Compte rendu
Commission
des affaires économiques
– Suite de l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur (n° 856) (M. Julien Dive, rapporteur) 2
Mercredi 14 mai 2025
Séance de 9 heures 30
Compte rendu n° 92
session ordinaire de 2024-2025
Présidence de Mme Aurélie Trouvé,
Présidente
— 1 —
La commission des affaires économiques a poursuivi l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur (n° 856) (M. Julien Dive, rapporteur).
Article 1er (suite) : Assouplir le dispositif de la séparation des activités de vente et de conseil en matière de produits phytopharmaceutiques et renforcer le conseil aux agriculteurs
Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je rappelle que l’adoption hier soir de l’amendement CE709 du rapporteur a eu pour conséquence de faire tomber l’ensemble des amendements suivants se rapportant au même alinéa, donc jusqu’au CE696 inclus.
Amendement CE199 de M. Benoît Biteau
M. Benoît Biteau (EcoS). Il s’agit d’enrichir les options de pratiques culturales proposées à l’exploitant dans le cadre du conseil stratégique global. Lui seraient présentés plusieurs scénarios, dont la conversion et le maintien en agriculture biologique, et précisées les conséquences de chacun d’entre eux, qu’elles soient agronomiques, environnementales, sanitaires ou, surtout, économiques, dans un contexte où le monde agricole cherche une plus forte rentabilité.
M. Julien Dive, rapporteur. Avis défavorable. Votre amendement est satisfait par l’amendement CE709, de clarification, qui précise que le conseil stratégique global « vise à améliorer la viabilité économique, environnementale et sociale de l’exploitation ».
La commission rejette l’amendement.
Amendement CE764 de M. Dominique Potier, amendements identiques CE270 de la commission du développement durable et CE38 de M. Benoît Biteau, amendement CE700 de Mme Julie Ozenne (discussion commune)
M. Dominique Potier (SOC). Alors qu’il va être mis fin à la séparation de la vente et du conseil, il nous faut insister sur les leviers à actionner pour s’engager dans une trajectoire de réduction du recours aux produits phytosanitaires, pour des raisons qui tiennent à l’environnement mais aussi à la productivité et à la rentabilité. Le blocage étant systémique, le déblocage doit l’être tout autant. Il convient donc de proposer un conseil agroécologique global balayant un large spectre : réduction de la consommation énergétique et des émissions de gaz à effet de serre, gestion durable de la ressource en eau, optimisation de la fertilisation – dans le bilan énergétique de l’agriculture, les engrais azotés demeurent une grande inconnue –, préservation et restauration de la qualité des sols.
M. Benoît Biteau (EcoS). L’amendement CE38 vise à préciser les contours du conseil stratégique global en indiquant qu’il est fondé sur un diagnostic comportant une analyse des spécificités pédoclimatiques, des moyens humains et matériels disponibles, des cultures et des précédents culturaux. Cette approche éminemment agronomique permettrait de retracer les parcours de production de la structure concernée tout en cernant les évolutions possibles des pratiques, notamment phytosanitaires. Elle serait bien sûr confiée à des personnes agréées, comme nous l’avons évoqué hier soir.
Mme Julie Ozenne (EcoS). Par l’amendement CE700, nous proposons que le conseil stratégique global intègre un diagnostic de santé des sols, sur lequel l’agriculteur pourrait se fonder pour adopter des pratiques agroécologiques plus respectueuses et réduire l’utilisation des pesticides.
M. Julien Dive, rapporteur. Ces amendements ont tous pour objet de préciser le champ du conseil stratégique global, comme mon amendement adopté hier soir, mais en allant beaucoup plus loin. Pour cette raison et du fait, en particulier, de la périodicité du diagnostic prévue par l’amendement CE38, je demande leur retrait au profit du CE764, au sujet duquel je m’en remets à la sagesse de la commission.
M. Thierry Benoit (HOR). Je soutenais l’amendement CE199, qui offrait la possibilité d’évoquer la conversion en bio parmi les scénarios envisageables tout en laissant l’initiative sur le terrain aux conseillers technico-commerciaux, mais ces amendements corsètent leur travail. En voulant tout prévoir et tout maîtriser, ils compliquent tout, à rebours de l’objectif que ce texte doit viser : simplifier la vie des agriculteurs.
M. Dominique Potier (SOC). Monsieur Benoit, il ne s’agit pas ici du conseil opérationnel fourni par le conseiller technico-commercial, mais du conseil stratégique. Nous nous employons dans nos amendements à en définir la portée, partant du principe qu’il ne doit pas se limiter au domaine phytosanitaire, ce qui le placerait dans une impasse. Les personnes qui en seront chargées – conseillers de la chambre d’agriculture, conseillers indépendants ou encore professionnels issus de structures comme les centres d’initiative pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (Civam) ou des coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma) – devront appliquer une approche agroécologique. Ce faisant, ils constitueront une sorte de contrepoids aux possibles dérives du conseil technico-commercial. Entendons-nous bien, je ne veux pas non plus caricaturer ce dernier. Les conseillers technico-commerciaux ne sont pas là seulement pour pousser à la vente ; ils peuvent aider les agriculteurs à faire des économies, à certifier des produits agroalimentaires sous signe de qualité ou les inciter à des efforts en vue d’une conversion ou d’une optimisation.
M. Julien Brugerolles (GDR). Je soutiens ces amendements qui mettent l’accent sur la maîtrise des charges de mécanisation et d’énergie, éléments fondamentaux qui appellent une analyse plus poussée.
M. Benoît Biteau (EcoS). Monsieur Benoit, le conseil stratégique global intervient en amont des opérations d’achat de pesticides et d’intrants. Il vise à cerner les atouts et les faiblesses d’une exploitation sur la base d’une analyse de la fertilité des sols, du contexte pédoclimatique et des moyens humains, afin de déterminer la bonne stratégie à adopter et d’évaluer la possibilité de ne pas recourir aux molécules de synthèse. Il ne relève pas du conseil technico-commercial.
Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Compte tenu de la nécessité de procéder à une transition agroécologique, il importe d’accompagner au mieux les agriculteurs dans cette voie, d’autant qu’ils ne sont pas opposés aux adaptations qu’implique le changement climatique : 62 % de ceux qui étaient interrogés dans le cadre d’une enquête récente considéraient la transition écologique comme une nécessité, 23 % déclaraient même y voir une opportunité.
M. Julien Dive, rapporteur. Si je n’ai pas émis un avis défavorable à l’amendement de Dominique Potier, c’est qu’il est le seul à déployer une approche systémique. Il prend en outre en compte des éléments présents dans les autres amendements, notamment la ressource en eau et les sols. Ainsi, il garantit le caractère global du conseil stratégique.
L’amendement CE270 est retiré.
La commission adopte l’amendement CE764.
En conséquence, les amendements CE38 et CE700 tombent.
Amendement CE525 de M. Patrice Martin
M. Patrice Martin (RN). Nous souhaitons ajouter un alinéa précisant que le conseil stratégique global se fonde sur une approche indépendante, objective et contextualisée prenant en compte les spécificités propres à chaque exploitation agricole – taille, système de production, contexte agroéconomie local. Ainsi seront fournies aux exploitants des recommandations concrètes, opérationnelles et directement transposables, susceptibles d’améliorer durablement la viabilité et la résilience de leur exploitation. En affirmant le principe d’indépendance des conseillers et l’exigence d’une adaptation fine des préconisations, cet amendement garantit un accompagnement individualisé pleinement ancré dans les réalités agricoles et éloigné de toute influence commerciale ou institutionnelle.
M. Julien Dive, rapporteur. Défavorable : l’amendement CE764 que nous venons d’adopter prend en compte une partie de ces éléments.
M. Thierry Benoit (HOR). Depuis l’adoption en 2018 de la première loi Egalim, le débat parlementaire sur ces enjeux n’a guère évolué : nous tentons toujours de tout corseter, alors que la population d’agriculteurs, elle, a connu un profond renouvellement. Les nouvelles générations sont de mieux en mieux formées, plus conscientes de la nécessité de procéder à une transition écologique et se sentent prêtes à ne plus recourir à terme aux produits phytosanitaires. Faisons place à l’initiative locale, ménageons de la souplesse et simplifions : bref, laissons les gens respirer !
M. Jean-Pierre Vigier (DR). En effet, faisons preuve de souplesse et laissons de la liberté à nos agriculteurs : ce sont des chefs d’entreprise qui connaissent leur métier ! Ils n’ont pas besoin de conseils à haute dose, ils savent gérer leur exploitation.
M. Julien Dive, rapporteur. L’amendement CE764 n’entend nullement contraindre les agriculteurs : il vise à élargir le champ du conseil stratégique global. Vous devriez plutôt vous réjouir des allégements que l’article 1er introduit dans la séparation du conseil et de la vente.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CE710 de M. Julien Dive, rapporteur, l’amendement CE583 de M. Julien Brugerolles ayant été retiré.
Amendements identiques CE269 de la commission du développement durable et CE39 de M. Benoît Biteau
M. Benoît Biteau (EcoS). Monsieur Vigier, loin de remettre en cause les capacités de discernement des agriculteurs, nous entendons nous fonder sur leurs compétences pour élargir le champ des possibilités qui leur sont offertes. L’approche systémique au cœur du conseil stratégique global les aidera à prendre les bonnes décisions.
Par notre amendement, nous précisons que la possibilité d’exercer les fonctions de conseiller sera soumise à l’obtention d’un diplôme d’ingénieur agronome ou d’un master en agronomie. La loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture a instauré un diplôme national de premier cycle en sciences et techniques de l’agronomie.
M. Julien Dive, rapporteur. Cette fois, vous faites exactement ce que dénonçait Thierry Benoit : corseter et restreindre. En réservant aux détenteurs d’un diplôme d’ingénieur agronome les possibilités d’exercer les fonctions de conseiller, vous mettez de côté les anciens agriculteurs, professionnels aguerris et expérimentés, ou les détenteurs de BTS (brevet de technicien supérieur), sur l’expertise desquels on peut pourtant compter, et vous omettez la VAE (validation des acquis de l’expérience). Avis défavorable.
M. Benoît Biteau (EcoS). Comme la VAE permet généralement d’obtenir un diplôme, mon amendement la prend implicitement en compte. Elle peut permettre à des agriculteurs de devenir conseillers techniques.
La commission rejette les amendements.
Amendements CE686, CE698 et CE699 de Mme Julie Ozenne (discussion commune)
Mme Julie Ozenne (EcoS). L’amendement CE686 tend à combler une énorme lacune du texte : l’accompagnement des agriculteurs et agricultrices en grande difficulté. Pour celles et ceux, de plus en plus nombreux, confrontés à une accumulation de dettes et à l’isolement, il est très compliqué, voire impossible, de se consacrer aux démarches administratives et judiciaires nécessaires au redressement de leur exploitation, a fortiori d’envisager des changements de pratiques. Nous proposons donc que le conseil stratégique global prévoie un accompagnement humain pour leur venir en aide. Celui-ci doit être mis en œuvre en partenariat avec des structures qui œuvrent déjà en ce sens, comme le réseau associatif Solidarité Paysans.
Toujours dans le cadre du conseil stratégique global, nous proposons que les exploitants se voient proposer un plan de restructuration-diversification – diversification des productions agricoles, développement des pratiques agroécologiques, réduction de l’usage des produits phytopharmaceutiques – ou encore un plan de redressement économique de l’exploitation, étape essentielle vers le changement de pratiques. C’est le sens des amendements CE698 et CE699. On ne peut pas laisser les agriculteurs et les agricultrices sur le carreau.
M. Julien Dive, rapporteur. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable : ces trois amendements apportent des précisions inutiles. L’accompagnement humain est assuré, puisqu’un conseiller se rendra auprès des agriculteurs. Quant aux difficultés économiques, elles sont prises en compte par l’amendement CE709 adopté hier soir, qui mentionne la « viabilité économique » des exploitations – le conseil dans ce domaine est l’une des missions des chambres d’agriculture.
Mme D (SOC). Ces amendements montrent bien que la séparation de la vente et du conseil n’a pas été satisfaisante. Pour accéder à un conseil, désormais indépendant, il faut aux agriculteurs capacités financières et temps de cerveau disponible. Pour ceux qui rencontrent des difficultés, cette démarche est donc compliquée.
M. Benoît Biteau (EcoS). Pour avoir milité plusieurs années au sein de Solidarité Paysans, je sais que ce type d’associations permet de soulager les agriculteurs des charges mentales et financières qui pèsent sur eux en leur offrant un conseil réellement indépendant, madame Thomin, qui les aide, dans un premier temps, à sortir de leurs difficultés et, ensuite, à identifier une trajectoire pour leur exploitation. Ainsi, ils peuvent franchir les étapes nécessaires sans avoir à s’en remettre à ceux qui vendent des pesticides. Que l’accès au conseil soit réservé à ceux qui utilisent des pesticides me gêne profondément, je le répète.
Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Nous voterons en faveur de ces très bons amendements. Il est fondamental que les agriculteurs en difficulté puissent bénéficier d’un accompagnement sur le plan économique et je salue Solidarité Paysans qui œuvre en ce sens – c’est aussi celui d’une baisse du recours aux phytosanitaires, vu leur coût. De même, les stratégies de diversification sont intéressantes à la fois pour la souveraineté alimentaire et pour réduire l’usage des phytosanitaires dans le cadre d’une approche écosystémique.
La commission adopte l’amendement CE686.
En conséquence, les amendements CE698 et CE699 tombent.
Amendements identiques CE267 de la commission du développement durable et CE367 de M. Loïc Prud’homme, amendement CE366 de M. Loïc Prud’homme (discussion commune)
Mme Sandrine Le Feur, rapporteure pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. L’amendement CE267 a été adopté par la commission du développement durable, contre mon avis.
