Compte rendu

Commission
des affaires sociales

– Examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (n° 325) (M. Yannick Neuder, rapporteur général ; M. Guillaume Florquin, M. Louis Boyard, Mme Sandrine Rousseau et M. Jean-Carles Grelier, rapporteurs)              2

– Présences en réunion.................................37

 

 

 

 

 


Lundi
21 octobre 2024

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 6

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de
M Frédéric Valletoux,
président

 


  1 

La réunion commence à dix-sept heures.

La commission examine le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (n° 325) (M. Yannick Neuder, rapporteur général ; M. Guillaume Florquin, M. Louis Boyard, Mme Sandrine Rousseau et M. Jean-Carles Grelier, rapporteurs)

M. le président Frédéric Valletoux. Nous commençons l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, sur lequel ont été déposés 1 577 amendements. Parmi eux, soixante-treize ont été retirés, douze étaient inopérants et huit ont été déposés en double.

Suite aux avis rendus par le président de la commission des finances sur les deux premières parties du texte, cinquante et un amendements sont irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, quarante et un au titre de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, principalement des cavaliers, et trois au titre de la loi organique relative aux lois de finances. Le président de la commission des finances n’ayant pas terminé l’examen de tous les amendements, le nombre définitif d’amendements en discussion n’est pas encore connu.

Pour le PLFSS 2023, notre commission avait examiné 712 amendements mais ce chiffre était monté à 1 254 pour le PLFSS 2024. Cette année, nous devrions nous situer entre les deux.

Les temps de parole seront, comme de coutume, de deux minutes. Par ailleurs, nous adapterons le déroulement de nos séances en fonction des votes importants prévus cette semaine dans l’hémicycle – je pense notamment à la motion de rejet sur le projet de loi de finances (PLF) et à l’élection d’un vice-président ou d’une vice-présidente de l’Assemblée nationale. Enfin, je rappelle que nous siégerons jusqu’à 20 heures avant de reprendre à 21 heures.

 

Article liminaire : Prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale pour 2024 et 2025

 

Amendements de suppression AS1 de M. Jérôme Guedj, AS510 de M. Yannick Monnet, AS782 de Mme Zahia Hamdane, AS1067 de Mme Joëlle Mélin et AS1149 de Mme Sandrine Rousseau

M. Jérôme Guedj (SOC). Le PLFSS est autant voire plus important que le budget de l’État, qui a beaucoup accaparé l’attention ces derniers jours. Je ne doute pas que nos travaux témoigneront de notre attachement à la sécurité sociale.

Ce premier amendement traduit nos interrogations sur le bien-fondé de ce type d’article dans le PLFSS. Il est une manière d’ouvrir le débat sur la logique sinon d’austérité, mais en tout cas de serrage de vis sur l’ensemble des dépenses sociales, illustrées par leur baisse par rapport à la richesse nationale. Cette tendance n’est pas pour nous un signe de progrès, au contraire : nous ne pouvons rester fidèles au principe de la sécurité sociale de répondre aux besoins qu’en socialisant les dépenses. Or nous constatons une baisse drastique de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), une augmentation du reste à charge après consultation et une désindexation des pensions de retraite.

En outre, le déficit prévu pour 2024 mélange les choux et les carottes puisqu’il comptabilise l’amortissement de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) – 16 milliards d’euros –, générant mécaniquement un solde positif.

M. Yannick Monnet (GDR). L’état des recettes, des dépenses et du solde des administrations de sécurité sociale pour 2024 et ses prévisions pour 2025 affichent une image restreinte de la protection sociale puisque ses dépenses et ses recettes sont ramenées à des points de PIB. Les besoins sanitaires et sociaux ainsi que les moyens pour y répondre nous semblent mériter une appréciation plus qualitative et surtout plus précise car cette présentation sur trois lignes masque une autre réalité budgétaire.

Si l’on se contente de regarder l’évolution des recettes et des dépenses en part du PIB, on observe que, entre 2024 et 2025, les recettes sont presque constantes avec 26,6 % du PIB en 2024 et de 26,7 % en 2025 et que les dépenses sont en baisse avec 26,6 % du PIB en 2024 et 26,4 % en 2025. La comparaison entre les deux années est d’autant plus facile que l’évolution de PIB est envisagée de manière constante, à 1,1 % en 2024 et en 2025.

Cet article liminaire montre ainsi des recettes à l’arrêt pour les administrations de sécurité sociale et des dépenses toujours davantage contraintes. Le solde positif de 0,2 % du PIB en 2025 ne laisse pas apparaître ce qu’il en coûte aux assurés sociaux : il cache le « coup de frein », selon l’euphémisme du Gouvernement, de 10,1 milliards d’euros sur les dépenses sociales ou encore le déficit sans précédent des hôpitaux, qui s’élève à 1,746 milliard en 2023 et qui devrait s’établir à 2 milliards en 2024, selon la Fédération hospitalière de France (FHF).

Mme Zahia Hamdane (LFI-NFP). L’article liminaire montre que ce PLFSS sera un texte d’austérité.

La Cades continue de priver la protection sociale de ressources importantes : 16 milliards d’euros lui ont été affectés en 2024 et la même somme le sera en 2025, soit plus que le volume d’économie que le Gouvernement compte imposer au système de protection sociale en 2025. Il fait le choix de couper dans les dépenses tout en disant, de façon erronée, que notre protection sociale est structurellement en crise.

Ce PLFSS est une traduction concrète de la ligne politique du gouvernement Barnier : faire payer aux classes moyennes et populaires les cadeaux fiscaux et les exonérations de cotisations octroyées aux grandes entreprises

Mme Joëlle Mélin (RN). Les prévisions de cet article sont trop optimistes, voire totalement irréalistes. Elles ne servent qu’à rassurer les investisseurs détenteurs de notre dette. L’agence Fitch a d’ailleurs dégradé la perspective de la France. Ces prévisions se sont révélées totalement erronées pour l’année 2024, comme cela avait déjà été le cas en 2023. Le flou qui procède à l’établissement de ces chiffres est total.

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Ce PLFSS est un texte d’austérité. Il ne répond en rien aux besoins urgents d’investissement dans notre système de soins et d’accompagnement social. Avec une réduction de 15 milliards d’euros, comment envisager le financement de la revalorisation des salaires, l’attractivité des professions ou encore stopper les fermetures en cascade des lits ? Plutôt que de répondre à l’urgence sociale dans laquelle le sous‑investissement dans l’hôpital public nous plonge, le Gouvernement a choisi d’aggraver la situation en faisant peser sa quête d’économie sur les plus vulnérables par l’augmentation du reste à charge pour les patients et par le plafonnement des indemnités versées en cas d’arrêt maladie Ce sont une fois de plus les populations les plus précaires qui devront compenser les avantages fiscaux accordés aux plus riches.

Il n’est fait aucune mention dans ce PLFSS de la santé mentale, de la santé psychique ou de la santé psychiatrique. C’est incroyable ! La santé mentale n’a-t-elle pas été déclarée grande cause du quinquennat par le Premier ministre ? Je rappelle que les maladies mentales et les troubles psychiques touchent près de 13 millions de Français et que le suicide constitue la première cause de mortalité chez les jeunes entre 15 et 35 ans. À l’occasion d’une mission d’information sur la prise en charge des urgences psychiatriques, j’ai pu constater, avec ma collègue Nicole Dubré-Chirat, l’effondrement de ce secteur. L’absence d’article sur la santé psychique nous empêche malheureusement de déposer des amendements

Notre système de soins nécessite des investissements pour répondre à la hausse croissante de la demande, mais le budget présenté ne répond pas à cette nécessité. Nous proposons donc la suppression de cet article.

M. Yannick Neuder, rapporteur général. Il y a du vrai et du faux dans ce que vous avez dit mais, quoi qu’il en soit, la loi organique impose la présence d’un tel article dans un PLFSS. Le supprimer rendrait le texte inconstitutionnel. Ce ne serait pas responsable.

Monsieur Guedj, on ne peut parler d’austérité que quand les dépenses baissent fortement. Or le texte prévoit des dépenses en augmentation. Peut-être cette augmentation n’est-elle pas suffisante et les recettes ne sont-elles pas en adéquation, mais on ne peut pas parler d’austérité.

Monsieur Monnet, les prévisions de recettes et de dépenses reposent naturellement sur les hypothèses du Gouvernement. En revanche, celui-ci n’a aucune marge de manœuvre sur les soldes des administrations de sécurité sociale puisque leurs prévisions sont faites sans l’intervention de Bercy.

Madame Hamdane, ne pas rembourser la dette sociale nous rendrait plus dépendants des marchés financiers asiatiques et anglo-saxons. Son remboursement est une mesure de souveraineté et de stabilité.

Madame Mélin, l’appréciation du Haut Conseil des finances publiques diffère de la vôtre. Je rappelle ses propos : le scénario macroéconomique pour 2025 est dans l’ensemble fragile, avec une prévision un peu élevée pour la croissance, optimiste au regard des indications données par les enquêtes de conjoncture disponibles. La prévision de croissance pour 2025, soit 1,1 %, apparaît en premier lieu un peu élevée compte tenu de l’orientation restrictive du scénario de finances publiques associé. Cette appréciation diffère donc de la vôtre.

Madame Rousseau, le cadre budgétaire est effectivement contraint, mais nous ne sommes pas dans l’austérité puisque les dépenses augmentent. La santé mentale est un sujet qui nous tient tous à cœur et vous pourrez déposer des amendements la concernant dans la partie du texte consacrée à la branche maladie.

Pour toutes ces raisons, avis défavorable à ces amendements de suppression.

M. Thibault Bazin (DR). Nous nous opposons à la suppression de cet article, qui nous permet de savoir où nous allons – il avait d’ailleurs été réclamé de façon consensuelle lors de la modification de la loi organique de 2022. La vision n’est pas restreinte, au contraire, puisque sont inclus l’ensemble des administrations de sécurité sociale, y compris les retraites complémentaires et les régimes d’assurance chômage.

