Compte rendu

Commission
des affaires culturelles
et de l’éducation

 Projet de loi de finances pour 2025 (n° 324 – seconde partie) : examen pour avis des crédits de la mission Culture (M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture, et M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis Patrimoines)              2

– Présences en réunion..............................25

 

 

 

 

 


Mardi
22 octobre 2024

Séance de 21 heures 30

Compte rendu n° 7

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de Mme Fatiha Keloua Hachi,
Présidente

 


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La séance est ouverte à vingt et une heures trente-cinq.

(Présidence de Mme Fatiha Keloua Hachi, présidente)

 

La commission examine, pour avis, les crédits de la mission Culture (M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis sur Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture et M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis sur Patrimoines).

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à l’examen des amendements, en commençant par ceux qui portent sur la mission Culture.

Article 42 et État B

Amendement II-AC81 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Cet amendement symbolique, qui tend à doubler les crédits du programme 131 Création, a pour objet d’alerter sur la crise structurelle du secteur, qui fait en outre l’objet de coupes budgétaires.

Nous nous étonnons de voir les crédits du pass culture être épargnés par la saignée budgétaire alors qu’il reste de l’argent dans les caisses. Le pass culture n’a que peu d’effets sur la création, notamment sur le spectacle vivant, et il n’est pas le meilleur outil pour favoriser la transmission artistique et culturelle. Celle-ci dépend d’abord de la diversité des genres et des lieux de la création.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis (Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture). Depuis 2017, le budget de la culture a augmenté de 1 milliard d’euros, même si cette augmentation n’est peut-être pas suffisante pour rattraper les déficits d’investissement antérieurs.

L’annulation de crédits sur le programme 131 a été de 75 millions d’euros après réception du virement de solidarité. Ce sont les opérateurs disposant de fonds de roulement qui ont supporté la majeure partie de ces annulations, à hauteur de 14,5 millions, après l’annulation des réserves de précaution.

La situation du spectacle vivant est certes difficile, mais l’État a été présent.

Le doublement des crédits proposés me semble déraisonnable dans le contexte budgétaire actuel. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC68 de M. Raphaël Arnault

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous proposons la création d’un fonds de soutien à la bifurcation écologique pour le secteur des arts et de la culture. Le plan Mieux produire, mieux diffuser devait notamment répondre à ces enjeux, mais son efficacité suscite des interrogations au regard des coûts écologiques et énergétiques élevés du secteur.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. L’État est fortement engagé aux côtés des opérateurs – théâtre de Chaillot, Centre national de la danse, écoles d’art – pour financer d’importants chantiers de rénovation thermique. Les collectivités le sont également, mais la transition pose un vrai problème de coût. Cela dit, le montant que vous proposez n’est pas raisonnable. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur la politique culturelle des collectivités.

Amendement II-AC66 de M. Raphaël Arnault

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). On a beaucoup entendu dire qu’il faudrait se réjouir du budget de la culture, qui aurait été sauvé, mais l’effort de 5 milliards d’euros demandés aux collectivités aura un impact faramineux sur la vie culturelle. Nous proposons donc la création d’un fonds de soutien aux collectivités territoriales.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Cet amendement est cocasse de la part de votre groupe : vous proposez de prélever 500 millions d’euros sur le budget de l’État pour financer les missions territoriales des collectivités. Il ne peut pas se substituer aux collectivités, auxquelles il revient de faire des choix de politique locale, ce qui peut, il est vrai, poser problème quand certaines choisissent de se désengager de certains projets culturels pour des raisons idéologiques. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC235 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Face à la hausse du prix de l’énergie, qui affecte les dépenses de fonctionnement des collectivités, et aux baisses drastiques de leur dotation de fonctionnement depuis des années, le risque de voir les collectivités réduire leurs budgets dédiés à la culture est réel. Cet amendement propose donc de créer un fonds d’aide, qui devra être territorialisé afin que les budgets soient équitablement répartis sur l’ensemble du territoire national.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Votre amendement est financièrement plus raisonnable que le précédent, mais mes arguments, et donc mon avis, restent les mêmes.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur la médiation culturelle dans les établissements publics.

Amendement II-AC76 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Pour démocratiser la culture, ainsi que le souhaite la ministre, il faut recruter davantage de médiateurs culturels. Cette médiation humaine, qui ne peut être remplacée par des algorithmes, est la seule à même d’emmener ses bénéficiaires vers des œuvres dont ils n’avaient pas connaissance, alors que le pass culture ne fait que reproduire des pratiques culturelles.

Mme Graziella Melchior (EPR). Cet amendement, comme la plupart de ceux que vous proposez, n’est pas sérieux dans le contexte actuel : vous prenez des centaines de millions d’euros d’un programme, sans même un début de réflexion sur les conséquences, pour les attribuer à un autre dans le seul but de plaire à votre électorat. Au total, ce sont 3 milliards de transferts ou de crédits supplémentaires alors que le budget du ministère de la culture est de 4,5 milliards d’euros !

Je m’exprime au nom de mon groupe pour dire que nous ne soutiendrons aucun des amendements de La France insoumise.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous n’avons aucune leçon à recevoir : nous avons trouvé 60 milliards d’euros de recettes en commission des finances en taxant les plus riches et les profits des grandes entreprises. Votre gouvernement préfère faire les poches des classes populaires et casser les services publics, notamment de la culture, de l’hôpital ou de l’école. Vous avez perdu le débat budgétaire en commission des finances et nous l’avons gagné !

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je suis d’accord, il faut développer la médiation. Cela tombe bien, le programme 361 affecte des crédits à la formation des acteurs de l’éducation artistique et culturelle (EAC). Je ne sais pas s’ils sont suffisants, mais ils existent. Nul besoin donc d’un nouveau programme. Je note en outre que les crédits à destination de l’EAC pendant le temps scolaire sont en hausse.

La médiation et le pass culture sont complémentaires. Les bénéficiaires du pass culture, dont l’appétence pour la culture a été développée à l’école, sont autonomes dans leur consommation de culture, notamment des livres et du spectacle vivant.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC78 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Quand on voit les sommes qui partent dans le pass culture de façon obscure – des articles de presse font état du train de vie des dirigeants de la société privée chargée de le gérer –, il ne me semble pas déraisonnable de proposer un amendement chiffrant précisément le recrutement de postes de médiateurs.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les crédits alloués au pass culture.

Amendements II-AC158 de Mme Soumya Bourouaha, II-AC9 de M. Philippe Fait, II-AC219 de Mme Violette Spillebout et II-AC17 de M. Emmanuel Grégoire

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Le pass culture ne permet pas de réduire les inégalités sociales et territoriales d’accès à la culture – l’application de géolocalisation de l’offre culturelle conçue pour les 15-18 ans a majoritairement été téléchargée par ceux dont les parents sont diplômés. Nous proposons donc de maintenir la partie collective du pass, mais de réaffecter les crédits de la partie individuelle au programme de création.

Mme Violette Spillebout (EPR). La part individuelle du pass culture ne répond pas à son objectif. Cet amendement d’appel invite le Gouvernement à la revoir, voire à la supprimer, pour redistribuer les 210 millions d’euros qui lui sont affectés vers l’éducation populaire, l’Éducation nationale et les mairies.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). La part collective souffre d’une insuffisance structurelle majeure. Elle ne permet pas, par exemple, de prendre en charge le transport. Nous souhaitons, par cet amendement, appeler l’attention sur un rééquilibrage entre la part collective et la part individuelle.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous voterons en faveur de ces quatre amendements. Deux sont issus du Nouveau Front populaire, mais les deux autres ont été déposés par la prétendue majorité et celui de M. Fait – je regrette qu’il ne l’ait pas défendu – propose de retirer 100 millions d’euros du pass culture pour les affecter la création. C’est exactement ce que nous proposons, car la part individuelle ne fait que nourrir les mêmes acteurs de l’industrie culturelle. Le groupe EPR votera-t-il pour ses propres amendements ?

