientés vers le réemploi et 3 % vers la réutilisation, 27 % des déchets ont été recyclés et 15 % éliminés ([87]). Des difficultés sont rencontrées concernant le recyclage des articles de sport et loisirs non métalliques, du fait d’une typologie de produits variée. L’éco-organisme précise que pour atteindre les taux de recyclage, des solutions adaptées à chaque typologie de produits doivent être développées, au travers d’investissements en matière de recherche et développement et d’appels à projet. L’écoconception joue également un rôle important pour améliorer la recyclabilité des produits et doit être renforcée.

La filière REP des articles de bricolage et de jardin a également été effective au second semestre 2022, suite à la publication des agréments des quatre éco-organismes pour des catégories de produits mentionnées au II de l'article R. 543-340 du code de l’environnement :

– EcoDDS agréé en février 2022 ([88]) (catégorie 1 – outillage du peintre) ;

– Ecologic agréé en février 2022 ([89]) (catégorie 2 – machines et appareils motorisés thermiques) ;

– Ecomaison agréé en avril 2022 ([90]) et Valobat agréé en décembre 2023 ([91]) (catégorie 3 – matériel de bricolage et catégorie 4 – produits et matériels destinés à l’entretien et aménagement du jardin).

En prévision de l’agrément accordé à Valobat en décembre 2023, le cahier des charges de la filière a été modifié ([92]) en novembre 2023 pour imposer la création d’un organisme coordonnateur durant l’année 2024, deux éco-organismes étant désormais agréés pour les mêmes catégories.

L’étude de préfiguration de l’Ademe indique une quantité totale de mises sur le marché de 144 800 tonnes. Selon Ecomaison, « l’étude de préfiguration a très largement sous-estimé la mise en marché » pour les produits de catégorie 3 et 4 et l’estime à 250 000 tonnes. Pour la première année de fonctionnement, Ecomaison indique avoir collecté entre 5 000 et 10 000 tonnes de produits de catégorie 3 et 4. Selon Ecologic, les mises sur le marché avoisinent les 45 000 tonnes pour les produits de catégorie 2. En 2022, 147 tonnes ont été collectées, 1 640 en 2023 et des prévisions sont proposées à 13 287 tonnes en 2024 pour les produits de catégorie 2 ([93]). Les objectifs de collecte dans le cahier des charges sont indiqués pour chaque catégorie, variant entre 13 % pour les catégories 3 et 4 en 2024, à 15 % pour les catégories 1 et 28 % pour les catégories 2. Les efforts de collecte doivent ainsi être poursuivis pour atteindre les objectifs.

La collecte s’effectue majoritairement dans des magasins et les déchèteries, pour lesquelles les signatures de contrat avec les collectivités se déploient progressivement. La distribution des articles de bricolage et de jardin est généralement composée de petites franchises, ce qui implique parfois pour l’éco‑organisme de contacter chacune des franchises pour y installer des points de collecte. Selon Ecomaison, les distributeurs n’ont pas toujours connaissance de la collecte sans frais, d’où la nécessité pour eux d’un accompagnement spécifique. Le consommateur reste par ailleurs également peu sensibilisé sur la collecte et a « tendance à ne rapporter ses produits que lorsque cela est associé à une reprise contre bon d’achat ». Les rapporteurs rappellent que les missions des éco-organismes sont précisément d’accompagner les distributeurs, notamment en les sensibilisant à la collecte sans frais, et en communiquant sur les dispositifs déjà mis en place.

Le réemploi est la priorité de traitement de la filière, les flux collectés sont d’abord tournés vers les acteurs du réemploi et en particulier les acteurs de l’économie sociale et solidaire selon les éco-organismes. Le cahier des charges propose un pourcentage minimal de réemploi ou réutilisation entre 2 et 5 % en 2024 selon les catégories de produits. Ecomaison indique que « étant fixés en fonction de la mise en marché, notamment sur le réemploi, on a des objectifs très déconnectés de la réalité ». Le recyclage des articles de bricolage et de jardin ne pose généralement pas de problème, ces produits contenant une partie métallique. Cependant, le cas des articles à moteurs thermiques est spécifique car il requiert en complément une dépollution des résidus d’hydrocarbures (huiles et essence). Des difficultés spécifiques ont été remontées aux rapporteurs. Au sein de la filière des articles de bricolage et de jardin, le périmètre des produits éligibles n’est pas facilement identifiable pour les producteurs, notamment s’agissant des catégories de bricolage ou de jardin pour lesquelles un même produit peut être utilisé. Par ailleurs, l’article R. 543-340 du code de l’environnement exclut du champ d’application de la filière REP les produits conçus pour être exclusivement utilisés par des professionnels. Cela entraîne des difficultés opérationnelles, ces produits étant récupérés dans le circuit de distribution. De ce fait, les produits achetés par des professionnels mais pouvant être détenus par des particuliers sont collectés, d’après l’éco-organisme.

La filière REP des jouets est entrée en application au second semestre 2022 suite à l’agrément de l’éco-organisme Ecomaison ([94]) depuis avril 2022. Les fabricants et distributeurs de jouets avaient peu de connaissance du système des REP, sauf ceux mettant sur le marché des jouets électriques couverts par la filière des déchets d’équipements électriques et électroniques. De ce fait, la pédagogie a été indispensable pour faire connaître la réglementation applicable. Selon l’éco-organisme, une bonne connaissance par ces acteurs est désormais établie. La capacité de collecte devrait donc s’accroître rapidement dans les prochaines années. La reprise en magasin, notamment la reprise par bon d’achat de jouets usagés, était déjà mise en place par certaines enseignes, qui travaillaient avec des acteurs du réemploi sur les invendus. Des bornes Ecomaison sont désormais installées dans les magasins de jouets, visant à inciter les consommateurs à ramener les jouets usagés. La priorité, pour le traitement des jouets collectés, est donnée aux acteurs du réemploi, et en particulier aux acteurs de l’économie sociale et solidaire. Les jouets, contrairement à d’autres filières, font l’objet d’attachement au produit, ce qui signifie que le consommateur préfère apporter une « seconde vie » aux jouets plutôt que de les jeter à la poubelle. Leur collecte et leur réemploi sont ainsi favorisés. Cependant certaines difficultés dans le réemploi des jouets peuvent apparaître, liées par exemple à la gestion des risques de sécurité de ces jouets réemployés vis-à-vis des enfants. Pour l’éco-organisme, le recyclage n’est prévu qu’en l’absence d’associations en mesure de collecter ces flux.

Ces trois filières possèdent des similitudes. Elles présentent des tonnages relativement faibles et souhaitent s’appuyer sur les déchèteries publiques pour proposer des lieux de collecte et de tri, et notamment y créer des zones de réemploi. Cependant, un nombre croissant de filières REP utilisant les déchèteries publiques, y compris la filière REP bâtiment qui présente des tonnages conséquents, l’espace foncier des déchèteries devient un frein au tri et aux possibilités de réemploi. Selon Ecologic, il est nécessaire de travailler à la mise en place de mutualisations de collecte pour réduire l’emprise sur le sol et maîtriser les coûts. Selon Ecomaison, certaines collectivités territoriales attendent d’obtenir une vision sur le déploiement de la filière REP bâtiment avant de signer les contrats de ces filières, ralentissant de ce fait leur démarrage opérationnel. Les produits de ces filières sont par ailleurs souvent composés d’objets de petite taille, souvent jetés dans les ordures ménagères par les consommateurs. Afin d’augmenter le taux de collecte, de réemploi ou de recyclage, un changement de comportement du consommateur et une plus grande sensibilisation sont requis. Cette sensibilisation est également nécessaire pour les producteurs, et entreprises qui n’ont pas toujours connaissance de leurs nouvelles obligations. La mise en place concomitante des nouvelles filières REP a apporté une complexité supplémentaire à cette sensibilisation, notamment pour un producteur ou distributeur concerné par plusieurs de ces filières et qui doit identifier les éco-organismes compétents.

b.   La filière REP des « huiles et lubrifiants », s’appuyant sur une filière préexistante, fonctionne

La filière REP des huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles a été créée par la loi Agec avec une mise en place prévue au 1er janvier 2022. Ces huiles (huiles de vidange pour les moteurs des véhicules par exemple) sont des déchets dangereux, pour la santé et pour l’environnement, avec des risques de pollution des cours d’eau et des nappes phréatiques.

Le décret ([95]) et le cahier des charges ([96]) ont été publiés en octobre 2021, et l’éco-organisme, Cyclevia a été agréé en mars 2022 ([97]). L’éco-organisme a proposé un effet rétroactif au 1er janvier 2022 afin de combler le retard de mise en place de la filière.

Selon l’éco-organisme, la filière est montée en puissance rapidement en 2022 et est efficiente. En 2022, 209 000 tonnes de déchets ont été collectées soit 53 % du gisement, dont 79 % ont été orientés vers le recyclage et 21 % vers la valorisation énergétique ([98]). Les objectifs instaurent un pourcentage minimum de collecte de 50 % et de régénération ou recyclage de 75 % en 2023 et un pourcentage maximal de valorisation énergétique de 25 % en 2023. Les objectifs 2023 sont donc atteints en 2022. Cela s’explique notamment par une filière essentiellement en « B to B », la collecte s’effectuant chez des professionnels et une filière préexistante déjà organisée. La collecte est effectuée par les collectivités, qui proposent des points de collecte pour les particuliers et entreprises locales, et par les collecteurs-regroupeurs qui recueillent les huiles usagées auprès des professionnels et des collectivités. Selon l’éco-organisme, la collecte sans frais est mise en place sur tout le territoire. Le recyclage des huiles usagées est effectué au travers de la régénération des huiles. Celle-ci permet de redonner à l’huile usagée ses caractéristiques. Elle peut rentrer à nouveau dans la composition d’huile neuve. En 2024, l’éco-organisme envisage de faire un appel à projet visant à l’implantation en France d’une unité capable de délivrer des huiles régénérées destinées aux moteurs répondant aux dernières normes EURO.

D’après le rapport d’activité 2022 de Cyclevia ([99]), les principales difficultés rencontrées sont liées aux situations locales spécifiques en outre-mer. Les pourcentages de collecte dans ces territoires varient de 20 % des mises sur le marché à Mayotte, notamment du fait de l’absence de déchèteries fixes et jusqu’à 75 % en Guadeloupe ou 81 % en Martinique. Des hausses importantes des stocks d’huiles usagées ont eu lieu à La Réunion et à Mayotte, notamment suite à la crise du covid-19 et à des problématiques de fret maritime. Ainsi, l’éco-organisme a contribué à un convoi spécial de déchets, dont 680 tonnes d’huiles usagées pour répondre à cet engorgement. Des réflexions sont actuellement en cours pour valoriser localement les huiles usagées (notamment dans les raffineries ou les centrales électriques), l’exportation vers la métropole représentant actuellement 97 % des huiles usagées.

Par ailleurs, Cyclevia souhaiterait obtenir une extension du périmètre de la filière REP pour devenir responsable des contenants d’huiles et de lubrifiants. Actuellement broyés et utilisés en tant que combustibles solides de récupération, ces contenants pourraient être réintégrés en partie dans de nouveaux contenants neufs selon l’éco-organisme.

c.   Les filières REP « engins de pêche » et « aides techniques » encore au stade de l’étude de préfiguration

L’article 62 de la loi Agec introduit également la création d’une filière REP pour les engins de pêche contenant du plastique, à compter du 1er janvier 2025. Elle devrait permettre de diminuer l’impact des filets abandonnés sur la pollution des océans. Cette filière vise ainsi à couvrir les coûts de la collecte des déchets d’engins de pêche contenant du plastique, leur transport et leur valorisation, notamment pour améliorer leur recyclage. Le ministère de la transition écologique a invité les parties prenantes à se structurer pour proposer un cadre volontaire, à l’instar de la filière volontaire d’agrofourniture. L’article L. 541-10-1 du code de l’environnement prévoit la possibilité de mettre en œuvre cette filière au moyen d’un accord conclu entre les professionnels et le ministère. L’organisme remplissant les obligations de responsabilité élargie du producteur conformément à cet accord n’est alors pas soumis à agrément, tant que l’accord est renouvelé. À ce titre, les producteurs ont proposé à l’éco-organisme Ecologic d’effectuer une étude de préfiguration dont la date butoir était en décembre 2023. Le dépôt du dossier d’accord volontaire (équivalent au cahier des charges) est prévu d’ici le 30 juin 2024, pour lancer la filière d’ici le 1er janvier 2025. La mise en place de cette filière au plus tard le 31 décembre 2024 provient également d’une obligation européenne, issue de la directive 2019/904 ([100]).

Selon la direction générale de l’offre de soins (DGOS), l’étude de préfiguration a été clôturée fin 2023 pour la filière des aides techniques mentionnées à l'article L. 245-3 du code de l’action sociale et des familles. La mise en application de cette filière est prévue pour le 1er janvier 2025.

3.   Les filières REP dédiées au nettoyage et au traitement de déchets font leur apparition

a.   La filière REP des produits du tabac, première filière dédiée au nettoyage

La filière REP des produits du tabac, équipés de filtres composés en tout ou partie de plastique et les produits qui sont destinés à être utilisés avec des produits du tabac devait être mise en place au 1er janvier 2021 conformément à l’article 62 de la loi Agec. Le cahier des charges a été publié en février 2021 ([101]), et l’éco-organisme Alcome a été agréé en août 2021 ([102]). La mise en place de cette filière a donc eu quelques mois de retard. Suite à un contentieux de la fédération des fabricants de cigares, le cahier des charges a été annulé par la décision n° 455411 du Conseil d’État du 28 juillet 2022, pour défaut de consultation publique préalable. Un nouveau cahier des charges ([103]) a donc été validé. Ces textes répondent également à une obligation européenne, issue de la directive 2019/904 ([104]), prévoyant le déploiement d’une filière REP produits du tabac au 5 janvier 2023 dans chaque État membre.

La filière REP des produits du tabac représente l’une des premières filières REP « de nettoiement », par distinction avec les filières REP prenant en charge les déchets triés, et présentant des objectifs chiffrés de collecte ou de valorisation des déchets. La filière REP des produits du tabac possède uniquement des objectifs de réduction de l’abandon illégal de mégots, et de nombre de collectivités ayant contractualisé avec l’éco-organisme pour la collecte. Il n’existe par ailleurs aucun objectif de traitement de ces mégots. Le cahier des charges impose cependant que 2 % des contributions financières reçues financent des projets de recherche et de développement pour créer des solutions de collecte innovantes, ou de recyclage des mégots, ne présentant pas de risque pour la santé et l’environnement.

L’éco-organisme a en charge la gestion des mégots (en proposant des dispositifs de collecte, comme des cendriers de rue), la prévention des abandons illégaux de mégots et les opérations de nettoiement des mégots abandonnés dans les espaces publics. Alors que les objectifs dans le cahier des charges de réduction du nombre de mégots abandonnées illégalement (jusqu’à - 40 % en 2026 par rapport à 2022) semblent réalistes selon Alcome, la trajectoire proposée pour la contractualisation avec les communes pour proposer des dispositifs de collecte de mégots et leur gestion est très ambitieuse (50 % de la population nationale au 31 décembre 2023 et jusqu’à 90 % au 31 décembre 2025). En effet, l’éco-organisme rencontre des difficultés liées au manque de connaissance sur les filières REP des interlocuteurs dans les communes. Un effort important de pédagogie est ainsi nécessaire pour contractualiser avec ces dernières. Alcome a pu établir environ 700 contrats au 15 décembre 2023, couvrant environ 25 % de la population nationale ([105]). Une astreinte financière journalière à l’encontre d’Alcome a été prononcée en novembre 2023, suite au non-respect de l’obligation d’établir un contrat-type en vue de soutenir financièrement les collectivités territoriales pour l’acquisition et la mise en place de dispositifs de collecte de mégots dans l’espace public. Considérant que le projet de contrat-type ne remplissait pas les exigences minimales, une décision de liquidation partielle de l’astreinte journalière a été émise en février 2024.

La prise en charge financière du nettoiement des mégots abandonnés est effectuée sur demande des collectivités, aucun objectif n’étant indiqué dans le cahier des charges. Alcome évalue à 12 % la quantité de cigarettes consommées en France et jetées au sol de manière inappropriée dans l'espace public, ce qui représente 7,7 milliards de mégots ([106]). Le barème du soutien financier aux collectivités pour les opérations de nettoiement, imposé dans le cahier des charges, est de 0,5 euro par habitant par an pour les communes rurales et jusqu’à 2,08 euros pour les communes urbaines denses. Selon Alcome, ce barème est « basé sur une étude qui est jugée par les parties prenantes de la filière comme non pertinente et non robuste ». Une étude est en cours pour mener à leur révision potentielle, le cahier des charges offrant cette possibilité. L’éco-organisme attire l’attention sur les coûts à couvrir pour les mégots abandonnés, qui ne seraient pas totalement alignés avec les éco-contributions reçues, notamment du fait de la baisse des ventes légales des produits du tabac, et l’augmentation de la part des produits vendus illégalement. Un rapport publié par Alliance Rethink Plastic et Surfrider en février 2024 estime au contraire que les coûts endossés, au niveau européen, « paraissent très faibles au regard des revenus considérables que génèrent les ventes de cigarettes ».

Cette filière REP est d’autant plus spécifique que la présence des mégots est liée à un mauvais comportement des fumeurs. La part de sensibilisation et communication envers les consommateurs est donc primordiale. À ce titre, diverses actions ont été menées en 2023, dont la distribution de cendriers de poche, une campagne nationale d’information sur l’impact environnemental « #MonMégotOùIlFaut », et une campagne de sensibilisation au risque incendie. Depuis la publication d’un décret ([107]) et d’un arrêté ([108]) en avril 2024, des actions nationales de sensibilisation sur le risque incendie doivent être réalisées au moins une fois par an, à hauteur de 3 % du montant des contributions perçues. Elles portent sur les risques liés à l’abandon des mégots « dans les espaces exposés aux feux de forêts et de végétation et le long des voies de circulation ». L’introduction de l’obligation de mener ces actions de sensibilisation dans la réglementation permet désormais d’effectuer leur suivi et leur contrôle.

b.   Les filières REP des textiles sanitaires et gommes à mâcher ne sont pas encore mises en place

La loi Agec prévoyait la mise en place d’une filière REP des textiles sanitaires à usage unique, y compris les lingettes pré-imbibées pour usages corporels et domestiques au 1er janvier 2024. L’étude de préfiguration de la filière par l’Ademe a été publiée en juin 2023. Celle-ci identifie les gisements potentiels : produits d’hygiène (mouchoirs, papier toilette, couches, protections féminines…), cotons et cotons-tiges, lingettes pré-imbibées, équipements de protection individuelle (masques), vêtements et linges jetables, dispositifs de soin (compresses, pansements…). Il est estimé une quantité de mises sur le marché de 1,2 million de tonnes pour ces produits. Les projets de décret et de cahier des charges ont été mis en concertation restreinte le 4 août 2023. Après prise en compte des remarques issues de la concertation, une nouvelle version de ces textes devrait être mise en consultation au premier semestre 2024. La mise en place de cette filière REP est donc retardée. L’intitulé de la filière REP ([109]) vise expressément les textiles sanitaires à usage unique. Dès lors, celle-ci ne permet pas de prévoir des dispositions quant à un éventuel réemploi des textiles sanitaires. Les déchets de textiles sanitaires à usage unique peuvent présenter des risques sanitaires particuliers, ou de salubrité, qu’il conviendra d’étudier dans les opérations de valorisation.

L’étude de préfiguration par l’Ademe est toujours en cours pour la filière REP des gommes à mâcher synthétiques non biodégradables, dont la mise en place était prévue dans la loi Agec au 1er janvier 2024. La mise en place effective de cette filière sera donc très en retard par rapport à la date fixée dans la loi. Les rapporteurs appellent à la mise en place rapide de cette filière REP prévue par la loi Agec. Pour cela, un renforcement des effectifs au sein de la direction générale de la prévention des risques, de la direction générale des entreprises et de l’Ademe doit être mis en œuvre (voir propositions n° 55 et 60).

4.   Certaines filières REP préexistantes, dont le périmètre a été étendu par la loi Agec, font face à des retards de mise en place

a.   La filière REP des véhicules est propice aux systèmes individuels

La filière REP des véhicules a été mise en place en 2006. La loi Agec a étendu cette filière aux véhicules à moteur à deux ou trois roues, et quadricycles à moteur, à partir du 1er janvier 2022, ainsi qu’au fonctionnement commun des différentes filières REP avec l’obligation de créer des éco-organismes ou des systèmes individuels. Auparavant, les centres de véhicules hors d’usage (VHU) étaient directement agréés par l’État. L’objectif de mise en place de cette filière REP est d’assurer la reprise des véhicules hors d’usage sur l’ensemble du territoire, et de lutter contre la filière illégale. Le décret ([110]) précisant les conditions de mise en œuvre a été publié en décembre 2022 et le cahier des charges ([111]) des éco-organismes et systèmes individuels est paru en novembre 2023. Les demandes d’agrément des éco-organismes et systèmes individuels devaient être déposées avant mars 2024. La mise en place effective de la filière REP véhicules étendue aura donc du retard, essentiellement dû au retard de publication des textes. Contrairement à la plupart des filières REP, celle des véhicules est propice à la mise en place de systèmes individuels, les véhicules en fin de vie étant identifiables par un marquage spécifique à chaque constructeur, qui peut gérer ses propres produits. Ainsi, plusieurs constructeurs prévoient la mise en place d’un système individuel. L’éco-organisme « Recycler mon véhicule », agréé en avril 2024 ([112]), est toutefois porté par les adhérents de la chambre syndicale internationale de l’automobile et du motocycle (Csiam), et notamment des constructeurs automobiles internationaux.

Les rapporteurs s’interrogent sur les conséquences, pour cette filière REP qui se met en place progressivement, d’une prédominance des systèmes individuels par rapport aux éco-organismes. Ils proposent ainsi, lorsqu’un retour d’expérience de son fonctionnement sera possible, la remise d’un rapport par le Gouvernement afin d’étudier les impacts associés, notamment vis-à-vis de l’atteinte des performances environnementales, et de la complexité de mise en œuvre. En effet, la mise en place de plusieurs systèmes individuels en complément d’un éco-organisme agréé peut complexifier la collecte et le traitement des produits en fin de vie pour les détenteurs de véhicules et pour l’ensemble des acteurs concernés jusqu’à leur valorisation.  

Proposition n° 42 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport sur les conséquences associées à une prédominance des systèmes individuels par rapport aux éco-organismes, agréés pour la filière REP des véhicules, en terme notamment d’atteinte des performances environnementales, et de complexité de mise en œuvre.

Le respect des objectifs du cahier des charges concernant le taux de réutilisation et de recyclage, ou le taux de réutilisation et de valorisation ne pose pas de problèmes spécifiques pour les voitures particulières. En effet, d’après le rapport annuel de la filière REP des véhicules publié par l’Ademe, ces taux étaient respectivement de 88 % et de 95,5 % en 2021, dépassant les objectifs du cahier des charges fixés à 85 % et 95 %. Cependant, pour les acteurs de la filière, notamment le Csiam et PFA, les objectifs de collecte mentionnés dans le cahier des charges ne paraissent pas pertinents. En effet, l’atteinte de cet objectif est calculée en considérant le nombre de VHU pris en charge au cours des trois dernières années, par rapport au nombre de véhicules neufs mis sur le marché national sur cette même période. La Plateforme automobile (PFA) considère ainsi que l’évaluation sur la base des mises sur le marché des années précédentes n’a « aucun sens pour des produits à très longue durée de vie (âge moyen près de 20 ans), dont les volumes de commercialisation sont assujettis à un contexte économique en constante évolution (crise covid, guerre en Ukraine...) et impactés par les aides d’État (prime à la conversion, prime à la casse...) ». L’objectif de collecte pourrait ainsi être très faible pour certains constructeurs présents depuis peu sur le marché français, ou commercialisant peu de véhicules. Ce cahier des charges fait par ailleurs l’objet d’un recours en annulation devant le Conseil d’État, déposé par la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec) en décembre 2023. Cette dernière reprocherait à ce cahier des charges de favoriser les systèmes individuels gérés par constructeurs, de retirer la propriété de la matière recyclée aux centres VHU et de négliger l’objectif de lutte contre la filière illégale de recyclage. Depuis le 1er janvier 2024, les centres VHU ne peuvent gérer des véhicules en fin de vie que s’ils disposent d’une relation contractuelle avec des systèmes individuels ou un éco-organisme. Le Csiam et PFA attirent l’attention sur le risque qu’une partie de ces centres se retrouvent sans contrat, et poursuivent leur activité de manière illégale. L’article R. 543-155-1 du code de l’environnement inquiète plus particulièrement PFA. Il autorise les centres VHU disposant d’un contrat avec un éco-organisme à réaliser les opérations de gestion de tout VHU correspondant à la catégorie d’agrément, même ceux relevant des systèmes individuels agréés, sans nécessité d’obtenir leur accord préalable. Les constructeurs de certains systèmes individuels pourraient dès lors, selon PFA, avoir du mal à respecter leurs objectifs du fait de difficultés d’accès au gisement.

La Commission européenne a présenté en juillet 2023 une proposition de règlement regroupant les réglementations relatives à l’écoconception des véhicules et aux véhicules hors d’usage. Selon PFA, la filière REP européenne n’a pas exactement le même périmètre ni les mêmes exigences que la filière REP française, notamment vis-à-vis de l’extension aux deux ou trois roues et quadricycles. Certains objectifs prévus au niveau français, notamment les objectifs de collecte, mais aussi les objectifs de réutilisation de pièces, des objectifs de récupération des fluides frigorigènes et relatifs au taux d’abandon des véhicules dans les territoires ultramarins, ne sont par ailleurs pas repris dans le projet de règlement européen.

b.   La filière REP des emballages professionnels et de restauration n’est pas encore mise en place

En complément de la filière REP des emballages ménagers, l’une des premières filières REP mise en place en 1993, l’article 62 de la loi Agec impose la création d’une filière REP « emballages professionnels et de restauration ». Alors que la filière REP d’emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les professionnels s’applique à compter du 1er janvier 2025, la filière REP « CHR » (cafés, hôtels, restaurants) des emballages professionnels liés à une activité de restauration prend effet au 1er janvier 2021. Dans son article 28, la loi « climat et résilience » ([113]) reporte cette dernière échéance au 1er janvier 2023. Le décret ([114]) instituant la filière REP « CHR » a été publié en mars 2023, et le cahier des charges ([115]) en juillet 2023. Un éco-organisme, Citeo Pro, a été agréé ([116]) en mars 2024. La filière REP « CHR » n’est donc pas encore mise en place, plus d’un an après la date butoir. La filière REP « EIC » (des emballages industriels et commerciaux), est quant à elle, toujours au stade de préparation de l’étude de préfiguration, en cours de finalisation d’après la direction générale de la prévention des risques.

La mise en place de trois filières REP en charge des emballages (ménagers, restauration et industriels ou commerciaux) peut apporter des complexités opérationnelles, par des questions techniques sur le périmètre de ces filières, par des compensations de coûts entre éco-organismes résultant de la gestion des emballages, ou par la multiplication des déclarations pour les professionnels en fonction des produits mis sur le marché. Le périmètre d’application de la filière REP « CHR » et des emballages ménagers est précisé dans le cahier des charges pour les emballages mixtes alimentaires (emballages susceptibles d'être consommés ou utilisés à la fois par les ménages et par les professionnels ayant une activité de restauration). Pour ce cas particulier, le cahier des charges prévoit que l’éco-organisme en charge de la filière « CHR » assure la collecte ou couvre les coûts de reprise sans frais des déchets mixtes alimentaires auprès des professionnels de la restauration. L’éco-organisme de la filière « CHR » peut ensuite être compensé des coûts supportés pour la collecte et le traitement de ces déchets par un éco-organisme de la filière des emballages ménagers.

B.   Une gouvernance et un mode de fonctionnement remis en question

1.   Une gouvernance à repenser

a.   Les metteurs sur le marché, uniques décideurs ?

L’augmentation du nombre de filières REP et leurs déploiements progressifs confèrent un poids de plus en plus important aux éco-organismes, notamment par les contributions financières à leur disposition. En effet, des prévisions portent à 7 milliards d’euros le montant des éco-contributions versées aux éco-organismes en 2029, ce montant étant de 2,4 milliards d’euros en 2023 ([117]). Cette forte montée en puissance du poids des filières REP pose inévitablement la question de leur gouvernance pour continuer d’assurer une performance environnementale optimale de ces filières.

Un éco-organisme est une entreprise à but non lucratif investie par l’État d’une mission d’utilité publique, dont le conseil d’administration est composé de producteurs. Cette gouvernance est parfois considérée comme contre-productive pour l’efficacité des filières REP, notamment en termes de prévention des déchets.

L’allongement de la durée de vie des produits, par le réemploi, la réutilisation ou la réparation, implique une baisse des ventes de produits neufs, et donc des mises sur le marché, poussant les filières REP à favoriser le recyclage. Afin d’inciter les éco-organismes à s’engager dans la prévention de la production de déchets, l’article 62 de la loi Agec impose que les cahiers des charges des filières REP fixent des objectifs de réduction des déchets « lorsque la nature des produits le justifie », au même titre que les objectifs de réemploi, de réutilisation, ou de recyclage. Or, on constate que seule la filière des emballages ménagers possède à ce jour des objectifs de réduction des déchets dans son cahier des charges. Ainsi, il est apparu évident lors des auditions que, bien qu’ils y soient sensibilisés, l’enjeu de la prévention des déchets n’est pas encore un acquis solide au sein des éco-organismes. Les rapporteurs souhaitent en conséquence renforcer les mesures en faveur de la prévention des déchets au sein de l’ensemble des filières REP. Pour cela, les rapporteurs proposent d’introduire, à l’instar du cahier des charges de la filière REP des emballages ménagers, un objectif global de réduction de la production de déchets pour chaque filière REP, ainsi qu’une pénalité, dans le cadre de l’éco-modulation des éco-contributions, portant sur le critère de la mise sur le marché des produits.

Proposition n° 43 : Renforcer la prévention de la production des déchets au sein de l’ensemble des filières REP, en intégrant dans les cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels :

– des objectifs globaux de réduction de la production de déchets, instaurant une trajectoire de réduction à court, moyen et long terme ;

– des pénalités liées aux quantités de produits mis sur le marché, dans le cadre des éco-modulations des contributions financières.

L’inclusion d’autres parties prenantes dans cette gouvernance, telles que les collectivités territoriales, les opérateurs de gestion des déchets ou les acteurs de l’économie sociale et solidaire, fait débat, car elles reçoivent des financements de la part de l’éco-organisme. M. Jacques Vernier, président de la Commission inter-filières REP (Cifrep), est opposé à l’introduction de nouvelles parties prenantes au sein du conseil d’administration des éco-organismes. Il considère en effet que la « responsabilité élargie des producteurs » incombe uniquement aux producteurs.

Cependant, la frontière est parfois fine pour certains acteurs, pouvant être à la fois considérés par exemple comme producteur et recycleur. Plus particulièrement, les agréments ([118]) accordés aux éco-organismes de la filière des pneumatiques en décembre 2023 sont susceptibles de transformer la gouvernance actuelle, composée uniquement de producteurs. En effet, l’éco-organisme France recyclage pneumatiques (FRP) est détenu à 51 % par des metteurs sur le marché et à 49 % par un groupement d’intérêt économique regroupant les gestionnaires de déchets et recycleurs. Cette gouvernance a fait l’objet de discussions, notamment pour la gestion des appels d’offres « non discriminatoires » des contrats de gestion des déchets, alors même que des gestionnaires de déchets seraient dans la gouvernance. Afin d’éviter tout potentiel conflit d’intérêts, FRP a créé une commission spéciale composée uniquement de metteurs sur le marché pour l’attribution de marché. Un autre enjeu sur la gouvernance se dessine au travers de l’éco-organisme Tyval. Cet éco-organisme a été créé par une entreprise qui met sur le marché des huiles et des pneus, et qui assure la gestion des déchets associés. La mise en place d’un système individuel par cette entreprise n’était pas possible, un producteur devant collecter ses propres produits. Cet exemple démontre donc qu’un éco-organisme peut également être constitué de metteurs sur le marché assurant en partie le traitement des déchets associés.

Les opérateurs de gestion des déchets, les collectivités territoriales ou les associations peuvent porter leur voix au sein du « comité des parties prenantes », instance spécifique dans la gouvernance des filières REP, mise en place par la loi Agec. L’article 62 impose la création d’un « comité des parties prenantes » dans chaque éco-organisme, et lorsque l’éco-organisme est agréé pour plusieurs filières REP, un « comité des parties prenantes » pour chacune de ces filières. Un décret ([119]) précise la composition et le rôle de ce comité. Il est composé de producteurs, de collectivités territoriales, d’associations de protection de l’environnement et de protection des consommateurs, ainsi que d’opérateurs de la prévention et de la gestion des déchets dont l’économie sociale et solidaire. L’éco-organisme peut ainsi saisir le comité des parties prenantes pour avis, préalablement à certaines décisions stratégiques, notamment sur le dossier de demande d’agrément, le montant des éco-contributions et des éco-modulations, les plans d’écoconception, l’affectation des ressources financières des fonds de réparation ou de réemploi, les plans d’outre-mer, ou les actions de communication. En cas d’avis défavorable du comité, l’éco-organisme doit transmettre un projet modifié ou des informations complémentaires et saisir à nouveau le comité des parties prenantes. Cependant, l’article D. 541-95 du code de l’environnement précise que « l’éco-organisme n’est pas lié par les avis du comité ». Le cahier des charges peut parfois imposer la mise en place de comités supplémentaires, des « comités opérationnels techniques », au sein d’un éco-organisme ou mutualisés en cas de plusieurs éco-organismes agréés pour une même filière REP. Ces comités techniques doivent rendre compte aux comités des parties prenantes sur les sujets pour lesquels ils sont responsables. Ils sont composés de divers acteurs spécialisés, par exemple des recycleurs, des utilisateurs finaux de la matière, ou des opérateurs du réemploi. Le cahier des charges de la filière REP des emballages ménagers prévoit ainsi la mise en place de trois comités techniques, en charge du réemploi, de l’écoconception, et du recyclage.

b.   La Commission inter-filières REP (Cifrep), instance indispensable à la concertation de toutes les parties prenantes, est saturée

La Cifrep, prévue par l’article 62 de la loi Agec, est mise en place par un décret ([120]) en octobre 2020, et remplace les commissions transversales et spécifiques des filières REP (CFREP). La Cifrep permet une concertation entre les parties prenantes pour une co-construction des filières REP. Elle rassemble cinq collèges comprenant les producteurs, les collectivités territoriales, les associations de protection de l’environnement, les opérateurs de la prévention et gestion des déchets, et l’État. La loi Agec prévoit une consultation de la Cifrep sur les projets de cahier des charges et d’agrément des éco-organismes, ainsi que pour les modulations de l’éco-contribution, ou les plans outre-mer.

Le compte rendu du 26 octobre 2022 de la Cifrep fait par ailleurs état d’un vote favorable à une modification de la réglementation pour que la Cifrep soit dorénavant consultée pour avis sur les projets des montants des éco-contributions, à la place des « comités des parties prenantes ». En effet, selon des membres de la Cifrep, les rapports de force entre les membres siégeant dans ces deux instances, ou le type de vote (bulletin secret ou vote à main levée) y sont différents. La Cifrep peut également être consultée par le ministère en charge de l’environnement sur tout projet de texte ayant un impact sur les filières REP. Le président de la Cifrep peut aussi saisir pour avis le comité des parties prenantes sur des questions relatives à l’exercice de la filière REP. La Cifrep reste une instance uniquement consultative, dont l’avis est généralement pris en compte.

Saisi par l’éco-organisme EcoDDS, de la filière REP des produits chimiques, le Conseil d’État juge par la décision n° 450282 du 20 mars 2024, que l’ensemble des dispositions du texte définitif d’un cahier des charges doivent être discutées en Cifrep. Il a en effet annulé une disposition majorant les soutiens versés aux territoires ultramarins, introduite dans le cahier des charges, au motif d’un défaut de consultation de la Cifrep. Cette disposition, présente dans le projet de cahier des charges présenté en Cifrep, n’y avait pas été débattue. Cette décision du Conseil d’État pourrait ainsi renforcer le rôle de la Cifrep, et pose la question de l’avenir des dispositions ajoutées à un cahier des charges après consultation de la Cifrep, ou d’une consultation publique.

Certaines parties prenantes de la Cifrep ont indiqué aux rapporteurs lors des auditions une sursollicitation de cette commission. Elle fait l’objet d’un engorgement régulier, dû notamment au nombre de plus en plus important de filières REP et d’éco-organismes. Son calendrier prévoit ainsi des réunions une fois par mois, et jusqu’à deux ou trois fois selon les mois. La participation aux réunions de la Cifrep devient ainsi très chronophage. Les participants ont parfois l’impression que certains sujets sont traités de manière superficielle, et de ne pas avoir le temps d’étudier en détail certaines propositions, ce qui provoque parfois des votes « contre » ou l’abstention des commissaires. Le Conseil national de l’économie circulaire (CNEC) a suggéré lors de son audition que les sujets techniques précis tels que l’écoconception ou le réemploi pourraient donner lieu à des réunions dédiées, nécessitant davantage de discussions, afin d’apporter une réponse en profondeur à leurs enjeux.

c.   Vers une nouvelle gouvernance inter-filière REP, et au sein des filières REP

La question de la gouvernance des filières REP a été abordée par de nombreux organismes auditionnés, qui remettent en cause le fonctionnement actuel. Le constat partagé reste la prédominance du traitement aval de ces filières, par le financement du tri, de la collecte et du recyclage que plutôt que la mise en place une politique ambitieuse de réduction des déchets, d’écoconception ou de réemploi et de réutilisation.

Pour les rapporteurs, la place prépondérante des producteurs au sein de la gouvernance des éco-organismes, en charge de la gestion et de la mutualisation des coûts, est justifiée, la responsabilité de la fin de vie des produits incombant au producteur. Néanmoins, les éco-organismes sont aussi en charge de structurer la filière vers le réemploi ou la réutilisation, la réparation et le recyclage. Pour concilier l’intérêt général à aller vers l’atteinte des objectifs environnementaux avec l’intérêt des producteurs, il semble davantage pertinent de réinterroger l’encadrement des pouvoirs des éco-organismes que de repenser sa gouvernance au sein du conseil d’administration. La mise en place d’une gouvernance partagée et équilibrée doit être mesurée en vertu de son impact sur la filière. Il apparaît ainsi nécessaire de laisser davantage de place à une co-construction dans la stratégie de chacune de ces filières, prenant en compte les besoins de l’ensemble des acteurs concernés. Cette co-construction, entre les éco-organismes, les acteurs industriels, les collectivités territoriales et la société civile, doit être rendue possible par la mise en place d’outils de planification à l’échelle inter-filières, mais aussi au sein de chaque filière REP.

Par son expérience et son rôle transversal, la Cifrep est l’un des interlocuteurs privilégiés de l’État dans l’élaboration et le suivi des cahiers des charges des éco-organismes, et plus généralement des filières REP. Les rapporteurs souhaitent renforcer le rôle de la Cifrep, en rappelant son rôle majeur et transversal de structuration des filières REP. En effet, après avoir donné un avis sur les cahiers des charges des filières REP, la Cifrep n’a plus de rôle dans la structuration des filières REP et la poursuite de l’atteinte des objectifs. Cela crée une difficulté, pour cette instance, à impulser des dynamiques au sein des filières REP ou de manière transversale et la pousse à devenir progressivement une « instance de compte rendu » plutôt qu’une instance de concertation. Il pourrait être envisagé de poursuivre les actions de la Cifrep après validation des cahiers des charges. Par exemple, elle pourrait être amenée à proposer et impulser des modifications des cahiers des charges en fonction des retours d’expérience et des contrôles menés par les services de l’État, afin d’atteindre les performances environnementales souhaitées.

Afin de poursuivre l’action de planification de la Cifrep de manière « décentralisée » au sein de chaque filière REP, il convient de remplacer le « comité des parties prenantes » par un « conseil de la stratégie industrielle ». Ce conseil, reprendrait la composition actuelle du comité des parties prenantes, à laquelle s’ajouterait un ou plusieurs collèges spécifiques à chacune des filières REP. Par exemple, pour le secteur de la santé, des représentants des pharmacies ou des associations de patients pourraient y être introduits. L’inclusion de parties prenantes supplémentaires au « conseil de la stratégie industrielle », pertinentes selon la filière REP, doit permettre de rééquilibrer la composition de cette instance, certaines parties prenantes étant parfois laissées-pour-compte dans le processus actuel de décision des éco-organismes. Ce conseil n’a pas vocation à être uniquement consultatif et son avis doit être davantage pris en compte. Pour cela, l’avis et les choix effectués par le conseil d’administration de l’éco-organisme devront être conformes à l’avis rendu au sein du « conseil de la stratégie industrielle ». En effet, si ces derniers ne sont pas concordants, le ministère chargé de la transition écologique devra trancher sur les actions à mener par l’éco-organisme.

Les décisions prises par l’éco-organisme sur les points stratégiques, permettront de redessiner la transition vers l’économie circulaire, en accord avec la hiérarchie de traitement des déchets. Le « conseil de la stratégie industrielle » doit ainsi apporter un équilibre dans la gouvernance des filières REP, avec une prise en considération des impacts industriels, sociaux, économiques et environnementaux de la gestion des produits en fin de vie.

Proposition n° 44 : Revoir la gouvernance pour faire évoluer les « filières à responsabilité élargie du producteur » vers les « filières de l’économie circulaire » sans remettre en cause le principe de « pollueur-payeur » :

- à l’échelon inter-filières REP, en redonnant un rôle de planification à la Cifrep afin que cette dernière élabore les stratégies de filière ;

- à l’intérieur de chaque filière REP, en transformant le « comité des parties prenantes » en un « conseil de la stratégie industrielle », géré par la Cifrep.

Cette nouvelle gouvernance engendre une charge de travail bien plus conséquente pour les acteurs siégeant dans les « conseils de la stratégie industrielle ». À ce titre, les rapporteurs souhaitent étudier la possibilité d’ouvrir un financement de l’Ademe pour financer certains acteurs notamment ceux du secteur associatif. Ces derniers sont aujourd’hui tentés de ne plus siéger dans ces instances, faute de moyens humains suffisants, ce qui bloque ainsi la mise en place de certains comités. L’ouverture à de tels financements permettrait ainsi une mise en place rapide et efficiente des conseils de la stratégie industrielle.

Outre son rôle de structuration des filières REP, les rapporteurs appellent à renforcer le rôle de la Cifrep, en la chargeant d’harmoniser et de faciliter les démarches de l’ensemble des acteurs, notamment face à la multiplication des filières REP. L’article D. 541-6-1 du code de l’environnement peut être modifié à cette fin pour établir la Cifrep comme l’organisme en charge, par exemple :

– de mettre en place un système permettant l’identification par un producteur des filières REP et éco-organismes ou systèmes individuels responsables des produits mis sur le marché (voir proposition n° 47) ; et

– d’apporter une harmonisation sur la mise en place des fonds de réemploi ou de réparation, en faisant le lien entre les éco-organismes d’une même filière pour leur mise en œuvre, ou entre les éco-organismes et les associations ou entreprises requérant des financements.

Proposition n° 45 : Transformer la Cifrep en « Commission transversale des filières REP », guichet unique de l’ensemble des filières REP, chargé d’harmoniser et de faciliter les démarches des différents acteurs, en complément de son rôle de structuration des filières.

Les instances de gouvernance, ou les cahiers des charges des filières REP ne prennent par ailleurs pas toujours en compte les spécificités des différents secteurs, ou les spécificités régionales dans leurs objectifs et décisions. Alors que les spécificités des secteurs soumis aux filières REP peuvent être prises en compte au sein du « conseil de la stratégie industrielle », il reste nécessaire d’accompagner la prise en compte des spécificités régionales dans les filières REP.

D’après Régions de France, « les filières REP n’ont pas de logique territoriale ou régionale, ce qui ne permet pas de favoriser une économie circulaire régionale ». La mise en place des filières est en effet pensée presque exclusivement à l’échelle nationale. Il existe peu de spécifications régionales dans les objectifs définis dans les cahiers des charges des filières REP, les objectifs régionaux restant des exceptions. Le cahier des charges de la filière REP des éléments d’ameublement impose par exemple des objectifs régionalisés de collecte à partir de 2026, pour la métropole et les territoires ultramarins. Les rapporteurs préconisent de généraliser, dans les cahiers des charges, la définition d’objectifs ou valeurs cibles à l’échelle régionale pour l’ensemble des filières REP. Toutefois, malgré l’absence de dispositions à l’échelle régionale, le retour d’expérience montre qu’un accompagnement par les régions est parfois indispensable. En effet, ces dernières apportent une vision concrète sur l’évolution régionale de certaines activités. Ainsi, dans le cadre de la mise en place de la filière REP bâtiment et pour répondre aux objectifs de maillage des points de collecte, un travail au niveau des régions a été effectué. Régions de France regrette par ailleurs le manque de moyens humains au sein des éco-organismes pour travailler localement et directement avec les régions, et autres collectivités territoriales.