Le solde excédentaire est essentiel pour prouver notre capacité de remboursement et s’engager sur une trajectoire de redressement des comptes publics. J’ai d’ailleurs noté, monsieur le rapporteur général, que vous jugiez les hypothèses plus cohérentes avec les prévisions des organismes extérieurs. Ce budget sera donc sans doute plus sincère que les précédents.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Monsieur Bazin, si cet article est si sérieux, pourquoi avoir déposé tant d’amendements ?

Monsieur le rapporteur général, l’engagement à l’égard des créanciers privés internationaux est précisément un problème puisque ces engagements nous coûtent 16 milliards d’euros sur une année ordinaire et nous ont coûté 75 milliards depuis 1996 en intérêts et commissions bancaires : les bons gestionnaires, aidés par les marchés financiers, ont réussi à paumer huit années de déficit de la sécurité sociale.

La Cades ne devrait pas être financée par la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), qui est un des impôts les plus injustes : chaque salarié se voit prélever 0,5 % de sa rémunération alors que ses soins de santé ont été déremboursés et que des lits ont été supprimés. C’est la triple peine !

Oui, les créanciers internationaux sont un problème. Ainsi, notre groupe plaide depuis longtemps pour rétablir un circuit du Trésor afin d’imposer des obligations de détention de bons du Trésor aux grands organismes du crédit. Cela nous permettrait de fixer d’autorité le prix de la dette et donc de ne pas être tenus par les créanciers.

M. Yannick Monnet (GDR). Monsieur Bazin, la sécurité sociale ne sert pas à rembourser la dette. Vous vous réjouissez de l’excédent, mais quel est son prix ? La fermeture d’hôpitaux ou l’arrêt de politiques de prévention nous rendrait encore plus vertueux d’un point de vue financier, mais il faut partir des besoins. C’est un des fondements de la sécurité sociale. J’ajoute que les recettes sont bien inférieures à ce qu’il faudrait pour financer les besoins de la population.

M. Michel Lauzzana (EPR). Il m’est pénible d’entendre parler d’austérité dans un pays où les dépenses sociales ne font qu’augmenter – 9 milliards d’euros de plus pour l’Ondam ce n’est pas rien. C’est très désobligeant pour ceux qui ont eu à subir une véritable austérité.

Si vous voulez éviter de payer des intérêts, il faut veiller à ne pas trop dépenser. Les besoins sociaux sont infinis, mais nous devons être responsables et assurer l’équilibre des dépenses et des recettes.

M. François Gernigon (HOR). Je rappelle que la CRDS a été mise en place pour éponger la dette sociale, pas pour financer les déficits de l’année.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article liminaire est supprimé et les amendements AS275, AS283, AS282, AS281, AS280, AS279, AS278, AS277 et AS276 de M. Thibault Bazin ainsi que les amendements AS1228 et AS1249 de M. Romain Baubry tombent.

 

PREMIÈRE PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2024

 

Article 1er : Rectification des prévisions de recettes, des tableaux d’équilibre et des objectifs de dépenses pour 2024

 

Amendements de suppression AS2 de M. Jérôme Guedj, AS511 de M. Yannick Monnet, AS512 de Mme Karine Lebon et AS784 de M. Hadrien Clouet

M. Jérôme Guedj (SOC). Monsieur le rapporteur général, vous avez raison : quand les dépenses augmentent en volume, on ne peut pas parler d’austérité, mais si ces dépenses ne répondent pas aux besoins auxquels elles sont censées répondre, je pense alors qu’on peut parler d’austérité.

Notre proposition de suppression est une forme de sanction, car cet article consacre une dégradation considérable des comptes de la sécurité sociale. Elle avait été anticipée à 10,5 milliards d’euros, mais elle serait en réalité de 18 milliards. Le Gouvernement justifie ce dérapage par la dégradation des perspectives macroéconomiques. C’est un peu facile !

Plutôt qu’une dynamique des recettes, nous observons une dynamique des exonérations de cotisations sociales. Ce PLFSS sera l’occasion de discuter de l’efficacité de ce « pognon de dingue » que représentent les 75 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales, qui ont quasiment doublé depuis 2017.

Cet article illustre une forme de fuite en avant – j’allais parler de démantèlement, mais j’essaye de peser mes mots. Vous avez laissé filer le déficit de la sécurité sociale. Je le rappelle, en 2017, la sécurité sociale était presque à l’équilibre, avec 4,9 milliards d’euros de déficit contre quelque 18 milliards aujourd’hui et tous les problèmes que nous connaissons – désertification médicale et paraméciale, crise de l’hôpital, difficultés des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad)...

M. Frédéric Maillot (GDR). Les chiffres de cet article nous semblent confirmer l’insincérité et l’indigence de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024, qui prévoyait un déficit de 10,4 milliards d’euros. Avant l’été, le Gouvernement a revu ce chiffre à 16,6 milliards et il est aujourd’hui fixé à 18 milliards. L’équilibre présenté nous semble donc pour le moins précaire.

Cet écart entre les prévisions et le résultat ne provient pas d’un dérapage des dépenses mais de recettes moindres. Voter cet article reviendrait à approuver les choix de dépenses de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, adoptée par 49.3, et donc l’insincérité du Gouvernement, qui surévalue les recettes budgétaires pour nous faire croire que le renoncement exigé année après année des professionnels de santé et des patients est inéluctable.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Pour la première fois depuis 2021, les recettes d’un PLFSS progressent moins vite que les dépenses, ce qui signifie que votre mauvaise gestion crée des déficits. Vous préférez parler de perspectives macroéconomiques. Celles-ci ne tombent pas du ciel : elles sont le résultat de politiques publiques de gel des salaires, de maltraitance sociale d’une partie de la population et de versements records de dividendes.

De façon très châtiée, vous expliquez que la croissance de la masse salariale a progressé de 3,2 % au lieu de 3,9 %. Mais pourquoi en est-il ainsi ? Parce que, plutôt que d’augmenter les salaires, qui génèrent des cotisations finançant la sécurité sociale, vous préférez distribuer des primes. Ce fric monumental, ce sont autant de milliards soustraits au financement de la sécurité sociale.

M. le rapporteur général. Cet article est une obligation de la loi organique. Le supprimer n’effacera pas la photographie mais rendra ce budget inconstitutionnel. J’en appelle à la responsabilité de chacun.

Monsieur Guedj, cet article ne dégrade pas le déficit de la sécurité sociale : il ne fait que constater l’état des dernières prévisions, qui sont en effet alarmantes.

Monsieur Maillot, vous avez raison : on ne peut pas parler d’équilibre général avec un déficit de 18 milliards. Mais ce n’est pas en supprimant l’article que la situation changera.

Monsieur Clouet, les recettes augmentent certes moins vite que les dépenses – 4,2 % et 5,3 % respectivement –, mais je rappelle que ces dernières sont largement tirées par la revalorisation des pensions de retraite, qui représente un coût supplémentaire de 13 milliards d’euros en 2024. Cet écart s’explique par des recettes fiscales moins élevées – de 4,5 milliards – qu’anticipées, mais supprimer l’article n’effacera pas l’ardoise.

M. Thibault Bazin (DR). Nous attendions les chiffres rectifiant les prévisions et certains d’entre nous demandaient même un PLFSS rectificatif (PLFRSS). Cette rectification est indispensable pour y voir plus clair. Je m’oppose donc à la suppression de l’article, d’autant qu’elle nous empêcherait de débattre de ces chiffres.

Monsieur Monnet, je suis d’accord avec vous : la protection sociale n’est pas là pour rembourser la dette, mais l’absence d’équilibre menace la solidarité intergénérationnelle, qui est un des fondements de la sécurité sociale, avec l’universalité de la politique familiale. La crise de la natalité oblige le Gouvernement à porter son attention sur les besoins des familles avec des enfants à charge, d’autant que le pouvoir d’achat est en baisse. C’est le sens de plusieurs de nos amendements.

M. Hendrik Davi (EcoS). Que l’on souhaite ou non supprimer cet article, son examen est l’occasion de débattre des choix politiques du Gouvernement et d’en faire le bilan. Ce tableau rectifié des dépenses relatives à 2024 est instructif, car il indique que l’accroissement du déficit des comptes de la sécurité sociale devrait atteindre 18 milliards d’euros, en raison de recettes moins importantes que prévu. Hadrien Clouet l’a dit, cette situation est évidemment l’échec de votre politique. Alors que le Gouvernement communique toujours sur la nécessité de réduire les dépenses, cette année, nous nous attarderons surtout sur la dynamique des recettes sur laquelle nous allons agir car les politiques macroéconomiques ne tombent pas du ciel.

Plus précisément, il sera question de revenir sur les exonérations de cotisations sociales. Je me félicite que l’article 6 du PLFSS ouvre cette perspective, qui pourrait nous permettre de dégager entre 12 et 13 milliards d’euros. De la même manière, la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du capital pourrait rapporter 3 milliards. Il en serait ainsi également de la hausse de certaines taxes sur les produits sucrés, le tabac et l’alcool qui conjuguerait politique de prévention et augmentation des recettes. Toutes ces pistes nous permettraient de réaliser ces 18 milliards d’euros d’économies dont nous avons besoin pour rétablir l’équilibre des comptes.

Certes, il n’est pas interdit de réfléchir à l’évolution des dépenses mais, en l’espèce, le tableau d’équilibre ne tient pas compte de notre système hybride, au sein duquel on demande beaucoup d’efforts au secteur public, mais sans se pencher véritablement sur le secteur privé, qui est parfois à but lucratif. Il conviendrait en effet de questionner l’évolution des dépenses et des profits de l’industrie pharmaceutique, des cliniques privées – particulièrement celles dispensant des soins de psychiatrie, car il y a là un scandale – et des différents secteurs de la médecine libérale de ville.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). À la lecture de ce PLFSS 2025, on se demande où l’on va. Et, surtout, comment en sommes-nous arrivés là ? Ceux qui ont applaudi à tout rompre les 49.3 sur les PLFSS successifs sont bien silencieux. Collègues macronistes, l’état financier dans lequel se trouve le pays relève tout de même de votre responsabilité. Vous qui prôniez la politique de l’offre et souteniez qu’en supprimant le maximum de taxes et de cotisations, on stimulerait la croissance et on ferait le plein de recettes, regardez donc où nous en sommes ! Cela n’a pas fonctionné. Et les propositions faites pour l’année prochaine ne me donnent pas l’impression d’un changement de direction. Le gouvernement Barnier ressemble à un poulet sans tête qui continue d’avancer sans savoir où il va, alors qu’on sait que c’est dans le mur !