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Nous ne devons avoir ni totem ni tabou sur le pass culture. Je n’y étais d’ailleurs moi-même pas le plus favorable à l’origine. J’y vois aujourd’hui plusieurs avantages, mais je pense aussi qu’il doit être amélioré.

Il favorise les enfants des familles, non pas forcément les plus riches, mais qui ont une appétence pour la culture.

Concernant le transport, c’est une compétence des collectivités locales.

Je note que le taux de pénétration du pass culture n’est pas uniforme : il est beaucoup plus important dans les départements et les régions pilotes. Je pense que les autres départements combleront leur retard.

La ministre a proposé de sanctuariser une partie de la part individuelle vers le spectacle vivant, c’est une bonne chose. Il faut maintenir l’universalité du pass culture, qui attribue la même somme à tous les enfants de notre pays. Il ne stigmatise personne et favorise leur autonomie.

Avis défavorable à tous ces amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur la transformation de la société privée chargée de la gestion du pass culture en opérateur de l’État.

Amendements II-AC30 de Mme Soumya Bourouaha et II-AC231 de M. Steevy Gustave.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Le modèle de gestion actuelle – une société privée réalisant une mission d’intérêt général – n’est pas efficace, d’autant que son financement est entièrement public. La Cour des comptes l’a d’ailleurs souligné dans un rapport publié en 2023, pointant un recours excessif à des consultants extérieurs. Le pass culture doit être géré par un opérateur de l’État.

M. Steevy Gustave (EcoS). Je reprends à mon compte les arguments de Mme Bourouaha pour défendre l’amendement.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Le pass culture souffre d’un péché originel, dont il ne se remettra pas : sa gestion a été confiée à l’entreprise créée par Éric Garandeau, ancien président du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). L’État s’est ainsi retrouvé dépouillé de ses compétences et de ses moyens au profit d’une sorte de start-up. On en voit aujourd’hui les résultats : doutes sur le financement des postes affectés à cette entreprise et scandale, révélé par un article de presse, sur le train de vie des gestionnaires.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Question candide : quelle est la justification de cet abondement de 10 000 euros ? Est-il destiné à accompagner la transformation de la société par actions simplifiée (SAS) en opérateur d’État, évolution dont on pourrait discuter dans un autre cadre que cet avis budgétaire ?

Quant au recours à des consultants extérieurs, la Cour des comptes a bien souligné dans son rapport qu’il est intervenu dans la phase préliminaire à la création de la SAS.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC185 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). En cette période de désastre budgétaire, les Français ne comprendraient pas que chaque ministère ne fasse pas d’économies. Ce doit être aussi le cas pour celui de la culture. Nous appelons à rationaliser les dépenses, notamment en réduisant de 137 millions d’euros l’action 01 Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant.

M. Paul Vannier (LFI-NFP). Nous n’avions pas encore entendu les députés frontistes. Voici donc leurs propositions : moins de théâtre, moins d’opéra, moins de culture. J’espère que vous assumerez devant les Français ce choix d’accompagner le gouvernement Barnier dans son budget d’austérité. Vous êtes le parti de la désertification, de la réduction des services publics. Cet amendement nous rappelle qui vous êtes : les plus grands ennemis de la culture, cet instrument d’émancipation et de lien social. Vous représentez un véritable danger pour la société !

Mme Graziella Melchior (EPR). Cette coupe dans les dépenses de fonctionnement ravira sans doute les opéras et théâtres, tout comme les agents du musée du Louvre et du musée des Arts décoratifs, auxquels vous voulez retirer 27 millions d’euros de budget, et ceux du Palais de la découverte et de la Cité des sciences et de l’industrie, avec la baisse de 10 millions des dépenses consacrées à la recherche culturelle et scientifique que vous envisagez. Au total, vous prévoyez une réduction de 300 millions d’euros pour les agents et opérateurs de l’État et pour des établissements représentant notre pays à l’étranger, comme la Villa Médicis.

Nos musées, nos théâtres, nos instituts font rayonner la France à travers le monde. Ils mettent en valeur l’extraordinaire richesse de notre patrimoine, la formidable diversité de nos pratiques artistiques et contribuent à faire de notre pays la première destination au monde.

La culture comme variable d’ajustement budgétaire : voici la vision du Rassemblement national. Mon groupe votera contre tous les amendements de ce groupe et soutiendra le budget proposé par la ministre, qui s’est battue pour qu’il soit préservé.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Avis défavorable. N’oublions pas que la culture d’aujourd’hui, c’est le patrimoine de demain et rappelons que le répertoire classique français, dont je pensais que vous étiez des grands défenseurs, vit dans les théâtres et les opéras dont vous voulez couper les budgets !

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur le soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant.

Amendements identiques II-AC20 de Mme Fatiha Keloua Hachi, II-AC55 de M. Raphaël Arnault et II-AC227 de M. Steevy Gustave

Mme Céline Hervieu (SOC). Il s’agit d’attribuer 100 millions d’euros supplémentaires au spectacle public vivant. La coupe de 96 millions dans le programme 131 affecte directement les théâtres nationaux à Paris et en province et affaiblit des réseaux entiers faisant vivre troupes et intermittents.

M. Raphaël Arnault (LFI-NFP). Nous souhaitons soutenir le spectacle vivant qui traverse une crise sans précédent. Les collectivités territoriales remettent en cause leurs engagements en faveur de la culture alors que l’inflation et la crise énergétique font exploser les coûts de fonctionnement. Cette paupérisation a des conséquences sur leur attractivité et provoque de grandes difficultés de recrutement. Ces dernières années, ce secteur non lucratif a connu des déficits inédits et les budgets consacrés à la programmation et à la production ont baissé dans des proportions allant de 25 % à 50 %. D’après le syndicat Les forces musicales, à l’issue de cette saison fantôme, 150 000 spectateurs auraient été perdus et 2 000 emplois artistiques auraient été supprimés.

Dans le même temps, les crédits du pass culture ne font qu’augmenter. Nous ne pouvons pas nous contenter de cette offre consumériste de biens et services culturels déclinée à travers un catalogue algorithmique. Nous voulons redonner des moyens au secteur de la création et aux politiques d’éducation artistique et culturelle.

M. Steevy Gustave (EcoS). Nous proposons de prélever 100 millions d’euros sur la part individuelle du pass culture, dispositif que des rapports de l’Inspection générale des affaires culturelles (Igac) ou de la Cour des comptes ont épinglé, pour les redéployer au profit du spectacle vivant, insuffisamment soutenu alors qu’il a subi les effets de crises successives.

M. Bertrand Sorre (EPR). Je tiens à rappeler l’attachement de notre groupe au spectacle vivant. Nous l’avons aidé à traverser la crise du covid, notamment en soutenant les intermittents du spectacle. Toutefois, nous ne voterons pas en faveur de ces amendements identiques, car nous nous refusons à voir diminués les crédits du pass culture, utile à tous les jeunes partout sur le territoire, y compris dans les zones rurales, je peux en témoigner.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Les représentants du syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), que nous avons auditionnés à de multiples reprises, sont conscients du fait que l’État n’a pas failli et que les problèmes budgétaires sont aussi parfois le résultat du désengagement des collectivités.

Il ne faut toutefois pas se voiler la face, le spectacle vivant, spécialement dans les théâtres nationaux, est confronté à des mutations qu’il nous faut accompagner au-delà du strict cadre financier. Je vous invite à y réfléchir.

Enfin, je souligne que sur l’application du pass culture, le spectacle vivant est bien mis en avant, non par l’algorithme mais par les équipes éditoriales qui l’animent. C’est une erreur d’opposer les deux. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement II-AC42 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). La ministre a insisté sur son action en faveur de l’accès à la culture, que ce soit dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ou les zones rurales. Cette action doit, pour ce faire, s’appuyer aussi sur le maillage des lieux intermédiaires et indépendants, qui sont les parents pauvres de la politique culturelle, du fait de la logique de concentration des financements publics.