Régions de France précise que les régions ont un rôle particulier parmi l’ensemble des collectivités territoriales, du fait de « de leurs compétences de planification mais aussi comme animatrices et coordinatrices régionales ». À ce titre, les rapporteurs considèrent que les régions peuvent être davantage impliquées dans la planification et le pilotage des filières REP. Cette implication peut se traduire par l’établissement d’une feuille de route régionale par les éco-organismes prenant en considérant les besoins et spécificités de chaque région, et par une coordination des campagnes régionales d’information et de communication en matière d’économie circulaire. Afin d’assurer une coordination des différents travaux entre les éco-organismes, étudier les synergies possibles, et définir les modalités d’intervention, les rapporteurs proposent d’organiser des réunions semestrielles entre les éco-organismes et les régions.

Proposition n° 46 : Intégrer l’approche régionale dans les cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels :

– en fixant, en concertation avec les régions, des objectifs ou valeurs cibles régionaux, en vue d’atteindre les objectifs nationaux ;

– en établissant, en concertation avec les régions, des feuilles de routes régionalisées dans le cadre de la planification régionale ;

– en coordonnant des campagnes régionales d’information et de communication avec les régions ;

– en organisant des réunions semestrielles entre les éco-organismes et les régions.

2.   La multiplicité des filières REP, et des éco-organismes ou systèmes individuels au sein d’une filière REP, complexifie leur mise en place

Depuis la loi Agec, le nombre de filières REP a considérablement augmenté. Des difficultés opérationnelles, mais aussi des opportunités apparaissent face à la multiplication des REP et de leurs instances propres. Cette multiplication des filières REP engendre la multiplication des éco-organismes, notamment lorsqu’il en existe plusieurs par filière, alors accompagnés d’un organisme coordonnateur. Plus précisément, parmi les 17 filières REP pour lesquelles des agréments ont été accordés jusqu’à aujourd’hui, 34 éco-organismes ont été créés, ainsi que 3 organismes coordonnateurs. À ces éco-organismes peuvent s’ajouter des systèmes individuels. Pour la filière REP des déchets d’équipements électriques et électroniques par exemple, au moins 5 systèmes individuels ont été agréés depuis la loi Agec. Il est ainsi nécessaire, pour assurer un bon fonctionnement des filières REP, de ne pas accroître la complexité des démarches pour les producteurs.

a.   L’augmentation du nombre de filières REP ne doit pas accroître la complexité des démarches pour les producteurs et les places de marché

i.   Une identification laborieuse des filières REP et des éco-organismes par les producteurs

Les producteurs peuvent éprouver des difficultés pour identifier les filières auxquelles leurs produits sont soumis, face au nombre croissant de filières REP ayant chacune des périmètres spécifiques, et pouvant s’entremêler. Par exemple, un téléphone portable est soumis a minima à trois filières REP : la filière des déchets d’équipements électriques et électroniques pour ses composants électroniques, la filière des piles et accumulateurs pour la batterie, et la filière emballages et papier pour la notice, ou le colis. Pour un même produit, le producteur va donc multiplier les démarches et la transmission des données aux éco-organismes, ou à l’Ademe. Certains produits sont difficilement catégorisables et nécessitent un accompagnement plus poussé des éco-organismes pour confirmer les obligations associées. Par exemple, les jeux vidéo peuvent être soumis à la filière des déchets d’équipements électriques et électroniques, uniquement pour les jeux vidéo sous forme de « cartouches » (consoles Switch, Gameboy…), les autres étant exclus. Le problème d’identification des filières REP est particulièrement important pour les places de marché qui n’ont pas toujours connaissance de l’ensemble des caractéristiques d’un produit, ou pour les metteurs sur le marché étrangers, pour lesquels l’absence d’informations facilement accessibles rend plus difficile la conformité à la réglementation française. Enfin, pour un producteur ayant identifié la filière à laquelle il est soumis, le choix d’un éco-organisme peut s’avérer particulièrement complexe, chacun proposant des barèmes d’éco-contribution, un accompagnement ou des procédures différents. Dans l’exemple du téléphone portable soumis à trois filières REP, le producteur doit choisir trois éco-organismes parmi sept.

Les rapporteurs proposent ainsi de mettre en place une interface lisible, et facile d’accès en vue de simplifier l’identification des filières REP, et des éco-organismes par les producteurs et places de marché. Cette interface doit permettre de proposer un accompagnement spécifique aux metteurs sur le marché, qu’ils soient français ou étrangers, en y incluant un accès multilingue. Ce système peut être développé par la Cifrep, dont le rôle doit être renforcé à des fins d’harmonisation des pratiques entre les filières REP, ou par la direction de supervision des filières REP (DSREP) de l’Ademe.

Proposition n° 47 : Charger la Cifrep ou la direction de supervision des filières REP (DSREP) de l’Ademe de mettre en place une interface lisible, facilement accessible, et multilingue, visant à simplifier l’identification par un producteur des filières REP et des éco-organismes responsables des produits mis sur le marché.

ii.   Une mutualisation de l’adhésion aux éco-organismes et des déclarations de mises sur le marché

Conformément à l’article L. 541-10-13 du code de l’environnement, créé par l’article 62 de la loi Agec, un producteur soumis à une filière REP doit s’enregistrer auprès de l’Ademe, pour obtenir un identifiant unique, via la plateforme Syderep. Dans le cas où le producteur adhère à un éco-organisme, la démarche d’obtention de l’identifiant unique est effectuée par ce dernier. De même, le producteur effectue sa déclaration des mises sur le marché à un éco-organisme, qui transmettra les données à l’Ademe. Cette démarche doit être effectuée, par le producteur, pour chacune des filières REP auxquelles il adhère. L’adhésion à un éco-organisme est gérée au cas par cas entre le producteur et l’éco-organisme.

Afin de faciliter l’adhésion aux éco-organismes, l’obtention de l’identifiant unique et les déclarations de mises sur le marché, les rapporteurs proposent la création d’un guichet unique rassemblant l’ensemble de ces démarches. Avec la centralisation et l’harmonisation de l’adhésion des producteurs aux éco-organismes, le producteur n’aurait plus besoin de se connecter aux différentes interfaces des éco-organismes et selon différentes procédures. Le producteur n’aurait par ailleurs plus à passer par chaque éco-organisme pour obtenir son identifiant unique ou déclarer ses données de mises sur le marché. Les données renseignées dans l’interface seraient ainsi soumises une fois, et rendues disponibles en tant que besoin pour les éco-organismes. L’obtention de l’identifiant unique, et les déclarations de mises sur le marché étant effectuées par les éco-organismes auprès de l’Ademe, il est ainsi proposé que l’Ademe établisse ce guichet unique. Les modalités de déclaration et le rôle de l’Ademe doivent être modifiés notamment aux articles L. 541-10-13 et L. 541-10-14 du code de l’environnement.

Proposition n° 48 : Charger l’Ademe de créer un guichet unique pour l’adhésion des producteurs aux éco-organismes, l’obtention de l’identifiant unique et les déclarations de mises sur le marché, en vue de simplifier les démarches pour les producteurs.

iii.   Les difficultés rencontrées par les places de marché et la vente à distance

L’article 62 de la loi Agec, modifiant l’article L. 541-10-9 du code de l’environnement, précise les obligations incombant aux places de marché et plus généralement aux plateformes de vente à distance. La loi Agec les rend responsables au sens de la responsabilité élargie du producteur au même titre que les producteurs, depuis le 1er janvier 2022. Les places de marché et vendeurs en ligne mettant sur le marché des produits pour le compte d’un tiers ont ainsi l’obligation de pourvoir ou contribuer à la gestion des déchets, sauf à démontrer que ce tiers a déjà rempli ces obligations.

Leur qualité d’« intermédiaires » de vente, entre un fabricant ou un vendeur tiers, et le consommateur, rend plus difficile l’application de la loi Agec pour ces acteurs. Les places de marché ou plateformes de vente à distance n’ont en effet pas toujours une connaissance des produits aussi précise que les fabricants, n’étant pas à l’origine de leur conception, ou n’ayant pas les produits en leur possession directement. La Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad) indique que la loi Agec ne prend pas suffisamment en compte les spécificités de ce secteur, et n’a pas été conçue pour les acteurs de la distribution et du e-commerce. En effet, ils se heurtent à des difficultés opérationnelles, notamment liées à l’application d’une réglementation nationale à des entreprises effectuant des ventes au niveau européen ou international, et notamment sur la définition du producteur et metteur sur le marché, qui varie selon le périmètre national ou européen.

Pour les vendeurs non conformes vis-à-vis des obligations relatives aux filières REP, les places de marché et plateformes de vente à distance sont en charge d’adhérer à un éco-organisme pour chaque filière REP relative aux produits vendus. Elles font directement face aux difficultés d’identification des filières REP et des éco-organismes. Elles sont aussi responsables de la déclaration des mises sur le marché et du paiement des éco-contributions pour le compte du vendeur tiers, tout en assurant le « service après-vente » (contributions déjà payées, produits catégorisés dans une mauvaise filière). Lors des auditions, il a été indiqué aux rapporteurs des difficultés à recouvrer ces éco-contributions payées « en avance » pour le compte des vendeurs tiers, constituant un manque à gagner pour les places de marché ou plateformes de vente à distance. Enfin, elles organisent la reprise des produits usagés pour le compte du vendeur tiers en absence d’informations sur sa politique de reprise. Pour les vendeurs conformes, les places de marché doivent tout de même vérifier la conformité des vendeurs (identifiant unique par exemple), tenir à jour un registre d’information sur ces vendeurs et gérer les éventuelles demandes des éco-organismes.

Pour les vendeurs ayant recours aux places de marché, la complexité de la mise en conformité impacte principalement les « petits » ou « moyens » commerçants, liée à une charge administrative disproportionnée. Ces difficultés sont d’autant plus importantes pour les vendeurs non francophones. Ces derniers ne connaissent pas le mode de fonctionnement des filières REP en France, et n’ont pas accès à des informations ou adhésions multilingues.

L’obligation incombant aujourd’hui aux places de marché en France peut être remise en question au niveau européen. La directive-cadre « déchets » ([121]) précise au point 5 de l’article 8 bis que « les États membres mettent en place un cadre approprié de suivi et de contrôle de l’application pour s’assurer que les producteurs de produits et les organisations mettant en œuvre les obligations de responsabilité élargie des producteurs pour leur compte respectent leurs obligations de responsabilité élargie, y compris en cas de ventes à distance ». Cette disposition n’est pas appliquée de manière équivalente dans les pays de l’Union européenne. Par exemple, en Allemagne, il n’existe pas de possibilité pour les places de marché d’effectuer la démarche au nom d’un tiers. Les places de marché doivent confirmer que les vendeurs respectent la réglementation applicable en matière de filières REP, et sont tenues, en cas de manquement, de bloquer l’accès de leurs services aux utilisateurs non conformes, sous peine de sanctions importantes. Selon l’Alliance française des places de marché (AFPDM), un travail conséquent et difficile a été mené ces dernières années avec les vendeurs tiers et les éco-organismes pour appliquer les dispositions de la loi Agec, qu’il convient désormais de préserver et stabiliser. Des coûts importants ont également été engagés par ces plateformes pour se mettre en conformité avec les dispositions de la loi Agec. Les rapporteurs proposent ainsi de maintenir le fonctionnement français actuel, et de le porter au niveau européen, par exemple dans le cadre des négociations relative à la directive-cadre « déchets ». Cette proposition permet également d’offrir davantage de flexibilité pour les petites et moyennes entreprises, et éviter que leurs produits soient retirés du marché français.

Proposition n° 49 : Défendre les dispositions de la loi Agec en portant au niveau européen le principe attribuant aux places de marché la responsabilité d’assumer les obligations relatives aux filières REP pour le compte des vendeurs non-conformes.

b.   Une concurrence s’installe entre éco-organismes, et systèmes individuels, agréés pour une même filière REP

Lorsque plusieurs éco-organismes sont agréés pour une même filière REP, une concurrence entre éco-organismes peut apparaître. Cette concurrence n’est pas nécessairement contraire à un bon fonctionnement des filières REP. Elle peut permettre une stimulation pour proposer de meilleurs services à des coûts optimisés, évitant ainsi la situation de monopole par défaut. Elle offre également une certaine liberté aux producteurs pour s’associer et créer des éco-organismes, notamment dans le cas des filières REP présentant d’importants volumes de déchets, ou de catégories de déchets diversifiés. Cependant, dans l’objectif de maximiser le nombre de contractualisations avec les metteurs sur le marché, certains éco-organismes sont susceptibles de réviser à la baisse les barèmes d’éco-contributions. C’est le retour d’expérience de la concurrence des éco-organismes de la filière REP bâtiment. Suite à la publication des barèmes des contributions des producteurs, ces barèmes ont été abaissés par les éco-organismes, s’alignant les uns sur les autres. Pourtant, la baisse du montant des éco-contributions peut remettre en cause la capacité financière réelle d’un éco-organisme à assurer ses obligations, notamment vis-à-vis des collectivités territoriales, et à atteindre les objectifs prévus dans le cahier des charges.

Les rapporteurs considèrent qu’il est prématuré, à ce stade, d’émettre des recommandations sur la concurrence entre éco-organismes. À ce titre, il est proposé que le Gouvernement conduise une étude approfondie sur les effets de cette concurrence afin d’identifier les avantages et inconvénients associés, et de confirmer la pertinence du modèle actuel de multi-agréments.

Proposition n° 50 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport au Parlement sur les effets réels de la concurrence entre éco-organismes, en ciblant notamment la filière REP dédiée au bâtiment.

Une concurrence entre éco-organismes et systèmes individuels peut aussi s’installer. Certains éco-organismes craignent que la mise en place de systèmes individuels représente une opportunité pour les producteurs de ne pas respecter pleinement leurs obligations. L’éco-organisme Dastri, en charge des déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés, précise que le metteur sur le marché peut déterminer lui-même la classification de son déchet, et « choisir une filière dont les objectifs de collecte sont moins ambitieux, ou le faire sortir d’une filière REP ». Il cite l’exemple d’un déchet issu d’un capteur de glucose en continu, dispositif médical perforant qui aurait été classé en déchets d’équipements électriques et électroniques, et pour lequel le producteur a choisi de mettre en place un système individuel. Les rapporteurs appellent ainsi à appliquer un même niveau d’exigence pour les éco-organismes et systèmes individuels. Pour cela, un contrôle du respect des objectifs des systèmes individuels, au même titre que les éco-organismes, doit être effectué.

Proposition n° 51 : Contrôler le respect des objectifs par les systèmes individuels, au même titre que les éco-organismes, pour lutter contre la distorsion de concurrence.

Outre la concurrence entre éco-organismes, et systèmes individuels, la concurrence de ces derniers avec l’ensemble des acteurs des filières REP doit faire l’objet d’une attention particulière lors du développement de nouvelles filières REP. En effet, la mise en place de ces nouvelles filières modifie l’équilibre qui était trouvé jusqu’alors par les acteurs historiques des filières. La réorganisation avec de nouveaux équilibres concurrentiels doit être surveillée pour assurer la pérennité de l’ensemble des acteurs historiques.

c.   Des synergies sont possibles pour les éco-organismes agréés pour différentes filières REP

Certains éco-organismes sont agréés pour plusieurs filières REP, à l’instar d’Ecologic, éco-organisme en charge des déchets d’équipements électriques et électroniques, des articles de sport et loisirs, et des articles de bricolage et de jardin. L’agrément pour plusieurs filières peut être un atout, car il permet de mettre en place une synergie pour la collecte des déchets et du réemploi ou de la réutilisation ainsi que de faciliter les démarches des producteurs dont les produits sont soumis à ces filières. Cette synergie est par exemple mise en place par Ecologic pour les équipements électriques ayant leur contrepartie non électrique, comme les vélos à assistance électrique, ou les articles de jardin électriques par rapport aux mêmes articles thermiques. Plus généralement, des mutualisations entre éco-organismes et entre filières REP pourraient être intéressantes en vue de simplifier le geste du tri du consommateur, ou les démarches des producteurs. C’est ce sur quoi tablent les éco-organismes Ecosystem, en charge des déchets d’équipements électriques et électroniques, et Corepile, en charge des piles et accumulateurs, qui ont annoncé en mars 2024 « un rapprochement stratégique ». Cette potentielle fusion est justifiée par les éco-organismes pour proposer notamment un guichet unique aux producteurs et aux opérateurs de collecte, 60 % des metteurs sur le marché d’accumulateurs étant concernés par la filière des équipements électriques et électroniques. Néanmoins, le multi-agrément conduit à une multiplication des organes de gouvernance, avec un comité des parties prenantes pour chaque filière REP, et le cas échéant des comités techniques opérationnels. Selon certains éco-organismes, cela ne pose pas de problèmes majeurs pour le fonctionnement de ces filières, mais reste très chronophage.

Lors d’une table ronde organisée par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale en janvier 2024, l’association des communes et collectivités d’outre-mer (Accd’om) a également évoqué la possibilité de mutualiser certaines filières REP pour répondre aux contraintes fortes en outre-mer. À cette fin, un exemple de mutualisation a été explicité concernant la Province Sud de la Nouvelle-Calédonie. La gestion des déchets y est effectuée par un éco-organisme unique, « Trecodec », en charge notamment des piles et accumulateurs, des batteries, des emballages, des huiles, des véhicules, des pneus, ou des déchets d’équipements électriques et électroniques. Ce mode de gestion, considéré comme plus efficace sur ce territoire, est également à l’étude en Polynésie française.

Les rapporteurs appellent ainsi à étudier les synergies possibles entre les différentes filières REP existantes. Plus particulièrement, il pourrait être analysé les bénéfices et les limites associés à la mutualisation des filières REP, notamment dans le cadre de la mise en œuvre des filières REP dans les outre-mer. Cette étude serait effectuée dans le cadre d’un rapport du Gouvernement transmis au Parlement.

Proposition n° 52 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport sur les bénéfices et les limites associés à la mutualisation des filières REP, notamment en vue de leur mise en œuvre dans les outre-mer.

C.   Un suivi et un contrôle des filières REP qui restent à renforcer

1.   La direction de supervision des filières REP de l’Ademe permet d’obtenir et de fiabiliser les données de suivi

L’article 76 de la loi Agec prévoit, modifiant l’article L. 131-3 du code de l’environnement, prévoit le suivi et l’observation des filières à responsabilité élargie du producteur par l’Ademe. À cette fin, il précise les règles concernant les coûts et les effectifs du pôle de l’Ademe en charge de cette mission. Les coûts associés doivent ainsi être couverts par une redevance versée par les producteurs ou les éco-organismes, avec laquelle l’Ademe dispose d’une autonomie financière dans la limite de ces contributions. En complément, les agents du pôle en charge des filières REP ne sont pas pris en compte dans le plafond d’emploi des autorisations des opérateurs de l’État, fixé chaque année par la loi de finances.

La direction de supervision des filières REP (DSREP) a été mise en place en 2021. Elle a pour mission d’accompagner les éco-organismes et systèmes individuels, réaliser des études et évaluations préalables à leur agrément, collecter, traiter et analyser les données nécessaires au suivi des filières REP, et les mettre à disposition du public. Depuis sa mise en place, ce pôle monte en puissance de manière continue, avec une première phase d’acquisition et de structuration des données, et une seconde phase, en cours, de traitement et de valorisation de ces données. Les producteurs et les éco-organismes ont une obligation de déclaration annuelle à l’Ademe concernant leurs filières REP. Cette déclaration est effectuée via l’outil Syderep. L’article L. 541-10-13 du code de l’environnement, créé par l’article 62 de la loi Agec, impose la transmission des justificatifs de l’adhésion à un éco-organisme ou de la création d’un système individuel, et des données relatives aux produits mis sur le marché, sur la gestion des déchets, et toute autre donnée pertinente pour suivre les objectifs quantitatifs et qualitatifs de prévention et de gestion des déchets. Les déclarations sont effectuées par les éco-organismes pour leurs producteurs adhérents. Régions de France regrette de ne pas avoir accès aux données régionales issues de Syderep, conformément à l’arrêté du 12 décembre 2022 relatif aux données des filières REP. Ces données peuvent être utiles pour suivre le développement des filières REP sur les territoires et définir les politiques publiques.

Pour Federec, le Syndicat national des entrepreneurs de la filière déchet (Snefid) et la Fédération nationale des activités de la dépollution et de l’environnement (Fnade), le passage des données par les éco-organismes pose des difficultés en termes de respect de la protection des données commerciales. Selon ces acteurs, les systèmes informatiques proposés par les éco-organismes « n’assurent pas la confidentialité d’un certain nombre de données considérées comme sensibles ou devant être protégées sur le plan commercial et contractuel ». Les rapporteurs proposent ainsi de charger l’Ademe de collecter directement ces données, tout en garantissant un accès aux données pertinentes aux éco-organismes et la confidentialité des données. À cette fin, le point III de l’article L. 541-10-14 du code de l’environnement doit être modifié, ainsi que les textes réglementaires pris pour son application.

Proposition n° 53 : Charger l’Ademe d’assurer la gestion des données dans le cadre de son rôle de guichet unique (adhésion des producteurs aux éco-organismes, obtention de l’identifiant unique et déclarations de mises sur le marché), tout en garantissant un accès aux données pertinentes aux éco-organismes et la confidentialité des données.

Lors du suivi et de l’évaluation de l’atteinte des objectifs, des désaccords peuvent apparaître entre les acteurs concernés sur la pertinence des données utilisées pour l’évaluation. Les rapporteurs appellent ainsi à rendre facilement accessibles les données à l’origine de méthodologies de calculs ou utiles pour la prise de décision. Il peut s’agir par exemple des éco-contributions fixées par les éco-organismes, des objectifs dans le cahier des charges publiés par l’État, ou les chiffres clés de l’Ademe.

Proposition n° 54 : Renforcer l’accessibilité et la lisibilité des données des éco-organismes, de l’État et de l’Ademe utilisées pour la prise de décision.

L’Ademe fait face à une évolution des missions de la DSREP, liée au déploiement des nouvelles filières REP, mais aussi aux attentes supplémentaires des diverses parties prenantes. Il est donc nécessaire d’obtenir de nouvelles compétences sur les approches économiques (équilibrage, dimensionnement des barèmes), sur les critères de modulation des éco-contributions, et sur la réparation (développement des fonds, travaux du conseil national de la réparation). En complément de ce pôle, l’observatoire du réemploi et de la réutilisation en 2022 et le conseil national de la réparation en 2023 ont été créés pour accompagner les acteurs vers l’économie circulaire.

Suite à l’audition de l’Ademe, il apparaît que l’application actuelle de l’article 76 de la loi Agec n’est pas en accord avec ce qui avait été prévu dans la loi à l’origine. En effet, le paiement de la redevance par les éco-organismes, prévue à l’article R. 131-26-2 du code de l’environnement pour couvrir les coûts de fonctionnement de la DSREP, n’a pas ou peu été effectué, et le financement du pôle a été réalisé en partie sur les fonds propres de l’Ademe. Les rapporteurs déplorent cet état de fait et souhaitent que les paiements de la redevance soient effectués par les éco-organismes en conformité avec l’article 76 de la loi Agec. Le paiement de la redevance reste un sujet de contentieux, bien que des échanges soient en cours pour aboutir à des accords. Certains éco-organismes, indiquant une évolution importante du montant de la redevance d’une année sur l’autre, souhaiteraient être associés à l’élaboration de la grille tarifaire soumise au ministère chargé de l’environnement. Deux décisions du Conseil d’État rendues le 6 mars 2024 rejettent les recours portés par une quinzaine d’éco-organismes contre le financement du service de suivi des REP. Il était demandé l’annulation de plusieurs arrêtés fixant les tarifs de la redevance à verser à l’Ademe. Le Conseil d’État juge notamment que les tarifs proposés par ces arrêtés ne sont pas disproportionnés par rapport aux prestations assurées par l’Ademe. Un protocole d’accord aurait été signé en parallèle le 28 février 2024 avec 18 éco-organismes, qui prévoit des montants plafonnés et calculés en fonction du chiffre d’affaires, ainsi qu’un renforcement de la concertation.

Par ailleurs, la loi de finances pour 2021 ([122]) a remis en cause la disposition initiale de la loi Agec, et oblige désormais l’Ademe à comptabiliser les agents du pôle dans le plafond d’emploi des autorisations des opérateurs de l’État. Selon l’Ademe, cela bride sa réactivité et son adaptabilité pour répondre aux divers besoins liés à la supervision des filières REP.

Les rapporteurs exigent que la volonté initiale du législateur soit respectée. Ils proposent un pilotage des effectifs affectés au suivi des filières REP au sein de la DSREP de l’Ademe au sein du budget annexe dédié, au travers de la masse salariale votée par le conseil d’administration et non au travers d’un plafond d’emploi. En effet, il convient d’assurer la capacité de l’Ademe dans ses missions de suivi et d’accompagnement des filières REP, au regard notamment des enjeux croissants de l’économie circulaire et de l’évolution continue des missions menées par la DSREP. Ils appellent ainsi à acter le renforcement de ces effectifs lors de la prochaine loi de finances.

Proposition n° 55 : Effectuer le pilotage des effectifs dédiés au suivi des filières REP au sein de la direction de supervision des filières REP de l’Ademe, dans le cadre du budget annexe dédié, au travers de la masse salariale votée par le conseil d’administration, et non au travers du plafond d’emploi tel que prévu actuellement dans la loi.

2.   Les contrôles et mises en œuvre des sanctions sont insuffisants

a.   Des sanctions peu appliquées

Le suivi et l’observation des filières REP sont effectués par la direction de supervision des filières REP de l’Ademe. Cependant, les missions de régulation (police, instruction, poursuites, ou sanctions) ne relèvent pas de cette direction, mais du ministère chargé de l’environnement. Le développement des filières REP et de leurs ambitions suite à la loi Agec nécessitent un renforcement important de la régulation et de la mise en œuvre des sanctions prévues.

L’article L. 541-9-6 du code de l’environnement, créé par l’article 61 de la loi Agec, précise les sanctions applicables à un producteur qui a mis en place un système individuel ou à un éco-organisme en cas de manquement à la réglementation relative aux filières REP. Une amende peut être ordonnée, proportionnée à la gravité des manquements et jusqu’à 10 % du montant annuel total des charges relatives à la gestion des déchets pour un éco-organisme, ou 10 % du montant annuel du budget prévisionnel pour un système individuel. Une astreinte journalière peut également être décidée, d’un montant maximal de 20 000 euros jusqu’à ce que les mesures prescrites soient satisfaites. En complément, l’agrément peut être suspendu ou retiré par le ministre chargé de l’environnement. Dans le cas où le producteur ou l’éco-organisme n’atteint pas les objectifs de prévention et de gestion des déchets, des engagements de nature à compenser les écarts constatés, notamment financiers, doivent être proposés et validés par le ministre chargé de l’environnement. Si ce plan d’engagement n’est pas respecté, les amendes et astreintes journalières, ou la suspension ou le retrait de l’agrément peuvent être décidés. Ce dispositif de sanctions est jugé peu dissuasif : d’une part par le montant des amendes formulées, comparé aux éco-contributions reçues par les éco-organismes, et d’autre part, car le retrait de l’agrément paraît peu crédible pour les filières pour lesquelles seul un éco-organisme est agréé.

Par décision du 15 novembre 2023 ([123]), la DGPR a émis une astreinte financière journalière à l’encontre de l’éco-organisme Alcome, en charge de la filière REP des produits du tabac. Le montant de l’astreinte a été fixé à 100 euros par jour jusqu’à fin novembre 2023 puis 7 500 euros par jour à partir de décembre 2023. L’éco-organisme n’aurait pas respecté l’obligation d’établir un contrat-type en vue de soutenir financièrement les collectivités territoriales pour l’acquisition et la mise en place de dispositifs de collecte de mégots dans l’espace public. Considérant que le projet de contrat-type transmis par l’éco-organisme à destination des collectivités territoriales en décembre 2023 ne remplissait toujours pas les exigences minimales, une décision de liquidation partielle de l’astreinte journalière a été émise le 29 février 2024 ([124]). Le montant associé à cette liquidation partielle de l’astreinte journalière s’élève à 466 000 euros.

Selon la DGPR, à l’exception de la décision d’astreinte journalière prise à l’encontre de l’éco-organisme Alcome, il n’y a pas eu d’autres sanctions financières prononcées par les pouvoirs publics. Divers acteurs, notamment les associations environnementales ou de collectivités territoriales, regrettent le faible taux de sanctions vis-à-vis des performances environnementales des filières REP, parfois en retrait par rapport aux objectifs affichés de collecte et recyclage. Cependant, plusieurs rappels à la réglementation ont été émis, par des courriers préalables à la mise en demeure, suivis de mises en demeure. En 2022, deux éco-organismes de la filière REP des déchets d’équipements électriques et électroniques ont été ainsi mis en demeure de transmettre un dossier de demande d’agrément d’organisme coordonnateur dans un délai d’un mois. En 2023, pour la filière REP bâtiment, deux éco-organismes ont été mis en demeure de respecter les objectifs de déploiement des points de reprise sans frais, et un éco-organisme a été mis en demeure pour défaut de transmission du plan relatif au réemploi. Dix-huit éco-organismes ont par ailleurs été mis en demeure d’élaborer les plans d’outre-mer de prévention et de gestion des déchets, prévus au VII de l’article L. 541-10 du code de l’environnement.

Les sanctions, prévues par le code de l’environnement, restent ainsi peu appliquées dans le cadre des filières REP. Les rapporteurs appellent à renforcer la mise en œuvre de ces sanctions et à les rendre effectives, en appliquant systématiquement les sanctions aux éco-organismes et systèmes individuels dès qu’un manquement vis-à-vis des obligations présentes dans le cahier des charges est constaté. Les rapporteurs souhaitent de plus un renforcement du montant des sanctions financières, pour tout non-respect de la réglementation des filières REP par un éco-organisme ou un système individuel. L’augmentation du montant des sanctions financières aurait ainsi un effet dissuasif, incitant les éco-organismes et systèmes individuels à améliorer leurs performances environnementales.

Proposition n° 56 : Assurer la mise en œuvre des sanctions :

– en appliquant systématiquement les sanctions prévues par la réglementation, dès qu’un manquement d’un éco-organisme ou d’un système individuel est constaté vis-à-vis des obligations présentes dans son cahier des charges ;

– en renforçant les montants des sanctions financières, pour inciter davantage les éco-organismes et les systèmes individuels à atteindre les performances environnementales attendues des filières REP.

Plus précisément, les rapporteurs insistent sur l’application de la sanction associée à la suspension ou au retrait de l’agrément d’un éco-organisme ou d’un système individuel. La direction générale des entreprises (DGE) a indiqué aux rapporteurs qu’« aucun agrément n’a été retiré à un éco-organisme depuis la mise en place des filières REP en France ». Cependant, des périodes courtes pendant lesquelles aucun éco-organisme n’était agréé ont été observées, liées à des dépôts de dossiers tardifs, ou à de longs délais d’instruction. La DGE précise également que dans certains cas, il peut être délivré des agréments sur une durée réduite, d’un an au lieu de six, sous conditions particulières. Elle cite l’exemple de l’éco-organisme Léko en charge des emballages ménagers, agréé de mars à décembre 2023, à condition de respecter les conditions énoncées dans le compte rendu de la Cifrep de février 2023 portant sur la contractualisation avec les collectivités, ou sur les effectifs de l’éco-organisme. La suspension ou le retrait de l’agrément est une mesure forte destinée aux cas de manquements avérés ou répétés. Alors qu’elle apparaît envisageable pour les filières REP pour lesquelles plusieurs éco-organismes sont agréés, elle semble peu concevable pour les filières REP avec un unique éco-organisme agréé. Pour ce dernier cas, il reste nécessaire d’appliquer cette sanction, soit en mettant en place un système capable de pallier au rôle de l’éco-organisme pendant une période déterminée, soit en assurant un accompagnement renforcé de l’éco-organisme, qui conserverait alors son rôle, vers la correction des manquements. Le fonctionnement continu des filières REP doit être maintenu. Ce système palliatif ou d’accompagnement de l’éco-organisme peut être mis en place par voie réglementaire.

Proposition n° 57 : Mettre en application la suspension ou le retrait de l’agrément à un éco-organisme ou à un système individuel en cas de manquement avéré, y compris lorsqu’il n’existe qu’un seul éco-organisme agréé pour une filière REP, en prévoyant la mise en place d’un système temporaire palliatif ou d’accompagnement renforcé de l’éco-organisme pour maintenir un fonctionnement continu des filières REP.

Lors de l’annonce d’une sanction prévue par le code de l’environnement, des incertitudes peuvent apparaître sur la responsabilité partielle ou totale de l’éco-organisme ou du système individuel du fait d’objectifs non atteints. M. Jacques Vernier, président de la Cifrep, a ainsi rappelé aux rapporteurs l’importance de définir précisément les responsabilités des différents acteurs pour éviter tout contentieux. Différents arguments pourraient être mis en avant par les différentes parties prenantes, par exemple que les objectifs imposés dans les cahiers des charges étaient inatteignables et n’ont pas fait l’objet d’études suffisantes, ou encore que la responsabilité est partagée avec des collectivités ou opérateurs de gestion des déchets dans la non-atteinte des objectifs. Pour éviter ces écueils, les rapporteurs souhaitent mettre l’éco-organisme en obligation de résultat, en assurant une concertation avec l’État, au-delà de la rédaction du cahier des charges des filières REP. Cette concertation peut être mise en place au travers de groupes de travail entre les services de l’administration et les éco-organismes de chaque filière REP.

Proposition n° 58 : Instaurer un dialogue constructif entre l’État et les éco-organismes en vue de dresser un état des lieux partagé et de parvenir à l'élaboration d’indicateurs de succès communs.

Une mission visant à réformer la gouvernance, la régulation économique et le fonctionnement des éco-organismes a été lancée en janvier 2024 par la Première ministre Élisabeth Borne. Elle a été confiée à l’inspection générale de l’environnement et du développement durable, au conseil général de l’économie et à l’inspection générale des finances, qui devraient présenter les conclusions de cette mission en juin 2024. Cette mission cherche à répondre aux enjeux des filières REP en termes de performances environnementales, notamment l’atteinte des objectifs des cahiers des charges, des performances économiques pour l’ensemble des acteurs des filières REP, et des enjeux concurrentiels liés aux éco-contributions et leurs modulations, ou aux déséquilibres introduits lors de la création des filières REP. Des pistes d’actions permettant d’améliorer le fonctionnement des filières REP seront proposées, par exemple sur l’introduction de mécanismes plus incitatifs, la lutte contre les « passagers clandestins » ou encore sur une potentielle mutualisation des filières. Sera également étudiée la possibilité de mise en place d’une instance de régulation, d’évaluation et de contrôle des éco-organismes et systèmes individuels. Les inspecteurs devront ainsi « définir le cadre et les conditions de réussite à la mise en place d’une instance de régulation, d’évaluation et de contrôle ».

Sur ce dernier point, l’article 8 bis de la directive-cadre « déchets » précise que les États membres de l’Union européenne doivent désigner « au moins un organisme indépendant des intérêts privés ou une autorité publique pour surveiller la mise en œuvre des obligations en matière de responsabilité élargie des producteurs ». L’Ademe a ainsi été désignée pour le suivi des filières REP, mais n’a pas de pouvoir de contrôle et de régulation. La mise en place d’une instance indépendante de contrôle et de régulation des filières REP fait l’objet de points de vue divergents parmi les acteurs de l’économie circulaire, plébiscitée à la fois par les éco-organismes ou organisations professionnelles, et les associations environnementales mais ne faisant pas l’unanimité au sein des administrations ou des collectivités territoriales. Les rapporteurs soutiennent la mise en place d’une instance indépendante de contrôle et de régulation des éco-organismes et des systèmes individuels au sein des filières REP. Pour la rapporteure Véronique Riotton, la mise en place de cette instance indépendante de contrôle et de régulation des filières REP n’implique pas nécessairement la création d’une nouvelle instance. Les missions associées à cette instance peuvent être attribuées à une instance déjà existante, à condition qu’elles soient clairement assignées, et que l’instance dispose de moyens humains et financiers suffisants à l’exercice de ses nouvelles fonctions.

L’instance indépendante de contrôle et de régulation des filières REP pourrait être chargée de contrôler l’atteinte des objectifs des cahiers des charges, de sanctionner toute pratique contraire au code de l’environnement dans le cadre des filières REP, ainsi que de sanctionner les « passagers clandestins ». Le pouvoir de sanction de cette instance doit être particulièrement renforcé, à l’instar d’autres autorités telles que l’Autorité de la concurrence. À ce titre, il pourrait être envisagé des sanctions financières, la mise en place de mesures conservatoires ou de mesures d’injonction, ou encore la révocation du conseil d’administration. Cette instance pourrait être envisagée également comme un outil de dialogue entre les parties prenantes des filières sur d’éventuels litiges, tout en assurant dans l’ensemble des processus un traitement équivalent pour les éco-organismes et les systèmes individuels. La mise en place d’une instance indépendante de contrôle et de régulation des filières REP devra faire l’objet d’une modification législative.

Les rapporteurs attendent les conclusions de la mission menée à ce sujet, qui apporteront des précisions sur les rôles possibles attribuables à cette instance, sur les modalités d’organisation et d’articulation avec les administrations, ainsi que sur les moyens nécessaires à son fonctionnement. De ce fait, les rapporteurs proposent à ce stade une recommandation « de principe », ne souhaitant pas se substituer à l’analyse en cours. Ils resteront attentifs aux propositions qui y seront portées, en vue de transformer et d’améliorer le contrôle et la régulation des filières REP.

Proposition n° 59 : Mettre en place une instance indépendante de contrôle et de régulation des filières REP en charge notamment :

– de contrôler l’atteinte des objectifs par les éco-organismes et les systèmes individuels, définis dans les cahiers des charges des filières REP ;

– de prononcer les sanctions en cas de manquement d’un éco-organisme ou d’un système individuel aux obligations prévues par son cahier des charges ;

– d’accompagner les éco-organismes dans la lutte contre les « passagers clandestins », et prononcer les sanctions associées ;

– d’accompagner les parties prenantes des filières REP vers la résolution d’éventuels litiges.

b.   Des moyens humains insuffisants

Pour pouvoir sanctionner et surveiller la bonne application des dispositions de la loi Agec par les éco-organismes ou producteurs ayant mis en place un système individuel, il est nécessaire d’assurer la capacité des ministères compétents à cette fin, et de leurs services déconcentrés. Une très grande majorité des acteurs de l’économie circulaire ont interpellé les rapporteurs sur l’insuffisance des effectifs particulièrement au sein de la DGPR. En effet, il n’y a pas eu ou peu de progression du nombre d’effectifs, malgré un doublement du nombre des filières REP. Plus généralement, le manque d’effectifs au sein la DGE et de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ont été mentionnées, y compris pour les sanctions sur des sujets liés à l’économie circulaire, dépassant le cadre des filières REP. Les rapporteurs appellent ainsi à un renforcement des effectifs au sein de l’ensemble des services des ministères compétents et de leurs services déconcentrés. Ils appellent ainsi à acter le renforcement de ces effectifs lors de la prochaine loi de finances.

Proposition n° 60 : Renforcer les effectifs pour le suivi, le contrôle et la régulation des filières REP au sein des services des ministères compétents (DGPR, DGE et DGCCRF) et de leurs services déconcentrés.

c.   Un accompagnement indispensable des éco-organismes dans la lutte contre les « passagers clandestins »

Plusieurs éco-organismes appellent à un appui supplémentaire des services de l’État dans la lutte contre les « free riders » ou « passagers clandestins », les producteurs qui ne contribuent pas, alors qu’ils sont soumis à une filière REP. Ce phénomène constitue un manque à gagner pour les éco-organismes, d’autant plus important que le montant des éco-contributions augmente, ainsi qu’une concurrence déloyale pour les producteurs à jour de leurs obligations. L’article R. 541-120-1 du code de l’environnement confie aux éco-organismes la responsabilité de sensibiliser les producteurs à leurs obligations, et de mettre en œuvre des procédures permettant d’identifier les « passagers clandestins ». Ils doivent signaler ces producteurs qui ne contribuent pas à la filière REP au ministère chargé de l’environnement, préciser les types et quantités de produits correspondants et les démarches réalisées. Selon les éco-organismes, il reste parfois très difficile d’identifier ces producteurs, notamment les sociétés étrangères mettant des produits sur le marché français. La lutte contre les « passagers clandestins » a par ailleurs été complétée dans la loi Agec par l’obligation d’enregistrement des producteurs auprès de l’Ademe et la saisie d’un identifiant unique pour chaque producteur. Des sanctions sont prévues pour les « passagers clandestins » à l’article L. 541-9-5 du code de l’environnement. Ainsi, une amende peut être établie à un montant maximal de 7 500 euros par unité ou par tonne de produit concerné, et a été complétée par la loi « climat et résilience » d’une astreinte journalière d’un montant maximal de 20 000 euros. Une amende de 30 000 euros est également prévue en cas de défaut de mention de l’identifiant unique par un producteur, suivant l’inscription au registre de l’Ademe.

Lors des auditions, plusieurs éco-organismes ont fait part de leurs difficultés à identifier les « passagers clandestins », la résolution de cette situation devenant de plus en plus importante à mesure que les contributions financières augmentent. Les rapporteurs proposent ainsi d’instaurer un interlocuteur privilégié dans chaque ministère compétent, afin d’apporter une aide et un accompagnement des éco-organismes dans cette identification. Cet interlocuteur pourrait aussi être en charge d’étudier les remontées des éco-organismes, et le cas échéant, d’appliquer les sanctions prévues. L’application des sanctions pourrait aussi être déléguée à l’instance indépendante de contrôle et de régulation des filières REP ou faire l’objet d’un accompagnement particulier par cette dernière, (voir proposition n° 59) si elle venait à être mise en place.

Proposition n° 61 : Instaurer un interlocuteur privilégié au sein des services des ministères compétents (DGPR, DGCCRF et douanes) chargé :

– d’accompagner les éco-organismes dans la procédure d’identification des « passagers clandestins » ;

– d’étudier les signalements des éco-organismes ;

– d’appliquer les sanctions associées.

La visibilité de l’éco-contribution est souvent mentionnée par les éco-organismes comme un outil dans la lutte contre les « passagers clandestins », en complément de l’identifiant unique. En effet, la visibilité de l’éco-contribution sur les factures serait à même de dissuader les fraudeurs, en rendant plus facilement détectable ces producteurs, et ne les exposant plus seulement à une amende administrative, mais à un régime de sanctions pénales liées à de « fausses factures ». L’éco-organisme Ecomaison précise par ailleurs que la visibilité de l’éco-contribution, a minima entre les acteurs professionnels est « souhaitable pour garantir la traçabilité de l’éco participation (notamment lors de certains cas particuliers d’export) et l’équité du système ».

La visibilité de l’éco-contribution, un sujet de débats

La visibilité de l’éco-contribution consiste à répercuter l’éco-contribution du producteur jusqu’au consommateur final, en l’apposant distinctement sur les factures et sur les étiquettes de prix des produits. Elle est mise en place actuellement pour les filières REP des déchets d’équipements électriques et électroniques, et des déchets d’ameublement, et fait l’objet de débats.

Cet affichage permet une plus grande transparence et pédagogie pour le consommateur, visant à le responsabiliser vers des achats durables. Cependant, l’éco-contribution n’est pas comprise par les citoyens, et est considérée comme une taxe supplémentaire, ou comme le coût environnemental du produit, alors que l’éco-contribution est relative au coût de gestion des produits. Par exemple, alors que l’éco-contribution peut être de quelques centimes pour un smartphone, elle serait dix fois plus importante pour une chaise en bois issu de forêts durables, car les recettes liées au recyclage du smartphone sont supérieures à celles de la chaise. Le coût environnemental du smartphone, à l’inverse, est dans la réalité bien plus important que celui de la chaise. Aussi, la visibilité de l’éco-contribution peut apparaître davantage comme une source de confusion pour le consommateur. Diverses mesures de la loi Agec dédiées à l’information du consommateur permettent par ailleurs déjà d’apporter des informations pertinentes sur les produits.

L’impact de la visibilité de l’éco-contribution sur l’incitation des producteurs à la prévention et l’écoconception est également contesté. En effet, la répercussion des coûts aux consommateurs rend les éco-modulations de l’éco-contribution moins incitatives pour les producteurs, les primes et pénalités n’étant plus intégrées dans le prix du produit, mais présentées sur une ligne supplémentaire de la facture du produit.