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). J’ai assisté à beaucoup des auditions de la commission d’enquête sur les produits phytosanitaires présidée par Dominique Potier. De l’avis de plusieurs experts, le recours à ces produits répond à des motivations économiques de la part des agriculteurs, qui arbitrent en fonction d’une balance bénéfices-risques. Or, l’article 1er risque d’entraîner un retour vers le pire : si les conseils sont prodigués par les vendeurs, cela biaisera ces décisions. L’amendement CE367 propose que l’État examine les conditions dans lesquelles il pourrait rendre gratuit le conseil stratégique dans le cadre d’une mission de service public.
Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Par l’amendement CE366, nous proposons que l’État examine les conditions dans lesquelles il peut créer un service public du conseil stratégique et spécifique incombant aux chambres d’agriculture. Cet accompagnement, qui supposerait bien sûr un renforcement des moyens humains, aiderait les agriculteurs à atteindre les objectifs de sortie progressive de l’utilisation des pesticides et engrais de synthèse et à développer des alternatives fondées sur l’agroécologie paysanne. Rappelons qu’ils ne sont nullement opposés à la transition écologique, nous l’avons bien vu à propos des Maec – mesures agroenvironnementales et climatiques.
M. Julien Dive, rapporteur. Avis défavorable. Outre que cette disposition rend la loi bavarde, elle ne me paraît pas opportune dans le contexte budgétaire actuel, même si un soutien aux chambres d’agriculture est bien sûr le bienvenu. La mesure pourrait en outre créer une distorsion de concurrence avec le secteur privé.
M. Dominique Potier (SOC). Nous avons eu l’occasion à de multiples reprises de souligner les défauts du conseil privé. Comme Loïc Prud’homme, nous sommes favorables à l’idée d’un financement public. Sébastien Windsor, président des chambres d’agriculture, a évalué à 60 millions d’euros l’enveloppe budgétaire que celles-ci devraient recevoir de l’État pour assurer cet accompagnement, la commission d’enquête sur l’usage des produits phytopharmaceutiques l’a estimée pour sa part à 70 millions. Elle pourrait être financée par une taxation sur la phytopharmacie ou une extension des taxes servant actuellement à financer la phytopharmacovigilance. Compte tenu du montant du chiffre d’affaires de la phytopharmacie en France – 2,4 milliards d’euros –, cet effort serait très relatif et les chambres d’agriculture auraient bien sûr à rendre des comptes sur l’usage qu’elles feraient de ces sommes. Ce conseil agronomique serait très bénéfique pour le monde agricole sur le plan de la sécurité, de la santé et de la compétitivité.
M. Benoît Biteau (EcoS). J’ai identifié un biais dans l’article 1er : dès lors que la séparation entre vente et conseil est remise en cause, il faudra acheter des intrants pour recevoir des conseils. Loïc Prud’homme propose l’inverse : qu’ils aient l’intention ou non d’acheter des produits phytopharmaceutiques, les agriculteurs pourront bénéficier d’un accompagnement assuré par des conseillers compétents, certifiés, à même de les éclairer sur la transition agroécologique, à laquelle nous les savons en majorité favorables – un sondage réalisé lors des manifestations mettait en évidence une adhésion à 85 % parmi ceux qui ont été interrogés. Ce qu’ils réclament, c’est de recevoir une aide non seulement financière, mais aussi technique ; c’est le sens des amendements.
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). Pardon d’être bavards, monsieur le rapporteur ! J’ose espérer que les amendements ne se réduisent pas à ce trait ; ils sont tout de même fondés sur des arguments.
C’est extraordinaire – enfin c’est normal, vous êtes de droite – de parler de distorsion de concurrence entre conseil public et conseil privé. Nous ne cessons de vous dire que le conseil privé est un échec, une impasse, qu’il s’agisse de la réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires ou de la préservation par les agriculteurs de leurs revenus – ils sont incités à les dépenser bêtement en pesticides qu’on leur recommande à mauvais escient. Nous ne voulons donc aucune concurrence dans ce secteur, nous voulons un conseil 100 % public et indépendant. Le problème n’est peut-être pas que je sois bavard, plutôt que je n’aie pas été compris.
M. Julien Dive, rapporteur. Cessez de mettre les gens dans des petites cases. Vous êtes de droite, vous êtes de gauche, vous êtes agriculteur pollueur, vous êtes agriculteur écolo… Ce n’est pas ainsi que nous aurons des débats apaisés.
Nos positions sont différentes ; c’est possible, compréhensible, respectable. Chacun développe ses arguments en faveur d’une vision de l’agriculture ; c’est comme cela que nous apporterons le plus de solutions possibles à l’ensemble des agriculteurs – n’est-ce pas l’objectif ?
Ce n’est pas vous que je trouve bavard, ce sont vos amendements. Mais je vous invite à être bavard en séance en interpellant la ministre : que « l’État examine les conditions dans lesquelles il peut mettre en œuvre la gratuité du conseil stratégique » implique un coût – évoqué par Dominique Potier.
Je vous suggère donc de retirer les amendements pour les déposer de nouveau en vue de la séance afin de recueillir l’avis de la ministre, puisque c’est le Gouvernement qui tient les cordons de la bourse. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement CE267 est retiré.
La commission rejette successivement les amendements CE367 et CE366.
Amendement de coordination CE711 de M. Julien Dive, rapporteur
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). Monsieur le rapporteur, vous avez dit que je mettais les gens dans des cases, alors que c’est vous qui m’avez rangé dans la case du bavard qui n’y connaît rien.
Vous parliez vous-mêmes des diplômes et de l’expertise des agriculteurs. Certains ici sont ingénieurs agronomes. J’ai moi-même un BTS agricole. Moi, je ne suis pas seulement bavard et vous, vous n’avez pas le monopole du savoir et de l’expertise en matière agricole.
Si vous voulez des débats apaisés, acceptez aussi que nous soyons ici pour faire de la politique – c’est ce que je fais, je mets en évidence des positions politiques – et tout se passera bien.
Mme la présidente Aurélie Trouvé. S’il vous plaît, mes chers collègues, n’interrompez pas les orateurs, vous apprécierez que je fasse respecter cette règle quand ce sera votre tour de prendre la parole.
M. Julien Dive, rapporteur. Monsieur le député, au-delà du bavardage, c’est de la caricature. Premièrement, je n’ai jamais dit que vous étiez ignorant ; c’est totalement faux. Deuxièmement, je n’ai jamais prétendu tout savoir. Encore une fois, vous versez dans la caricature. Troisièmement, assumez simplement que vous mettez les gens dans des cases. Ce n’est pas grave, vous avez le droit de le faire, vous l’avez fait et vous continuerez de le faire. C’est votre libre arbitre.
M. René Pilato (LFI-NFP). Ce n’est pas une insulte de vous dire que vous êtes de droite !
M. Julien Dive, rapporteur. Je n’ai pas dit que c’était une insulte. Je dis que ça ne sert à rien de mettre les gens dans des petites cases. Ce n’est pas de cette manière que les débats parlementaires avanceront. Que nous ayons des positions différentes, très bien.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CE551 de M. David Taupiac
M. David Taupiac (LIOT). Par cet amendement de simplification, je propose que les diagnostics modulaires créés par la loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture, dite LOA, soient réalisés dans le cadre des conseils stratégiques. Il s’agit d’éviter toute redondance avec la loi d’orientation, qui prévoit déjà des modules évaluant l’utilisation économe et durable des ressources et l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.
M. Julien Dive, rapporteur. C’est votre amendement qui crée une redondance par rapport à la LOA. Je vous invite à le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. Thierry Benoit (HOR). Je reviens à l’amendement CE366, qui ne mentionnait pas la gratuité du conseil stratégique. Monsieur le rapporteur, sans qu’il soit nécessaire de l’inscrire dans la loi, est-ce qu’il n’appartient pas à la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire de confier aux chambres d’agriculture, qui viennent d’être renouvelées, la mission d’assurer un service public de conseil stratégique incluant la transition écologique et l’agroécologie ?
M. Frédéric Falcon (RN). Madame la présidente, pour la bonne tenue des débats, serait-il possible de ne donner la parole qu’à deux orateurs – un pour et un contre –, sauf à propos des amendements de suppression d’un article ? On entend beaucoup la gauche s’écouter parler et se jauger – BTS, master d’agronomie… –, mais nous aimerions avancer.
Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Monsieur Benoit, on pourrait en effet imaginer une initiative de la ministre, mais comme elle ne vient pas, nous proposons d’inscrire cette mission dans la loi. En notre qualité de parlementaires, nous avons le droit de décider des politiques appliquées dans notre pays.
Cela fait longtemps qu’on essaie de rendre effective la séparation du conseil et de la vente. Nous faisons le même constat d’un échec, mais nos avis divergent sur ses raisons. Selon nous, le Gouvernement n’a pas alloué aux chambres d’agriculture les moyens suffisants pour disposer de conseillers qui accompagneraient les agriculteurs et les agricultrices dans une dynamique de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires afin de protéger la santé et l’environnement, et de diminuer la charge économique des exploitations.
M. Stéphane Travert (EPR). Cette mission doit être inscrite dans le contrat d’objectifs et de performance signé par les chambres d’agriculture. Si l’initiative ne vient pas du ministère, les chambres pourraient lui demander de le faire. Cela éviterait d’alourdir la loi et apporterait un peu plus de souplesse.
Mme la présidente Aurélie Trouvé. Un point à la suite de l’intervention de M. Falcon. Il m’appartient d’assurer la police et l’animation des débats. J’estime que ces derniers sont sereins. Nous avons par ailleurs un très bon rythme d’une trentaine d’amendements à l’heure. Sur certains amendements, il n’y a pas d’intervention ; sur d’autres, il peut y avoir plus de deux orateurs, selon l’importance du sujet. J’aviserai si j’estime nécessaire d’accélérer. À ce rythme, nous pourrons achever l’examen du texte vendredi après-midi.
M. Julien Dive, rapporteur. Monsieur Benoit, vous marquez un point ; je vous invite à interroger la ministre en séance sur cette question – je vous appuierai.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 1er modifié.
Après l’article 1er
Amendement CE780 de M. Pascal Lecamp
M. Pascal Lecamp (Dem). Cet amendement du groupe Démocrates reprend une recommandation de l’excellent rapport Potier de juillet 2023 sur le bilan de la séparation de la vente et du conseil en matière de produits phytopharmaceutiques : la création, sur le modèle québécois, d’un ordre professionnel des conseillers. Elle permettrait de renforcer et de formaliser les règles déontologiques de la profession, de garantir leur respect, de lutter contre les conflits d’intérêts et de garantir la transparence de l’activité de conseil. Le but est de développer la profession de phytiatre, qui rassemble les experts en biologie végétale chargés d’émettre des avis sur l’utilisation des produits dans l’agriculture.
M. Julien Dive, rapporteur. La profession n’a pas lieu d’être réglementée. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
La réunion est suspendue de dix heures vingt-cinq à dix heures quarante.
Article 2 : Mise sur le marché et utilisation des produits phytopharmaceutiques
Amendements de suppression CE262 de la commission du développement durable, CE2 de Mme Delphine Batho, CE127 de M. Dominique Potier, CE368 de Mme Mathilde Hignet et CE584 de M. Julien Brugerolles
Mme la présidente Aurélie Trouvé. De nombreux députés ont demandé que ces amendements soient mis aux voix par scrutin. La proportion d’un dixième des députés requise par le règlement étant atteinte, il sera ainsi procédé.
Mme Sandrine Le Feur, rapporteure pour avis. Je suis favorable à l’amendement de suppression voté en commission du développement durable.
Il existe deux points bloquants. D’une part, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) doit rester indépendante. Seul le Masa (ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire) est favorable au fait de l’obliger à informer ses ministères de tutelle préalablement à toute prise de décision par son directeur général (DG). Ni le MTE (ministère de la transition écologique), ni le ministère chargé de la santé ne veulent de cette prérogative.
D’autre part, cet article prévoit d’autoriser de nouveau l’usage de l’acétamipride au profit de quelques filières – la noisette, cultivée par 300 agriculteurs –, mais au détriment de milliers d’autres agriculteurs des filières apicoles, des fruits et légumes et des oléoprotéagineux. La baisse des rendements observée dans ces filières est due à la diminution du nombre d’insectes pollinisateurs, pour partie imputable aux néonicotinoïdes. Lors d’une audition, l’Anses et le ministère chargé de la santé se sont dits inquiets du risque neurotoxique de l’acétate hybride.
Enfin, ce n’est pas cet article qui permettra de lever les entraves au métier d’agriculteur.
Mme Delphine Batho (EcoS). Ce débat dépasse largement les sensibilités partisanes. La France doit rester une nation libre, qui fait confiance à la science et qui protège la santé humaine et la santé des écosystèmes.
L’article 2 est une attaque frontale contre la science, la santé et la souveraineté.
Contre la science, d’abord, puisqu’il prévoit une ingérence politique du ministre chargé de l’agriculture dans les procédures d’évaluation des risques et d’autorisation de mise sur le marché (AMM) relevant de l’Anses qui conduirait à un conflit d’intérêts avec les firmes de l’agrochimie. Contre la science aussi parce que la littérature scientifique sur les méfaits des néonicotinoïdes est implacable et accablante.
Contre la santé, ensuite, car la notion d’usage prioritaire consiste à faire prévaloir les intérêts économiques sur la santé publique et la protection de l’environnement.
Enfin, contre la souveraineté, puisque cet article conduirait la France à se dédire alors qu’elle a obtenu l’interdiction des néonicotinoïdes en Europe et qu’elle est en train d’obtenir l’interdiction de l’acétamipride.
M. Dominique Potier (SOC). Cet article est l’un des plus importants de la proposition de loi. La position du groupe Socialistes et apparentés est très claire : il constitue une ligne rouge et un recul de plus de dix ans.
En 2014, après une longue réflexion et un dialogue entre la gauche et la droite, l’Assemblée a finalement décidé de confier à l’Anses la mission de délivrer les autorisations de mise sur le marché, qui est inscrite dans un cahier des charges défini démocratiquement. Ce faisant, elle a considéré que la décision d’autoriser la mise sur le marché d’un produit – en l’occurrence d’une substance à l’échelle européenne – devait être prise par un comité scientifique indépendant et non sous la pression de la dictature du marché ou de celle de l’opinion publique.