Prenons l’exemple du plan Mieux produire, mieux diffuser. Censé favoriser une diffusion sur l’ensemble du territoire, il a principalement bénéficié aux scènes nationales et labellisées. Il faut défendre l’infusion sur les territoires, chère au syndicat national des arts vivants (Synavi).

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Rappelons que 31,7 millions d’euros, soit 30 % de plus que l’année dernière, ont été consacrés au soutien aux établissements non labellisés. On ne peut donc pas dire qu’ils sont abandonnés.

Une solution les aiderait beaucoup, qui ne coûterait pas un centime : faire passer le rythme des appels à projets d’un an à trois ans, afin qu’ils puissent avoir une plus grande visibilité sur leur production de spectacles.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC214 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Sept ans de macronisme ont mis la France à genoux avec 1 000 milliards d’euros de dette. Les Français ne comprendraient pas que les ministères ne se serrent pas la ceinture et qu’ils soient les seuls à qui l’on fait les poches.

Par cet amendement, nous entendons réduire de 42 millions les crédits de soutien au spectacle vivant.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous avons examiné attentivement les divers amendements du Rassemblement national. Nous voyons bien qu’ils correspondent à ce que Barnier a rêvé de faire, puisqu’ils vont plus loin encore que le Gouvernement dans les coupes budgétaires. Alors même que vous êtes membres de la commission des affaires culturelles, vous vous montrez incapables de défendre la culture : tous vos amendements suppriment des crédits dans le budget du service public de la culture comme si cet argent était destiné à des privilégiés.

Dans cet amendement même, vous ciblez le spectacle vivant alors que nous savons qu’il traverse une crise profonde, perceptible dans chacun de vos territoires. Honte à vous !

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC38 de M. Frédéric Maillot

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Il vise à abonder de 1 million d’euros les crédits destinés à la création artistique à La Réunion, territoire dont l’insularité expose ses artistes à des difficultés particulières. Ils font face, par exemple, à des coûts exorbitants pour organiser des tournées. Il importe donc de favoriser la diffusion des œuvres réunionnaises.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement, qui est limité à La Réunion, alors qu’il nous faudrait avoir une réflexion globale sur la place spécifique à faire dans le programme 131 au soutien à la création dans les outre-mer. Peut-être pourrions-nous en discuter avec les services du ministère de la culture.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC228 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Les cultures urbaines comme le DJing, le street art ou la breakdance ont acquis une place importante au sein de la scène artistique et jouent un rôle clé dans l’expression culturelle des jeunes et des moins jeunes. Cependant, ces pratiques restent sous-financées et, malgré leur impact social et culturel, ne bénéficient pas du soutien nécessaire pour renforcer leur développement et leur diffusion.

Nous proposons de dégager 10 millions d’euros de crédits pour créer un fonds qui leur serait dédié.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Les cultures urbaines peuvent bénéficier de financements existants. Leur dédier un fonds reviendrait à les stigmatiser par rapport à d’autres expressions culturelles. Nous devons soutenir la culture française dans sa pluralité et sa diversité. Évitons toute logique de silos.

M. Steevy Gustave (EcoS). Je ne suis pas d’accord avec vous. Il importe de reconnaître les cultures urbaines en leur dédiant un financement spécifique. Elles couvrent un champ large et ne se réduisent pas aux quartiers. Nous les voyons présentes dans de multiples domaines. La breakdance, devenue discipline olympique, est enseignée avec la hipe et le lock dans les écoles de danse, des graffiteurs sont exposés dans des musées, le rap est le premier genre musical en France devant le rock, la mode s’empare de ces cultures et pourtant, elles ne sont toujours pas reconnues. Je sais de quoi je parle, je viens de cet univers.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC75 de Mme Fatiha Keloua Hachi

Mme Céline Hervieu (SOC). Il s’agit d’accroître le soutien de l’État aux quatre-vingt-treize structures labellisées Scène de musiques actuelles (Smac) en augmentant les crédits qui leur sont consacrés de 3,4 millions d’euros. Nous comblerions ainsi la part qui manque dans leur financement, évalué l’année dernière à 6,8 millions. Ces scènes qui s’autofinancent ont fait face à des crises successives et il importe de les préserver, elles qui contribuent à la diversité de l’offre artistique et jouent un rôle essentiel, à travers le maillage territorial, en matière de création, de diffusion et d’éducation artistique et culturelle.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il convient en effet de soutenir les Smac, structures d’une grande fragilité remplissant des missions essentielles sur les territoires. L’année dernière, une majorité s’était d’ailleurs dégagée au sein de la commission pour augmenter leurs crédits.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Les Smac restent fragiles, malgré une bonne fréquentation du public et des recettes propres élevées : la majorité d’entre elles étaient en déficit fin 2023. Le soutien supplémentaire qui leur a été apporté en 2024 est pérennisé pour 2025, ce dont on peut se féliciter dans un contexte budgétaire tendu. Leurs crédits augmentent même de 14 à 18 millions.

Ajoutons que les musiques actuelles peuvent bénéficier d’autres aides, notamment de la part du Centre national de la musique (CNM). Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC35 de M. Frédéric Maillot

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Les musiques actuelles n’ont que très peu profité du plan Mieux produire, mieux diffuser lancé en 2024, car les directions régionales des affaires culturelles (Drac) ont considéré qu’elles n’étaient pas prioritaires, compte tenu du coup de pouce donné aux Smac. Elles n’ont reçu que 400 000 euros sur les 10 millions dont est doté ce plan. Nous entendons flécher 600 000 euros vers elles.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je n’ai pas eu d’information au sujet du choix fait par les Drac. Les musiques actuelles bénéficient de plusieurs aides mais je veux bien examiner votre demande d’ici à la séance. Pour l’heure, ce sera une demande de retrait.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC63 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). La politique de gratuité des musées lancée depuis plus de vingt ans remporte succès sur succès, depuis 1996 et l’institution de la gratuité un dimanche par mois au musée du Louvre. À chaque étape de l’élargissement de celle-ci aux musées et monuments nationaux ainsi que de la Ville de Paris, la fréquentation des musées a augmenté, montrant l’engouement du public pour la culture.

L’accessibilité de la culture s’inscrit dans un mouvement historique, né d’une volonté de partage, d’apprentissage et d’émancipation sociale. Dans un esprit d’universalité et d’égalité, notre groupe propose d’étendre la gratuité à tous les visiteurs venant d’un pays de l’Union européenne un dimanche par mois dans les musées et monuments publics.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. De multiples initiatives existent déjà. Est-il pertinent de rendre toutes les entrées gratuites ? N’oublions pas que les entrées payantes de visiteurs étrangers constituent des ressources pour financer la médiation et améliorer la présentation des œuvres. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC83 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). Par cet amendement de repli, nous proposons d’instaurer des tarifs progressifs pour permettre aux familles des classes populaires et moyennes d’accéder aux musées et lieux culturels publics. La culture est un outil d’émancipation, vital pour la formation de chaque citoyen. Les politiques culturelles successives ont facilité dans notre pays la démocratisation de l’accès à la culture dans son ensemble. Toutefois, elles n’ont pas permis de réduire les inégalités sociales. L’accès à la culture mobilise une part importante du budget de nombre de nos concitoyens. En période d’inflation, ce poste de dépenses est sacrifié et la pratique culturelle n’est maintenue qu’au sein des classes plutôt aisées. Une étude de l’Observatoire des inégalités révèle que 62 % des cadres supérieurs se rendent au musée au moins une fois par an contre 18 % des ouvriers et employés.

