Compte rendu

Commission
des affaires économiques

 Examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2025 (n° 324) :

 mission « Écologie, développement et mobilité durables » :

. Avis Énergie (M. Maxime Laisney, rapporteur pour
avis).......................................... 2

 

 

 


Mardi 29 octobre 2024

Séance de 17 heures 30

Compte rendu n° 15

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de Mme Aurélie Trouvé,

Présidente, puis de
M. Charles Fournier,

Vice-président


  1 

Dans le cadre de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2025, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. Maxime Laisney, les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », en ce qui concerne l’énergie.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous examinons aujourd’hui les crédits des programmes 174 « Énergie, climat et après-mines » et 345 « Service public de l’énergie » de la mission Écologie, développement et mobilités durables, ainsi que le compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ».

L’énergie représente un enjeu crucial pour nos concitoyens, notamment ceux dont les revenus sont les plus modestes et qui peinent à assumer une facture toujours plus lourde – je pense en particulier aux douze millions de personnes qui souffrent de précarité énergétique. La sécurité de l’approvisionnement et la stabilité des prix sont aussi cruciales pour nos entreprises, notamment pour les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) et les artisans, qui ont beaucoup souffert et qui continuent à souffrir de l’emballement des prix du marché depuis trois ans. Nos concitoyens comptent sur notre vigilance.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Dans ma première partie, je vous expliquerai pourquoi je suis défavorable aux crédits relatifs à l’énergie. Tout d’abord, nous sommes bien loin des engagements de la France, pris notamment envers l’Union européenne, et du Plan national intégré énergie-climat (Pniec), rendu au mois de juillet. L’augmentation du budget de la mission est en trompe-l’œil. Le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » connait une forte diminution, qui s’explique en partie par un transfert des crédits de MaPrimRénov’ vers une autre mission, également en diminution, de même que tout ce qui concerne le verdissement de l’automobile, le « fonds Vert » qui soutient la transition énergétique dans les territoires, et le « fonds Chaleur » de l’Agence de la transition écologique (Ademe). Au total, ce sont 3,5 milliards d’euros (Md€) en moins à destination des ménages et des collectivités pour la transition énergétique, alors que ces dispositifs sont efficaces.

Entre la dette financière et la dette écologique, entre les créanciers et les générations futures, monsieur Barnier n’a pas choisi l’avenir. Il n’a pas choisi non plus le présent, notamment en ce qui concerne l’accès à l’énergie, puisque le chèque énergie est fragilisé. Quant à la fameuse taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) ou « accise sur l’électricité », dont la hausse a été supprimée la semaine dernière dans l’hémicycle, le Gouvernement s’est engagé à faire baisser les factures de 9 %. Soit ! Mais cet engagement ne figure que dans l’exposé des motifs et, étant donné que la décision sera prise au mois de janvier, bien malin celui qui connaîtra le Gouvernement d’alors… La taxe sera au moins de 35 euros par kilowattheure, alors qu’elle était de 22 euros environ cette année et que les tarifs réglementés de vente d’électricité (TRV) ont augmenté de 43 % en trois ans.

Le programme 345 « Service public de l’énergie » profite d’une hausse en trompe‑l’œil. Si les charges de service public de l’énergie (CSPE) augmentent de 6 Md€ sur les renouvelables, il ne s’agit en fait que d’un retour au niveau d’avant-crise et surtout de dépenses obligatoires qui tiennent aux mécanismes de soutien aux énergies renouvelables. En réalité, les dépenses sur les énergies renouvelables sont bridées par une programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) désormais obsolète. Cela fait d’ailleurs un an et demi que nous attendons une loi de programmation pluriannuelle pour l’énergie et le climat en bonne et due forme, comme cela était prévu dans la loi « Énergie et climat » du 8 novembre 2019. Sous cet aspect, notre gouvernement est, après d’autres, hors-la-loi.

J’ai choisi de consacrer la seconde partie de mon rapport au coût du nucléaire. Il est urgent de débattre de la politique énergétique et de l’option nucléaire. Les rapports de Réseau de transport d’électricité (RTE) ou de l’Ademe ne présentent aucun scénario de décarbonation sans déploiement massif des énergies renouvelables, alors qu’ils en élaborent plusieurs sans nouveau nucléaire. Celui-ci pose plusieurs problèmes : gestion des déchets, risques d’accident, arrivée trop tardive pour éviter des quantités gigantesques d’émissions de gaz à effet de serre, absence de résilience face aux conséquences du réchauffement climatique. Et tout cela pour des dizaines de milliards d’euros ! Est-ce bien raisonnable d’engager autant d’argent sur le dos des consommateurs et des contribuables pour un résultat aussi incertain et alors que l’on a besoin de ces sommes pour déployer les énergies renouvelables et les intégrer dans le réseau ?

Le coût du « Grand carénage », c’est-à-dire celui de la prolongation des centrales existantes, sera élevé, mais son estimation est encore floue. EDF y consacre déjà quatre à cinq milliards d’euros par an, depuis 2014 et jusqu’à 2028, terme de la projection. La VD4, la quatrième visite décennale, celle qui permet de prolonger l’existence des centrales au-delà de quarante ans, coûterait quatre fois plus cher qu’une VD3. Quant à la VD6, celle qui prolongerait l’existence des centrales au-delà de soixante ans, elle coûterait également plus cher que la VD5. Dans les années 2040, les deux tiers de nos réacteurs auront plus de soixante ans. Quelle sera la facture d’une prolongation au-delà de soixante ans ? Quelles sont les certitudes technologiques et industrielles ?

Le réacteur de type EPR de Flamanville est un objet intéressant. Déjà du passé, c’est pourtant du futur qui se fait attendre mais toujours pas du présent, alors que sa construction enregistre, pour l’heure, douze ans de retard. En 2020, la Cour des comptes estimait que sa facture avait été multipliée par six. Il a, pour l’instant, coûté près de 20 Md€. Son coût de production du mégawattheure était évalué par l’économiste Alain Grandjean, en 2020, à 154 euros, soit bien au-dessus de ce que l’on pourrait espérer. Nous avons appris au cours de nos auditions que, lors du lancement de sa construction, on ne disposait que de 10 % du design détaillé. Il fallait donc s’attendre à un tel fiasco industriel ! La situation mondiale des autres EPR n’est pas beaucoup plus brillante. EDF a investi dans Hinkley Point, au Royaume-Uni. Le chantier dure depuis dix ans. Pour les deux réacteurs en construction, l’estimation va de 31 à 35 Md€.

Si l’EPR2 est « vendu » comme une version simplifiée de l’EPR, il représente un nouveau modèle qui nous expose à de nouveaux risques industriels. La phase de basic design validée, on entre dans la phase du design détaillé pour commencer à construire. On nous dit que ces plans seront élaborés d’ici à 2030, mais que le premier béton nucléaire sera coulé à Penly en 2028... EDF se fixe pour objectif de construire un réacteur en soixante-dix mois, reconnaissant que c’est « ambitieux et atteignable ». La direction interministérielle au nouveau nucléaire, que nous avons auditionnée, parle d’un objectif « challenging » – chacun appréciera – et précise que l’effet de série ne devrait intervenir qu’à partir du quatrième, du cinquième voire du sixième exemplaire. Pour Penly, il ne faut pas espérer construire en moins de dix ans, soit la durée moyenne de construction d’un EPR2 dans le monde. La promesse des soixante-dix mois est-elle donc bien sérieuse ?

Tout cela a un impact sur les coûts. La première estimation pour les six premiers chantiers était de 51,7 Md€ en 2020 ; elle est passée à 67,4 Md€ en 2024. Une nouvelle estimation est attendue pour la fin de cette année. Ces quelque soixante-dix milliards d’euros s’entendent hors coûts de financement, lesquels pourraient, selon RTE, multiplier le prix de l’électricité par deux ou par trois. Il ne me semble donc pas responsable d’engager de tels travaux sans y voir plus clair, non seulement sur les montants, mais aussi sur les modalités de financement et sur l’impact pour les différents consommateurs.

Deuxièmement, j’en viens aux factures des consommateurs. Le 31 décembre 2025, l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) prendra fin. EDF vendra l’intégralité de sa production électrique sur le marché européen.

S’agissant des entreprises, EDF a commencé à proposer des contrats de moyen terme à quatre ou cinq ans – 2 600 ont déjà été signés. Pour les énergo-intensifs, deux dispositifs supplémentaires existent. Les contrats d’allocation de production nucléaire (CAPN) sont des contrats de partenariats industriels sur des durées de dix à quinze ans. Lors des auditions, les entreprises énergo-intensives nous ont dit que la négociation était un peu « rude » et que le prix du mégawattheure proposé par EDF était 15 euros au-dessus de ce qu’elles espéraient, si bien que seulement cinq lettres d’intention ont été signées. Le deuxième dispositif, c’est la phase 2 d’Exeltium, selon le même principe de « l’avance en tête » que pour le CAPN, mais à destination d’un consortium d’énergo-intensifs.

Ces entreprises, qui espéraient un contrat pour différence (Contract for Difference, CfD) négocié par le Gouvernement, sont d’accord faute de mieux, mais elles ne sont pas particulièrement « emballées », ce qui laisse planer des doutes sur la décarbonation de nos outils de production par l’électrification et la réindustrialisation et fait craindre d’éventuelles délocalisations.

S’agissant du nouveau nucléaire, les entreprises énergo-intensives ne sont pas prêtes à mettre 1 centime dans les nouveaux réacteurs. Malheureusement, le fiasco de Flamanville les a vaccinées. Néanmoins, il reste deux options de financement public sur la table : le modèle Dukovany et l’avance remboursable. Dans le premier cas, l’État prête à taux zéro à EDF pour la réalisation du chantier et, une fois la mise en service effectuée, l’exploitation se ferait selon un contrat pour différence, c’est-à-dire avec un soutien de l’État quand les prix du marché sont bas et, à l’inverse, un reversement des surplus à l’État quand les prix sont élevés. Dans le second cas, EDF ne rembourserait l’État que lorsqu’il fait des bénéfices.

Le fameux article 4 du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, qui a été supprimé lors de la séance du 25 octobre dernier, contenait le dispositif qui devait prendre la suite de l’Arenh et concerner les ménages, les collectivités et une partie des entreprises. En réalité, même si la loi contraint EDF à réserver 100 térawattheures, par construction, ce sont les trois quarts de l’électricité nucléaire d’EDF qui sont vendus au prix de 42 euros par mégawattheure, si bien que 50 % de la « part électron » de la facture des ménages au tarif réglementé de vente d’électricité (TRV) sont fixés sur le tarif de l’Arenh. Dès le 1er janvier 2026, ce sera 100 % de cette « part électron » qu’il faudra aller chercher sur le marché de gros européen, qui, malgré la réforme récente du marché de l’électricité, suivra encore de près les cours du gaz.

L’État envisage un dispositif définissant deux seuils de captation des revenus nucléaires d’EDF : le versement nucléaire universel. Le premier seuil, dit « seuil de taxation », correspondrait aux coûts complets de production majorés de 5 à 25 euros ; pour le deuxième seuil, appelé « seuil d’écrêtement », la fourchette se situerait entre 35 et 55 euros supplémentaires. C’est un arrêté ministériel qui fixerait les tarifs de taxation et d’écrêtement à l’intérieur de ces fourchettes, en prenant en compte, d’une part, le coût de production du nucléaire existant – ce qui pose un premier problème, dans la mesure où la Commission de régulation de l’énergie (CRE) le fixe à 60 euros et EDF à 75 euros par mégawattheure – et, d’autre part, la dette d’EDF (55 Md€) et les investissements dans le nouveau nucléaire – EDF demande la moitié des quelque 70 Md€ du nouveau programme.

On se retrouverait alors à peu près dans les fourchettes négociées par le ministre Bruno Le Maire avec EDF, il y a un an : 78 euros par mégawattheure pour le premier seuil et 110 euros pour le deuxième. Au-delà du seuil de 78 euros, 50 % des revenus perçus par EDF au titre de son parc nucléaire seraient prélevés et 90 % le seraient pour la quotité de revenus qui excéderait le second seuil de 110 euros, pour être ensuite redistribués. Comprenez bien qu’avant le premier seuil, qui a été fixé très haut, il y a 0 % de taxation et qu’aucune minoration ne sera appliquée sur la facture des consommateurs. On ne comprend pas trop comment les calculs seront faits, dans la mesure où ils seront à la main des ministres et différents pour chacun.