Nous avons déposé plusieurs amendements visant à renforcer l’examen par l’Anses de l’impact des produits phytosanitaires. C’est le fruit du travail approfondi et pluriel que nous avons mené dans le cadre de la commission d’enquête sur ces produits. Nous sommes partisans d’une Anses augmentée. Nous nous méfions de toute délibération politique en la matière. Seules la science et la démocratie nous permettront de réconcilier le monde agricole avec la société, et de faire converger l’intérêt général et l’intérêt des filières.
Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Cet article compromet l’indépendance de l’Anses et son intégrité scientifique. Il s’agit en effet d’une attaque contre les scientifiques.
En outre, il prévoit de revenir sur l’interdiction des néonicotinoïdes, pesticides particulièrement toxiques et connus pour être des tueurs d’abeilles. Ce serait donc une catastrophe pour la biodiversité et pour la santé des agriculteurs et des riverains. La levée de cette interdiction constituerait un recul grave, en totale contradiction avec l’urgence écologique actuelle.
Supprimer cet article, c’est préserver l’indépendance de l’Anses, c’est appliquer le principe de précaution et c’est protéger la biodiversité et la santé publique.
M. Julien Brugerolles (GDR). Cet article est au cœur des intentions initiales rétrogrades du texte. Il remet en cause l’indépendance scientifique et l’expertise de l’Anses, autorise l’usage des drones dans l’agriculture et prévoit de nouveau des dérogations pour certaines molécules, dont l’acétamipride.
L’exercice d’une tutelle sur l’Anses en amont de la décision refusant la mise sur le marché d’un produit serait la porte ouverte à toutes les pressions politiques et économiques dans le domaine phytosanitaire. On ne peut qu’y être défavorable, d’autant qu’une confusion est entretenue entre la tutelle exercée par les ministères, qui concernerait la gouvernance et la gestion de l’établissement public, et celle qui s’exercerait sur les missions directes de l’Anses. C’est très préoccupant.
M. Julien Dive, rapporteur. Notre rôle, en notre qualité de membres de la commission des affaires économiques, est de débattre du contenu de l’article 2, qui concerne un sujet épineux, plutôt que de le rejeter en bloc.
L’article repose sur trois piliers. Le premier, c’est la question des autorisations de mise sur le marché et le rôle de l’Anses. Le deuxième, c’est l’autorisation de l’usage des drones, par exemple dans l’agriculture biologique, qui figure déjà dans la proposition de loi de Jean-Luc Fugit adoptée à l’Assemblée nationale puis au Sénat. Le troisième, c’est la possibilité de déroger à l’interdiction de l’usage de l’acétamipride pour des cultures qui seraient dans l’impasse, dérogation assortie de conditions définies.
L’Anses mérite d’être protégée. L’autonomie des décisions scientifiques est importante. La commission a entendu le directeur général de l’Anses le 25 mars dernier et, dans le cadre des travaux préalables à l’examen de ce texte, j’ai auditionné l’Anses – ce que le Sénat n’avait pas fait. Par ailleurs, j’ai eu des échanges nourris avec son directeur général sur ces questions. Un dialogue réel a été instauré et il n’est pas question d’aborder ces sujets sans tenir compte des remarques de l’agence.
Par conséquent, j’ai déposé plusieurs amendements afin d’aménager l’article.
L’information préalable des ministres de tutelle au sujet de toutes les décisions prises par le directeur général de l’Anses aurait un effet contre-productif : elle alourdirait le processus sans apporter de garanties nouvelles. Je propose donc d’ajuster cette mesure.
S’agissant de l’autosaisine du comité de suivi des autorisations de mise sur le marché, cette mesure est satisfaite car le conseil d’administration de l’Anses est libre de le saisir.
Par ailleurs, le contradictoire imposé avant tout rejet de demande d’AMM conduirait à alourdir la procédure et à allonger les délais. Notre rôle n’est pas d’entraver la procédure car, de facto, cela empêcherait l’usage de certaines substances de biocontrôle ou de synthèse. Je propose donc d’alléger ce dispositif.
Quant aux usages prioritaires, le texte les définit et prévoit la façon de les identifier. Toutefois, il conviendrait de faire intervenir le comité des solutions. J’ai déposé un amendement qui vise à s’appuyer sur ce comité créé il y a un peu plus d’un an et qui réunit les acteurs des filières, les scientifiques et les ONG. En plus de définir les usages prioritaires, il établirait un calendrier d’instruction.
Par ailleurs, j’ai déposé un amendement de suppression des dispositions relatives aux drones, qui sont déjà satisfaites par le droit en vigueur.
Venons-en à la dérogation à l’interdiction d’utiliser des produits phytopharmaceutiques contenant de l’acétamipride, substance appartenant à la famille des néonicotinoïdes. Sur les cinq substances appartenant à cette famille qui ont été interdites par la loi de 2016, quatre d’entre elles ont été interdites au niveau européen – la clothianidine, l’imidaclopride et le thiaméthoxame en 2018, la thiaclopride en 2021. Les avis scientifiques de l’Efsa (Agence européenne de sécurité des aliments) ont nourri la décision de la Commission européenne. Seul l’usage en application foliaire de l’acétamipride est resté autorisé dans l’Union européenne.
Contrairement au texte initial, la rédaction actuelle de l’article 2 ne revient pas sur l’interdiction de 2016. Il permet d’y déroger uniquement pour des substances approuvées au niveau européen, soit l’acétamipride, dans des conditions bien précises et pour un usage déterminé, voire pour une durée limitée si les amendements en ce sens sont adoptés. La dérogation prendrait la forme d’un décret pris après avis du conseil de surveillance créé par la loi Denormandie de 2020 et auquel participent des parlementaires, des scientifiques et des ONG. Une fois ce décret pris, les produits contenant de l’acétamipride devront encore obtenir une autorisation de mise sur le marché.
Si cette substance est autorisée jusqu’en 2033 au niveau européen, c’est parce qu’elle est considérée par les scientifiques comme moins risquée, moins rémanente et ayant une durée de vie dans l’air beaucoup plus courte que les autres néonicotinoïdes du même type.
Avis défavorable aux amendements de suppression.
Mme Hélène Laporte (RN). Nous sommes défavorables à la suppression de l’article 2.
En supprimant cet article, vous, les groupes de gauche, voulez enterrer définitivement le principal apport de ce texte. Vous assumez de soumettre les agriculteurs français à des restrictions plus lourdes que partout ailleurs. Vous assumez de conduire des filières entières à leur perte et vous allez finir de tuer nos exploitations agricoles.
Je voudrais rappeler plusieurs faits sur l’acétamipride, qui est au cœur de tous les débats. Si cette molécule appartient bien à la famille des néonicotinoïdes, elle est totalement incomparable aux quatre molécules interdites au niveau européen. Elle n’est pas un néonicotinoïde tueur d’abeilles. Les travaux de l’Efsa comme ceux de l’Anses l’ont confirmé. Cette substance est 3 600 fois moins toxique pour les abeilles que la clothianidine, et 4 000 fois moins que l’imidaclopride.
Autoriser de nouveau l’acétamipride n’ouvre évidemment pas la porte à son utilisation illimitée et incontrôlée. Comme pour n’importe quelle substance active homologuée, la Commission européenne prévoit des limites maximales de résidus autorisés dans chaque produit alimentaire.
Nous demandons simplement que les agriculteurs français soient de nouveau mis sur un pied d’égalité avec leurs homologues allemands, italiens ou polonais, alors même que nous consommons des produits importés. L’interdiction de l’acétamipride conduit des filières dans une impasse technique s’agissant de la lutte contre les ravageurs. C’est le cas des filières arboricoles, mais également de celle de la noisette.
M. Guillaume Lepers (DR). L’acétamipride est interdite en France mais ne l’est pas au niveau européen, ce qui entraîne des conséquences catastrophiques pour les filières françaises, notamment celle de la noisette. Or, selon l’Efsa et l’Anses, cette substance, dont la persistance dans les sols est faible, ne présente aucun danger. Son usage, qui est encadré, est notamment interdit durant la floraison, ce qui évite l’exposition des abeilles à la substance.
J’en appelle à votre bon sens. Je connais très bien la filière de la noisette ; les 350 producteurs vont crever parce qu’il n’y a aucune solution. Comme dans d’autres filières, ils constatent que des produits sont importés de toute l’Europe. On assiste à une chute de la production et à une explosion des importations, car nous ne disposons pas des mêmes armes que nos concurrents.
On dit à l’opinion publique que tous les néonicotinoïdes vont être réautorisés. C’est faux ! La dérogation ne concernera que l’usage de l’acétamipride, qui sera encadré. Il faut que nous sauvions ces filières d’excellence en France et que nous arrêtions de nous mettre des bâtons dans les roues.
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Le groupe EPR s’oppose à la suppression de cet article. Nous proposons de supprimer tant les dispositions relatives à l’Anses, car nous voulons préserver son indépendance et éviter d’emprunter un chemin qui nous semble dangereux, que celles relatives aux drones, qui sont satisfaites. Nous souhaitons compléter le rôle du comité des solutions.
Par ailleurs, le cadre dérogatoire au droit commun s’appliquant à l’usage de l’acétamipride nous convient. La décision d’autoriser la molécule jusqu’en 2033 se fonde sur la science. On ne peut s’appuyer sur certains avis scientifiques et choisir d’en écarter d’autres.
La filière de la noisette n’est pas la seule concernée. Il y a quinze jours, l’Allemagne a appliqué ce régime dérogatoire pour aider les producteurs de pommes de terre. Nous voulons que nos agriculteurs jouent selon les mêmes règles que les agriculteurs des autres pays européens. Marché unique, règles uniques.
M. Henri Alfandari (HOR). En quoi le fait que l’Anses doive informer ses ministères de tutelle remettrait-il en cause son indépendance ?
L’alinéa 9 dispose qu’elle « est tenue, préalablement à l’adoption de toute décision de rejet, de communiquer les motifs pour lesquels elle envisage de rejeter la demande ». Il s’agit de permettre au demandeur « de produire des observations écrites. Ces observations sont prises en compte par l’[Anses] aux fins d’adoption de sa décision ». Donc sa décision n’est en rien remise en cause, il s’agit bien de sa décision, c’est écrit.
Par ailleurs, arrêtons d’être volontairement ambigus : les néonicotinoïdes ne sont pas de nouveau autorisés. Quatre substances sur cinq ont été interdites au niveau européen. Du reste, il ne devrait pas être question d’une molécule dans la loi : cela relève du domaine réglementaire. Ensuite, il est nécessaire de disposer de cette souplesse. Enfin, cette dérogation permet d’être en conformité avec ce que l’Union européenne autorise.
Mme Delphine Batho (EcoS). Monsieur le rapporteur, les amendements que vous proposez sur l’Anses aboutissent exactement au même résultat que le texte qu’ils modifient, puisqu’ils prévoient l’information du ministre de l’agriculture avant toute décision concernant des usages prioritaires, dont l’amendement CE797 propose qu’ils soient déterminés par le ministre chargé de l’agriculture. Cela signifie que l’Anses, au lieu de fonder sa décision d’autorisation ou de rejet sur des considérations liées à la santé humaine ou à l’effondrement des populations d’insectes, déciderait en fonction d’une liste de priorités économiques définies par le ministre chargé de l’agriculture. Les modifications proposées par le rapporteur n’atténuent pas la gravité de l’attaque contre l’expertise scientifique.
Par ailleurs, s’agissant de l’acétamipride – et vous avez oublié une deuxième substance, le flupyradifurone –, je citerai Agnès Pannier-Runacher : l’acétamipride « tue aussi les abeilles et les pollinisateurs […]. [C’est] un des facteurs […] de baisse des rendements de notre agriculture. [C]e produit, il est soupçonné d’avoir un effet de perturbateur endocrinien et d’être un neurotoxique du développement. [C]e produit peut se retrouver dans l’eau potable, par infiltration. Donc c’est évidemment un sujet de santé qui n’est pas à prendre à la légère. Je le dis très directement ». Ainsi parle la ministre chargée de l’écologie dans le Gouvernement actuel.
M. Dominique Potier (SOC). Le danger serait de faire croire que ceux qui s’intéressent aux biens communs écologiques se moquent de la production. Or, nous, socialistes – et plus largement, je crois, à gauche et au centre –, nous sommes convaincus que la défense des biens communs écologiques n’est pas contradictoire avec la productivité. Au contraire, c’est même la condition pour garantir la productivité de demain.
Certains arbitrages sont difficiles, des filières sont en panne, il y a des impasses. Nous prenons ce sujet très au sérieux. Réintroduire d’anciennes molécules, interdites par une décision politique, en se dispensant de l’avis de l’Anses, est-ce la solution ? Ce serait une erreur, car cela reviendrait à prendre une décision politique qui contredit une autre décision politique sans se préoccuper des impacts sur l’environnement.
Enfin, ceux, nombreux à droite et parfois à l’extrême droite, qui veulent repolitiser le débat et qui demandent que nous prenions nos responsabilités pour mesurer les avantages et les inconvénients, les bénéfices et les risques, oublient simplement une chose fondamentale : si les bénéfices seront réalisés par les filières concernées, les risques pèseront sur toute la société et les générations futures.
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). Il n’y a rien à sauver dans cet article, même en passant par une rédaction alternative. En audition, le directeur général de l’Anses a indiqué que si l’article 2 était adopté, il démissionnerait. De fait, comment pourrait-il endosser les conséquences juridiques des choix effectués par le conseil d’orientation pour la protection des cultures ? Cette situation serait intenable.
Concernant l’acétamipride, nous écoutons les scientifiques, monsieur Fugit. Le principe de précaution n’est pas une vue de l’esprit. Dans un avis de 2014, l’Efsa a pointé la toxicité de cette molécule pour le neurodéveloppement. Si vous souhaitez la réintroduire, vous en assumerez les conséquences, car vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas et que les scientifiques ne savaient pas.
M. David Taupiac (LIOT). La mise sous tutelle de l’Anses au nom d’enjeux économiques ne serait pas une bonne solution, au vu des enjeux environnementaux et pour la santé publique.