Tous les collègues l’ont dit avant moi, les recettes constituent le cœur du problème, Quelles dépenses pourraient être encore supprimées pour faire des économies ? Je ne fais pas un déplacement dans le pays sans que les gens me disent qu’ils tirent la langue. On ne peut plus toucher aux dépenses. Et on peut d’autant moins se le permettre que cela ralentirait l’activité économique, porterait atteinte à la croissance, et diminuerait les recettes. Voilà la situation dans laquelle nous sommes.

Dans ces conditions, bien sûr que nous allons supprimer cet article. Ni les macronistes, ni Les Républicains ne sont en mesure de proposer une politique alternative qui ne nous emmènerait pas dans le mur. Nous chercherons donc à tout supprimer jusqu’à avoir un gouvernement dirigé par le Nouveau Front populaire pour enclencher une autre dynamique. (Exclamations.)

Mme Joëlle Mélin (RN). Je sais bien que la loi organique prévoit la présentation, à l’article 1er du PLFSS, d’un tableau d’équilibre, mais le terme est tout à fait usurpé. La loi de financement de la sécurité sociale promulguée en décembre 2023 prévoyait un solde négatif de 8,7 milliards d’euros. Après rectification – quoique sans projet PLFRSS –, ce solde atteint désormais 18 milliards. Un écart pareil est inacceptable ! Comment peut-on admettre un nouvel équilibre avec de telles imprévisions, s’agissant aussi bien des dépenses que des recettes ?

Je rappelle aussi qu’en 2010, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale avait été autorisée à emprunter 13 milliards d’euros. L’année prochaine – nous allons y venir –, nous en serons à 65 milliards. En Europe, seule la France permet à son agence de contracter des emprunts. Et quand le plafond est atteint, on crée du déficit, qu’on envoie ensuite à la Cades. Il faut vraiment revoir les choses.

Je reconnais qu’il était compliqué, en deux ou trois semaines, de proposer quelque chose de nouveau qui soit à même de mettre hors de danger nos comptes sociaux, mais nous sommes très loin du compte. Nous prendrons donc les décisions qui s’imposent au regard de l’insincérité, ou du moins de l’approximation des chiffres.

Mme Annie Vidal (EPR). Je suis désolée si je radote depuis sept ans – le débat est récurrent –, mais supprimer un article qui ne fait que présenter les dépenses et les recettes réelles au cours d’un exercice budgétaire n’a pas de sens. Cela porte même atteinte à la transparence que nous souhaitons tous, sans rien changer à la situation.

Nous discuterons bientôt des perspectives pour l’an prochain. Avant cela, je rappellerai tout de même qu’en 2020, lors des confinements, nous avons permis aux entreprises de rester à flot et aux salariés d’être rémunérés à hauteur de 80 % de leur salaire. Certains d’entre vous nous avaient alors reproché de ne pas maintenir les rémunérations à 100 %... Oui, tout cela a un coût et emporte les conséquences que nous constatons aujourd’hui. Pendant la crise sanitaire, la sécurité sociale a joué son rôle d’amortisseur social et économique. On peut supprimer tous les articles, cela n’y changera rien et ne fera pas avancer les choses.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 1er est supprimé et les amendements AS285 et AS284 de M. Thibault Bazin et AS513 de M. Yannick Monnet tombent.

 

Article 2 : Rectification de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que de ses sous-objectifs

 

Amendements de suppression AS4 de M. Jérôme Guedj, AS514 de Mme Karine Lebon, AS524 de M. Yannick Monnet, AS823 de M. Hadrien Clouet et AS1048 de M. Sébastien Peytavie

M. Jérôme Guedj (SOC). La suppression de l’article 1er aura au moins une vertu : nous éviter d’examiner l’amendement d’appel AS285 de M. Bazin, qui visait à modifier le panier de soins de l’aide médicale de l’État (AME). Je le dis avec toute l’amitié que je peux avoir pour lui, j’étais déçu que l’un des premiers amendements d’un éminent spécialiste des PLFSS porte sur ce sujet, qui est vraiment éloigné du cœur des préoccupations.

L’article 2, que nous proposons également de supprimer, traite de l’insuffisance de l’Ondam. C’est l’enjeu majeur du PLFSS 2025, mais évoquons d’abord les chiffres relatifs à 2024, car toutes les dépenses ne pourront pas être absorbées. À cet égard, la FHF, que vous connaissez bien, monsieur le président, et qui n’est pas un repaire de gauchistes, s’inquiète « du niveau de l’Ondam au vu de la situation des établissements ». Selon elle, « le risque est d’aggraver la situation de sous-recours sur certaines activités prioritaires, d’obliger les établissements à repousser des investissements et de limiter leur capacité de recrutement ». Ces amendements de suppression sont donc des amendements d’humeur. Ils visent à indiquer que ni la LFSS 2024, adoptée par 49.3, ni les corrections intervenues ensuite n’ont pris la mesure de l’impact inflationniste et du sous-calibrage initial.

Enfin, je rappellerai souvent, car il faut que nous le martelions, que pour la première fois, un ministre, en l’occurrence Laurent Saint-Martin, a reconnu devant notre commission que le Ségur de la santé n’était pas financé. À elle seule, cette déclaration mériterait la création d’une commission d’enquête ; nous en reparlerons.

M. Frédéric Maillot (GDR). L’amendement AS514 est défendu.

M. Yannick Monnet (GDR). L’article 2 prévoit une rectification de l’Ondam et de ses sous-objectifs pour 2024. Non seulement nous avions alerté, lors de l’examen du PLFSS 2024, sur leur insuffisance, mais nous allons devoir le faire de nouveau s’agissant de l’année 2025. C’est infernal : chaque année, vous sous-évaluez l’Ondam, puis vous le corrigez, mais en restant en-deçà des besoins. Et comme, en parallèle, les ressources de la sécurité sociale sont asséchées, le Gouvernement fait mine de s’étonner du creusement du déficit.

Je souhaiterais que le Gouvernement prenne la mesure de la situation dramatique dans laquelle est désormais plongé notre système de soins. Le déficit des hôpitaux s’est établi à 1,7 milliard d’euros en 2023 et devrait atteindre les 2 milliards cette année. Au total, 85 % des Ehpad publics sont déficitaires, pour un montant global de 1,3 milliard. En conséquence, les personnels soignants et non soignants sont exsangues et nous constatons une détérioration de la prise en charge sociale et médicale. Quatre malades chroniques ou concernés par un handicap physique sur dix considèrent que leur prise en charge s’est détériorée depuis le covid. Quant aux renoncements aux soins, ils vont croissant : plus de six Français sur dix ont déjà renoncé à se faire soigner.

L’exposé des motifs de l’article 2 explique que la rectification de l’Ondam à hauteur de 1,2 milliard d’euros résulte principalement « d’une dynamique particulièrement importante sur les dépenses de soins de ville, notamment sur les indemnités journalières et les honoraires de médecins spécialistes ». À cet égard, si le Gouvernement s’en est pris une fois de plus aux arrêts maladie, je n’ai rien entendu de sa part au sujet des dépassements d’honoraires de certains spécialistes. Pourtant, d’après l’UFC-Que Choisir, qui se fonde sur des données de la Caisse nationale de l’assurance maladie, le montant d’une consultation de spécialiste peut être multiplié par 2,5 d’un département à l’autre.

Pour toutes ces raisons, le groupe GDR demande la suppression de cet article.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Je défends l’amendement AS823.

L’année dernière, déjà, le budget de la sécurité sociale, adopté par 49.3, était insuffisant. La FHF le disait ; les soignants l’ont subi. Ils n’ont pas pu soigner correctement et les patients ont passé des heures, voire des jours sur des brancards.

Il s’agit maintenant de rectifier ce budget insuffisant, mais avec une somme qui l’est elle-même, étant donné qu’elle ne couvre pas l’inflation, ni même les déficits structurels. L’hôpital, par exemple, voit son financement diminuer de 100 millions d’euros, ce qui n’est pas entendable quand on sait que son déficit avoisine les 2 milliards.

Dans le temps, les choses fonctionnaient plutôt bien, car le Gouvernement finançait la sécurité sociale et les soignants pouvaient faire leur boulot. Maintenant il ne reste qu’eux, mais ils ne pourront pas tenir éternellement si vous ne leur donnez pas des moyens suffisants. Si elles devaient choisir maintenant leur carrière, 60 % des infirmières affirment qu’elles se reporteraient sur un autre métier. La plupart sont insatisfaites de leurs conditions de travail et de leur salaire.

M. Sébastien Peytavie (EcoS). Nous nous interrogeons sur la sincérité même des chiffres qui nous sont présentés. De PLFSS en PLFSS, en raison de sa sur-exécution, l’Ondam et ses sous-objectifs ne cessent d’être rectifiés, car leur financement est loin d’être à la hauteur des besoins de notre système de santé. Selon la FHF, la seule non-compensation de l’inflation représente 1,3 milliard d’euros, soit 20 000 équivalents temps plein d’infirmier. Cette somme grève sévèrement les capacités de fonctionnement et d’investissement des établissements. J’ajoute que le secteur médico-social n’est pas en reste, 85 % des Ehpad ayant enregistré un résultat déficitaire en 2023. Ainsi, alors que l’Ondam pour 2024 est fixé à 256 milliards d’euros, la FHF prévient qu’il manque 4 milliards pour ne serait-ce que sortir la tête de l’eau.

Par ailleurs, nous ne pourrons revenir à une sécurité sociale qui protège sans penser l’interdépendance entre la santé humaine et celle des écosystèmes. L’augmentation du nombre de maladies chroniques est directement liée aux facteurs environnementaux, ainsi qu’à nos modes de vie. Les symptômes sont connus : problèmes respiratoires dus à la pollution de l’air, maladies liées aux perturbateurs endocriniens, exposition aux pesticides. En bons comptables, pourquoi n’avez-vous toujours pas investi dans une politique de prévention en santé environnementale pour réduire le coût social et sanitaire de la pollution et des inégalités ?