Les cabinets des ministres que nous avons auditionnés ont été incapables de nous fournir des simulations. Selon l’économiste Nicolas Goldberg, il est impossible de garantir le prix cible de 70 euros, vendu dans l’exposé des motifs sans justification. Toutes choses égales par ailleurs, on pourrait s’attendre au 1er janvier 2026 à une hausse des factures de 10 %. Le dispositif n’assure donc aucune prévisibilité et il est la garantie d’une augmentation des factures.

Pour conclure, l’article 4 du projet de loi de finances ayant été supprimé à une large majorité en séance, j’appelle le Gouvernement à ne pas passer en force et à proposer un projet de loi dédié pour discuter de cette question fondamentale de l’énergie. Avec mes collègues de La France insoumise, nous allons proposer dans notre niche, fin novembre, un texte de blocage des prix et de TRV fondés sur les coûts de production. Qui plus est, nous avons besoin d’une vraie loi de programmation pluriannuelle sur l’énergie et le climat pour voter ou non la relance du nucléaire, compte tenu de tous les éléments que je vous ai présentés. C’était d’ailleurs l’une des recommandations de la commission d’enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France, pilotée par notre collègue Raphaël Schellenberger et monsieur Antoine Armand, désormais ministre. C’est un enjeu d’approvisionnement électrique, d’accès à un bien de première nécessité et de décarbonation de notre économie.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Maxime Amblard (RN). La lecture de votre rapport a été éprouvante, mais sans grande surprise : la volonté de discréditer le nucléaire, une multitude de chiffres sans cohérence ni rapport avec la quantité d’énergie effectivement produite par le nucléaire et l’absence de hauteur de vue le caractérisent. Votre propos n’a pour seule cohérence que de tenter de justifier, au prix de quelques arrangements avec la vérité, votre idéologie. Or l’une de vos erreurs fondamentales est de faire passer les moyens avant la fin.

Nous partageons le même constat de la menace du réchauffement climatique et de la raréfaction des ressources en hydrocarbures et, par conséquent, les mêmes objectifs de diminuer l’intensité carbone de notre mix énergétique et de nous défaire de notre dépendance aux énergies fossiles. Cependant, le Rassemblement national cherche à le faire en garantissant au maximum un faible coût de l’énergie. Ces trois objectifs, nous avons la chance de les avoir déjà atteints dans notre histoire récente, grâce à un mix électrique combinant nucléaire historique et hydraulique – l’un des moins carbonés au monde et le moins cher d’Europe pendant des décennies. Ce n’est pas de l’idéologie, c’est de la physique.

Vous promouvez un mix énergétique incluant les énergies renouvelables intermittentes qui, non seulement remplacerait un mix déjà décarboné, mais présente davantage de limites physiques. Le nucléaire et l’hydraulique sont pilotables et concentrés, tandis que les énergies renouvelables intermittentes sont, par définition, intermittentes et diffuses. Leur exploitation pose un problème majeur en termes de gestion des ressources. Ainsi, en termes de puissance disponible garantie, il faudrait environ 3 500 éoliennes de 3 mégawattheures pour égaler la production d’un seul réacteur EPR. Ces contraintes physiques ne peuvent que se matérialiser dans le coût de production.

Vous affirmez pourtant, à la page 21 de votre rapport, que la filière éolienne paraît peu coûteuse pour l’État et qu’elle dégage même des recettes – une assertion trompeuse, qui masque volontairement une période d’explosion des prix de l’électricité. Une recette qui se fait au prix de 30 Md€ de bouclier énergétique n’est pas une recette, c’est la démonstration que le seul moyen de rendre les énergies renouvelables intermittentes non coûteuses pour l’État consiste à en faire porter le coût au consommateur, avec des prix structurellement élevés. Vous expliquerez aux Français pourquoi leur facture d’électricité explose.

Nous pouvons cependant nous retrouver sur vos remarques s’agissant de la brièveté des délais impartis à la représentation nationale pour se prononcer sur le dispositif post-Arenh. À cet égard, la taxe sur EDF que le Gouvernement a tenté d’introduire en catimini à l’article 4 du projet de loi de finances est en effet totalement inacceptable.

Finalement, tout cet argent public dépensé pour une électricité décarbonée, qui l’est déjà grâce au nucléaire et à l’hydroélectricité, n’a de sens ni pour notre souveraineté, ni pour l’environnement, ni pour les finances publiques et le consommateur. La vision dogmatique que défendent main dans la main les membres du parti unique n’est rien d’autre que celle de l’Union européenne, sous la pression de l’Allemagne, qui, confondant l’objectif – émettre moins de gaz à effet de serre – et l’un des moyens – le renouvelable –, va remplacer des moyens de production électrique pilotables par le solaire et l’éolien, non pilotables et grassement subventionnés, ce qui dissuadera de maintenir et de renouveler les premiers.

Afin d’éviter que la facture des Français ne s’envole, le temps est venu de laisser les énergies renouvelables, « très compétitives » dites-vous, se développer sans subventions massives, et de sortir des règles de tarification du marché européen de l’électricité pour se rapprocher du coût de production réel de l’électricité – je suis ravi que vous entendiez faire cette proposition dans le cadre de votre niche parlementaire.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). La sortie progressive de l’utilisation des énergies fossiles et l’atteinte de la neutralité carbone d’ici à 2050 sont les objectifs qui guident désormais l’action de notre politique publique énergétique, et les lois emblématiques que sont la loi d’orientation des mobilités (LOM) en 2019 et la loi « Climat et résilience » en 2021 en sont les marqueurs. La « défossilisation » doit se réaliser avant tout avec pragmatisme et s’appuyer sur une approche scientifique. Cette stratégie repose sur quatre piliers indissociables : la sobriété énergétique, l’efficacité énergétique, l’accélération du développement des énergies renouvelables et la relance de la filière nucléaire française.

La loi « Énergie et climat » de 2019 fixe un objectif d’au moins 33 % d’énergies renouvelables dans la consommation énergétique finale en 2030. C’est pourquoi, en 2023, nous avons adopté la loi d’accélération du développement des énergies renouvelables et la loi sur la relance de la filière nucléaire – votre discours aurait d’ailleurs été plus cohérent si votre groupe avait voté la première.

Le seul combat qui vaille, c’est celui des énergies décarbonées contre les énergies fossiles et de sortir de notre dépendance à ces dernières. Nous n’avons ni le luxe ni le temps d’opposer les énergies renouvelables entre elles, ou le renouvelable et le nucléaire, ou les molécules et les électrons. La connaissance scientifique sur ces sujets offre un apport indéniable et s’impose à nous, nous appelant à agir sans dogme pour garantir notre souveraineté énergétique ainsi que l’équilibre des prix. La crise, qui a vu les prix du gaz et de l’électricité atteindre des sommets en 2022, a prouvé que l’État sait être protecteur – pensons à la création du chèque énergie pour les foyers les plus précaires et au renforcement du bouclier tarifaire pour aider les Français, les entreprises et les collectivités.

La question énergétique est corrélée à celle de l’aménagement du territoire. Elle le sera davantage encore demain avec le déploiement des énergies renouvelables, principalement dans nos territoires ruraux, en reliant les bassins de production et de consommation, alimentés par de l’électricité nucléaire, du biométhane, de la chaleur renouvelable ou de l’hydrogène. Le fonds Vert créé en 2023 a permis d’apporter un soutien financier à près de six mille communes, pour des projets représentant des dépenses de dix milliards d’euros et un engagement du fonds de deux milliards d’euros. C’est bien cette politique énergétique construite au plus près des Français et des territoires qui conduit à une diminution des émissions françaises de CO2 de 4,8 % en 2023.

Pour en venir aux crédits, notre groupe se réjouit de voir ceux du programme 345 « Service public de l’énergie augmenter de plus de 32 % pour atteindre 7,3 Md€. Cette augmentation des crédits vise notamment à favoriser le développement d’autres sources d’énergie, comme l’hydrogène ou la petite hydroélectricité.

En revanche, je me désole de la nette diminution des crédits du programme 174 « Énergie, climat et après-mines ». Si elle est principalement l’effet d’un changement de périmètre des dotations allouées au dispositif MaPrimeRénov’, désormais rattaché au programme 135, ce sont bien les crédits dédiés au fonds Vert pour les collectivités, malgré la démonstration de leur utilité et l’importance des besoins locaux, qui sont ramenés à 1 Md€ quand la loi de finances pour 2024 avait doté le fonds de 2,5 Md€. Nous appelons donc le Gouvernement à créer les conditions de sa revalorisation.

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). Dans la mesure où j’ai moi-même travaillé en commission du développement durable sur un avis budgétaire au périmètre similaire, nous sommes convenus avec le rapporteur que je prendrais la parole sur des crédits qu’il a moins étudiés dans son rapport.

Ces crédits illustrent le pas de deux entre le gouvernement Barnier et le RN. La démission permanente de la Macronie sur l’écologie crée un terreau favorable à la démagogie antiécologiste du RN. Le budget montre de grandes coupes là où des investissements publics massifs sont indispensables. Les crédits de la rénovation thermique baissent de 1 Md€, alors même que ce chantier est critique et que nous accumulons des retards depuis des années. En 2023, 85 000 rénovations globales ont été effectuées, alors qu’il en faudrait deux cent mille par an et sept cent mille à partir de 2030. Ce défaut d’investissement se traduit sur le plan budgétaire, mais aussi dans toutes les autres dimensions : structuration de la filière du bâtiment, formation de deux cent mille professionnels, organisation d’un grand service public qui puisse assurer le travail social qu’implique la massification de la rénovation. Le RN s’engouffre dans la brèche et proposera dans sa niche d’annuler l’interdiction de louer des passoires thermiques, mesure qui revient à acter les renoncements et les reculs de la Macronie. En attendant, il y a 4,8 millions de passoires thermiques. La précarité énergétique touche encore douze millions de Français, avec toutes les conséquences sanitaires et sociales que cela implique.

L’électrification du parc automobile perd 870 millions d’euros (M€). Si l’on prend en compte l’écart entre la consommation réelle des crédits en 2024 et les aides prévues dans le budget pour 2025, on dépasse le milliard d’euros de coupes budgétaires. Elles créent de véritables impasses pour les Français : l’accès à un véhicule électrique reste impossible faute d’aides conséquentes et à cause d’un prix à l’achat beaucoup trop élevé. Là encore, le RN s’en empare et en fait une tribune antiécologique : ses députés sont contre les zones à faibles émissions (ZFE), le malus automobile et la fin de la vente des véhicules thermiques en 2035, ce qui revient à enfermer les Français dans l’impasse du thermique.

Concernant le chèque énergie, le gouvernement Barnier veut mettre fin à son automaticité, ce qui est une manière dissimulée de moins dépenser, en comptant sur le non-recours. Nous avons d’ailleurs fait adopter un amendement transpartisan de suppression de cette réforme en commission du développement durable. Je vous inviterai à faire de même en commission des affaires économiques. Une fois de plus, le RN reprend la rhétorique de l’austérité pour mieux justifier des amendements parfaitement xénophobes. Au prétexte de faire des économies, ses députés ont ainsi proposé en commission du développement durable d’appliquer la préférence nationale à ce chèque.

Les Françaises et les Français sont coincés entre l’incurie gouvernementale et la démagogie antiécologiste du RN. Un autre budget de l’écologie était pourtant possible, qui aurait augmenté ces enveloppes budgétaires et se serait inscrit dans une véritable planification écologique, afin de défendre le pouvoir d’achat et la dignité des Français, leur droit de vivre sans avoir froid et de se déplacer sans risquer d’hypothéquer leur avenir.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Je partage évidemment vos inquiétudes quant à la rénovation énergétique et au véhicule électrique. Pour ce qui est du chèque énergie, nous y reviendrons à l’occasion de l’examen des amendements.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). En premier lieu, il faudrait revoir certains aspects de l’examen des missions par notre commission, car de nombreux amendements n’ont pas de lien avec le rapport que nous examinons. Je ne jette pas la pierre à mes collègues, car nous n’aurons sans doute pas l’occasion d’aborder ces questions en séance, mais cela crée un certain mélange et le choix très artificiel des gages dont ils sont assortis ne doit pas conditionner le tri des amendements.