Monsieur le rapporteur, la solution alternative que vous proposez n’est pas non plus entièrement adaptée. Par ailleurs, les alinéas concernant l’épandage par drone pourront être supprimés sans dommage, puisque nous avons récemment légiféré en la matière.
Ma position est plus nuancée concernant l’acétamipride, notamment parce que je connais les difficultés de la filière noisettes, qui m’inquiètent. Il faut éviter de la placer dans une impasse. Si une dérogation est adoptée, elle devra être clairement encadrée et subordonnée à un avis de l’Anses. L’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) nous informe que des recherches sont en cours pour trouver des molécules alternatives. Ainsi, la filière est pleinement mobilisée et des solutions seront trouvées d’ici quatre ou cinq ans.
M. Éric Martineau (Dem). Merci de m’accueillir dans votre commission.
L’Anses joue un rôle essentiel pour la science et éclaire les décisions publiques de son expertise. Pour assurer une approche cohérente avec l’Efsa et parce que nous avons la responsabilité de sortir les filières en difficulté de l’impasse, nous ne pouvons fermer la porte de manière définitive aux solutions proposées à cet article. Cela reviendrait à demander aux agriculteurs de courir le 100 mètres avec un boulet au pied.
Si vous souhaitez interdire l’usage de l’acétamipride même dans un cadre très contraint, allez au bout de votre logique, interdisez l’importation des produits qui y ont été exposés et supportez-en les conséquences !
M. Julien Dive, rapporteur. Madame Batho, vous omettez de préciser que les usages prioritaires ne seront définis par le ministère qu’après un avis du comité des solutions. Ce comité, créé par Mme Pannier-Runacher et relancé par Mme Genevard, constitue un lieu informel de débat et d’échanges qui a été soutenu par l’ensemble des acteurs auditionnés – y compris par l’Anses, qui y siège.
Je défendrai tout à l’heure un amendement visant à le formaliser. Les membres du comité, qui ne sont pas hostiles à la discussion, se réuniront pour identifier les situations d’impasse, les cas où il est nécessaire de rechercher une solution alternative et définiront des usages prioritaires. Les autorités de tutelle de l’Anses, c’est-à-dire les ministères, transmettront ensuite à l’Anses l’avis du comité. Elles n’imposeront donc pas leur définition des priorités. En outre, le calendrier d’instruction des demandes d’autorisation de mise sur le marché pour ces usages sera établi par l’Anses.
Celles et ceux qui souhaitent supprimer les dispositions du présent texte concernant l’Anses se dessaisissent du sujet et renvoient de fait la décision à un décret ministériel. C’est peut-être voulu, mais cela pourrait aussi créer des désagréments pour l’Anses.
Monsieur Prud’homme, le directeur général de l’Anses n’a pas menacé de démissionner si l’article 2 était adopté.
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). Si !
M. Julien Dive, rapporteur. Non, il ne s’agissait pas de l’article 2. Plusieurs d’entre nous, dont vous et moi, l’ont interrogé sur l’acétamipride et il a expliqué que la question serait renvoyée au niveau européen. En outre, il a clairement indiqué – forcément : il n’est pas là pour s’exprimer sur une substance – que l’interdiction des néonicotinoïdes, donc de cette molécule, était bien une décision politique. Ne transformez pas ses propos.
La commission rejette les amendements, mis aux voix par scrutin.
Amendements CE458 de M. Dominique Potier, CE541 et CE5 de Mme Delphine Batho (discussion commune)
M. Dominique Potier (SOC). Cet amendement de repli vise à instaurer un lieu de dialogue entre tous les acteurs concernés par les questions phytosanitaires. Les filières confrontées à des impasses, à cause de l’interdiction d’insecticides, d’herbicides ou de fongicides, ou les régions confrontées à des plantes invasives pourraient s’y exprimer et dialoguer avec les scientifiques, les représentants de l’Anses et des autorités de tutelle, afin de traiter les questions économiques de revenu des agriculteurs et de souveraineté alimentaire.
Dans ce lieu de dialogue, les acteurs pourraient faire remonter auprès de toutes les autorités compétentes – l’Anses comme les acteurs de la recherche – leurs priorités en matière de recherche. Agnès Pannier-Runacher avait animé de façon informelle un tel espace de dialogue, après les lois Egalim, ce qui avait permis certains résultats. Il faut en tout cas dissocier de l’Anses ce lieu de dialogue sur les préoccupations économiques et écologiques.
Mme Delphine Batho (EcoS). L’amendement CE541 vise à réécrire l’article 2 pour rétablir la pleine interdiction des néonicotinoïdes telle que nous l’avions adoptée dans le projet de loi Egalim 1 – le rapporteur de ce texte, Jean-Baptiste Moreau, avait alors interpellé l’ensemble des députés, en rappelant à juste titre qu’il n’y a pas d’agriculture sans pollinisateur.
L’amendement vise également à corriger une faille juridique dans la clause miroir adoptée par le Parlement. Nous avons ainsi déposé plusieurs amendements contre la concurrence déloyale, car nous accompagnons chaque mesure d’interdiction d’un pesticide d’une mesure de protection du marché français des produits importés exposés à ces pesticides.
Par ailleurs, si l’acétamipride a effectivement un impact inférieur à l’imidaclopride pour l’abeille domestique, ce n’est pas le cas pour les pollinisateurs sauvages. Pour ces derniers, les deux molécules conduisent également à une hécatombe.
Enfin, l’acétamipride affecte lourdement la biodiversité – notamment les oiseaux et les vers de terre – ainsi que la santé humaine. Cette molécule a été retrouvée dans le liquide céphalo-rachidien d’enfants traités pour un cancer, mais aussi, à des doses supérieures à la moyenne, dans les urines des bébés prématurés les plus petits au vu de leur âge gestationnel.
Les motifs d’inquiétude pour la santé humaine sont si importants que, lors de la réunion du Scopaff (Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale) du 5 décembre 2024, la Commission européenne a indiqué qu’elle avait lancé un réexamen de l’approbation de l’acétamipride, en vertu de l’article 21 du règlement (CE) n° 1107/2009, afin d’évaluer sa neurotoxicité et son rôle de perturbateurs endocrinien. Les données scientifiques concernant cette molécule sont accablantes.
M. Julien Dive, rapporteur. Ces amendements de réécriture visent, de manière déguisée, à supprimer l’article 2.
Monsieur Potier, le comité que vous défendez existe déjà, sous le nom de comité des solutions. Je défendrai tout à l’heure sa formalisation. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Madame Batho, vos deux amendements sont proches – le CE5 vise à abroger les deux premiers articles de la loi du 14 décembre 2020, quand le CE541 tend à supprimer les dispositions codifiées qui en sont issues. Avis défavorable. Je suis cependant d’accord avec votre proposition d’interdire la production, le transport et le stockage des substances actives interdites dans l’Union européenne, et j’émettrai un avis favorable à votre amendement ultérieur qui la reprend.
Vous avez raison, l’Efsa a lancé une étude sur l’acétamipride. Elle a également abaissé la limite maximale de résidus pour cette molécule. Cela montre que les scientifiques font bien leur travail et que nous pouvons faire confiance tant à l’Anses, en France, qu’à l’Efsa, au niveau européen.
Si l’Anses en venait à s’exprimer sur l’AMM de l’acétamipride, il nous appartiendrait de respecter sa décision. Celle-ci pourrait d’ailleurs être contestée en justice. Ainsi des associations ont-elles contesté l’AMM du sulfoxaflor – une molécule assimilée à la famille des néonicotinoïdes – et le fabricant a-t-il contesté la décision de février de la cour administrative d’appel de Marseille d’annuler cette AMM. Les filtres existent, les recours scientifiques et judiciaires sont possibles.
Enfin, dans les cas de contamination à l’acétamipride ou à ses alternatives que vous évoquez, la question est celle de l’exposition à la dose. L’exemple le plus criant est celui des pyréthrinoïdes, une alternative aux néonicotinoïdes dont l’usage a explosé après l’interdiction de ces molécules, notamment de l’acétamipride. D’ailleurs, l’Anses a lancé des alertes très sérieuses sur ces molécules, qui nuisent beaucoup plus durablement à la biodiversité et à la santé humaine que l’acétamipride, puisqu’elles sont utilisées de manière plus importante.
M. Nicolas Meizonnet (RN). Non mais franchement, les socialistes et les écolos, vous êtes extraordinaires ! Vous n’avez de cesse de convoquer la science, mais quand celle-ci contredit vos dogmes, vous érigez ces derniers en vérités scientifiques. « Les néonicotinoïdes », ça n’existe pas ; il y a des néonicotinoïdes. L’acétamipride est 3 000 à 4 000 fois moins toxique que les autres molécules. Ce n’est pas le Rassemblement national qui le dit, mais l’Efsa et l’Anses. Cette molécule n’est pas une tueuse d’abeilles.
C’est vrai, dans les années 1990, le Gaucho posait problème. Mais, depuis vingt ans, nous en avons tiré les leçons – vous me direz qu’on a encore quelques problèmes avec des gauchos, mais ce ne sont pas les mêmes… La science indique que la chute actuelle de la population d’abeilles est avant tout due au frelon asiatique.
Depuis cette salle de commission, à l’abri du réel, vous proposez de faire crever les agriculteurs. Vous ne les rencontrez jamais, pour 95 % d’entre eux. Nous, nous les défendons.
Mme la présidente Aurélie Trouvé. S’il vous plaît, évitons les petites blagues qui sont en réalité des mises en cause.
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Nous nous opposons à ces amendements. Celui de M. Potier est astucieux : en réécrivant l’article, il en évacue le sujet sensible de l’acétamipride. Nous défendrons à peu près le même dispositif, mais sans que cela aboutisse à ce même résultat – supprimer la réautorisation de l’acétamipride.
En ce qui concerne cette molécule, homologuée à l’échelle de l’Union européenne, j’approuve une grande partie de ce qu’a dit le rapporteur sur l’aspect scientifique. Les arboriculteurs et les apiculteurs – ce sont parfois les mêmes, certains agriculteurs installant des ruches au milieu de leurs vergers – déclarent en avoir besoin. Aux termes du texte tel que le rapporteur propose de l’amender, l’acétamipride ne pourrait être autorisée qu’à titre dérogatoire, pendant trois ans. Son utilisation serait donc très encadrée. Ne faisons pas croire à nos concitoyens que nous faisons n’importe quoi !
Mme Anne-Laure Blin (DR). Je suis ébahie : les décroissants osent toujours tout. Madame Batho, vous n’êtes pas à une contre-vérité près. Pensez-vous sincèrement que les pays de l’Union européenne veulent intoxiquer leur population et que l’acétamipride utilisé dans nos jardins intoxique nos compatriotes ? Vous devriez postuler à l’Efsa pour tenter de convaincre ses experts. Pour l’heure, ils ont réaffirmé qu’il n’y a aucune preuve concluante de l’augmentation des risques pour les oiseaux, les organismes aquatiques, les abeilles mellifères et les organismes vivant dans la terre.
L’acétamipride se dégrade rapidement. Elle a été autorisée par l’Anses, qui lui a d’ailleurs attribué la mention abeille il y a quelques décennies. Malgré les contre-vérités que vous assénez, les agriculteurs ont besoin de ce produit pour sauver les filières agricoles, en attendant de trouver des substituts.
M. Dominique Potier (SOC). Certains prétendent que le maintien de l’interdiction de l’acétamipride conduira à une apocalypse pour les agriculteurs ; d’autres, que c’est son autorisation qui sera fatale pour les abeilles et la nature. La seule solution est de s’en remettre à une agence indépendante pour mesurer l’impact réel de cette substance. C’est cela, une démocratie moderne.
Si notre commission vote en faveur d’une autorisation à titre dérogatoire, notre groupe propose une règle simple : l’autorisation ne pourra être effective qu’après un avis conforme et définitif de l’Anses. Le rapporteur, lui, ne prévoit pas une telle condition.
Venons-en au comité des solutions proposées par le rapporteur. Ce comité identifierait des usages prioritaires à la place de l’Anses, qui devrait lui rendre des comptes. Notre proposition de créer un conseil d’appui à la protection des cultures est significativement différente. Un tel conseil constituerait un espace de dialogue entre les chercheurs, les responsables du régime d’autorisation et les producteurs. L’Anses et le conseil resteraient indépendants. Il est capital qu’ils ne soient pas redevables l’un de l’autre.
Mme Delphine Batho (EcoS). Merci, monsieur le rapporteur, pour votre avis favorable sur le II de mes amendements, qui vise à interdire la production, le transport et le stockage des substances actives interdites dans l’Union européenne. Nous y reviendrons.
Les questions de concurrence déloyale sont pour nous centrales. Nous avions déposé des amendements visant à introduire un titre dédié dans le présent texte, mais ils ont été déclarés irrecevables. C’est pourtant l’une des principales revendications des agriculteurs, avec celle concernant leur revenu.
La révision de la limite maximale de résidus de l’acétamipride que vous mentionnez date du début de 2024. Le réexamen de l’autorisation de cette molécule, en revanche, date de décembre 2024. La France, qui demande l’interdiction de cette molécule à l’échelle européenne, a fourni des preuves à l’appui de sa demande, mais l’Efsa a décidé de les écarter. C’est un problème.
Enfin, en matière de perturbateurs endocriniens, la dose ne fait pas le poison. Ce qui compte, c’est le moment de l’exposition. Une exposition in utero à l’acétamipride a des conséquences neurotoxiques.
Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Les défenseurs de l’acétamipride arguent que cette substance serait moins toxique pour les abeilles que les solutions alternatives prohibées. Mais cet argument ne vaut que si la molécule est évaluée seule et sur le court terme, sans prendre en compte les effets cocktail. Certains cocktails utilisés dans les formules commerciales de l’acétamipride et des autres néonicotinoïdes augmentent la toxicité pour les abeilles.