Cependant, la visibilité de l’éco-contribution permet d’éviter un effet inflationniste sur les prix. Lorsque l’éco-contribution n’est pas visible sur les factures, elle n’est pas séparée du reste du prix. Une inflation de ce prix est alors parfois constatée, des marges successives étant appliquées au prix du produit par les intermédiaires à chaque étape de la chaîne de vente.

Les rapporteurs considèrent que la mise en place de la visibilité de l’éco-contribution doit être maintenue, mais adaptée pour ne pas transformer le principe de « responsabilité élargie du producteur » en principe de « responsabilité élargie du consommateur ». À ce titre, il est proposé d’introduire dans la loi l’obligation de rendre visible l’éco-contribution sur les factures des produits vendus entre professionnels pour l’ensemble des filières REP.

Proposition n° 62 : Introduire dans la loi la visibilité du montant de l’éco-contribution sur les factures des produits vendus entre professionnels soumis aux filières REP.

II.   L’écoconception, premier levier à l’origine d’une transformation des modes de production, s’enracine chez les producteurs

L’écoconception est fondamentale pour allonger la durée de vie des produits et assurer leur valorisation en fin de vie. La loi Agec rend ainsi obligatoire la rédaction de plans quinquennaux d’écoconception, permettant de sensibiliser les producteurs à cet enjeu, et vient renforcer l’éco-modulation des éco-contributions, afin de favoriser les pratiques vertueuses. La lutte contre l’obsolescence programmée invite également les producteurs à repenser la fabrication de leurs produits pour assurer leur réparabilité.

A.   Les plans quinquennaux d’écoconception, outils nécessaires à la prise de conscience environnementale des producteurs

L’article 72 de la loi Agec, qui créé l’article L. 541-10-12 du code de l’environnement, oblige les producteurs à élaborer et mettre en œuvre un plan de prévention et d’écoconception, révisé tous les 5 ans. Ce plan définit notamment les objectifs, et actions qui seront mises en œuvre durant les cinq années suivantes. Ces plans possèdent trois axes majeurs : « réduire l’utilisation de matières premières non renouvelables », « accroître l’incorporation de matières recyclées dans les produits », et « accroître la recyclabilité ».

1.   Des plans d’écoconception pas toujours transmis, avec des contenus hétéroclites

L’article R. 541-101 du code de l’environnement, créé par le décret ([125]) portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs, précise que l’éco-organisme doit publier au moins tous les trois ans une synthèse actualisée des plans de prévention et d’écoconception.

Cette mesure est mise en place, puisque les éco-organismes communiquent aux metteurs sur le marché leurs obligations et qu’ils commencent à recevoir des plans, bien que partiellement. Selon l’Ademe, divers éco-organismes ont proposé une trame à remplir à leurs adhérents, notamment Ecosystem, Refashion, Ecomaison, Valdelia, Citeo, Ecologic et Screlec, ou un questionnaire à remplir. Certains éco-organismes ont par ailleurs co-construit une trame proposée aux producteurs afin d’harmoniser les pratiques. En complément des trois objectifs des plans de prévention et d’écoconception définis par la loi, la trame proposée par les éco-organismes aborde la conception des produits en vue de prolonger leur durée d’usage, ainsi que les services de réparation et accompagnement des consommateurs associés, la conception en vue de limiter les impacts environnementaux, l’optimisation de l’emballage des produits, la traçabilité, et le verdissement des procédés de fabrication et de distribution. Il s’agit donc d’un signal positif de l’engagement des producteurs vers l’écoconception, et de la prise en compte des caractéristiques environnementales des produits. L’accompagnement des éco-organismes peut également prendre d’autres formes : plan commun rédigé par l’éco-organisme, élaboration d’un guide, sessions de formation et d’accompagnement personnalisé… Malgré les efforts d’harmonisation, les industriels font face à une multiplicité de formats de ces plans, et du nombre de plans, un plan pour chaque filière REP devant être élaboré pour un produit.

Des éco-organismes ont publié une synthèse à la fin de l’année 2023, notamment Ecosystem, éco-organisme en charge des équipements électriques ou électroniques et Alcome, en charge des produits du tabac. Ecosystem a reçu environ 1 250 plans de prévention et d’écoconception pour la filière d’équipements ménagers et la filière d’équipements professionnels, représentant respectivement 27 % et 23 % du nombre de producteurs adhérents et 50 % et 37 % des tonnes d’équipements mises sur le marché. En effet, les metteurs sur le marché de faibles volumes ont plus de difficultés à fournir ces plans d’écoconception. La synthèse d’Alcome fait état de 13 répondants sur 29 adhérents, soit 45 % des adhérents. Les résultats ne sont donc pas suffisants, plus de la moitié des producteurs n’ayant pas transmis de plans, ou ces plans étant parfois incomplets. Ils ne traitent souvent presque exclusivement que de la question des matériaux (recyclabilité, et incorporation de matières recyclées). Aucune transmission de ces plans aux pouvoirs publics, ni leur analyse n’ont été prévues par la loi Agec. Le contenu de ces plans est donc actuellement évalué uniquement par les éco-organismes, en charge de publier leur synthèse. Pour le Conseil national de l’économie circulaire (CNEC) ou Halte à l’obsolescence programmée (HOP), la portée et l’utilité de ces plans restent à prouver en l’absence de contrôles extérieurs tiers.

Un travail de pédagogie doit donc être poursuivi par les éco-organismes, pour informer les producteurs de l’obligation de rédaction du plan de prévention et d’écoconception, et les accompagner. Ce travail s’avère plus difficile lorsque le producteur metteur sur le marché n’est pas le fabricant du produit, comme les distributeurs, ou les importateurs. Ces derniers peuvent représenter plus de 50 % voire 80 % des producteurs. Ainsi, l’incitation à la recyclabilité ou l’incorporation de matières recyclées pour ces producteurs non-fabricants est amoindrie, puisqu’ils n’ont pas les connaissances associées à la fabrication des produits. Les distributeurs ou importateurs mettant sur le marché des produits ont parfois peu de possibilités d’influence par rapport à certains fabricants. Il existe tout de même de plus en plus de clauses entre les producteurs non-fabricants et les fabricants pour reconnaître des pratiques d’achat tournées vers l’écoconception, et notamment pour pouvoir bénéficier des primes associées aux éco-modulations.

Il n’est pas possible de dresser un bilan complet de l’élaboration des plans de prévention et d’écoconception, chaque éco-organisme ayant un degré d’avancement différent. Le premier retour d’expérience démontre cependant l’absence de transmission de plans d’écoconception par un certain nombre de producteurs. Lorsque ces plans sont transmis, il est difficile de mesurer, au travers des synthèses des éco-organismes, leur utilité en l’absence de contrôles par un tiers. Les rapporteurs suggèrent ainsi de mettre en place une évaluation du contenu des plans quinquennaux d’écoconception par l’Ademe. Pour cela, l’Ademe deviendrait en charge d’harmoniser les trames à compléter des plans quinquennaux d’écoconception pour chaque filière REP, en se fondant sur les trames déjà proposées par les éco-organismes, et en concertation avec ces derniers et les services de l’État. Les rapporteurs proposent d’imposer aux producteurs une obligation de résultat. À cette fin, les trames proposées par l’Ademe devraient comporter des objectifs de prévention de la production de déchets et d’écoconception, basés sur des indicateurs de performance mesurables, et un calendrier progressif pour les atteindre. La définition de ces objectifs, obligatoire, pourrait être effectuée par les producteurs lors du remplissage du plan quinquennal d’écoconception. L’Ademe serait également responsable de la publication tous les trois ans d’une synthèse du contenu des plans d’écoconception, pour chacune des filières REP, et à l’échelle inter-filières REP. Enfin elle peut être chargée de transmettre la liste des producteurs n’ayant transmis aucun plan d’écoconception aux services de l’État. Cela signifie également que les plans d’écoconception, transmis actuellement par les producteurs aux éco-organismes, seraient désormais transmis à l’Ademe. L’évaluation de ces plans implique une charge importante de travail qu’il convient d’assurer par des moyens humains ou financiers suffisants. L’article L. 541-10-12 du code de l’environnement doit ainsi être modifié pour y inclure l’évaluation des plans quinquennaux d’écoconception par l’Ademe.

Proposition n° 63 : Charger l’Ademe de l’évaluation du contenu des plans quinquennaux d’écoconception et notamment :

– d’harmoniser les trames à compléter par les producteurs pour chaque filière REP, en s’appuyant sur les trames déjà créées par les éco-organismes, en concertation avec les éco-organismes et les services de l’État ;

– d’imposer dans chacune de ces trames la définition obligatoire par les producteurs d’objectifs de prévention à la production de déchets et d’écoconception, basés sur des indicateurs de performance mesurables, et un calendrier progressif pour les atteindre ;

– de publier tous les trois ans une synthèse du contenu de ces plans pour chaque filière REP, ainsi qu’une synthèse globale inter-filières REP ;

– de transmettre la liste des producteurs n’ayant pas transmis de plans quinquennaux d’écoconception aux services de l’État en charge du contrôle et de la régulation des filières REP, afin que les producteurs ne respectant pas cette obligation soient sanctionnés.

Donner à l’Ademe des moyens suffisants pour la mise en place de cette évaluation.

2.   Un accompagnement spécifique dans la rédaction des plans d’écoconception du secteur des emballages

Dans le cadre de la stratégie nationale pour la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique, « Stratégie 3R », des actions spécifiques d’accompagnement des producteurs pour la réalisation des plans de prévention et d’écoconception ont été mises en œuvre. Les producteurs ont ainsi la possibilité d’être associés à un plan commun « tout secteur », présentant les enjeux d’écoconception et pistes d’actions pour les grandes catégories d’emballages, à un plan commun « sectoriel », ou à un plan individuel. Quinze plans sectoriels ont été rédigés, co-construits avec des entreprises et des fédérations professionnelles, et sont représentatifs de différents secteurs d’activité (épicerie, frais, boissons, hygiène, beauté, détergence, biens ménagers…). Un bilan concernant l’élaboration de ces plans est disponible. Citeo a constaté une « mobilisation très encourageante », avec une couverture des plans à 75 % par rapport au gisement total d’emballages mis sur le marché, mais représentant seulement 28 % des producteurs, la majorité étant associée aux plans communs « tout secteur » ou « sectoriels ». Outre la substitution du plastique par un changement de matériau, l’enjeu du recyclage semble bien ancré par les entreprises, qui se tournent davantage vers des solutions mono-matériau et vers la suppression de perturbateurs du recyclage, ainsi que l’intégration de matière recyclée. Les propositions dans les plans quinquennaux d’écoconception concernant le réemploi ou la prévention de la création de déchets restent toutefois encore minoritaires.

Conformément à l’article 72 de la loi Agec, les éco-organismes en charge des emballages ont mis en place un dispositif de signalement électronique des emballages excessifs à la disposition des consommateurs. Les contributions peuvent porter sur le suremballage, mais aussi sur la taille ou le poids de l’emballage qui ne serait pas adapté aux produits. Ces contributions sont ensuite analysées et transmises aux entreprises afin qu’elles mènent des actions correctives d’écoconception. Le bilan 2022-2023 de la mise en œuvre de ce dispositif par Citeo et Adelphe fait état de signalements majoritairement pour les produits de type biscuits, et sur la présence d’un surplus d’éléments d’emballages ou d’emballages surdimensionnés, le matériau plastique étant le plus cité. D’après le bilan des plans de prévention et d’écoconception, les producteurs ont davantage ciblé l’optimisation de l’emballage que la réduction du nombre d’emballages, ou les emballages jugés « inutiles ».

B.   La mise sur le marché de produits plus respectueux de l’environnement est encouragée via un système de bonus-malus

Les producteurs versent une éco-contribution aux éco-organismes afin de financer la prévention et la gestion des déchets. Ces éco-contributions peuvent être modulées par des primes ou des pénalités, qui encouragent les produits vertueux sur des critères de performance environnementale, et pénalisent les produits non vertueux.

1.   La définition d’éco-modulations incitatives, un enjeu pour l’écoconception

L’article 62 de la loi Agec, modifiant l’article L. 541-10-3 du code de l’environnement, a renforcé les éco-modulations des éco-contributions, ouvrant la voie à l’établissement de primes ou pénalités plus ambitieuses. La modulation, sous forme de prime ou de pénalité, peut désormais atteindre jusqu’à 20 % du prix de vente hors taxe d’un produit et être supérieure au montant de l’éco-contribution. Ce sont les producteurs, par l’éco-organisme, qui sont chargés de formuler les propositions de critères de performance environnementale adéquats pour chaque filière, et de fixer le montant des primes ou pénalités. Ces critères peuvent par exemple comprendre la quantité de matière utilisée, la disponibilité de pièces détachées, l’incorporation de matière recyclée, la réparabilité, la recyclabilité, les possibilités de réemploi ou de réutilisation, la certification à des labels environnementaux, l’absence de substances dangereuses ou d’écotoxicité, ou la visée publicitaire ou promotionnelle d’un produit.

Le périmètre des primes et pénalités proposé actuellement pourrait être élargi, afin d’y intégrer de nouvelles modulations. La DGPR indique que l’absence de critère de modulation relatif à l’empreinte carbone des produits, notamment pour la filière textile et batteries, fait souvent l’objet de discussions. Les associations environnementales déplorent l’absence de modulations liées aux quantités de produits mis sur le marché, afin d’encourager une trajectoire de réduction des mises sur le marché. Ce type de modulation est uniquement imposé dans le cahier des charges de la filière REP des emballages ménagers. À ce titre, la proposition n° 37 des rapporteurs prévoit notamment de renforcer la prévention de la production des déchets en introduisant des pénalités liées aux quantités de produits mis sur le marché pour l’ensemble des filières REP. Les rapporteurs proposent l’ajout d’un critère supplémentaire de performance environnementale dans les cahiers des charges des filières REP, consistant à favoriser l’utilisation de pièces issues de l’économie circulaire, lorsque cela s’avère pertinent. En effet, le marché du réemploi et de la réutilisation est aujourd’hui encore balbutiant, notamment pour l’offre de pièces détachées reconditionnées. Cette proposition vise ainsi à permettre le développement de ce marché au sein des filières REP, et de structurer l’offre associée, à l’image du secteur automobile.

Proposition n° 64 : Introduire dans les cahiers des charges des filières REP des primes et des pénalités, dans le cadre des éco-modulations des contributions financières, relatives à l’utilisation de pièces issues de l’économie circulaire, en vue de favoriser le développement de ce marché.

Le retour d’expérience de la DGPR montre que les éco-organismes sont capables de proposer des critères de performance environnementale pertinents, bien que les montants de primes ou pénalités ne sont généralement pas suffisamment incitatifs. La DGPR a donc dû fixer les modulations dans les cahiers des charges de certains éco-organismes. Cela a été le cas pour la filière des emballages ménagers, la filière des textiles, linge de maison et chaussures, la filière de l’ameublement ou la filière des équipements électriques ou électroniques. Pour cette dernière, un projet d’arrêté en consultation en novembre 2023 ([126]) établit des bonus et des malus à des montants beaucoup plus élevés que ceux actuellement en vigueur, jusqu’à 40 euros de primes et 20 euros de pénalités par produit en fonction de leur note à l’indice de réparabilité. Selon HOP, « plus de 50 % des téléphones portables, lave-linge à hublot, aspirateurs, tondeuses à gazon, nettoyeurs haute pression en rayon ne sont concernés ni par la prime, ni par la pénalité » prévus par ce projet d’arrêté. La DGE prévoit, en raison du montant important des modulations, « que ces modulations se répercutent sur les prix des produits, d'autant plus que l'affichage de la modulation sur le produit est obligatoire pour cette filière, conformément à l'article L. 541-10-2 du code de l’environnement, émettant ainsi un signal de prix fort ». L’équilibre entre primes et pénalités fait l’objet de discussions. Selon les industriels, la mise en place de bonus plus importants que le malus, outre l’impact sur les prix payés par les consommateurs, peut engendrer des risques de déséquilibre financier des éco-organismes. Ils souhaitent ainsi que les pénalités puissent financer les primes afin d’assurer l’équilibre du système. Plusieurs associations environnementales regrettent que la mise en place des éco-modulations dans certaines filières REP ne concerne que l’adoption de primes, et qu’aucune pénalité ne soit proposée par les éco-organismes ou dans les cahiers des charges. Elles rappellent ainsi la nécessité de la mise en œuvre de pénalités sanctionnant la mise sur le marché de produits. En effet, alors que les primes poussent à adopter une démarche plus vertueuse sur le plan environnemental, les pénalités sanctionnent les comportements non vertueux. Les primes et pénalités sont donc complémentaires.

Les rapporteurs indiquent par ailleurs que, dans le cadre du projet de révision du cahier des charges des emballages ménagers, la possibilité de déclencher automatiquement un malus pour les éco-organismes n’atteignant pas leurs objectifs de recyclage est étudiée. Des discussions similaires auraient lieu sur le cahier des charges de la filière REP des emballages industriels et commerciaux. Les rapporteurs sont favorables à la mise en place d’un tel malus afin d’inciter les éco-organismes, ou les systèmes individuels, à atteindre leurs objectifs de recyclage, et propose d’étendre ce malus à l’atteinte des objectifs de réemploi et de réutilisation.

Proposition n° 65 : Introduire dans les cahiers des charges des filières REP le déclenchement automatique d’un malus pour les éco-organismes et les systèmes individuels qui n’atteignent pas leurs objectifs de recyclage ou de réemploi et de réutilisation.

Les barèmes d’éco-contribution et d’éco-modulation sont fixés par chaque éco-organisme, sans intervention de l’administration. Cependant, l’éco-modulation peut également être imposée dans le cahier des charges des filières REP. La décision n° 454172 du Conseil d’État ([127]), publiée en avril 2024, rejette la demande de Citeo d’annuler un arrêté modifiant le cahier des charges de la filière des emballages ménagers. Citeo estimait que la procédure de fixation des primes et pénalités, s’agissant de la prise en compte de l’incorporation de matières recyclées, n’était pas conforme car imposée par le Gouvernement et non proposée par l’éco-organisme. Le Conseil d’État considère cependant que la loi Agec donne « la possibilité pour le ministre, sans avoir à être saisi pour accord par un éco-organisme, de fixer lui-même ces modulations par un arrêté, pris après avis de la commission inter-filières ».

L’éco-contribution et l’éco-modulation de ces éco-contributions sont les piliers d’une mise en œuvre ambitieuse des objectifs de la loi Agec. La loi fixe un plafond à l’éco-modulation à 20 % du prix de vente hors taxe, cependant elle ne fixe aucun plancher. L’éco-organisme n’est donc pas tenu de respecter de seuil minimal. Aucun seuil n’est également fixé pour l’éco-contribution. À ce titre, il apparaît donc opportun pour les rapporteurs de fixer dans la loi, pour l’ensemble des filières REP, le principe d’un montant minimal d’éco-contribution, et d’éco-modulation. À cette fin, l’article L. 541-10-3 du code de l’environnement peut être modifié pour y inclure ce principe. Les montants minimaux des éco-contributions et des éco-modulations seront fixés par voie réglementaire. Les industriels appellent toutefois à une vigilance particulière, en cas de fixation des critères d’éco-modulation par l’administration, sur la prise en compte des efforts et investissements déjà effectués par les fabricants pour l’écoconception, notamment en matière de recherche et de développement. Les effets de bord éventuels des critères choisis doivent être également analysés.

Proposition n° 66 : Introduire dans la loi le principe qu’un niveau minimal d’éco-contribution et d’éco-modulation doit être respecté pour chaque filière REP, ce niveau minimal étant fixé par voie réglementaire.

Il est difficile de mesurer l’efficacité des incitations économiques liées aux éco-modulations des éco-contributions. Pour les rapporteurs, il est indispensable que soient menées des études d’élasticité-prix par les éco-organismes, afin d’éclairer le choix des décideurs en matière de politique publique. Ces études permettront de prioriser et mieux calibrer les éco-modulations mises en place, voire d’opter pour des mesures « hors filières REP », qu’il s’agisse de modifications législatives, ou de la fiscalité applicable, ou de proposer des financements spécifiques plus adaptés.

Proposition n° 67 : Imposer aux éco-organismes dans les cahiers des charges des filières REP la conduite d’études d’élasticité-prix, en vue de mieux calibrer les éco-modulations et d’améliorer l’incitation vers une économie circulaire.

2.   Des risques de fraudes et de distorsions de concurrence

Les organisations patronales et les industriels alertent sur les possibles distorsions de concurrence, via ces modulations, si les déclarations des producteurs aux éco-organismes ne sont pas suffisamment contrôlées ou si des « surprimes » ne s’appliquent qu’à certains secteurs. Le contrôle des déclarations relatif aux primes et pénalités inquiète particulièrement sur l’indice de durabilité, suite au projet d’arrêté en consultation en novembre 2023. L’indice de durabilité est en effet fondé sur une déclaration des producteurs, ouvrant la porte à des déclarations erronées et des fraudes, face à l’enjeu financier grandissant des éco-modulations. Un contrôle renforcé de ces indices par la DGCCRF est ainsi plébiscité par l’ensemble des organisations patronales et des industriels. La distorsion de concurrence peut aussi exister, selon les industriels, pour certains secteurs bénéficiant de « surprimes », c’est-à-dire des primes supplémentaires aux primes initiales pour des produits très spécifiques. Dans le cahier des charges de la filière REP des emballages ménagers, par exemple, une prime supplémentaire par kilogramme de matière plastique issue du recyclage incorporée est mise en place pour les barquettes et pots qui incorporent de la matière recyclée issue de barquettes et pots. Enfin, les industriels appellent à la mise en place d’éco-modulations contrôlables. L’octroi de primes est par exemple conditionné, dans le cahier des charges de la filière REP des emballages ménagers, à ce que « les matériaux [soient] recyclés à moins de 1 500 kilomètres de leur lieu de collecte », ce qui peut apparaître comme difficilement contrôlable. Les associations environnementales souhaiteraient par ailleurs une mise en œuvre des malus plus robuste. En effet, afin d’obtenir les primes ou les pénalités, le producteur doit faire une déclaration et transmettre des justificatifs à l’éco-organisme qui est en charge de vérifier ces documents. Selon ces associations, les producteurs ont peu d’intérêt à fournir certaines caractéristiques des produits dans le cadre des malus, et les éco-organismes n’ont pas toujours les moyens de vérifier efficacement ces points. Plus la modulation est forte, plus les risques de fraudes et de distorsions de concurrence sont importants et la question des contrôles devient nécessaire. Enfin, la distorsion de concurrence peut être rencontrée également à l’échelle européenne. Les industriels regrettent ainsi l’absence d’harmonisation des critères d’éco-modulation, pour les filières REP mises en place à l’échelle européenne.

Les éco-modulations sont ainsi considérées par l’ensemble des acteurs comme un bon outil pour favoriser l’éco-conception des produits, mais dont la mise en œuvre doit être strictement réglementée et contrôlée.

C.   La lutte contre l’obsolescence programmée reste difficile à mesurer

L’obsolescence programmée, d’après l’article L. 441-2 du code de la consommation, consiste au « recours à des techniques, y compris logicielles, par lesquelles le responsable de la mise sur le marché d'un produit vise à en réduire délibérément la durée de vie ». Conformément à l’article L. 454-6 du code de la consommation, la pratique de l’obsolescence programmée est considérée comme un délit, puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 euros. Le montant de l’amende peut être porté jusqu’à 5 % du chiffre d’affaires moyen annuel. Il existe différentes formes d’obsolescence programmée : l’obsolescence fonctionnelle liée à l’usage d’un produit d’un point de vue technique, réglementaire ou économique, l’obsolescence esthétique (effets de mode…), ou l’obsolescence logicielle (mise à jour non disponible…).

La loi Agec a instauré diverses mesures dont l’objectif est de lutter contre l’obsolescence programmée, ciblant principalement l’obsolescence fonctionnelle et logicielle. Elle a par exemple interdit les pratiques d’irréparabilité intentionnelle, proposé des obligations liées à la disponibilité des pièces détachées et des plans de fabrication pour les impressions 3D, a mis en place l’indice de réparabilité, informant le consommateur du caractère réparable de son produit, et le « bonus réparation », financé par les fonds de réparation des filières REP.

Les mesures en faveur de l’allongement de la durée de vie des produits sont également discutées au niveau européen, notamment via l’évolution de la directive et des règlements « écoconception », de celle sur le « droit à la réparation » ou encore les directives sur les « allégations commerciales trompeuses » et « allégations environnementales sur les produits et les services ».

1.   Les pratiques empêchant la réparabilité ou le reconditionnement d’un produit existent encore malgré leur interdiction

L’article 25 de la loi Agec, complété par l’article 7 de la loi « Reen » ([128]) interdit les pratiques, y compris logicielles, empêchant la réparation ou le reconditionnement d’un produit hors des circuits agréés. Selon HOP, cette interdiction n’est pas respectée par certains fabricants. En effet les pratiques de sérialisation, associant les numéros de série des composants d’un produit via des micro-puces, sont de plus en plus utilisées sur les smartphones et les ordinateurs portables, notamment sur des pièces fréquemment soumises à des pannes (écran, batterie, caméra…). Le remplacement de certaines pièces détachées dotées de numéros de série provoque alors des désagréments pour le consommateur, sauf si ce dernier passe par un réparateur agréé par le fabricant. La sérialisation permet ainsi de limiter les possibilités de réparation par des réparateurs non-agréés. Ces pratiques restent cependant rares. Rcube recommande ainsi de garantir l’accès à des pièces détachées génériques et compatibles pour éviter ces techniques empêchant la réparabilité.

D’autres pratiques sont également montrées du doigt, dans la filière des véhicules électriques. Un rapport publié par HOP en avril 2024 ([129]), dénonce la pratique d’irréparabilité des batteries par certains constructeurs automobiles. Ces pratiques concernent d’une part l’ouverture des couvercles des batteries, et d’autre part l’accès aux modules des batteries. Les constructeurs automobiles peuvent par exemple sceller les couvercles avec de la silicone, compliquant « considérablement les manipulations des techniciens ». Les couvercles, une fois ouverts, ne peuvent pas toujours être réutilisés. Une résine ou mousse est de plus insérée « entre le boîtier et les modules, ce qui rend quasi impossible de retirer le module ». Ces techniques sont mises en place pour réduire les coûts de production, voire pour inciter à l’achat d’une batterie neuve, la batterie comptant pour 30 à 40 % de la valeur du véhicule. L’association dénonce par ailleurs le manque d’information aux consommateurs sur la réparabilité des batteries dans les modèles en vente. La filière des véhicules est aussi de plus en plus confrontée à des « verrous logiciels », notamment à la sérialisation, ces véhicules ne pouvant plus utiliser de pièces d’occasion. Les constructeurs rendent impossibles les diagnostics ou réparations en conservant un accès exclusif aux données informatiques des véhicules.

Enfin, HOP attire l’attention sur la nécessité de publier rapidement l’arrêté mentionné dans l’article L. 441-3 du code de la consommation. Cet arrêté, nécessaire à l’application de la loi, doit définir la liste des produits et des motifs légitimes, notamment concernant la sécurité ou la santé des utilisateurs, pour lesquels le fabricant n’est pas tenu par l’interdiction des pratiques d’irréparabilité. Les rapporteurs demandent aux services de l’État de publier rapidement cet arrêté, et plus généralement l’ensemble des textes réglementaires nécessaires à la mise en œuvre des dispositions de la loi Agec.

2.   L’obligation de la disponibilité des pièces détachées n’est pas toujours respectée

L’article 19 de la loi Agec porte l’obligation d’information sur la disponibilité ou non des pièces détachées indispensables à l’utilisation d’un produit, et la date jusqu’à laquelle elles sont disponibles sur le marché. L’obligation d’information est imposée d’une part au fabricant ou à l’importateur vis-à-vis du vendeur, et d’autre part répercute cette obligation au vendeur vis-à-vis du consommateur. Les pièces détachées doivent être disponibles au minimum cinq ans à compter de la date de mise sur le marché de la dernière unité du modèle concerné. Cette obligation, portant sur le matériel médical et certaines catégories d’équipements électroniques et électriques, notamment les ordinateurs et smartphones, a été étendue par l’article 30 de la loi « climat et résilience » ([130]) aux outils de jardinage et de bricolage, ainsi qu’aux articles de sport et loisirs. Les données de l’Open Repair Alliance ([131]) indiquent que les besoins de réparation interviennent environ cinq ans après achat pour un ordinateur portable, et deux ou trois ans après pour un smartphone. La disponibilité pendant cinq ans minimum des pièces détachées semble donc plutôt cohérente avec ces données. Cependant, d’après HOP, certaines pièces détachées sont introuvables malgré cette obligation, et des retours de consommateurs indiqueraient un non-respect des années de disponibilité requises. La disponibilité des pièces détachées est l’un des critères de calcul de la note de l’indice de réparabilité. Cette disponibilité devrait devenir dès lors plus facilement contrôlable. Cette obligation n’a pas fait l’objet en 2023 d’un focus dans les enquêtes nationales de la DGCCRF. Néanmoins, la DGCCRF prévoit des contrôles en 2024 sur le respect de l’obligation de mise à disposition des pièces détachées pour les outils motorisés de bricolage et de jardinage, les articles de sport et loisirs et les engins de déplacement personnel motorisés.

Pour les matériels médicaux, la durée de disponibilité des pièces détachées après la fin de commercialisation est systématiquement prise en compte dans les marchés hospitaliers d’après la DGOS. L’Union des groupements d’achats publics (Ugap) ou ResaH imposent une durée minimale de cinq ans, avec possibilité d’engagement pour une durée supérieure. C’est le cas par exemple pour les tensiomètres et les thermomètres sans contact pour lesquels la durée de disponibilité des pièces détachées est de sept ans. La plateforme Union des hôpitaux pour les achats (UniHA) précise que les durées garanties de support des équipements (pièces de rechange ou logiciels) après arrêt de la commercialisation sont effectivement comprises entre cinq et dix ans. Le retour d’expérience ne semble donc pas démontrer de difficultés particulières avec cette disposition, sauf quelques cas de délais très longs pour obtenir la pièce détachée, ou de problèmes de rupture des stocks disponibles.

Toutefois, le point de vigilance reste la « requalification nécessaire de l’équipement par un organisme compétent pour garantir l’homologation et la sécurité des produits utilisant des pièces détachées », par diverses vérifications réglementaires. La question du maintien de la garantie et de la maintenance par les fabricants lorsque les pièces ne sont pas d’origine reste également une problématique souvent rencontrée dans l’utilisation des pièces détachées. Par ailleurs, selon Rcube, outre la disponibilité des pièces détachées, l’un des freins à la réparation reste le prix trop élevé de ces pièces détachées. Couplée aux coûts de la main-d’œuvre, et aux coûts d’équipement, la réparation reste peu compétitive par rapport à l’achat d’un produit neuf. Le sujet de la disponibilité et du coût des pièces détachées reste donc un facteur limitant au reconditionnement, et reste un frein au développement de l’économie circulaire. La Fédération hospitalière de France (FHF) partage ce point de vue et considère que le « marché de la seconde main n’est pas forcément mature ou réalisé par les mêmes fournisseurs que les produits neufs ». Cela conduit à un coût des pièces et des prestations de remplacement qui resterait dissuasif.

La disponibilité des pièces détachées est nécessaire pour pouvoir assurer la réparation des produits concernés. Le marché des pièces détachées est cependant majoritairement tourné vers les pièces détachées « neuves ». Le marché des pièces détachées issues de l’économie circulaire reste naissant. De même, un marché spécifique à des pièces détachées génériques doit pouvoir se développer. Les pièces génériques permettent également une réparation plus rapide et à des prix plus bas, sans dépendre de la disponibilité des pièces de constructeurs. Les rapporteurs invitent ainsi à mettre en place des plateformes de vente de pièces détachées génériques et de pièces détachées reconditionnées. La qualité des pièces détachées, notamment dans le secteur médical, reste un frein à leur utilisation. C’est pourquoi les rapporteurs souhaitent que les pièces détachées de ces filières de vente disposent d’un label de qualité.

Proposition n° 68 : Mettre en place des plateformes de vente de pièces détachées génériques et de pièces détachées reconditionnées. Cette mise en place doit faire l’objet d’études de l’État, et être soutenue au travers d’investissements financiers par l’État, et par les éco-organismes.

Associer un label de qualité à ces pièces détachées.

3.   L’obsolescence logicielle, difficile à identifier

L’obsolescence logicielle, qui peut concerner tout équipement comportant des éléments numériques, consiste en une indisponibilité ou un dysfonctionnement d’un logiciel, détériorant l’usage normal de l’équipement. Par exemple, l’absence de disponibilité de mises à jour récentes dans le système d’exploitation des appareils électroniques empêche le prolongement de la durée de vie et rend l’appareil obsolète. Selon l’étude Eurobaromètre 503 de la Commission européenne menée en 2019, les problèmes liés au fonctionnement d’applications ou de logiciels compteraient pour 18 % des motifs d’achat d’un nouvel appareil numérique.

L’article 27 de la loi Agec introduit des obligations d’information du consommateur sur les mises à jour de logiciels. Les dispositions de la loi Agec relatives à la durée de fonctionnement normal suite à une mise à jour ont été complétées par une ordonnance ([132]), et par la loi « Reen » et apparaissent désormais à l’article L. 111-6 du code de la consommation. Ainsi, le producteur d’un bien doit transmettre au vendeur des informations sur la durée au cours de laquelle les mises à jour logicielles restent compatibles avec la fonctionnalité complète du bien. Le vendeur doit lui-même informer le consommateur de cette durée, et des impacts des mises à jour sur les performances du bien. L’indice de durabilité pour les smartphones et ordinateurs portables est appuyé sur des critères liés à l’obsolescence logicielle, avec par exemple l’engagement sur la durée de disponibilité des mises à jour de sécurité ou corrective, et la possibilité d’installer le système d’exploitation de son choix s’il n’est plus maintenu par le fournisseur.

D’après la DGCCRF, il est très compliqué d’identifier et d’analyser l’évolution des cas d’obsolescence logicielle. Pour mener des investigations à ce sujet, des opérations de visite et de saisie dans les centres de développement des produits, parfois à l’étranger seraient nécessaires. À ce jour, une seule enquête est en cours sur la demande du parquet.

Selon l’Alliance française des industries du numérique (Afnum), les fabricants de produits numériques ont mis en place des mesures visant à allonger la durée de vie de leurs produits. Par exemple, plusieurs fabricants de smartphones auraient allongé la durée de disponibilité de leurs nouvelles versions de système d’exploitation de 3 à 7 ans ou envisagent d’accorder une garantie étendue. Un fabricant d’ordinateurs prévoirait d’allonger la durée de vie d’utilisation de 7 ans supplémentaires. Des programmes seraient également en cours de mise en place parmi ces industriels pour permettre aux utilisateurs d’accéder à des manuels de réparation, des outils ou pièces d’origine pour réparer eux-mêmes leur appareil à moindre coût. L’Afnum table également sur la virtualisation logicielle pour allonger la durée de vie des produits. Cette dernière consiste à rendre disponible un logiciel en ligne plutôt que de devoir le télécharger et l’exécuter sur un ordinateur. Ainsi, elle permet de faire fonctionner certains logiciels sur des ordinateurs vieillissants, avec des capacités de mémoire ou de processeur limitées. Outre l’allongement de la durée de vie par des procédés techniques, l’Afnum note une durée d’utilisation des produits numériques qui augmente progressivement, notamment pour les ordinateurs portables. L’obsolescence esthétique, qui s’exerce sur des équipements qui font l’objet de nombreuses évolutions esthétiques ou technologiques dans des délais proches, diminuerait et pourrait devenir une obsolescence transitoire.

HOP précise que les pannes logicielles « sont de plus en plus présentes en raison de l’augmentation croissante des appareils connectés sur le marché ». Afin de les quantifier et d’améliorer leur prise en charge, les rapporteurs proposent d’inclure les pannes logicielles dans le cadre du « bonus réparation » mis en place pour certaines filières REP.

Proposition n° 69 : Rendre les pannes logicielles éligibles à un financement par les fonds dédiés à la réparation, au sein des cahiers des charges des filières REP.

L’article 27 de la loi Agec prévoit également un rapport au Parlement sur la durée de vie des appareils numériques et connectés, sur l’obsolescence logicielle et sur les options pour allonger la durée de vie de l’équipement. Ce rapport a bien été transmis en février 2021, et propose huit recommandations, à prendre en compte en particulier dans le cadre des négociations européennes des directives « vente de biens » ([133]), « contenus numériques et services numériques » ([134]), et « écoconception ». Ces recommandations portent par exemple sur la formulation d’exigence de dissociation des mises à jour nécessaires et non nécessaires au maintien de la conformité des biens, sur la mise à disposition des logiciels et des mises à jour dès la fin de commercialisation des biens pour faciliter leur réinstallation en cas de dysfonctionnement ou encore sur la conduite d’une étude « destinée à définir précisément les limites des possibilités d’arrêt par logiciel du fonctionnement d’un appareil ». Les rapporteurs retiennent plus particulièrement la première recommandation visant à imposer aux fabricants de fournir gratuitement les mises à jour nécessaires au maintien de la conformité du bien pendant une durée correspondant à la durée d’usage attendue. Le rapport propose par exemple une durée de cinq ans pour un smartphone, ou de dix ans pour une machine à laver.

Proposition n° 70 : Dans le cadre de la révision des directives « vente de biens », « contenus numériques et services numériques », et « écoconception », porter au niveau européen l’obligation pour les fabricants de fournir gratuitement les mises à jour nécessaires au maintien de la conformité d’un produit pendant sa durée d’usage attendue.

III.   Massifier et diversifier les débouchés des biens issus de l’économie circulaire reste indispensable pour assurer leur développement

L’économie circulaire répond à la règle de l’offre et de la demande. Afin d’assurer son développement, il est nécessaire d’assurer un débouché aux produits issus de l’économie circulaire, qu’il s’agisse de produits réemployés ou réutilisés, ou de matières premières issues du recyclage. À cette fin, la commande publique est considérée comme le levier principal d’accélération du changement de modèles de production. L’incorporation de matières issues du recyclage dans la fabrication de produits contribue également à augmenter les capacités de recyclage et à répondre aux objectifs de la loi Agec. Enfin, l’économie de la fonctionnalité, pratique vertueuse en matière d’économie circulaire est un marché naissant, qui doit encore se développer.

A.   L’incorporation de matières recyclées doit être assurée et rester compétitive par rapport à la matière première vierge

1.   Une incorporation prévue par la réglementation pour les bouteilles plastiques, et favorisée par l’éco-modulation des éco-contributions

L’article 61 de la loi Agec, à l’origine de l’article L. 541-9 du code de l’environnement, prévoit le respect d’un taux minimal d’incorporation de matière recyclée pour certains produits, afin d’atteindre les objectifs de recyclage et soutenir ces filières. Les produits concernés et les taux doivent être fixés par décret. Un décret ([135]) publié en décembre 2021 fixe ainsi un taux minimum d’incorporation de plastique recyclé des bouteilles pour boissons composées de polyéthylène téréphtalate (PET) à hauteur de 25 %, à compter du 1er janvier 2025, à l’exception des bouteilles de lait non réfrigérées. À partir du 1er janvier 2030, ce taux minimal est relevé à 30 % et est étendu à l’ensemble des bouteilles pour boissons en plastique. Les éco-organismes en charge des emballages ménagers ou professionnels doivent vérifier le respect de ce taux minimum d’incorporation, et informer l’autorité administrative en cas de non-respect. Ces taux sont en réalité la transposition en droit français des objectifs contraignants d’incorporation prévus par la directive « plastiques à usage unique » ([136]). Il a donc été choisi l’adoption d’un taux d’incorporation européen. Dans le cadre de la révision du règlement « emballages » au niveau européen, l’introduction d’obligations d’incorporation de matières recyclées supplémentaires est débattue. La Commission européenne, dans sa proposition initiale, fixe des objectifs d’incorporation de plastique recyclé dans les emballages qui en contiennent pour les produits sensibles au contact alimentaire, les emballages plastiques ainsi que les bouteilles à usage unique.

Seul le taux minimal d’incorporation de plastique recyclé des bouteilles pour boissons a été fixé par voie réglementaire, l’État préférant se reposer sur les filières REP, et plus particulièrement sur l’éco-modulation, pour soutenir l’incorporation. Le cahier des charges ([137]) de la filière REP des emballages ménagers prévoit ainsi des primes de 0,05 à 0,45 euro par kilogramme de matière plastique incorporée issue du recyclage d’emballages, selon la résine plastique : polytéréphtalate d’éthylène (PET), polyéthylène basse densité (PEBD), polyéthylène haute densité (PEHD), polypropylène (PP) ou polystyrène (PS). Des primes supplémentaires peuvent être accordées pour les PET et PEBD, notamment sur des barquettes et pots. Cependant, pour bénéficier de ces primes, le producteur doit incorporer au minimum 10 % de matières plastiques issues du recyclage des emballages ménagers, industriels ou commerciaux. À partir du 1er janvier 2025, pour les bouteilles pour boisson en PET, une prime sera accordée pour la part d’incorporation dépassant le taux d’incorporation de 25 % déjà prévu par la réglementation. De plus, l’origine géographique doit être justifiée pour l’obtention de la prime, les matériaux devant être recyclés à moins de 1 500 kilomètres de leur lieu de collecte.

Selon la Federec, la Fnade et le Snefid, le rôle des éco-organismes doit être renforcé sur l’amont des filières REP, l’écoconception, et les incitations à l’intégration de matières recyclées doivent être renforcées. Pour permettre le développement de filières de recyclage, un marché pour la matière première issue du recyclage doit exister et le modèle économique associé doit être rentable. Ainsi, l’enjeu est d’assurer la compétitivité du prix de production et de vente de la matière première issue du recyclage par rapport au prix de la matière première vierge. Chaque filière de recyclage possède des contraintes propres, des débouchés et un cours des matières premières recyclées spécifiques.

2.   La matière première issue du recyclage subit la concurrence des matières premières vierges

En 2022, 39,8 millions de tonnes de matières premières issues du recyclage ont été produites et vendues en France (métaux ferreux ou non ferreux, bois, papiers-cartons, verre, plastiques, textiles…) ([138]).

La filière des plastiques est particulièrement sensible aux fluctuations des marchés de la matière vierge. Le rapport ([139]) de Plastics Europe montre une forte croissance du recyclage des plastiques et de l’incorporation de plastiques recyclés au niveau européen ces dernières années. Les résines recyclées représentent 12,6 % de la consommation de plastique européenne en 2022, soit 6,8 millions de tonnes. Cette incorporation progresse particulièrement dans le secteur de l’emballage, du bâtiment et de l’agriculture, avec des taux d’incorporation de matières recyclées respectifs de 9,7 %, 22,7 % et 37,5 %. Federec estime à environ 755 100 tonnes la matière première issue du recyclage produite et vendue en 2022 en France, chiffre stable par rapport à 2021. Cependant, un effondrement de la demande des matières premières plastiques recyclées a eu lieu en 2023, en faveur des matières premières vierges pétro-sourcées, créant un véritable retour en arrière sur l’incorporation de contenu recyclé. Entre mai 2022 et mai 2023, les principaux plastiques vierges pétro-sourcés ont enregistré une baisse de prix de l’ordre de 25 à 40 % en fonction du type de plastique concerné ([140]), suite à la baisse du prix du pétrole. Pour des raisons économiques, les producteurs ont ainsi fortement réduit en 2023 leur utilisation de plastiques recyclés dans la production d’emballages neufs. D’après le Syndicat national des régénérateurs de matières plastiques (SRP), la production française de plastique recyclé a atteint environ 571 000 tonnes, alors que la demande française était de 443 000 tonnes en 2023 ([141]). Peu de producteurs utilisant le PET ont maintenu l’incorporation de matière issue du recyclage, préférant attendre l’entrée en vigueur de l’obligation d’incorporation. Des difficultés sont alors rencontrées par les acteurs des filières de recyclage pour trouver des débouchés aux tonnes de matières premières plastiques issues du recyclage. Pour SRP, l’exportation des produits aurait atteint 20 %. Alors que des investissements conséquents ont été mis en place pour augmenter les capacités de recyclage, les centres de recyclage tournent au ralenti.

Sans débouchés viables et constants, les acteurs du recyclage peinent ainsi à écouler les stocks de matières, fragilisant l’économie circulaire. Afin d’assurer des débouchés à la matière première plastique issue du recyclage, les rapporteurs proposent d’étendre les obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées à tous les secteurs d’activité. Ces obligations d’incorporation, qui concerneraient tous les plastiques présents dans l’ensemble des secteurs dans lesquels ils sont utilisés (pas uniquement pour les emballages), visent à créer une plus forte demande de matières recyclées et ainsi assurer la viabilité du recyclage. Pour cela, il est nécessaire de soutenir l’introduction d’obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées au niveau européen, notamment dans le cadre de la révision de la directive « plastiques à usage unique » et du règlement « emballages » pour l’ensemble des produits en plastique soumis à une filière REP. Les rapporteurs appellent également à étudier la possibilité de mettre en place au niveau national des obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées. À cette fin, un rapport du Gouvernement permettrait d’évaluer les secteurs pour lesquels il apparaît pertinent d’étendre les obligations d’incorporation, selon un calendrier progressif.