Nous appelons à sortir du culte de l’austérité et à gouverner en fonction des besoins. Le financement de notre protection sociale ne devrait pas avoir comme boussole les coupes budgétaires, mais le fait que nous n’avons qu’une seule santé. Voilà pourquoi le groupe Écologiste demande la suppression de cet article.

M. le rapporteur général. Une nouvelle fois, je regrette ces amendements de suppression et m’étonne de votre détermination à ne pas respecter la loi organique. Des législateurs rendent le texte inconstitutionnel ! Je suis navré de me répéter, mais cela interroge la logique qui nous anime. On peut approuver ou non les politiques passées, mais il me semble préférable de disposer de ces comptes administratifs, qu’il s’agisse du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale ou de l’Ondam rectifié, pour envisager les futurs objectifs et élaborer nos propositions. Ces comptes permettent aussi de définir des trajectoires s’agissant des établissements ou encore des professionnels de ville.

Monsieur Guedj, la hausse du budget qui est prévue n’est peut-être pas suffisante à vos yeux, ni aux miens d’ailleurs, mais il s’agit bien d’une augmentation, en l’occurrence de 8,2 milliards d’euros. Vous ne pouvez donc pas parler d’austérité. J’ajoute que supprimer cet article n’améliorera en rien la situation des hôpitaux ou des soins de ville.

Monsieur Monnet, nous n’avons pas la même lecture des chiffres. Les régimes obligatoires de base de sécurité sociale et le Fonds de solidarité vieillesse sont bien à l’équilibre.

Monsieur Maudet, je partage votre inquiétude concernant le déficit des établissements hospitaliers, sociaux et médico-sociaux. Vous dites que 60 % des infirmières regrettent d’avoir choisi ce métier mais, j’y insiste, ce n’est pas en supprimant l’article prévoyant la rectification de l’Ondam que vous changerez leur situation en 2025. Vous aurez l’occasion de faire des propositions – légitimes – pour améliorer leurs conditions de travail, ou encore l’attractivité des métiers de la médecine de ville et hospitalière.

Monsieur Peytavie, les budgets pour 2023 et 2024 sont peut-être insincères politiquement et budgétairement, mais ce n’est pas en supprimant cet article que vous y remédierez : vous supprimerez simplement la photographie de leur insincérité. Est-ce réellement ce que vous souhaitez ? Par ailleurs, je partage complètement vos propos sur la santé environnementale. Je viens d’une métropole, Grenoble, où un décès prématuré sur trois est dû à la pollution. Toutes les mesures visant à améliorer la santé environnementale et à lutter contre la pollution seront donc à considérer, mais ne faisons pas croire aux personnes qui nous regardent que c’est en rejetant la rectification de l’Ondam que nous progresserons en la matière. Je répète que cette question a toute sa place dans l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, mais n’en faisons pas un motif pour refuser la rectification de l’Ondam pour 2024.

Mon avis est donc défavorable sur ces amendements.

M. Thibault Bazin (DR). Gardons à l’esprit que le dépassement de 2,7 milliards d’euros de l’Ondam et de ses sous-objectifs est lié pour moitié à des mesures de revalorisation des gardes de nuit et de week-end. Ce sont de très bonnes dépenses, appréciées dans nos territoires, qu’il est normal d’intégrer.

Un véritable enjeu, j’en conviens, est la révision des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens avec les établissements. C’est important pour les Ehpad et plus encore pour les établissements accueillant des personnes en situation de handicap. Nous avons pris du retard et ne fonctionnons qu’avec des crédits non renouvelables, ce qui déresponsabilise profondément les acteurs.

L’Ondam n’est qu’un objectif. De 2010 à 2019, comme l’a montré le rapporteur général, il a été respecté. Depuis cinq ans, en revanche, la cible a toujours été dépassée. Pourquoi ? Certains regrettent l’absence de politiques de prévention. Le recours massif au Paxlovid, qui évite aux personnes vulnérables d’être emportés par la covid-19, contredit cette idée.

En revanche, je m’inquiète de la stabilisation de l’investissement en faveur de la modernisation de notre système de santé : je fais ici référence aux volets numérique et immobilier du Ségur de la santé. Alors que nous montions en puissance dans ce domaine ces dernières années, en 2024, les budgets seront au même niveau qu’en 2023, à 200 millions d’euros près. Cet effort budgétaire est consensuel et je ne voudrais pas que les difficultés de notre système de santé nous empêchent de le moderniser, car nous avons justement besoin de réformes de structure.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Qu’il n’y ait pas de malentendu, personne ne refuse de rectifier l’Ondam. Nous exigeons simplement que cette rectification soit véritable, c’est‑à‑dire qu’elle soit positive et qu’elle tienne compte de l’inflation. En effet, ce n’est pas d’un PLFSS qu’il s’agit ici, mais d’un épisode de Fantômas ! À chaque article, vous dépouillez la sécu par effraction ! Alors que l’Ondam rectifié progresse de 0,47 %, l’inflation, sur la même période, s’établit à 2,5 %. Vous avez donc réduit l’objectif en valeur réelle. Cela signifie que les médicaments sont rationnés, que les blouses manquent dans les services de santé, que des lits sont fermés, et même que des soignantes et des soignants paient les ampoules sur leur lieu de travail avec leur argent.

Nous constatons tous – je suppose – le résultat de cette politique dans nos circonscriptions. Chez moi, ces six derniers mois, il y a eu une bataille à l’hôpital, car les secrétaires médicales y étaient payées en dessous du Smic, et encore récemment, il y a eu huit jours de grève pour que l’hôpital pour enfants soit doté d’un service de soins critiques. Ce sont autant de conséquences très concrètes du refus d’augmenter l’Ondam de manière suffisante.

Vous vous étonnez, monsieur le rapporteur général, que nous ne respections pas la loi organique. Pour ma part, je m’étonne qu’on nous présente des projets de loi qui mettent le système de santé publique à vif.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Nous pourrions interroger la validité d’un texte qui ne respecte pas le préambule de la Constitution, lequel prévoit que la nation garantit à tous la protection de la santé. Quand les budgets sont sous-financés, quand les soignants ne sont plus à même de faire correctement leur travail, quand des patients attendent des heures voire des jours sur des brancards au point de parfois y mourir faute de personnel, la constitutionnalité du PLFSS pose question. Le texte met en danger tous nos compatriotes, qui sont de plus en plus réticents à s’approcher des hôpitaux et des urgences, car ils savent que les soignants sont en difficulté et que les services sont surchargés. Le Gouvernement, qui risque de faire adopter le budget de la sécurité sociale par 49.3, est-il dans son droit constitutionnel en proposant des budgets toujours en deçà des besoins ?

M. le président Frédéric Valletoux. Avec 21 millions de passages aux urgences par an, les Français ne sont pas rebutés à l’idée de fréquenter l’hôpital. Sachons raison garder et prenons garde aux mots que nous utilisons : il s’agit du service public le plus fréquenté.

M. Michel Lauzzana (EPR). Avec le Nouveau Front populaire, on voit bien que les mots n’ont plus aucun sens. Une fois de plus, on nous dépeint la France comme un pays sous‑développé.

Je rappelle que l’Ondam n’est qu’un objectif et qu’il est donc normal de ne pas le tenir. Nous n’examinons pas le PLF, mais le PLFSS. Une fois les chiffres connus, il faut bien régulariser soit les dépenses, soit les bénéfices.

La semaine dernière, nous avons eu la foire à la saucisse des taxes ; je crains que nous n’ayons droit maintenant à la foire à la saucisse des dépenses.

M. Hendrik Davi (EcoS). Vous dites que cet article n’est pas le bon pour parler des problèmes de notre système hospitalier, mais à quel moment pouvons-nous le faire, dans la mesure où l’article 40 de la Constitution nous empêche de faire des propositions sur l’organisation des dépenses ?

Pardonnez-moi d’y revenir, mais à la lecture des chiffres, nous ne savons pas comment se répartissent les dépenses de santé entre les secteurs public et privé, ni quelle est leur dynamique.

Quoi qu’il en soit, ces amendements de suppression visent à vous alerter sur la situation de l’hôpital public, qui est au bord de l’effondrement. Vous nous opposez que les Français continuent de s’y rendre, mais heureusement ! Quand on a une crise cardiaque, quand on n’a pas la possibilité d’être pris en charge différemment, on va aux urgences ! Ne faites pas comme si de nombreux services d’urgences n’avaient pas fermé au cours de l’été, comme si des personnes âgées n’avaient eu à patienter plus de soixante-dix heures sur un brancard. C’est du réel, du concret ; c’est ce que nous racontent nos administrés.

Cette situation ne vient pas de nulle part : elle est le résultat des politiques d’austérité qui, année après année, diminuent les dépenses hospitalières. Les chiffres sont éloquents : depuis 2000, 111 800 lits ont été fermés. Certes, il y a eu un virage ambulatoire, mais il a bon dos et n’explique pas tout. Quand, en vingt-quatre ans, autant de lits sont supprimés, il y a forcément des patients qui se retrouvent à attendre sur des brancards.

Ces amendements de suppression nous permettent de débattre des raisons de l’effondrement du système hospitalier. Les soignants sont mal payés, les conditions de travail sont dégradées et souffrent d’un management toxique, l’austérité privilégie la logique comptable sur l’accès aux soins : voilà ce que nous voulons dénoncer. C’est le débat démocratique et si ce à quoi nous aboutissons n’est pas constitutionnel, nous verrons bien.

M. Jean-François Rousset (EPR). Je crois que nous entamons nos débats d’une bien mauvaise manière en opposant public et privé. Il y a de bons établissements relevant des deux secteurs et suivant votre lieu de résidence, vous serez bien soigné par des médecins compétents, qui ont la même formation et qui ne comptent pas leurs heures.