M. Thierry Benoit (HOR). Si j’ai voté contre la suppression de l’article 2, c’était pour permettre sa réécriture. Nous devons garantir l’indépendance de l’Anses. Quant au problème des drones, il semble réglé par la loi Fugit.
L’interdiction totale des néonicotinoïdes en 2018 met quelques filières dans l’impasse. Je souhaite qu’une dérogation soit possible, mais uniquement si l’indépendance totale de l’Anses est garantie. La version initiale du présent texte est allée beaucoup trop loin en la matière. À nous, avec la ministre de l’agriculture, de préciser les conditions de la dérogation – ses bénéficiaires, ses motifs et sa durée – d’ici l’examen du texte dans l’hémicycle.
M. Julien Dive, rapporteur. Madame Batho, peu importe que l’Efsa ait abaissé la limite maximale de résidus de l’acétamipride avant ou après la demande de réévaluation de l’autorisation de cette molécule. Nous sommes d’accord pour dire qu’il faut faire confiance à la communauté scientifique.
Par ailleurs, vous ne pouvez pas, d’un côté, demander l’indépendance de l’Anses, de l’autre, vous ingérer en tant que décisionnaire politique dans le choix d’autoriser ou d’interdire des molécules. Cela pourrait conduire à des dérives.
Si l’Efsa réévalue les seuils, tant mieux. Si demain, sur avis de l’Efsa, la Commission européenne interdit l’acétamipride au même titre que les autres néonicotinoïdes, la décision s’appliquera à l’ensemble des pays de l’Union européenne. Pour l’heure, cette molécule est autorisée jusqu’en 2033, avec des aménagements au fil de l’eau. Cela montre que l’autorisation n’est pas accordée aveuglément.
Si la molécule se retrouve dans le corps humain, des nourrissons aux adultes, c’est aussi à cause de l’effet cocktail, notamment des produits à usage domestique – en commission du développement durable, vous avez d’ailleurs fait amender le présent texte concernant la composition des produits biocides. De fait, certains biocides d’usage domestique – insecticides, traitements anti-tiques et anti-puces pour chats et chiens – comportent les mêmes molécules qu’en agriculture, parfois même des molécules dont l’usage agricole est interdit depuis belle lurette. Les résidus dans le corps humain que vous mentionnez proviennent peut-être aussi de tels produits.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques CE9 de Mme Delphine Batho, CE135 de M. Richard Ramos, CE369 de M. Loïc Prud’homme, CE511 de M. David Taupiac, CE601 de M. Dominique Potier, CE646 de M. Jean-Luc Fugit et CE784 de M. Pascal Lecamp, amendement CE302 de Mme Delphine Batho (discussion commune)
Mme Delphine Batho (EcoS). Nous proposons de supprimer les alinéas 1 à 9, car nous refusons l’ingérence des décideurs politiques et des firmes de l’agrochimie dans les travaux de l’Anses.
En effet, ces alinéas prévoient que le directeur général de l’Anses devra informer ses autorités de tutelle avant de prendre une décision, alors qu’actuellement, l’Anses n’informe les ministres qu’après avoir évalué les risques et décidé d’accorder ou non une autorisation de mise sur le marché. Vous revenez ainsi sur la loi du 13 octobre 2014. Cette confusion est très grave.
Nous refusons également la fixation d’usages prioritaires prévue dans ces alinéas.
M. Richard Ramos (Dem). Il ne faut toucher à la loi que d’une main tremblante. La question de l’acétamipride est complexe. Sans cette molécule, les agriculteurs sont dans l’impasse, mais la science nous dit que c’est un neurotoxique – et ce n’est pas pour les abeilles que je m’inquiète, car pour elles, le danger est au pire très lointain.
Je regrette que nous n’ayons pu examiner des amendements tendant à interdire l’importation de produits issus d’une agriculture recourant à cette molécule. C’est le nerf de la guerre. Les agriculteurs pourraient se passer de l’acétamipride, quitte à produire moins, s’ils n’avaient pas à faire face à une telle concurrence.
La FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles) a donné consigne aux agriculteurs de murer la permanence de députés Modem et de se rendre à leur domicile. C’est inadmissible en République. Monsieur Rousseau, ressaisissez-vous !
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). Je reviens à ce que nous disait ici même le directeur général de l’Anses le 25 mars : « Le changement qui suivrait un texte adopté change mon contrat et donc, pour moi, il n’y a plus de possibilité de rester directeur général de l’agence. C’est très simple. Ça engagera les futurs. »
Il faut absolument supprimer toutes ces velléités d’imposer quelque contrôle que ce soit aux décisions de l’Anses. Elles sont inacceptables. Les processus d’autorisation de mise sur le marché sont certes perfectibles, mais l’indépendance de l’agence doit rester garantie.
M. David Taupiac (LIOT). Je suis surpris que ceux qui se sont évertués à supprimer de nombreux comités dans la loi de simplification de la vie économique veuillent créer ici un conseil d’orientation, qui vient semer le trouble. Il faut soit que nous en restions, comme je le propose, au dispositif actuel pour l’Anses, soit que le ministère reprenne la main et assume les décisions. L’entre-deux ne va pas dans le sens de la simplification. Qui plus est, la participation de certains acteurs de l’industrie phytopharmaceutique à ce conseil pourrait être source de conflits d’intérêts.
M. Dominique Potier (SOC). Même argument. Cette mesure est peut-être la plus grave de cette proposition de loi Duplomb, qui a pu être présentée comme une contre-révolution culturelle en matière d’agroécologie. L’indépendance de la science, qui est l’un des socles de cette dernière, est ici méprisée et fragilisée. La solution proposée est, en outre, assez perverse, car elle désengage totalement le politique pour confier à l’Anses une décision contraire à l’intérêt général. C’est absolument insupportable.
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Les alinéas 1 à 9 risquent de fragiliser la gouvernance de la sécurité sanitaire, à laquelle contribue l’action de l’Anses. Il faut préserver l’indépendance de cette dernière face à toute tentative qui pourrait être mal interprétée, voire dangereuse.
M. Pascal Lecamp (Dem). Afin que l’Anses continue à fonctionner comme aujourd’hui, le groupe Démocrates souhaite supprimer des dispositions potentiellement contraires à la mission majeure de l’agence, qui est d’éclairer la décision publique : obligation d’information préalable des ministères de tutelle au sujet des décisions prises par le DG, capacité d’autosaisine du comité de suivi des AMM, logique contradictoire applicable aux décisions de rejet des demandes d’AMM.
Mme Delphine Batho (EcoS). Mon amendement CE302 est en quelque sorte un amendement de repli.
M. Julien Dive, rapporteur. Nous convergeons en partie sur la finalité, mais divergeons sur la manière. Je suis favorable à la suppression de certains des alinéas qui font l’objet des amendements examinés, et j’ai moi-même déposé des amendements en ce sens. C’est notamment le cas pour l’information préalable de l’ensemble des ministères de tutelle, car, comme en a témoigné le DG de l’Anses, il s’agirait alors de faire remonter à ces ministères plusieurs milliers d’informations – il a évoqué le chiffre de 2 000 –, étant donné que le Masa ne serait pas seul concerné, mais aussi, par exemple, les ministères de la santé ou de la transition écologique, ce qui créerait nécessairement un engorgement et une entrave aux travaux de l’Anses. La question ne me semble pourtant intéresser que le Masa, d’où mon amendement CE743. Quant à mon amendement CE797, il concerne la définition des usages prioritaires par le comité des solutions.
Cependant, la reconnaissance mutuelle n’est abordée nulle part dans nos débats. Or, aujourd’hui, lors d’une demande d’AMM – que ce soit pour un produit de synthèse ou pour une solution de biocontrôle, laquelle, en raison d’un règlement européen, est soumise au même parcours du combattant au niveau européen, ce qu’il faudra revoir à cette même échelle –, les agences concernées ne se focalisent pas toujours sur les mêmes questions. Mieux vaudrait, pour accélérer la démarche, que les dossiers soient les mêmes d’un pays à l’autre et que l’Anses puisse demander des documents complémentaires pour reconnaître le travail réalisé dans un autre pays. Cela suppose toutefois que l’alinéa 9 ne soit pas supprimé.
Je demande donc le retrait des amendements. À défaut, avis défavorable.
M. Henri Alfandari (HOR). Je ne vois toujours pas pourquoi le fait de demander une information poserait problème. Il n’est pas question, en effet, de contraindre la décision de l’Anses, qui reste souveraine. L’autosaisine du comité de suivi est, en revanche, plus problématique.
M. Dominique Potier (SOC). Monsieur le rapporteur, je salue votre volonté de dialogue sur ces demandes de suppression qui viennent de quasiment tous les groupes. Le coupe-file dont bénéficie le biocontrôle et l’épidémio-phytopharmacovigilance sont des innovations françaises qui produisent de vrais résultats et qui mériteraient d’être portées à l’échelle européenne.
J’entends vos réserves quant à la suppression de l’alinéa 9 et je prends l’engagement que nous soutiendrons votre initiative en faveur de la reconnaissance mutuelle pour accélérer la sortie des impasses et des situations de concurrence déloyale – nous pouvons y travailler ensemble en vue de la séance publique. Nous souhaitons toutefois supprimer cet alinéa 9, qui est le cœur de la proposition de loi, ce qu’elle a de plus toxique pour l’indépendance de la science.
M. Lionel Tivoli (RN). N’exagérons pas ! L’article 2 ne supprime pas l’Anses et ne la contourne pas : il permet simplement à l’État de prendre en compte ses avis sans s’y soumettre aveuglément – comme Météo-France, qui fournit des prévisions et qui alerte, mais à qui il ne revient pas de décider de fermer une école ou d’annuler un marché, car cela relève des autorités publiques. L’article permet de s’appuyer sur la science tout en tenant compte des réalités économiques, agronomiques et territoriales. La France est le seul pays d’Europe qui transforme un avis scientifique en interdiction automatique. Pendant ce temps, l’Allemagne, l’Espagne et la Belgique continuent de produire avec les mêmes outils. Supprimer ces alinéas reviendrait donc à dire aux agriculteurs qu’ils seront les seuls en Europe à ne pas pouvoir se défendre. Nous voterons contre ces amendements, car faire confiance à la science, ce n’est pas s’interdire de réfléchir : c’est aussi savoir quand il faut protéger ceux qui nourrissent la France.
Mme Anne-Laure Blin (DR). L’Anses suscite de fortes critiques, car elle illustre l’agencification de l’État. J’ai mené cette bataille lors de l’examen du texte relatif à la simplification de la vie économique et je continuerai. Un grand verger de ma circonscription se réjouit que ce texte permette enfin d’obliger l’Anses à communiquer avec ses autorités de tutelle pour s’assurer que ses travaux soient en phase avec les attentes des agriculteurs. C’est essentiel, car cette agence est hors de tout contrôle démocratique depuis 2015. Il faut qu’elle soit pilotée, car elle multiplie les interdictions franco-françaises et décourage, par son zèle, les demandes d’autorisation de solutions phytosanitaires. En tout état de cause, le texte permet déjà une première avancée, qui mérite d’être soutenue.
M. Richard Ramos (Dem). On voit ici une tentative dangereuse pour mettre du politique dans la science, alors que c’est la science qui doit éclairer le politique. Il y a dans cette salle très peu de vrais scientifiques et nous avons besoin de nous appuyer sur la science, mais celle-ci ne doit pas être en relation trop forte avec le politique, pour ne pas être influencée et perdre son indépendance. Le règlement interne de l’Anses set déjà assez compliqué – ce ne sont pas les chercheurs qui rédigent, mais un rapporteur, ce qui peut susciter des conflits avec les chercheurs, certains ayant même démissionné à la publication de certains rapports de l’Anses. Protégeons l’Anses et protégeons-nous en ne nous mêlant pas de science, tout en nous appuyant sur celle-ci pour prendre des décisions politiques.
Mme Delphine Batho (EcoS). La rhétorique idéologique qui s’exprime à l’encontre de l’Anses ressemble terriblement au discours que l’on entend actuellement aux États-Unis contre les agences fédérales dans divers domaines.
Par ailleurs, l’Anses évalue les risques en fonction d’éléments graves touchant par exemple la santé humaine, l’environnement ou l’eau potable et justifiant un retrait de l’AMM. Or, les dispositions de la proposition de loi l’empêcheraient de le faire en lui imposant d’informer ses ministres de tutelle, lesquels n’ont évidemment pas le même point de vue sur la question, de telle sorte que ce serait, au bout du compte, une réunion interministérielle qui déciderait de l’autorisation de mise sur le marché. Si tel est le cas, les ministres devront en porter la responsabilité pénale, conformément aux conclusions d’un rapport d’inspection de décembre 2007 selon lequel, compte tenu de l’état des connaissances scientifiques quant à l’impact des pesticides sur la santé, la responsabilité pénale des pouvoirs publics était désormais engagée. Il me semble donc qu’il vaut mieux supprimer les alinéas 1 à 9.
Mme Manon Meunier (LFI-NFP). À ceux qui accusent la gauche d’un excès de zèle, je rappelle que, lors de son audition, Phyteis – anciennement Union des industries de la protection des plantes –, association professionnelle qui réunit dix-huit entreprises fournissant des produits phytosanitaires et des pesticides, et qui n’est donc pas un lobby proche de la gauche, s’est, elle aussi, inquiétée de la mise sous tutelle de l’Anses, pour des raisons qui sont également économiques. Selon ces industriels, en effet, la création du conseil d’orientation introduit un biais politique et les décisions prises par ce conseil pourraient, en fonction des ministères qui y siègent, nuire à l’indépendance des choix de l’Anses en matière de pesticides, donc éventuellement aussi à Phyteis et aux professionnels fournisseurs de produits phytosanitaires. Nous devons absolument nous en tenir à des analyses scientifiques.
M. Julien Dive, rapporteur. Je confirme. Nous pouvons tous en convenir, quelles que soient nos obédiences politiques : si le politique décide de ce qui est autorisé sur le marché, nous pourrions tous y trouver à redire au gré des changements de majorité parlementaire et de gouvernement, certains pouvant être plus enclins à tout autoriser et d’autres à tout interdire. Faisons donc confiance aux scientifiques.