Proposition n° 71 : Étendre les obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées à tous les secteurs d’activité :

– en demandant au Gouvernement la remise d’un rapport sur la possibilité, au niveau national, de mettre en place des obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées. Ce rapport évaluera les secteurs pertinents à cette fin, et proposera un calendrier progressif relatif aux obligations d’incorporation envisagées ;

– en soutenant au niveau européen l’introduction d’obligations d’incorporation de matières plastiques recyclées pour l’ensemble des produits en plastique soumis à une filière REP, notamment dans le cadre de la révision de la directive « plastiques à usage unique » et du règlement « emballages ».

Les acteurs du recyclage dénoncent par ailleurs l’augmentation des importations à bas prix de matières premières vierges, mais également des matières premières issues du recyclage en provenance de marchés asiatiques. En mars 2023, la Commission européenne a ouvert, à ce titre, une enquête antidumping concernant les importations de PET originaire de Chine, sur la base d’une plainte de PET Europe, représentant de l’industrie européenne du PET. PET Europe estimait que l’industrie européenne était désavantagée par rapport aux producteurs chinois qui proposent des prix bas pour les PET vierge ou recyclé alors que la tendance au niveau mondial est à la hausse. Cette enquête a mené à la publication d’un règlement européen instituant un droit antidumping sur les importations de certains types de PET originaires de Chine en mars 2024 ([142]).

Les acteurs du recyclage indiquent également faire face à des difficultés sur l’incorporation de matières premières issues du recyclage pour le bois de classe B, c’est-à-dire les déchets de bois non dangereux, faiblement traités, peints ou vernis (bois d’ameublement par exemple) faisant l’objet d’une concurrence entre valorisation matière et énergétique, et les métaux ferreux et non ferreux. D’autres types de matériaux, cependant, possèdent des performances de recyclage et d’incorporation stables malgré les fluctuations économiques, comme le verre et les textiles.

B.   L’achat public doit être exemplaire

La commande publique, représentant 8 % du produit intérieur brut (PIB) ([143]), est considérée comme un levier de transformation de l’économie et de mise en œuvre des politiques publiques. Elle a donc un rôle majeur à jouer en matière d’économie circulaire. En créant des débouchés pour une offre plus durable et circulaire, elle incite les acteurs économiques à accélérer le changement de leurs modèles de production. La loi Agec a ainsi constitué pour de nombreux acteurs publics un « premier pas vers la systématisation de critères verts dans la commande publique » d’après le Commissariat général au développement durable.

La loi Agec a mis en place des obligations pour la commande publique et fait partie d’un ensemble global de textes renforçant la transition écologique dans la commande publique. Elle a été complétée par la loi « climat et résilience » ([144]) (article 35), la loi « industrie verte » ([145]) (article 29) et par le plan national pour des achats durables 2022-2025, comportant des considérations environnementales et sociales pour les marchés publics. Par ailleurs, le projet de règlement européen « écoconception », en cours de publication, prévoit aussi des obligations en termes de marchés publics écologiques.

1.   La part minimale des achats publics devant être issue de l’économie circulaire, un levier puissant sur l’offre

L’article 58 de la loi Agec impose que les biens acquis annuellement par l’État ou les collectivités soient issus de l’économie circulaire (du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées) dans des proportions entre 20 % et 100 % en fonction du type de produit. Des dérogations sont prévues pour les contraintes de défense nationale, ou les contraintes techniques liées à la nature de la commande publique. Le décret ([146]) fixant la liste des produits concernés et les proportions associées a été publié en mars 2021. Ce décret prévoit des taux minimaux de 20 %, le seuil minimum proposé par la loi Agec, sauf pour les livres et la papeterie, ou le papier d’impression pour lesquels ce taux est fixé à 40 %. Il prévoit également l'obligation pour les acheteurs publics de déclarer à l’observatoire économique de la commande publique (OECP) les dépenses relatives aux achats de biens issus de l’économie circulaire.

Les modalités d’application de ces textes réglementaires sont considérées par les acteurs publics comme peu claires, notamment sur le périmètre et les familles de produits, et inadaptées à leurs outils et au processus d’achat public.

La mise en œuvre de l’article 58, y compris les dispositions du décret précité, a fait l’objet par le commissariat général au développement durable d’un rapport au Parlement comprenant une analyse quantitative et qualitative, dont le bilan est public depuis juillet 2023 et contient 14 propositions. L’article 58 de la loi Agec apparaît comme un réel levier sur l’offre. 40 % des fournisseurs ont indiqué avoir modifié leur offre suite à la publication du décret. Du point de vue de la demande, 72 % des acheteurs ont déclaré avoir acheté des produits issus de l’économie circulaire depuis mars 2021. Ce chiffre est à relativiser, certains de ces achats ayant déjà lieu avant l’entrée en vigueur de la mesure. L’Ugap aurait aussi constaté une multiplication par cinq entre fin 2021 et fin 2022 des références des produits de son catalogue relevant du champ de l’économie circulaire ([147]), et plus particulièrement pour les produits contenant de la matière recyclée. La mise en place de bonnes pratiques a par ailleurs été remarquée. Les obligations de la loi Agec sont systématiquement rappelées dans les cahiers des clauses administratives particulières, et des allotissements plus fins avec des lots dédiés « loi Agec » sont intégrés dans les marchés. Des clauses incitatives pour l’intégration d’équipements issus de l’économie circulaire et des clauses de réexamen visant un verdissement progressif des achats sont rédigées. Cependant, l’appropriation reste encore insuffisante de la part des acheteurs publics, et les objectifs ne sont pas encore atteints. Les catégories de produits qui dépassent le seuil des 20 % de part de dépenses annuelles consacrées à de produits issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées concernent les sacs d’emballage (45 %), les véhicules (23 %), les papiers d’impression (32 %), le mobilier urbain (44 %) et les bâtiments modulaires (36 %). Les cartouches (15 %) et photocopieurs (16 %) sont légèrement en dessous des 20 % tandis que les autres catégories, notamment les articles de papeterie, le matériel informatique, et les téléphones restent bien en dessous du seuil. La part de dépenses est surtout liée aux produits intégrant des matières recyclées. En effet, la part des dépenses annuelles consacrée au réemploi est inférieure à 3 % pour l’ensemble des catégories de produits sauf pour les bâtiments modulaires (27 %) et les cartouches d’encre et toner (10 %).

Le commissariat général au développement durable a ainsi pris en compte cette évaluation et les diverses remarques des acteurs de l’achat public, afin de proposer de nouveaux textes réglementaires. Un nouveau décret ([148]) publié en février 2024 modifie les règles fixées dans le précédent décret. Les objectifs chiffrés sont réévalués et sont plus ambitieux, avec une progression pluriannuelle jusqu’en 2030. Le don est désormais pris en compte dans l’atteinte des objectifs, afin de valoriser cette pratique vertueuse sur le plan environnemental. Enfin, les catégories de produits sont revues, avec notamment l’abandon de la nomenclature « CPV » (« Common Procurement Vocabulary »), relative au vocabulaire commun pour les marchés publics de l’Union européenne, ou une amélioration du système de classification des achats de marchés publics, en vue de simplifier et adapter les outils à la disposition des acheteurs publics.

Divers freins ont été identifiés par les collectivités locales au développement de l’achat de biens issus de l’économie circulaire. Tout d’abord, des difficultés d’obtention de biens couvrant la totalité des besoins des collectivités ont été constatées, les achats en nombre important d’unités n’étant pas toujours possibles. Pour certains équipements comme le matériel informatique, les collectivités recherchent une standardisation des équipements, demande difficile à satisfaire pour les équipements issus du réemploi ou de la réutilisation. La question de la sécurité des données reste l’objet d’inquiétudes, et est également considérée comme un frein à l’achat de matériels issus du réemploi ou de la réutilisation. Pour accompagner les services de l’État concernés par l’application de l’article 58 de la loi Agec sur cette question, l’agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) a publié en octobre 2023 des recommandations pour le reconditionnement des ordinateurs de bureau ou portables. Bien qu’une amélioration soit constatée, les collectivités font état d’une lente adaptation des catalogues des centrales d’achat, et de peu ou pas d’offres matures pour certains produits spécifiques, comme les équipements de protection individuelle, ou qui ne concernent que quelques collectivités (matériel de signalisation ou bac de collecte). Enfin, la connaissance des personnels des services de l’État et des collectivités territoriales en charge de ces achats doivent être renforcées. L’économie circulaire n’est pas encore un automatisme lors des appels d’offres.

Des difficultés de remontées d’informations et de suivi des mesures de la loi Agec sont également rencontrées dans la détermination de la part d’achat pour le calcul des obligations prévues par l’article 58 de la loi Agec. La part d’achat se calcule en pourcentage du montant total hors taxe de la dépense consacrée à l’achat relatif à l’économie circulaire, de chaque catégorie de produits, au cours d’une année civile. L’obligation s’applique de manière annuelle et non pas par marchés de fournitures, nécessitant un exercice de répartition des dépenses. Le travail sur les données est par ailleurs complexe pour certaines collectivités qui possèdent des systèmes informatiques séparés pour les opérations financières et d’achat, permettant difficilement de comparer ces données.

Le rapport au Parlement du commissariat général au développement durable relatif à l’article 58 de la loi Agec propose que soit menée une étude sur la possibilité d’étendre l’article 58 à tous les acheteurs soumis au code de la commande publique. En effet, actuellement seuls les acheteurs de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements intercommunaux sont concernés, pour environ 46 % du montant total des marchés notifiés en 2021, soit 59 milliards d’euros ([149]). Les autres acheteurs soumis au code la commande publique, notamment les établissements publics pourraient y être ajoutés. L’exclusion de l’article 58 n’empêche cependant pas ces acheteurs d’appliquer le dispositif et d’engager une démarche volontaire « circulaire ». Les rapporteurs soutiennent l’extension du périmètre de l’article 58 à tous les acheteurs soumis au code de la commande publique.

Proposition n° 72 : Étendre l’application de l’article 58 de la loi Agec à tous les acheteurs soumis au code de la commande publique.

2.   Le don et la réparabilité sont désormais pris en compte dans les marchés publics

L’article 55 de la loi Agec vise à inciter, au travers des achats publics, les services de l’État et des collectivités territoriales, à « réduire la consommation de plastiques à usage unique, la production de déchets et [à privilégier] les biens issus du réemploi ou qui intègrent des matières recyclées ». L’indice de réparabilité, outil mis en place pour les consommateurs, permet de connaître le caractère « réparable » du produit acheté, en vue d’allonger la durée du produit. L’article 15 de la loi « Reen » ([150]) vient compléter l’article 55 de la loi Agec pour instaurer la prise en compte de cet indice, à compter du 1er janvier 2023, lors d’achats publics de produits numériques. Selon France urbaine, la mise en œuvre de cet indice dans les marchés publics est progressive, mais pas encore automatique. Il fait ainsi rarement partie des exigences du cahier des charges, mais est souvent demandé, et parfois pris en compte dans l’analyse des offres. La direction des achats de l’État a confirmé aux rapporteurs qu’elle exige dans les marchés interministériels des téléphones mobiles ou ordinateurs portables ayant un indice de réparabilité élevé. Elle attire l’attention sur une incohérence : cet indice n’est actuellement mis en place que pour les produits destinés aux ménages, et ne s’applique pas aux produits destinés aux professionnels. L’article L. 541-9-2 du code de l’environnement dispose actuellement que « cet indice vise à informer le consommateur sur la capacité à réparer le produit concerné ». Le guide réalisé en 2022 par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la prise en compte de l’indice de réparabilité dans les achats publics ([151]), apporte des précisions sur la mise en œuvre de cet article. Il distingue ainsi trois catégories de produits : ceux destinés exclusivement à la vente aux consommateurs, ceux destinés à la vente aux consommateurs et aux professionnels, et ceux destinés exclusivement à la vente à des professionnels. Ce rapport précise que « les modèles de produits destinés exclusivement à la vente à des professionnels ne sont pas soumis à l’obligation de calcul et d’affichage d’un indice de réparabilité ».

Les rapporteurs considèrent que les produits destinés exclusivement à la vente à des professionnels doivent être soumis à l’obligation de calcul et d’affichage de l’indice de réparabilité, ou de l’indice de durabilité, au même titre que les produits destinés à la vente aux consommateurs. À cette fin, ils proposent de préciser le périmètre applicable à l’indice de réparabilité et à l’indice de durabilité à l’article L. 541-9-2 du code de l’environnement pour y inclure explicitement les catégories de produits concernées.  

Proposition n° 73 : Préciser le périmètre applicable à l’indice de réparabilité et de l’indice de durabilité, à l’article L. 541-9-2 du code de l’environnement, pour y inclure explicitement :

– les produits destinés exclusivement à la vente aux consommateurs ;

– les produits destinés exclusivement à la vente aux professionnels ;

– les produits destinés à la vente à des consommateurs et à des professionnels.

La prise en compte de la disponibilité des pièces détachées reste encore émergente dans le cadre des marchés publics, et est généralement prise en compte indirectement par des extensions de garantie.

L’article 60 de la loi Agec impose aux services de l’État, et aux collectivités territoriales l’achat de pneumatiques rechapés, sauf pour les véhicules d’urgence et les véhicules militaires, le rechapage permettant d’allonger la durée de vie d’un pneu et d’économiser des ressources naturelles. Le guide d’Intercommunalité de France sur la commande publique responsable ([152]) rappelle l’obligation de lancer des marchés portant sur les pneus rechapés, et semble indiquer que les collectivités « regimbent à accepter les pneus rechapés lors de leurs achats publics ». Outre une demande encore naissante en pneus rechapés, l’observatoire des achats responsables (ObsAR) précise par ailleurs que l’offre de pneus rechapés est faible. En effet, il n’y aurait qu’un seul soumissionnaire qui présente actuellement moins de références que le nombre souhaité dans le cahier des charges d’un appel d’offres. Pour justifier du peu de références proposées, le soumissionnaire a apporté la preuve que ces références n’existaient pas sur le marché. Pour accompagner le développement de l’offre, le rechapage a été intégré dans les objectifs fixés dans le cahier des charges de la filière des pneumatiques ([153]). Ainsi, pour les véhicules légers, l’objectif de rechapage est de 4 % des pneus en 2024 et jusqu’à 10 % en 2028. Pour les véhicules lourds, l’objectif est de 50 % en 2028. L’offre pourrait donc évoluer pour les pneus rechapés dans les prochaines années.

Le don des services de l’État et des collectivités territoriales existait déjà avant la loi Agec. L’article 38 étend le don de matériels informatiques pour lesquels les services de l’État ou de l’un de ses établissements publics n’ont plus l’emploi, aux associations de soutien scolaire, et aux associations reconnues d’utilité publique. L’article 16 de la loi « Reen » flèche ces équipements informatiques vers le réemploi ou la réutilisation, sauf lorsqu‘ils ont atteint plus de dix ans, et sont alors orientés vers le recyclage. Un décret ([154]) prévoit ainsi à partir du 1er janvier 2025 l’objectif de 50 % de réemploi et de réutilisation des matériels informatiques réformés. Les services concernés ont le choix, en vue de leur réemploi ou réutilisation, de les céder à une autre personne publique, de les vendre ou les proposer au don, notamment aux associations. Le don des services de l’État et des collectivités territoriales s’effectue au travers d’un site internet, « Dons, enchères, domaine » ([155]). En 2023, environ 30 000 biens ont été publiés sur cette plateforme informatique de dons, dont 10 000 ont été attribués, à parts égales à des services de l’État et à des associations. Selon l’observatoire des achats responsables (ObsAR), des présentations de cette plateforme du don sont organisées régulièrement par la direction nationale d’interventions domaniales (DNID), à destination des personnels des directions et des services d’achat de l’État.

3.   Pour répondre aux enjeux de l’économie circulaire, l’achat local dispose de peu de marge de manœuvre dans la commande publique

Les marchés publics ont un rôle prépondérant à jouer dans la prise en compte des enjeux environnementaux. La considération de la performance environnementale peut parfois donner lieu à des préférences locales, en prenant en compte par exemple les calculs de coûts carbone ou les bénéfices de l’économie circulaire. Or, favoriser des prestataires locaux dans les marchés publics est illégal. La prise en compte d’une proximité géographique dans les marchés publics est également contraire au droit de l’Union européenne, car pouvant discriminer les entreprises d’autres États membres, conformément à la directive relative à la passation des marchés publics ([156]). Cette directive ne s’applique pour les marchés publics qu’à partir d’un certain seuil, par exemple 134 000 euros pour les marchés publics de fournitures et de services passés par des autorités publiques centrales. La réponse du ministre de l’économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique à une question écrite ([157]) en juin 2023 précise cependant que « la jurisprudence européenne exige le respect des règles fondamentales du traité et notamment du principe de non-discrimination y compris pour les contrats de la commande publique qui sont inférieurs aux seuils européens et n'entrent pas dans le champ des directives européennes ». Il y est également précisé que l’aspect géographique seul ne constitue pas l’assurance pour un acheteur public qu’il bénéficie de la solution la plus vertueuse. À ce titre, il n’est ainsi pas envisageable, pour le Gouvernement, d’ajouter des dispositions dans le code de la commande publique favorisant des soumissionnaires en fonction de leur situation géographique.

Le code de la commande publique prévoit toutefois des solutions alternatives pour considérer les offres à plus haute performance environnementale. Cette dernière peut être prise en compte à plusieurs niveaux, lors de la définition des besoins, de l’analyse des offres, et enfin dans les clauses du marché finalisé. Conformément à l’article L. 2111-1 du code de la commande publique, les objectifs liés au développement durable doivent être définis dès la préparation du marché. Par la suite, pour l’attribution du marché à un soumissionnaire, la loi « industrie verte » ([158]) a modifié l’article L. 2152-7, qui précise désormais que l’offre économiquement la plus avantageuse peut aussi être déterminée sur d’autres critères, y compris sur des aspects environnementaux. Enfin d’autres outils sont à la disposition des collectivités territoriales ou des services de l’État permettant de s’affranchir des règles de la commande publique, tels que l’absence de mise en concurrence pour des marchés inférieurs à 40 000 euros, ou pour des marchés de travaux, fournitures ou services innovants de moins de 100 000 euros. Les marchés ou lots réservés permettent également de favoriser les structures employant des personnes handicapées ou défavorisées, y compris localement.

4.   La formation des fonctionnaires et des élus doit continuer et s’accentuer

Conformément à l’article 124 de la loi Agec, et depuis le 1er janvier 2021, les fonctionnaires qui le souhaitent peuvent bénéficier d’une formation en matière d’économie circulaire, de prévention et de gestion des déchets. Les élus y sont également encouragés. La direction des achats de l’État a, à cette fin, mis en place une offre de formation interministérielle sur les achats écologiques. Les sujets d’économie circulaire, de prévention ou de gestion des déchets sont inclus dans cette formation transversale, les segments d’achats concernés par l’article 58 étant particulièrement visés. Dans le cadre du plan national des achats durables 2022-2025, le commissariat général au développement durable met à disposition des acheteurs publics et privés une formation en ligne (Mooc) ([159]) gratuite dédiée aux fondamentaux des achats durables dont l’économie circulaire. Bénéficier d’une formation en matière d’économie circulaire reste une possibilité et n’est pas une obligation. Selon la direction des achats de l’État, il n’est pas souhaitable de rendre cette formation obligatoire car « le fait de rendre une formation obligatoire plutôt qu’une autre pourrait avoir des effets pervers (faible investissement des stagiaires voyant leur formation comme un passage obligé, effet d’éviction de l’offre de formation sur les sujets obligatoires par rapport aux sujets non obligatoires) ».

L’ObsAR considère qu’il faut encore amplifier la formation des acheteurs et des prescripteurs à l’économie circulaire et à l’analyse du cycle de vie. Les outils de formation proposés ne seraient pas encore à la hauteur des ambitions. France urbaine constate néanmoins une acculturation progressive des agents des collectivités qui tendent « à intégrer les questions de réemploi et de réutilisation avant même l’expression des besoins, dès le stade de la programmation ». Selon la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), peu de collectivités indiquent avoir mis en place une offre de formation à ce sujet au sein de leur service.

La DGOS précise que les professionnels de la fonction publique hospitalière bénéficient de formations en matière d’économie circulaire, de prévention et de gestion des déchets, « dans le cadre des orientations prioritaires de compétences ». Plusieurs axes de formation sont proposés, notamment « gérer les déchets d’activités de soins en conciliant sécurité sanitaire des personnes et déploiement d’une économie circulaire », ou « accompagner les professionnels du système de santé à l’urgence climatique et les former à la transformation écologique du secteur ». Ces formations traitent de la gestion des déchets tout en prenant en compte les risques sanitaires, et notamment sur l’élimination des déchets d’activités de soins à risques infectieux, les biodéchets, ou le gaspillage alimentaire. Des formations spécifiques sur les achats au sein du secteur de la santé traitent de l’économie circulaire, abordée sous l’angle « cycle de vie » et « éviter - réduire », pour réduire la production de déchets et favoriser le réemploi. La DGOS indique qu’environ 263 personnes ont été formées depuis 2022, dans le cadre de l’organisation de 29 sessions de formation. La FHF précise que diverses formations internes ont été proposées, dont une en 2023 avec l’ensemble des référents d’achat des groupements hospitaliers de territoire, ou encore dans les services de soins par les responsables hygiènes ou déchets, ou dans les instituts paramédicaux. Plus généralement, une sensibilisation des professionnels est fréquemment mise en place dans les établissements hospitaliers (kits pédagogiques, stands, formations).

La commande publique étant considérée comme l’un des principaux leviers de l’économie circulaire, elle se doit d’être exemplaire. À ce titre, les rapporteurs considèrent qu’il est indispensable de continuer d’assurer la mise en place de formations sur l’économie circulaire pour l’ensemble des agents publics qui le souhaitent et plus particulièrement pour les acheteurs publics, au travers du plan national des achats durables 2022-2025. Pour répondre aux objectifs de l’article 58 de la loi Agec, imposant une part minimale des achats publics issue de l’économie circulaire, l’accompagnement des acheteurs publics doit être renforcé, afin qu’ils disposent de connaissances précises sur la réglementation et sur les spécificités des produits issus de l’économie circulaire. Les acheteurs publics doivent ainsi avoir l’assurance de la qualité des produits proposés, et de leur sécurité, par une maîtrise des risques sanitaires ou des risques informatiques.

Proposition n° 74 : Renforcer l’accompagnement des fonctionnaires et des élus vers une appropriation générale de l’économie circulaire, et des acheteurs publics vers des connaissances plus ciblées, notamment pour la mise en œuvre de l’article 58 de la loi Agec :

– en rendant obligatoire une formation transversale sur l’économie circulaire, s’appuyant notamment sur le déploiement du plan national des achats durables 2022-2025 et les actions mises en œuvre dans ce cadre ;

– en proposant des formations thématiques spécifiques sur la mise en œuvre de l’article 58 de la loi Agec, en vue d’améliorer la connaissance sur les caractéristiques des produits de l’économie circulaire, notamment en termes de sécurité et de qualité, et en rendant ces formations obligatoires pour les acheteurs publics.

C.   La transition attendue vers une économie de la fonctionnalité peine à s’engager

Considérée comme une alternative au modèle économique basé sur la production, l’économie de l’usage et de la fonctionnalité privilégie l’usage plutôt que la vente d’un produit. L’économie de l’usage et de la fonctionnalité est une location comportant une dimension environnementale et sociale. Elle découple la valeur ajoutée d’un produit de sa consommation d’énergie ou des matières premières utilisées, permettant ainsi de préserver les ressources naturelles. Ce modèle économique vise donc à proposer au consommateur une nouvelle approche de consommation. Il propose des offres davantage adaptées aux besoins, sans chercher à maximiser le volume de vente. Il est par ailleurs souvent admis que le fournisseur du bien au sein de l’économie de l’usage et de la fonctionnalité cherche à allonger la durée de vie de ce bien. Cependant, une vigilance particulière doit être accordée au devenir du produit une fois sa période de location terminée afin de s’assurer qu’il est réellement réemployé.

L’article 68 de la loi Agec prévoit la transmission d’un rapport au Parlement sur les actions mises en œuvre pour permettre le développement de l’économie de l’usage et de la fonctionnalité. Ce rapport a été publié en avril 2022. Il dresse un état des lieux des mesures adoptées par les entreprises, les collectivités territoriales et l’État et ses agences pour favoriser l’économie de la fonctionnalité ainsi que des freins rencontrés. L’économie de la fonctionnalité, bien qu’elle continue à s’implanter peu à peu chez ces différents acteurs, reste encore très modeste et peine à progresser.

Au sein des entreprises, l’économie de la fonctionnalité se développe timidement depuis le début des années 2010. Selon le rapport au Parlement, l’économie de la fonctionnalité peut être mise en œuvre quelle que soit la taille de l’entreprise, la nature de son activité ou son statut. Elle ne concerne pourtant que quelques projets ou expériences limitées, et ne s’ancre pas encore dans les stratégies globales des entreprises. Elle peine à se développer, notamment à cause d’investissements « de départ » pouvant être importants et à une rentabilité imprévisible.

La commande publique est considérée comme un levier important du développement de l’économie de l’usage et de la fonctionnalité. L’article 58 de la loi Agec prévoit des objectifs d’achat par les services de l’État ou les collectivités territoriales de biens issus du réemploi ou de la réutilisation, ou intégrant des matières recyclées. Cependant, afin d’atteindre ces objectifs, il n’est pas possible de comptabiliser des achats de services ou prestations tels que l’économie de la fonctionnalité, ce qui peut constituer un frein à son développement. Les appels d’offres restent ainsi davantage orientés vers l’acquisition de produits, sans y inclure de possibilité d’usage des produits. Au même titre que la fixation d’objectifs d’achats de biens issus de l’économie circulaire dans l’article 58 de la loi Agec, des objectifs d’achats de services ou prestations issues de l’économie de la fonctionnalité peuvent être fixés dans la loi. Les rapporteurs proposent ainsi d’introduire une part minimale d’achats publics de services ou prestations issue de l’économie de la fonctionnalité, en vue de favoriser le développement de cette économie vertueuse pour l’environnement.

Proposition n° 75 : Favoriser le développement de l’économie de la fonctionnalité dans la commande publique en introduisant dans la loi une part minimale d’achats publics de services ou de prestations issue de l’économie de la fonctionnalité.

Plusieurs associations de collectivités territoriales ont identifié une contrainte budgétaire au développement de l’économie de la fonctionnalité, pouvant dissuader ces collectivités de se tourner vers la location plutôt que vers l’achat d’un bien. En effet, selon France urbaine « louer un bien plutôt que l’acheter induit souvent d’imputer en section de fonctionnement une dépense auparavant imputée en section d’investissement ». La direction générale des collectivités locales précise néanmoins qu’une attention particulière doit être apportée à la mise en place de dérogations à la distinction entre dépenses de fonctionnement et d’investissement, « au risque de fragiliser fortement la soutenabilité de la dette locale, alors qu’elle est actuellement sécurisée pour les collectivités ».

Le rapporteur Stéphane Delautrette souhaite associer les dépenses des collectivités territoriales liées à l’économie de la fonctionnalité à des dépenses d’investissement, tout en préservant l’équilibre des dépenses et de la dette pour les collectivités. La rapporteure Véronique Riotton soutient cette idée, mais souhaite que cela soit précédé de la remise d’un rapport par le Gouvernement afin d’évaluer plus précisément les conséquences pour les collectivités territoriales.

Proposition n° 76 du rapporteur Stéphane Delautrette : Considérer les dépenses des collectivités territoriales liées à l’économie de la fonctionnalité comme des dépenses d’investissement, plutôt que des dépenses de fonctionnement.

 

Proposition n° 77 de la rapporteure Véronique Riotton : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport au Parlement sur les solutions pour considérer les dépenses des collectivités territoriales liées à l’économie de la fonctionnalité comme des dépenses d’investissement, plutôt que des dépenses de fonctionnement.

L’économie de la fonctionnalité fait par ailleurs face aux mêmes contraintes que la commande publique concernant la formation des personnels et des élus sur l’achat durable, ou la standardisation du matériel informatique et la sécurité des données. Néanmoins, l’économie de la fonctionnalité s’implante progressivement au sein de la commande publique, notamment pour certains produits tels que les imprimantes ou les véhicules. Selon la direction des achats de l’État, un important marché de location de solutions d’impression a été mis en place. L’offre a particulièrement évolué, incluant des critères environnementaux ou sociaux, en proposant des produits neufs ou reconditionnés, un taux de plastique recyclé, une approche fondée sur la consommation énergétique des équipements ou de facturation à la feuille, ou encore sur l’accessibilité à des personnes en situation de handicap.

Afin d’accompagner le développement de l’économie de la fonctionnalité, les rapporteurs soutiennent la mise en place d’une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) circulaire.

Mise en place d’une TVA circulaire

La TVA est un impôt général sur la consommation, à hauteur de 20 %, directement facturé à un consommateur sur les biens consommés ou les services utilisés. En France, certains produits et services spécifiques, mentionnés dans le code général des impôts, peuvent bénéficier d’une TVA perçue au taux réduit de 10 % ou de 5,5 %, et au taux particulier de 2,1 %.

Le rapport « Proposition pour la mise en place d’une TVA circulaire », rédigé par Mme Emmanuelle Ledoux et M. Emery Jacquillat et publié en septembre 2023, présente les conclusions de la mission réalisée à la demande de M. Christophe Béchu, ministre chargé de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Cette mission vise à évaluer la mise en place d’un dispositif de TVA circulaire pour rendre plus compétitifs les produits permettant de diminuer les externalités négatives en matière environnementale, ou de santé publique. À ce titre, diverses propositions relatives à la mise en place d’une TVA circulaire pour la réparation ou l’économie de la fonctionnalité y sont suggérées.

Le taux de TVA est encadré au niveau européen par la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. Son annexe III précise la liste des biens et des prestations de service pouvant faire l’objet de taux réduit, notamment « les prestations de services de réparation d’appareils ménagers, chaussures et articles en cuir, vêtements et linge de maison (y compris les travaux de raccommodage et de modification) ». Le rapport précité précise qu’au sein de l’Union européenne, 12 États membres ont d’ores et déjà mis en place une TVA à taux réduit sur la réparation. La France apparaît donc à la traîne au niveau européen sur le soutien à la réparation par la TVA. Il y est par ailleurs indiqué que « sans cette fondation solide que constitue la TVA circulaire, les autres mesures mises en œuvre comme le bonus réparation et l’indice de réparabilité n’auront qu’un impact superficiel sur l’activité économique des réparateurs ». Les rapporteurs proposent ainsi d’adopter une TVA à taux réduit à 5,5 % sur les opérations de réparation des produits prévus par la directive européenne, c’est-à-dire l’électroménager, les chaussures et articles en cuir, ainsi que les vêtements et linge de maison.

L’économie de la fonctionnalité est un secteur qui peine à s’implanter et qui cherche encore son modèle économique. Système plus vertueux visant à transformer nos modes de consommation, il subit cependant des désavantages compétitifs. Déployer une TVA à taux réduit sur les activités liées à l’économie de la fonctionnalité apparaît donc comme un levier qui permettrait de débloquer et d’accélérer sa mise en œuvre. Les conséquences de sa mise en place, étudiées dans le rapport, sont considérées comme bénéfiques pour le développement du secteur, avec peu d’impact sur les finances publiques. Le développement de cette activité économique pourrait même entraîner des recettes supplémentaires. Par ailleurs, le contexte européen est favorable à un élargissement d’une TVA à taux réduit pour l’économie de la fonctionnalité. Les rapporteurs soutiennent ainsi la proposition du rapport visant à adopter une TVA à taux réduit pour favoriser l’économie de la fonctionnalité.

Le rapport précité propose enfin d’étendre la TVA circulaire à d’autres secteurs de la réparation, afin de généraliser la pratique et le recours à la réparation, ciblant par exemple les secteurs de l’ameublement ou de l’outillage. Cette extension doit cependant être traitée au niveau européen, dans le cadre d’une révision de la directive relative à la taxe sur la valeur ajoutée. Les rapporteurs appellent ainsi les services de l’État en charge des négociations européennes sur la TVA à soutenir une révision de la directive 2006/112/CE pour étendre la TVA à taux réduit à davantage de secteurs de la réparation.

 

Proposition n° 78 : Instaurer une « TVA circulaire » dans la loi de finances pour 2025 :

– en adoptant une TVA à taux réduit à 5,5 % pour le secteur de l’économie de la fonctionnalité ;

– en adoptant une TVA à taux réduit à 5,5 % sur les opérations de réparation de l’électroménager, des chaussures et articles en cuir et des vêtements et du linge de maison ;

– en demandant au niveau européen une révision de la directive européenne réglementant les taux de TVA pour inclure, au sein de la liste des biens et des prestations de service pouvant faire l’objet de taux réduit, d’autres secteurs de la réparation, tels que l’ameublement ou l’outillage.

 

 


   Troisième Partie :
Mieux trier, collecter et valoriser les déchets

Les résultats, en matière d’économie circulaire, ne s’obtiennent que par la mise bout à bout d’un ensemble d’actions. Ainsi, les performances de tri, de collecte et de valorisation sont inextricablement liées. Plus le tri à la source est efficace, plus le taux de collecte sera conséquent, et plus le gisement de déchets à valoriser sera important et de qualité.

I.   Le tri à la source, étape indispensable pour massifier les gisements de déchets à valoriser, est encore balbutiant

Afin d’atteindre les objectifs de collecte, puis de valorisation des déchets, plusieurs leviers ont été proposés dans la loi Agec pour optimiser les performances du tri par les consommateurs. Tout d’abord, une sensibilisation des consommateurs au tri est proposée par la mise en place de dispositifs d’affichage des règles de tri sur les produits mis sur le marché. L’accessibilité aux poubelles de tri est facilitée par l’harmonisation des modalités de tri et de collecte sur le territoire, mais également par le développement du tri hors foyer. Enfin, la loi Agec prévoit plus particulièrement la mise en place du tri à la source des biodéchets.

A.   Les logos « Tri-man » et « info-tri » déployés, mais remis en cause au niveau européen

Afin d’accompagner les ménages et simplifier le geste du tri, l’article 17 de la loi Agec, créant l’article L. 541-9-3 du code de l’environnement, impose l’apposition d’une signalétique sur tous les produits mis sur le marché, précisant les règles de tri associées. Il s’agit du logo « Triman », qui informe le consommateur que le produit fait l’objet d’une consigne de tri, et du logo « Info-tri », qui précise les règles applicables en matière de tri, par exemple le bac de collecte dans lequel le déchet doit être déposé. Ces derniers sont apposés sur les produits, leurs notices, ou leurs emballages. Ils concernent tous les produits à destination des ménages soumis à des filières REP, à partir du 1er janvier 2022, à l’exception des bouteilles en verre. Un décret ([160]) rend les éco-organismes responsables de l’élaboration de cette signalétique, et en précise les modalités. Il donne également la possibilité aux producteurs de remplacer cette signalétique, par tout autre signalétique encadrée par l’Union européenne ou un autre État membre de l’Union européenne.

La direction générale de la prévention des risques (DGPR) a indiqué aux rapporteurs que la mise en place de cette signalétique s’est effectuée progressivement pour l’ensemble des filières REP en 2023. L’ensemble des filières REP et leurs éco-organismes ont été force de proposition lors du travail sur la mise en place de cette signalétique. Seul l’éco-organisme EcoDDS, en charge des « déchets diffus spécifiques » (produits chimiques), s’est opposé à la mise en place de cette signalétique et n’a pas effectué les démarches demandées. Pour remédier à cette situation, la DGPR a conçu une signalétique pour cette filière qui devrait être imposée par un arrêté en 2024. Les logos « Triman » et « Info-tri » sont désormais présents sur 100 milliards de produits mis sur le marché chaque année. On peut donc considérer un déploiement efficient de ce dispositif. Pour assurer à présent l’efficacité de cette mesure, il reste indispensable de sensibiliser les consommateurs à ces logos. En effet, les associations environnementales considèrent que ces logos complexifient les consignes de tri. Elles alertent sur le manque de connaissance des consommateurs sur ces logos et plus généralement des règles de tri par les citoyens, lié à une communication insuffisante. Afin de répondre à cette problématique, la DGPR a élaboré, en lien avec les éco-organismes, deux campagnes nationales de communication inter-filières REP en 2022 et en 2023.

Alors que cette signalétique est désormais mise en place, elle est menacée par la réglementation européenne. En février 2023, la Commission européenne a annoncé avoir ouvert une procédure d’infraction à l’encontre de la France pour non-respect du droit européen de la concurrence. Elle considère que l’affichage des consignes de tri en France n’est pas conforme au principe de libre circulation de marchandises. Elle estime de plus que cette mesure peut « avoir des effets contreproductifs sur l’environnement », notamment en entraînant une augmentation des besoins en matériaux pour l’étiquetage. La procédure d’infraction fait également état d’un défaut de notification. La Commission reproche ainsi à la France de ne pas avoir notifié la loi Agec lorsqu’elle était encore à l’état de projet. En effet, le projet de décret précisant les modalités de signalétique de tri a bien été notifié à la Commission européenne. Cependant, celui-ci se référant directement à l’article 17 de la loi Agec, c’est cette dernière qui impose des conditions de mise sur le marché des produits français et qui aurait dû être notifiée. Dans la mesure où l’engagement d’une procédure d’infraction ne suspend pas cette disposition, la mise en œuvre en France des logos « Triman » et « Info-tri » prévus par la loi Agec reste donc toujours en vigueur.

En parallèle, un contentieux a été engagé devant le Conseil d’État par la fédération des industries électriques, électroniques et de communication et la fédération française des industries jouet puériculture, demandant l’annulation, « pour excès de pouvoir » et « entrave injustifiée à la libre circulation des marchandises », du décret d’application sur la mise en place de la signalétique de tri, publié conformément à l’article 17 de la loi Agec. Par décision du 21 avril 2023 ([161]), le Conseil d’État a rejeté la demande de ces fédérations. La mesure de la loi Agec est jugée comme proportionnée pour répondre aux enjeux de l’économie circulaire, les objectifs de collecte des filières REP n’étant pas atteints, et des études des éco-organismes concluant à un manque manifeste de connaissance des gestes de tri par les consommateurs.

Enfin, le projet de règlement européen « emballages », reprend l’idée des logos « Triman » et « Info-tri » au niveau européen. Chaque emballage portera une étiquette indiquant le matériau le composant, et le flux de déchets dans lequel il doit être placé. Une signalétique, commune à l’ensemble des États membre de l’Union européenne pourra être apposée également sur les conteneurs de collecte. La signalétique française est donc menacée et pourrait être remise en cause par ce règlement européen. Les rapporteurs soulignent l’importance de soutenir les intérêts de la France dans la négociation du règlement européen « emballages », afin de conserver les logos « Triman » et « Info-tri », avancée majeure de la loi Agec vers la simplification du geste du tri pour les consommateurs.

B.   L’accessibilité aux poubelles de tri reste un enjeu majeur sur le territoire

1.   Une harmonisation des modalités de tri et de collecte sur le territoire majoritairement effective

L’article 80 de la loi « transition énergétique pour la croissance verte » ([162]) (LTECV) introduisait en 2015 « des modalités harmonisées sur l’ensemble du territoire national » pour la collecte séparée des déchets d’emballages et de papiers graphiques. La date butoir pour la mise en place de ces nouvelles modalités était le 1er janvier 2025. L’article 72 de la loi Agec avance cette date au 31 décembre 2022 et étend cette mesure en imposant une harmonisation sur l’ensemble du territoire national des modalités de tri et de collecte séparée des déchets d’emballages et des papiers à usage graphique. Les collectivités peuvent s’appuyer à cette fin sur des recommandations de l’Ademe sur la séparation des flux de déchets, les consignes de tri et les couleurs des contenants, selon le référentiel national de mai 2016 relatif à l’organisation de la collecte des déchets d’emballages ménagers et de papiers graphiques dans le service public de gestion des déchets. Ce référentiel prévoit notamment une harmonisation des modalités de collecte, avec un unique contenant pour les emballages et papiers, ainsi que l’harmonisation des couleurs des bacs ou de leurs couvercles.

L’association des maires de France (AMF) a indiqué aux rapporteurs que le coût de remplacement de la totalité du parc des bacs de collecte en France est important, de l’ordre de 600 millions d’euros. Cette harmonisation doit donc s’effectuer progressivement en comptant sur le renouvellement naturel des parcs de contenants de collecte. L’extension de la consigne de tri à l’ensemble des emballages en plastique a par ailleurs conduit à l’accélération de la transformation du parc de contenants. En effet, elle a provoqué une augmentation de la quantité de déchets collectés, et la nécessité d’investir dans de nouveaux bacs de collecte, ou d’augmenter la taille de ces derniers. Les collectivités territoriales sont tenues de mettre en place un plan de conversion vers l’harmonisation des modalités de tri et de collecte. Ce dernier étudie notamment l’adaptation des modalités de tri et de collecte en accord avec le référentiel national, en vue de respecter l’échéance du 31 décembre 2022. Afin d’inciter les collectivités territoriales à cette harmonisation, le cahier des charges ([163]) des éco-organismes en charge des emballages ménagers conditionne l’accès des collectivités territoriales à un soutien financier (lié à l’adaptation des centres de tri à l’extension de la consigne de tri), à la mise en œuvre par ces dernières du plan de conversion.

L’harmonisation des modalités de tri et de collecte s’est mise en place progressivement depuis 2015 et est quasiment effective. L’Ademe estime ainsi à moins de 10 % en 2022 la proportion de contenants de collecte qui n’étaient pas en cohérence avec le référentiel national ([164]). Selon les collectivités territoriales, cette mise en place n’est pas encore uniforme sur tout le territoire national, et il reste divers marchés de transformation des parcs de bacs de collecte à planifier. Pour participer à l’effort d’harmonisation des contenants de collecte lorsque ces derniers ne sont pas encore remplacés, les collectivités apposent des autocollants sur les bacs de collecte pour préciser, par exemple, qu’il s’agit du « bac jaune ». En comptabilisant les contenants disposant de ces autocollants, l’harmonisation de la couleur des bacs de tri serait alors entièrement effective, selon les collectivités.

2.   Les débuts timides du déploiement du tri hors foyer

L’article 72 la loi Agec prévoit également la prise en charge par les producteurs et les éco-organismes des coûts liés à la généralisation de la collecte séparée pour recyclage des déchets d’emballages pour les produits consommés hors foyer. Cette généralisation, qui vise notamment l’installation de corbeilles de tri dans les espaces publics, doit être mise en place d’ici le 1er janvier 2025. Outre son utilité pour améliorer les performances de la collecte et du recyclage, la mise en place de solutions de tri dans l’espace public permet d’accompagner les citoyens vers des habitudes de collecte sélective. En habituant ainsi les Français à trier hors du foyer, des améliorations peuvent apparaître aussi dans le tri fait à la maison.

Il est nécessaire d’accompagner les collectivités territoriales dans le financement du développement du tri hors foyer. Le cahier des charges ([165]) de la filière REP des emballages ménagers, des imprimés papiers et des papiers à usage graphique, prévoit ainsi l’allocation d’un montant financier aux collectivités locales, sous forme d’appels à projet, d’au moins 100 millions d’euros pour l’ensemble des éco-organismes d’ici le 31 décembre 2025, comprenant les montants déjà engagés en 2023. Malgré les aides financières proposées, des difficultés de développement du tri hors foyer sont identifiées. En effet, il existe des contraintes spécifiques liées à l’espace public, que ce soit en termes d’espace disponible pour la mise en place des équipements de tri, ou en termes de respect des conditions d’intégration urbaine des corbeilles de tri. Aussi, le tri hors foyer requiert une réorganisation des compétences et des services dans les collectivités territoriales, et poserait des questions pratiques sur la traçabilité des tonnes collectées.

La généralisation du tri hors foyer est un donc un travail qui se met en place, mais pour lequel des efforts considérables doivent encore être faits dans les prochaines années. Citeo estime actuellement la population « engagée dans un projet de collecte sélective sur l’espace public » à environ 5 %, qui aurait permis la collecte hors foyer en 2021 d’environ 74 000 tonnes d’emballages. Citeo considère que 75 % des déchets collectés pourraient être recyclés avec la généralisation de la collecte hors foyer à terme. Citeo estime alors « qu’un dispositif complet produirait les résultats attendus à compter de 2026 pour un effet d’augmentation de l’ordre d’un point supplémentaire pour le taux de recyclage des emballages ménagers », à condition que les investissements soient lancés par les collectivités locales en 2024.