L’Ondam sera toujours inférieur à ce qu’il faudrait et les gens ne seront jamais contents. Plutôt que de m’exprimer sur ce point, je souhaite anticiper nos débats et évoquer la question des dépassements d’honoraires, qu’abordait justement M. Monnet. Une mission a été lancée sur ce sujet lors de l’examen de la proposition de loi visant la prise en charge du cancer du sein et j’aurai le plaisir, dans quelques jours, de présenter nos réflexions ainsi qu’un amendement au PLFSS. Nous avons tous conscience que les dépassements d’honoraires constituent un facteur d’inégalité dans l’accès aux soins, qu’ils sont inflationnistes, qu’ils entraînent l’augmentation du coût des complémentaires, qu’ils diminuent le pouvoir d’achat et nos capacités de dépenses – l’argent serait mieux utilisé dans la prévention –, et qu’ils ont une incidence sur les installations de médecins, les spécialistes qui les pratiquent s’établissant dans les zones où les patients ont les moyens de payer.

Alors que la période est très tendue, la réduction et l’encadrement des dépassements d’honoraires pourraient donc constituer une piste consensuelle à même de nous donner un peu de baume au cœur.

Mme Joëlle Mélin (RN). L’Ondam a 20 ans et il s’agit manifestement d’un indicateur inefficient. C’est en revanche un outil magique, qui permet de serrer plus ou moins fortement le licol autour des acteurs de la santé.

Nous sommes dans une situation non plus d’endettement, mais de surendettement. Dès lors, les solutions envisagées pour réduire la dette ne sont plus du tout d’actualité : il faut l’avoir à l’esprit. Les acteurs de la santé sont-ils à l’origine de toutes les augmentations ? Certes, ils ont des économies à faire et doivent se remettre en question. Certes, la grande évolution de notre système de soins demande d’être précautionneux et de réfléchir très sérieusement aux moyens de retrouver l’équilibre. Mais les efforts ne peuvent pas reposer que sur eux. L’Ondam ne sert qu’à faire parler – la preuve ! – et n’est qu’un rideau de fumée qui méritera d’être revu, voire d’être remplacé.

M. Frédéric Maillot (GDR). Au sein de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, où je siège habituellement – je remplace aujourd’hui Mme Lebon dans votre commission –, je constate souvent que la Macronie, ainsi que d’autres groupes, ne connaît vraiment pas la réalité des Français et à plus forte raison des outre-mer. À La Réunion, nous avons une station de radio qui est un peu le bureau des pleurs et tous les jours des gens y interviennent pour dire qu’ils n’ont pas été bien reçus à l’hôpital et que l’attente a été très longue. Dans mon territoire, mais aussi en Guadeloupe ou en Martinique, l’état des hôpitaux est très dégradé et on ne s’y rend qu’avec dépit. Veuillez donc ne parler que de ce que vous connaissez.

M. le rapporteur général. Je souscris à une grande partie de vos propos, notamment pour ce qui concerne les mauvaises conditions de travail à l’hôpital et d’accès aux soins en ville. Il est un peu exagéré de dire que nous ne connaissons pas ces problèmes, car nous sommes ici un certain nombre de professionnels de santé.

Quant à l’objectif rectifié, qu’on soit d’accord ou non, il faut l’acter dans le texte. Vous aurez ensuite l’occasion de voter pour ou contre – et je ne vous ai d’ailleurs pas dit si je voterais moi-même l’article dans le cas où vous le maintiendriez. Les questions restent donc ouvertes et le fait de retirer la photographie n’y changera rien.

Monsieur Rousset, je considère comme vous qu’il ne faut pas opposer public et privé. Pour ce qui est toutefois des dépassements d’honoraires, il faut veiller à éviter l’irrecevabilité des amendements. En effet, sur 1 600 amendements, 800 environ sont irrecevables et je ne suis pas sûr que le PLFSS soit le cadre approprié pour régler le problème des dépassements d’honoraires, car ces derniers sont pris en charge, non par la sécurité sociale, mais par le système d’assurance complémentaire, qui ne relève pas stricto sensu du PLFSS. Je ne veux donc pas, même si nous en avons toujours le projet – et je pense que nous en sommes tous d’accord –, faire de fausse annonce en affirmant que nous règlerons le problème dans ce cadre.

Madame Mélin, nous avons déjà débattu de la question de savoir s’il fallait maintenir cet indicateur qu’est l’Ondam. Ces discussions s’inscriraient plutôt dans le cadre d’une loi pluriannuelle de santé, laquelle permettrait peut-être de définir d’autres critères. L’Ondam s’applique depuis une trentaine d’années et le contexte de surendettement que nous connaissons n’est peut-être pas le meilleur moment pour traiter cette question.

Parallèlement au débat budgétaire sur le PLFSS, nous pourrions commencer à ébaucher une loi pluriannuelle de santé. Il me semble que nous en serions tous d’accord et ce travail en commun pourrait permettre d’inclure d’autres indicateurs. Je suis, je le répète, tout à fait d’accord pour abandonner à terme l’Ondam, à condition que nous disposions d’une loi pluriannuelle de santé et ayons défini collectivement les indicateurs de santé nécessaires à son application.

Enfin, monsieur Maillot, je suis un peu surpris de vos propos. J’ai bien noté votre attachement aux questions de santé en outre-mer, régions que, de fait, nous ne connaissons certainement pas aussi bien que vous, mais si vous aviez assisté aux nombreuses auditions auxquelles nous avons procédé depuis la fin août vous auriez constaté qu’un point y était systématiquement consacré à l’outre-mer. M. Elie Califer, qui a été très présent à ces auditions – et qui a d’ailleurs été le seul député d’outre-mer à l’être autant – vous le dira mieux que moi. Ce PLFSS comportera, du reste, des amendements destinés à prendre en compte les spécificités de l’outre-mer, en particulier à propos de Mayotte, dont la situation a retenu une grande attention.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 2 est supprimé et les amendements AS826 de Mme Elise Leboucher, AS234 de M. Jérôme Guedj, AS457 de M. Laurent Panifous, AS235 de M. Jérôme Guedj, AS1049 de M. Hendrik Davi, AS475 de Mme Sandrine Runel, AS827 de M. Damien Maudet, AS221 de Mme Danielle Brulebois, AS390 de Mme Émilie Bonnivard, AS1274 de M. Sébastien Peytavie, AS515 de M. Yannick Monnet, AS 516 de Mme Karine Lebon, AS219 de Mme Danielle Brulebois, AS311 de M. Sébastien SaintPasteur, AS389 de Mme Émilie Bonnivard, AS1270 de M. Sébastien Peytavie et AS1359 de M. François Gernigon tombent.

 

Les articles 1er et 2 ayant été successivement supprimés, la première partie du projet de loi est ainsi rejetée.

 

DEUXIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2025

 

TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

 

Article 3 : Alignement de l’effort contributif des nonsalariés agricoles sur celui des travailleurs indépendants dans le cadre de la réforme du mode de calcul de la pension de retraite de base

 

La commission adopte l’article 3 non modifié.

 

Après l’article 3

 

Amendements identiques AS161 de M. Boris Vallaud, AS577 de M. Yannick Monnet, AS977 de Mme Sandrine Rousseau et AS990 de Mme Élise Leboucher, amendements AS592 de Mme Océane Godard et AS815 de Mme Élise Leboucher (discussion commune)

M. Jérôme Guedj (SOC). La réforme des retraites ayant été adoptée par un PLFRSS et plusieurs amendements identiques permettant dès maintenant d’aborder ce débat, il nous a semblé pertinent d’utiliser ce vecteur juridique pour engager l’abrogation de la réforme des retraites, que nous défendons depuis maintenant plusieurs mois.

L’amendement AS161, dont nous nous réjouissons qu’il ait pu passer le filtre de la recevabilité, permet bien, en effet, cette abrogation. Il tend, en effet, à instaurer une surcotisation au régime d’assurance vieillesse qui couvrira les besoins de financement de la branche vieillesse et, surtout, à poser le principe d’une conférence de financement de la branche vieillesse destinée à mobiliser, en agissant sur les compléments de salaire, les exonérations de cotisations sociales et les exemptions d’assiette, les 3,5 à 5 milliards d’euros nécessaires en 2025 et 2026, qui correspondent rendement de cet impôt sur la vie que constitue le recul de deux ans de l’âge légal de départ.

L’adoption de cet amendement sera un signal qui répondra à l’aspiration, majoritaire dans notre pays et portée sur de nombreux bancs de notre assemblée et de cette commission, à l’abrogation de la réforme des retraites.

M. Frédéric Maillot (GDR). Le report à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite introduit par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale du 24 avril 2023 est l’expression d’une violence inouïe, tant par la régression sociale durable qu’il impose aux Français que dans la manière dont le Gouvernement l’a mis en œuvre.

Pour l’imposer contre le peuple, contre une intersyndicale unie, contre les travailleuses et travailleurs et contre la majorité des parlementaires, le Gouvernement a usé et abusé des moyens de procédure prévus par les textes, mobilisant l’article 44, alinéas 2 et 3, l’article 47‑1, alinéas 2 et 3, et l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, ainsi que l’article 38, l’article 42, alinéas 10 et 16, l’article 44 bis, alinéas 3, 9 et 10, et l’article 46 du Règlement du Sénat. Alors que 64 % des Français s’opposaient fermement à cette réforme en avril 2023, ils ne sont aujourd’hui que 11 % à en approuver la mise en œuvre.

Face à cette réforme injuste, injustifiée, inefficace et impopulaire, récusée par une grande majorité de nos concitoyens, les auteurs de l’amendement AS577 proposent la convocation d’une conférence de financement dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi. Il s’agit là d’une demande des organisations syndicales et patronales, qui sont les plus à même de définir les moyens de préserver notre système de répartition sans recul de l’âge ni augmentation de la durée des cotisations, proprement insoutenables pour nos concitoyens. Dans la perspective de l’abrogation de cette réforme, l’amendement prévoit également une ressource nouvelle, basée sur l’augmentation de la cotisation vieillesse déplafonnée sur la part des salaires supérieurs à deux fois le plafond de la sécurité sociale.