D’ailleurs, la préservation de l’autonomie de l’Anses devrait rassurer certains au sujet des AMM qu’elle pourrait délivrer pour l’acétamipride et les dissuader de s’opposer à la fin de l’article 2…
Je répète que je ne suis pas en désaccord sur le fond avec l’intégralité de vos arguments. C’est pour alléger les procédures que j’ai insisté sur la reconnaissance mutuelle, d’un commun accord avec certains collègues de différents groupes. Il serait regrettable d’adopter les amendements de suppression d’alinéas que j’étais prêt à étudier un par un avec vous. Je maintiens donc mon avis défavorable et défendrai la reconnaissance mutuelle au fil de vos interventions.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, l’amendement CE302 tombe, ainsi que tous les amendements se rapportant aux alinéas 1 à 9.
Amendements CE484 et CE485 de M. Hervé de Lépinau (discussion commune)
M. Hervé de Lépinau (RN). Ils portent sur le problème de la surtransposition ou de la restriction normative qu’imposerait l’Anses, qui est juge et partie. L’Anses devrait rester dans sa mission de conseil scientifique, sur la base de quoi il incomberait au politique de prendre ses responsabilités. Que la gauche se rassure : vous savez si bien terroriser les gens que de nombreux ministres y auraient regardé à deux fois !
L’amendement permet une approche plus raisonnée des AMM, en tenant compte du principe selon lequel il ne doit pas y avoir d’interdiction sans solution. Je rappelle que l’Assemblée nationale avait voté, la main sur le cœur, une motion visant à mettre fin aux surtranspositions afin de rétablir un équilibre pour nos agriculteurs dans la compétition européenne. Il faut maintenant passer des paroles aux actes.
L’amendement CE485 est un amendement de repli. Depuis qu’elle est devenue responsable des AMM des produits phytopharmaceutiques, en 2014, l’Anses a fréquemment procédé à des surtranspositions des normes européennes, qui se sont traduites par des contraintes réglementaires disproportionnées pour les agriculteurs français, une dégradation de notre compétitivité agricole et une perte de plusieurs milliards d’euros pour le secteur. En forçant au niveau législatif un alignement sur le reste de l’Union européenne, nous pourrons mettre fin à une décennie d’interdictions abusives de produits phytopharmaceutiques.
M. Julien Dive, rapporteur. Ces amendements, qui suppriment le principe d’évaluation dès lors qu’une substance est autorisée dans un pays de l’Union européenne, suppriment aussi l’évaluation par l’Anses. Or, selon le règlement européen actuellement en vigueur, lorsqu’une reconnaissance mutuelle est engagée, cette évaluation est nécessaire. Les amendements étant ainsi contraires au droit européen, je ne peux émettre qu’un avis défavorable.
Mme Delphine Batho (EcoS). Ces amendements représenteraient un abandon de souveraineté de la France – ce qui, compte tenu de leurs autrices et auteurs, mérite d’être noté. De fait, la France ne pourrait qu’appliquer les décisions des autres pays de l’Union européenne, ce à quoi nous nous opposons. La France doit pouvoir décider, puis prendre des mesures visant à ce que ses décisions soient reprises à l’échelle européenne. Notre pays doit protéger son marché intérieur de l’importation de denrées utilisant des pesticides qu’il a interdits.
M. Dominique Potier (SOC). Il ne s’agit pas ici, à proprement parler, de surtransposition, car la loi donne aux nations, par le biais de leurs agences, la possibilité de délivrer une autorisation pour les produits, les substances étant, quant à elles, traitées à l’échelle européenne. Il peut y avoir, en revanche, des distorsions de concurrence, sur lesquelles nous pourrons revenir et qui font l’objet de diverses propositions. Nous devons néanmoins nous garder des abus de langage dans cette bataille idéologique.
Par ailleurs, notre commission d’enquête sur les produits phytosanitaires a notamment proposé un régime d’autorisation des produits et des substances unifié à l’échelle européenne, filière par filière, bien sûr, et en tenant compte des contextes pédoclimatiques. Cette solution a, du reste, été évoquée comme une perspective possible par la ministre Genevard à l’occasion d’un congrès syndical. Cela pourrait faire l’objet d’un débat public intéressant.
M. Hervé de Lépinau (RN). Je suis très attaché au principe de subsidiarité : l’Europe fixe un principe, que la France peut adapter en fonction de ses intérêts hexagonaux. Nous constatons toutefois que l’Anses joue systématiquement contre son camp. Dans le Vaucluse, du fait de l’interdiction par l’Anses, nous avons ainsi perdu la lavande, nous sommes en train de perdre la cerise et nous allons perdre la fraise. Si vous voulez que la France ne soit plus qu’un immense désert agricole, continuons dans ce sens ! Nous sommes confrontés à une compétition intra-européenne avec des pays membres qui continuent d’utiliser des molécules que l’Anses interdit en France. Cela témoigne d’un dysfonctionnement, dans lequel, du reste, le DG de l’Anses, lorsque nous l’avons auditionné, a considéré qu’il n’avait aucune responsabilité, ce qui est particulièrement inquiétant.
Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Il est savoureux de lire un amendement du Rassemblement national visant à promouvoir l’alignement sur la réglementation en vigueur dans les autres pays membres de l’Union européenne – un Rassemblement national pro-Europe ! Alors que nous avons en France des normes d’excellence dans le domaine de l’environnement et de la santé, et qu’on ne cesse de nous présenter comme l’un des modèles agricoles les plus vertueux au monde, vous proposez de nous aligner sur le moins-disant international. Soit vous êtes complètement incohérents et faites la promotion à la fois d’un protectionnisme qui protège les agriculteurs et du libre-échange qui permet de faire n’importe quoi dans le pays, soit vous êtes favorables au libre-échange et ne défendez que l’agro-industrie, qui se développe en encourageant l’alignement sur les normes les moins-disantes à l’international pour être toujours plus compétitifs, au détriment des agriculteurs et des agricultrices.
M. Julien Dive, rapporteur. Indépendamment du fond, je comprends le souhait de M. de Lépinau de favoriser des substances qui sont autorisées un peu partout en Europe – on retrouve d’ailleurs là le débat sur l’acétamipride comme sur la reconnaissance mutuelle. Toutefois, cet amendement ferait sortir l’Anses de sa mission, qui est aussi d’écarter de l’autorisation de mise sur le marché des substances interdites dans d’autres pays européens.
Mon argument principal est néanmoins que ces amendements sont contraires au droit européen et que la Commission européenne pourrait reprocher à la France un manquement à cet égard. Avis défavorable, donc.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements CE620 de M. Robert Le Bourgeois et CE796 de M. Julien Dive (discussion commune)
M. Robert Le Bourgeois (RN). Mon amendement vise à revenir à la rédaction initiale du texte. Personne ici ne s’oppose au développement de solutions alternatives viables et efficaces aux produits phytopharmaceutiques : ce qui nous divise, ce sont le plus souvent des questions de méthode ou d’agenda. En l’occurrence, la position du Rassemblement national est claire et ne change pas : pas de suppression sans alternative. Or, l’expérience a malheureusement montré que les agriculteurs – notamment dans la filière sucrière et dans celles des noisettes et des pommes et poires – pouvaient être privés de certains produits au moment même où ils en avaient le plus besoin et sans qu’aucun horizon leur soit proposé. Quelle que soit l’issue de ce texte, il paraît donc fondamental d’offrir à nos agriculteurs la garantie que, si ce zèle normatif devait se poursuivre ou revenir, l’État serait tenu de financer véritablement la recherche d’alternatives acceptables.
M. Julien Dive, rapporteur. Monsieur Le Bourgeois, je souscris pleinement à l’idée qu’il est nécessaire d’avoir des moyens d’accompagnement et de recherche d’alternatives en cas d’interdiction ou d’arrêt de l’utilisation d’un produit ou d’une substance au niveau national.
Votre amendement comporte cependant une deuxième partie, que vous n’avez pas évoquée et qui crée, en matière de décision, une confusion des rôles entre l’Anses et le ministère de l’agriculture.
Je vous propose donc plutôt de vous replier sur mon amendement CE796, qui vise – sans injonction, bien sûr, pour ne pas tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution – à ce que l’État se donne les moyens d’accompagner les filières et la recherche en cas d’interdiction.
Nous en avons des exemples concrets. Le plan national de recherche et d’innovation (PNRI), issu de la loi Denormandie et faisant intervenir notamment l’Institut technique de la betterave (ITB) et l’Inrae, a été doté de 7,2 millions d’euros pour la période 2020-2024 et de 4 millions de plus jusqu’à 2027 pour travailler sur des alternatives pour la filière unique de la betterave. Je pense aussi au Parsada (plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures), doté d’une enveloppe de 140 millions d’euros. Mais comme nous ne maîtrisons pas les coups de rabot successifs que peuvent opérer les projets de loi de finances, il convient d’inscrire dans la loi la volonté de l’État de mettre les moyens sur la table.
Mme Delphine Batho (EcoS). Nous ne comprenons pas que ces amendements aient été déclarés financièrement recevables, alors que certains des nôtres ont été déclarés irrecevables en vertu de l’article 40 de la Constitution. L’amendement CE620, par exemple, prévoit bien une obligation financière pour l’État.
Sur le fond, nous ne leur sommes pas favorables. En cas de retrait de produits dangereux, les agricultrices et les agriculteurs doivent évidemment être accompagnés. Toutefois, beaucoup d’argent public a été engagé depuis l’interdiction des néonicotinoïdes et, lors de l’examen de la précédente loi – avant la censure de la Cour de justice de l’Union européenne –, vous affirmiez que vous aviez seulement besoin de trois ans et qu’avec tout cet argent, vous alliez trouver des solutions et changer les pratiques. Et voilà que les mêmes filières viennent aujourd’hui demander à l’Assemblée nationale le retour des néonicotinoïdes ? Nous ne pouvons pas suivre cette logique.
Mme la présidente Aurélie Trouvé. Pour ce qui est de la recevabilité financière, nous avons suivi strictement les avis du président de la commission des finances.
Mme Anne-Laure Blin (DR). L’État français ne doit pas prendre des mesures franco-françaises et il n’est pas admissible de partir du principe qu’il va continuer à interdire certaines molécules – ce n’est du reste pas ce que souhaitent les agriculteurs. Par ailleurs, le rôle de l’État n’est pas de mener les recherches sur les solutions alternatives, mais d’accompagner les agriculteurs, ainsi que les entreprises qui font de la recherche et du développement, bridées dans cet effort par des mesures imposées par l’État et par notre législation. Il faut un accompagnement de nos forces vives plutôt qu’un interventionnisme étatique dans le domaine de la recherche et du développement, qui n’est pas une solution pérenne.
M. Dominique Potier (SOC). À la tribune de notre assemblée, lors de la discussion générale sur la loi réintroduisant par dérogation les néonicotinoïdes pour les betteraves, en décembre 2020, j’ai demandé à Julien Denormandie, ministre de l’agriculture, s’il pouvait produire les comptes rendus des comités scientifiques, conseils de surveillance et autres comités des solutions consacrés à la filière betterave entre 2016 et 2020. La réponse a été un silence assourdissant du ministre : ils n’avaient pas travaillé.
Je comprends l’esprit de ce qui est proposé, mais il faudrait y ajouter au moins deux éléments. Tout d’abord, que l’État, au lieu d’accorder des compensations après coup, engage une politique de prévention avant les interdictions, car on connaît deux ou trois ans à l’avance les produits visés. Il faudrait aussi recourir aux fonds européens prévus pour accompagner ces transitions et qui sont sous-utilisés par la France.
Nous nous abstiendrons sur ces amendements incomplets.
M. Hervé de Lépinau (RN). Ces amendements mettent en évidence le problème gravissime que va poser aux agriculteurs la multiplication des non-renouvellements d’AMM. Face à l’incertitude entourant la commercialisation de ses produits, l’industrie phytopharmaceutique risque de renoncer à financer sa R&D ou de ne plus en être capable ; charge alors à l’État de compenser.
Petit à petit, l’agriculture sans phyto va devenir une agriculture sans agriculteurs, incapable de nourrir les populations – le bio en est un bon exemple. C’est le changement de paradigme voulu par les écolos.
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). Entre l’extrême droite et Mme Blin, c’est un concours de propos délirants. Vous considérez que seule la R&D peut proposer des solutions, parce que vous partez du principe qu’il faut absolument un produit. Mais pourquoi faudrait-il impérativement remplacer une molécule sale par une autre dont on découvrira peut-être à l’avenir qu’elle a elle aussi des effets délétères sur la santé et l’environnement ? Il existe pourtant d’autres solutions pour la quasi-totalité des filières, comme l’ont montré les études de l’Inrae – notamment celle de la betterave, dont nous avions plus particulièrement débattu. Mais peut-être Mme Blin veut-elle aussi supprimer l’Inrae dans le cadre du projet de loi de simplification ? Il faut vraiment en finir avec ces discours qui discréditent la recherche publique et cherchent à nous faire financer la R&D des producteurs de produits phytosanitaires.
M. David Taupiac (LIOT). L’Inrae, qui travaille en bonne intelligence avec l’Anses, a souligné l’importance de maintenir le budget consacré au Parsada – en baisse cette année –, qui permet de soutenir la recherche publique et d’accompagner les filières, comme celle de la noisette, dans la recherche de solutions pour remplacer les produits qui seront interdits dans les prochaines années. Je suis donc tout à fait favorable à l’amendement du rapporteur.
M. Julien Dive, rapporteur. Madame Blin, je ne crois pas que vous soyez opposée au financement de la recherche et à des outils comme le crédit d’impôt recherche. Or, l’objectif de mon amendement est bien d’assurer l’accompagnement financier de la recherche, qu’elle soit menée par des instituts techniques, des entreprises privées ou des instituts publics comme l’Inrae, pour trouver des solutions de remplacement. Ces solutions peuvent certes être des produits de synthèse, mais la R&D, monsieur Prud’homme, peut également permettre de trouver des solutions bio ou de biocontrôle.