Cette mesure d’équité s’inscrit dans la politique de démocratisation menée par le ministère de la culture.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC64 de M. Raphaël Arnault

M. Paul Vannier (LFI-NFP). Il vise à instaurer la gratuité des prêts de livres dans les bibliothèques et médiathèques municipales et intercommunales. En effet, 12,5 % seulement de la population ayant accès à une bibliothèque a effectué au moins un emprunt dans l’année précédente, or l’expérience d’autres pays, comme les États-Unis, montre que la gratuité donne un plus grand accès aux livres. L’amendement tend également à créer un fonds de soutien destiné aux collectivités qui auraient des difficultés financières pour assumer cette gratuité.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Le choix de la gratuité du prêt des livres appartient aux collectivités territoriales ; il faut le leur laisser – du reste, le sujet devrait plutôt être abordé dans le programme dédié au livre et aux bibliothèques. Le maire d’une commune ayant un projet de médiathèque a longtemps pu obtenir près de 80 % de subvention – c’est un peu moins aujourd’hui. Les collectivités ont créé des plans lecture et des politiques publiques assez importantes, de telle sorte que le projet de fonds de soutien aux bibliothèques est déjà satisfait par l’effort consenti par l’État pour soutenir la création des médiathèques. Avis défavorable.

M. Paul Vannier (LFI-NFP). Le budget prévoit 5 milliards d’euros de coupes pour les collectivités territoriales : il est étonnant que vous jugiez superflu un fonds de soutien à ces mêmes collectivités. En période d’austérité et de coupes drastiques dans les budgets des collectivités, les maires ont moins de choix. L’amendement vise donc à permettre aux collectivités d’assumer la gratuité.

Les objections que vous souleviez à propos des musées ne tiennent pas pour ce qui concerne les bibliothèques municipales et intercommunales. Les touristes, que vous vouliez faire contribuer, les fréquentent peu. Il est dommage que vous ne laissiez pas les collectivités aller dans le sens de l’accès au livre, a fortiori en sachant que mon amendement ne coûte que 25 millions d’euros, soit rien ou presque, au budget de l’État.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC82 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). Trop souvent, la logique d’appel à projets nuit à la production et à la diffusion de l’art par gaspillage de temps et de moyens. Artistes, institutions, musées et associations mobilisent leurs ressources pour cocher les cases donnant droit à financements. Il est temps de changer de paradigme en octroyant des moyens supplémentaires stables au soutien de la production culturelle et artistique française : les enveloppes budgétaires doivent assurer un financement pérenne, à l’inverse des appels à projets fluctuant chaque année. Cela favorisera la créativité et la diversité culturelle par l’affranchissement des artistes et des équipes indépendantes des contraintes liées à la recherche de budget.

Un fonds de soutien aux expressions culturelles non académiques permettrait aux acteurs du monde culturel de se rapprocher des citoyens les plus éloignés de la culture et de développer un style, une vision de la culture pleinement émancipatrice et populaire.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Il ne vous aura pas échappé que je ne suis pas le ministre de la culture et ce n’est pas moi qui fais le budget. La difficulté de l’exercice, c’est qu’on prend à Paul pour habiller Jacques. Je souscris à votre idée de mener une réflexion avec les services du ministère de la culture pour adopter, sur certains projets, une logique pluriannuelle. Pour autant, cela justifierait-il 52 millions d’euros supplémentaires ? Je ne le crois pas. Depuis 2017, nous avons augmenté de 1 milliard le budget de la culture. L’augmentation est certes moins forte cette année que les précédentes, mais il s’agit d’une année particulière, après la crise du covid et la guerre en Ukraine. Et je rappelle aux collègues du Rassemblement national, que sur tous les derniers budgets, ils réclamaient 100 milliards d’euros de dépenses supplémentaires. Nous pouvons travailler collectivement pour avancer sur le sujet.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les artistes-auteurs.

Amendement II-AC65 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Les artistes-auteurs sont parmi les grands perdants des sept années de pouvoir d’Emmanuel Macron ; ils n’ont jamais vu leurs revendications, qui figuraient notamment dans le rapport Racine, suivies d’effet. Ils nous alertent sur l’état de précarisation qui caractérise leur situation et sur les dangers que fait peser l’intelligence artificielle sur leurs revenus. Leur revendication est finalement assez simple : voir reconnaître leur travail d’artistes-auteurs et bénéficier d’une protection sociale, d’élections professionnelles qui leur permettent d’être représentés ainsi que d’une continuité de revenus. Je vous renvoie à cet égard à la proposition de loi transpartisane pour une continuité de revenus des artistes-auteurs, qui a reçu de nombreux soutiens dans le secteur, mais qui n’a obtenu aucune réponse et sur laquelle on n’a vu aucune tentative d’avancer. Il faut absolument mettre en place ce plan pour les artistes-auteurs et reconnaître qu’il existe bien un travail de l’art et qu’il doit être rémunéré à sa juste valeur.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. J’ai du mal à comprendre pourquoi Emmanuel Macron se serait acharné sur le sort des artistes-auteurs. Le Président de la République a eu plusieurs gouvernements, qui ont augmenté de 1 milliard d’euros le budget de la culture, ce qui soutient directement ou indirectement les artistes-auteurs en élargissant la capacité de commande des acteurs de la filière.

Les syndicats d’artistes-auteurs que nous avons auditionnés ne sont pas tous pleinement en phase avec la proposition de loi de M. Dharréville, que j’avais d’ailleurs cosignée. Peut-être faut-il que nous nous remettions collectivement autour de la table pour y travailler.

Un chantier est en cours et la protection des artistes-auteurs face à des menaces technologiques nouvelles comme l’intelligence artificielle doit nous interroger. Nous devons nous questionner aussi à propos de la chaîne de la valeur afin que les auteurs soient bien rémunérés quand leurs œuvres rapportent de l’argent. Nous devons, enfin, nous poser la question très importante du respect des règles, en matière par exemple de délais de paiement, car les auteurs d’une prestation artistique sont parfois payés avec six mois ou un an de retard. Ce sont là de vraies questions.

La situation des artistes-auteurs pourrait, du reste, mériter une mission flash ou une mission d’information de notre commission.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Je vous ai entendu, monsieur le rapporteur.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Vous dites que les syndicats ne sont pas tous d’accord entre eux et trouvez qu’ils devraient se mettre autour de la table.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Vous aussi avec eux !

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Avec 50 millions d’euros, le coût de cet amendement n’est pas si important – même si, je le sais bien, le Rassemblement national veut supprimer tout le budget de la culture et vote contre la moindre recette dès qu’il s’agit de toucher les poches des plus riches. Des élections professionnelles sont indispensables pour la protection des artistes-auteurs, qui doivent pouvoir être représentés et entendus. Ce n’est pas contradictoire avec ce que vous dites, bien au contraire.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC154 de Mme Soumya Bourouaha

Mme Soumya Bourouaha (GDR). J’ai récemment redéposé sur ces questions une proposition de loi précédemment déposée par mon collègue Pierre Dharréville. Cet amendement d’appel vise à préfigurer la création d’un revenu de remplacement pour les artistes-auteurs. Les artistes sont en effet des travailleurs, car la création d’une œuvre artistique est un véritable travail. Cependant ces artistes ne gagnent de l’argent que lorsque leurs œuvres sont diffusées et les droits d’auteur qui constituent leur rémunération ne reflètent que le succès ou la diffusion de celles-ci. En revanche, le travail créatif qui précède la diffusion n’est le plus souvent pas rémunéré. Ainsi, quand un artiste auteur n’a pas d’activité rémunérée, il ne perçoit aucun revenu en dehors des aides sociales minimales, ce qui le place dans une situation encore plus précaire que de nombreux autres travailleurs, car il doit continuer à créer tout en faisant face à ses besoins de base et aux coûts liés à son activité professionnelle, comme l’achat de matériel et de fournitures, la recherche de diffuseurs ou la location d’ateliers.