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). La réforme des retraites, particulièrement impopulaire et à laquelle près de neuf Français sur dix étaient opposés, a mis dans la rue une intersyndicale qui n’avait jamais été aussi soudée ni ne l’avait été aussi longtemps dans l’histoire sociale de notre pays, ainsi que des cortèges dont les chiffres égalaient ceux des manifestations de mai 68. Il s’agissait là d’une résistance populaire massive et majeure.

Dans un esprit de responsabilité, l’amendement AS977 vise également à convoquer une conférence de financement réunissant les partenaires sociaux pour trouver ensemble des solutions. Une réunion a d’ailleurs déjà eu lieu ce matin pour leur permettre de travailler à des pistes de financement des retraites évitant de repousser l’âge de départ.

Après nous avoir rabâché durant l’examen du texte, avec force trémolos dans la voix et beaucoup de conviction, qu’une augmentation des cotisations patronales n’était pas possible, que c’était un crime de lèse-majesté, vous les augmentez au niveau du Smic. Ce qui a manqué, durant tous les débats sur la réforme des retraites, était la considération qu’il aurait fallu témoigner aux partenaires sociaux, qui auraient dû être convoqués pour un échange avec la Première ministre de l’époque, Elisabeth Borne. Il n’y a jamais eu conférence de financement et il est temps qu’il y en ait une.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Je défends l’amendement AS990.

On ne peut pas recourir en permanence à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution ! Vous avez beau essayer d’ignorer le résultat des élections législatives, il est clair que, d’une manière assez unanime, le peuple français ne veut pas de la réforme des retraites. Déjà pendant le mouvement social, 70 % des Français, dont 93 % des actifs, étaient contre cette réforme. Il faut maintenant que vous vous en fassiez une raison : vous avez perdu les élections et les gens ne veulent pas de votre réforme. Je rappelle à cet égard que les ouvriers ont cinq ans d’espérance de vie en moins que les cadres et qu’à 62 ans, 40 % des personnes qui ne sont pas en retraite sont au chômage.

Vous aviez promis une revalorisation, mais 185 000 retraités seulement ont reçu 30 euros bruts par mois. Parce que les gens ne veulent pas de votre réforme des retraites, vous allez perdre le vote, comme vous les perdez tous depuis le début de l’examen de ce PLFSS, car vous n’êtes majoritaires ni à l’Assemblée nationale ni dans le pays. (Protestations.)

Ne nous racontons pas d’histoires : c’est une évidence que M. Barnier va recourir au 49.3, parce que nous sommes en train de vous battre à tous les votes. J’espère que vous lui ferez passer le message : quand le peuple français et l’Assemblée nationale sont contre la réforme des retraites, il ne peut pas en retirer l’abrogation à coups de 49.3.

Vous avez le droit d’avoir votre opinion, mais il en est une qui est au-dessus de toutes les autres : l’opinion du peuple français, qui demande aujourd’hui d’abroger la réforme des retraites. Avec ou sans 49.3, il va falloir le faire.

Mme Océane Godard (SOC). Mon amendement vise à créer une surcotisation sociale dont le produit serait affecté à la branche vieillesse. Cette surcotisation, qui est une alternative au recul de l’âge légal, s’appliquerait aux revenus supérieurs à quatre fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit environ 8 700 euros nets par mois. Nous estimons en effet que ce niveau de revenu peut absorber sans difficulté une telle cotisation sans que cela entame le pouvoir d’achat des ménages concernés. Notre souci est de répartir l’effort en fonction des capacités de chacun, et non d’appliquer des mesures uniformes à des réalités différentes.

Cette proposition alternative de financement de notre système de retraites permettra ainsi de compenser l’abrogation des mesures de report de l’âge légal et d’accélération du calendrier de la hausse de la durée de cotisation que vous avez instaurées par la réforme de 2023.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous sommes au cœur de la plus grosse bataille de ce quinquennat : la bataille des retraites, qui a conduit à la défaite électorale générale de la Macronie et de ses supplétifs aux élections de juillet dernier. (Protestations.) Ce n’est pas parce que M. Barnier dispose de 28 000 euros de retraite en droits ouverts que c’est le cas de tout le monde. (Exclamations.)

Cette réforme est inacceptable et injuste car, en France, l’espérance de vie sans incapacité à la naissance et de 65 ans pour les femmes de 64 ans pour les hommes, ce qui signifie que de nombreuse personne n’arrivent pas jusqu’à la retraite ou, si elles bénéficient de la retraite – ce que nous souhaitons –, elles ne peuvent pas en profiter, car elles n’ont que quelques semaines ou quelques mois devant elles. Il en va de même dans le monde du travail, dans les derniers moments avant que les salariés puissent liquider leur pension. Chez les plus de 45 ans, en effet, les deux tiers des accidents du travail sont mortels et, inversement, deux tiers des victimes d’accidents du travail ont 50 ans ou plus. Voilà la réalité du monde du travail pour les seniors qui y sont maintenus de force – je précise en effet que chacun a le droit de rester plus longtemps s’il le veut, car le droit à la retraite, c’est le droit de partir quand on le souhaite et qu’on n’en peut plus.

Vous nous expliquez que le problème serait purement financier et budgétaire ? Dont acte : l’amendement AS815 propose de mobiliser 4 milliards d’euros de la manière la plus juste possible, en faisant cotiser à hauteur de 1,5 point les revenus qui se situent au-dessus du plafond de la sécurité sociale, c’est-à-dire à 3 900 euros, pour assurer le financement de la retraite de tous. Ça, c’est de la justice sociale. C’est simple et compréhensible : 4 milliards sont à la clef et nous attendons que vous le votiez.

M. le rapporteur général. Avec ces amendements, vous contournez les règles de recevabilité pour aborder de manière détournée l’abrogation de la réforme des retraites. Vous proposez d’instaurer une surcotisation d’assurance vieillesse qui s’appliquerait aux seuls revenus supérieurs à un montant égal à deux fois le plafond de la sécurité sociale, soit 7 400 euros par mois – ou, pour l’amendement AS92, aux seuls revenus supérieurs à quatre fois ce plafond, soit 14 800 euros par mois. Selon les données de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, l’abrogation du report progressif de l’âge de départ aggraverait le déficit de près de 3,4 milliards d’euros dès 2025 et de 16 milliards en 2032, comme Mme Rousseau, rapporteure thématique, le sait bien.

Je vous retourne donc la question : en cas d’abrogation de la réforme des retraites, avez-vous estimé le montant des recettes issues de votre surcotisation et pouvez-vous garantir que celle-ci, qui correspond à une augmentation du taux de cotisations d’assurance vieillesse de 5,8 % au total sur les revenus concernés, correspond aux besoins de financement de notre système de retraites ?

Par ailleurs, vous n’intégrez pas seulement dans l’assiette de votre mesure les salariés du régime général, mais aussi les artisans, les commerçants et les agriculteurs, dont le taux de cotisation va déjà augmenter avec la réforme de leur assiette sociale votée en LFSS 2024 et, particulièrement pour les agriculteurs, avec la réforme de la prise en compte des vingt-cinq meilleures années pour le calcul de leurs droits à la retraite.

Pour toutes ces raisons, à quoi s’ajoute le fait que ce dispositif n’a fait l’objet d’aucune estimation alors qu’il majore un manque de recettes, avis défavorable à ces amendements.

M. Thomas Ménagé (RN). Nous ne pensions pas arriver aussi vite à la question des retraites et cet amendement sera donc le seul moment où je remercierai nos collègues du Nouveau Front populaire. Plus sérieusement, il n’est pas possible d’aller aujourd’hui vers une augmentation des cotisations alors que nous sommes déjà dans un enfer fiscal, à 28 % de cotisations, soit 10 points au-dessus de la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques. Dans le cadre du rapport lié à la proposition de loi visant à abroger la réforme des retraites dont nous débattrons mercredi, je présenterai des éléments de comparaison à cet égard : le taux de cotisation est inférieur de 10 points en Allemagne, où il est de 18 % – il est encore de 16 % en Belgique et de 13 % au Danemark. En outre, les cotisations vieillesse sont aujourd’hui le premier poste de dépenses pour un travailleur, devant le logement, avec 928 euros contre 920 pour le salaire moyen. On ne peut pas procéder à une telle augmentation sur un coin de table.

On ne peut pas dire non plus, comme l’a fait M. Guedj défendant l’amendement de M. Vallaud, que cet amendement vise à abroger la réforme des retraites – un peu de sérieux, s’il vous plaît ! Ce peut être un premier jalon, mais le moment où nous pourrons abroger la réforme des retraites sera ce mercredi, où nous examinerons en commission le texte que défendra le Rassemblement National le 31 octobre : la balle est dans votre camp. Vous pourrez alors vous positionner et nous pourrons voir si vous êtes en conformité avec ce que vous disiez durant les élections, dans vos professions de foi et en faisant les marchés, lorsque vous vous affirmiez favorables à l’abrogation. De fait, aujourd’hui, votre positionnement n’est pas très clair – je vous rappelle que vous avez participé à la mise en place de cette réforme en appelant par deux fois à voter pour Emmanuel Macron et en faisant tout, par votre comportement en séance, pour empêcher le débat, votre obstruction nous empêchant de débattre de l’article 7.

Vous aurez donc mercredi, dans le cadre de notre niche parlementaire, l’occasion de vous rattraper dans et d’être en conformité avec vos engagements envers vos électeurs.

M. Jérôme Guedj (SOC). Nous sommes vraiment au cœur du sujet. M. le rapporteur général nous demande si nous sommes prêts à assumer des financements alternatifs ; or c’est précisément l’objet de cet amendement, qui vise à réunir une conférence de financement. Notre proposition a un rendement d’environ 3,5 milliards d’euros, qui couvre le déficit attendu pour 2025. En 2026, le rendement de la réforme des retraites était de 4,8 milliards : avant de parler du rendement de 16 milliards en 2032, regardons cette montée en puissance. Nous pouvons dégager dès à présent les 3, puis 5, puis 7, puis 11 et, à terme, 12 et 13 milliards d’euros nécessaires si nous nous empruntons cette voie.