Je souligne aussi la difficulté de se mobiliser sur les fonds affectés au budget Énergie, alors que nous n’avons toujours pas d’indications sur les orientations et les objectifs à atteindre – et donc sur les moyens financiers à y affecter – faute d’une loi de programmation énergie-climat et d’une programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), alors que la loi l’impose, comme l’a rappelé le rapporteur. L’exercice est insolite et tout à fait inconfortable.

Sur le fond, les crédits liés au rapport Énergie connaissent cette année une évolution majeure avec le transfert, que nous demandions d’ailleurs l’an dernier, de MaPrimeRénov’ vers la mission Cohésion des territoires.

Ce qui caractérise le rapport cette année, c’est d’abord l’insuffisance des moyens alloués au chèque énergie, dont le montant n’a jamais rattrapé l’évolution des prix depuis 2021, alors que la facture moyenne des ménages a augmenté de 45 % depuis cette date. Il est donc essentiel d’augmenter le montant du chèque. Or le Gouvernement semble avoir des ambitions contraires avec l’article 60 du projet de loi de finances, qui rendra encore plus difficile l’accès au chèque énergie pour les ménages les plus précaires. Le rapporteur a proposé un amendement visant à chercher des modalités alternatives d’identification des bénéficiaires, afin d’améliorer le taux de recours malgré cette réforme. Nous le remercions de cette initiative, mais, si nous partageons son intention, nous voyons bien où se dirigent nos débats sur ce projet de loi de finances et il importe donc que l’article 60 soit rejeté par la majorité la plus large possible.

Le fonds Vert se voit raboter à hauteur de 1,5 Md€, ce qui affectera lourdement les collectivités territoriales et affaiblira l’investissement dans la transition écologique pour nos territoires, qui se mobilisent pourtant de plus en plus. Cette mesure incompréhensible obère l’avenir, en comblant les trous laissés par les chèques sans provision signés par Emmanuel Macron. Un tel affaiblissement du soutien à l’investissement local ne pourra que pénaliser durablement nos TPE et PME, alors que celles du secteur du bâtiment et travaux publics (BTP) subissent déjà durement la crise de la construction et du logement, même si les besoins en nouveaux logements et en rénovation sont criants.

Pour toutes ces raisons et beaucoup d’autres, le groupe Socialistes et apparentés votera contre les crédits de la mission.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Nous parlerons plus tard du chèque énergie. Quant à la PPE, lorsque nous avons auditionné la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), nous avons appris qu’une nouvelle PPE arriverait en février, mais qu’elle ne serait pas précédée d’une loi de programmation sur l’énergie et le climat (LPEC) en bonne et due forme, le Gouvernement comptant vaguement sur la proposition de loi du sénateur Daniel Gremillet, récemment adoptée, pour en tenir lieu.

M. Jean-Pierre Vigier (DR). La politique énergétique est fondamentale pour notre souveraineté nationale. Les événements récents, comme la guerre en Ukraine, nous ont durement rappelé les conséquences d’une dépendance énergétique non maîtrisée. Nos entreprises, en particulier celles de l’industrie électro-intensive, et le commerce de proximité, notamment en zone rurale, ont été frappés par la flambée des prix de l’énergie. Nous ne pouvons plus nous contenter de mesures temporaires pour compenser des décennies d’une politique énergétique mal adaptée et trop souvent soumise à des querelles partisanes. Une refonte profonde s’impose pour garantir une politique stable et résiliente, moins vulnérable aux fluctuations.

Pourquoi accorder une telle importance aux coûts associés à l’EPR de Flamanville, en s’appuyant sur des estimations non validées par EDF ? Des échecs opérationnels ont certes eu lieu, mais cette insistance semble surtout viser à discréditer l’énergie nucléaire, alors que nous ne pouvons ignorer les bénéfices d’une source d’énergie puissante, abordable et décarbonée – une énergie propre.

Votre rapport met en relief le financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale, en soulignant notamment le manque de bornes de recharge pour les véhicules électriques. C’est certes important, mais d’autres aspects ne seraient-ils pas prioritaires pour relever les défis de l’électrification en zone rurale, notamment le maintien du compte d’affectation spéciale, principal outil de financement à cet effet, qui n’a pas été revalorisé depuis 2012 ?

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Je partage votre préoccupation quant au maintien et, surtout, à la revalorisation du compte d’affectation spéciale Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale (CAS Facé). La Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), que nous avons auditionnée, s’est émue du fait que, depuis des années, les crédits ne suivent pas l’inflation et elle n’est pas satisfaite de ce qu’une partie de l’accise doive désormais financer le CAS Facé.

Pour ce qui est du nucléaire et de Flamanville, je privilégierai les chiffres de la Cour des comptes plutôt que ceux de monsieur Grandjean. EDF nous a fourni certaines réponses, mais pas toutes. Il me semble ainsi avoir démontré que l’énergie nucléaire n’était pas si abordable que vous le dites. Quant à la souveraineté et à l’indépendance, je vous renvoie aux travaux de la commission d’enquête : lorsqu’on est dépendant à 100 %, pour le nucléaire, d’importations d’uranium dont 40 % viennent du Kazakhstan en passant par Rosatom, l’entreprise de Poutine, je ne suis pas certain qu’on puisse parler de souveraineté ni d’indépendance…

Mme Julie Laernoes (EcoS). Votre rapport très substantiel sur les programmes budgétaires consacrés à la politique énergétique de notre pays permet d’objectiver enfin la forte régression des enveloppes dévolues à la transition énergétique.

Fonds Vert, MaPrimeRénov’, fonds Chaleur, aides pour le verdissement des véhicules : comme vous, nous déplorons les fortes baisses de ces budgets, délétères pour le climat, pour le pouvoir d’achat des ménages et pour nos entreprises – et, surtout, en totale contradiction avec la stratégie pluriannuelle d’investissement de la transition écologique présentée récemment par le Gouvernement, qui prévoit que les investissements pour le climat doivent encore augmenter de 110 Md€ par an d’ici à 2030. Nous sommes très loin du compte !

Vous regrettez également que le développement des énergies renouvelables soit bridé par une PPE obsolète. On le constate en effet aussi sur le terrain et je souscris pleinement à votre analyse. Depuis deux ans, nous avons exhorté les gouvernements successifs à présenter une loi de programmation énergie-climat, mais en vain. Cette absence de trajectoire énergétique actualisée, à laquelle s’ajoutent tous les reculs que je viens d’énoncer, est catastrophique pour le développement des projets industriels dans le domaine des énergies renouvelables. Si nous continuons sur cette voie, nous ne tiendrons pas l’objectif des 177 térawattheures d’électricité supplémentaires dont nous avons besoin pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles, et nous le paierons collectivement très cher en termes de sécurité d’approvisionnement et d’indépendance énergétique.

Puisque nous en débattrons lors de l’examen des amendements que nous avons déposés, je ne mentionnerai ici la réforme du chèque énergie que pour dire qu’elle est inacceptable, car elle risque de provoquer une explosion des non-recours et de la précarité énergétique.

Je salue enfin votre volonté de mettre en lumière un aspect dont on ne parle jamais et qui aura pourtant une incidence fondamentale sur notre sécurité d’approvisionnement comme sur le prix de l’électricité : les coûts des nucléaires existant et futur, et leur impact sur les consommateurs français. Alors qu’on brandit le nucléaire comme la solution à tous nos problèmes, personne n’est capable d’en exposer les coûts en toute transparence. L’opacité règne en maître. Dans le contexte budgétaire actuel et au vu des investissements colossaux qui sont nécessaires, ce n’est pas acceptable. Il est temps de clarifier ces coûts et de les verser au débat sur la politique énergétique.

On ne peut qu’être interloqué en apprenant que vous n’avez pu, malgré votre qualité de rapporteur, obtenir plus d’informations sur les coûts à court terme que génère la filière du nucléaire, sur ceux du grand carénage qui interviendra après 2028 ni sur le montage financier concernant les EPR2 : c’est le flou total, et c’est très inquiétant. Comment expliquez-vous ces zones d’ombre persistantes et le peu de chiffres disponibles ? Ce flou ne doit-il pas amener le Parlement à s’interroger plus soigneusement sur le financement du nucléaire et sur sa compétitivité ?

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Pour ce qui est du flou, je partage vos interrogations mais ne saurais y répondre.

Pour ce qui est du prix du nucléaire, je me souviens d’une phrase prononcée à deux reprises par M. Bruno Le Maire, que nous avions auditionné voilà un peu plus d’un an, en audition commune avec Mme Pannier-Runacher, dans le cadre de la commission des finances : selon lui, les Français allaient devoir se payer leur choix du mix énergétique – ce qui signifiait qu’ayant voté Macron, ils allaient payer pour le nucléaire.

M. Philippe Bolo (Dem). Le montant de 60 Md€ qu’il faut aller chercher par des recettes nouvelles ou par des dépenses en moins correspond, à peu de choses près, à celui que l’État a mis sur la table pour des mesures de protection des entreprises, des collectivités territoriales et des ménages face à l’explosion du prix des énergies sur la période 2021-2023 : des dépenses en plus et d’autres en moins pour financer le « bouclier » gaz et électricité, la baisse de la TICFE, l’ « amortisseur » électricité, le « filet de sécurité » et les nombreux chèques énergie – inflation 2023, bois et fioul. La question de l’énergie est donc majeure et les crédits que nous examinons aujourd’hui sont essentiels pour la souveraineté énergétique de notre pays, le pouvoir d’achat des Français et la décarbonation des usages de l’énergie en France.

Le programme 174 fait apparaître un équilibre entre des baisses significatives et quelques hausses, les baisses s’expliquant par le changement d’affectation du dispositif MaPrimeRénov’, désormais rattaché au programme 135. N’oublions jamais que, malgré les exigences budgétaires qui s’imposent, les économies d’aujourd’hui peuvent parfois être des dépenses insupportables pour demain : efforçons-nous de raisonner à long terme.

L’article 60 du projet de loi de finances pour 2025 réforme les modalités d’attribution du chèque énergie. Nous devons être vigilants quant aux adaptations prévues, si nécessaires soient-elles, car l’évolution de certains paramètres rend parfois difficile de cibler précisément les ménages qui ont besoin de ce dispositif. Voilà encore quelques années, le taux d’utilisation du chèque énergie était, au mieux, inférieur à 80 % : la réforme ne doit pas dégrader le taux d’accès à un dispositif qui avait été retenu en 2018 pour corriger le faible recours aux tarifs sociaux de l’énergie.

Nous avons une vision positive des dispositions du programme 345, qui prévoit un soutien aux énergies renouvelables et, plus généralement, aux charges de service public de l’énergie, en nette hausse de 4,6 Md€.

Pour ce qui est de la fiscalité, le fait que la TICFE retrouve son niveau d’avant la crise énergétique aura une incidence sur la facture énergétique des Français, mais n’oublions pas que cette taxe intègre également, depuis une réforme intervenue voilà quelques années, la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE), dont le produit est reversé aux syndicats d’énergie, lesquels ont un important effet de levier sur l’activité des territoires. Cette augmentation est donc une forme de retour direct pour les ménages et les entreprises, via l’activité des syndicats d’énergie. Cela ne signifie pas qu’il faille l’augmenter n’importe comment : la vigilance s’impose et cette taxe ne doit pas devenir une variable d’ajustement pour ménager au Gouvernement des recettes nouvelles, car toute augmentation se traduira par une augmentation du prix de l’énergie, voire, par effet indirect, par une baisse de production de certaines énergies, notamment renouvelables.

Quant au CAS Facé, qui est en effet essentiel pour la maîtrise d’ouvrage confiée aux syndicats d’énergie dans les territoires ruraux, il faut absolument en revaloriser les montants, qui sont versés à ces syndicats d’énergie. Ce levier en faveur des travaux d’électrification est un facteur de vitalité et de dynamisme dans les zones rurales, qui contribue à l’attractivité des territoires et à la gestion des risques climatiques. Ces syndicats procèdent en effet à l’enfouissement de lignes vulnérables aux coups de vent forts. C’est aussi un enjeu de démocratie locale.

Le groupe Les Démocrates regardera avec vigilance ces crédits et leur évolution en fonction des amendements qu’il reste à voter.