Le groupe GDR défend depuis plusieurs années l’idée d’une loi qui créerait un revenu de remplacement pour ces artistes. Le dispositif proposé est technique, mais ce serait un formidable tsunami que nous votions tous cet amendement.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. J’ai déjà dit ce que j’en pensais. Nous devons avoir cette réflexion importante. Des pistes d’amélioration existent pour les auteurs et il serait bon que notre commission se penche sur le sujet, avec l’aide du Gouvernement. Avis défavorable, mais je soutiens l’examen de cette question.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC189 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Pendant que vous jonglez avec les centaines de millions et que vous vous faites plaisir avec l’argent des Français, nous nous efforçons de réparer le désastre budgétaire, dans lequel nous ne portons aucune responsabilité. Cet amendement propose de réduire de 50 millions d’euros les crédits accordés à l’action Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels du programme Création.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). En réalité, vous portez une responsabilité. Voilà encore dix minutes ou un quart d’heure, dans l’hémicycle, vous avez rejeté, avec le socle du gouvernement Barnier, l’augmentation de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus qui aurait permis au budget de l’État d’engranger des sommes nécessaires pour les services publics et les politiques de service public. J’ai l’impression d’assister à un sketch, malheureusement devenu réalité, du président argentin Javier Milei, qui s’affichait tronçonneuse à la main : Afuera ! Dehors, les ministères et les services publics ! Vous n’avez pas la tronçonneuse, mais la même ambition de jeter aux orties l’ensemble des politiques culturelles.

M. Laurent Croizier (Dem). Je suis étonné, surpris, abasourdi par cet amendement. La culture, c’est ce qui forge la citoyenneté, l’appartenance à une nation, nos traditions, nos savoir-faire et notre art de vivre à la française, et vous voulez baisser les crédits qui lui sont alloués ? C’est irresponsable et totalement contraire à ce que vous racontez depuis toujours. Cet amendement d’opportunité est très malvenu et manque complètement sa cible.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je suis surpris que vous ne vous cachiez pas de vouloir faire ce qui est le réflexe de tous les régimes illibéraux : commencer par tailler à la tronçonneuse les budgets de la culture. D’ailleurs, qu’est-ce qui vous déplaît au palais de Tokyo, et pourquoi les métiers d’art, qui sont les métiers de la culture et des traditions millénaires de la France ? Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les enseignements artistiques.

Amendement II-AC72 de M. Raphaël Arnault

M. Raphaël Arnault (LFI-NFP). Il tend à renforcer la place des enseignements artistiques dans les lycées où, marginalisés par le nouveau baccalauréat, ils sont en train de disparaître. Les dernières réformes ont institué une école dans laquelle les contenus, options et spécialités proposés varient d’un établissement à l’autre, et les enseignements artistiques en font les frais. Les réformes successives du lycée professionnel ont, par exemple, réduit les enseignements permettant aux élèves de disposer d’une culture commune. Derrière l’illusion de liberté que confèrent aux lycées les réformes de l’enseignement, le résultat est la marginalisation des matières jugées moins essentielles ou moins utiles. Dans le cas des options artistiques, il revient au lycée de décider s’il en proposera parmi les parcours d’enseignement : l’option artistique devient alors un simple bonus. La disparition progressive de ces enseignements au lycée a pour conséquence directe le renforcement des inégalités d’accès à la culture. Cet amendement propose donc d’augmenter de 50 millions d’euros le soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. C’est là une préoccupation que nous partageons tous. Toutefois, les crédits alloués à l’enseignement artistique et culturel dans le temps scolaire sont déjà en augmentation de 8 millions d’euros cette année, ce qui permet la réalisation de politiques nouvelles. Dans cette période de tensions budgétaires, on pourrait s’en féliciter. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC18 de Mme Céline Hervieu

Mme Céline Hervieu (SOC). Il vise à corriger la baisse de 10 millions d’euros des crédits en faveur de l’éducation artistique et culturelle. S’il existe des dispositifs politiques qui permettent la démocratisation de la culture et la transmission des savoirs, ce sont bien ceux de l’EAC. Nous ne comprenons pas comment on peut, d’un côté, défendre le 100 % EAC et la garantie que tous les enfants pourront en bénéficier et, de l’autre côté, constater une baisse de 5 % des élèves de primaire et de collège qui en bénéficient par rapport à 2024. Pourquoi la part de ces crédits censée être dirigée vers les territoires prioritaires est-elle en baisse de 2 % par rapport à 2024 ? Nous proposons donc de rétablir ces 10 millions d’euros pour l’éducation artistique et culturelle.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Nous n’avons pas tout à fait les mêmes chiffres : le mien est d’un peu moins de 5 millions d’euros, et non pas 10. Je répète que, pour les temps scolaires, les crédits de l’EAC augmentent de 8 millions et, pour le temps hors scolaire, de 9 millions, avec 2 millions supplémentaires pour une action menée dans les conservatoires : cela témoigne d’un soutien à l’EAC. Je ne suis personnellement pas opposé à l’idée de lui allouer plus de moyens mais, dans une période de budget contraint, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, avis défavorable.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Il est assez pénible de vous entendre invoquer les contraintes budgétaires alors que, dans le même temps, vous rejetez dans l’hémicycle tout le budget que nous pourrions récupérer. Cela ne coûterait pas grand-chose d’aller récupérer quelques sous en taxant les superprofits et les superdividendes. Personne n’a jamais dit que l’éducation artistique et culturelle devait diminuer et on voit bien qu’il faut augmenter ces budgets : il en est d’autant plus regrettable, monsieur Balanant, alors même que votre groupe vote parfois en faveur d’augmentations de recettes, que vous adhériez au logiciel austéritaire selon lequel, même quand une idée est bonne, on n’a pas les sous pour la payer.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. D’abord, je ne suis pas dans l’hémicycle, mais ici. Vous avez eu l’honnêteté de relever que mon groupe, le Mouvement démocrate, réclame depuis sept ans quelques ajustements fiscaux, même s’ils ne vont pas dans le sens de ce que vous préconisez, qui est parfois caricaturalement fort. Ne nous faites pas de procès d’intention, car je note avec satisfaction que, globalement, le budget de la culture augmente encore cette année de 3,8 %, après une augmentation de 30 % depuis 2017. Dire que je soutiens une politique austéritaire est donc un peu caricatural. Je le dis d’autant plus que je connais votre attachement pour ces questions et que nous partageons parfois certaines convictions –  comme, je l’espère, la plupart des membres de cette commission – quant au développement de la culture. Si nous voulons progresser, il faut être juste et reconnaître ce qui a été fait.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC32 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Il vise à affecter la modique somme de 2 millions d’euros à l’éducation à l’image, qui est un enjeu fondamental pour la jeunesse. Cette éducation repose aujourd’hui sur des dispositifs auxquels je suis personnellement très attachée, en tant qu’ancienne professeure, pour y avoir eu recours. J’ai vu, en effet, les résultats produits en emmenant des classes d’élèves au cinéma voir, selon une programmation choisie, des films qu’ils ne seraient pas allés voir spontanément, et en dispensant aux enseignants des formations leur permettant d’accompagner ce rapport au cinéma.

Le département du Nord a récemment annoncé qu’il renonçait au programme Collège au cinéma en raison des coupes budgétaires qui l’obligeaient à choisir entre cette activité et la protection de l’enfance. Ce renoncement, dramatique en termes d’égalité entre les élèves sur l’ensemble du territoire, montre aussi l’impact des baisses des budgets des collectivités territoriales sur la politique culturelle. Nous devons soutenir ces dispositifs, qui ne doivent pas en faire les frais. J’ajoute que les réformes en cours dans l’éducation nationale, avec le pacte enseignant, ne favorisent pas le recours à ce dispositif.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Le débat est le même que pour l’amendement précédent. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur l’éducation critique aux médias et à l’information.