Les rapporteurs soulignent la nécessité d’accélérer le déploiement du tri hors foyer. À cette fin, il pourrait être imposé aux collectivités territoriales d’avoir engagé en 2024 une démarche de mise en place du tri hors foyer. Pour les accompagner dans cet investissement, une augmentation du montant du financement par appels à projets est nécessaire. Afin de lever les freins concernant la mise en œuvre pratique, un groupe de travail pourrait y être dédié, comprenant les collectivités territoriales, les services de l’État, l’Ademe et les éco-organismes concernés. Enfin, lorsque cela paraît pertinent, un transfert de compétences pourrait être mis en œuvre entre la commune et un établissement public de coopération intercommunale.

Proposition n° 79 : Accélérer le déploiement du tri hors foyer :

– en imposant aux collectivités territoriales d’avoir engagé une démarche de mise en place du tri hors foyer en 2024 ;

– en augmentant le montant du financement accordé par les appels à projets ;

– en créant un groupe de travail dédié, avec les collectivités territoriales, les services de l’État, l’Ademe et les éco-organismes concernés ;

– en proposant un transfert de compétences, si nécessaire, entre la commune et un établissement public de coopération intercommunale (EPCI)

C.   Le tri des biodéchets se heurte à de nombreux freins

L’article L. 541-1-1 du code de l’environnement définit les biodéchets comme « les déchets non dangereux biodégradables de jardin ou de parc, les déchets alimentaires ou de cuisine provenant des ménages, des bureaux, des restaurants, du commerce de gros, des cantines, des traiteurs, ou des magasins de vente au détail, ainsi que les déchets comparables provenant des usines de transformation de denrées alimentaires ». En pratique, les biodéchets concernent donc à la fois les déchets verts et les déchets alimentaires.

Le tri à la source et la valorisation des biodéchets étaient déjà prévus dans la législation française depuis 2012 pour les producteurs ou détenteurs de quantités importantes de biodéchets, au travers de l’article 204 de la loi « Grenelle 2 » ([166]). Ce tri a ensuite été généralisé à l’ensemble des producteurs ou détenteurs de biodéchets à compter du 1er janvier 2025, par l’article 70 de la loi « transition énergétique pour une croissance verte » (LTECV) ([167]). La généralisation du tri à la source a donc été planifiée bien avant la loi Agec. L’article 88 de la loi Agec, qui modifie l’article L. 541-21-1 du code de l’environnement, avance l’échéance de généralisation du tri à la source des biodéchets au 31 décembre 2023, afin de se mettre en conformité avec les dispositions européennes, fixées à l’article 22 de la directive-cadre « déchets » ([168]). Le tri à la source des biodéchets est donc obligatoire depuis le 1er janvier 2024 pour les professionnels et les particuliers. Les collectivités territoriales doivent mettre à disposition des solutions de tri à la source, par une collecte séparée en porte à porte ou en points d’apports volontaires, ou par une gestion de proximité des biodéchets, en proposant des composteurs domestiques individuels ou partagés. L’objectif est ainsi de capter le gisement des biodéchets et éviter leur mélange aux ordures ménagères. L’Ademe estime à 2,8 millions de tonnes les biodéchets actuellement incinérés ou enfouis pouvant être valorisés ([169]). Au total, le gisement de biodéchets (déchets verts et déchets alimentaires) représenterait environ 10,6 millions de tonnes ([170]), dont 6 millions présents dans les ordures ménagères et 4,6 millions de tonnes détournés des ordures ménagères par le tri à la source ou captés dans les déchèteries pour les déchets verts. La campagne nationale de caractérisation des déchets ménagers et assimilés « Modecom » entreprise par l’Ademe sur les données 2017 évalue la part de biodéchets à environ un tiers des ordures ménagères, soit 83 kilogrammes par an et par habitant.

Un avis ([171]) de la DGPR publié en décembre 2023 précise les règles et solutions techniques, qui peuvent répondre à l’objectif de généralisation de la mise en place du tri. Une collectivité territoriale répond ainsi à l’objectif de la loi Agec si cette dernière peut démontrer avoir lancé une étude de préfiguration de ce tri, au plus tard le 31 décembre 2023. Des critères y sont proposés, notamment pour les points d’apport volontaire, en termes de distance maximale ou nombre maximal d’habitant pour un point d’apport. Cet avis invite par ailleurs les collectivités territoriales à privilégier la collecte en porte à porte dans la mesure du possible « pour des motifs liés à l’accessibilité, à la qualité et à la performance du geste du tri ».

1.   Un déploiement progressif, présentant encore des disparités sur le territoire

Les collectivités se mettent progressivement en marche pour la mise en place du tri à la source des biodéchets, mais cela n’a pas toujours été le cas. Une étude de l’Ademe ([172]), publiée en décembre 2022, démontre que la « mobilisation des collectivités pour proposer un tri à la source des biodéchets à l’ensemble des usagers était encore limitée ». En effet, 5,2 % de la population française disposait d’une solution de tri à la source en 2015, contre 6,3 % en 2021, avec 101 collectivités proposant une collecte séparée, et 815 collectivités tournées vers les actions de gestion de proximité. Un rapport d’alerte de la Commission européenne en juin 2023 ([173]) souligne d’ailleurs une collecte des biodéchets insuffisante en France, faisant le constat que « la collecte séparée des biodéchets est peu répandue en France. Seule une part réduite de la population bénéficie d’un système de collecte séparée ».

L’Ademe estime qu’à la fin de l’année 2023, le nombre d’habitants desservis par une solution de tri à la source des biodéchets proposée par les collectivités territoriales serait d’environ 20 millions, soit 1 Français sur 3, pour un volume de biodéchets collecté à des fins de valorisation à hauteur de 600 000 tonnes. L’objectif pour 2024 est d’étendre le tri à la source pour 27 millions de Français, représentant 40 % de la population ([174]). L’année 2024 reste donc une année de montée en puissance de la mise en place du tri à la source. Bien que le tri à la source des biodéchets ait fait l’objet d’une forte progression depuis la loi Agec, plus de la moitié des Français restent sans solutions de tri à la source.

Ces estimations ne prennent toutefois pas en compte la part de la population qui gère ses propres biodéchets sans avoir été équipée par la collectivité (compostages individuels ou partagés). L’Ademe prévoit ainsi d’effectuer en 2024 des enquêtes et des sondages auprès de la population et des collectivités territoriales pour procéder à un panorama plus précis de la gestion des biodéchets, mesurer le déploiement effectif et identifier les besoins du tri à la source. Les rapporteurs indiquent qu’il est nécessaire de surveiller et mesurer la pratique de compostage de proximité. À ce titre, l’Ademe doit être chargée de mettre en place des indicateurs de suivi permettant d’évaluer cette pratique, afin de pouvoir accompagner plus efficacement la population et de mieux calibrer le tri, la collecte et la valorisation des biodéchets par les collectivités territoriales.

Proposition n° 80 : Charger l’Ademe de mettre en place des indicateurs de suivi, permettant d’évaluer la pratique de compostage de proximité.

Il existe enfin des disparités dans le déploiement du tri à la source parmi les collectivités. Alors que certaines s’y sont engagées depuis plusieurs années, d’autres ne sont pas encore en mesure de le mettre en œuvre, chaque territoire ayant ses spécificités, ses besoins et ses difficultés. L’Ademe n’a cependant pas identifié de collectivités n’ayant engagé aucune étude ou démarche sur la mise en place du tri. La grande majorité des collectivités seraient donc conformes à l’objectif de tri à la source tel que défini par l’avis de décembre 2023, c’est-à-dire qu’elles ont lancé une étude de préfiguration du tri des biodéchets au plus tard le 31 décembre 2023. Toutefois, cela n’implique pas nécessairement que la collectivité soit en capacité de trier ses biodéchets ou de les valoriser. L’objectif initial de généralisation du tri à la source des biodéchets au 1er janvier 2024 est donc revu à la baisse, ce dernier pouvant être atteint sans que soient mises en place réellement les solutions de tri et de collecte au sein des collectivités. La DGPR indique ainsi que « les objectifs de l'État au titre des politiques prioritaires du Gouvernement visent à ce que le tri à la source des biodéchets soit pleinement déployé en 2027 ». Il reste donc nécessaire d’augmenter la capacité de tri à la source des biodéchets, et de leur valorisation par les collectivités territoriales, en imposant à ces dernières une obligation de résultats.

Le déploiement du tri à la source des biodéchets se met ainsi progressivement en place au sein des collectivités territoriales, et devrait monter en puissance dans les prochaines années. Il est désormais indispensable d’accompagner les consommateurs au geste de tri des biodéchets.

2.   Des freins réglementaires, financiers et sociaux restent présents

La mise en place du tri et de la valorisation des biodéchets par les collectivités territoriales nécessite des investissements financiers conséquents, pour la construction d’infrastructures, pour l’achat d’équipements, ou le recrutement et la formation de personnels. Une étude ([175]) de la Confédération des métiers de l’environnement (CME) en décembre 2022 montre un surcoût pour les collectivités territoriales lié à la gestion des biodéchets, estimé entre 7 et 22 euros par habitant et par an. La collecte reste la dépense la plus importante de la gestion des déchets (entre 60 et 75 %), tandis que les coûts de traitement ont un plus faible impact sur le coût total (entre 10 et 20 %). La mobilisation des ressources nécessaires peut s’avérer difficile pour certaines collectivités. Afin de les accompagner, des financements sont proposés par l’Ademe depuis 2011, via le fonds « économie circulaire ». L’Ademe a indiqué aux rapporteurs avoir participé au financement de plus de 500 projets en France. Le fonds vert, disposant d’un montant annuel de 2 milliards d’euros en 2023, cible notamment le soutien au tri à la source des biodéchets afin d’accompagner les collectivités territoriales dans ces projets de performance environnementale. En 2023, 40 millions d’euros ont ainsi été attribués à la collecte des biodéchets. Le fonds vert est maintenu en 2024 et son montant a été porté à 2,5 milliards d’euros dans la loi de finances pour 2024, qui a depuis été réduit à 2,1 milliards en février 2024. Ce fonds devrait permettre notamment de poursuivre en 2024 les aides aux collectivités qui ont réalisé les études de préfiguration et doivent désormais déployer la solution de gestion des biodéchets sur leur territoire. Les collectivités font l’objet d’une campagne de communication de la part de l’État, qui leur propose notamment des outils d’aide à la décision pour les accompagner dans la mise en place du tri à la source. Pour l’association Amorce, qui estime le coût du tri à la source des biodéchets à près de 5 milliards d’euros sur les dix prochaines années, l’État doit rehausser le niveau de financement pour répondre à la montée en puissance du tri à la source des biodéchets, et aider les collectivités à assumer les surcoûts de sa mise en place. Pour cela, Amorce souhaiterait une pérennisation des aides publiques, avec un soutien à hauteur de 50 % des surcoûts supportés par les collectivités. L’absence de dispositifs de collecte ou d’infrastructures de tri, de transport et de traitement des biodéchets dans certaines collectivités reste donc majoritairement liée à une problématique de financement. Le tonnage parfois faible de la collecte des biodéchets, mis en regard des coûts élevés de leur gestion, freine certaines collectivités dans cet investissement, selon la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR).

Les rapporteurs appellent à augmenter les financements pour les collectivités territoriales afin de les accompagner dans le déploiement du tri à la source des biodéchets et les aider à assumer les surcoûts liés à sa mise en place.

Proposition n° 81 : Renforcer les financements de l’État à destination des collectivités territoriales afin de les accompagner davantage dans la mise en place du tri à la source des biodéchets.

Outre les dispositifs mis en place par les collectivités, l’implication des citoyens est l’un des éléments clés pour obtenir un volume important de biodéchets, et de qualité. Il est en effet primordial d’éviter les problèmes de contamination des biodéchets par des matériaux non compostables, comme certains plastiques, le verre ou d’autres déchets non organiques. Les collectivités doivent ainsi sensibiliser massivement les citoyens au geste de tri, que ce soit pour la collecte séparée, ou le compostage individuel et collectif, et les accompagner dans leurs démarches. Les craintes liées à de mauvaises odeurs, ou la présence de nuisibles peuvent rendre plus difficile l’adhésion au tri à la source des biodéchets des citoyens. Une communication spécifique présentant les solutions existantes peut être nécessaire pour lever ces réticences.

Les rapporteurs soulignent la nécessité d’intensifier les actions de communication nationales et locales pour sensibiliser la population aux gestes adéquats de tri à la source des biodéchets.

Proposition n° 82 : Mener des campagnes de communication nationales, ainsi que des campagnes de communication locales pour sensibiliser plus largement la population aux gestes adéquats de tri à la source des biodéchets, dans le cadre de la collecte séparée et de la gestion de proximité des biodéchets.

Conformément à l’article 84 de la loi Agec, un rapport au Parlement ([176]) sur les « impacts sanitaires, environnementaux et sociétaux des plastiques biosourcés, biodégradables et compostables sur l’ensemble de leur cycle de vie » a été transmis en octobre 2022. Prenant en compte le risque de dispersion des microplastiques dans l’environnement lié au compostage des plastiques biosourcés, biodégradables et compostables, diverses recommandations y sont proposées. Alors que le contrôle du respect des normes dédiées au compostage dans des conditions industrielles est réalisable, l’application des conditions dans un compost domestique reste incertaine. Les experts considèrent qu’« il est très probable qu'un particulier ne pourra pas appliquer l’ensemble des conditions indiquées dans le protocole pour un compostage domestique », émettant des doutes sur une biodégradation satisfaisante du produit en compostage domestique. Le compost domestique peut être utilisé comme amendement organique, par exemple dans le jardin. À ce titre, les experts soulignent qu’« une biodégradation incomplète pourrait entraîner la dissémination, voire l’accumulation de substances indésirables pour l’environnement et, par conséquent, l’exposition du consommateur ». Le rapport invite ainsi à privilégier le compostage des matières plastiques biodégradables au sein d’une filière industrielle. Les rapporteurs appellent à prendre en compte les recommandations de ce rapport dans le cadre du développement du tri à la source des biodéchets. Ils soutiennent plus particulièrement la proposition d’interdire l’allusion à l’insertion de matières plastiques dans un compost domestique. À ce titre, l’arrêté du 15 mars 2022 ([177]) pourrait être révisé pour supprimer la mention des matières plastiques, ou précisé en différenciant la collecte en vue d’un compost domestique ou d’un compost dans une filière industrielle. De plus, les collectivités territoriales doivent sensibiliser la population aux risques associés au compostage domestique des matières plastiques, dans le cadre du déploiement du tri à la source des biodéchets. Les rapporteurs demandent la mise en place d’une étude, au travers d’un rapport du Gouvernement remis au Parlement, sur la nécessité de modifier, voire d’interdire, la mention « compostable » sur les produits composés de matières plastiques utilisés dans un compost domestique.

Proposition n° 83 : Revoir les règles applicables à la valorisation conjointe de matières plastiques et des biodéchets triés à la source dans les composts domestiques :

– en modifiant la réglementation afin d’interdire toute allusion à l’insertion de matières plastiques dans un compost domestique, y compris les sacs de collecte de biodéchets composés de plastique ;

– en sensibilisant la population à ne pas introduire de matières plastiques, même libellées biodégradables, dans un compost domestique ;

– en demandant la remise d’un rapport du Gouvernement sur la nécessité de modifier, voire d’interdire, la mention « compostable » sur les produits composés de matières plastiques utilisés dans un compost domestique.

Outre les freins liés aux investissements financiers nécessaires ou à l’adhésion de la population au tri, les manques d’incitation et de sanction pour les collectivités territoriales ont été mentionnés lors des auditions. Les associations environnementales ([178]) regrettent la publication d’un avis, plutôt qu’un décret ou d’un autre texte réglementaire contraignant précisant les modalités du tri à la source, accompagné d’« obligations de moyens et de résultats ». À ce titre est évoquée l’absence d’objectifs quantitatifs de réduction de la part des biodéchets dans les ordures ménagères ou de tonnes collectées, qui incite peu à la mise en place rapide du tri à la source. Par ailleurs, il n’existe pas de sanctions en cas de manquement d’une collectivité. Cependant, réduire la part des biodéchets dans les ordures ménagères lors de la mise en décharge reste dans l’intérêt des collectivités territoriales, suite à la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Afin d’assurer une plus forte incitation à la généralisation du tri à la source et de la collecte des biodéchets, les rapporteurs proposent de fixer dans la loi des objectifs progressifs de baisse du poids des biodéchets dans les ordures ménagères résiduelles. Une trajectoire doit être établie, menant à une interdiction, à terme, des biodéchets dans les ordures ménagères résiduelles. Ces objectifs peuvent être introduits à l’article L. 541-21-1 du code de l’environnement relatif à la collecte des biodéchets, ou à l’article L. 541-1 relatif aux dispositions générales sur la politique nationale de prévention et de gestion des déchets. L’introduction d’une trajectoire de baisse du poids des biodéchets dans les ordures ménagères doit être associée à une étude d’impact, afin de justifier d’objectifs réalistes et ambitieux.

Proposition n° 84 : Introduire dans la loi des objectifs de réduction progressive du poids des biodéchets dans les ordures ménagères résiduelles, et établir une trajectoire jusqu’à l’interdiction des biodéchets dans les ordures ménagères résiduelles.

Enfin, des difficultés locales peuvent également apparaître. En effet, il est plus complexe de mettre en œuvre le tri à la source dans les territoires urbains, notamment les centres-villes denses, composés d’habitats collectifs, par rapport aux zones rurales, ou pavillonnaires. Selon la direction générale des collectivités locales (DGCL), une harmonisation des règles de tri et de collecte des biodéchets doit être mise en place. En effet, des règles différentes sont formulées par les collectivités territoriales concernant la caractérisation des biodéchets collectés. Les déchets et matériaux qui peuvent être collectés conjointement aux biodéchets sont prévus par un arrêté ([179]). Ainsi, les biodéchets peuvent être collectés par exemple avec des sacs de collecte en papier-carton ou en plastique, des filtres à café ou dosettes majoritairement en papier, des essuie-tout, des serviettes, des déchets organiques ménagers… Cet arrêté précise néanmoins que la collecte conjointe est possible, mais n’est pas obligatoire, et que « chaque collectivité territoriale en charge de la collecte des biodéchets reste libre de définir, au sein des consignes de tri des biodéchets sur son territoire, les déchets pouvant être acceptés, ou non, conjointement avec les biodéchets ». Ces décisions, à l’encontre de la simplification du geste de tri pour les citoyens, dépendent des exigences à respecter selon le type de valorisation des biodéchets choisie par la collectivité. Les rapporteurs appellent à simplifier les consignes de tri, et à les clarifier pour qu’elles puissent être facilement adoptées par tous les consommateurs. Enfin, certaines collectivités peinent à trouver des filières de valorisation à proximité de leurs territoires, notamment pour les territoires urbains denses, et permettant de respecter les contraintes réglementaires, telles que les normes de qualité du compost. Cette préoccupation liée aux débouchés des biodéchets collectés freine la mise en place du tri à la source.

II.   Les objectifs de la loi Agec ne pourront pas être atteints sans une amélioration des performances de collecte des produits en fin de vie

Pour atteindre les objectifs en termes de réemploi et de réutilisation, de recyclage ou de toute autre forme de valorisation, il est indispensable de continuer d’améliorer les performances de collecte des produits en fin de vie. Les collectivités territoriales sont en charge de définir localement les règles en matière de collecte et de décider des investissements à mettre en œuvre. La mise en place d’une consigne pour recyclage est souvent mentionnée comme l’une des solutions permettant de capter davantage de gisement. Elle fait cependant l’objet de blocages et reste clivante. La collecte est l’un des postes de dépenses les plus importants pour les collectivités. Le développement des filières REP doit ainsi permettre de prendre en charge une partie de ces frais, et d’accompagner les collectivités territoriales dans la résorption des dépôts sauvages.

A.   La consigne pour recyclage : un dispositif clivant

Le présent titre est consacré au dispositif de consigne pour recyclage, le sujet de la consigne pour réemploi étant abordé dans la première partie du rapport (voir supra).

1.   L’atteinte des objectifs de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique sera difficile, avec ou sans consigne

L’article 66 de la loi Agec crée un nouvel article L. 541-10-11 du code de l’environnement prévoyant que la France se donne pour objectif d’atteindre un taux de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique pour boisson de 77 % en 2025 et de 90 % en 2029, ainsi qu’une réduction de 50 % du nombre de bouteilles en plastique à usage unique pour boisson mises sur le marché d’ici à 2030.

Cet article transpose ainsi la directive (UE) 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement. L’article 9 de la directive prévoit que les États membres prennent les mesures nécessaires pour garantir la collecte séparée, en vue d’un recyclage :

– au plus tard en 2025, d’une quantité de déchets de produits en plastique à usage unique correspondant à 77 % en poids de ces produits ;

– au plus tard en 2029, d’une quantité de déchets de produits en plastique à usage unique correspondant à 90 % en poids de ces produits.

Ce dernier objectif est repris et complété par le règlement européen sur les emballages et les déchets d’emballages, qui a fait l’objet d’un accord entre le Conseil et le Parlement européen en mars 2024. Il prévoit ainsi que, d’ici à 2029, 90 % des emballages de boissons en métal et en plastique à usage unique (jusqu’à trois litres) devront être collectés séparément, au moyen de systèmes de consigne ou d’autres solutions permettant d’atteindre l’objectif de collecte.

Par ailleurs, l’article 66 de la loi Agec charge l’Ademe d’évaluer les performances de collecte en prévoyant que l’Agence :

– rende public, avant le 30 septembre 2020, un rapport sur les taux de performance de la collecte et du recyclage des bouteilles en plastique pour boisson atteints en 2019. Ce rapport évalue notamment la capacité à respecter la trajectoire de collecte pour recyclage permettant d’atteindre les objectifs de la France par l’extension des consignes de tri à l’ensemble des emballages plastiques, ainsi que les impacts technico-économiques, budgétaires et environnementaux d’un dispositif de consigne pour réemploi et recyclage comparés aux impacts d’autres modalités de collecte.

– à partir de 2021, publie chaque année, avant le 1er juin, une évaluation des performances effectivement atteintes au cours de l’année précédente, en distinguant les bouteilles collectées par le service public de gestion des déchets ménagers, dans les corbeilles de tri dans l’espace public et au sein des entreprises. La loi prévoit qu’« au vu de ces bilans annuels et si les performances cibles ne sont pas atteintes, le Gouvernement définit après la publication du bilan réalisé en 2023, après évaluation des impacts économiques et environnementaux et concertation avec les parties prenantes, notamment les collectivités en charge du service public des déchets, les modalités de mise en œuvre d’un ou plusieurs dispositifs de consigne pour recyclage et réemploi. Ce bilan environnemental est rendu public ».

Lors de l’examen du projet de loi Agec, le sujet de la consigne pour recyclage des bouteilles en plastique a suscité une opposition importante des associations d’élus locaux et de nombreux industriels. Ce n’est que trois ans après le vote de la loi, début 2023, que ce sujet clivant a été remis à l’ordre du jour à l’occasion d’une grande concertation associant les différentes parties prenantes (industriels, distributeurs, organisations non gouvernementales, associations d’élus et de consommateurs), mais également avec la publication, en juin et septembre 2023, d’études de l’Ademe comparant les impacts de différents scénarios, avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson.

L’Ademe note tout d’abord que la poursuite tendancielle des mesures en place ne permettra pas d’atteindre les objectifs de collecte pour recyclage que la France s’est fixés. Ainsi, dans un rapport de septembre 2023 sur l’« Évaluation du taux de collecte des bouteilles en plastique de boisson pour 2021 et 2022 » ([180]), l’Agence constate que les performances de collecte ont aujourd’hui atteint un plateau. Après une progression régulière de trois points par an en moyenne entre 2018 et 2021, le taux de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique de boisson s’élève à 61,1 % en 2021 et à 60,3 % en 2022. Cette stagnation s’explique par un rebond des mises sur le marché non compensé par la progression de la collecte sélective.

Ensuite, les travaux de l’Ademe ne permettent pas de trancher en faveur ou non d’un dispositif de consigne pour recyclage des bouteilles en plastique. Dans son rapport de juin 2023 présentant les « Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson » ([181]), l’Agence modélise sept scénarios avec différents dispositifs de consigne pour recyclage et un scénario de collecte sélective pure. Elle étudie des périmètres plus ou moins réduits de cette consigne (selon le type de bouteilles en plastique admises, l’ajout ou non des canettes, des briques, etc.) afin de savoir s’ils permettront d’atteindre les objectifs de taux de collecte des bouteilles en plastique de 77 % en 2025 et de 90 % en 2029 et celui de 50 % de bouteilles en plastique à usage unique en moins d’ici à 2030.

Dans tous les cas, l’atteinte en 2029 de l’objectif fixé par la loi Agec nécessite le déploiement de moyens importants, qu’il s’agisse de la mise en place d’un dispositif de consigne pour recyclage correctement dimensionné ou du renforcement et de la mise en œuvre ambitieuse de tous les leviers d’amélioration de la performance de la collecte sélective.

a.   Le scénario sans consigne pour recyclage

En premier lieu, l’étude de l’Ademe montre que le scénario sans consigne est plus incertain, mais possible. Sa version la plus optimale pourrait permettre d’atteindre les 90 % de collecte en 2029. En outre, cette hypothèse conduit à de meilleurs résultats de collecte sur l’ensemble des emballages légers (76,3 %) qu’avec la consigne (73,3 %, dans le meilleur des cas) – hors aluminium. Selon l’étude, « tous les scénarios modélisés avec consigne présentent, en moyenne, des performances de taux de collecte pour recyclage pour l’ensemble des emballages légers inférieures à celle de la trajectoire ambitieuse de la collecte sélective sans consigne ».

Cette trajectoire ambitieuse, sans consigne, suppose d’importants efforts : elle est en effet conditionnée à ce que tous les leviers identifiés par l’Ademe soient mis en place, par toutes les collectivités et en un temps record. Le déploiement de la tarification incitative constitue l’un des leviers les plus importants. Dans la meilleure des hypothèses, 41,5 millions de Français devraient être couverts par cette tarification, soit 61 % de la population, contre à peine six millions en 2020. Parmi les onze autres leviers, figurent notamment la réussite du tri à la source des biodéchets, loin d’être acquise, l’amélioration des services de collecte en porte‑à‑porte, le développement du tri dans les espaces publics ou la collecte sélective en entreprise.

En cas de déploiement ne serait-ce que partiel des leviers évoqués, les objectifs ne seront pas atteints ; le taux de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique de boissons tomberait à 83,8 % en 2029.

 


Leviers d’amélioration, niveau de déploiement et conditions de mise en œuvre
dans la trajectoire ambitieuse d’amélioration de la collecte sélective

Levier 1 : Tarification incitative

Descriptif : tarification incitative adaptée en fonction des territoires, milieux et habitats (taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative - TEOMI ou redevance d’enlèvement des ordures ménagères incitative - REOMI).

Développement : 41,5 millions d’habitants (environ 60 % de la population).

Conditions de mise en œuvre : adaptation de la réglementation encadrant les conditions de mise en œuvre de la tarification incitative et refonte des différents outils existants, notamment fiscaux ; accompagnement financier des collectivités locales ; prise en compte des contraintes de l’habitat collectif en mettant en œuvre des mesures adaptées ; prise en compte de l’acceptation sociale, notamment en mettant en place des dispositifs adaptés pour les habitants pour lesquels la hausse des coûts serait trop pénalisante.

Levier 2 : Tri à la source des biodéchets

Descriptif : collecte séparée des biodéchets pour les particuliers. Lors de sa mise en place, il est généralement observé une progression des performances de la collecte sélective des emballages.

Développement : 32 millions d’habitants.

Conditions de mise en œuvre : le déploiement de ce levier est lié à la gestion des biodéchets et non à celle des emballages (effet induit ne relevant pas de la responsabilité de la REP des emballages ménagers).

Levier 3 : Finalisation de l’extension des consignes de tri

Descriptif : l’extension des consignes de tri couvre 98 % de la population métropolitaine début 2023, avec l’objectif de pouvoir couvrir la totalité de la population nationale d’ici fin 2026, le déploiement pour les départements et régions d’outre-mer (Drom) étant décalé de trois ans.

Développement : 100 % de la population.

Conditions de mise en œuvre : accompagnement technique et financier par les éco‑organismes des collectivités des Drom.

Levier 4, 5 et 6 : Amélioration du service de collecte

Descriptif : mesures visant à une amélioration et une optimisation du service de collecte, notamment grâce à la densification des points d’apports volontaires, l’amélioration du service de collecte en porte-à-porte (dotation en bacs, ajustement des fréquences, amélioration de la desserte des zones moins bien desservies), le passage à une collecte en multimatériaux au niveau national.

Développement : territoires à faible et moyenne performances ; passage de 100 % de la population en collecte en multimatériaux.

Conditions de mise en œuvre : définition et mise en œuvre par les collectivités territoriales de projets d’amélioration de la collecte, soutiens financiers par les éco-organismes (via des appels à projets par exemple).

Levier 7 : Diagnostics ciblés sur les ordures ménagères résiduelles (OMR) et actions correctrices

Descriptif : diagnostic territorialisé permettant de mieux identifier les performances réelles de collecte sélective, analyse des causes de ces moindres performances, mise en place d’un plan d’actions correctrices.

Développement : 23 millions d’habitants (population des territoires à faible et moyenne performance).

Conditions de mise en œuvre : identification par les éco-organismes de tous les territoires présentant des performances susceptibles d’être améliorées, prise en charge financière du diagnostic par les éco-organismes avec accompagnement technique de la collectivité, partage du diagnostic et définition d’un plan d’actions, mise en place par territoire d’une personne dédiée (communication-sensibilisation des usagers et suivi des actions correctrices), soutiens financiers par les éco-organismes pour la mise en place des actions.

Levier 8 : Campagnes de communication nationale et locale sur les gestes de tri

Descriptif : campagnes de communication nationale de grande ampleur (spots télévisés, affichages publics, évènements, etc.), coordonnées avec les campagnes de communication locale.

Développement : 60 millions d’euros par an.

Conditions de mise en œuvre : mise en place par les éco-organismes d’une stratégie de communication, collaboration étroite entre les différentes parties prenantes (pouvoirs publics, collectivités, entreprises, associations, eco-organismes, etc.) pour assurer une diffusion cohérente du message, supports adaptés avec des canaux de diffusion variés, contenus engageants et messages clairs, durée et fréquence suffisante.

Levier 9 : Amélioration de la performance de tri dans les centres de tri

Descriptif : amélioration de l’efficacité des processus de tri et de captation des emballages entrants dans les centres de tri.

Développement : 100 % des centres de tri.

Conditions de mise en œuvre : définition et mise en œuvre par les opérateurs du tri (publics ou privés) de projets d’amélioration de la performance du tri, soutiens financiers par les éco-organismes (via des appels à projets par exemple).

Levier 10 : Développement du tri sur l’espace public

Descriptif : déploiement et généralisation sur l’ensemble du territoire de la collecte séparée des emballages légers sur l’espace public, collectes réalisées par le service public de prévention et de gestion des déchets et/ou le service chargé de la propreté des collectivités.

Développement : captation de 85 % des tonnages de ce segment de consommation.

Conditions de mise en œuvre : soutien financier par les éco-organismes, déjà prévu par le cahier des charges d’agrément de la REP emballages ménagers, pour accompagner les investissements importants à mettre en place.

Levier 11 : Développement de la collecte sélective en entreprise

Descriptif : collecte sélective des emballages légers en entreprise : secteur de la restauration, espaces privés recevant du public (gares, aéroports, lieux de loisirs, etc.) et entreprises accueillant des salariés sur site. Ce levier couvre uniquement les entreprises qui ne sont pas collectées par le service public de la gestion des déchets.

Développement : captation de 81 % des tonnages de ce segment de consommation.

Conditions de mise en œuvre : application par les activités économiques concernées des obligations concernant le tri 5 flux. Sanctions en cas de non-respect, identification et traçabilité des flux correspondants au travers des dispositions prises dans le cadre de la REP.

Levier 12 : Développement des systèmes de collecte avec gratification

Descriptif : dispositifs de collecte avec gratification (de 1 à 2 centimes d’euros ou bon d’achat ou don à des associations, attribuée au consommateur lorsqu’il retourne l’emballage vide à un point de collecte). Leur déploiement doit cibler en priorité les zones où les performances de collecte resteraient faibles après mise en œuvre des autres leviers.

Développement : 1 800 automates de collectes (RVM – reverse vending machine) dans les territoires à faibles performances.

Conditions de mise en œuvre : coordination étroite entre les gestionnaires des RVM et les collectivités territoriales pour assurer la cohérence du maillage et la communication auprès des usagers, définition d’un système de gratification simple, financement des coûts associés au déploiement des RVM et des gratifications.

Source : Ademe.

b.   Le scénario avec consigne pour recyclage

Les objectifs fixés à l’article 66 de la loi Agec pourraient également être atteints dans un scénario avec consigne, si plusieurs conditions sont respectées, notamment la garantie d’un montant incitatif, l’existence d’un dispositif de reprise performant, une communication efficace et un plan de déploiement dans un délai de deux ans. L’étude de l’Ademe montre toutefois que la consigne, à elle seule, ne permettra pas d’atteindre les objectifs fixés plus largement pour l’ensemble des emballages. Là encore, elle devra être complétée par plusieurs leviers d’amélioration de la collecte. L’Ademe note par ailleurs que la consigne pourrait conduire à une réduction plus importante des déchets d’emballages abandonnés. L’inclusion des canettes dans le dispositif entraînerait aussi une meilleure performance de collecte.

Plusieurs pays européens ont déjà mis en place des dispositifs de consigne d’emballages de boissons pour recyclage.

La consigne pour recyclage, un dispositif mis en place
dans plusieurs pays européens

Des dispositifs de consigne d’emballages de boissons pour recyclage sont déployés depuis plus de 15 ans dans de nombreux pays d’Europe. Les pays nordiques ont été précurseurs dans les années 1980 et 1990 (Suède, Islande, Finlande, Norvège), suivis par le Danemark, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Croatie dans les années 2000, et, plus récemment, les pays Baltes, Malte et la Slovaquie. Le Royaume-Uni, l’Irlande, l’Autriche, le Portugal, la Grèce, la Roumanie et la Pologne ont adopté ou ont prévu d’adopter un tel dispositif entre 2023 et 2025.

Ces dispositifs, mis en place à l’échelle nationale, portent a minima sur les bouteilles en plastique et les canettes.

Comme le note l’Ademe, ils permettent, dans certains pays et sous certaines conditions, d’atteindre des taux de collecte pour recyclage des emballages consignés supérieurs à 90 %.

Source : Ademe, Benchmark européen des dispositifs de consigne pour réemploi et/ou recyclage des emballages, juin 2023.

c.   Un coût deux fois plus élevé

Quel que soit le scénario retenu – avec ou sans consigne –, l’Ademe estime que « la recherche d’une amélioration des performances en vue de l’atteinte des objectifs réglementaires coûte, dans tous les cas, environ deux fois plus cher que le coût de référence du système actuel ». L’Agence évalue ainsi le coût « net » nécessaire pour atteindre les objectifs de collecte autour de 1,8 milliard d’euros, que la consigne soit mise en place ou non. La question de la répartition des coûts entre les acteurs, notamment pour financer les différents leviers d’amélioration de la collecte, ainsi que celle de l’accompagnement de ces acteurs, se pose.

En résumé, l’étude de l’Ademe montre que :

– aucun scénario, avec ou sans consigne, n’apparaît préférable en soi. Dans tous les cas, une série de leviers devront être activés pour atteindre les objectifs de la France en matière de collecte ;

– les considérations financières ne permettent pas non plus de trancher le débat entre les partisans et les opposants à la consigne.

Dans ce contexte, la décision sur le modèle d’organisation à adopter apparaît nécessairement politique.

Si l’atteinte de l’objectif d’un taux de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique de 90 % en 2029 suppose dans tous les cas un investissement financier conséquent, la mise en place d’un dispositif de consigne pour recyclage soulève des difficultés financières particulières pour les collectivités territoriales. En effet, ces dernières ont engagé des investissements élevés pour moderniser et augmenter leurs capacités de collecte et leurs centres de tri, estimés à environ 1,5 à 2 milliards d’euros depuis 2015 ([182]).

2.   Le choix de ne pas généraliser, dans l’immédiat, la consigne pour recyclage en France

a.   En l’absence de consensus, l’absence de mise en place, à ce jour, de la consigne pour recyclage

À l’occasion des Assises des déchets qui se sont tenues à Nantes le 27 septembre 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, M. Christophe Béchu, a annoncé que la France renonçait à mettre en place, en 2024, la consigne pour recyclage des bouteilles en plastique. Cette décision attendue est intervenue après plusieurs mois de débats et de concertations menés avec les parties prenantes, à l’issue desquels le ministre a indiqué que « force est de constater que la consigne pour recyclage ne rencontre pas la pleine adhésion dont nous avons besoin ». Alors que l’étude de l’Ademe ne met en évidence aucun élément probant permettant de véritablement faire pencher la balance dans un sens ou dans un autre, le doute a bénéficié aux collectivités territoriales, en particulier les communes et les intercommunalités, et, derrière elles, aux autres acteurs opposés au dispositif de consigne pour recyclage.

Les associations d’élus locaux, dans un document d’avril 2023, ont notamment formulé quatorze propositions pour atteindre l’objectif d’un taux de collecte pour recyclage de 90 %, sans mise en place d’un système de consigne ([183]).

La rapporteure Véronique Riotton reconnaît que la mise en place d’un tel dispositif suppose d’être acceptée par les collectivités territoriales, et que cette condition n’est aujourd’hui pas remplie. Comme cela a été rappelé lors des auditions, les collectivités ont réalisé des investissements conséquents afin d’augmenter les performances de la collecte sélective. Or, ces investissements seraient en partie « perdus » en cas de mise en place d’un dispositif de consigne.

La rapporteure Véronique Riotton souhaiterait néanmoins que la réflexion et les travaux autour d’un dispositif de consigne pour recyclage puissent se poursuivre. En effet, elle considère que ce dispositif permet une acculturation des citoyens à la question de la réduction et de la gestion des déchets et présente l’avantage de massifier le geste de tri.

Surtout, bien qu’elle n’ait pas été retenue à court terme, la question de la mise en place d’une consigne pour recyclage se posera à nouveau si la France n’atteint pas ses objectifs de collecte, malgré l’activation des différents leviers identifiés par l’Ademe.

En effet, le règlement européen sur les emballages et les déchets d’emballages impose la mise en place d’une consigne pour recyclage aux États membres qui n’atteindront pas un taux de collecte séparée de 80 % en 2026 et qui ne seront pas en mesure de garantir que le taux de 90 % sera atteint en 2029 ([184]). La rapporteure Véronique Riotton regrette que les objectifs figurant dans le règlement aient été revus à la baisse par rapport au projet initial, notamment sous l’impulsion de la France (le projet de règlement prévoyait l’instauration d’une consigne pour recyclage obligatoire dans le cas où les États membres n’atteindraient pas un taux de collecte séparée de 90 % respectivement en 2026 et 2027).

Dans ce contexte, la rapporteure Véronique Riotton suivra avec attention les efforts engagés afin d’améliorer l’efficacité du dispositif de collecte sélective sans consigne. Si ce dernier ne permettait pas d’atteindre les objectifs inscrits dans le règlement européen, un dispositif de consigne pour recyclage devra être prêt à être mis en place. C’est pourquoi la rapporteure considère qu’il convient de trouver, dès aujourd’hui, une solution aux difficultés soulevées par les collectivités territoriales en cas de déploiement de la consigne pour recyclage.

Si elle devait être mise en place, la rapporteure Véronique Riotton considère que les conditions suivantes doivent être remplies, afin de s’assurer de sa réussite :

– lever les freins financiers, en réfléchissant à un nouveau modèle économique pour les collectivités territoriales. Une étude sur le financement de ce nouveau mode de collecte doit être menée, en tenant compte de la nécessité de compenser financièrement le surcoût pour les collectivités ;

– prévoir un montant de la consigne suffisamment incitatif, à savoir au moins 20 cents pour les bouteilles en plastique et, en cas d’extension du dispositif aux canettes, au moins 15 cents pour celles-ci ;

– mettre en place un dispositif de reprise performant en termes de maillage et d’équipements de reprise, avec des points de reprise suffisamment denses et répartis partout sur le territoire, équipés le cas échéant de déconsigneurs (reverse vending machines – RVM) en taille et en nombre suffisants afin de faciliter pour les consommateurs le retour des emballages en vue de leur déconsignation ;

– disposer d’un système de marquage lisible pour les consommateurs, avec un logo visuel et un code-barres apposés sur chaque emballage, afin d’assurer une bonne compréhension et une simplicité d’utilisation du dispositif ;

– mettre en place des actions de communication et de sensibilisation auprès des consommateurs afin de faciliter l’adhésion et la compréhension du dispositif ;

– élaborer un plan de déploiement du dispositif de consigne retenu (études, consultations, contractualisations, acquisition et installation d’équipement, etc.) qui soit suffisamment robuste et efficient pour permettre une mise en place dans un délai de deux ans.

Proposition n° 85 de la rapporteure Véronique Riotton : Poursuivre les réflexions et les travaux engagés en vue de la mise en place d’un dispositif de consigne des bouteilles en plastique pour recyclage. Dans ce cadre, s’assurer que les conditions suivantes soient remplies :

– la réalisation d’une étude sur le financement de ce mode de collecte, qui permette d’envisager un nouveau modèle économique pour les collectivités territoriales, en tenant compte de la nécessité de compenser financièrement les surcoûts auxquels elles feront face ;

– un montant de la consigne suffisamment incitatif, à savoir au moins 20 cents pour les bouteilles en plastique et, en cas d’extension du dispositif aux canettes, au moins 15 cents pour celles-ci ;

– un dispositif de reprise performant en termes de maillage et d’équipements de reprise, avec des points de reprise suffisamment denses et répartis partout sur le territoire, équipés le cas échéant de déconsigneurs en taille et en nombre suffisants ;

– un système de marquage lisible pour les consommateurs, avec un logo visuel et un code-barres apposés sur chaque emballage ;

– des actions de communication et de sensibilisation auprès des consommateurs afin de faciliter l’adhésion et la compréhension du dispositif ;

– un plan de déploiement du dispositif de consigne qui permette sa mise en place dans un délai de deux ans.

b.   Le développement d’une logique de performance

En contrepartie de l’abandon, pour l’heure, de la consigne pour recyclage, les pouvoirs publics ont annoncé leur intention de mesurer finement les performances de collecte des territoires, afin de sanctionner financièrement ceux qui affichent de mauvais résultats.

On observe en effet une grande diversité de situations en matière de collecte. La région Bourgogne‑Franche-Comté collecte 82 % des bouteilles alors que l’Île‑de-France et le sud de la France n’en collectent que 40 %. Il existe un rapport de un à sept entre les collectivités les plus performantes et celles qui le sont le moins, les meilleurs résultats étant atteints, de manière générale, en zone rurale. Or, la France verse 1,3 milliard d’euros par an de contribution à l’Union européenne au titre des mauvaises performances de recyclage, dont 700 à 800 millions pour les déchets ménagers. Ces sommes sont financées par l’ensemble des contribuables, alors que les collectivités les plus performantes ont déjà des coûts de gestion des déchets plus élevés.

Afin de passer à « une logique de performance », le ministre Christophe Béchu a annoncé lors des Assises des déchets du 27 septembre 2023 vouloir « objectiver le débat et mettre chacun face à ses responsabilités ». Il a indiqué à cette occasion que les ordures ménagères des collectivités seront caractérisées chaque année pour identifier parmi ces dernières celles ayant de bonnes et de mauvaises performances. Ce dispositif, dont le coût devrait être assez faible, sera financé dans le cadre des filières REP. Un système de bonus-malus sera mis en place pour favoriser les collectivités aux bons résultats de collecte et de recyclage et pénaliser celles ayant obtenu de mauvais résultats. Il pourrait consister en une modulation des dotations de l’État, de la TGAP appliquée aux déchets ou des financements versés par les éco‑organismes. Une décision plus précise quant au détail de ce dispositif est attendue courant 2024.

c.   Le nécessaire déploiement de la tarification incitative

La généralisation de la consigne pour recyclage n’étant plus d’actualité, les rapporteurs considèrent qu’il convient d’activer tous les leviers identifiés par l’Ademe dans son scénario sans consigne, détaillé dans son étude de juin 2023 précitée (voir l’encadré ci-dessus). Les rapporteurs soulignent que ces douze actions doivent être mises en place par toutes les collectivités et sans plus attendre, afin de permettre à la France de respecter ses objectifs de collecte pour 2029.