Il ne s’agit pas ici d’accorder des mesures réparatrices ou compensatoires. Mais, à partir du moment où l’interdiction de l’utilisation d’un produit par l’État laisse une filière dans l’impasse, comme c’est arrivé avec la betterave, mais aussi la noisette, le navet ou les arbres fruitiers, il est normal qu’il accompagne la recherche de solutions de remplacement. Mon amendement ne fait que sanctuariser une pratique qui existe, mais n’a pas été systématiquement appliquée pour toutes les filières.
La commission rejette l’amendement CE620.
Elle adopte l’amendement CE796.
Amendements identiques CE25 de Mme Delphine Batho et CE377 de Mme Mathilde Hignet
Mme Delphine Batho (EcoS). Cet amendement tend à abroger la loi autorisant l’épandage par drone.
Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). En poussant à toujours plus de mécanisation – en l’espèce, en incitant au recours aux drones –, la logique « robotique, génétique, numérique » freine l’autonomie des agriculteurs. Il faut absolument repenser l’usage de l’agroéquipement, tourné vers les profits du machinisme agricole, pour en faire un levier réel de la transition agroécologique.
M. Julien Dive, rapporteur. Nous en avons déjà débattu il y a quelques mois à l’occasion de l’examen de la proposition de loi de Jean-Luc Fugit visant à autoriser le recours à l’épandage par drone dans certaines conditions. Avis défavorable.
M. Hervé de Lépinau (RN). Pour notre part, nous considérions que cette proposition de loi n’allait pas assez loin, mais il faut un début à tout. La technologie est toujours au service de l’humain : l’usage de drones permet de consommer moins de produit, puisque le traitement est beaucoup plus précis, et d’éviter à l’opérateur d’être directement à son contact, ce qui est bénéfique pour nos agriculteurs. Comme toujours, les écolos tiennent un double discours : en réalité, ils refusent le progrès et la science.
Non seulement le drone sera un auxiliaire utile, mais en plus il coûte beaucoup moins cher qu’un tracteur de 350 chevaux. Nous savons tous que nombre de nos agriculteurs sont des smicards qui roulent en Ferrari…
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Je rappelle que nous avons beaucoup restreint l’usage des drones en le limitant à l’épandage de certains produits – produits de biocontrôle, autorisés en agriculture biologique ou à faible risque. N’oublions pas que l’objectif est de réduire la pénibilité du travail, c’est-à-dire la difficulté physique, mais aussi le contact avec les produits phytosanitaires.
Contrairement à ce que vous pensez, madame Hignet, ce débat transcende les clivages politiques. À l’image de Perceval Gaillard, votre collègue de La Réunion, la plupart des députés ultramarins sont favorables au texte que j’ai défendu, car l’épandage par drone de produits de biocontrôle ou autorisés en agriculture biologique est très intéressant, notamment pour lutter contre la cercosporiose noire, une maladie qui touche les bananeraies, sans imposer aux agriculteurs de manipuler ou d’inhaler des produits très dangereux pour leur santé.
Mme Delphine Batho (EcoS). À plusieurs reprises, un collègue a fait référence à notre groupe en usant d’un langage familier. Nous sommes restés d’un calme olympien, mais je tiens à rappeler que les familiarités n’ont pas leur place dans cette commission. Nous nous appelons « les écologistes » ou le groupe Écologiste et social.
Nous sommes favorables à une interdiction stricte de l’épandage aérien, dont l’expérimentation n’avait pas été jugée totalement concluante par l’Anses, notamment en raison du risque de dérive des produits qui pourrait affecter les riverains. Il ne nous paraît donc pas pertinent de généraliser cette technique.
M. Julien Dive, rapporteur. J’étais pour ma part favorable au texte de Jean-Luc Fugit. Le Sénat avait choisi d’en reprendre les dispositions quasiment à l’identique dans son texte initial – seul le seuil de pente a été modifié – pour les sécuriser, mais puisque la loi a désormais été promulguée, je proposerai, comme d’autres, de supprimer les alinéas 12 à 24.
Ces outils vont dans le sens de l’histoire. Ils ont vocation à accompagner le monde agricole en permettant aux agriculteurs de s’affranchir du machinisme et de se passer de la phase de traitement préventif au profit du seul traitement curatif.
Le recours à l’épandage aérien est bien encadré ; nous pourrions aller beaucoup plus loin, mais ce n’est pas l’objet du texte. Commençons par appliquer les dispositions de la loi Fugit, qui seront évaluées dans trois ans.
La commission rejette les amendements.
Amendements CE534 et CE26 de Mme Delphine Batho (discussion commune)
Mme Delphine Batho (EcoS). Ils visent à rétablir la pleine interdiction des néonicotinoïdes en abrogeant les dispositions ad hoc de la loi de 2020, censurées de fait par la Cour de justice de l’Union européenne. À l’époque, il ne s’agissait pas d’autoriser l’acétamipride, mais des substances interdites à l’échelle européenne. Aujourd’hui, vous voulez autoriser l’acétamipride et le flupyradifurone – le rapporteur n’a pas parlé de cette deuxième molécule, mais elle est bien concernée par le texte. À l’inverse, nous proposons de revenir aux dispositions de la loi Egalim 1.
M. Julien Dive, rapporteur. Avis défavorable. L’adoption de votre amendement conduirait à supprimer l’ensemble des dispositions de la loi Denormandie, dont certaines sont toilettées dans le texte et font l’objet d’amendements. Entre autres choses, vous supprimeriez le Conseil de surveillance, qui me semble utile – j’y reviendrai.
J’ajoute que le flupyradifurone comme le sulfoxaflor – dont l’AMM, délivrée par l’Anses, avait été attaquée au tribunal avant d’être définitivement accordée – ne sont pas des néonicotinoïdes à proprement parler ; ils présentent seulement le même mode d’action. Si le flupy venait à être interdit sur la base de données scientifiques, son AMM serait alors retirée. Et j’en profite pour préciser que nous sommes tous attachés à l’indépendance de l’Anses, j’en veux pour preuve l’adoption d’amendements en ce sens tout à l’heure.
Mme Hélène Laporte (RN). Nous voterons contre ces amendements.
Les néonicotinoïdes à usage vétérinaire, soumis à une AMM délivrée par l’Agence nationale du médicament vétérinaire – une agence placée sous la tutelle de l’Anses –, restent autorisés, notamment parce qu’ils ne sont appliqués que localement. Certains colliers pour chiens et chats contiennent ainsi de l’imidaclopride, une substance 4 000 fois plus toxique que l’acétamipride. Elle se retrouve de fait, à travers nos animaux domestiques, directement au cœur de nos foyers, et ce n’est pas considéré comme un problème. Vous craignez que la réautorisation de l’acétamipride ne provoque une crise sanitaire majeure ; si on suit votre logique, il faudrait donc élargir l’interdiction des néonicotinoïdes à tous les usages.
Mme Manon Meunier (LFI-NFP). C’est exactement ce que nous demandons !
Mme Delphine Batho (EcoS). Une substance dangereuse l’est évidemment quel que soit l’usage auquel elle est destinée – agricole, domestique, vétérinaire. Les conséquences des pyréthrinoïdes sur la santé humaine, en particulier, sont une source de préoccupation majeure. En toute cohérence, le groupe Écologiste et social a donc déposé un amendement visant à interdire l’utilisation dans les biocides de substances interdites dans les pesticides. Il a été adopté par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et sera discuté après l’article 2.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur, un très bon rapport d’information de Stéphane Travert et Hélène Laporte pour la commission des affaires économiques a montré à quel point le Conseil de surveillance était un échec.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE645 de M. Jean-Luc Fugit et amendements identiques CE745 de M. Julien Dive, CE15 de Mme Delphine Batho, CE129 de M. Dominique Potier, CE378 de M. Loïc Prud’homme, CE512 de M. David Taupiac, CE586 de M. Julien Brugerolles et CE786 de M. Pascal Lecamp (discussion commune)
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Mon amendement vise à supprimer les alinéas 11 à 24, qui reprennent des dispositions du texte sur l’épandage par drone adopté à mon initiative. La loi ayant été promulguée le 23 avril, ces alinéas sont donc satisfaits.
S’agissant du risque de dérive pointé par Mme Batho, l’Anses a montré que la concentration de résidus due à la dérive au-delà de 10 mètres est beaucoup plus faible qu’à 5 mètres. En outre, des études de la MSA (Mutualité sociale agricole) ont mis en évidence les bénéfices du recours au drone sur la santé des applicateurs de produits phytosanitaires de l’Ardèche et de la Drôme, où les terrains sont particulièrement pentus.
Enfin, je rappelle que la partie expérimentale de la loi s’appuie sur les travaux de l’Anses – dont nous défendons tous l’indépendance –, qui devra présenter les résultats des essais chaque année à l’Opecst (Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques). Le Parlement suivra donc bien l’application de la loi.
M. Julien Dive, rapporteur. Mon amendement tend également à supprimer les alinéas qui portent sur l’épandage par drone dans les terrains en pente ou cultivés en agriculture biologique, puisque la loi Fugit a été promulguée.
Mme Delphine Batho (EcoS). Quoique pour des raisons opposées, nous demandons également la suppression des alinéas 12 à 24.
Mme Mélanie Thomin (SOC). Si nous ne sommes pas opposés à l’épandage par drone dès lors qu’il facilite les conditions de travail des salariés et travailleurs agricoles de certaines filières, nous sommes en revanche défavorables à la généralisation de cette technique, car tous les risques pointés par l’Anses n’ont pas été complètement écartés.
Nous avons déjà débattu de tous ces sujets lors de l’examen de la proposition de loi Fugit, il n’est pas pertinent d’y revenir.
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). Certains veulent supprimer ces alinéas pour laisser prospérer la loi Fugit ; comme l’a expliqué Delphine Batho, nous, nous voulons interdire l’épandage aérien. Le simple fait d’accoler ces deux mots contrevient au bon sens le plus élémentaire. Les dérives sont un des principaux défauts de cette technique, comme l’ont montré les premiers essais.
M. David Taupiac (LIOT). Les débats il y a quelques mois nous ont permis d’encadrer au mieux cette pratique, à laquelle je suis favorable. Concentrons-nous maintenant sur le cœur de ce texte : la simplification.
M. Julien Brugerolles (GDR). Par principe, nous ne sommes pas opposés au développement de l’agriculture de précision. Mais dans le contexte actuel, le recours à l’épandage par aéronef – notamment par drone –, dont l’un des défauts est le risque de dérive des produits, s’inscrit dans une logique visant à lever petit à petit les obstacles aux usages répétés de pesticides, alors que l’effort devrait porter en priorité sur la recherche d’autres solutions.
M. Pascal Lecamp (Dem). Cet amendement du groupe Démocrates vise à supprimer les alinéas 12 à 24, déjà satisfaits par la loi Fugit, dont les dispositions sont elles-mêmes issues des travaux de notre ancien collègue Pascal Lavergne, que je salue. Elles avaient alors été soutenues par notre collègue Hubert Ott. La seule différence entre la loi Fugit et le texte que nous examinons porte sur le seuil de pente autorisant l’épandage par drone – 20 % pour la première contre 30 % pour le second. Mieux vaut respecter l’équilibre du texte promulgué et nous assurer de son application effective.
M. Julien Dive, rapporteur. Je suis favorable à tous les amendements visant à supprimer ces alinéas, quelle qu’en soit la raison profonde. L’Assemblée nationale évaluera l’application de la loi Fugit.
Par cohérence légistique, je vous demande, monsieur Fugit, de bien vouloir retirer votre amendement CE645, car il supprime aussi l’alinéa 11.
M. Lionel Tivoli (RN). Une fois de plus, la gauche écologiste ne cherche pas à encadrer, mais à interdire. Elle s’en prend cette fois à l’épandage par drone, une technologie pourtant plus ciblée et moins dispersive que les méthodes traditionnelles, et qui est l’une des seules permettant de réduire les doses, de préserver les sols en évitant le tassement et de traiter les terrains où les tracteurs ne passent pas – terrains en pente ou détrempés, vignes, zones sensibles.
Surtout, l’usage des drones est déjà autorisé, dans certaines conditions, en Allemagne, en Espagne et en Italie ; en Asie, l’agriculture de précision est devenue un standard. Pourquoi la France devrait-elle être encore une fois le seul pays à interdire ce que les autres développent ? Il y va de notre souveraineté.
Le RN votera contre ces amendements de blocage qui empêchent le développement d’une agriculture moderne, responsable et compétitive. Ce n’est pas en cassant le drone qu’on fera pousser les cultures plus proprement.
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Monsieur Brugerolles, vos propos sont gênants, pour ne pas dire blessants pour tous ceux qui ont travaillé sur cette loi de progrès social et environnemental. L’objectif était de réduire la pénibilité pour les employés agricoles, qui travaillent dans des conditions difficiles, en particulier lorsque les terrains sont pentus. Je suis navré que le groupe GDR ne s’y montre pas sensible, d’autant que seuls les produits de biocontrôle et les produits à faible risque peuvent être épandus par drone. Le recours au drone permet donc aussi de réduire les conséquences environnementales des produits.
Libre à vous de travestir l’objectif du texte, mais ce n’est pas très honnête intellectuellement. C’est dommage.
Quant à mon amendement, je le retire.
Mme Manon Meunier (LFI-NFP). Puisqu’on parle d’honnêteté intellectuelle, je souligne que l’étude de l’Anses a pointé des faiblesses méthodologiques dans soixante-sept des soixante-quatorze essais menés. Malgré nos demandes répétées pendant l’examen de votre texte, vous ne nous avez jamais indiqué, monsieur Fugit, si vous considériez que dix essais étaient suffisants pour conclure à l’absence de risques de cette technique pour la santé et l’environnement. À nos yeux, ce n’est pas le cas : les travaux de l’Anses doivent se poursuivre, et, en attendant, mieux vaut interdire cette pratique.
Au-delà des données scientifiques, la question est aussi politique : veut-on avant tout améliorer le revenu des agriculteurs pour encourager les vocations ou céder au remplacement par le machinisme agricole ? L’agroéquipement doit faciliter la transition écologique, pas remplacer les agriculteurs.