Amendements identiques II-AC26 de Mme Sophie Taillé-Polian et II-AC73 de M. Raphaël Arnault

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). L’amendement II-AC26, travaillé avec l’association Jets d’encre, propose un plan d’investissement de 3 millions d’euros dans l’éducation aux médias, à l’image et à l’information. Il est essentiel pour notre démocratie d’aider les jeunes à y voir plus clair dans la masse d’informations ou de désinformations qui circulent sur l’ensemble des moyens de communication, que ce soit sur certaines chaînes de télévision du secteur privé ou sur les réseaux sociaux. Il est très important d’instaurer ce parcours citoyen. En outre, avec des crédits qui ne sont pas à la hauteur, les entreprises du service public de l’audiovisuel risquent d’avoir plus de difficultés à participer à ces actions.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Comme pour l’éducation artistique et culturelle, il y a consensus sur le fait que la jeunesse est exposée à des images, et à des contenus médiatiques qu’elle doit être capable d’analyser. L’adoption de cet amendement à 3 millions serait, pour l’Assemblée nationale, une façon de montrer qu’il faut renforcer les moyens en ce sens. Vous avez déjà refusé de soutenir les programmes permettant d’emmener lycéens et collégiens au cinéma, alors que nous savons à quel point le secteur, que nous avons auditionné, demande le renforcement de ce dispositif qui fonctionne bien, mais auquel certaines collectivités renoncent, faute de budget. On voit en tout cas que l’argument selon lequel nous serions déraisonnables et demanderions des sommes hallucinantes est un argument bidon, car il ne s’agit ici que de sommes très raisonnables pour des sujets qui font consensus.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Ce que vous réclamez existe déjà : il s’agit de la sous-action 01 de l’action 02 du programme 361, dotée de 3,77 millions d’euros. Votre amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous n’allons pas retirer des amendements dont vous n’assumez pas le rejet. Vous ne voulez même pas lâcher 3 millions d’euros pour l’éducation aux médias !

La commission rejette les amendements.

Amendement II-AC221 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Comme mes collègues, je soulignerai l’importance de l’éducation aux médias et à l’image, à l’école et dans d’autres structures, comme les bibliothèques, les médiathèques, les centres sociaux et les maisons de quartier, dont certaines ont conclu des conventions avec les caisses d’allocations familiales ou peuvent avoir des budgets à cette fin, même si cela reste insuffisant. Il existe aujourd’hui un budget de 3,77 millions d’euros, qui est maintenu pour 2025.

Cet amendement vise toutefois à ajouter 500 000 euros pour l’éducation critique aux médias, afin de lutter contre la désinformation et d’accompagner les jeunes et les moins jeunes pour leur permettre d’exercer leur esprit critique dans tous les domaines, en particulier dans les espaces numériques, en partenariat avec les associations d’éducation aux médias et de journalisme, dont Mme Taillé-Polian a souligné le rôle et dont une grande partie intervient bénévolement dans les classes.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Lorsque j’ai dit que 3,77 millions d’euros y étaient déjà consacrés, je n’ai pas eu le temps de dire que ce chiffre pourrait légèrement augmenter. Avis favorable, donc.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC69 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Il vise au financement d’un plan de lutte contre les violences et le harcèlement sexistes et sexuels, et de défense de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les arts et la culture. J’espère, monsieur Balanant, qu’en tant que rapporteur fraîchement élu de la commission d’enquête sur les violences sexistes et sexuelles (VSS), vous n’oserez pas, cette fois, émettre un avis défavorable à un amendement dont chacun comprendra l’importance. Quasiment tous les jours, nous recevons des alertes concernant des agresseurs circulant dans les milieux des arts et de la culture, milieux encore très masculins et cultivant le huis clos, propices aux violences et à l’emprise. Il nous faut donc absolument renforcer ce combat, ce qui ne passe pas seulement par des mots et des lois, mais aussi par du budget. Cet amendement répond, pour la part du budget de la culture, aux demandes des associations d’une somme de 2,6 milliards d’euros à l’échelle de tout le budget pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles.

M. Jérémie Patrier-Leitus (HOR). Dans de nombreux domaines, ce n’est pas seulement avec plus d’argent qu’on traite les problèmes. Pour ce qui est, par exemple, de l’éducation aux médias, les acteurs de l’audiovisuel public pourraient fort bien mener des actions plus substantielles. Il ne s’agit pas seulement ici d’évoquer en termes budgétaires des questions qui nous paraissent collectivement importantes, car tout ne se résout pas avec de l’argent supplémentaire. Nous devons aussi être responsables collectivement.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Vous irez expliquer cela aux associations féministes, qui disent précisément que, dans le combat contre la culture du viol et les violences faites aux femmes, la dimension budgétaire est essentielle pour la formation. Pour écouter les femmes – car ce sont essentiellement les femmes qui sont victimes –, qui parlent de plus en plus, pour les entendre et les accompagner, il faut des budgets.

Il est hallucinant, alors que vous êtes rapporteur pour avis sur le budget du patrimoine, que vous nous expliquiez que ce n’est pas parce qu’on examine le budget qu’il faudrait faire des dépenses, et qu’on peut s’arranger. Votre réponse me choque, car une importante documentation atteste de l’importance de la part budgétaire. Vous avez mal choisi votre moment pour intervenir.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. M. Patrier-Leitus est membre de la commission et, à ce titre, il a droit à la parole.

Mme Graziella Melchior (EPR). Notre groupe partage la cause de la lutte contre les violences et le harcèlement sexistes et sexuels et j’y suis moi-même très engagée, comme vous. Cependant, nous avons repris aujourd’hui même les travaux de la commission d’enquête consacrée à ce sujet et pensons qu’il conviendrait que cette commission d’enquête mène ses travaux à terme avant de faire de telles recommandations. Nous nous abstiendrons donc sur votre amendement.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je suis, moi aussi, choquée par certains propos. Des pays comme l’Espagne, que l’on cite souvent en exemple, montrent qu’il faut des moyens pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles et contre les discriminations liées au genre. On ne peut pas lutter contre ces violences uniquement avec de bons sentiments. Il faut des moyens d’accompagnement et les victimes doivent pouvoir être écoutées. Il faut aussi des mesures de prévention permettant que tout se passe bien sur les tournages.

Dans le cadre de la discussion budgétaire, nous considérons qu’il faut consacrer des moyens à ce problème. Les réactions que nous entendons m’étonnent d’autant plus que nous avons voté à l’unanimité la création de cette commission d’enquête, ce qui montre que nous considérons qu’il s’agit d’un sujet majeur et qu’il faut agir. Peut-être faudra-t-il affiner ce plan sur la base des résultats de la commission d’enquête, mais nous savons dès aujourd’hui qu’il faut débloquer des moyens.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Il est évident qu’il faudra que nous consacrions des moyens à cette cause. Même s’ils sont insuffisants, il en existe déjà pour des plans de prévention et des accompagnements. Une commission d’enquête a été créée parce que des faits graves nous ont été révélés, qui ne remontent du reste pas seulement au mois de mai 2024 mais, en réalité, à une vingtaine d’années. À l’issue de cette commission d’enquête présidée par Mme Sandrine Rousseau, dont vous avez rappelé que je viens d’être nommé rapporteur, et où siégeront bon nombre des membres de notre commission, nous procéderons à des évaluations et à des constats. J’espère aussi que nous établirons une stratégie, un plan de lutte, que nous chiffrerons ensemble. À un moment donné, nous demanderons des moyens supplémentaires.