Monsieur Ménagé, si nous cherchons réellement l’efficacité dans l’abrogation de la réforme des retraites, c’est dès à présent que nous devons agir, dans le cadre de ce PLFSS, car celui-ci est tenu par les délais constitutionnels. Nous pouvons ainsi dégager dès maintenant ces ressources et créer la conférence de financement que vous proposez. À l’inverse, en admettant même que votre proposition de loi soit adoptée, elle partira dans les limbes du Sénat et ne reviendra jamais dans une navette parlementaire : c’est de la poudre aux yeux. Si vous voulez vraiment être efficaces pour marquer votre volonté d’abroger la réforme des retraites, faites comme nous – le rapporteur général a relevé à juste titre la ruse par laquelle nous avons contourné l’irrecevabilité. Nous le faisons cependant en affichant une volonté politique : l’instauration de cotisations vieillesse touchant les revenus qui atteignent deux fois ou quatre fois le plafond de la sécurité sociale, et n’affectant donc pas l’écrasante majorité des salariés, ainsi que, pour compléter, la création d’une conférence de financement.

Ensuite, les propositions sont nombreuses : nous pouvons taxer les retraites chapeaux, les parachutes dorés et les exemptions d’assiette. Nous pouvons aussi instaurer une taxe sur les superprofits afin d’abonder le Fonds de réserve pour les retraites. Il existe aujourd’hui une palette de financements qui montre que d’autres ressources sont possibles. Comme nous l’avons dit dans le débat sur les amendements au PLFRSS portant articles additionnels après l’article 2, un autre financement des retraites est possible sans passer par cet impôt sur la vie. Si vous voulez sincèrement abroger la réforme des retraites, il faut voter cet amendement.

M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Ces amendements nous permettent de réparer une faute historique de la minorité présidentielle, qui a provoqué de grandes fractures, et d’apaiser la société de notre pays. De fait, nous avons besoin d’apaisement démocratique et social, plutôt que d’entêtement.

Apaisement social d’abord, parce que cette loi a été pour les Français une grande injustice, notamment pour ceux qui souffrent le plus. C’est en effet un impôt sur la vie car, quand on souffre au travail, plus on travaille longtemps, plus on souffre longtemps et plus on risque de mourir plus jeune. Sans revenir sur les débats qui nous ont longtemps animés, je rappelle que la réforme des retraites est d’une grande brutalité sur les plans social et sanitaire.

Il faut aussi un apaisement démocratique, car vous n’avez reçu aucun consentement pour imposer cette réforme – ni celui des organisations syndicales qui, comme vient de le rappeler Sandrine Rousseau, ont été unanimes, dans un mouvement social, puissant, exemplaire et inédit dans ce pays, pour rejeter en bloc cette réforme, ni celui de l’opinion publique, que vous auriez pu prendre à témoin contre les organisations syndicales et les parlementaires que nous étions. Comme l’ont montré toutes les enquêtes d’opinion au fil des mois de débat, plus vous expliquiez cette réforme et plus les Français la comprenaient, plus ils la rejetaient – neuf actifs sur dix et sept Français sur dix l’ont refusée. Vous n’avez pas eu non plus le consentement du Parlement, puisque nous n’avons pas été appelés à voter cette réforme – vous saviez en effet que, si vous alliez au vote, elle serait rejetée par l’Assemblée nationale.

Cette loi n’a pas été votée mais elle est passée en force et a été imposée. Sur une question aussi importante pour la construction de notre société, qui délite notre contrat social et notre pacte républicain, nous ne pouvons pas nous satisfaire de nous passer de la démocratie. Nous proposons donc de tourner la page et d’apaiser le pays avec une méthode de financement qui permette de réintroduire de la démocratie et de la justice sociale. Cette assemblée en sortirait grandie.

M. Thibault Bazin (DR). Ce débat est très sensible et peut faire naître de nombreuses attentes. Mieux vaut donc revenir au fond. Il faut assurer l’équilibre de notre système de retraites, faute de quoi nos pensions diminueront demain – c’est un principe de réalité. Or ces amendements ne réformeront pas véritablement les retraites – ils font même semblant de remettre en cause la réforme. Il y a là, en effet, une forme d’illusion, car ce qui est proposé ne modifie en réalité ni l’âge de départ ni la durée du travail. On aperçoit l’esquisse d’une solution dans l’augmentation des cotisations, mais j’y suis profondément opposé, car l’augmentation des cotisations diminuera le revenu net de ceux qui travaillent, ce qui n’est pas acceptable – comme il n’est pas acceptable de réduire les pensions des retraités.

Pour assurer la pérennité de notre système de retraites, il existe deux axes. Le premier est le travail : il y a là un véritable défi en matière de travail des jeunes et des seniors. Nous devons, dans ce domaine, remettre à l’ordre du jour certaines mesures que nous avions proposées et que le Conseil constitutionnel a censurées. L’autre axe est celui du renouvellement des générations. En effet, la crise de la natalité est la véritable menace sur l’avenir de notre système par répartition : imaginez les conséquences d’une baisse de natalité de 100 000 enfants sur dix ans ! Nous devons donc agir à court terme par le travail et à moyen terme par une politique démographique ambitieuse.

En outre, nous ne disposons pas d’une étude d’impact pour ces amendements et il ne serait pas sérieux de les voter en l’état, car ils seraient sans lendemain. Nous devons mener une étude et une concertation, notamment sur les retraites progressives. Il faut ouvrir plusieurs chantiers, par exemple sur la pénibilité, mais il ne faut pas augmenter les cotisations et diminuer le pouvoir d’achat de nos concitoyens qui souffrent déjà de la situation.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Vous invoquez le pouvoir d’achat, mais nous évoquons quant à nous des cotisations touchant des personnes percevant des revenus supérieurs au plafond de la sécurité sociale, soit plus de 4 000 euros par mois : il ne s’agit pas de super-riches, mais de personnes pour lesquelles il est possible de négocier une augmentation d’un point de cotisation pour assurer directement l’équilibre des comptes de l’assurance vieillesse l’année prochaine. Du reste, cet argent ne disparaît pas, car il va aux retraités, lesquels ne vont pas cacher les billets dans leur oreiller, mais consommer : la mesure ne changera rien au pouvoir d’achat dans le pays. Notre amendement est donc plus juste et il génère, je le rappelle, 4 milliards d’euros. Soit donc vous vous passez volontairement de ces 4 milliards dans les caisses de l’assurance vieillesse, soit vous les prenez.

Au-delà de la confusion, toujours une peu étonnante, que font nos collègues du Rassemblement National entre impôt et cotisation, ils ont évoqué différents modèles, dont celui de l’Allemagne. Je rappelle que, dans ce pays, le système de retraites se traduit par 20 % de pauvreté. Les retraités allemands sont en effet parmi les plus pauvres d’Europe. Est-ce là le modèle de pensions de retraite que vous nous vendez ? En Allemagne, plus d’un quart des plus de 80 ans vivent sous le seuil de pauvreté, si bien que, dans n’importe quelle grande ville allemande, on voit des personnes âgées récupérer les bouteilles en verre dans les poubelles pour les rendre à la consigne, six ou sept bouteilles leur permettant d’acheter une boîte de conserve pour se nourrir. Voilà le quotidien des milieux les plus paupérisés que sont, en Allemagne, les seniors. Si c’est ce qui vous inspire, nous ne vivons pas sur la même planète.

M. Fabien Di Filippo (DR). Quel message envoyez-vous aux travailleurs en essayant toujours d’alourdir un peu la barque ? Surtout, comme le dit Thibault Bazin, vous voulez créer une surcotisation alors que la pente démographique accélère dans la descente. Comment ferez-vous demain, avec 1,6 ou 1,4 enfant par femme ? Vous instaurerez encore des surcotisations sur les surcotisations ? En l’état actuel, le système par répartition, créé à une époque où l’on comptait quatre enfants par foyer, n’est pas tenable, quelles que soient la fiscalisation ou la taxation par lesquelles vous voulez le soutenir.

La seule issue réside dans une politique familiale beaucoup plus vigoureuse, qui est à l’inverse de votre philosophie et de ce qui est porté depuis dix ans, ou dans la création d’un système individuel de capitalisation. Voilà la vérité. Tout ce que vous ferez reviendra à détruire de l’activité et de l’emploi, à appauvrir encore le système et à fragiliser le modèle social.

M. Christophe Bentz (RN). Chers collègues de l’extrême gauche, non seulement nous ne voterons pas vos amendements, mais nous voterons même contre. Tout d’abord, en effet, vous mentez, car ces amendements ne sont pas une manière d’abroger la réforme des retraites. Comme l’a dit mon collègue, la vraie occasion vous en sera donnée mercredi matin en commission.

Par ailleurs, vous vous y prenez à la va-vite, par un amendement au PLFSS. Tout cela manque de sérieux : nous n’avons même pas d’étude d’impact.

Enfin, je souligne à mon tour que vous allez encore augmenter les cotisations, dans un pays déjà le plus taxé au monde.

M. Hendrik Davi (EcoS). La réforme des retraites a été refusée par 90 % des actifs et tous les syndicats de salariés. Vous avez d’ailleurs perdu des élections pour cette raison.

Le véritable débat, notamment avec les collègues du Rassemblement National, est de savoir comment on finance l’abrogation de la réforme des retraites. Ce qui a été dit à ce sujet est faux. Si on augmente le niveau des cotisations, en particulier pour des salaires assez élevés, on ne réduira pas le pouvoir d’achat. Il existe normalement des conventions collectives qui font que les salaires resteront au même niveau. C’est un rééquilibrage entre la part du travail et celle du capital qui se produira. Je rappelle, à cet égard, que 10 % de la richesse sont passés du travail au capital, ce qui s’est très mécaniquement traduit par une hausse des dividendes. Près de 80 milliards d’euros sont ainsi versés aux actionnaires dans les grandes entreprises françaises. Nous proposons, en augmentant le taux de cotisation, de revenir sur cet « exil fiscal » qui voit de l’argent partir dans la finance. Nous récupérerons 4 milliards qui permettront d’abroger la réforme des retraites.

M. Philippe Vigier (Dem). Il est souvent question du couperet de la commission des affaires sociales, mais vous voyez que nous pouvons débattre.