M. Thomas Lam (HOR). L’Arenh était un dispositif imposé par l’Europe pour introduire sur le marché français de l’électricité une concurrence qui aurait dû investir dans de nouvelles capacités de production électrique. Or cela n’a jamais été le cas et c’est aujourd’hui l’État qui financera les chantiers des six nouveaux EPR prévus. Cela a pour résultat qu’EDF vend trop peu cher et ne peut ni couvrir ses frais de production ni rembourser sa dette, qui se creuse – elle a augmenté de 100 % depuis l’instauration de l’Arenh, passant de 34,4 Md€ à 55 Md€. Le tarif de 42 euros par mégawattheure aurait ainsi dû être réévalué à 60 euros selon une estimation de la Cour des comptes en 2021.

Le groupe Horizons et indépendants soutient donc le nouveau dispositif, car le nucléaire est l’énergie qui émet le moins de CO2 par kilowattheure – il a ainsi permis, en quarante-cinq ans, d’éviter vingt-cinq fois les émissions totales de CO2 de 2022. C’est également une énergie pilotable, qui ne dépend pas d’aléas, et c’est aussi la moins coûteuse – selon Eurostat, l’électricité est 22 % moins chère en France que dans le reste de l’Union européenne. En conséquence, les investissements dans le nucléaire sont ceux qui permettront d’assurer à long terme de l’électricité bon marché. Il fallait, en outre, sortir de la spirale de la dette, qu’il faudra bien payer un jour.

Enfin, vous semblez parler d’un marché privé de l’électricité, mais ce n’est pas le cas. Le système proposé par le Gouvernement conjugue les bons côtés d’un système de prix et les avantages du contrôle de l’État. Un mécanisme de seuil permet de redistribuer les profits du nucléaire si la rente d’EDF devient trop élevée : on redonne de l’argent aux Français quand l’entreprise EDF se porte bien. Il n’est donc pas exact de dire que le prix du nucléaire français est lié aux évolutions du marché.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Si vous êtes capable de nous expliquer comment est calculée la minoration et comment elle s’applique sur les factures, quel est le montant initial des factures et combien nous paierons à la fin, nous sommes tous preneurs de ces informations, car personne n’a rien compris !

Pour ce qui est de la dette d’EDF, l’Arenh fait partie du problème, mais cela tient aussi aux investissements hasardeux de Flamanville, qui n’a toujours pas produit le moindre électron sur le réseau, et de Hinkley Point, avec 31 à 35 Md€ qu’EDF assume à peu près seule.

Le nucléaire est décarboné, c’est vrai lorsqu’il existe et fonctionne. Or ce n’était pas le cas durant l’épisode de corrosion sous contrainte (CSC). La centrale de Flamanville n’a toujours pas démarré et les six premiers EPR sont attendus vers 2035 pour le premier et vers 2043 pour le dernier : d’ici là, nous allons émettre des gaz à effet de serre. Greenpeace avait calculé qu’en investissant le même montant de 52 Md€ dans les énergies renouvelables plutôt que dans le nucléaire, nous aurions, à l’horizon 2050, évité quatre fois plus de gaz à effet de serre et produit trois fois plus d’électricité.

Enfin, le nucléaire n’est pas compétitif. Ainsi, EDF conteste l’accord conclu en République tchèque, considérant qu’il n’est pas possible que le prix du kilowattheure soit inférieur à 90 euros sans soutien de l’État.

M. Harold Huwart (LIOT). Accélérer vers la transition écologique sans pénaliser nos entreprises ni faire reculer une ambition de justice sociale indispensable à l’engagement de nos concitoyens et à leur acceptation de cette évolution majeure est un objectif qui pourrait nous rassembler. À cet égard, notre groupe ne comprend pas le projet de taxation de la consommation finale de l’électricité. Il y avait là une occasion majeure de faire baisser le prix de l’électricité pour les ménages dans le budget desquels le poids des consommations énergétiques a augmenté de 40 % à 50 % depuis la guerre en Ukraine et le début de la crise énergétique fin 2021. Il y a donc un problème de justice sociale et de pouvoir d’achat des ménages.

Le rapport de la Commission de régulation de l'énergie chiffre à 4,3 Md€ les crédits de soutien aux énergies renouvelables, qui se situaient à 2,5 Md€ voilà à peine quelques années. Cette masse financière, qui représente l’essentiel des crédits soumis à notre avis, pose question, alors que, dans le même temps, la Commission signale des gains de compétitivité majeurs dans le secteur des énergies renouvelables. J’appelle donc votre attention sur ce point et sans doute faudrait-il donner priorité au maintien de dispositifs tels que MaPrimeRénov’, car les particuliers, les ménages et les artisans ont besoin de stabilité et de prévisibilité pour pouvoir engager les travaux indispensables à la rénovation de notre parc immobilier. Le maintien de ce dispositif en l’état, avec une baisse de 1 Md€ que l’on pourrait envisager de remettre en cause, me semble prioritaire par rapport à d’autres dispositifs

Pour le reste, nous partageons le sentiment d’une majorité des membres de cette commission à propos du chèque énergie : il doit rester automatique, la suppression de l’automaticité ayant pour effet de rendre mécanique la sous-consommation de ce dispositif.

En outre, dans le domaine des transports, la baisse des aides à l’électrification des véhicules et la suppression de la prime à la conversion nous paraissent être un recul pour le pouvoir d’achat des ménages, qui reste une priorité dans la période que nous traversons.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Je ne répondrai que sur les CSPE pour le développement des énergies renouvelables. Comme je l’ai indiqué dans mon propos liminaire, nous sommes revenus à un niveau assez normal, qui est celui d’avant la crise. À la création d’une installation de production d’électricité renouvelable, le producteur bénéficie d’un prix garanti, qui est celui auquel EDF s’engage à lui racheter son électricité. Lorsque les prix descendent sur les marchés, cela coûte, et lorsqu’ils augmentent, c’est le producteur qui reverse. Certaines années, l’État a gagné de l’argent avec ce dispositif. Il existe encore, notamment dans le domaine du photovoltaïque, de vieux contrats souscrits à une époque où les prix de marché étaient élevés et donc moins avantageux pour l’État, mais ces contrats arrivent à échéance.

Enfin, les énergies renouvelables connaissent un développement, même s’il n’est pas à la hauteur des objectifs que nous nous étions fixés : il est donc normal que cela coûte, à la fin, un peu plus cher.

Je vais maintenant compléter mes réponses à l’ensemble des orateurs des groupes.

Monsieur Amblard, vous évoquez la puissance disponible que garantirait le nucléaire mais, je le répète, dix-sept ans après le lancement du projet, la centrale de Flamanville n’a toujours pas envoyé un seul électron dans le réseau. On nous promet une connexion au réseau d’ici à la fin de l’automne, mais la centrale ne produirait alors que 25 % de la puissance nominale, de telle sorte que nous ne disposerons toujours pas des 1 650 mégawatts espérés. De même, l’épisode de CSC n’a pas été causé par une coalition d’écoterroristes et de députés de La France insoumise désireux de mettre en difficulté les réacteurs nucléaires. Quant au prix, selon les chiffres 2020 de la Cour des comptes – qui remontent donc à quatre ans –, le mégawattheure serait produit à un prix situé entre 110 et 120 euros, ce qui n’a rien de compétitif. Et l’EPR de Flamanville n’a pas encore démarré...

Monsieur Bolo, on ne peut parler d’équilibre pour le programme 174 quand il y manque 3,5 Md€ pour la rénovation thermique et toutes les autres actions prévues. Vous nous appelez à regarder sur le long terme, mais ce sont précisément là des dépenses efficaces et de long terme qui subissent des coupes.

Pour ce qui est de la TICFE, le tableau figurant à l’article 7 du projet de loi de finances présente un montant de 25 euros, mais, compte tenu de la fameuse fourchette de modulation comprise entre + 5 euros et + 25 euros, nous avons calculé qu’il se situera d’emblée à 35 euros. Or la Commission de régulation de l'énergie nous dit qu’il sera très difficile pour le Gouvernement de tenir sa promesse d’une baisse des factures de 9 % avec un prix de 35 euros. J’attends donc de voir ce qu’il en sera.

Monsieur Fugit, nous n’avons pas voté pour la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, mais, un an après sa promulgation, 70 % des décrets d’application de cette loi n’étaient pas publiés : si vous croisez madame Pannier-Runacher, n’hésitez pas à lui demander où cela en est ! Quant à l’idée qu’il ne faut pas opposer les énergies, élément de langage que j’entends répéter depuis que je suis député, je rappelle tout de même qu’en un temps où l’on cherche des milliards d’euros partout, le nucléaire coûte très cher et qu’il y a un intérêt à garder de l’argent pour développer les énergies renouvelables, qui continueront de toute façon à se développer – il n’est, pour s’en convaincre, que de regarder les scénarios de Réseau de transport d’électricité (RTE) et de l’Agence de la transition écologique (Ademe).

Les renouvelables se développent et deviendront majoritaires. Il y a donc lieu de développer les réseaux et les capacités de stockage et de flexibilité, afin que le réseau puisse les accueillir lorsqu’elles auront monté en puissance. S’il faut faire des choix, y compris budgétaires, gardons l’argent pour ce qui marche. Et les renouvelables, nous savons les faire vite et bien.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons aux questions des autres députés.

M. Maxime Amblard (RN). Le nucléaire existant est amorti ; il dégage donc du cash qui peut être investi, par exemple, dans le grand carénage, alors que les énergies renouvelables intermittentes sont subventionnées, perfusées, pour les rendre amortissables à terme, à coups de 6 Md€ par an. C’est ainsi que 150 Md€ ont déjà été engagés pour la durée de vie totale de la puissance installée actuelle. Ne dites donc pas que cela ne coûte rien ! Pour que les énergies renouvelables puissent exister, elles doivent être perfusées à l’argent public. Si, comme vous le dites, elles se développent d’elles-mêmes, arrêtons de les perfuser et elles voleront de leurs propres ailes. C’est ainsi que les oiseaux grandissent.

Pour ce qui est de l’origine du combustible, dont je discutais ce matin avec le haut-commissaire à l’énergie atomique, la France dispose de quinze ans pour se retourner, grâce à l’uranium de retraitement, à l’uranium appauvri et à notre stock d’uranium normal. Nous ne dépendons donc pas de monsieur Poutine – il faut arrêter de dire n’importe quoi.

M. René Pilato (LFI-NFP). D’après l’ONU, la trajectoire du réchauffement climatique conduit à une augmentation moyenne mondiale de 3,1 degrés. Pour la France, elle sera de 4 degrés. Après plusieurs mois d’attente, le 25 octobre, la troisième édition du plan d’adaptation au changement climatique a été présentée par le Premier ministre. Parmi les cinquante et une mesures retenues, aucune n’est prévue pour obliger les grandes entreprises gérant des infrastructures d’énergie à se doter d’un plan d’adaptation dès 2026.

On apprend par ailleurs que deux nouveaux réacteurs nucléaires doivent prendre place dans une zone inondable et vulnérable aux dérèglements climatiques – en l’occurrence, sur le site de Gravelines, où la centrale existante est construite sur un polder et donc déjà sous le niveau de la mer aux plus hautes marées. Est-ce bien raisonnable ? Un risque majeur de submersion existe. A-t-il été pris en compte dans les coûts et les prix évoqués ?

M. Vincent Rolland (DR). Une bonne partie du travail du rapporteur est un plaidoyer antinucléaire. Il est vrai que la filière rencontre certaines difficultés, qui tiennent notamment à la décision prise sous les présidences de François Hollande et d’Emmanuel Macron de stopper le développement du nucléaire, mesure que le président Hollande avait prise pour s’assurer le soutien des écologistes à l’Assemblée nationale.

Les hyper électro-intensifs ont visiblement quelques difficultés car, avec la fin programmée de l’Arenh, ils ont besoin à la fois d’un prix du mégawatt bas et de visibilité. Dans ma circonscription, des entreprises comme Niche Fused Alumina ou Métaux Spéciaux sont en attente de ces tarifs préférentiels, sans lesquels leur production risque peu à peu d’être délocalisée.

M. Alexandre Loubet (RN). Quelle est votre position sur la conversion des centrales à charbon françaises en lieux de production d’énergies moins émettrices de CO2 – je pense notamment au biogaz ou à la biomasse ? Cette démarche serait favorable à la décarbonation de notre mix électrique et à la sécurisation de nos approvisionnements électriques, étant donné que la France importe depuis l’Allemagne de l’électricité produite à base de charbon lignite, particulièrement émetteur de CO2. Ce serait aussi une bonne nouvelle pour les emplois qui font fonctionner ces centrales à charbon. Dans ma circonscription, les salariés qui ont redémarré la centrale de Saint-Avold pour sauver le système électrique français n’ont aucune visibilité sur leur avenir. Sans décision rapide du Gouvernement, ils seront tous au chômage en avril 2025. Si vous aussi croisez madame Pannier-Runacher, posez-lui donc la question : voilà deux ans que je la lui pose et qu’elle ne me répond pas.