Ne nous donnez pas de leçons dans ce domaine ; je m’y suis impliqué et je continue à le faire. Du reste, peut-être constaterons-nous qu’il faut plus que les 30 millions d’euros que vous demandez – peut-être 50 millions d’euros, je n’en sais rien. À ce stade, faisons travailler la commission d’enquête que nous avons installée et qui a fait l’objet d’un consensus. Allons jusqu’au bout de ce travail, après quoi nous pourrons réfléchir à l’argent qu’il faudra mettre, autant que nécessaire, pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans l’intégralité du monde de la culture – et nous savons qu’elles existent aussi dans toute notre société. Je ne peux pas donner un avis défavorable, mais je demande le retrait de cet amendement, car nous ne savons pas combien coûteront ces mesures et il faut travailler pour le savoir.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). J’ai bien compris le sens de vos propos : il est urgent d’attendre. Je suis membre de cette commission d’enquête, et je pense en effet qu’elle émettra des préconisations, y compris sur le plan législatif. Cependant, depuis le début de ses travaux – j’y inclus ceux qui ont été réalisés avant qu’elle soit relancée –, toutes les personnes auditionnées faisaient état de besoins en termes de formation. Les victimes étant de plus en plus nombreuses à parler, il est, mathématiquement, de plus en plus nécessaire de disposer de budgets pour les accueillir les écouter et les entendre. Quelles que soient les décisions que nous pourrions prendre en termes de normes et de droit, tout le monde souligne le besoin de budgets.

Jamais je ne retirerai un amendement qui propose du budget contre les VSS. Il n’est pas audible qu’il faudrait attendre la fin de la commission d’enquête, c’est-à-dire avril prochain, pour ajouter du budget alors que nous apprenons tous les jours qu’un rappeur par-ci, un réalisateur par-là, y compris dans l’audiovisuel public, commettent des violences. Il n’est pas audible qu’il serait urgent d’attendre pour mieux évaluer des besoins qui pourraient se révéler supérieurs à ce qui est demandé aujourd’hui.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur le fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps).

Amendement II-AC230 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Cet amendement vise à augmenter de 19 millions d’euros le financement affecté au Fonpeps, qui a fait ses preuves dans la résorption de la précarité de l’emploi dans le secteur culturel. Le fonds retrouverait ainsi sa dotation initiale de 90 millions.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Pour 2025, les crédits du Fonpeps, dispositif efficace et apprécié par les acteurs du secteur, sont renouvelés à l’identique, soit 39 millions d’euros. En pratique, le ministère de la culture a toujours pourvu aux besoins de financement du fonds lorsque son budget était épuisé. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC238 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Il s’agit d’un amendement de repli, élaboré avec le Synavi : il tend à affecter au Fonpeps un financement de 6,5 millionsd’euros afin de financer les évolutions de celui-ci.

Il a également pour but de revenir à la condition initiale d’éligibilité, à partir de deux artistes en plateau, et d’ajouter une clause pour les salles de petite jauge et les lieux non dédiés. Cette proposition permettrait de couvrir environ 40 % des coûts artistiques et techniques directement supportés par une compagnie, autorisant des petites communes à accueillir pour quelques centaines d’euros des spectacles qui seraient, sinon, inaccessibles.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Jusqu’ici, le ministère de la culture a en effet pourvu aux besoins de financement du Fonpeps autant que de besoin, mais le rapporteur pour avis ne cesse de nous dire que 2025 est une année particulière, qui demanderait d’être particulièrement raisonnable. Quelle assurance avons-nous que cette pratique sera maintenue en 2025 ? Avant le prochain coup de tronçonneuse contre le Fonpeps suggéré par le Rassemblement national, nous devons affirmer notre volonté de réduire la précarité dans le monde du spectacle.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je n’ai pas dit qu’il fallait être raisonnable : en matière de culture, il ne faut jamais l’être ! Pour autant, les augmentations que vous appelez de vos vœux me semblent trop fortes, et quel qu’en soit le montant, mon avis reste le même : demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC186 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Cet amendement vise à réduire de 20 millions d’euros les crédits accordés à l’action 06 Soutien à l’emploi et structuration des professions du programme 131 Création. Nous continuons de faire en sorte de ne pas creuser le déficit, de réduire l’imposition des Français et d’accentuer la baisse de la dépense publique.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Massacre à la tronçonneuse, épisode 4 ! Voilà encore un amendement du Rassemblement national qui ne propose aucune politique culturelle. On a bien compris qu’il n’aime pas la culture et sa puissance émancipatrice. Il en a même un peu peur puisqu’il veut bien la soutenir, mais seulement si elle est neutre – c’est-à-dire s’il peut la contrôler. En commission, vous cherchez à raboter les budgets et, parallèlement, dans l’hémicycle, vous votez contre les recettes qu’on pourrait piocher dans les superprofits des entreprises et les poches des plus riches. Nous avons bien compris que tout ce que vous voulez faire, ce sont des coupes, des coupes, des coupes, comme Emmanuel Macron.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Madame Parmentier, je viens de vous entendre dire « vous allez mettre la France à genoux ». En l’occurrence, ce sont les artistes que vous voulez mettre à genoux ! Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les écoles d’art territoriales.

Amendements identiques II-AC19 de Mme Fatiha Keloua Hachi et II-AC237 de M. Steevy Gustave et amendement II-AC53 de Mme Sarah Legrain (discussion commune)

Mme Céline Hervieu (SOC). L’amendement II-AC19 vise à réévaluer la dotation de trente-trois écoles territoriales d’art à hauteur de 16 millions d’euros. Avec l’Association nationale des écoles supérieures d’art, nous donnons l’alerte depuis deux ans sur la situation dramatique de ces établissements, dont nous souhaitons réévaluer les dotations pour établir une équité de traitement avec les écoles nationales. Cela permettrait de financer notamment l’accroissement des missions de fonctionnement, les conséquences de l’inflation et de l’évolution du point d’indice, ainsi que l’exonération des frais d’inscription des étudiants boursiers.

L’État n’a pas fait évoluer la dotation structurelle de ces écoles territoriales depuis près de douze ans. En euros constants et en tenant compte de l’inflation, cela correspond à une diminution réelle de plus de 14 %. Ces établissements, en grande difficulté, sont en train d’épuiser leurs fonds de roulement. Ils ont besoin de soutien de toute urgence.

M. Steevy Gustave (EcoS). Cet amendement identique a pour but de débloquer 16 millions d’euros pour les écoles d’art territoriales, dont la situation est dramatique ; certaines d’entre elles sont menacées de fermeture. Constituées en établissements publics de coopération culturelle (EPCC), ces trente-trois écoles délivrent des diplômes nationaux du ministère de la culture – licences et masters. Le financement de l’État ne représente que 10 % de leur budget, en moyenne, l’essentiel provenant des collectivités territoriales déjà lourdement affectées par la crise.

Cette aide de 16 millions avait été approuvée par nos collègues du Sénat dans le cadre du PLF pour 2024, mais elle a été victime du 49.3. Elle vise à rétablir une équité de traitement entre les EPCC et les écoles nationales, qui délivrent les mêmes diplômes.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Nous avons reçu le groupement des écoles d’art territoriales et nous avons identifié plusieurs sujets à traiter. Le financement de l’État présente des asymétries, allant de 3,8 % à 40 %. Toutefois, le rééquilibrage ne devrait pas pénaliser les écoles qui sont les mieux financées.

Les écoles territoriales, comme leur nom l’indique, relèvent de la responsabilité des collectivités dans lesquelles elles sont implantées, notamment en matière de financement. Celles-ci doivent s’engager auprès des écoles, qui participent à l’attractivité des territoires ; certaines subventions sont insuffisantes.

Par ailleurs, je souhaite appeler l’attention du ministère de la culture sur la nécessaire poursuite de l’application des recommandations du rapport très complet de M. Pierre Oudart.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC156 de Mme Soumya Bourouaha

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Nous souhaitons donner l’alerte sur la situation difficile des écoles d’art territoriales, qui font face à de graves problèmes financiers. En 2023, la précédente ministre de la culture avait débloqué une aide de 2 millions d’euros ; plus récemment, l’actuelle ministre leur a octroyé une aide de 3 millions. Cet amendement vise à les compléter par une nouvelle aide de 3,6 millions.