M. Julien Brugerolles (GDR). Monsieur Fugit, au-delà des risques de dérive, l’étude de l’Anses publiée en 2022 laissait ouverte la question de l’impact de la quantité des dépôts sur les cultures et l’exposition des travailleurs, et soulignait que les niveaux de contamination des mannequins placés à 3, 5 et 10 mètres de la parcelle étaient quatre à six fois plus élevés après application par drone que pour l’atomiseur à dos.
M. Benoît Biteau (EcoS). Vous partez du postulat que, sans pesticides, l’agriculture n’est pas capable de répondre aux besoins. Mais le recours au drone signe une fuite en avant : en tentant de devenir moins dépendants des pesticides, on crée une nouvelle dépendance, à une technologie cette fois.
Essayons plutôt d’imaginer un système dans lequel on se passe des pesticides, donc de toutes les technologies d’application – et on en revient au débat de l’article 1er sur la séparation entre la vente et le conseil. Penser que l’agriculture sans pesticides nous affamera est un biais de raisonnement très dommageable au soutien aux agriculteurs et à la protection de leur revenu et de leur santé.
L’amendement CE645 est retiré.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, tous les amendements se rapportant aux alinéas 12 à 24 tombent.
Amendements CE310, CE311, CE312 et CE313 de M. Nicolas Thierry (discussion commune)
M. Nicolas Thierry (EcoS). Aussi baptisées polluants éternels, les substances per- ou polyfluoroalkylées (PFAS) sont des composés chimiques très persistants engendrant une pollution invisible et massive de l’air, de l’eau, des sols et des aliments. Ils présentent des risques bien documentés pour la santé publique et l’environnement. L’épandage de pesticides contenant des PFAS, qui a triplé en France entre 2008 et 2021 pour atteindre plus de 2 300 tonnes, aggrave directement cette contamination.
Face à ces substances qui empoisonnent durablement nos écosystèmes et nos corps, nous ne pouvons pas rester inactifs. L’amendement CE310 vise donc à interdire les pesticides contenant des PFAS ou dont la dégradation en libère sous forme de métabolites.
Les amendements CE311, CE312 et CE313 visent à interdire spécifiquement trois pesticides utilisés en France et dont la dégradation libère de l’acide trifluoroacétique (TFA), qui est l’un des polluants éternels les plus préoccupants. Il est à l’origine d’une contamination massive de l’eau potable en France. Il est également reconnu comme un perturbateur endocrinien présentant des risques pour le développement cérébral, la santé des femmes enceintes et des nouveau-nés.
Il faut couper au plus vite le robinet de cette pollution. Il y va de notre santé publique et des finances de nos collectivités chargées du traitement de l’eau, qui feront inévitablement face à un mur financier pour assurer la coûteuse dépollution de l’eau potable.
M. Julien Dive, rapporteur. Comme je l’ai déjà expliqué, seule l’Efsa peut décider d’interdire ou d’autoriser l’usage d’un pesticide. Afin de ne pas pénaliser l’agriculture ni créer de distorsion par rapport aux acteurs européens, mieux vaut respecter ce cadre. Je vous demande donc de bien vouloir retirer ces amendements ; à défaut, avis défavorable.
M. Hervé de Lépinau (RN). N’oublions pas que moins une molécule est efficace, plus il faut traiter pour obtenir un résultat équivalent. Dans les vignes cultivées en bio, par exemple, le tracteur doit passer plus souvent ; à défaut, la flavescence dorée ou le mildiou se développent et contaminent les parcelles adjacentes en culture conventionnelle.
Contrairement à ce que vous affirmez, monsieur Biteau, non seulement l’agriculture bio est également consommatrice de produits phytosanitaires, mais en plus, comme ils sont moins efficaces, elle doit en appliquer davantage.
Mme Nicole Le Peih (EPR). Monsieur Biteau, la mécanisation est certainement nécessaire. Mais pour éliminer les adventices avec une herse étrille dans des rangs de maïs séparés de 70 centimètres, il faut que le tracteur passe trois fois. Cela assèche la terre ou, à tout le moins, la tasse, et le ver de terre ne joue plus son rôle d’aération. La consommation de gazole est trois fois plus importante, sans compter le coût du chauffeur. Et le résultat peut être moins bon.
Réduire le recours à certains produits phytopharmaceutiques, soit, mais alors le rendement sera moindre, donc on importera davantage.
M. Benoît Biteau (EcoS). Sortons des impressions et des croyances. Une agriculture qui fait référence à l’agroécologie serait moins productive ? Quand la certification en agriculture biologique est l’aboutissement d’un parcours agronomique, comme cela devrait toujours être le cas, on n’observe pas de différence de productivité.
M. de Lépinau prétend que l’agriculture biologique nécessite beaucoup plus de traitements : je lui rappellerai qu’elle est sévèrement contrôlée et qu’elle est régie par un cahier des charges qui limite drastiquement les doses à utiliser. Surtout, un agriculteur biologique qui fait de l’agronomie part du principe que ce n’est pas parce que certaines molécules sont autorisées qu’il doit les utiliser. Cela fait vingt ans que je suis agriculteur en bio, et je n’ai même pas le Certiphyto, le certificat individuel professionnel produits phytopharmaceutiques. Je n’ai jamais utilisé de molécules, même autorisées. Pourtant, je produis autant que les autres.
Mme Le Peih affirme que les passages de tracteur sont plus nombreux en agriculture biologique et consomment plus de gazole. Je lui rappellerai que pour produire 1 kilo d’azote, il faut 1,5 litre de pétrole : il faut beaucoup de passages de bineuse pour atteindre le niveau de la fertilisation azotée !
M. Éric Martineau (Dem). Il faut tout de même reconnaître que l’agriculture biologique a une production moindre, en tout cas dans les vergers – je peux l’affirmer, puisque je pratique l’agriculture biologique et l’agriculture écoresponsable. Je n’oppose pas les systèmes ; ils sont différents, voire complémentaires. On n’utilise pas les mêmes substances en agriculture biologique, raisonnée ou écoresponsable. Toutefois, je ne peux pas laisser dire que la production est équivalente ; dans nos vergers, elle est au moins moitié moindre alors que notre coût de production est presque deux fois supérieur. J’ajoute que les produits que nous avons le droit d’utiliser ne sont pas tous très bons : par exemple, le Neemazal, l’huile de neem, est un perturbateur endocrinien reconnu.
Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP). Les techniques agroécologiques telles que la rotation et la diversification des cultures ou la polyculture-élevage permettent aussi de limiter les passages, y compris le désherbage mécanique. Il est possible de produire différemment.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE653 de Mme Hélène Laporte
M. Christophe Barthès (RN). Nous souhaitons restaurer dans leur rédaction initiale les dispositions de l’article 2 qui abrogent l’interdiction générale des néonicotinoïdes introduite par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Cela permettrait d’aligner le droit français sur le droit européen, qui autorise encore l’usage de l’acétamipride sous une limite maximale de résidus. Les néonicotinoïdes resteraient en revanche interdits pour les cultures de plein air. Cette rédaction s’impose pour mettre fin à la surtransposition du droit européen relatif aux néonicotinoïdes, qui a conduit de nombreuses exploitations à la faillite. Elle mettra les agriculteurs français sur un pied d’égalité avec leurs homologues italiens, allemands et polonais.
M. Julien Dive, rapporteur. Nous agissons dans un maquis où s’entrelacent le cadre légal, avec la loi de 2016, et le cadre jurisprudentiel, avec la décision du Conseil constitutionnel de 2020 et celle de la Cour de justice de l’Union européenne de 2023. Nous ne pouvons pas revenir sur la loi de 2016 – si tel était le cas, nous ne pourrions d’ailleurs réautoriser que l’acétamipride, puisque les autres substances néonicotinoïdes sont interdites en Europe. Surtout, nous risquerions la censure du Conseil constitutionnel, qui précise dans sa décision sur la loi de 2020 : « Les limitations portées par le législateur à l’exercice de ce droit ne sauraient être que liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi. » Je vous propose donc de retirer votre amendement. Nous examinerons plus loin des amendements visant à réautoriser l’acétamipride dans un cadre dérogatoire, notamment pour la culture de la noisette, et qui ne présentent pas le risque d’être censurés par le Conseil constitutionnel.
M. Lionel Tivoli (RN). Disons les choses clairement : on interdit aux agriculteurs d’utiliser certaines substances non pas pour protéger la santé, mais pour se donner bonne conscience. Dans le même temps, des produits cultivés à l’étranger avec les mêmes molécules remplissent nos rayons : pas vu, pas pris. On sacrifie nos producteurs sur l’autel de l’image ; on les montre du doigt ; on leur impose des normes que même Bruxelles n’impose pas. Quand ils ferment boutique, on verse une larme entre deux bouchées de fraises espagnoles. Ce système est hypocrite : il prétend sauver la planète mais ne sauve que les apparences.
Cet amendement ne vise qu’une chose : arrêter de punir ceux qui jouent le jeu. Nos agriculteurs veulent bien faire, mais pas se faire tondre pendant que les autres moissonnent les profits. Un peu de cohérence ! Et surtout, un peu de respect pour ceux qui bossent la terre pendant que d’autres s’en lavent les mains.
Mme Delphine Batho (EcoS). Le Rassemblement national plaide pour s’en remettre à la réglementation européenne : cela ne manque pas de saveur ! Pour rappel, c’est grâce à la France et à sa loi interdisant les néonicotinoïdes que l’Union européenne a proscrit l’usage de certaines substances. C’est grâce au ministre Julien Denormandie – qui, à ma connaissance, n’est pas un écologiste – qu’a été enclenchée la demande d’interdiction de l’acétamipride, du sulfoxaflor et du flupyradifurone.
Nous examinerons des amendements qui traitent de la concurrence déloyale. Cependant, ce n’est pas parce qu’un produit est autorisé ailleurs qu’il doit l’être chez nous : cela reviendrait à tout accepter. La Turquie, par exemple, emploie une quinzaine de produits interdits par l’Union européenne dans ses cultures de noisettes. Devons-nous en faire autant pour lutter contre la concurrence déloyale avec ce pays – dont je précise, pour aller au bout du problème, qu’il reçoit des aides européennes dans le cadre de la procédure de préadhésion ?
M. Pierrick Courbon (SOC). L’apiculteur que je suis a entendu de nombreuses contre-vérités au cours de ces débats. Ceux qui plaident pour réintroduire l’acétamipride, au motif qu’il serait moins dangereux, défendaient hier avec la même conviction les autres néonicotinoïdes, avant que l’accumulation de constats scientifiques, médicaux et agricoles ne conduise à les interdire. Quel modèle agricole voulons-nous défendre ?
M. Loïc Prud’homme (LFI-NFP). Ces amendements ne manquent pas de sel : le Rassemblement national prétend défendre les agriculteurs, leurs revenus et leur survie, mais souhaite s’aligner sur les normes environnementales les plus sales en Europe et dans le monde, ce qui suppose aussi de s’aligner sur les pratiques tarifaires, salariales et sociales les plus défavorables. Avec un tel dumping, les agriculteurs finiront par toucher 300 euros par mois – c’est déjà le cas pour beaucoup –, comme en Roumanie. Pour notre part, nous voulons protéger les agriculteurs contre la concurrence de pays qui produisent dans de telles conditions. L’exemple de l’interdiction du diméthoate pour la culture de la cerise prouve que c’est possible. Nous devons interdire l’importation de produits étrangers traités avec des substances qui sont interdites en France. C’est ainsi que l’on protégera les revenus des agriculteurs.
Mme Hélène Laporte (RN). Je ne retire pas mon amendement, et je précise que le Conseil constitutionnel n’a pas prononcé une censure.
La commission rejette l’amendement.
*
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 14 mai 2025 à 9 h 30
Présents. - M. Laurent Alexandre, M. Henri Alfandari, M. Alexandre Allegret-Pilot, M. Charles Alloncle, M. Maxime Amblard, M. Antoine Armand, M. Christophe Barthès, M. Fabrice Barusseau, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Lisa Belluco, M. Thierry Benoit, M. Benoît Biteau, Mme Anne-Laure Blin, M. Jean-Luc Bourgeaux, M. Julien Brugerolles, M. Stéphane Buchou, M. Romain Daubié, M. Julien Dive, M. Peio Dufau, M. Inaki Echaniz, M. Frédéric Falcon, M. Jean-Luc Fugit, M. Antoine Golliot, Mme Géraldine Grangier, Mme Olivia Grégoire, Mme Mathilde Hignet, M. Harold Huwart, M. Maxime Laisney, M. Thomas Lam, Mme Hélène Laporte, Mme Annaïg Le Meur, Mme Nicole Le Peih, Mme Marie Lebec, M. Robert Le Bourgeois, M. Pascal Lecamp, M. Guillaume Lepers, M. Hervé de Lépinau, M. Laurent Lhardit, M. Eric Liégeon, M. Alexandre Loubet, M. Bastien Marchive, Mme Sandra Marsaud, M. Éric Martineau, M.Patrice Martin, M. Max Mathiasin, M. Nicolas Meizonnet, Mme Manon Meunier, Mme Louise Morel, M. Philippe Naillet, Mme Sandrine Nosbé, Mme Julie Ozenne, M. René Pilato, M. Dominique Potier, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, M. Loïc Prud'homme, M. Richard Ramos, M. Jean-Claude Raux, M. Joseph Rivière, Mme Anne-Sophie Ronceret, M. David Taupiac, M. Matthias Tavel, Mme Mélanie Thomin, M. Lionel Tivoli, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, M. Jean-Pierre Vigier, M. Stéphane Vojetta, M. Frédéric-Pierre Vos, M. Frédéric Weber
Assistaient également à la réunion. - Mme Brigitte Barèges, M. Pierrick Courbon, Mme Sandrine Le Feur, M. Paul Midy, M. Christophe Naegelen, M. Jérôme Nury, Mme Marie Pochon, M. Vincent Rolland, M. Nicolas Thierry