M. Philippe Bolo (Dem). Une question très technique : l’actuelle TICFE intègre la TCCFE, reversée aux syndicats d’énergie. L’augmentation décidée de la TICFE emporte-t-elle une augmentation mécanique de la TCCFE ou celle-ci a-t-elle été « cristallisée » au montant initial qui était le sien lorsqu’elle a été intégrée ?

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Monsieur Amblard, vous critiquez la mise sous perfusion des énergies renouvelables, mais le nucléaire existant a lui-même profité d’argent public. En toute logique, vous devriez être défavorable à tous les dispositifs qui feront supporter au contribuable des investissements dans le nouveau nucléaire !

Il est vrai, monsieur Pilato, que la construction à Gravelines, sous le niveau de la mer, de deux des six EPR projetés soulève un problème. Pour la paléoclimatologue Valérie Masson‑Delmotte, « la réponse à la montée du niveau de la mer demande une planification à très long terme. Les deux seules choses qui empêchent les risques, c’est de ne pas construire dans les zones qui seront soumises aux risques littoraux et le repli planifié. » J’aimerais justement que l’on planifie et que l’on ne jette pas des milliards d’euros à la mer : avant la fin du siècle, la centrale aura les pieds dans l’eau et les réacteurs devront être mis à l’arrêt.

Je partage vos craintes, monsieur Rolland, au sujet des consommateurs électro‑intensifs. Les représentants de l’Union des industries utilisatrices d’énergie (Uniden) que nous avons auditionnés auraient préféré un contrat pour différence, considérant qu’ils n’ont à financer ni la prolongation du parc existant ni les investissements dans le nouveau nucléaire. Ils estiment que la proposition qui leur a été faite par EDF dans le cadre des contrats d’allocation de production nucléaire est trop élevée de 15 euros et ils risquent donc de se tourner vers un fournisseur plus compétitif.

Je suis heureux de vous trouver à nos côtés, monsieur Loubet, pour soutenir la conversion des centrales à charbon en centrales à biomasse. Dans le cadre d’un mix 100 % renouvelable, nous aurons besoin de la flexibilité qu’apportent ces dernières.

Il me semble enfin, monsieur Bolo, que la TCCFE est comprise dans le barème de base de 25 euros.

 

Présidence de M. Charles Fournier, vice-président de la commission

 

Article 42 et état B : Crédits du budget général

 

Amendement II-CE224 de Mme Clémence Guetté

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). Nous proposons la création d’un fonds en faveur de la souveraineté de notre pays. Il permettrait à l’État de maîtriser sa transition énergétique grâce à une entrée au capital de TotalEnergies et de General Electric, géant étasunien de l’énergie, et à une augmentation de sa participation au capital d’Engie.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Ces opérations, pour lesquelles vous proposez de créer un nouveau programme doté de 3 Md€, doivent permettre à l’État de préserver ses intérêts souverains mais aussi d’engager une véritable planification du développement des énergies renouvelables. J’y suis favorable, en comptant sur la levée du gage.

M. Vincent Rolland (DR). Que représenteraient 3 Md€ dans le capital de ces entreprises ? Je ne suis pas certain qu’ils permettent à l’État d’avoir une quelconque influence sur leur politique, ni même un siège dans leurs conseils d’administration respectifs.

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). Ces 3 Md€ seraient une première étape, le fonds étant destiné à être abondé par la suite : le but est que l’État ait une influence réelle sur les décisions prises par ces géants de l’énergie.

M. Vincent Rolland (DR). À ce rythme, il faudra sans doute plusieurs dizaines d’années pour que l’État ait une influence quelconque dans ces entreprises. La capitalisation boursière de TotalEnergies, par exemple, doit se compter en dizaines ou centaines de milliards d’euros de plus !

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE223 de Mme Claire Lejeune

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). Dans son rapport « Futurs énergétiques 2050 », RTE France estime qu’un mix reposant à 100 % sur des énergies renouvelables est possible – c’est son scénario M0. Pour l’atteindre, nous proposons avec cet amendement d’appel de renforcer le soutien à ces énergies.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Avis favorable. Je comprends l’appel à soutenir le développement des énergies renouvelables, quand bien même existent déjà les CSPE.

M. Maxime Amblard (RN). Que ce scénario soit considéré comme possible par RTE ne signifie pas qu’il est souhaitable : son scénario le moins onéreux est celui dans lequel la part du nucléaire est la plus importante – sans excéder 50 % toutefois, pour des raisons plus politiques que techniques. Et je suis certain que le scénario Terrawater des Voix du nucléaire l’est encore moins.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Les scénarios de RTE ont été publiés en 2021. Quant au scénario de l’Ademe basé sur 100 % d’énergies renouvelables, il était un peu plus coûteux, lors de sa publication en 2022, qu’un scénario incluant la construction de dix nouveaux réacteurs ; il l’est un peu moins dans sa version révisée de 2023.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE258 de M. Maxime Amblard

M. Maxime Amblard (RN). Nous proposons de supprimer les subventions allouées à l’énergie solaire photovoltaïque : si les énergies renouvelables intermittentes sont mûres, elles n’ont pas besoin d’être subventionnées. Laissons-les voler de leurs propres ailes et voyons quelle énergie sera la meilleure à l’issue de la compétition.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Cet amendement révèle bien votre obsession. Vous qualifiez les énergies renouvelables d’ « intermittentes », alors qu’elles sont en réalité variables : on sait en effet prédire l’évolution de leur potentiel de production dans la journée. C’est à la flexibilité de la demande qu’il faut réfléchir – je sais que RTE y travaille.

M. Vincent Rolland (DR). Il serait intéressant de dresser le bilan carbone des outils de production énergétique tels que les panneaux solaires ou les éoliennes, comme on le fait pour les véhicules électriques. Dans la très grande majorité des cas, les panneaux solaires que l’on subventionne sont importés de Chine, ce qui me dérange.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Les Voix du nucléaire est un lobby, et non un organisme scientifique, alors que RTE est une entreprise française remplissant une mission de service public.

Quant aux outils de production des énergies renouvelables, nous allons en avoir besoin pour accroître notre production d’électricité décarbonée dans les dix ans à venir. Il y a donc là un enjeu de souveraineté industrielle. L’une des deux dernières entreprises françaises fabricant des panneaux photovoltaïques vient de mettre la clé sous la porte : si nous ne voulons pas être dépendants de la Chine, nous devons lancer une stratégie de réindustrialisation dans ce domaine. C’est au Gouvernement désormais d’y allouer les crédits nécessaires.

M. Alexandre Loubet (RN). Notre groupe est fier de défendre le nucléaire : c’est une filière nationale pilotable et décarbonée, permettant de produire de l’électricité à bas coût et en quantité suffisante. Le Nouveau Front populaire, lui, défend des produits importés de l’autre bout du monde qui ne produisent pas en permanence : les éoliennes ne produisent que 25 % du temps ; quant aux panneaux photovoltaïques, ils n’ont fonctionné qu’à 40 % seulement de leur puissance installée durant l’été 2022, alors que l’on connaissait un record d’ensoleillement ! Pour disposer d’un système de production électrique viable et assurant notre souveraineté, il faut développer le nucléaire, protéger les barrages hydroélectriques – il est regrettable, à cet égard, que vous n’ayez pas voté la proposition de loi de notre groupe – et convertir les centrales à charbon.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Je m’inquiète de la fracture entre ceux qui défendent les énergies renouvelables et ceux qui défendent le nucléaire : les deux seront nécessaires pour sortir des énergies fossiles, raison pour laquelle notre groupe est favorable aux deux. Peut-être voudra-t-on sortir un jour du nucléaire, mais il nous est aujourd’hui indispensable.

J’ajoute que deux projets d’implantation de gigafactory de production de panneaux photovoltaïques sont en cours de développement dans notre pays, ce qui est une bonne nouvelle. Les énergies renouvelables emploieront, à terme, cinq cent mille personnes, et le nucléaire, cent mille. N’opposons pas les unes à l’autre : le seul combat qui vaille, c’est l’accélération de la sortie progressive des énergies fossiles.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Notre groupe votera contre ces amendements, considérant que ce n’est pas le moment de réduire nos efforts en faveur du développement des énergies renouvelables. Quant à la proposition de loi du Rassemblement national relative aux installations hydroélectriques, elle était tellement peu aboutie que son adoption n’aurait pas été d’une grande utilité. Nous aurons plus de chances d’avancer avec la proposition de loi issue de la mission transpartisane dont je suis l’une des rapporteurs.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE260 de M. Maxime Amblard

M. Maxime Amblard (RN). Dans le même esprit que l’amendement précédent, nous proposons de ne plus subventionner le biométhane comme source d’énergie.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Je partage votre avis, monsieur Fugit, ce sont bien les énergies fossiles qu’il faut combattre. C’est la raison pour laquelle nous aurons besoin d’une montée en puissance des énergies renouvelables dans les dix ans à venir.

J’indique à nos collègues du RN que le nucléaire n’est pas pilotable lorsqu’un problème de corrosion sous contrainte met la moitié des centrales à l’arrêt, comme ce fut le cas en 2022 ! Quant au coût de cette énergie, c’est une question qui commence à se poser et il est important que le Parlement s’en saisisse. Enfin, quelques règles de géophysique : les énergies renouvelables – le vent, le soleil, la chaleur – ne sont pas importées, ce sont les moyens de captage qui le sont.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE256 de M. Maxime Amblard

M. Maxime Amblard (RN). Cet amendement, qui obéit à la même logique que les précédents, vise l’éolien terrestre.

Pour chaque mégawattheure produit, le nucléaire utilise 22 grammes de matière quand l’énergie éolienne en consomme près de 230 grammes, essentiellement issus de métaux importés ; la soutenabilité de cette source d’électricité s’en trouve remise en cause. En outre, les panneaux photovoltaïques et les éoliennes ne poussent pas dans les arbres : il faut les produire en quantités d’autant plus grandes que les énergies renouvelables sont diffuses, contrairement au nucléaire – c’est de la physique.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Ni le béton des centrales, ni l’uranium, ne poussent non plus dans les arbres ! Je le répète, à l’horizon 2050, aucun scénario ne fait l’impasse sur le déploiement des énergies renouvelables. Je comprends que vous ayez des atomes crochus avec l’énergie nucléaire, mais celle-ci ne sera pas suffisante : les centrales ont déjà quasiment toutes atteint leur durée de vie initiale et atteindront l’âge de soixante ans au cours de la décennie 2040 – ce qu’aucune centrale n’avait fait jusqu’à maintenant dans le monde. Votre obsession nucléaire nous conduit vers le black-out ! Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CE302 de M. Antoine Golliot et II-CE257 de M. Maxime Amblard (discussion commune)

M. Antoine Golliot (RN). L’amendement d’appel II-CE302 vise à supprimer au sein du programme 174 les crédits destinés aux études relatives à l’éolien en mer, ce qui permettra de réaliser une économie de 125 M€.

En 2022, le Président de la République avait fixé le cap de cinquante parcs éoliens le long du littoral français d’ici à 2050, soit une puissance de 40 gigawatts. Dans le présent projet de loi de finances, l’objectif est passé à 45 gigawatts. Chaque parc éolien occupe une superficie de 50 à 80 mètres carrés : autant de surface en moins pour les pêcheurs, qui ont interdiction d’y pêcher alors qu’ils exploitaient ces zones depuis des générations. Présenté comme une solution énergétique d’avenir, l’éolien en mer sacrifie en réalité l’avenir de ces pêcheurs. La pêche est un secteur clé de notre économie locale, qui contribue à la vitalité de nos côtes, où elle emploie de nombreuses personnes – 690 emplois directs dans les Hauts-de-France et de 5 600 emplois indirects dans le territoire de Boulogne-sur-Mer. L’amendement a pour objet de protéger notre patrimoine maritime et de défendre notre filière « Pêche ».