Proposition n° 86 : En l’absence de consigne pour recyclage, mettre en place immédiatement et dans toutes les collectivités les douze actions identifiées par l’Ademe pour respecter l’objectif européen d’un taux de collecte de 90 % des bouteilles en plastique et des canettes en 2029 (tarification incitative, tri à la source des biodéchets, amélioration des services de collecte en porte‑à‑porte, développement du tri dans les espaces publics, collecte sélective en entreprise…).

Parmi les différents leviers identifiés, la tarification incitative (TI) constitue une mesure particulièrement efficace pour améliorer la collecte.

La tarification incitative

La tarification incitative (TI) est un mode de financement de la gestion des déchets établi sur la base des quantités produites par les usagers du service. La facturation de la TI se fait selon une part fixe, payée par l’usager et pouvant inclure un certain nombre d’accès au service, et une part variable, payée en complément par l’usager selon son niveau d’utilisation du service.

En facturant les ménages en fonction de la quantité de déchets ultimes produits (la « poubelle grise »), la TI les incite à limiter la production des déchets et à mieux trier ceux qui sont valorisables, comme par exemple les emballages ou les biodéchets.

L’incitativité peut être introduite par le biais de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères incitative (REOMI) ou par la taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMI) :

– la REOMI est facturée par la collectivité à l’usager, comme les autres services publics locaux ;

– la TEOMI reste adossée à la taxe foncière, due par les propriétaires.

La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a fixé un objectif national ambitieux : atteindre le seuil de 25 millions de personnes couvertes par la TI d’ici 2025.

Source : Ademe.

Dans un « bilan des collectivités en tarification incitative au 1er janvier 2021 », publié en janvier 2024 ([185]), l’Ademe montre que la TI permet, en moyenne, de réduire de 30 % la quantité d’ordures ménagères résiduelles.

Au 1er janvier 2021, 200 collectivités finançaient leur service public de gestion des déchets à travers une tarification incitative. Parmi celles-ci, 175 ont opté pour une redevance d’enlèvement des ordures ménagères incitative (REOMI) et 25 ont choisi la taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMI) ([186]).

Ces collectivités sont en majorité rurales. En effet, la mise en place d’une TI en centre urbain dense est souvent complexe car elle suppose d’individualiser les facturations. L’habitat individuel, en zone pavillonnaire ou rurale, simplifie cette identification.

La population concernée par une TI a augmenté de 44 % entre 2016 et 2021, passant de 4,6 millions à 6,6 millions d’habitants.

Évolution de la population en tarification incitative de 1997 à 2021

Source : Ademe.

Malgré la hausse de la part de la population couverte, l’objectif de 25 millions de personnes couvertes par la TI d’ici 2025 est loin d’être atteint ([187]).

Le déploiement de la TI pose en effet un certain nombre de difficultés aux collectivités.

L’une d’entre elles tenait à l’absence de possibilité, pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), de déployer une TI sur une partie seulement d’un territoire donné. En assouplissant les conditions de sa mise en œuvre, la loi de finances pour 2024 a permis de régler cette difficulté. Désormais, un EPCI peut décider de « ne pas instituer la part incitative sur le territoire de ses communes membres dont la proportion de logements situés dans des immeubles collectifs est supérieure à 20 % du nombre total de logements dans chacune de ces communes ». Cette disposition a l’avantage de permettre une segmentation de la mise en œuvre de la TI par zones, et non plus au sein de la totalité d’une intercommunalité. Concrètement, elle permet son déploiement en milieu périurbain et rural, sans pour autant la mettre en place en milieu urbain dense, où cela serait plus complexe.

Malgré cette disposition récente, certains membres de l’association Intercommunalités de France restent réticents au déploiement de la TI. Les principaux problèmes évoqués sont le coût des nouvelles technologies revenant à la charge des collectivités, d’une part, et la difficulté d’instaurer la TI dans les logements collectifs, d’autre part.

Afin d’aider les collectivités territoriales à atteindre l’objectif global de 41,5 millions de Français couverts par la TI, soit 61 % de la population ([188]), les aides pour son déploiement doivent être développées. Comme le préconisait déjà la Cour des comptes dans un rapport de septembre 2022 consacré à la prévention, la collecte et le traitement des déchets ménagers ([189]), la mise en place de la TI pourrait être favorisée en allégeant son coût pour les communes et les intercommunalités grâce à un financement complémentaire de l’État porté à 80 % des coûts correspondants sur les premiers exercices.

Pour les rapporteurs, ces aides pourraient prendre la forme :

– de subventions directes de l’Ademe, via le fonds « Économie circulaire » ;

– d’une atténuation supplémentaire des frais de gestion grevant la TEOMI. En effet, depuis la loi de finances pour 2019, les frais de gestion, fixés à 8 % sur la TEOM, sont limités pour la TEOMI à 3 % pendant cinq ans ([190]). Une telle proposition est également portée par la sénatrice Marta de Cidrac dans un rapport de juillet 2023 relatif à la consigne pour réemploi et recyclage sur les emballages ([191]).

Proposition n° 87 : Alléger le coût de déploiement de la tarification incitative pour les communes et les intercommunalités en prévoyant un financement complémentaire de l’État porté à 80 % des coûts correspondants sur les premiers exercices, grâce à :

– des subventions directes de l’Ademe, via le fonds « Économie circulaire » ;

– une atténuation supplémentaire des frais de gestion grevant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMI).

B.   Les charges des collectivités consacrées à la collecte ne sont pas totalement couvertes par les éco‑contributions des filières REP

Selon le dossier de presse associé à la loi Agec ([192]), les mesures prévues par cette dernière devraient permettre d’atteindre 500 millions d’euros d’économies par an pour les collectivités territoriales. Ces économies proviennent de la création ou l’extension des filières à responsabilité élargie du producteur (REP), en transférant les charges assumées par les collectivités vers les acteurs économiques responsables de la mise sur le marché des déchets, ainsi que des mesures de lutte contre les dépôts sauvages. Par exemple, la prise en charge par les collectivités territoriales des lingettes imbibées avoisine les 160 millions d’euros par an, tandis qu’elle atteint environ 10 millions d’euros par an pour le nettoyage des mégots. Ces coûts peuvent être assumés en partie par les filières REP. La lutte et la résorption des dépôts sauvages, de même, impacte financièrement les collectivités à hauteur de 340 à 420 millions d’euros par an.

Il est difficile de mesurer précisément l’impact de la loi Agec en termes de coûts pour les collectivités, car il faudrait prendre en compte l’ensemble des conséquences financières des dispositions de la loi impactant le budget des collectivités, comme le tri à la source des biodéchets, et d’autres facteurs extérieurs, en complément des mesures liées aux filières REP ou aux dépôts sauvages. Amorce a indiqué aux rapporteurs avoir constaté depuis deux ans une hausse des coûts de la gestion des déchets pour les collectivités territoriales, et l’estime de l’ordre de 15 %, soit 1,5 milliard d’euros. La hausse de la TGAP serait néanmoins l’un des facteurs principaux de la hausse du coût de la gestion des déchets.

La mise en place des filières REP n’a pas encore permis d’engendrer des économies, selon les collectivités. En effet, la plupart des filières REP ont été mises en place en retard, et certaines ne sont pas encore en fonctionnement. Les contractualisations et les financements par les filières REP se développent progressivement. Tous les déchets pris en charge par les collectivités territoriales ne sont par ailleurs pas couverts par une filière REP, ou lorsqu’ils sont couverts, toutes les charges associées ne sont pas toujours prises en charge par les éco-organismes. Ainsi, selon la FNCCR, « il est systématiquement constaté que la prise en charge des éco-organismes est toujours inférieure aux coûts engagés par les collectivités ». L’AMF souligne également que certaines charges sont sous-évaluées par les producteurs ou éco-organismes lors de la fixation des montants des éco-contributions. Pour la filière REP des huiles et lubrifiants, par exemple, l’éco-organisme verse 100 à 150 euros par an par déchèterie pour la collecte et l’investissement d’achat d’une cuve, représentant plus de 300 euros d’investissement par an. Les coûts réels, comprenant en complément le personnel, le nettoyage ou l’entretien ne seraient pas pris en compte dans ces coûts reversés aux collectivités. La FNCCR a proposé aux rapporteurs un exemple précis de charges portées par les collectivités et de celles soutenues par les éco-organismes, au travers de l’expérience de Trivalis, un syndicat de traitement des déchets en Vendée. Pour les filières des déchets d’équipements électriques et électroniques, ainsi que les déchets d’ameublement, les données de Trivalis en 2022 indiquent une prise en charge des éco-organismes d’environ 1,65 euro par habitant, pour un coût réel supporté par la collectivité de 2,64 euros par habitant, soit 0,99 euro par habitant non couvert par les éco-organismes. Pour la filière des produits chimiques « déchets diffus spécifiques », alors que le coût réel est de 0,98 euro par habitant, l’éco-organisme verse 0,11 euro par habitant. Les coûts non couverts concerneraient notamment le temps passé par un agent pour le tri de ces déchets. Il existe donc des disparités de la prise en charge des coûts selon les filières REP, qui peuvent parfois représenter moins de 50 % de la couverture des coûts réels des collectivités territoriales. La FNCCR mentionne par ailleurs des incohérences sur la prise en charge des coûts pour un même type de déchets entre filières REP. La filière REP bâtiment soutient la collecte d’inertes (gravats) à hauteur de 7 euros par tonne, et leur traitement à hauteur de 12 euros par tonne, tandis qu’ils sont couverts par la filière REP articles de bricolage et de jardin à hauteur de 5 euros par tonne. Des soutiens différents sont ainsi accordés pour des matériaux suivant une même voie de valorisation.

La contractualisation entre une collectivité territoriale et un éco-organisme est encadrée. Les éco-organismes rémunèrent les collectivités par des soutiens forfaitaires pour les coûts fixes de gestion des déchets, et variables pour les charges courantes en déchèteries, en fonction des tonnages collectés. Les soutiens peuvent être définis dans le contrat-type des éco-organismes, ou directement dans le cahier des charges des filières REP. Pour la filière REP ameublement, il existe dans le cahier des charges ([193]) des clauses sur les parts forfaitaires précisant le montant du soutien versé pour la collecte. Par exemple, pour la collecte séparée, cela représente 3 050 euros par an et par benne, complétés par une part variable. Diverses associations de collectivités territoriales plaident pour la mise en place d’un forfait pour chaque benne de 3 000 euros par an pour l’ensemble des filières. Pour la filière REP « bâtiment », les soutiens forfaitaires et variables sont définis dans les contrats types de l’Ocab, et dépendent notamment du volume de la benne. La FNCCR regrette que le soutien forfaitaire de 1 350 euros par tonne si la benne est inférieure à 30 mètres cubes, soit très inférieur au forfait de 2 700 euros par benne, prévu pour la majorité des flux. En effet, selon cette fédération, les bennes de 10 ou 20 mètres cubes demandent un même ordre de grandeur d’investissement financier qu’une benne de 30 mètres cubes.

Malgré des soutiens financiers encore insuffisants, les contributions financières des filières REP aux collectivités territoriales augmentent progressivement. Afin d’atteindre les objectifs de leurs cahiers des charges respectifs, et face à la multiplication des filières REP, de plus en plus d’éco-organismes contractualisent avec les collectivités. Les déchèteries constituant l’un des réseaux de collecte principal sur le territoire national, les collectivités possèdent ainsi de plus en plus de poids pour défendre leurs intérêts. Ecosystem et Ecologic, des éco-organismes de la filière REP des déchets d’équipements électriques et électroniques ont ainsi versé 40,2 millions d’euros aux collectivités en 2022 (en hausse de 19 % par rapport à 2021), contre 15 millions d’euros en 2006 lors du lancement de la filière ([194]).

C.   Les dépôts sauvages sont mieux pris en charge, mais leur réduction se heurte à des difficultés

Un « dépôt sauvage » est un dépôt illégal, résultant de l’abandon de déchets par une ou plusieurs personnes, et entraînant une accumulation de déchets divers sur un terrain privé, ou dans l’espace public. Selon l’association de lutte contre les déchets abandonnés « Gestes propres », environ 1 million de tonnes de déchets seraient abandonnées chaque année. Les dépôts sauvages ont un impact environnemental significatif. En effet, les déchets abandonnés sont une source de pollution pour l’eau et les sols, provoquent des nuisances visuelles ou olfactives, et peuvent attirer des animaux nuisibles, devenant un alors enjeu de santé publique. Ils représentent également une menace en termes de sécurité liée à des risques d’incendie, ou d’intoxication. Bien qu’interdits par la loi du 15 juillet 1975, et malgré les filières de collecte et traitement des déchets existantes, les dépôts sauvages restent un sujet d’actualité et génèrent des coûts importants pour les collectivités. Une étude de l’Ademe ([195]) en février 2019 estimait à environ 90 % le nombre de collectivités territoriales confrontées aux déchets sauvages (sur un panel de 2 652 répondants).

Le titre V de la loi Agec, constitué des articles 93 à 106 est dédié à la lutte contre les dépôts sauvages, « fléaux écologiques et économiques » ([196]) pour les collectivités. La loi Agec apporte des outils permettant d’améliorer leur prise en charge en imposant aux filières REP la reprise des déchets abandonnés, et de faciliter les sanctions, notamment en renforçant les pouvoirs des maires contre les dépôts sauvages.

1.   La mise en place des filières REP a encore peu d’impact sur la réduction des dépôts sauvages

a.   La prise en charge de la résorption des dépôts sauvages par les éco-organismes reste peu applicable

Un décret ([197]) définit le « dépôt illégal de déchets abandonnés » par un amoncellement de déchets abandonnés dont la quantité totale estimée est supérieure à cent tonnes, ou à cinquante tonnes après avoir retiré par une opération de tri les déchets issus de produits soumis à des filières REP, ou pouvant faire l’objet d’une valorisation. Ce décret fixe les modalités de prise en charge des dépôts sauvages par les éco-organismes. Ces derniers ont ainsi l’obligation de prendre en charge les opérations de gestion des déchets relatives à la résorption d’un dépôt sauvage, pour les déchets relevant de leur agrément. Lorsque la résorption d’un dépôt sauvage est réalisée par une collectivité territoriale, elle en informe préalablement les éco-organismes, en fournissant un procès-verbal de constat d’infraction, et une évaluation du coût des opérations de gestion des déchets. Les éco-organismes lui versent alors une contribution financière à hauteur de 80 % des coûts supportés. Si la résorption du dépôt sauvage est réalisée directement par les éco-organismes, la collectivité territoriale doit alors supporter 20 % des coûts de gestion des déchets, ainsi que les coûts correspondant à la gestion des déchets non soumis à des filières REP.

D’après la DGPR, « la prise en charge des dépôts sauvages par les filières REP peine à se lancer ». La complexité administrative est mentionnée d’une part, notamment lorsque le dépôt sauvage est constitué de différents types de déchets soumis à différentes filières REP. Le conventionnement préalable prévu entre la collectivité et les éco-organismes induit alors un retard de prise en charge des dépôts sauvages par les filières REP. Ces derniers nécessitent pourtant une prise en charge rapide pour éviter toute pollution de l’environnement ou risques sanitaires. Enfin, d’autre part, le seuil de prise en charge défini par la réglementation est trop élevé et ne correspond pas à la majorité des cas de dépôts sauvages. L’AMF juge ainsi que « cette mesure n’est pas applicable car le seuil de 100 tonnes est trop important pour répondre aux besoins des collectivités ». Amorce partage ce constat, et considère que seules les grandes décharges sauvages sont effectivement concernées par une prise en charge financière par les éco-organismes des filières REP.

Les rapporteurs proposent que soit abaissé le seuil de cent tonnes mentionné dans la définition de « dépôt illégal de déchets abandonnés » à l’article R. 541-111 du code de l’environnement, renvoyant à l’article 2 du décret 2019-1176 du 14 novembre 2019. En effet, les rapporteurs soutiennent l’objectif de prise en charge partielle par les éco-organismes de la résorption d’un dépôt sauvage, mais le seuil de déclenchement de cette prise en charge ne semble actuellement pas adapté aux besoins des collectivités. M. Jacques Vernier, président de la Commission inter-filières REP (Cifrep), a indiqué aux rapporteurs qu’un seuil à 20 tonnes pourrait être envisagé pour répondre aux besoins des collectivités.

Proposition n° 88 : Abaisser le seuil de cent tonnes à vingt tonnes à partir duquel les dépôts sauvages sont pris en charge par les filières REP, en modifiant l’article R. 541‑111 du code de l’environnement.

b.   La reprise gratuite par les filières REP n’a pour l’instant que peu d’effets sur les dépôts sauvages

Le développement des filières REP a également pour objectif de lutter contre les dépôts sauvages par la prévention, en facilitant la prise en charge des déchets pour leurs détenteurs. Les filières REP assurent l’accessibilité au dépôt des déchets par la mise en place d’un maillage suffisant de points de collecte, et elles incitent au tri et à la collecte des déchets par la reprise gratuite des déchets, financée par les éco-organismes. Les filières REP instaurées dans la loi Agec se sont, pour la plupart, mises en place récemment. Le maillage des points de reprise et la reprise gratuite s’installent donc progressivement. Une attente particulièrement forte sur ces points concerne la filière REP bâtiment, le volume des déchets du bâtiment étant particulièrement important. Il est toutefois encore tôt pour dresser un bilan de l’efficacité des filières REP en matière de prévention de la formation de dépôts sauvages.

L’AMF et Régions de France indiquent cependant que la mise en place de nouvelles filières REP, ou leur extension ne permet pas de diminuer le nombre de dépôts sauvages. En effet, l’AMF précise que les filières REP « permettent de sortir les déchets recyclables de la collecte des ordures ménagères pour les amener dans les circuits de collecte sélective et permettre leur revalorisation. Elles modifient donc la destination de déchets déjà collectés régulièrement par le service public ; elles font passer les déchets d’un flux à l’autre ». Les filières REP ont ainsi une conséquence « aval » sur la valorisation des déchets, mais n’ont pas d’impact direct sur la formation de dépôts sauvages. Elles participent en effet, par leur présence et leur développement, à la lutte contre les dépôts sauvages, mais n’ont pas le rôle spécifique d’empêcher la formation de dépôts sauvages. Les dépôts sauvages sont en effet souvent considérés comme des déchets « qui échappent au service public ». Malgré l’existence de filières REP pour faciliter la collecte et la valorisation des déchets, les dépôts sauvages subsistent. Ces derniers proviennent d’entreprises ou de particuliers peu scrupuleux qui s’éloignent du cadre établi des filières REP du fait d’actes d’incivilité. Il reste ainsi nécessaire pour la prévention des dépôts sauvages de sensibiliser la population à leurs conséquences, et sanctionner les comportements délictueux.

D’après l’éco-organisme Dastri, en charge des déchets d'activités de soins à risques infectieux perforants, des opérateurs de gestion de déchets ont collecté ces déchets pendant la crise sanitaire de covid-19 à titre onéreux, la collecte assurée par l’éco-organisme étant pourtant gratuite. L’éco-organisme considère que « cette situation fait non seulement peser un risque sanitaire sur la communauté mais également pénal sur l’éco-organisme dans la mesure où ces déchets ont dans certains cas été déposés dans la nature créant des risques d’accidents d’exposition au sang pour des personnes amenées à les manipuler ». Les rapporteurs proposent de sécuriser la collecte des déchets d’activité de soins à risques infectieux vis-à-vis des opérateurs de déchets opérant hors du cadre des filières REP. Il peut, à cette fin, être envisagé une modification législative, par l’ajout d’un article au sein de la « Sous-section 3 : Dispositions propres à certaines filières soumises à la responsabilité élargie du producteur (articles L. 541-10-18 à L. 541-10-28) » du code de l’environnement. Ce nouvel article vise à imposer aux opérateurs de gestion de déchets une contractualisation avec l’éco-organisme, ou les systèmes individuels, pour gérer ces types de déchets spécifiques.

Proposition n° 89 : Sécuriser la collecte des déchets d’activités de soins à risques infectieux (DASRI) vis-à-vis des opérateurs de gestion de déchets qui opèrent hors du cadre des filières REP, en imposant à ces derniers une contractualisation avec les éco-organismes ou systèmes individuels.

c.   Le soutien des éco-organismes à la prévention dans la lutte contre les dépôts sauvages

La prévention en termes de dépôt des déchets abandonnés est indispensable. Il reste nécessaire de sensibiliser plus largement la population aux conséquences environnementales de l’abandon des déchets. D’après des enquêtes Ifop en 2020-2021 pour Gestes propres et Citeo, 90 % des Français jugent les consommateurs responsables des déchets abandonnés. Les déchets abandonnés sont par ailleurs davantage perçus comme une incivilité, plutôt que sous l’angle des risques de pollution associés. La dangerosité et les conséquences environnementales des déchets abandonnés ne font ainsi pas encore l’objet d’une prise de conscience généralisée par la population française. Les nouvelles obligations des éco-organismes en matière de prise en charge des dépôts sauvages ont conduit plusieurs éco-organismes, dont Citeo, Alcome et Ecomaison, à rejoindre l’association « Gestes propres », luttant contre les déchets abandonnés. La présence des éco-organismes, avec le soutien du ministère de la transition écologique et d’associations de collectivités, permet de préparer et mettre en œuvre des actions de communication de plus grande ampleur. Des projets sont également mis en place pour comprendre les comportements des consommateurs et identifier des leviers d’action et de communication. Dans le cadre de l’un de ces projets, une enquête ([198]) auprès des habitants de communes participantes montre que les solutions pour réduire les déchets abandonnés sont tout d’abord d’ « expliquer », puis de « sanctionner » et « ajouter des poubelles », ou encore de « valoriser les bons comportements ». En complément de cette sensibilisation des consommateurs, d’autres mesures de la loi Agec permettent de mieux lutter contre les déchets abandonnés, notamment le déploiement du tri et de la collecte hors foyer, l’étude de la mise en place d’une consigne et plus généralement, le renforcement des contrôles et des sanctions.

Les rapporteurs soutiennent les efforts déployés par l’ensemble des parties prenantes pour sensibiliser la population aux conséquences environnementales de l’abandon des déchets et prévenir la formation de dépôts sauvages. À ce titre, ils proposent de mettre en place régulièrement des campagnes de sensibilisation sur cette problématique, par exemple en les incluant au sein des actions de communication inter-filières prévues par l’article L. 541-10-2-1 du code de l’environnement.

Proposition n° 90 : Inclure des campagnes de sensibilisation des citoyens sur les conséquences environnementales des dépôts sauvages, au sein des actions de communication inter-filières prévues par l’article L. 541-10-2-1 du code de l’environnement.

2.   Un accueil positif du renforcement des pouvoirs du maire et des sanctions

La réglementation en matière de déchets attribue un rôle décisif aux collectivités territoriales, et notamment aux maires. Le maire détient le pouvoir de police en cas de dépôt sauvage dans sa commune et dispose d’une responsabilité en matière de salubrité publique. Il lui revient par conséquent de prendre toute mesure permettant le respect du code de l’environnement sur son territoire. À ce titre, il peut constater, mettre en demeure et sanctionner les producteurs ou détenteurs de déchets à l’origine de leur abandon. De nombreuses dispositions de la loi Agec permettent de simplifier les procédures administratives et pénales pour la mise en œuvre de sanctions contre les dépôts sauvages.

Avant toute mise en place de procédure de sanction, les agents compétents doivent procéder à une constatation de manquement à la réglementation sur les déchets. Outre les officiers et agents de police judiciaire, et les inspecteurs de l’environnement, les agents habilités à rechercher et constater les infractions sont mentionnés à l’article L. 541-44 du code de l’environnement. L’article 96 de la loi Agec, créant un article L. 541-44-1, étend cette habilitation aux agents des collectivités territoriales dans des conditions fixées par voie réglementaire ([199]). Le recours à la vidéosurveillance est désormais autorisé par l’article 100 de la loi Agec pour la constatation des infractions relatives à l’abandon d’ordures, de déchets, de matériaux ou d’autres objets. L’AMF a fait part aux rapporteurs d’un bilan positif de la mise en œuvre de ces mesures. En effet, le recours à la vidéo-protection est davantage envisagé par les collectivités afin de disposer des preuves nécessaires à une verbalisation. Amorce a également noté une facilitation de l’assermentation des agents des collectivités depuis la loi Agec, ainsi que du recours à la vidéo-protection. Cependant, l’identification du contrevenant reste parfois complexe, malgré l’utilisation du système de vidéosurveillance.

Une fois le manquement constaté, des procédures administratives ou pénales peuvent être engagées. Dans le cadre d’une procédure administrative, une mise en demeure de se mettre en conformité avec la réglementation est prononcée, précédée d’une phase pendant laquelle le contrevenant est avisé des faits reprochés et des sanctions encourues, conformément au principe du contradictoire. En cas de non-respect de la mise en demeure, des sanctions peuvent être décidées. L’article 93 de la loi Agec offre la possibilité pour le maire d’accompagner la mise en demeure, d’une amende administrative maximale de 15 000 euros permettant de sanctionner directement le manquement constaté. Si la mise en demeure reste sans effet, le maire peut alors recourir à diverses sanctions administratives prévues à l’article L. 541-3 du code de l’environnement : la consignation de fonds, la réalisation d’office et aux frais de la personne mise en demeure des travaux nécessaires, la suspension du fonctionnement de l’installation à l’origine du manquement, une astreinte journalière maximale de 1 500 euros, ou encore une amende de 150 000 euros. Au travers de son article 94, la loi Agec permet désormais le recouvrement des amendes administratives et de l’astreinte journalière prononcées par le maire au bénéfice de la commune.

Une procédure de sanction pénale peut être mise en place en parallèle de la procédure de sanction administrative. Le maire, après avoir constaté l’infraction, réalise un procès-verbal et le transmet au procureur de la République, qui confirmera l’engagement ou non de poursuites pénales à l’encontre de l’auteur de l’infraction. Des contraventions sont prévues aux articles R. 541-76 et R. 541-77 du code de l’environnement, pour le fait de déposer, abandonner, jeter ou déverser des déchets ou une épave de véhicule en dehors des emplacements prévus. Des dispositions spécifiques s’appliquent pour les déchets transportés avec l’aide d’un véhicule. À ce titre, l’article 101 de la loi Agec entérine le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule comme responsable pécuniairement des contraventions relatives à l’abandon de déchets. L’abandon de déchets, ou de véhicules sur le domaine public ou le domaine privé de l’État et des collectivités territoriales, est passible de 4 ans d’emprisonnement et jusqu’à 150 000 euros d’amende (durée et montant revus à la hausse par la loi « industrie verte » ([200])), conformément à l’article L. 541-46 du code de l’environnement. Cet article a été complété par les articles 97 et 98 de la loi Agec : l’article 97 offre la possibilité de verser une amende forfaitaire d’un montant de 1 500 euros, minorée à 1 000 euros et majorée à 2 500 euros pour éteindre l’action publique, et l’article 98 rend possibles l’immobilisation et la mise en fourrière des véhicules utilisés pour commettre ces infractions.

Les pouvoirs du maire en termes de constatation des infractions, et de sanction des comportements délictueux sont renforcés par la loi Agec, et sont particulièrement dissuasifs. L’AMF a indiqué aux rapporteurs que les mesures proposées par la loi Agec contribuent effectivement à faciliter la lutte contre les dépôts sauvages et sont accueillies positivement. L’amende prévue à l’article L. 541-3 du code de l’environnement, dont le produit revient aux collectivités, est bien mise en place par les collectivités. Les procédures de sanctions administratives et pénales restent cependant longues, et ne permettent pas toujours une gestion immédiate des déchets. Pour Régions de France, il apparaît nécessaire de « mettre en œuvre au niveau local un accord partenarial entre les associations d’élus, le procureur de la République, les services de police et de gendarmerie afin de faciliter la prévention mais surtout la répression ». Amorce considère qu’il existe encore un manque de moyens humains et financiers pour mener à bien ces actions. Un calcul effectué par cette association la conduit à estimer un besoin de 1 536 agents supplémentaires pour déployer une « brigade verte » dédiée à la lutte contre les dépôts sauvages. Amorce prévoit ainsi un coût total de 76,8 millions d’euros pour l’ensemble des collectivités pour lutter efficacement contre les dépôts sauvages.

Il est très difficile de mesurer l’impact de la loi Agec de manière quantitative sur la prévention ou la résorption de dépôts sauvages. En effet, selon l’association Amorce, aucun outil ne permet de répertorier l’ensemble des dépôts sauvages sur le territoire national. Les rapporteurs proposent ainsi de développer un outil permettant l’identification et le suivi des dépôts sauvages sur l’ensemble du territoire national. Cet outil a vocation à apporter un appui utile aux collectivités territoriales, et à permettre aux pouvoirs publics d’estimer le nombre de dépôts sauvages, la quantité de déchets associée, ainsi que d’analyser les moyens financiers ou humains à déployer pour leur résorption. À cette fin, un article R. 541-43-2 au code de l’environnement peut être créé, visant à mettre en place une base de données électronique centralisée d’identification et de suivi des dépôts sauvages, accessible et modifiable par les collectivités territoriales.

Proposition n° 91 : Mettre en place une base de données électronique centralisée d’identification et de suivi des dépôts sauvages sur le territoire national, accessible et modifiable par les collectivités territoriales.

III.   En l’absence de possibilités de réemploi ou de réutilisation, La valorisation des déchets doit être privilégiée

Conformément à la hiérarchie des modes de traitement, tout produit non réemployé et tout déchet non réutilisé doivent faire l’objet d’une valorisation, soit par recyclage, soit par toute autre forme de valorisation, notamment énergétique. L’élimination ou mise en décharge ne doit être envisagée qu’en dernier recours. La loi Agec a prévu des dispositions en vue de réduire l’enfouissement, complémentaires de la réglementation déjà mise en œuvre. Les performances du recyclage progressent pour l’ensemble des matériaux, cependant, des efforts particuliers doivent être menés pour le recyclage des plastiques pour atteindre les objectifs. Enfin, la valorisation des biodéchets est amenée à se développer dans les prochaines années avec la montée en puissance du tri à la source des biodéchets. Elle peine cependant encore à trouver son équilibre et à s’implanter.

A.   La mise en décharge des déchets diminue

En absence de possibilités de réemploi d’un produit, les déchets associés doivent être valorisés, conformément à la hiérarchie des modes de traitement. Pour l’année 2020, les données rapportées à la Commission européenne font état d’une majorité de déchets valorisés, avec 50,3 % des déchets dirigés vers le recyclage ou la réutilisation, 18,2 % en remblayage, 8,5 % en incinération avec récupération d’énergie, 1,6 % en incinération sans récupération d'énergie, 21,3 % mis en décharge, et 0,2 % via un autre système d'élimination ([201]). Il n’est pas possible, d’évaluer quantitativement l’impact de la loi Agec après 2020 sur la valorisation globale des déchets, les données 2020 étant les dernières disponibles.

La gestion des déchets fait cependant l’objet d’un important retard dans les territoires d’outre-mer. Alors qu’environ 77 % des déchets font l’objet d’une valorisation (matière ou énergétique) en métropole, 70 % des déchets d’outre-mer seraient enfouis, situation qui varie selon les territoires ([202]). Ainsi, la Guyane, Mayotte et Saint-Martin enfouissent leurs déchets à 100 %, Saint-Barthélemy incinère les déchets à 100 %, et La Réunion, la Guadeloupe et la Martinique ont entre 20 et 30 % de déchets valorisés. Selon Amorce, le maillage des déchèteries dans les territoires ultramarins est deux fois moindre qu’en métropole, créant des difficultés pour capter les gisements de déchets à des fins de valorisation. L’isolement de ces territoires est à l’origine d’importants stockages de déchets, y compris de déchets dangereux, et d’un engorgement des centres de traitement, d’enfouissement ou d’incinération. Cet éloignement impacte aussi directement le coût de traitement des déchets, particulièrement élevé, notamment lorsqu’un transport maritime est nécessaire. Un rapport du Sénat ([203]) estime que « les coûts de gestion du service public des déchets sont en moyenne 1,7 fois plus importants en outre-mer que ceux observés dans l'Hexagone ». L’Association des communes et collectivités d’outre-mer (Accd’om) souligne « que les collectivités ultramarines, et en particulier celles de Mayotte et de Guyane, ont besoin du soutien financier de l’État pour récupérer le retard accumulé ». Pour répondre aux enjeux spécifiques de leurs territoires, les collectivités ultramarines envisagent surtout les unités de valorisation énergétique, plus facilement mises en œuvre que la valorisation matière nécessitant de nouvelles infrastructures. Des plans d’outre-mer sont prévus par la loi Agec dans le cadre des filières REP pour définir des solutions permettant d’améliorer les performances de ces collectivités territoriales en termes d’économie circulaire. Ces plans ont été préparés suivant des lignes directrices proposées par l’Ademe, et sont pour certains encore en discussion au sein de la DGPR.

La mise en décharge, dernière solution dans la hiérarchie des modes de traitement des déchets, est sur une trajectoire de réduction. Elle est soumise à la composante déchets de la TGAP, incitant à privilégier le tri et le recyclage plutôt que l’élimination. La TGAP aurait conduit, selon la DGPR, à une diminution de 9 % en 2022 de la mise en décharge des déchets non dangereux non inertes par rapport à 2021, soit une réduction de 16 % par rapport à 2020 et 20 % par rapport à 2019. Une poursuite de cette trajectoire de réduction de la mise en décharge est prévue, notamment suite au développement des filières REP et à l’obligation du tri à la source. La DGPR indique néanmoins que les projections actuelles ne permettent pas d’atteindre l’objectif de diminution de moitié de la mise en décharge en 2025 par rapport à 2010 pour les déchets non dangereux et non inertes, conformément à l’article L. 541-1 du code de l’environnement, mais elle pourrait être atteinte à l’horizon 2030. Les acteurs du recyclage ou les collectivités territoriales attirent cependant l’attention sur le fait que, malgré la hausse de la TGAP programmée et l’incitation associée, il n’est pas toujours possible de se reporter vers le recyclage ou vers une autre forme de valorisation. La hausse de la TGAP, selon la direction générale des collectivités locales, frappe « indistinctement les déchets qui pourraient être mieux triés grâce à l’intervention des collectivités et les déchets non recyclables du fait des choix techniques des entreprises sur les volumes desquels les collectivités ne disposent d’aucun moyen d’action ». Il existerait ainsi « un volume incompressible de déchets qui doivent être dirigés aujourd’hui vers ces exutoires et qui pourrait faire l’objet d’un tarif de base révisé ».

L’article 10 de la loi Agec fixe un objectif de réduction des déchets ménagers et assimilés admis en installation de stockage à 10 % de ces déchets mesurés en masse, en 2035. Selon Amorce, le respect de cet objectif « implique de n’enfouir que 3,3 millions de tonnes de déchets ménagers et assimilés à l’horizon 2035, contre 7,9 millions de tonnes stockés en 2021 ». Il apparaît donc difficilement réalisable, d’autant plus qu’Amorce a constaté une hausse de la production des déchets ménagers et assimilés par rapport à 2010 dans les filières REP historiques, de 4 % pour les emballages ménagers, de 9 % pour les textiles, de 20 % pour les déchets d’équipements électriques et électroniques et de 24 % pour les déchets d’éléments d’ameublement. Amorce précise par ailleurs que les objectifs nationaux de réduction de déchets stockés se traduisent par la réduction du nombre et des capacités autorisées des installations de stockage de déchets, certaines atteignant progressivement leurs limites.

L’article 91 de la loi Agec, créant l’article L. 541-30-2 du code de l’environnement, prévoyait des dispositions pour faciliter l’accès aux décharges pour les résidus de tri et de déchets issus de la mise en œuvre des procédés de valorisation, dans un contexte de raréfaction des capacités de stockage. Cependant, suite à un recours de la fédération nationale des activités de dépollution et de l’environnement (Fnade), le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution l’article L. 541-30-2 du code de l’environnement, car portant une « atteinte manifestement disproportionnée au droit au maintien des conventions légalement conclues ». Cet article a donc été abrogé par la décision n° 2021-968 QPC du 11 février 2022 ([204]). Deux textes réglementaires d’application avaient été publiés ([205]), qui ont également fait l’objet d’une annulation par la décision du Conseil d’État rendue le 28 mars 2024 ([206]).

B.   La filière du recyclage du plastique fait face à des difficultés et mise sur de nouvelles technologies

Diverses mesures de la loi Agec, au travers notamment du développement ou de l’extension des filières REP, de l’écoconception et de la mise en place du tri à la source, permettent de renforcer et structurer les filières de recyclage, et de participer à l’augmentation des performances de ces filières.

D’après les chiffres du recyclage des emballages ménagers en France ([207]) publiés par Citeo en février 2024, le taux de recyclage global des emballages ménagers est de 65,5 %, dépassant l’objectif de 63 % en 2024 prévu par le cahier des charges et sur une bonne trajectoire pour atteindre l’objectif de 69 % en 2029. Cependant, ce taux de recyclage global cache des taux de recyclage très hétérogènes selon les matériaux considérés. Le verre reste l’un des matériaux présentant les meilleures performances de collecte et de recyclage. Les objectifs de recyclage pour l’acier (de 78 % en 2024 à 84 % en 2029) et le verre (78 % en 2024 à 88 % en 2029), recyclés à 86 % sont pour l’instant atteints. Le papier-carton et l’aluminium restent en bonne voie pour atteindre leurs objectifs. Le papier-carton (68 % en 2024 à 83 % en 2029) est recyclé à 63 %, et l’aluminium (42 % en 2024 à 58 % en 2029) à 36 %. Selon Citeo, les papiers et cartons sont « plutôt bien triés par les consommateurs », mais le taux de recyclage peine à augmenter du fait d’une forte augmentation des mises sur le marché. Pour les textiles, alors que le cahier des charges de la filière REP impose un objectif de recyclage de 70 % en 2024 et 80 % en 2027 (pour les textiles non réemployés ou réutilisés), le rapport d’activité de Refashion ([208]) pour l’année 2022 indique un taux de réutilisation d’environ 60 % et de recyclage de 30 %. Sur le gisement restant après réutilisation, la part de recyclage est donc bien majoritaire. Pour les plastiques, en revanche, les chiffres du recyclage des emballages ménagers indiquent que la France est encore loin du compte, avec un taux de recyclage à 24,5 %, pour des objectifs ciblant 40 % de recyclage en 2024 et jusqu’à 54 % en 2029. Citeo a toutefois observé une augmentation de plus de 6 % des quantités recyclées « grâce à la simplification du geste de tri et au développement de nouvelles filières de recyclage ».

Pour les emballages ménagers, comparer les taux de recyclage avant et après la loi Agec est une tâche ardue. En effet, une nouvelle méthodologie de calcul a été mise en place par l’Union européenne depuis 2022. Selon Citeo, « celle-ci prend en compte non pas les quantités acceptées par les recycleurs à l’entrée du process comme c’était le cas jusqu’alors, mais celles effectivement recyclées ». Le taux global de recyclage des emballages ménagers, qui s’élevait à 72,3 % en 2021 ([209]), a donc baissé mécaniquement malgré une hausse du recyclage. Le rapport d’alerte de la Commission européenne ([210]) publié en juin 2023 indique un taux de recyclage des déchets d’emballage de 60,3 % en 2020. Ce rapport d’alerte confirme par ailleurs que la France « est en voie d’atteindre l’objectif fixé pour 2025 pour tous les déchets d’emballage » fixé à 65 %. Cependant, la Commission européenne invite la France à « redoubler d’efforts » pour atteindre l’objectif de recyclage des déchets d’emballage en plastique à l’horizon 2025.

D’après Federec, la Fnade, et le Snefid, près de 5 millions de tonnes de plastiques sont ainsi mises sur le marché en France, pour un recyclage de l’ordre de 1 million de tonnes ([211]). Bien qu’en progression, le recyclage des plastiques n’augmente pas aussi rapidement que la production de plastiques. Il fait face à des obstacles d’ordre technique, structurel ou encore économique. Le recyclage des plastiques subit notamment les mauvaises performances de collecte et des retards dans l’écoconception, les déchets plastiques n’étant pas toujours recyclables.

1.   La collecte, frein majeur pour tendre vers l’objectif de 100 % plastique recyclé

Dans un état des lieux sur le recyclage entre 2012 et 2021, publié par l’Ademe en mars 2024 ([212]), le gisement identifié de déchets plastiques post-consommation est issu essentiellement du secteur des emballages ménagers, et des emballages industriels et commerciaux, à hauteur de 62 %. Les autres types de déchets plastiques proviennent principalement des secteurs de la construction, de l’agriculture, de l’automobile, ou encore des équipements électriques et électroniques. Les chiffres sont similaires pour la collecte des plastiques, 69 % des déchets plastiques étant collectés au sein des secteurs des emballages ménagers, et des emballages industriels et commerciaux. Au niveau européen toutefois, plus de 80 % des déchets de plastiques collectés proviennent du secteur des emballages. Cet écart est lié aux différents schémas de collecte des déchets plastiques parmi les États membres de l’Union européenne, et plus particulièrement à la mise en place des filières REP en France. Les volumes de déchets issus des filières REP des emballages ménagers, des véhicules, des équipements électriques et électroniques ou de l’ameublement sont significatifs. La mise en place progressive des filières REP créées par la loi Agec devrait ainsi accroître la collecte des plastiques dans les prochaines années. Dans cet état des lieux, l’Ademe considère les filières liées aux articles de jardin et bricolage, aux emballages de restauration, industriels et commerciaux, comme structurantes pour la valorisation des déchets plastiques dans les prochaines années.

L’article 5 de la loi Agec, modifiant l’article L. 541-1 du code de l’environnement, vise à « tendre vers l’objectif de 100 % de plastique recyclé d’ici le 1er janvier 2025 ». En 2022, seuls 20 % des plastiques mis sur le marché ont été recyclés ([213]). Selon la direction générale des entreprises (DGE), se rapprocher de l’objectif de 100 % de plastique recyclé semble compromis « non pas du fait des capacités de recyclage (qui devraient être suffisantes), mais face à la mauvaise performance de collecte des emballages (30 % pour les emballages ménagers en plastique en 2022) ». Un rapport de Federec ([214]) démontre cependant une légère amélioration de la collecte en 2022. En effet, alors qu’elle était de 922 600 tonnes en 2020, la collecte de plastiques a atteint environ 1 048 800 tonnes en 2022, notamment grâce à l’extension de la consigne de tri. Pour se rapprocher de l’objectif de 100 % de plastique recyclé, il reste donc nécessaire de mettre en place l’ensemble des leviers prévus pour améliorer les performances de collecte, tels que l’extension des consignes de tri, l’amélioration du service de collecte en porte à porte, l’harmonisation des consignes de tri, l’accessibilité à des poubelles de tri hors foyer ou encore l’étude de la mise en place d’une tarification incitative ou d’une consigne. Les acteurs du recyclage ([215]) estiment actuellement le gisement issu de la collecte suffisant pour approvisionner les usines de recyclage. La collecte est donc un frein à l’atteinte d’un taux de recyclage très élevé, mais n’est pas la seule responsable des problèmes de performance de la filière du recyclage des plastiques. L’écoconception apparaît un élément essentiel permettant d’assurer la recyclabilité des plastiques, et l’incorporation de matières issues du recyclage.

2.   Le recyclage des plastiques reste fortement dépendant de l’écoconception et de la demande en matières premières issues du recyclage

Les acteurs du recyclage font état de difficultés principalement liées d’une part à une faible demande en matière première issue du recyclage, et d’autre part à une recyclabilité insuffisante des produits.

Les centres de recyclage répondent à une logique industrielle, et nécessitent de ce fait un modèle économique viable et rentable pour se développer et répondre aux besoins de l’économie circulaire. Il est primordial qu’un marché pour la matière première issue du recyclage se mette en place, avec une demande suffisante pour garantir des débouchés à cette matière recyclée. La demande peut être assurée soit par un prix de vente de la matière première issue du recyclage suffisamment compétitif par rapport à la matière première vierge, soit par la mise en place d’incitations ou d’obligations réglementaires d’incorporation de matières recyclées. Une baisse importante de la demande en matière première plastique issue du recyclage a été constatée en 2023, notamment dans le secteur des emballages, au profit des matières plastiques vierges dont le prix a été fortement réduit. Cette baisse de la demande a pour conséquence une réduction du taux d’incorporation de matières recyclées dans les produits. Cela crée alors une absence de débouché pour les matières premières plastiques issues du recyclage, mettant ainsi en danger la viabilité des infrastructures de recyclage. Certains centres de recyclage n’ont donc pas tourné au maximum de leur capacité en 2023 et ont subi des pertes financières. Le prix des plastiques vierges n’est actuellement pas suffisamment élevé pour inciter à l’utilisation de matières premières issues du recyclage, face à des obligations réglementaires actuelles d’incorporation peu incitatives.