En effet, ces aides n’ont pas suffi à compenser le retrait progressif de l’État. Ces écoles sont majoritairement financées par les collectivités locales, à hauteur de 75 %, tandis que l’État ne contribue qu’à hauteur de 11 % en moyenne. Cette situation risque d’empirer en 2025 puisque le Gouvernement demande aux collectivités de réduire leurs dépenses de 5 milliards d’euros, ce qui risque de diminuer le budget en faveur de la culture, et donc, des écoles d’art territoriales. D’après l’Association nationale des écoles d’art, les subventions de l’État ont déjà diminué de 14 % si l’on tient compte de l’inflation.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC234 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Les enseignants des trente-trois écoles d’art territoriales ont le statut de professeur d’enseignement artistique de la fonction publique territoriale, c’est-à-dire le même que les enseignants des pratiques amateurs et conservatoires. Or ils délivrent des diplômes de licence ou de master, et leur statut doit être réformé en conséquence. Toutefois, cette réforme indispensable ne peut être prise en charge par les seules collectivités territoriales. Cet amendement a pour but de dégager 2 millions d’euros pour contribuer à sa concrétisation.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Cette réforme est légitime, mais mérite de faire l’objet d’une discussion entre le ministère de la culture, les collectivités territoriales, les instances représentatives du personnel et la direction des écoles, afin de trouver la bonne clé de répartition. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-AC291 de M. Erwan Balanant et II-AC233 de M. Steevy Gustave

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. L’amendement vise à octroyer 1,6 million d’euros aux écoles territoriales d’art et de design pour exonérer les étudiants boursiers des frais d’inscription. J’ai appris récemment qu’il existait une différence de traitement entre les étudiants boursiers des écoles nationales d’art et ceux des écoles territoriales d’art, alors qu’ils obtiennent les mêmes diplômes après avoir suivi des enseignements similaires : les premiers bénéficient d’une exonération complète de leurs frais de scolarité, contrairement aux seconds.

Lorsque nous avons reçu en audition les représentants de ces écoles, j’ai considéré que cette revendication était justifiée : la différence de traitement n’est ni juste, ni valorisante pour ces établissements d’excellence.

La commission adopte les amendements.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les écoles nationales supérieures d’architecture (Ensa).

Amendement II-AC59 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). L’amendement est défendu.

Amendement II-AC36 de M. Frédéric Maillot

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Cet amendement a été élaboré en collaboration avec le collectif pour les conditions dignes et égalitaires des enseignants contractuels en écoles d’architecture. Il vise à aligner les rémunérations des professeurs contractuels sur celles des titulaires, parce qu’il n’est pas acceptable de ne pas percevoir le même salaire pour le même travail. Un amendement similaire au PLF pour 2023 avait été adopté, mais il a été victime du recours au 49.3.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. L’année dernière, les crédits destinés aux charges de fonctionnement des Ensa ont fortement augmenté, afin de les aider à surmonter la crise qui les touchait. D’un montant de 56 millions d’euros, ils ont été reconduits dans le PLF pour 2025. Avis défavorable sur l’amendement II-AC59.

L’évolution visée par l’amendement II-AC36 serait louable, mais elle doit faire l’objet d’une concertation entre l’État, les Ensa et les instances représentatives du personnel. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC52 de Mme Céline Hervieu

Mme Céline Hervieu (SOC). Cet amendement vise à corriger la baisse des subventions allouées aux Ensa. Ces vingt écoles ont des missions cruciales en matière de formation initiale et continue des professionnels de l’architecture, de recherche en architecture, de diffusion de la culture architecturale et de rayonnement international. Leur situation financière s’est fortement dégradée et nous contestons la baisse des subventions, qui représente 700 000 euros.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. En tant qu’amoureux de l’architecture, je devrais être favorable à votre amendement, sauf qu’un effort notable a été réalisé l’année dernière, comme je l’ai rappelé. La nette hausse des crédits pour 2024 ayant été reconduite dans le PLF pour 2025, il ne s’agit donc pas d’une simple réaction pour éteindre un incendie, mais d’un véritable engagement.

Nous devons cependant rester vigilants quant à la situation des Ensa, dont l’importance est cruciale, en témoignent les nombreux architectes français qu’elles ont formés et qui sont mondialement reconnus pour leurs qualités et leur expertise. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur l’accessibilité de la culture aux personnes en situation de handicap.

Amendements II-AC34 de M. Frédéric Maillot et II-AC165 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Le financement de l’accessibilité de la culture aux personnes en situation de handicap est déjà pris en charge dans la sous-action Participation à la vie culturelle de l’action 02 du programme 361. En outre, les crédits dédiés au handicap ont augmenté de 8 % en 2024 ; ce n’est peut-être pas suffisant pour un enjeu de cette importance, mais il ne me semble pas pertinent de créer un nouveau programme. Demande de retrait.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-AC126 de Mme Sophie-Laurence Roy.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les maisons des jeunes et de la culture (MJC).

Amendement II-AC232 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Cet amendement a pour objet l’augmentation du financement dédié aux MJC. Parce qu’elles agissent pour l’éducation populaire, l’accès à la culture et l’émancipation de la jeunesse, elles sont essentielles à la vie des quartiers populaires et à la démocratisation culturelle. Nous souhaitons soutenir le développement d’un fonds de soutien aux MJC et aux associations culturelles dans les quartiers populaires et dans les zones rurales, projet que la ministre affectionne particulièrement.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. La ministre de la culture a en effet lancé une réflexion à ce sujet, reconnaissant que les MJC ne sont sans doute pas suffisamment soutenues. En attendant l’examen de ce sujet en séance, où elle pourra nous en dire davantage, je vous invite à retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

Amendement II-AC220 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Le présent amendement vise à affecter 1 million d’euros supplémentaire à l’éducation artistique et culturelle dispensée par les structures de l’éducation populaire. Le budget prévu dans le PLF pour 2025 s’élève à 1,74 million, ce qui semble bien peu au regard du nombre de structures concernées. Cet ajout nous semble conforme aux déclarations de la ministre, qui a exprimé à plusieurs reprises le souhait de renforcer les moyens des MJC. Celles-ci rencontrent en effet d’importantes difficultés financières, comme elles l’ont exprimé lors des manifestations du mois de mars.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Avis favorable. Non seulement le montant proposé est raisonnable, mais cet amendement ne peut qu’encourager la réflexion nécessaire sur les MJC et leur avenir.

La commission adopte l’amendement.

 

La séance est levée à minuit.

 


Présences en réunion

Présents.  Mme Farida Amrani, M. Raphaël Arnault, Mme Bénédicte Auzanot, M. Erwan Balanant, M. Philippe Ballard, Mme Géraldine Bannier, M. José Beaurain, Mme Béatrice Bellamy, M. Arnaud Bonnet, M. Idir Boumertit, Mme Soumya Bourouaha, Mme Céline Calvez, M. Aymeric Caron, M. Bruno Clavet, M. Pierrick Courbon, M. Laurent Croizier, Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho, M. Aly Diouara, M. Philippe Fait, M. Emmanuel Grégoire, M. Steevy Gustave, Mme Céline Hervieu, Mme Tiffany Joncour, Mme Florence Joubert, Mme Fatiha Keloua Hachi, Mme Sarah Legrain, Mme Delphine Lingemann, M. Christophe Marion, Mme Graziella Melchior, Mme Marie Mesmeur, Mme Frédérique Meunier, Mme Caroline Parmentier, M. Jérémie Patrier-Leitus, M. Thierry Perez, Mme Béatrice Piron, Mme Lisette Pollet, M. Christophe Proença, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Claude Raux, Mme Sophie-Laurence Roy, M. Arnaud Sanvert, Mme Anne Sicard, M. Bertrand Sorre, Mme Violette Spillebout, Mme Sophie Taillé-Polian, M. Paul Vannier

Excusés.  M. Gabriel Attal, M. Xavier Breton, M. Frantz Gumbs, M. Frédéric Maillot, Mme Nicole Sanquer