M. Maxime Amblard (RN). Le parc éolien de Saint-Brieuc produira de l’électricité à un coût moyen de 180 euros par mégawattheure. C’est bien plus que les 120 à 150 euros de l’EPR ! De surcroît, les coûts de raccordement ne sont pas inclus et devront être pris en charge par RTE et Enedis, à hauteur de 100 Md€ chacun d’ici à 2040.

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). Je conteste les chiffres que vous avancez et apprécierais que vous citiez vos sources. Je me réfère, quant à moi, au dernier scénario de l’Ademe, celui qu’elle a mis à jour en 2023. Une éolienne offshore coûte peut-être plus cher à la construction, mais s’avère moins onéreuse à l’usage. J’ajoute qu’avec 45 gigawatts de puissance installée, les parcs éoliens permettraient de produire l’équivalent de la production d’une trentaine d’EPR – tout en pouvant sortir de terre beaucoup plus rapidement ! Avec un facteur de charge de 55 %, l’éolien offshore n’a rien à envier non plus au parc nucléaire lorsqu’il est victime de corrosion sous contrainte.

Enfin, en tant que fervent défenseur de la pêche artisanale, je voudrais souligner que l’installation de parcs éoliens offshore posés dans des pays d’Europe du nord a permis d’observer deux effets : l’effet « récif », qui voit de nouvelles espèces coloniser les pieds des pylônes, et l’effet « réserve », c’est-à-dire la possibilité ainsi offerte à la ressource halieutique de se régénérer – ce qui est bénéfique pour la pêche artisanale. Avis défavorable.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Ces amendements remettraient en cause une filière essentielle à l’atteinte de nos objectifs de décarbonation. Depuis que son exploitation a été reprise par General Electric au détriment d’Alstom, le premier parc éolien en mer français, celui de Saint-Nazaire, voit ses emplois menacés. Les ingénieurs y ont pourtant développé un véritable savoir-faire français, œuvrant pour notre souveraineté énergétique. Je confirme par ailleurs l’existence d’un effet « récif » déjà constaté sur les éoliennes au large de Saint-Nazaire. Je m’inquiète de l’absence de vision du Rassemblement national sur ces sujets fondamentaux.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CE291 de M. Patrice Martin

M. Patrice Martin (RN). Nous proposons d’ajuster les crédits dédiés aux filières énergétiques renouvelables, dans un contexte où la maîtrise des finances publiques et la gestion responsable des ressources de l’État deviennent essentielles. L’ambition en matière de transition énergétique demeure intacte, et cette mesure transitoire ne constitue en aucun cas un recul des engagements structurels de l’État. L’objectif est de maintenir le soutien aux énergies renouvelables dans des conditions budgétaires soutenables. En somme, il s’agit de conjuguer responsabilité budgétaire et ambition environnementale en veillant à ce que l’argent public soit investi de façon judicieuse.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Je note que votre argument principal porte sur les efforts de rationalisation de la dépense publique et l’optimisation des crédits, avec lequel on ne peut qu’être d’accord. Mais votre amendement fait écho à l’attitude de votre groupe en séance la semaine dernière, lors de l’examen du projet de loi de finances. Vous êtes en voie de macronisation ! Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE299 de M. Nicolas Meizonnet

M. Nicolas Meizonnet (RN). Cet amendement, dont je suis certain qu’il fera consensus, vise à soutenir le développement de l’hydrogène. On peut se réjouir du choix pertinent qu’a fait la France en faveur de cette énergie à fort potentiel qui peut accompagner les énergies renouvelables, les transports, mais aussi servir de moyen de stockage. Le budget alloué à son développement est cependant stable dans le projet de loi de finances, alors qu’une approche plus ambitieuse serait nécessaire pour éviter un décrochage de notre pays face à l’Allemagne, au Japon ou aux États-Unis.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Pour la première fois, vous proposez d’augmenter les moyens alloués à une énergie renouvelable. Il se trouve que l’enveloppe allouée à l’hydrogène est déjà conséquente, avec 692 M€ d’autorisations d’engagement en 2025 – pour à peine 25 M€ de crédits de paiement. Cette inclination se marie bien avec votre tropisme pour le nucléaire. L’hydrogène permet de décarboner certains usages industriels pour lesquels il n’existe pas d’autre solution, mais, pour ma part, je ne crois pas qu’il soit l’avenir des mobilités. Avis défavorable.

M. Alexandre Loubet (RN). Je suis surpris que vous vous opposiez au développement de grande envergure de l’hydrogène. Nous avons la chance de disposer, dans ma circonscription de Moselle, du plus grand gisement d’hydrogène blanc au monde. Nous pourrions en extraire des ressources utiles tout en veillant à ce qu’elles soient renouvelables. Il est vrai qu’un budget conséquent est alloué à l’hydrogène vert, mais il n’est pas dépensé : les projets européens dans ce domaine ne sont pas soutenus par l’État. Plus qu’un projet concret, l’hydrogène est devenu un objet de communication et je regrette l’absence de soutien du Gouvernement.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Je suis surpris d’entendre cela, alors qu’un plan « Hydrogène » a été lancé en 2018, doté de 100 M€, et que d’autres actions ont suivi dans le cadre du plan de relance. Des centaines de millions d’euros ont été investis dans l’usine Symbio ou encore dans l’entreprise Lhyfe. Je vous invite à vous renseigner : l’hydrogène fonctionne, et il est faux d’affirmer que cette énergie serait uniquement liée au nucléaire. L’électrolyse de l’eau nécessite des électrons, peu importe d’où ils viennent. Je regrette d’entendre à ce sujet des informations erronées. L’hydrogène peut être intéressant pour stocker les flux d’électrons produits par les énergies renouvelables, mais aussi par l’énergie nucléaire.

Le présent amendement est cependant sans intérêt, les investissements étant suffisants. Notre groupe votera contre. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une révision de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène, qui devrait être publiée d’ici quelques semaines.

M. Charles Fournier, président. Notre commission devra revenir sur ce sujet, qui mérite des éclairages précis.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE295 de M. Nicolas Meizonnet

M. Nicolas Meizonnet (RN). Depuis vingt ans, la Commission européenne nous empêche de réaliser tout investissement d’envergure dans les ouvrages hydroélectriques. Nous avons présenté une proposition de loi visant à régler ce contentieux pour sortir du blocage et pouvoir augmenter de 20 % la capacité de production de nos barrages – EDF Hydro exprime la même demande que nous. Vous vous êtes opposés au texte en commission ; je vous invite à réviser votre position lors de son examen en séance publique. Quoi qu’il en soit, le parc hydroélectrique vieillissant et la vétusté de certains ouvrages commandent d’allouer des moyens à la sécurité des barrages.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. L’amendement visait surtout à évoquer votre proposition de loi… Je n’ai pas entendu dire que la sécurité des barrages était mise à mal au point de justifier une enveloppe de dix millions d’euros. Je conviens néanmoins avec vous qu’il est urgent de trouver une solution sur les concessions. Avis défavorable.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Je suis surprise par l’argument de la vétusté des ouvrages. Venant d’une circonscription où se trouvent plusieurs barrages anciens, je vous assure que leur maintenance et leur sécurité sont suivies de près par les exploitants, qui ont l’obligation de les rendre en bon état de fonctionnement au terme de la concession. Qui plus est, ce n’est pas l’État, mais les exploitants eux-mêmes qui financent le développement du potentiel des barrages et l’augmentation de leur puissance. À quoi serviraient ces dotations ?

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CE217 de M. Maxime Laisney et II-CE218 de Mme Claire Lejeune (discussion commune)

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). L’amendement II-CE217 vise à augmenter les fonds consacrés à la rénovation thermique afin de revenir sur les coupes budgétaires et de financer le « reste à charge zéro » pour les ménages les plus modestes qui souhaiteraient réaliser une rénovation thermique globale. Dans son rapport de 2024, le Haut Conseil pour le climat indique que ce reste à charge est un des freins majeurs à la massification de la rénovation thermique. Malgré une prise en charge allant jusqu’à 90 % pour certains déciles, il reste parfois quelques milliers d’euros à la charge des ménages modestes ; pour ceux qui n’ont aucune épargne, ce coût est prohibitif. La précarité énergétique augmente ; la massification de la rénovation thermique devrait être une priorité, sachant, en plus, que ce secteur représente un gisement d’emplois.

L’amendement de repli II-CE218 tend uniquement à revenir sur les coupes budgétaires. En audition, les acteurs du secteur ont pointé la dynamique que connaît le dépôt de dossiers MaPrimeRénov’, dont le nombre a augmenté en octobre 2024 de 50 % par rapport à l’année précédente. Le budget présenté ne permet de financer qu’une base stable de 85 000 rénovations par an, ce qui est peu satisfaisant au regard des objectifs climatiques.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Les deux amendements ont été parfaitement défendus. Avis favorable, avec une préférence pour le mieux-disant.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Je tiens à souligner combien ces amendements sont modérés. En 2023, nous avions adopté à l’unanimité – moins le Rassemblement national…, mais on ne se refait pas – un rapport d’information sur la rénovation énergétique des bâtiments qui soulignait la nécessité d’une progression constante du financement des gestes de rénovation. Les reculs progressifs font craindre le pire : non seulement ils augmentent la précarité énergétique, mais ils mettent en péril la construction d’une filière performante de la rénovation globale. Il faudrait également mentionner l’enjeu de la production française de pompes à chaleur.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Nous voterons l’amendement le plus ambitieux. Alors que les besoins en matière de rénovation des logements sont importants, les collectivités territoriales, qui sont très engagées, et le BTP pâtissent de la diminution du fonds Vert.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Si, par bonheur, l’amendement était adopté, nous espérons la levée du gage en séance publique.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements II-CE307 et II-CE308 de M. Laurent Lhardit (discussion commune)

M. Laurent Lhardit (SOC). L’amendement II-CE307 vise à revenir sur la dramatique réduction du fonds Vert, qui passe de 2,5 Md€ en 2024 à 1 Md€ en 2025. Encore une mesure qui vise à mettre les collectivités territoriales au pain sec et à l’eau ! Le fonds Vert a le mérite de cibler simultanément la transition énergétique, que nous entreprenons dans l’espoir d’inverser la courbe du réchauffement, et l’adaptation au changement climatique, comme nous le faisons à Marseille avec la rénovation thermique des écoles et pour laquelle les besoins sont exponentiels. Une telle baisse, couplée aux autres diminutions de crédits du projet de loi de finances, aurait un effet désastreux sur l’investissement local et sur un écosystème créateur de nombreux emplois. En tant qu’élu de Marseille, je vous assure que ce serait une catastrophe.

L’amendement de repli II-CE308 propose une augmentation de 500 M€, contre 1,5 Md€ pour l’amendement précédent.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Je partage l’ambition s’agissant du fonds Vert, qui a permis d’aider six mille communes et d’accompagner 3 354 projets d’acteurs locaux, dont plus du tiers concernait la rénovation de bâtiments scolaires. Ce fonds a un effet de levier important puisque, pour 2 Md€ investis par l’État, 8 Md€ sont investis par les collectivités territoriales. Avis très favorable, surtout au II-CE307.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Revenir à 2,5 Md€ serait délicat compte tenu des contraintes budgétaires, mais nous voterons pour l’amendement II-CE308 qui rehausse l’ambition de manière plus raisonnable. Il s’agit d’envoyer au Gouvernement un message demandant de rétablir une partie des crédits. Les collectivités territoriales ont besoin de ce fonds qui leur a permis de réaliser de nombreux travaux ; je regrette que sa création n’ait pas été soutenue par tout le monde à l’époque.

La commission rejette l’amendement II-CE307.

Elle adopte l’amendement II-CE308.

 

Amendements II-CE222 et II-CE301 de M. Emmanuel Fernandes (discussion commune)

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). Les deux amendements concernent Stocamine, un ancien site minier reconverti en site d’enfouissement des déchets dangereux à la fin des années quatre-vingt-dix. L’arrêté initial interdisait le stockage de déchets inflammables, mais, en 2002, un incendie s’est produit ; depuis, aucun déchet supplémentaire n’a été stocké, mais personne ne sait quoi faire de ces déchets dangereux. Les amendements visent à créer un fonds pour financer le déstockage complet du site en huit ans, en donnant la priorité au déstockage des déchets toxiques.