En termes d’écoconception, outre l’incorporation de matières recyclées, l’absence de recyclabilité de certains produits plastiques reste un enjeu majeur du recyclage. Lorsqu’un plastique est éco-conçu et recyclable, il peut généralement être recyclé 5 à 7 fois sans apport complémentaire et sauf composants incompatibles avec le recyclage, le plastique se dégradant progressivement à chaque cycle de recyclage. Toutefois, la composition ou le procédé de fabrication de ces produits plastiques peuvent rendre difficile la récupération des matériaux qui les constituent. Dans le cas de déchets plastiques complexes, tels que les emballages multicouches constitués de plusieurs matériaux ou résines plastiques différentes, la séparation des différentes couches pour recyclage peut s’avérer laborieuse, voire impossible. C’est parfois le cas, par exemple, dans le secteur des papiers et cartons avec une augmentation des papiers pelliculés comprenant une part de plastiques. La recyclabilité dépend également de la facilité de démontage des produits, notamment pour ceux dont les composants ont été fixés par des adhésifs ou colles. Enfin, la présence de perturbateurs de recyclage complique le geste de tri, le tri ou le recyclage des produits. Par exemple, l’ajout de matériaux infusibles, ou de substances polluantes ou dangereuses dans certains produits compromet la recyclabilité, ainsi que l’utilisation du matériau recyclé. L’ensemble des produits non recyclables sont alors orientés vers les refus de tri à des fins d’incinération ou de mise en décharge. Pour accompagner les producteurs, des outils d’écoconception sont proposés par des éco-organismes, entreprises et autres organisations. Citeo propose ainsi « Tree », un outil d’évaluation de la recyclabilité des emballages.

Les rapporteurs rappellent l’importance fondamentale de l’écoconception afin d’atteindre les objectifs de recyclage. Ils appellent à améliorer la recyclabilité des plastiques lors de leur conception, par exemple en limitant le nombre de résines et de couleurs, en simplifiant les produits pour passer d’un emballage multicouche à un emballage monocouche, et en supprimant les perturbateurs de recyclage. Pour inciter davantage les producteurs à la recyclabilité, les rapporteurs considèrent qu’il est nécessaire de rendre la mise sur le marché de produits en plastique non recyclable plus dissuasive. À cette fin, une pénalité doit être mise en place lorsque « la capacité à être recyclée à l’échelle et en pratique » dans le cadre des éco-modulations des éco-contributions est insuffisante, à l’instar de la pénalité présente dans le cahier des charges des emballages ménagers, pour l’ensemble des filières REP dans lesquelles des produits en plastique sont mis sur le marché.

Proposition n° 92 : Rendre la mise sur le marché de produits en plastique non recyclable plus dissuasive en introduisant des pénalités dans le cadre de l’éco-modulation des contributions financières, au sein des cahiers des charges de l’ensemble des filières REP, afin de tendre vers l’objectif de 100 % de plastique recyclé d’ici le 1er janvier 2025.

Pour les emballages en plastique, le rapport de l’Opecst propose d’aller plus loin, notamment par l’interdiction des emballages en plastique non recyclable, considérant que les pénalités ne sont pas assez dissuasives « au regard des gains marketing réalisés par les producteurs grâce à certains emballages non recyclables ». Les rapporteurs sont favorables à une interdiction, à terme, des emballages en plastique non recyclable. Cette interdiction doit cependant s’accompagner d’un calendrier progressif, défini en concertation avec les industriels des secteurs concernés. Les rapporteurs soulignent que cette proposition n’est en aucun cas un renoncement aux dispositions prévues par l’article 23 de la loi « climat et résilience » qui interdit, à partir du 1er janvier 2025, les emballages en polystyrène non recyclable et qui ne peuvent intégrer une filière de recyclage. Ils souhaitent au contraire continuer ce travail en allant progressivement vers une interdiction de tous les plastiques non recyclable ne pouvant intégrer une filière de recyclage.

Proposition n° 93 : Rendre la mise sur le marché d’emballages en plastique non recyclable plus dissuasive en les interdisant à terme, selon un calendrier progressif qui doit être défini en concertation avec les industriels des secteurs concernés.

3.   Face à des freins techniques, de nouvelles technologies se mettent en place…

Le rapport d’activité 2022 de Citeo ([216]) fait état de 65 % d’emballages plastiques recyclables, c’est-à-dire qu’ils disposent d’une filière de recyclage établie. Parmi les emballages en plastique restants, 15 % disposeraient d’une filière en cours de développement, et 20 % ne disposeraient d’aucune solution adaptée à l’heure actuelle. Pour ces derniers cas, l’amélioration du taux de recyclage implique le développement soit de l’écoconception pour améliorer leur recyclabilité, soit le développement de nouvelles technologies lorsque l’écoconception est impossible. La filière du recyclage des plastiques est ainsi confrontée à un frein technique pour pouvoir traiter tous les types de résines vendus en France.

Il existe deux types de recyclage des plastiques : le recyclage mécanique et le recyclage chimique. Le recyclage mécanique, principalement utilisé, transforme les plastiques en granulés pour être réincorporés en tant que matière première issue du recyclage. Le recyclage chimique, à l’inverse du recyclage mécanique, modifie la structure du polymère constitutif des plastiques. Selon le type de plastiques à recycler, différentes méthodes de recyclage chimique peuvent être choisies telles que l’extraction par solvant, la dépolymérisation ou la gazéification et la pyrolyse, présentant chacune des avantages et des inconvénients et ciblant des types de résine spécifiques. Le recyclage chimique permet d’une part d’apporter d’autres solutions au recyclage des plastiques complexes, et d’autre part d’extraire certains additifs présents dans les plastiques, et de le purifier. Cependant, le recyclage chimique est plus coûteux, et fait l’objet de débats pour son bilan environnemental lié à une consommation accrue d’énergie, ou à l’utilisation de solvants présentant parfois une certaine dangerosité. De plus, la question de la traçabilité des matières plastiques dans les procédés chimiques fait l’objet de nombreuses discussions, notamment au niveau européen, vis-à-vis de leur comptabilisation dans les objectifs d’incorporation de matières premières issues du recyclage. En effet, il est impossible de dissocier le plastique recyclé du plastique vierge après un processus de recyclage chimique. Différentes méthodes sont étudiées par la Commission européenne pour en effectuer le suivi et notamment une méthode de calcul de « bilan massique ». Les déchets considérés comme difficilement recyclables par une filière mécanique sont les plastiques ayant plusieurs constituants, tels que les plastiques multicouches, les plastiques souillés (graisse…), ceux qui ne sont pas thermoplastiques (plastiques capables de ramollir et de se durcir de manière réversible sous l’action de la chaleur) ou ceux contenant des additifs non souhaités ou autorisés dans les produits à incorporer. Selon les acteurs du recyclage, il n’existe actuellement qu’une seule usine de recyclage chimique en fonctionnement pour traiter les mousses polyuréthane, mais plusieurs projets voient le jour. Le recyclage mécanique possède peu de filières pour les emballages en polyéthylène (PE) souples (film des packs de bouteilles en plastique, sacs de caisse…), en polypropylène (PP) souples (sachets de biscuits, pâtes…) et en polystyrène (PS) (pots de yaourt, barquettes…). Le développement de projets de recherche et développement sur ces produits permettra d’améliorer leur recyclabilité.

Les acteurs du recyclage considèrent que le recyclage chimique est complémentaire du recyclage mécanique. Il est ainsi « destiné à recycler les déchets qui ne peuvent l’être par des procédés mécaniques », c’est-à-dire ceux qui sont actuellement valorisés énergétiquement, ou enfouis, et qui n’ont pas de filières de recyclage mécanique matures. Ils attirent également l’attention des rapporteurs sur certains projets de recyclage chimique, qui pourraient capter des gisements de matières premières à la place des recycleurs mécaniques, par exemple des gisements de polyéthylène térephtalate (PET) dans le secteur de l’emballage, ou le « PP non chargé » dans le secteur automobile.

Une note de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) ([217]), publiée en juin 2023 par le député Philippe Bolo et la sénatrice Angèle Préville, étudie la question du recyclage des plastiques, et notamment de la place du recyclage chimique par rapport au recyclage mécanique. Elle indique qu’« en dépit des discours rassurants sur la complémentarité entre les deux techniques de recyclage, il existe un risque réel de voir le recyclage chimique se développer au détriment du recyclage mécanique sous prétexte que les matières issues de ce dernier seraient de moindre qualité ». Le recyclage mécanique nécessite en effet un tri, une collecte et une préparation des matières à recycler adéquats, de manière à assurer une haute qualité et le moins d’impuretés possible au sein des plastiques à recycler. Le travail d’écoconception, en développant des flux de matières à recycler simplifiés, plus homogènes, voire standardisés, participe aussi à maintenir une haute qualité des plastiques à recycler. Les mesures mises en place pour améliorer la recyclabilité renforcent ainsi l’efficacité et la qualité du recyclage mécanique. Soutenant la proposition issue de la note de l’Opecst, les rapporteurs confirment la place qui doit être donnée au recyclage chimique en tant que solution complémentaire, et non pas concurrente, au recyclage mécanique.

Proposition n° 94 : Considérer, au sein des appels d’offres, le recyclage chimique comme une solution complémentaire au recyclage mécanique, dans le cas où le recyclage mécanique n’est pas une option possible.

4.   … et font l’objet d’un accompagnement de l’État

Afin d’accompagner les entreprises du recyclage et plus généralement de l’économie circulaire, des financements sont proposés au travers du plan d’investissement « France 2030 », à hauteur de 685 millions d’euros et du plan « France Relance », à hauteur de 280 millions d’euros. La majorité de ces fonds sont dédiés à des projets en lien avec le recyclage, afin d’accroître les capacités de recyclage sur le territoire, mais surtout de cibler l’écoconception au travers de la recyclabilité et la réincorporation de matériaux recyclés.

Dans le cadre de « France 2030 », la DGE a indiqué aux rapporteurs que :

– 255 millions d’euros sont alloués à la stratégie d’accélération « recyclabilité, recyclage et réincorporation des matériaux recyclés », afin de répondre aux enjeux d’innovation de ces filières. L’innovation est notamment encouragée par un appel à projets de 120 millions d’euros, visant à permettre un recyclage de meilleure qualité des plastiques, et l’automatisation et robotisation des centres de tri pour faciliter et augmenter la vitesse du tri et affiner la pureté des flux triés. À ce jour, 34 projets ont été retenus pour environ 111 millions d’euros ;

– 430 millions d’euros sont alloués aux appels à projets « Recyclage des plastiques composites et élastomères », en vue d’augmenter les capacités de recyclage sur le territoire national et d’élargir la gamme des déchets recyclables. Ces appels à projets visent donc à acter le passage à l’échelle industrielle de la mise en place de nouvelles filières de recyclage des plastiques, selon des priorités définies par le ministère. Trois types de projets sont ciblés : des solutions de recyclage chimique de déchets qui ne sont pas ou peu recyclables par recyclage mécanique, des solutions de recyclage mécanique et d’incorporation de matière recyclée produite par voie mécanique, et l’amélioration du tri ou sur-tri et de la préparation des déchets en vue de leur recyclage. Le résultat de l’appel à projets fait état à ce jour de 13 projets retenus pour un montant de 109 millions d’euros, représentant environ 295 000 tonnes de déchets plastiques traités à terme.

Le plan « France Relance » a financé le programme « Orplast 3 » de l’Ademe à hauteur de 140 millions d’euros entre 2020 et 2022. Désormais terminé, ce programme a contribué à 286 projets d’incorporation de plastiques recyclés, et 93 projets de recyclage. Le soutien se poursuit cependant dans le cadre du programme « Ormat ». Ce plan a aussi permis de soutenir le déploiement du tri sélectif dans les espaces publics, de moderniser les équipements de centres de tri, et d’accompagner les entreprises dans la mise en œuvre des obligations réglementaires.

D’autres financements sont également proposés, au travers du « fonds économie circulaire » de l’Ademe, le programme « recyclage, recyclabilité, réutilisation des matières » du centre national de la recherche scientifique (CNRS), ou du programme d’investissements d’avenir (PIA4) « Recyclage et réincorporation de matériaux recyclés », dédié à l’enseignement supérieur, à la recherche et à l’innovation. Les éco-organismes sont également à l’origine d’appels à projets, finançant des projets en recherche et développement (R&D). Par exemple, l’éco-organisme Ecomaison a proposé un « appel à projets R&D Innovation et Recyclage », visant divers matériaux dont les plastiques ou Ecologic avec un « appel à projets R&D déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) et articles de sport et loisirs », visant l’étude du recyclage des matériaux critiques des DEEE, et le recyclage des articles de sport et loisirs.

Les acteurs du recyclage ([218]) saluent les aides apportées via l’ensemble des appels à projet, mais précisent cependant que « le passage à l’échelle industrielle pour certains matériaux requiert des investissements importants et pour lesquels l’équilibre économique n’est aujourd’hui possible que par des économies d’échelle ». Les rapporteurs appellent à poursuivre les financements en faveur de l’écoconception et de l’amélioration de la recyclabilité des plastiques, et à soutenir notamment l’innovation au sein des filières de recyclage pour accompagner le développement de nouvelles solutions jusqu’à leur maturité technique et économique.

C.   La valorisation des déchets organiques, un chantier encore en construction

1.   La réglementation liée à la valorisation des boues d’épuration crée des frustrations

Plusieurs méthodes de valorisation des boues d’épuration peuvent être mises en place : la méthanisation, le compostage ou l’épandage pour une valorisation matière, ou leur incinération pour une valorisation énergétique. Le retour au sol des boues d’épuration permet de contribuer à la fertilisation des cultures agricoles, grâce aux qualités agronomiques de ces boues. En 2019, 729 millions de tonnes de matières fertilisantes ont été produites dont 300 millions de tonnes ayant fait l’objet d’un retour au sol. Les boues d’épuration y contribuent à hauteur d’un peu moins de 10 millions de tonnes ([219]). Les boues d’épuration font l’objet à 73 % d’une valorisation matière, à 18 % d’une valorisation énergétique, et sont stockées à hauteur de 9 % ([220]). Selon le syndicat des professionnels du recyclage par valorisation agronomique (Syprea), en 2022, la principale méthode de valorisation matière est le compostage, qui tend à augmenter légèrement. Ainsi, parmi les boues d’épuration valorisées, environ 55 % des boues d’épuration font l’objet d’un compostage, 35 % d’un épandage direct, et 10 % d’une méthanisation.

Le secteur des boues d’épuration fait face à des difficultés pour la valorisation de ces matières. Ces difficultés ne sont pas liées au coût de la valorisation matière des boues d’épuration, qui reste incitative comparée à sa valorisation énergétique. En effet, le prix des boues d’épuration pour épandage ou compostage varie entre 15 et 80 euros la tonne, alors qu’il se situe entre 110 et 200 euros la tonne pour leur incinération ou enfouissement ([221]). Selon les collectivités territoriales et les organisations professionnelles, le blocage actuel rencontré est ainsi d’ordre réglementaire. Les incertitudes sur les normes de qualité des composts et d’épandage de la matière organique, associées à de nouvelles normes liées à la pandémie de covid-19, imposant une hygiénisation systématique, auraient conduit à un arrêt des projets de valorisation matière, en faveur de l’incinération.

a.   La révision du référentiel d’usage au sol des boues d’épuration fait l’objet d’oppositions fortes

L’article 86 de la loi Agec prévoit une mise à jour des référentiels réglementaires sur l’innocuité environnementale et sanitaire applicables aux boues d’épuration, en vue de leur usage au sol, avant le 1er juillet 2021. L’usage au sol de boues d’épuration ne respectant pas ces référentiels est alors interdit. Le Gouvernement souhaite encadrer l’ensemble des matières fertilisantes à travers « un socle commun », afin d’harmoniser les obligations pour les produits valorisés en agriculture. Des projets de décret et d’arrêtés relatifs aux critères de qualité agronomique et d’innocuité pour les matières fertilisantes et les supports de culture (MFSC) étaient ainsi en consultation publique en novembre 2023, et d’autres consultations obligatoires devaient se poursuivre jusqu’en avril 2024. Ils listent les critères à respecter en termes d'innocuité (traces métalliques, micro-organismes pathogènes…) et de qualité agronomique (éléments utiles à la nutrition des végétaux). L’article 86 n’est donc pas encore appliqué, ces projets de textes n’ayant pas encore été publiés, ce qui reste une source d’incertitudes réglementaires pour les acteurs concernés. Malgré l’ambition d’un « socle commun », des adaptations ont été proposées pour prendre en compte les besoins de chaque secteur. Ces différences créent alors des frustrations sur le niveau d’exigence pour chacun des acteurs. Les collectivités territoriales et des organisations professionnelles jugent les conditions de retour au sol plus contraignantes et inéquitables pour les boues d’épuration que pour d’autres matières fertilisantes. Des oppositions fortes à ces projets de textes réglementaires ont ainsi été communiquées aux rapporteurs lors des auditions, bien que les acteurs soutiennent la mise à jour des référentiels réglementaires de 1998 ([222]). Le Syprea souhaite un « socle commun » qui se fonde sur des critères de qualité des intrants, et non sur leur origine, et considère ces textes comme inapplicables sur le terrain (pour des raisons techniques de méthodes analytiques et de seuils non justifiés ou irréalistes). La FNCCR et Amorce précisent que les restrictions liées aux flux de cadmium, de zinc ou de cuivre introduites dans ces projets de texte obligeraient les collectivités à étendre la zone d’épandage, diluant l’apport nutritionnel des boues, ou à rediriger les boues d’épuration vers l’incinération. Amorce estime ainsi de 30 à 60 % les flux de boues d’épuration qui ne pourraient plus faire l’objet d’un retour au sol, et seraient incinérés.

Le rapporteur Stéphane Delautrette propose la création d’un observatoire des sols, chargé d’effectuer le suivi et d’accompagner le développement des solutions de valorisation des boues d’épuration. Cet observatoire a également pour vocation d’appuyer les pouvoirs publics sur la valorisation des boues d’épuration d’un point de vue environnemental, économique, technique et sanitaire, notamment dans le cadre de la réglementation du « socle commun », en vue d’une harmonisation des dispositions entre les matières fertilisantes et les supports de culture. La rapporteure Véronique Riotton propose plutôt de charger l’observatoire du réemploi et de la réutilisation d’effectuer ces mêmes missions. Afin d’établir la création de l’observatoire national des sols, ou de charger l’observatoire du réemploi et de la réutilisation du suivi et de l’accompagnement du développement de la valorisation des boues d’épuration, une modification législative est nécessaire.

Proposition n° 95 du rapporteur Stéphane Delautrette : Créer un observatoire national des sols, en charge d’effectuer le suivi et d’accompagner le développement des solutions de valorisation des boues d’épuration sur l’ensemble du territoire national.

 

Proposition n° 96 de la rapporteure Véronique Riotton : Charger l’observatoire du réemploi et de la réutilisation d’effectuer le suivi et d’accompagner le développement des solutions de valorisation des boues d’épuration sur l’ensemble du territoire national.

Les rapporteurs soulignent l’intérêt particulier de la valorisation matière des boues d’épuration, permettant de promouvoir l’économie circulaire, mais aussi de réduire la dépendance aux engrais chimiques, et d’améliorer la qualité des sols. Ils proposent d’introduire dans la réglementation une hiérarchisation de la gestion des boues d’épuration, privilégiant le retour au sol, ainsi qu’un objectif contraignant de retour au sol des boues produites en France, afin d’éviter notamment que ces flux soient dirigés vers l’incinération.

Proposition n° 97 : Afin d’assurer la valorisation des boues d’épuration, introduire dans la loi :

– une hiérarchisation de la gestion des boues, privilégiant le retour au sol par rapport à l’incinération ;

– un objectif ambitieux de retour au sol des boues produites en France.

b.   La définition des conditions de compostage des boues d’épuration crée des incertitudes

L’article 86 de la loi Agec prévoit la définition, par voie réglementaire, des conditions de compostage des boues d’épuration, et des digestats issus de la méthanisation, seuls ou conjointement avec d’autres matières végétales. Le mélange de boues d’épuration n’est actuellement possible qu’avec des déchets verts issus de déchèteries, ces déchets verts étant un élément indispensable au processus de compostage. Un décret ([223]) encadre ce compostage, et prévoit à l’article R. 543-313 du code de l’environnement un taux maximal de déchets verts de 100 % de la masse des boues (une tonne de déchets verts pour une tonne de boues) à partir de 2022. Il prévoit également d’abaisser ce taux à 80 % en 2024. L’Ademe doit fournir avant le 1er janvier 2026 un rapport sur la disponibilité du gisement de déchets verts pour la valorisation organique des déchets alimentaires triés à la source et sur l’opportunité de modifier le seuil de 80 % au vu des besoins en matières fertilisantes utilisables en agriculture biologique. Pour Amorce, une surveillance particulière doit être mise en place pour analyser les impacts en 2024 du seuil de 80 %, considéré comme le seuil de viabilité technique du compostage. Le Syprea et la FNCCR regrettent que les taux de structurants de déchets verts n’aient pas été fixés à long terme dans ce décret, ce qui génère de l’incertitude d’ici 2026 et qui impacte négativement la mise en place de nouveaux projets par les collectivités ou les industriels. Un projet d’arrêté de sortie de statut de déchets pour les broyats de déchets verts pour un usage combustible pourrait par ailleurs diminuer le gisement de déchets verts utilisés pour le compostage, le détournant vers l’incinération.

Les rapporteurs souhaitent préciser que l’Ademe doit effectuer une surveillance et une analyse de l’impact du seuil de 80 % sur le processus de compostage, dans le cadre du rapport qu’elle doit fournir avant le 1er janvier 2026, et plus particulièrement lors de l’étude de l’opportunité de modifier ce seuil.

Proposition n° 98 : Charger l’Ademe, dans le cadre du rapport prévu par l’article R. 543-313 du code de l’environnement, transmis au plus tard le 1er janvier 2026, de surveiller et d’analyser les conséquences sur le processus de compostage de la mise en place depuis le 1er janvier 2024 d’une masse de déchets verts utilisés comme structurants n’excédant pas 80 % de la masse de boues d’épuration et de digestats de boues d'épuration utilisée dans le mélange.

c.   L’interdiction d’importation des boues d’épuration remise en cause au niveau européen

L’article 86 de la loi Agec, modifiant l’article L. 541-38 du code de l’environnement, prévoit l’interdiction d’importer des boues d’épuration en France (sauf provenant d’installations mutualisées avec des pays limitrophes). Il est cependant considéré comme contraire au droit européen. En effet, l’article 11 du règlement 1013/2006 relatif aux transferts de déchets offre la possibilité à un État membre d’interdire de manière globale des transferts de déchets, uniquement pour ceux destinés à être éliminés. L’article 12 du même règlement prévoit une libre circulation des flux de déchets destinés à la valorisation au sein de l’Union européenne, et selon les procédures d’obtention des autorisations de transfert transfrontalier de déchets. La décision n° 22PA02680 du 29 juin 2023 de la cour d’appel de Paris ([224]) annule ainsi cinq décisions du ministre chargé de la transition écologique, prises en application de l’interdiction d’importation des boues prévue à l’article L. 541-38, car non conforme au droit de l’Union européenne. Suite à cette décision, la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne supprime l’interdiction prévue par la loi Agec. Désormais, les boues d’épuration ne font plus l’objet d’une interdiction systématique pour les demandes de transferts de déchets destinés à être valorisés, mais d’un examen au cas par cas par l’administration. La FNCCR plaide cependant « pour la valorisation des déchets au plus près du lieu où ils ont été produits dans un esprit d’économie circulaire, par les parties prenantes locales (habitants, entreprises, collectivités), ce qui les responsabilise et les engage ».

2.   Les biodéchets peinent à trouver une voie de valorisation stabilisée

Les acteurs du recyclage ([225]) ont indiqué aux rapporteurs la part de biodéchets couverts par le service public de prévention et de gestion des déchets, et ayant fait l’objet d’une valorisation matière. Ainsi, environ 6 millions de tonnes de biodéchets étaient valorisées en France en 2020, parmi lesquels 3,6 millions de tonnes de déchets verts valorisées en compostage, 1,3 million de tonnes de déchets alimentaires valorisées par compostage ou méthanisation, et 1,2 million de biodéchets collectés en mélange avec les ordures ménagères traités en tri mécano-biologique valorisés par compostage ou méthanisation.

a.   Les débouchés pour la valorisation des biodéchets restent insuffisants

Les collectivités territoriales mettent progressivement en place le tri à la source des biodéchets et leur collecte. Pour accompagner la montée en puissance des performances sur le tri à la source, il est nécessaire que des solutions de valorisation de ces biodéchets, adaptées à chaque territoire et correctement dimensionnées, puissent être mises en place. La mise en place du tri à la source des biodéchets a notamment pour objectif d’éviter leur mise en décharge, particulièrement polluante par l’émission de méthane, ainsi que leur incinération, peu utile, les biodéchets étant majoritairement composés d’eau. Les débouchés pour les biodéchets peuvent ainsi être divers, par exemple :

– par des utilisations au sein de la collectivité (compost pour les espaces verts, distribution aux habitants pour le jardinage) ;

– par des partenariats avec des exploitations agricoles pour un retour au sol ;

– par l’installation de plateformes de compostage ;

– par la mise en place d’unités de méthanisation permettant l’obtention de biogaz (utilisé comme source d’énergie, ou introduit dans le réseau de gaz naturel).

Un diagnostic par les collectivités et des concertations avec l’ensemble des acteurs du territoire sont souvent nécessaires pour définir les solutions les plus appropriées sur leur territoire. Pour ces dernières, le périmètre et les modalités de la collecte doivent être considérés, mais aussi les voies de valorisation possibles et l’identification de celles qui seraient déjà présentes localement.

Le rapport d’alerte de la Commission européenne de juin 2023 ([226]) fait état d’un retard dans le tri à la source, la collecte et la valorisation des biodéchets municipaux, et les estime « insuffisants ». Le manque d’infrastructures de traitement, de compostage ou de méthanisation, est notamment montré du doigt. À ce titre, la Commission européenne recommande d’investir massivement dans des capacités de traitement. Ce manque d’infrastructures a pu retarder la mise en marche des collectivités vers le tri à la source et la collecte. Les collectivités doivent en effet disposer d’un exutoire pour les biodéchets pour mettre en place leur collecte. À l’inverse, la question de la collecte et plus particulièrement des volumes de biodéchets collectés impacte la mise en place d’installations de valorisation des biodéchets. Cette mise en place nécessite un investissement conséquent, qui doit s’accompagner de volumes suffisamment importants pour trouver un équilibre économique et pérenniser les installations. L’AMF estime ainsi que « la question des débouchés après collecte et compostage reste préoccupante ». La mise en place des exigences réglementaires n’est par ailleurs pas encore finalisée concernant le « socle commun » des matières fertilisantes pour les supports de culture. Selon les collectivités territoriales et organisations professionnelles, cette incertitude réglementaire impacte les projets de valorisation des déchets organiques, et oriente ces flux vers l’incinération. Pour le Syprea, l’une des difficultés de la valorisation des biodéchets provient de la mauvaise qualité des biodéchets issus du tri et de la collecte, avec notamment la présence d’impuretés.

Outre les déchets alimentaires issus de la collecte des biodéchets, il reste nécessaire d’améliorer la collecte des déchets verts pour mieux valoriser les déchets alimentaires, et les boues d’épuration pour lesquelles l’utilisation de déchets verts est une condition technique au compostage. Le Syprea précise que le gisement de déchets verts utilisé pour la valorisation des boues d’épuration et des biodéchets est menacé par un projet d’arrêté de sortie de statut de déchets pour les déchets verts, qui vise à les utiliser pour un usage combustible. Selon les acteurs du recyclage ([227]), l’un des enjeux de la filière organique est ainsi de capter le gisement de déchets verts non collectés, estimé à plus de 50 millions de tonnes.

Il est techniquement possible de mélanger plusieurs types de déchets organiques (biodéchets, boues d’épuration, déchets de l’agriculture, ou de l’industrie agro-alimentaire…). Toutefois, la valorisation conjointe des biodéchets ayant fait l’objet d’un tri à la source, avec tout autre déchet (sauf déchets agricoles), y compris les boues d’épuration, est interdite. Cette interdiction a été ajoutée ultérieurement à la loi Agec par une ordonnance en juillet 2020 ([228]) complétant l’article L. 541-21-1 du code de l’environnement sur le tri à la source des biodéchets. Elle reprend une disposition réglementaire existante depuis 2016 à l’article D. 543-226-1 du code de l’environnement. Les filières de valorisation des biodéchets et des boues d’épuration doivent donc être mises en place de manière parallèle, notamment sur les plateformes de compostage ou dans les unités de méthanisation. Selon l’association Amorce, la valorisation en compostage par mélange avait lieu jusqu’à son interdiction. Le retour d’expérience démontre que la double valorisation est « un mélange techniquement intéressant car il permet d’obtenir des fertilisants équilibrés et nutritionnellement intéressants pour les cultures ». Selon l’association Amorce et la FNCCR, l’impossibilité de mutualiser les infrastructures augmente les coûts pour les collectivités territoriales, et engendre des contraintes de gestion, notamment en termes de limitation de tonnages. Elles appellent ainsi à une évolution de la réglementation pour permettre une valorisation conjointe des déchets organiques, en vue d’augmenter le volume de matière valorisable et d’assurer la viabilité technique et économique des projets d’installation d’équipements de valorisation. Les rapporteurs proposent que soit menée une étude visant à déterminer les bénéfices et les limites associés à la valorisation conjointe de plusieurs types de déchets organiques, et plus particulièrement des biodéchets et des boues d’épuration. Cette étude serait effectuée dans le cadre d’un rapport du Gouvernement transmis au Parlement.

Proposition n° 99 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport sur les bénéfices et les limites associés à la mise en place d’une valorisation conjointe de différents types de déchets organiques, notamment des biodéchets et des boues d’épuration.

b.   Les restrictions sur le tri mécano-biologique ne font pas consensus

Le tri mécano-biologique est un procédé qui vise à séparer les éléments valorisables des ordures ménagères (métaux, plastique, verre ou biodéchets par exemple). Il permet également de transformer par des opérations biologiques ces déchets en produits valorisables, tels que le compost ou le biogaz, ou en produits stabilisés pouvant être stockés (n’émettant pas ou peu d’émissions de gaz à effet de serre). La loi Agec prévoit diverses dispositions relatives au tri mécano-biologique. Son article 87 interdit d’utiliser la fraction fermentescible des déchets issus des installations de tri mécano-biologique dans la fabrication de compost, à partir du 1er janvier 2027, dans une volonté d'amélioration de la qualité des matières fertilisantes. L’association « Zero Waste » ([229]) considère que le tri mécano-biologique est une « technologie très coûteuse et néfaste du point de vue environnemental, le compost qui en ressort étant très pollué du fait d’avoir été en contact avec les autres déchets de la poubelle noire, et finissant bien souvent par être enfoui ou incinéré », et regrette l’échéance de 2027, qui reste lointaine. En 2027, les installations de tri mécano-biologiques pourront continuer à orienter leur production vers la méthanisation des déchets fermentescibles.

L’article 90 conditionne l’autorisation de nouvelles installations de tri mécano-biologiques, ou la modification de celles existantes à la généralisation du tri à la source des biodéchets par les collectivités territoriales. Ces installations ne peuvent plus bénéficier d’aides de personnes publiques. Les critères et les seuils justifiant de la mise en place du tri à la source des biodéchets ont été précisés par un décret ([230]) et un arrêté ([231]). Suite à un recours porté par la fédération nationale des collectivités de compostage, par l’association pour la méthanisation écologique des déchets et par l’association Amorce, le Conseil constitutionnel juge conformes les conditions de création de nouvelles unités de tri mécano-biologique ou de modification de celles existantes par la décision n° 2022-990 QPC du 22 avril 2022 ([232]). Il confirme ainsi que cette mesure de la loi Agec ne s’oppose pas au principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par la Constitution et n’institue pas de différence de traitement entre les collectivités territoriales qui ont mis en place une installation de tri mécano-biologique et les autres collectivités. Il rappelle que : « le législateur a entendu, pour mettre en œuvre les objectifs de réduction et de valorisation des déchets ménagers, privilégier le tri à la source des biodéchets plutôt que leur prise en charge par des installations de traitement mécano-biologique dont il a estimé que les performances en termes de valorisation étaient insuffisantes ». Selon la FNCCR, bien que la loi Agec n’interdise pas les installations de tri mécano-biologique, ses articles remettent en cause cette filière et les investissements faits par les collectivités. Le tri à la source des biodéchets devrait, selon ces acteurs, être considérée comme solution complémentaire. Amorce, et la FNCCR souhaiteraient ainsi une « réhabilitation des tris mécano-biologiques, ou unités de valorisation énergétique ou organique », comme une solution de valorisation matière, lorsque les normes réglementaires pour la qualité des matières sorties de ce processus sont respectées, en complément du tri à la source des biodéchets. Une réponse du secrétariat d’État chargé de l’écologie à une question écrite du Sénat ([233]), publiée en décembre 2022, ouvre la porte à des discussions sur l’avenir de ces installations : « une réflexion sur le devenir de ces installations pourrait être initiée à l'initiative des organismes représentant les collectivités concernées ». En effet, il considère qu’à condition que la collecte séparée des biodéchets soit effective, les installations de tri mécano-biologique pourraient « présenter un intérêt environnemental », par la stabilisation des ordures ménagères résiduelles avant la mise en décharge, ou par la production de combustibles solides de récupération à partir des refus de tri.

Les rapporteurs proposent que soit menée une étude sur les avantages et inconvénients du développement d’installations de tri mécano-biologique en vue d’atteindre de meilleures performances environnementales, la généralisation du tri à la source et de la valorisation des biodéchets, et en mesurant l’impact économique pour l’ensemble des acteurs concernés (collectivités territoriales, exploitants d’installations…). Cette étude pourrait également évaluer la possibilité d’avancer la date d’interdiction d’utiliser la fraction fermentescible des déchets issus des installations de tri mécano-biologique dans la fabrication de compost, actuellement prévue au 1er janvier 2027 par l’article 87 de la loi Agec.

Proposition n° 100 : Demander au Gouvernement la remise d’un rapport visant à :

– évaluer l’intérêt environnemental et économique du développement d’installations de tri mécano-biologique en parallèle de la montée en puissance du tri à la source des biodéchets ;

– évaluer la possibilité d’avancer la date du 1er janvier 2027, prévue par l’article 87 de la loi Agec, concernant l’interdiction d’utiliser la fraction fermentescible des déchets issus des installations de tri mécano-biologique dans la fabrication de compost.

 


   EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du mercredi 29 mai 2024, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a procédé à l’examen du rapport de la mission d’évaluation de l’impact de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) (M. Stéphane Delautrette et Mme Véronique Riotton, corapporteurs).

Ce point de l’ordre du jour ne fait pas l’objet d’un compte rendu écrit. Les débats sont accessibles sur le portail vidéo de l’Assemblée à l’adresse suivante :

https://assnat.fr/ZVlW43

*

À l’issue de sa réunion, la commission a autorisé la publication du rapport d’information.

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   Liste des personnes auditionnées

(par ordre chronologique)

Ministère de la transition écologique – Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

M. Vincent Coissard, sous-directeur « Déchets et économie circulaire »

Conseil national de l’économie circulaire (CNEC)

M. Jean-Michel Buf, président

Mme Nathalie Boyer, vice-présidente, déléguée générale d’ORÉE

Mme Stéphanie Lumbers, directrice en charge du développement durable de Fédération des entreprises de la beauté (Febea)  

M. Sébastien Sureau, directeur de la mission « Environnement » du Mouvement des entreprises de France (Medef)

Mme Lise Breteau, membre du collectif GreenIT

Mme Dominique Mignon, présidente d’Écomaison

Institut national de l’économie circulaire (Inec) *

Mme Emmanuelle Ledoux, directrice générale

M. Hugo Conzelmann, responsable « Affaires publiques et juridiques »

Mme Hélène Tessier, chargée de mission

Orée

Mme Nathalie Boyer, déléguée générale

M. Pierre-Yves Burlot, secrétaire général

Ministère de la transition écologique - Commissariat général du développement durable (CGDD)

Mme Audrey Coreau, cheffe du service de l’économie verte et solidaire

M. Stephane Hocquet, adjoint à la sous-directrice des entreprises

Mme Juliette Moizo, cheffe du bureau des produits et de la consommation durables

Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

– Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)

M. Ambroise Pascal, délégué à la transition écologique

– Direction générale des entreprises (DGE)

Mme Laura Grisat, sous-directrice de la chimie, des matériaux et des éco-industries

Mme Léna Poirier, directrice de projets « Économie circulaire »

Table ronde « Associations de consommateurs »

– UFC-Que choisir *

Mme Lucile Buisson, chargée de mission « Énergie, transports, environnement »

M. Olivier Andrault, chargé de mission « Alimentation et nutrition »

M. Benjamin Recher, chargé de mission « Relations institutionnelles »

– Institut national de la consommation (INC), éditeur de « 60 millions de consommateurs » *

M. Philippe Laval, directeur général

Mme Patricia Foucher, cheffe du service juridique, économique et de la documentation

Table ronde « Industriels »

– Association nationale des industries alimentaires (Ania) *

Mme Hélène Courades, directrice générale de Boissons rafraîchissantes de France (BRF)

Mme Camille Carvalho, directrice « Affaires techniques, réglementaires et scientifiques » de l’association de la transformation laitière française (Atla)

M. Simon Foucault, directeur « Affaires publiques » de l’Ania

– EC2027 *

M. Pierre-Emmanuel Saint-Esprit, directeur « Économie circulaire » 

Mme Bénédicte Barbry-Feltz, directrice « Relations extérieures, affaires publiques et développement durable » de Mobivia

Mme Alexandra Lange, consultante « Affaires publiques en économie circulaire »

– Fédération du commerce et de la distribution (FCD) *

M. Philippe Joguet, directeur « Développement durable, responsabilité sociétale des entreprises et questions financières »

Mme Sophie Amoros, responsable « Affaires publiques et communication »

– Union des industries textiles (UIT) *

Mme Sophie Frachon, responsable « Développement durable et responsabilité sociétale des entreprises »

Mme Karine Sfar, déléguée générale de la Fédération de la maille, de la lingerie et du balnéaire

M. Grégory Darcy, directeur « Développement durable » de Chantelle

 Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (Fiiec) *

Mme Florence Monier, directrice « Énergie et environnement »

M. Teoman Bakoglu, délégué général adjoint en charge des affaires publiques

Mme Anne-Charlotte Wedrychowska, directrice « Économie circulaire et responsabilité sociétale des entreprises »

– Fédération française du bâtiment (FFB) *

Mme Stéphanie Coullon, ingénieure « Environnement » à la direction des affaires techniques

M. Benoit Vanstavel, directeur « Relations institutionnelles »

Mme Léa Ligneres, chargée d’études « Relations parlementaires et institutionnelles »

Table ronde « Collectivités territoriales »

– Association des communautés de France (AdCF)

Mme Odile Begorre, vice-présidente de la communauté de communes du Bassin de Pompey, référente « Déchets »

– France Urbaine

Mme Delphine Bourdin, conseillère « Développement durable, économie sociale et solidaire, Europe »

M. Christophe Amoretti-Hannequin, conseiller « Finance responsable et achats »

M. Bastien Taloc, conseiller « Relations parlementaires »

– Association des maires de France (AMF)

Mme Florence Presson, membre du conseil, adjointe au maire de Sceaux

Mme Sylviane Oberlé, chargée de mission « Prévention des pollutions »

Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

– Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR)

M. Erwann Calonnec, directeur général des services de Trivalis, et directeur de la contractualisation et l'ingénierie territoriale au conseil départemental de la Vendée

Mme Anne Barbarin, cheffe du département « Énergie »

M. Etienne Anquetin, chargé de mission « Valorisation des déchets et économie circulaire »

Amorce *

M. Nicolas Garnier, délégué général

M. Joël Ruffy, responsable du pôle juridique et fiscal et du service institutionnel et médias

Commission inter-filières REP (Cifrep)

M. Jacques Vernier, président

Commission européenne – Direction générale de l’environnement

M. Aurel Ciobanu-Dordea, directeur en charge de l’économie circulaire

Mme Estelle Elizagoien, chargée de mission « Économie circulaire, production et consommation durables »

M. Pierre Henry, chargé de mission « Produits durables »

M. David Buhe, chargé de mission « Emballages »

Audition conjointe

– Secrétariat général des affaires européennes (SGAE)

M. Ludovic Butel, secrétaire général adjoint

M. Benoit Prévost, bureau « Environnement, énergie, climat »

M. Valentin Lutz, bureau « Environnement, énergie, climat » 

Mme Fanny Codol, bureau « Parlement »

– Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne

M. Nicolas Encausse, conseiller « Environnement »

Agence de la transition écologique (Ademe)

M. Baptiste Perrissin Fabert, directeur général délégué

Table ronde « Consigne »

– Fédération des entreprises du recyclage (Federec) *

M. François Excoffier, président

M. Christophe Viant, président de la commission plastique

– Réseau Vrac et Réemploi *

Mme Celia Rennesson, cofondatrice et directrice générale

– Association des maires de France (AMF)

M. Jean-François Vigier, vice-président, maire de Bures-sur-Yvette

Mme Sylviane Oberlé, chargée de mission « Prévention des pollutions »

Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

– Association des communautés de France (AdCF) et France Urbaine

Mme Odile Begorre, maire, vice-présidente de la communauté de commune du Bassin de Pompey, référente « Déchets »

Mme Anaëlle Contrepois, conseillère « Déchets »

– Fédération nationale des boissons (FNB) *

Mme Laure Bomy, directrice générale

– Citeo *

M. Jean Hornain, directeur général

M. Laurent Grave-Raulin, directeur « Affaires publiques et juridiques »

Mme Anne-Sophie Louvel, directrice « Opérations et territoires »

Table ronde « Éco-organismes des nouvelles filières REP »

– Cyclevia (huiles usagées) *

M. André Zaffiro, directeur général

Mme Brigitte Pouliquen, responsable des opérations

– Alcome (produits de tabac) *

Mme Marie-Noëlle Duval, directrice générale

M. Jean-François Rey, directeur « Administratif et financier »

M. Sébastien Chesbeuf, directeur conseil « Affaires publiques et relations institutionnelles » pour ASDC Int.

– Ecologic (sport et loisirs, bricolage et jardin) *

Mme Vanessa Montagne, directrice « Nouvelles filières »

M. Bertrand Reygner, directeur des relations institutionnelles et techniques

M. Quentin Bellet, responsable « Affaires publiques »

– Ecomaison (jouets, articles de jardin) *

M. Louis-Paul Laclaire, directeur général adjoint

Mme Pauline Boulard, chargée de mission « Affaires réglementaires et institutionnelles »

Table ronde « Filière REP bâtiment »

– Association des recycleurs indépendants (ARI) *

M. Patrick Armabessaire, président adjoint

M. Maurice Slotine, membre

M. Etienne de Crouy-Chanel, directeur conseil de Comfluence

– Eco-organismes :

 Ecomaison *

M. Louis-Paul Laclaire, directeur général adjoint

Mme Pauline Boulard, chargée de mission « Affaires réglementaires et institutionnelles »

 Valobat *

M. Hervé De Maistre, président

M. Jérôme Flamen d’Assigny, directeur des relations publiques

M. Sébastien Flichy, directeur des opérations

 Valdelia *

M. Arnaud Humbert-Droz, président exécutif

Mme Elodie Rivière, responsable des relations institutionnelles

 Ecominero *

M. François Demeure dit Latte, directeur général

M. Mathieu Hiblot, directeur délégué

M. Benoît Planchard, responsable des relations institutionnelles

 Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) *

M. David Amadon, directeur de la « direction technique et professionnelle »

M. Jean Yves Labat, référent « Déchets et économie circulaire »

M. Thibaut Bousquet, responsable des relations institutionnelles

 Syndicat des entreprises de déconstruction, dépollution et recyclage (Seddre)

M. Nathanaël Cornet-Philippe, délégué général

Mme Anaïs Terbeche, chef de projet « Bâtiment et environnement »

M. Raphaël Gas, directeur de Serfim Recyclage

– Fédération française du bâtiment (FFB) *

Mme Catherine Guerniou, présidente de la commission « Transition écologique »

Mme Stéphanie Coullon, ingénieure « Environnement » à la direction des affaires techniques

M. Benoit Vanstavel, directeur « Relations institutionnelles »

Mme Léa Lignères, chargée d'études « Relations parlementaires et institutionnelles »

Table ronde « Fonds réparation »

– Refashion *

Mme Maud Hardy, directrice générale

Mme Elsa Chassagnette, responsable du « Fonds réparation »

– Ecosystem *

Mme Nathalie Yserd, directrice générale

Mme Chloé Brumel-Jouan, directrice « Relations institutionnelles, juridique et contrôle interne »