Mme Sandra Regol (EcoS). Stocamine, ce sont 42 000 tonnes de déchets hautement toxiques camouflés sous la plus grande nappe phréatique d’Europe, qui sera un jour contaminée définitivement – la seule question est désormais : « Quand ? » Cet amendement de repli vise à provisionner une somme minimale pour que l’État agisse quand le jugement du tribunal l’obligera à déstocker ces déchets et avant que huit millions de personnes ne puissent plus avoir accès à l’eau potable. Le Premier ministre, alerté de la situation, nous a renvoyés vers le directeur général de la prévention des risques, qui nous communiquera sa réaction éclairée ; d’ici là, notre devoir de législateur est d’anticiper.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. J’émets un avis favorable en priorité à l’amendement II-CE222, qui est mieux-disant, et je salue le travail transpartisan effectué sur l’amendement II-CE301, auquel je suis également favorable.

M. Hubert Ott (Dem). Je connais le dossier depuis 1997. J’ai fait partie de ceux qui, dans le cadre de leur mission associative, avaient clairement formulé leur opposition à ce type de confinement. Cinq ans plus tard, un incendie se produisait à 600 mètres de profondeur. Toutes les études réalisées depuis ont abouti à la même conclusion : sous l’effet du fluage, qui crée un effet « bouchon de champagne », les eaux de surface qui ruissellent à travers ces couches salines rempliront les galeries, lesquelles finiront inéluctablement par s’écraser, poussant vers le haut les eaux polluées par des substances toxiques dont on ne connaît pas la nature. À ce dernier stade, nous serons dans l’incapacité de confiner les déchets et la pollution ne sera plus contrôlable. Il faut penser à l’avenir.

La commission adopte l’amendement II-CE222.

En conséquence, l’amendement II-CE301 tombe.

 

Amendements II-CE283 de Mme Julie Laernoes, II-CE306 et II-CE305 de Mme Marie-Noëlle Battistel, II-CE284 de Mme Julie Laernoes et II-CE219 de M. Maxime Laisney (discussion commune)

Mme Julie Laernoes (EcoS). Protéger les Français de la précarité énergétique, c’est préférablement leur permettre d’isoler leur logement. Toutefois, dans l’immédiat, il est nécessaire de revaloriser le chèque énergie pour couvrir l’augmentation du prix de l’énergie que subissent des millions de ménages. Le budget du chèque énergie ne baisse certes pas, mais il ne prend pas en compte l’inflation : il n’a été revalorisé que ponctuellement depuis 2019, alors que la facture des ménages au tarif réglementé de vente a augmenté de 65 % depuis 2018. L’amendement II-CE283 tend à tripler le montant qui lui est alloué. Si vous trouvez que c’est beaucoup, je rappelle que le bouclier tarifaire se montait à 44 Md€.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Les dépenses énergétiques ont explosé depuis 2021 sous l’effet cumulé du déséquilibre des marchés mondiaux induit par la reprise de l’activité post-covid puis de la guerre en Ukraine. Malgré les mécanismes amortisseurs mis en place par l’État, la facture moyenne d’un ménage facturé au tarif réglementé est passée de 1 552 euros à 2 548 euros en 2024, soit une augmentation de 45 %. L’amendement II-CE306 a pour objet d’augmenter de 45 % les crédits du chèque énergie, de sorte à effectuer un rattrapage.

L’amendement de repli II-CE305 vise une majoration de 25 %.

Mme Julie Laernoes (EcoS). L’amendement II-CE284 vise à élargir l’assiette des bénéficiaires du chèque énergie. Celui-ci est conditionné à un plafond de ressources de 11 000 euros annuels, ce qui en prive de fait des foyers vivant sous le seuil pauvreté, fixé, lui, à 1 216 euros mensuels pour une personne seule.

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). L’amendement II-CE219 vise à relever les crédits de paiement du chèque énergie au niveau de 2024 pour garantir que les fonds seront bien provisionnés. Nous voulons nous assurer que la réforme annoncée par le Gouvernement n’est pas un prétexte pour faire des économies sur le dos des plus précaires. Les crédits de paiement pour 2025 sont nettement inférieurs aux autorisations d’engagement de 2024 ; cela laisse penser que le Gouvernement mise sur le non-recours.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Les amendements correspondent à la demande exprimée par le Réseau action climat et le réseau Cler, qui ont signalé en audition l’alarmante hausse de la précarité énergétique. Je terminerai à ma façon la phrase de madame Laernoes : « Si vous trouvez que c’est trop cher, allez vivre dans une passoire thermique jusqu’en février ! »

Avis favorable à tous les amendements, avec une préférence pour ceux qui proposent de tripler le montant du chèque énergie. Mon amendement est le moins-disant, car nous considérons que le chèque énergie a subventionné les superprofits des énergéticiens. Il convient néanmoins de le revaloriser en attendant un meilleur système, que nous proposerons le 28 novembre dans le cadre de notre niche parlementaire. L’amendement II-CE284 présente également l’intérêt de viser à changer les critères d’attribution du chèque énergie pour un coût raisonnable de 200 M€.

M. Alexandre Loubet (RN). Il est plus facile de faire la poche aux Français que de défendre nos intérêts auprès de la Commission européenne ! En deux ans, les factures d’électricité ont explosé de 44 % et nous avons dilapidé près de 50 Md€ d’argent public avec le chèque énergie et le bouclier tarifaire pour limiter l’explosion des prix. La solution n’est pas là, elle est dans le rapport de force avec la Commission européenne. Le problème, ce sont les règles absurdes du marché de l’énergie : le prix français de l’électricité est indexé sur le prix européen du gaz, alors que notre électricité est l’une des moins chères à produire d’Europe. En octobre dernier, j’avais défendu au nom du RN une proposition de loi visant à rétablir un prix français de l’électricité pour faire baisser les factures. Si le texte avait été adopté, nous aurions payé l’énergie au coût de production et nous n’aurions pas besoin de dilapider ainsi les impôts des Français.

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). Monsieur Bardella et son groupe étant absents du Parlement européen pendant la discussion et le vote de la réforme du marché européen de l’énergie, nos collègues du Rassemblement national sont mal placés pour se positionner sur la question.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Les bénéficiaires du chèque énergie vous remercieront de dire qu’on dilapide l’argent de l’État pour eux !

M. Alexandre Loubet (RN). Double mensonge ! Premièrement, le marché européen de l’énergie permet aux groupes électro-intensifs de payer l’électricité au coût de production ; au nom de quoi les ménages et les PME français ne pourraient-ils pas, eux aussi, bénéficier d’un prix attractif ? Ce serait un juste retour de notre investissement dans le parc nucléaire. Deuxièmement, je n’ai jamais dit que le chèque énergie dilapidait l’impôt des Français, mais que nous aurions pu nous en passer si nous avions eu le courage de fixer un prix français de l’électricité – courage que vous n’avez pas eu au moment de voter ma proposition de loi.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Ma collègue Lejeune n’a pas défendu le principe du marché européen de l’énergie, bien au contraire ; nos députés européens étaient même présents pour le combattre. La question qui se pose maintenant est de savoir si les Français vont avoir froid parce que le RN refuse de voter l’augmentation des crédits du chèque énergie.

La commission rejette l’amendement II-CE283.

Elle adopte l’amendement II-CE306.

En conséquence, les amendements II-CE305, II-CE284 et II-CE219 tombent.

 

Amendements II-CE208 de M. Lionel Tivoli, II-CE221 de Mme Claire Lejeune et IICE220 de M. Maxime Laisney (discussion commune)

M. Lionel Tivoli (RN). Les aides à l’acquisition d’un véhicule électrique – « voiture verte », « zéro carbone », « énergie propre », les formules ne manquent pas – représentent une dépense considérable. Je propose la suppression de ces aides compte tenu de l’état des finances publiques, mais également pour des raisons de souveraineté et d’écologie. Ces véhicules sont souvent fabriqués en Chine ; ils détruisent l’industrie automobile française et risquent d’anéantir à terme des dizaines de milliers d’emplois en France. En outre, leur bilan carbone, de la construction jusqu’au recyclage, est nettement supérieur à celui des véhicules thermiques ; ils n’ont donc d’écologique que le nom.

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). L’amendement II-CE221 propose, au contraire, d’augmenter l’enveloppe consacrée à l’électrification des véhicules à 2 Md€. Cette dotation ne suffit pas à permettre aux ménages les plus modestes d’acheter un véhicule électrique, en raison d’un reste à charge compris entre 10 000 et 40 000 euros. Il faut massifier le leasing social, qui a dû être interrompu début 2024, victime de son succès. En tout état de cause, la voiture électrique a un bilan écologique plus vertueux que la voiture thermique dans laquelle le RN voudrait nous enfermer.

L’amendement de repli II-CE220 vise à annuler les 870 M€ de coupes budgétaires, et même plus de 1 Md€ si on prend en compte l’excédent de crédits de l’année précédente.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Rapport après rapport, le GIEC le dit : la situation s’aggrave. Il faut sortir des énergies fossiles pour tous les usages. Cela implique de développer les transports en commun et les mobilités douces comme la marche ou le vélo ; pour le reste, il faut diminuer la taille du parc automobile en privilégiant des véhicules moins lourds, à faible empreinte carbone, jusqu’à parvenir à un parc 100 % électrique. Il faut aussi aider les ménages modestes à passer à la voiture électrique. Les véhicules d’occasion étant encore trop chers, je défends les mesures de soutien à l’acquisition de véhicules électriques neufs. Sans cela, les constructeurs français et étrangers continueront de fabriquer de grosses voitures qui coûtent cher et que personne ne peut acheter. Un critère a été ajouté récemment pour l’octroi de ces aides : l’ « écoscore » ou score environnemental, qui écarte les voitures extra-européennes. Nous ne serons pas inondés de voitures chinoises.

Avis défavorable à l’amendement II-CE208 et favorable aux deux autres amendements, avec une préférence pour le II-CE221.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Ce que dit le RN sur les voitures électriques est si caricatural que les bras m’en tombent.

Rapporteur de la LOM en 2019, j’y ai fait inscrire par amendement la sortie progressive des véhicules à énergie fossile d’ici à 2040 pour limiter les émissions de CO2, mais aussi celles d’oxydes d’azote et de particules fines en milieu urbain dense. Il est dramatique d’ignorer ainsi les enjeux de qualité de l’air et de santé respiratoire quand on prétend s’occuper des Français.

Le leasing social est une mesure que nous avons défendue lors de la campagne de 2022 du président Macron ; je suis ravi de voir que la France insoumise le soutient. Par ailleurs, si monsieur le rapporteur pour avis lit attentivement le rapport du GIEC, il verra que celui-ci recommande de s’appuyer sur le nucléaire en complément des énergies renouvelables.

Nous voterons contre l’amendement de monsieur Tivoli. À titre personnel, je voterai pour l’amendement du rapporteur pour avis.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CE342 de M. Maxime Laisney

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à augmenter les moyens du Centre interprofessionnel d’étude de la pollution atmosphérique (Citepa), un organisme de recherche scientifique et technique qui travaille sur les gaz à effet de serre et les polluants atmosphériques. Il aide également au pilotage des politiques publiques dans le domaine climatique et de la qualité de l’air. Le Citepa est actuellement doté de 1,9 M€ pour 2025. Nous souhaitons rehausser cette dotation de 500 000 euros.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). L’amendement a-t-il été construit avec le Citepa ? Ces crédits sont-ils justifiés par des projets nouveaux ?

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. L’amendement n’a pas été travaillé avec le Citepa, mais les rapports du GIEC sont de plus en plus sombres. Il faut donner à cet organisme les moyens nécessaires à l’accompagnement des politiques d’adaptation et d’atténuation.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CE286 de M. Nicolas Meizonnet et II-CE294 de M. Patrice Martin (discussion commune)

M. Nicolas Meizonnet (RN). Mon amendement vise à défendre les paysages français des zones rurales et du littoral, mais celui de mon collègue Martin est mieux rédigé.

M. Patrice Martin (RN). Les paysages français, véritables joyaux de notre patrimoine, font partie intégrante de l’identité de la nation et participent à son rayonnement international. Les littoraux, les campagnes et les sites emblématiques ne sont pas seulement des espaces naturels, ils sont le reflet d’une cohabitation harmonieuse entre l’activité humaine et la préservation de l’environnement, un équilibre que nous devons préserver. Ces paysages subissent une pression grandissante due au développement des infrastructures énergétiques intermittentes telles que les éoliennes.

Bien que l’objectif de la transition énergétique soit important, nous ne pouvons ignorer les conséquences esthétiques et écologiques de ces installations. Il est de notre responsabilité de garantir que la transition énergétique ne se fasse pas au détriment du patrimoine paysager, lequel constitue un lien précieux avec notre histoire et notre culture. Nous appelons donc à une gestion plus prudente des paysages en limitant les projets énergétiques invasifs afin que les générations futures puissent encore profiter de l’authenticité et de la beauté de nos territoires. C’est un acte de respect de notre héritage commun et un engagement envers l’environnement et la qualité de vie de nos concitoyens.

L’amendement II-CE286 est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-CE294.

L’amendement II-CE293 de M. Patrice Martin est retiré.

 

Amendement II-CE290 de M. Patrice Martin

M. Patrice Martin (RN). La pêche française se retrouve en difficulté croissante, en raison de la concurrence exacerbée de certains pays européens, mais aussi du poids d’une régulation souvent excessive et d’une pression administrative intense qui réduisent sa compétitivité. Face à des chalutiers étrangers souvent mieux équipés et moins contraints, les pêcheurs français ressentent une distorsion de concurrence profondément injuste. Contraints de jeter une part significative de leurs prises en mer, ils voient leur activité limitée par des règles rigides économiquement désavantageuses.

La baisse de 30 % des autorisations d’engagement et de 17 % des crédits de paiement du programme « Affaires maritimes, pêche et aquaculture », sans même parler de l’action « Pêche et aquaculture », envoie un signal de désengagement préoccupant de l’État. Dans ce contexte, l’éolien en mer ajoute une pression supplémentaire en accaparant les zones de pêche et en perturbant les écosystèmes marins. Ces infrastructures énergétiques intermittentes sont déployées sans étude d’impact exhaustive sur leur compatibilité avec les activités marines. L’amendement vise à réorienter les ressources pour répondre aux défis concrets de la filière en allégeant un financement qui pourrait bien compromettre la durabilité du secteur halieutique.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE303 de M. Antoine Golliot

M. Antoine Golliot (RN). Il est bien triste que vous n’ayez pas conscience des graves conséquences des projets d’éoliennes en mer. Il faut écouter les pêcheurs. Le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins (CRPMEM) des Hauts-de-France s’est déclaré contre l’éolien offshore. Selon lui, si tous ces projets de 45 gigawatts étaient réalisés, ce serait la fin de la pêche côtière artisanale française. Les Pays-Bas ont investi massivement dans l’éolien offshore et cela y a signé la disparition de la pêche artisanale ; leurs pêcheurs se sont reconvertis dans la pêche en haute mer, quand ils ne viennent pas pêcher à la senne dans nos eaux territoriales. C’est une menace terrible pour notre souveraineté alimentaire

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-CE297 de M. Nicolas Meizonnet

M. Nicolas Meizonnet (RN). L’amendement vise à augmenter le budget alloué à la formation dans le secteur de la pêche. La baisse de 30 M€ du budget de la pêche et de l’aquaculture est intolérable au vu des difficultés que traverse une filière qui fait vivre des milliers de professionnels, qui dynamise les territoires et constitue le pilier de notre souveraineté alimentaire. En trois décennies, la flotte française a perdu 53 % de ses navires ; au Grau du Roi, deuxième port de pêche de Méditerranée, le nombre de chalutiers est passé de 35 à 15. On ne peut pas accepter que la filière soit à ce point malmenée et doive faire face à un prix du gasoil trop élevé, à la diminution du nombre de jours en mer liée au plan West Med, et maintenant à la réduction des zones de pêche en raison du développement des éoliennes offshore. On est en train d’étrangler nos pêcheurs et de tuer une filière.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. L’amendement est en dehors du périmètre de cette discussion budgétaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE292 de M. Patrice Martin

M. Patrice Martin (RN). Cet amendement vise à réduire le budget destiné aux zones à faibles émissions (ZFE), dont l’implantation suscite de vives préoccupations quand bien même elles visent à améliorer la qualité de l’air. Compte tenu de la conjoncture économique, elles risquent d’aggraver les inégalités et de créer des zones à forte exclusion sociale. La majorité des citoyens français n’ont pas les moyens financiers de remplacer leur véhicule par un modèle hybride ou électrique, souvent hors de prix. Cette situation touche en premier lieu les classes populaires qui dépendent de leur voiture pour aller travailler. Loin de favoriser une transition écologique inclusive, les ZFE exercent une pression supplémentaire sur les ménages déjà fragiles, qui se serrent la ceinture. Il est donc peu réaliste d’imposer de telles zones sans accompagner les citoyens vers des solutions concrètes et accessibles.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. La qualité de l’air est un enjeu bien réel, tout comme l’avenir des générations futures. Il ne faut pas revenir sur l’idée des ZFE. En revanche, si vous étiez cohérents, vous voteriez en faveur d’une augmentation des crédits alloués au verdissement des véhicules, afin que tous puissent accéder à la ville. Avis défavorable.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). En janvier 2023, une proposition de loi du Rassemblement national rapportée par notre collègue Pierre Meurin visait déjà à supprimer les ZFE. Heureusement, nous avions réussi à la rejeter. En pensant à tous ces enfants qui souffrent de bronchiolites dans les milieux urbains denses, je me dis que c’est très grave de vouloir encore revenir sur ces zones à faibles émissions, que vous aviez osé appeler « zones à forte exclusion ». Ce que nous souhaitons exclure, ce sont les polluants des milieux urbains denses, à l’origine d’un grave problème de santé publique. Certes, il faut adapter les périmètres et les calendriers des ZFE mobilité, mais il existe des aides pour aller vers des véhicules moins polluants.

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). La pollution de l’air cause quarante mille morts par an en France. Et vous, vous êtes contre les ZFE, contre l’électrification du parc automobile et contre toutes les mesures permettant de décarboner notre économie. Votre position est purement démagogique. C’est une honte !

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE50 de M. Lionel Tivoli

M. Lionel Tivoli (RN). Afin de renforcer la résilience des territoires, il convient d’affecter aux collectivités les crédits nécessaires pour qu’elles ne soient plus touchées par des phénomènes climatiques dramatiques, comme ceux subis par les Alpes-Maritimes ces derniers temps.

L’amendement prévoit une hausse des budgets en faveur de la réparation des canalisations, aussi appelées « conduites fuyardes ». Dans les Alpes-Maritimes, elles représentent en moyenne un tiers de perte entre la demande et la consommation finale. Ce chiffre bondit jusqu’à 66 % dans certaines vallées enclavées. Par ailleurs, ce département est pionnier en matière de recyclage des eaux usées, ce qui permet d’économiser des dizaines de millions de mètres cubes d’eau par an. L’investissement de l’État dans ces deux systèmes serait particulièrement apprécié en période estivale.

Face aux inondations répétitives qui fragilisent l’économie, il est également indispensable d’assurer un meilleur modèle de prévention. Financer ces mesures en récupérant les crédits destinés à l’éolien offshore, qui est inefficace, tel est l’objet du présent amendement.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Si les conduites fuyardes sont un vrai problème, cela ne concerne pas cet avis budgétaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Écologie, développement et mobilités durables consacrés à l’énergie, modifiés.

 

 

Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

 

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-CE41 de M. Pierre Meurin.

 

Amendement II-CE204 de M. Maxime Amblard

M. Maxime Amblard (RN). Mon amendement fera l’unanimité ! La lutte contre le réchauffement climatique repose avant tout sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. S’agissant de la production d’électricité, cette réduction passe par une diminution de son intensité carbone. Dès lors, il convient de maximiser la part de la production d’électricité à faible intensité carbone. Le nucléaire français, avec quatre grammes d’équivalent CO₂ par kilowattheure, présente l’intensité carbone la plus faible au monde. Il est donc logique de tenir compte du rôle central de ce mode de production dans nos objectifs de décarbonation de la production électrique. C’est pourquoi je vous propose de porter à 98 % la part d’énergies bas-carbone dans la production d’électricité d’ici à 2030.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

 

Article 47 : Plafonds des autorisations d’emplois de l’État

 

Amendement II-CE278 de Mme Julie Laernoes

Mme Julie Laernoes (EcoS). Cet amendement, travaillé avec le syndicat des énergies renouvelables, vise à renforcer les moyens des ministères concernés par la transition énergétique et de leurs administrations déconcentrées. Tous ceux qui ont voté pour la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables savent qu’il faut augmenter le personnel pour l’appliquer pleinement. En effet, les retards pris dans l’annonce et l’exécution des nouveaux appels d’offres, notamment dans l’installation des parcs éoliens offshore, sont liés au manque d’effectifs. Pour atteindre nos objectifs européens de RED III, il est impératif de mettre les moyens.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Je soutiens d’autant plus cet amendement que 55 % des décrets d’application de la loi sur l’accélération du développement des énergies renouvelables n’ont pas été pris. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

 

Article 60 : Réforme du chèque énergie

 

Amendements de suppression II-CE225 de Mme Claire Lejeune, II-CE279 de Mme Julie Laernoes et II-CE309 de Mme Marie-Noëlle Battistel

Mme Julie Laernoes (EcoS). L’octroi du chèque énergie, qui se fondait sur la taxe d’habitation, était automatisé. Cela fait sept ans que l’on aurait pu inventer un autre mécanisme... La réforme prévoit que les bénéficiaires en fassent la demande par voie électronique, en précisant leur numéro de point de livraison électrique, le revenu fiscal de référence du foyer fiscal, dont l’un des déclarants est titulaire du contrat de fourniture d’électricité, et le justificatif de domicile. Beaucoup d’associations qui travaillent avec les bénéficiaires du chèque énergie y sont fermement opposées. D’autres solutions sont possibles. Cette réforme risque de favoriser le non-recours de potentiels bénéficiaires.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Nous sommes opposés à cette réforme, qui conduirait, à l’évidence, à l’explosion des non-recours, et donc de la précarité énergétique.

M. Maxime Laisney, rapporteur pour avis. Je partage l’avis de mes collègues sur l’article 60, qui n’est pas satisfaisant. La situation actuelle n’est, au demeurant, pas satisfaisante non plus, car, avec la disparition de la taxe d’habitation, l’automaticité de l’attribution du chèque énergie est déjà perdue.

Mon amendement II-CE343, qui sera examiné à l’issue de cette discussion, présente une alternative à la suppression de l’article 60, qui n’apporterait pas de solution. Il tend à repartir d’une première liste établie par l’administration fiscale, non plus à partir des données relatives à la taxe d’habitation, qui a disparu, mais à l’impôt sur le revenu. L’administration fiscale disposant d’informations concernant aussi bien les revenus que la composition du foyer, elle serait en mesure de croiser ces données pour identifier les foyers concernés et éviter une augmentation du taux de non-recours. Je ne sais pas dans quelle mesure ce dispositif serait suffisant, mais il appartiendra aux services ministériels de le vérifier, voire d’en proposer un meilleur.

Je propose donc de ne pas voter les amendements de suppression, au profit de mon amendement II-CE343.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Nous ne sommes pas opposés à l’argumentation du rapporteur pour avis mais, dans l’état actuel de nos débats et compte tenu de l’issue qui pourrait advenir, nous préférons sécuriser les choses en supprimant l’article 60.

La commission adopte les amendements.

Elle émet ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 60.

En conséquence, l’amendement II-CE343 tombe.


Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 29 octobre 2024 à 17 h 35

Présents.  M. Henri Alfandari, M. Maxime Amblard, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Karim Benbrahim, M. Philippe Bolo, M. Jean-Luc Bourgeaux, M. Charles Fournier, M. Jean-Luc Fugit, M. Antoine Golliot, M. Harold Huwart, Mme Julie Laernoes, M. Maxime Laisney, M. Thomas Lam, Mme Nicole Le Peih, Mme Marie Lebec, M. Guillaume Lepers, M. Laurent Lhardit, M. Alexandre Loubet, M. Bastien Marchive, M. Patrice Martin, M. Nicolas Meizonnet, Mme Manon Meunier, M. René Pilato, M. Vincent Rolland, M. Lionel Tivoli, Mme Aurélie Trouvé, M. Jean-Pierre Vigier, M. Stéphane Vojetta, M. Frédéric Weber

Excusés.  M. Alexandre Allegret-Pilot, M. André Chassaigne, M. Max Mathiasin, M. Philippe Naillet, M. Jérôme Nury