– Ecologic *

M. René-Louis Perrier, président

M. Bertrand Reygner, directeur des relations institutionnelles et techniques

M. Quentin Bellet, responsable « Affaires publiques »

 Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (Fieec) *

Mme Anne-Charlotte Wedrychowska, directrice « Économie circulaire et responsabilité sociétale des entreprises »

M. Philippe de Cuetos, directeur des affaires techniques et réglementaires de l’Alliance française des industries du numérique (Afnum)

Mme Alexandrine Fadin, directrice « Économie circulaire et énergie » du Groupement des marques d’appareils pour la maison (Gifam)

– Union des industries textiles de France (UIT) *

M. Eric Boël, président de la commission « Développement durable » et directeur de « Les tissages de Charlieu »

Mme Sophie Frachon, responsable « Développement durable et responsabilité sociétale des entreprises »

Mme Myriam Joly, dirigeante de l’entreprise Missègle

– Groupement des entreprises de service et de maintenance de matériel électrique (Sirmelec)

Mme Florence Monier, déléguée générale

Table ronde « Indices de réparabilité et durabilité »

– Groupement des marques d’appareils pour la maison (Gifam) *

Mme Camille Beurdeley, déléguée générale

Mme Alexandrine Fadin, directrice « Économie circulaire et énergie »

Mme Anaïs Regnier, responsable « Développement durable »

– Murfy *

M. Guy Pezaku, président-directeur général

Mme Sarah Schönfeld, directrice des affaires publiques

– Agence de la transition écologique (Ademe)

M. Raphaël Guastavi, directeur adjoint à l’économie circulaire

M. Erwan Fangeat, ingénieur au service recyclage et éco-conception

Mme Anne-Charlotte Bonjean, ingénieure au service recyclage et éco-conception

 Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (Fieec) *

Mme Anne-Charlotte Wedrychowska, directrice « Économie circulaire et responsabilité sociétale des entreprises »

Mme Margaux De Dinechin, responsable « Affaires juridiques »

M. Philippe de Cuetos, directeur des affaires techniques et réglementaires de l’Alliance française des industries du numérique (Afnum)

– Groupement des entreprises de service et de maintenance de matériel électrique (Sirmelec)

Mme Florence Monier, déléguée générale

– Fédération Envie

M. Bruno Fradet, directeur « Métiers et développement »

Table ronde « Associations environnementales »

– Surfrider Foundation Europe *

Mme Diane Beaumenay-Joannet, responsable plaidoyer « Déchets aquatiques »

– Zero Waste France *

Mme Charlotte Soulary, responsable du plaidoyer

– France Nature Environnement (FNE) *

Mme Axèle Gibert, animatrice du réseau « Prévention et gestion des déchets »

– Les Amis de la Terre *

M. Pierre Condamine, chargé de campagne « Surproduction »

Table ronde « Valorisation des boues d’épuration »

– Amorce *

M. Nicolas Garnier, délégué général

M. Baptiste Julien, responsable du pôle « Eau »

 Syndicat des professionnels du recyclage par valorisation agronomique (Syprea) *

M. Jean-Luc Josiaud, président

M. Hervé Lefebvre, secrétaire

M. Patrick Faisques, membre

– Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR)

M. Franco Novelli, ingénieur, adjoint au chef du département « Cycle de l’eau »

M. Christophe Lime, vice-président de la métropole du Grand Besançon

M. Régis Demoly, directeur de l’eau et de l’assainissement de la Métropole du Grand Besançon

Table ronde « Vrac et emballages »

– Reloop *

Mme Clarissa Morawski, présidente directrice générale

M. Alexis Eisenberg, directeur « France et francophonie »

– Conseil national de l’emballage (CNE)

M. Michel Fontaine, président

M. Bruno Siri, délégué général

M. Fabrice Peltier, administrateur, Institut national du « design packaging »

 Citeo *

M. Jean Hornain, directeur général

M. Laurent Grave-Raulin, directeur « Affaires publiques et juridiques »

M. Valentin Fournel, directeur « Écoconception et réemploi »

– UFC-Que choisir

Mme Lucile Buisson, chargée de mission « Énergie, transport, environnement »

M. Benjamin Recher, chargé de mission « Relations institutionnelles »

– Réseau Vrac et Réemploi

Mme Lucia Pereira, directrice des affaires juridiques et réglementaires

Table ronde « Plastique »

– Elipso *

M. Gaël Bouquet, délégué général

Mme Marie Delafalize, responsable « Économie circulaire »

M. Olivier Laigre, « Group head of business development and strategy », groupe Faerch

– Plastics Europe France *

Mme Véronique Fraigneau, directrice « Communication et des affaires publiques »

– Citeo *

M. Jean Hornain, directeur général

M. Laurent Grave-Raulin, directeur « Affaires publiques et juridiques »

M. Valentin Fournel, directeur « Écoconception et réemploi »

– Elanova *

Mme Raffaella Ciampa, déléguée générale

M. Didier Chauffaille, co-président de la commission « Développement durable »

M. Islem Belkhous, directeur « Économie et relations extérieures »

– Polyvia *

M. Thierry Charles, directeur des relations publiques

Mme Caroline Chaussard, directrice « Responsabilité sociétale des entreprises »

Table ronde « Recyclage »

– Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec) *

M. Jean-François Carenco, président délégué

M. Manuel Burnand, directeur général

Mme Charlie Trisse, responsable des relations institutionnelles

– Syndicat national des entrepreneurs de la filière déchet (Snefid) *

Mme Guénola Gascoin, secrétaire générale

M. Simon Loisel, trésorier

Mme Lise Olsina, chargée des relations institutionnelles

– Fédération nationale des activités de la dépollution et de l’environnement (Fnade) *

M. Antoine Bousseau, président

Mme Muriel Olivier, déléguée générale

Mme Lucie Muniesa, présidente de la commission « Relations institutionnelles »

Table ronde « Gaspillage alimentaire »

 Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) *

Mme Anne-Marie Denis, membre du conseil d’administration

Mme Amarylis Blin, chargée de mission « Alimentation et qualité »

Mme Angélique Delahaye, présidente de Solaal

Mme Dorothée Briaumont, directrice de Solaal

– Fédération française des banques alimentaires *

Mme Barbara Mauvilain, responsable du service des relations institutionnelles

– Association nationale des industries alimentaires (Ania) *

Mme Cristina Durlesteanu, responsable « Économie circulaire »

M. Simon Foucault, directeur des affaires publiques

– Interfel *

M. Laurent Grandin, président

M. Fabien Gaucher, responsable du service des affaires juridiques

Mme Muriel Vény, responsable du service des relations institutionnelles

Régions de France

M. Jean-Michel Buf, référent « Économie circulaire »

Table ronde « Réemploi et réutilisation »

– Emmaüs *

Mme Valérie Fayard, directrice générale déléguée

M. Thomas Ladreyt, directeur général adjoint « Économie solidaire et insertion »

Mme Camille Rognant, responsable du service « Développement économique »

– Fédération Envie

M. Guillaume Balas, délégué général

M. Bruno Fradet, directeur « Métiers et développement »

Mme Nesrine Dani, directrice « Partenariats et innovation »

– Réseau national des ressourceries et recycleries

Mme Catherine Mechkour Di Maria, secrétaire générale

M. Martin Bobel, administrateur

– ESS France *

Mme Aurore Médieu, responsable « Transition écologique et économie circulaire »

– Agence du don en nature *

M. Romain Canler, directeur général

M. Faudhil Moussi, responsable « Affaires publiques »

M. Charles Broume, chargé de mission

– Fédération des entreprises d’insertion *

M. Guillaume Labbé, responsable « Filières et développement économique »

M. Matthieu Grosset, dirigeant de l’entreprise « Demain environnement »

Ministère de l’intérieur – Direction générale des collectivités locales (DGCL) – Sous-direction des compétences et des institutions locales

Mme Isabelle Dorliat-Pouzet, sous-directrice

Mme Hélène Martin, adjointe à la sous-directrice

Table ronde « Véhicules »

– Mobilians *

Mme Dorothée Dayraut Jullian, directrice des affaires publiques

M. Patrick Poincelet, président de la branche « Recycleurs véhicules hors d’usage »

M. Laurent Herail, vice-président de la branche « Recycleurs véhicules hors d’usage »

Mme Claire Lichawski, chargée de métier « Recycleurs véhicules hors d’usage »

– Mobivia *

Mme Bénédicte Barbry-Feltz, directrice des affaires publiques et du développement durable

– Chambre syndicale internationale de l’automobile et du motocycle *

Mme Athina Argyriou, présidente déléguée

M. Jérôme Poirot, consultant

Mme Noémie Chemla, consultante

Ministère du travail, de la santé et des solidarités

– Direction générale de la santé (DGS)

Mme Laurence Cate, sous-directrice adjointe de la prévention des risques liés à l’environnement

Mme Caroline Paul, cheffe de bureau de l’environnement extérieur et des produits chimiques

M. Charles-Emmanuel Barthélémy, sous-directeur adjoint de la politique des produits de santé et de la qualité des pratiques

Mme Esther Lepaicheux, cheffe de bureau des dispositifs médicaux et autres produits de santé

– Direction générale de l’offre de soins (DGOS)

Mme Hélène Gilquin, cheffe de projets « Élus, territoires et transition écologique du système de santé »

Mme Véronique Chasse, adjointe du programme « Phare », sous-direction du pilotage de la performance des acteurs de l’offre soins

Table ronde « Santé »

– Fédération hospitalière de France (FHF) *

Mme Stéphanie Geyer, cheffe du département territorial « Investissement et logistique » du Centre hospitalier régional universitaire de Nancy

M. Rudy Chouvel, chargé de mission

M. Augustin Viard, chargé de mission

– Dastri *

Mme Laurence Bouret, directeur général

M. Yannick Jegou, président

M. Théo Hudelist, consultant « Affaires publiques » à Comfluence

– Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) *

M. Denis Millet, secrétaire général

Mme Jocelyne Wittevrongel, conseillère du président

– Union nationale des prestataires de dispositifs médicaux (UNDPM) *

M. Jean-Roch Meunier, président

Mme Julia Crépin, déléguée générale

M. Pierre-Henri Casamayou, délégué général adjoint

– Fédération Envie - Autonomie

M. Philippe Robin, directeur général, président du directoire

Table ronde « Obsolescence programmée »

– Fédération Française des Télécoms (FFT) *

M. Olivier Riffard, directeur général adjoint

Mme Sabah Doudou, directrice « Affaires publiques » d’Altice-SFR

M. Corentin Durand, responsable « Affaires publiques » de Bouygues Telecom

Mme Flaminia le Maignan, direction des affaires publiques d’Orange

– Halte à l’obsolescence programmée (HOP) *

Mme Laetitia Vasseur, déléguée générale

Mme Flavie Vonderscher, responsable du plaidoyer

– Alliance française des industries numériques (Afnum) *

M. Philippe de Cuetos, directeur des affaires techniques et réglementaires

Mme Clara Grojean, responsable « Environnement »

Mme Eva Marxer, chargée de mission « Affaires publiques et communication »

– Cigref

Mme Flora Fischer, directrice de mission, déléguée au numérique responsable

– Rcube *

M. Benoît Varin, président

Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

– Direction des achats de l’État

Mme Sandrine Jarry, sous-directrice de la modernisation des achats

Mme Malika Kessous, cheffe du bureau des achats responsables

– Direction des affaires juridiques

M. Raphaël Arnoux, sous-directeur du droit de la commande publique

Mme Flora Vigreux, adjointe au chef de bureau de l’économie, des statistiques et techniques de l’achat public

Mme Jeanne Glachant, chargée de mission « Développement durable et innovation dans la commande publique »

Table ronde « Achats publics »

– Union des groupements d’achats publics (Ugap) *

M. Lionel Ferraris, directeur des politiques publiques et du pilotage de l’offre

– Observatoire achats responsables (ObsAR)

Mme Stéphanie Kerbarh, ancienne députée, co-rapporteure de la loi Agec

Mme Ghislaine Demette, chargée de mission ministérielle des achats responsables au ministère des Armées

Observatoire national du réemploi et de la réutilisation

M. Jean-Charles Caudron, directeur de la direction de la supervision des REP

M. Eric Vesine, directeur adjoint de la direction de la supervision des REP

Mme Marie Hervier, coordinatrice

Table ronde organisations patronales

– Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) *

Mme Sandrine Bourgogne, secrétaire générale adjointe

Mme Zoé Lagarde, responsable « Développement durable »

Mme Solène Chambard, mandataire au Conseil national de l’économie circulaire (CNEC)

– Mouvement des entreprises de France (Medef) *

Mme Cathy Dufour, directrice générale de la Fédération de l’ameublement

M. Philippe Joguet, directeur « Développement durable et responsabilité sociétale des entreprises » de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD)

Secrétariat général à la planification écologique (SGPE)

M. Antoine Pellion, secrétaire général à la planification écologique

Mme Cécilia Berthaud, secrétaire générale adjointe

Mme Lohengrine Schulz, directrice de programme

Personnes qualifiées :

– M. Jean-Paul Ventère, ancien chargé de mission au ministère de la transition écologique, auteur de La qualité écologique des produits

– Mme Géraldine Poivert, présidente de The (Re)set compagny

Mme Sophie Aubert, directrice conseil de The (Re)set company

M. Ashly Doré, consultant, chef de cabinet de Mme Poivert

Table ronde sur le commerce en ligne

– Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad) *

Mme Pauline Fiquémont, responsable « Responsabilité sociétale des entreprises, paiement et logistique »

M. Moncef Lameche, responsable « Affaires publiques »

Mme Marie Guillemot, responsable « Sustainability strategy » pour La Redoute

Mme Géraldine Olivier, responsable « Responsabilité sociétale des entreprises » du groupe Fnac-Darty

– Alliance française des places de marché (AFPMD) *

M. Pierre Sellin, consultant « Affaires publiques »

Mme Charlotte Cheynard, « Senior manager EU affairs » pour Ebay

M. Paul Smail, juriste « compliance » pour Rakuten

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 


   Liste des contributions Écrites

(par ordre alphabétique)

Abbott *

Adivalor

Alliance carton nature (ACN) *

Alliance du commerce *

Altaroad Trace *

Association chimie du végétal (ACV) *

Association de la transformation laitière française (Atla)

Association française des compostables biosourcés (AFCB) *

CampoSPHERE

Comité français de l’emballage papier carton (Cofepac) *

Confédération des grossistes de France (CGF) *

Consommation logement cadre de vie (CLCV) *

Éco-organismes de la filière des pneumatiques (Aliapur *, FRP, Tyval)

Fédération de la mode circulaire *

Fédération des distributeurs de produits alimentaires spécialisés (Fedalis)

Fédération des entreprises de la beauté (Febea) *

Fédération des industries des peintures, encres, couleurs, colles et adhésifs, résines (Fipec) *

Fédération des magasins de bricolage et de l’aménagement de la maison (FMB) *

Fédération française des spiritueux (FFS) *

Fédération nationale des éleveurs de chèvres (FNEC) * et Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL)

Filière de l’emballage métallique - contribution conjointe :

-         Syndicat national des fabricants de boîtes, emballages et bouchages métalliques (SNFBM)

-         GIE La Boîte Boisson (GIE LBB) *

-         Aluminium France *

-         Alliance des minerais, minéraux et métaux (A3M) *

-         ArcelorMittal/Recyclacier

-         France Aluminium Recyclage (FAR) *

Institut professionnel du lait de consommation (IPLC) *

Jacobs Douwe Egberts (JDE) *

L’ameublement français *

Le fourgon

Maif *

Maison des eaux minérales naturelles (MEMN) *

Michelin *

No plastic in my sea

Novo Nordisk *

Plateforme de la filière automobile (PFA) *

Région Nouvelle Aquitaine

Réseau compost citoyen (RCC)

Suez *

Synabio, Forebio, Synadis bio

Syndicat des eaux de source et des eaux minérales naturelles (SESEMN) *

Syndicat des professionnels du recyclage, de la valorisation, de la régénération et du traitement des déchets dangereux (Sypred) *

Syndicat national de l’alimentation et de la restauration rapide (Snarr) *

Tomra *

Union des entreprises de proximité (U2P) *

Union française des industries mode et habillement (Ufimh) *

Union nationale artisanale de la couture et des activités connexes (Unacac)

Union sport et cycle *

United.B

Veolia *

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 

 

 


([1]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([2]) Loi n° 2021-1485 du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France.

([3]) Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte.

([4]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([5]) « Rapport groupe de travail évaluation n° 7 », pour le Conseil national de l’économie circulaire, Mme Dominique Mignon et M. Matthieu Glachant.

([6]) Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement.

([7]) Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.

([8]) Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

([9]https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/cnc/avis/2023/Allegations_environnementales/guide_2023.pdf

([10]) https://signal.conso.gouv.fr/fr

([11]) https://www.jdp-pub.org/avis/la-poste-colissimo-internet/  

([12]) https://librairie.ademe.fr/ged/6965/affichage-env-produits-alimentaires-rapport-2022.pdf  

([13]) https://librairie.ademe.fr/ged/7036/rapport-parlement-bilan-affichage-environnemental-agec-2022.pdf  

([14]) https://ecobalyse.beta.gouv.fr/#/  

([15]) https://www.quechoisir.org/action-ufc-que-choisir-nutri-score-seule-une-obligation-de-l-afficher-poussera-les-industriels-de-la-malbouffe-a-ameliorer-leurs-recettes-n107018/?dl=115766  

([16]) Baromètre de la consommation responsable, GreenFlex/Ademe, octobre 2022.

([17]) Le guide de la communication responsable, Ademe, 2022.

([18]) https://communication-responsable.ademe.fr/campagne-de-lademe-posons-nous-les-bonnes-questions-avant-dacheter  

([19]) La mission sera menée par trois inspections : l’Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD), l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires culturelles (IGAC).

([20]) https://librairie.ademe.fr/ged/7185/rex_indice_reparabilite_ieic_odoxa_rapport_juin22.pdf  

([21]https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Rapport%20sur%20l%27indice%20de%20re%CC%81parabilite%CC%81.pdf

([22]) https://www.halteobsolescence.org/wp-content/uploads/2022/11/Synthese-rapport-indice-de-reparabilite.pdf  

([23]) https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-39175-rapport-ufc-murfy-indice-reparabilite.pdf

([24]) https://monindicedereparabilite.fr/home  

([25]) https://schema.data.gouv.fr/etalab/schema-indice-reparabilite/0.1.1/  

([26]) Ce sondage, réalisé dans le cadre des travaux de préfiguration de l’indice de durabilité, n’a pas fait l’objet d’une publication.

([27]) Décret n° 2024-316 du 5 avril 2024 relatif à l’indice de durabilité des équipements électriques et électroniques et arrêté du 5 avril 2024 relatif aux modalités d’affichage, à la signalétique et aux paramètres généraux de calcul de l’indice de durabilité des équipements électriques et électroniques.

([28]) Arrêté du 5 avril 2024 relatif aux critères, aux sous critères et au système de notation pour le calcul et l’affichage de l’indice de durabilité des téléviseurs et arrêté du 5 avril 2024 relatif aux critères, aux sous critères et au système de notation pour le calcul et l’affichage de l'indice de durabilité des lave-linge ménagers.

([29]) https://technical-regulation-information-system.ec.europa.eu/fr/notification/24323

([30]) Réponse du 5 février 2024 à l’avis circonstancié de la Commission européenne.

([31]) https://presse.ademe.fr/wp-content/uploads/2020/06/CP-Allongement-et-re%CC%81paration-10062020.pdf?v=1711026091  

([32]) Décret n° 2024-123 du 20 février 2024 relatif aux fonds dédiés au financement de la réparation des produits relevant du principe de responsabilité élargie du producteur.

([33]) Arrêté du 10 novembre 2023 portant diverses dispositions relatives aux fonds dédiés au financement de la réparation, du réemploi et de la réutilisation des produits relevant du principe de responsabilité élargie du producteur.

([34]) https://www.halteobsolescence.org/rapport-hop-bonus-reparation/  

([35]) https://www.capital.fr/conso/bonus-reparation-pourquoi-les-clients-de-fnac-darty-ne-peuvent-pas-en-profiter-1469528  

([36]) https://www.francetravail.fr/actualites/le-dossier/commerce-vente/reparation-sav/reparateur-dappareils-electromen.html  

([37]) https://www.actu-environnement.com/ae/news/video-electromenager-reparation-bonus-murphy-recrutement-42940.php4  

([38]) https://librairie.ademe.fr/7182-bilan-3r-en-2023-pour-les-emballages-en-plastique-a-usage-unique-en-france.htm

([39]) Précité.

([40]) Article 64 paragraphe cb (plastique) et article 22 paragraphe 1c (autres matériaux) du règlement.

([41]) Décret n° 2021-1318 du 8 octobre 2021 relatif à l’obligation de présentation à la vente des fruits et légumes frais non transformés sans conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique.

([42]) Décret n° 2020-1724 du 28 décembre 2020 relatif à l’interdiction d’élimination des invendus non alimentaires et à diverses dispositions de lutte contre le gaspillage.

([43]) Décision n° 2023-1055 QPC du 16 juin 2023.

([44]) https://presse.ademe.fr/2023/06/reduction-reemploi-et-recyclage-des-emballages-menagers-lademe-presente-8-nouvelles-etudes.html  

([45]) https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-43259-rapport-points-eau-erp.pdf  

([46]) Île-de-France, Centre-Val-de-Loire, Bourgogne-Franche-Comté, Normandie, Hauts-de-France, Grand-Est, Pays-de-la-Loire, Bretagne, Nouvelle Aquitaine, Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Corse.

([47]) https://reporterre.net/Lait-aliments-pour-bebe-tampons-Ces-produits-interdits-de-vrac  

([48])  https://librairie.ademe.fr/ged/6520/panorama-evaluation-environnementale-vrac-france_rapport1-v2.pdf

([49])  https://www.philippe-bolo.fr/wp-content/uploads/2023/11/document-de-synthese-format-a5-2.pdf

([50]) https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-43400-registre-solutions-harmonisees-vrac.pdf  

([51]) Décret n° 2022-507 du 8 avril 2022 relatif à la proportion minimale d’emballages réemployés à mettre sur le marché annuellement.

([52]) https://librairie.ademe.fr/ged/7717/comptabilisationreemploi-2023-rapport.pdf  

([53]) Rapport annuel, Ecosystem, 2022.

([54]) Par exemple, jedonnemonelectromenager.fr ou jedonnemontelephone.fr, dispositifs lancés par l’éco-organisme Ecosystem.

([55]) https://librairie.ademe.fr/ged/8192/Potentiels-Developpement-Reemploi-Emballages-Par-Secteur-Rapport-2023.pdf

([56]) https://librairie.ademe.fr/ged/3661/panorama-deuxieme-vie-201711-rapport-051217.pdf  

([57]) https://data.ademe.fr/applications/carte-des-centres-de-lavage-test-carto-stats?lat=41.41020954547545&lng=1.7507788999205331&zoom=2.8883095104573955  

([58]) https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/6359-evaluation-environnementale-de-la-consigne-pour-le-reemploi-des-emballages-en-verre-en-france.html  

([59]) La DGPR a précisé qu’il s’agissait des données disponibles les plus récentes, rapportées à la Commission européenne en 2023.

([60]) Décret n° 2021-1906 du 30 décembre 2021 modifiant le décret n° 2020-1651 du 22 décembre 2020 relatif au label national « anti-gaspillage alimentaire » en application de l’article L. 541-15-6-1-1 du code de l’environnement.

([61]) Arrêté du 28 février 2023 portant application de l’article D. 541-216 du code de l’environnement et approuvant le référentiel du label national « anti-gaspillage alimentaire » pour le secteur de la distribution.

([62]https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Liste_%C3%A9tablissements_labellis%C3%A9s_antigaspi.pdf

([63]) Décret n° 2022-100 du 31 janvier 2022 relatif à la délivrance à l’unité de certains médicaments.

([64]) Arrêté du 1er mars 2022 portant création de la liste des spécialités pouvant être soumises à une délivrance à l’unité en application de l’article R. 5132-42-2 du code de la santé publique.

([65]) Décret n° 2024-205 du 8 mars 2024 relatif à l’encadrement des conventions de cession à titre gratuit de matériel médical aux structures de l’économie sociale et solidaire par l’article L. 541-15-13 du code de l’environnement.

([66]) Réponse au questionnaire par la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) – données rapportées à la Commission européenne (Eurostat).

([67]) « Accelerating the circular economy in Europe », Agence européenne pour l’environnement.

([68]) France nature environnement, Les amis de la Terre, No plastic in my sea, Surfrider, Zero Waste : « Évaluation de la loi Agec : 4 ans après, quel bilan pour la réduction des déchets ? ».

([69]) Directive 2008/98 du 19 novembre 2008 relative aux déchets.

([70]) Ademe : « Déchets chiffres-clés, L’essentiel en 2022 ».

([71]) Décret n° 2021-1941 du 31 décembre 2021 relatif à la responsabilité élargie des producteurs pour les produits et les matériaux de construction du secteur du bâtiment.

([72]) Arrêté du 10 juin 2022 portant cahier des charges des éco-organismes, des systèmes individuels et des organismes coordonnateurs de la filière à responsabilité élargie du producteur des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment.

([73]) Arrêté du 30 septembre 2022 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur de produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB) (Ecominero – Ecomaison – Valobat).

([74]) Ademe : « Déchets chiffres-clés, L’essentiel en 2022 ».

([75]) Réponse au questionnaire du syndicat des entreprises de déconstruction, dépollution et recyclage.

([76]https://www.actu-environnement.com/ae/news/chiffres-collecte-dechets-batiment-pmcb-43852.php4

([77]) Arrêté du 28 février 2023 modifiant le cahier des charges des éco-organismes de la filière à responsabilité élargie du producteur des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment annexé à l'arrêté ministériel du 10 juin 2022.

([78]) Réponse au questionnaire de la fédération française du bâtiment.

([79]) Arrêté du 20 février 2024 modifiant le cahier des charges des éco-organismes de la filière à responsabilité élargie du producteur des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment annexé à l'arrêté ministériel du 10 juin 2022.

([80]https://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/projet-d-arrete-ministeriel-modifiant-les-cahiers-a3014.html

([81]) Décret n° 2021-1213 du 22 septembre 2021 relatif aux filières de responsabilité élargie des producteurs portant sur les jouets, les articles de sport et de loisirs, et les articles de bricolage et de jardin.

([82]) Arrêté du 27 octobre 2021 portant cahier des charges des éco-organismes et des systèmes individuels de la filière à responsabilité élargie du producteur des articles de sport et de loisirs.

([83]) Arrêté du 27 octobre 2021 portant cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels de la filière à responsabilité élargie du producteur des articles de bricolage et de jardin.

([84]) Arrêté du 27 octobre 2021 portant cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels de la filière à responsabilité élargie du producteur des jouets.

([85]) Arrêté du 31 janvier 2022 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des articles de sport et de loisirs.

([86]) Réponse au questionnaire d’Ecologic.

([87]) Réponse au questionnaire d’Ecologic.

([88]) Arrêté du 24 février 2022 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des articles de bricolage et de jardin.

([89]) Arrêté du 24 février 2022 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des articles de bricolage et de jardin.

([90]) Arrêté du 21 avril 2022 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des articles de bricolage et de jardin.

([91]) Arrêté du 21 décembre 2023 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des articles de bricolage et de jardin.

([92]) Arrêté du 23 novembre 2023 portant modification de l'arrêté du 27 octobre 2021 modifié portant cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels de la filière à responsabilité élargie du producteur des articles de bricolage et de jardin.

([93]) Réponses au questionnaire d’Ecomaison et d’Ecologic.

([94]) Arrêté du 21 avril 2022 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des jouets.

([95]) Décret n° 2021-1395 du 27 octobre 2021 relatif à la gestion des huiles usagées et à la responsabilité élargie des producteurs d'huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles.

([96]) Arrêté du 27 octobre 2021 portant cahier des charges des éco-organismes de la filière à responsabilité élargie du producteur des huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles.

([97]) Arrêté du 24 février 2022 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles.

([98]) Réponse au questionnaire de Cyclevia

([99]) Rapport d’activité de Cyclevia,

2022 : https://www.cyclevia.com/post/cycle-2022-le-premier-rapport-d-activit%C3%A9-de-cyclevia

([100]) Directive 2019/904 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement.

([101]) Arrêté du 5 février 2021 portant cahier des charges d'agrément des éco-organismes de la filière à responsabilité élargie du producteur des produits du tabac.

([102]) Arrêté du 28 juillet 2021 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des produits du tabac équipés de filtres composés en tout ou partie de plastique et des produits qui sont destinés à être utilisés avec des produits du tabac relevant du 19° de l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement.

([103]) Arrêté du 23 novembre 2022 portant cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels de la filière à responsabilité élargie du producteur des produits du tabac.

([104]) Directive (UE) 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement.

([105]) Réponse au questionnaire d’Alcome.

([106]) Infographie disponible sur le site d’Alcome (données 2020).

([107]) Décret n° 2024-359 du 18 avril 2024 relatif à la participation des éco-organismes agréés pour les produits du tabac à la prévention des incendies de forêt, et à l'autorité administrative compétente pour prendre les sanctions en cas d'inobservation des dispositions du III de l'article L. 541-15-10 du code de l'environnement.

([108]) Arrêté du 18 avril 2024 modifiant le cahier des charges des éco-organismes de la filière à responsabilité élargie des producteurs de produits du tabac et fixant la part annuelle minimale des contributions à consacrer aux actions de sensibilisation au risque d'incendie lié à l'abandon de mégots.

([109]) Point 21° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement.

([110]) Décret n° 2022-1495 du 24 novembre 2022 relatif à la gestion des véhicules hors d'usage et à la responsabilité élargie des producteurs de voitures particulières, de camionnettes, de véhicules à moteur à deux ou trois roues et quadricycles à moteur.

([111]) Arrêté du 20 novembre 2023 portant cahiers des charges des éco-organismes, des systèmes individuels et des organismes coordonnateurs de la filière à responsabilité élargie des producteurs de voitures particulières, de camionnettes, de véhicules à moteur à deux ou trois roues et quadricycles à moteur.

([112]) Arrêté du 8 avril 2024 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie des producteurs de voitures particulières, de camionnettes, de véhicules à moteur à deux ou trois roues et quadricycles à moteur.

([113]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([114]) Décret n° 2023-162 du 7 mars 2023 relatif aux déchets d'emballages et instituant la filière de responsabilité élargie des producteurs d'emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les professionnels ayant une activité de restauration.

([115]) Arrêté du 20 juillet 2023 portant cahier des charges des éco-organismes, des systèmes individuels et des organismes coordonnateurs de la filière à responsabilité élargie des producteurs d'emballages servant à commercialiser des produits consommés ou utilisés par des professionnels ayant une activité de restauration et portant modification de l'arrêté du 29 novembre 2016 modifié relatif à la procédure d'agrément et portant cahier des charges des éco-organismes de la filière des emballages ménagers.

([116]) Arrêté du 11 mars 2024 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur d'emballages servant à commercialiser des produits consommés ou utilisés par des professionnels ayant une activité de restauration.

([117]) Montants indiqués dans la lettre de mission visant à réformer la gouvernance, la régulation économique et le fonctionnement des éco-organismes.

([118]) Arrêté du 27 décembre 2023 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des pneumatiques (Aliapur – Tyval) et arrêté du 21 décembre 2023 portant agrément d'un éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur des pneumatiques (France Recyclage Pneumatiques).

([119]) Décret n° 2020-1455 du 27 novembre 2020 portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs.

([120]) Décret n° 2020-1249 du 12 octobre 2020 relatif à la commission inter-filières de responsabilité élargie des producteurs.

([121]) Directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets.

([122]) Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([123]https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/ALCOME_Decision_astreinte.pdf

([124]https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/20240229%20ALCOME_decision_de_liquidation_partielle_de_lastreinte.pdf

([125]) Décret n° 2020-1455 du 27 novembre 2020 portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs.

([126]https://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/projet-d-arrete-fixant-les-modulations-applicables-a2928.html

([127]https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000049445828

([128]) Loi n° 2021-1485 du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France.

([129]https://www.halteobsolescence.org/wp-content/uploads/2024/04/Rapport-HOP-obsolescence-dans-lautomobile-vers-des-voitures-jetable.pdf

([130]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([131]https://openrepair.org/open-data/insights/laptops/

https://openrepair.org/open-data/insights/mobiles/

([132]) Ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021 relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques.

([133]) Directive (UE) 2019/771 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 relative à certains aspects concernant les contrats de vente de biens, modifiant le règlement (UE) 2017/2394 et la directive 2009/22/CE et abrogeant la directive 1999/44/CE.

([134]) Directive (UE) 2019/770 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 relative à certains aspects concernant les contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques.

([135]) Décret n° 2021-1610 du 9 décembre 2021 relatif à l'incorporation de plastique recyclé dans les bouteilles pour boissons.

([136]) Directive (UE) 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement.

([137]) Arrêté du 7 décembre 2023 portant cahier des charges des éco-organismes et des systèmes individuels de la filière à responsabilité élargie des producteurs des emballages ménagers, des imprimés papiers et des papiers à usage graphique.

([138]) « Chiffres clés FEDEREC, le marché du recyclage », 2022.

([139]) « The Circular Economy for Plastics, a european Analysis », mars 2024.

([140]) Réponse au questionnaire de Federec, Fnade et Snefid.

([141]) Données issues d’Actu Environnement : https://www.actu-environnement.com/ae/news/bilan-2023-srp-recyclage-plastique-incorporation-43770.php4

([142]) Règlement d’exécution (UE) 2024/1040 de la Commission du 27 mars 2024 instituant un droit antidumping définitif sur les importations de certains types de polyéthylène téréphtalate originaires de la République populaire de Chine.

([143]) Intercommunalités de France, La commande publique en 2021, Focus (novembre 2022).

([144]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([145]) Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte.

([146]) Décret n° 2021-254 du 9 mars 2021 relatif à l'obligation d'acquisition par la commande publique de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées.

([147]) Réponse au questionnaire du commissariat général au développement durable (CGDD).

([148]) Décret n° 2024-134 du 21 février 2024 relatif à l'obligation d'acquisition par la commande publique de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées et à l'interdiction d'acquisition par l'Etat de produits en plastique à usage unique.

([149]) Données issues du rapport au Parlement sur l’article 58.

([150]) Loi n° 2021-1485 du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France.

([151]) https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Guide%20IR%20Achat%20durable%202022.pdf

([152]https://www.intercommunalites.fr/publications/guide-juridique-commande-publique-responsable/

([153]) Arrêté du 27 juin 2023 portant cahiers des charges des éco-organismes, des systèmes individuels et des organismes coordonnateurs de la filière à responsabilité élargie du producteur des pneumatiques.

([154]) Décret n° 2023-266 du 12 avril 2023 fixant les objectifs et modalités de réemploi et de réutilisation des matériels informatiques réformés par l'État et les collectivités territoriales.

([155]https://dons.encheres-domaine.gouv.fr

([156]) Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.

([157]) Question écrite de M. Didier Le Gac (Renaissance) n° 4036, publiée le 13 décembre 2022 ; réponse publiée le 6 juin 2023.

([158]) Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte.

([159]) https://www.ecologie.gouv.fr/mooc-engagez-vous-dans-lachat-durable

([160]) Décret n° 2021-835 du 29 juin 2021 relatif à l'information des consommateurs sur la règle de tri des déchets issus des produits soumis au principe de responsabilité élargie du producteur.

([161]) https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000047477673

([162]) Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

([163]) Arrêté du 4 janvier 2019 portant modification du cahier des charges des éco-organismes de la filière des déchets d’emballages ménagers en application des articles L. 541-10 et R. 543-53 à R. 543-65 du code de l’environnement.

([164]) Réponse au questionnaire de la direction générale de la prévention des risques (DGPR).

([165]) Arrêté du 7 décembre 2023 portant cahier des charges des éco-organismes et des systèmes individuels de la filière à responsabilité élargie des producteurs des emballages ménagers, des imprimés papiers et des papiers à usage graphique.

([166]) Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement.

([167]) Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

([168]) Directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives.

([169]) Ademe : https://infos.ademe.fr/magazine-decembre-2023-janvier-2024/faits-et-chiffres/tri-a-la-source-des-biodechets-etat-des-lieux/

([170]) Réponse au questionnaire de l’association Amorce.

([171]) Avis du 6 décembre 2023 relatif aux solutions techniques applicables pour la mise en place du tri à la source des biodéchets dans le cadre du service public de gestion des déchets.

([172]) Ademe : https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/6107-tri-a-la-source-des-biodechets.html

([173]) Rapport d’alerte de la Commission européenne : https://op.europa.eu/fr/publication-detail/-/publication/118e2ae3-0354-11ee-87ec-01aa75ed71a1/language-en

([174]) Ademe : https://presse.ademe.fr/2023/10/tri-a-la-source-des-biodechets-tous-mobilises-pour-valoriser-ces-ressources-encore-trop-gaspillees.html

([175]) Rapport provenant de la Confédération des métiers de l’environnement (CME) : https://www.cme-france.fr/_files/ugd/4430e6_f72df4e61dd84c3a988a64a8956c755c.pdf

([176]) Rapport de l’Anses : https://www.anses.fr/fr/system/files/CONSO2021SA0202Ra.pdf

([177]) Arrêté du 15 mars 2022 listant les emballages et déchets compostables, méthanisables et biodégradables pouvant faire l'objet d'une collecte conjointe avec des biodéchets ayant fait l'objet d'un tri à la source.

([178]) Réponse commune au questionnaire de France nature environnement, Zero Waste France, Les amis de la Terre, Surfrider et No plastic in my sea.

([179]) Arrêté du 15 mars 2022 listant les emballages et déchets compostables, méthanisables et biodégradables pouvant faire l'objet d'une collecte conjointe avec des biodéchets ayant fait l'objet d'un tri à la source.

([180]) https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/6358-evaluation-du-taux-de-collecte-des-bouteilles-en-plastique-de-boisson-pour-2021-et-2022.html  

([181]) https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/6356-scenarios-avec-et-sans-consigne-pour-recyclage-des-emballages-de-boisson.html  

([182]) Estimation réalisée par le cercle national du recyclage.

([183]) https://www.apvf.asso.fr/wp-content/uploads/2023/06/14-Propositions-Consignes.pdf  

([184]) https://www.actu-environnement.com/ae/news/accord-parlement-conseil-projet-reglement-emballages-43612.php4  

([185]) https://librairie.ademe.fr/ged/8441/Tarification-incitative-2021-bilan-collectivites-rapport.pdf  

([186]) https://presse.ademe.fr/wp-content/uploads/2024/01/Dossier-de-presse-Reduire-les-dechets-Les-solutions-a-disposition-des-collectivites-17.01.2024.pdf  

([187]) Cet objectif est défini par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

([188]) Couverture minimale, selon l’Ademe, pour contribuer au respect des objectifs de collecte pour recyclage.

([189]) https://www.ccomptes.fr/fr/publications/prevention-collecte-et-traitement-des-dechets-menagers  

([190])  Article 1641 du code général des impôts.

([191]) https://www.senat.fr/rap/r22-850/r22-8501.pdf  

([192]) Dossier de presse de la loi Agec :https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/DP%20Loi%20anti-gaspillage.pdf

([193]) Arrêté du 12 octobre 2023 portant cahiers des charges d'agrément des éco-organismes, des systèmes individuels et des organismes coordonnateurs de la filière à responsabilité élargie du producteur des éléments d'ameublement désignés à l'article R. 543-240 du code de l'environnement.

([194]) Données issues de l’article d’Actu Environnement : https://www.actu-environnement.com/ae/news/REP-decheteries-publiques-collectivites-negociation-capacite-collecte-41230.php4

([195]) Ademe, « Caractérisation de la problématique des déchets sauvages », février 2019.

([196]) Dossier de presse de la loi Agec : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/DP%20Loi%20anti-gaspillage.pdf

([197]) Décret n° 2020-1455 du 27 novembre 2020 portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs.

([198]) Rapport d’activité de Gestes propres :

https://www.gestespropres.com/wp-content/uploads/2023/07/Rapport-dActivites-2022.pdf

([199]) Décret n° 2020-1575 du 11 décembre 2020 relatif à l'habilitation et à l'assermentation des agents des collectivités territoriales en application de l'article L. 541-44-1 du code de l'environnement.

([200]) Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte.

([201]) Réponse au questionnaire de la direction générale de la prévention des risques (DGPR)

([202]) Contribution de l’Association des communes et des collectivités d’outre-mer (Accd’om) suite à la table ronde sur la gestion des déchets dans les outre-mer, organisée en janvier 2024 par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, et la délégation aux outre-mer.

([203]) Sénat, Rapport d'information n° 195, « La gestion des déchets dans les outre-mer ».

([204]) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045159981/

([205]) Décret n° 2021-838 du 29 juin 2021 relatif à la priorité d'accès aux installations de stockage de déchets non dangereux pour les déchets et résidus de tri issus d'installations de valorisation de déchets performantes.

Arrêté du 29 juin 2021 pris pour l'application de l'article L. 541-30-2 du code de l'environnement relatif aux critères de performances d'une opération de tri des déchets non dangereux non inertes.

([206])https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000049345291?init=true&page=1&query=456187&searchField=ALL&tab_selection=all

([207]) https://www.citeo.com/le-mag/les-chiffres-du-recyclage-en-france

([208]) https://refashion.fr/rapport-activite/2022/#page/51

([209]) Ademe : « Mémo REP, données 2021 ».

([210]) https://environment.ec.europa.eu/publications/waste-early-warning-reports-2023-country-specific-factsheets_en

([211]) Réponse au questionnaire de la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec), du Syndicat national des entrepreneurs de la filière déchets (Snefid), la Fédération nationale des activités de dépollution de l’environnement (Fnade).

([212]) Ademe : « Bilan national du recyclage 2012-2021 » : https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/6959-bilan-national-du-recyclage-bnr-2012-2021.html

([213]) Réponse au questionnaire de la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec), du Syndicat national des entrepreneurs de la filière déchets (Snefid), la Fédération nationale des activités de dépollution de l’environnement (Fnade).

([214]) Federec, « Chiffres-clés 2022 ».

([215]) Réponse au questionnaire de la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec), du Syndicat national des entrepreneurs de la filière déchets (Snefid), la Fédération nationale des activités de dépollution de l’environnement (Fnade).

([216]) Rapport d’activité 2022 de Citeo :

https://bo.citeo.com/sites/default/files/2023-10/CITEO-Rapport%20activite-2022.pdf

([217]) Note n° 39 de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) : « Le recyclage des plastiques ».

([218]) Réponse au questionnaire de la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec), du Syndicat national des entrepreneurs de la filière déchets (Snefid), la Fédération nationale des activités de dépollution de l’environnement (Fnade).

([219]) Réponse au questionnaire d’Amorce : 6 millions de tonnes en 2019.

([220]) Syprea, « La valorisation des boues d’épuration, un enjeu collectif pour demain » :

https://www.syprea.org/wp-content/uploads/2021/10/SYPREA_2021_Plaquette_Valorisation-des-boues-depuration.pdf

([221]) Réponses au questionnaire du syndicat des professionnels du recyclage par valorisation agronomique (Syprea) et d’Amorce.

([222]) Arrêté du 8 janvier 1998 fixant les prescriptions techniques applicables aux épandages de boues sur les sols agricoles pris en application du décret n° 97-1133 du 8 décembre 1997 relatif à l'épandage des boues issues du traitement des eaux usées.

([223]) Décret n°2021-1179 du 14 septembre 2021 relatif au compostage des boues d’épuration et digestats des boues d’épuration avec des structurants.

([224])https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000047772020?juridiction=CONSEIL_ETAT&juridiction=COURS_APPEL&juridiction=TRIBUNAL_ADMINISTATIF&juridiction=TRIBUNAL_CONFLIT&page=1&pageSize=10&query=d%C3%A9chet&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=cetat

([225]) Réponse au questionnaire de la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec), du Syndicat national des entrepreneurs de la filière déchets (Snefid), la Fédération nationale des activités de dépollution de l’environnement (Fnade).

([226]) Rapport d’alerte de la Commission européenne : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_23_3105

([227]) Réponse au questionnaire de la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec), du Syndicat national des entrepreneurs de la filière déchets (Snefid), la Fédération nationale des activités de dépollution de l’environnement (Fnade).

([228]) Ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 relative à la prévention et à la gestion des déchets.

([229]) https://www.zerowastefrance.org/compost-pollue-tri-mecano-biologique-illegal/

([230]) Décret n° 2021-855 du 30 juin 2021 relatif à la justification de la généralisation du tri à la source des biodéchets et aux installations de tri mécano-biologiques.

([231]) Arrêté du 7 juillet 2021 pris en application de l'article R. 543-227-2 du code de l'environnement.

([232]) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045639339

([233]) Question écrite n°02583, de M. Brisson Max (Pyrénées-Atlantiques - Les Républicains) : « Stigmatisation et avenir de la filière de tri-compostage ».