J’ai été surpris lors de l’audition des ministres, la semaine dernière, que pas un groupe d’opposition ne pose des questions sur les retraites : je me suis demandé s’il s’agissait d’un changement de posture de leur part.

Vous voulez supprimer la dernière réforme des retraites. Il me semblait pourtant avoir lu dans le programme du NFP que vous vouliez revenir à la retraite à 60 ans. Êtes-vous en train de nous dire que vous avez définitivement renoncé à cette idée, parce que vous arrivez à vous satisfaire de la réforme de Mme Touraine ? Ceux qui nous expliquent qu’il faut revenir à la retraite à 60 ans ont voté pour cette réform,e qui prévoyait un passage progressif à 62 ans.

Le déficit, Jérôme Guedj le sait parfaitement, n’est pas de 4 milliards d’euros. Combien l’État donne-t-il chaque année pour équilibrer notre système de retraites ? Il faudrait ajouter environ 35 milliards au chiffre actuel.

Le groupe Les Démocrates avait déposé un amendement qui demandait une clause de revoyure en 2026 car, oui, nous devons discuter de certains sujets. Il faut reprendre le dialogue avec l’ensemble des partenaires sociaux sur la question de la pénibilité, qui n’est pas réglée, et sur celle des femmes. Mais ne relançons pas le débat ce soir, il faut avancer.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement AS496 de M. Fabien Di Filippo

M. Fabien Di Filippo (DR). Cet amendement vise à faciliter le cumul emploi-retraite, qui concerne actuellement 3,6 % des retraités ayant 55 ans ou plus. Comme l’a dit Thibault Bazin, un des enjeux pour notre système de retraites et notre économie en général est d’arriver à avoir un niveau de travail plus important, notamment chez les seniors. Beaucoup de secteurs souffrent d’une pénurie de main-d’œuvre alors que des gens à la retraite aimeraient bien pouvoir reprendre, sans perdre leur pension, une activité à temps partiel ou complet. Ce que nous vous proposons fait partie des mesures qui permettraient d’encourager le travail sous toutes ses formes et à tous les âges dans notre société, ce qui serait salvateur pour notre économie et notre modèle social.

M. le rapporteur général. Vous souhaitez, par cet amendement, relever le plafond de revenus pour le cumul emploi-retraite non créateur de droits et exonérer de cotisations chômage l’employeur d’un retraité qui reprend une activité. Depuis la réforme des retraites d’avril 2023, le dispositif de cumul emploi-retraite plafonné a été complété par une possibilité de cumul emploi-retraite intégral qui est beaucoup avantageux, car créateur de droits pour les personnes concernées. Cette mesure permet à un retraité de reprendre un emploi en cumulant intégralement les revenus qu’il en tire avec sa pension et, de plus, en augmentant ses droits à la retraite. J’ai peur que votre proposition soit moins favorable et aille à l’encontre de l’objectif que vous visez.

Par conséquent, demande de retrait ; sinon, avis défavorable.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). La volonté de maintenir des personnes en emploi le plus longtemps possible, dans le cadre de la réforme des retraites que vous avez faite, ou de pourvoir des emplois vacants avec des retraités ne peut pas être compatible avec une politique d’accès des jeunes à l’emploi. Il arrive que des personnes conservent ou reprennent un emploi pour lequel une substitution n’est pas possible, mais ce n’est pas vrai dans beaucoup de cas. Ce type de dispositif prive d’autres personnes d’un accès à l’emploi ou allonge le délai consécutif à la formation initiale.

M. Thibault Bazin (DR). Cet amendement de Fabien Di Filippo est vraiment très intéressant. Nous avons un problème de taux d’emploi des seniors et la question du cumul emploi-retraite n’a pas été parfaitement appréhendée lors de la réforme de l’an dernier. Le dispositif qui a été adopté crée de nouveaux droits, ce qui est très bien – une seconde liquidation de retraite est possible –, mais certains retraités qui n’ont pas eu une carrière complète n’ont pas droit au déplafonnement. J’ai rencontré des aides-soignantes qui, après avoir travaillé dans des maisons de retraite, se trouvaient dans cette situation. Cela pénalise des personnes qui ont dû, par exemple, arrêter de travailler pour accompagner un parent en fin de vie et qui ont de petites pensions. Autre difficulté, ces personnes ont souvent un âge auquel elles ne peuvent plus prétendre au chômage. Les exonérer de cotisations chômage aurait donc un sens. On ne les exonérerait pas, en revanche, de cotisations retraite, puisque la reprise d’une activité leur donnerait de nouveaux droits. Nous soutiendrons cet amendement qui vise à faciliter le cumul emploi-retraite, mais il faudra aller encore plus loin.

M. Hendrik Davi (EcoS). Très cher collègue, nous ne devons pas vivre exactement dans le même pays. J’ai rencontré des jeunes qui ne trouvent pas d’emploi et des personnes de plus de 55 ans qui ont été licenciées et n’arrivent pas à retravailler alors qu’elles le voudraient, mais très sincèrement, si vous avez trouvé des aides‑soignantes ou des professeurs des écoles qui souhaitent retravailler à 70 ans, je veux bien que vous nous donniez des noms. Les gens sont cassés, ils veulent la plupart du temps prendre leur retraite, à 60 ans – c’est pourquoi nous y reviendrons.

Mme Josiane Corneloup (DR). Il n’y aura pas d’obligation : chacun sera libre de reprendre ou non un travail. Il faut laisser aux gens la possibilité de le faire et supprimer des cotisations chômage dont ils ne pourront jamais bénéficier, mais qui sont une charge et un frein. Par ailleurs, levons les plafonds s’il en existe pour ceux qui n’ont pas fait une carrière complète.

M. Fabien Di Filippo (DR). Il faut cesser de toujours voir le travail comme une souffrance. C’est précisément pour les personnes dont nous parle l’extrême gauche, celles qui n’ont pas de carrière complète, que nous devons agir : ce sont celles qui ont les plus petites retraites et qui ont le plus souvent besoin de reprendre une activité pour avoir un niveau de revenus décent.

M. le rapporteur général. Deux cas de figure sont possibles, selon qu’on est à taux plein ou non, et il faudrait bien mesurer l’impact du déplafonnement selon les situations. Je vous propose donc de retirer l’amendement pour le retravailler en vue de la séance.

M. Fabien Di Filippo (DR). Je reconnais que mon amendement est imparfaitement rédigé et je choisis la voie d’un compromis avec le rapporteur général.

L’amendement est retiré.

 

Amendement AS648 de M. Michel Lauzzana

M. Michel Lauzzana (EPR). Il s’agit de lutter contre le manque de médecins : compte tenu de la démographie médicale, beaucoup vont encore partir à la retraite. Nombreux sont ceux qui voudraient continuer à travailler de manière réduite et à un taux intéressant. Lorsqu’ils font des remplacements, ils cotisent à hauteur de 13,5 % jusqu’à 19 000 euros de bénéfices, puis à hauteur de 21,20 %. Selon les remontées de terrain, certains médecins se limitent donc à 19 000 euros. Je vous propose de vous porter le seuil à 38 000 euros.

M. le rapporteur général. Nous sommes plusieurs à avoir réfléchi à une amélioration du cumul emploi-retraite pour les médecins, afin de lutter contre les déserts médicaux. J’ai ainsi déposé un amendement qui va un peu plus loin que le vôtre. Vous proposez un taux unique de prélèvement pour les médecins retraités qui reprennent une activité de remplacement. Ce taux dérogatoire s’appliquerait notamment à la CSG-CRDS, aux cotisations maladie et aux cotisations vieillesse. Je vous proposerai plutôt des exonérations afin d’inciter vraiment au cumul emploi-retraite.

Par conséquent, demande de retrait.

M. Michel Lauzzana (EPR). Si j’ai déposé cet amendement, c’est pour que la solution soit simple : le plafond changera, mais le mécanisme restera le même.

Je fais des remplacements dans un groupe médical : il n’y a plus de jeunes remplaçants, nous n’avons plus que des retraités. Trois d’entre eux m’ont dit qu’ils s’arrêtaient à 19 000 euros, parce qu’ensuite l’augmentation du taux de cotisations faisait qu’ils devraient travailler beaucoup plus.

M. le rapporteur général. Je partage votre souhait d’une solution simple. Mon amendement permettra, en cas de cumul emploi-retraite, une exonération de toutes les cotisations vieillesse et un déplafonnement. On manque vraiment de médecins à certains endroits. Je connais un cabinet médical dont les deux médecins sont partis à la retraite ; ils n’ont accepté de continuer une activité qu’à condition d’être réemployés par l’hôpital dans le cadre d’un cumul emploi-retraite.

M. Thibault Bazin (DR). Nous souhaitons depuis longtemps une évolution. Nous avons obtenu dans la LFSS 2023 une mesure qui n’était, malheureusement, que transitoire. Ce type de dispositif fait pourtant partie des mesures efficaces contre la désertification médicale, étant entendu que la question va au-delà des médecins : d’autres professionnels de santé mériteraient d’être soutenus de la même manière. J’aimerais que nous profitions du travail qui sera réalisé en vue de la séance et de la navette pour les inclure.

Ce qui a changé, c’est qu’une seconde liquidation de retraite est désormais possible dans le cadre du cumul emploi-retraite. Il faut être clair : si des personnes veulent cotiser à nouveau, elles bénéficieront d’une seconde liquidation ; si elles ne veulent pas payer de cotisations, il n’y aura pas de seconde liquidation. Des médecins, mais pas seulement eux, peuvent souhaiter ne pas cotiser. Comme nous avons besoin d’heures de travail, effectuées par des soignants de proximité, nous soutiendrons à la fois l’amendement de notre collègue Lauzzana et celui du rapporteur général, que nous souhaitons encore élargir.

M. Hendrik Davi (EcoS). La proposition qui nous est faite me laisse rêveur. Nous avons un problème de démographie médicale et de déserts médicaux, mais la solution serait de faire travailler des médecins au-delà de 60, 65 ou 70 ans – et pourquoi pas 70 ou 80 ans ? La solution serait d’avoir des jeunes. La réforme Pass/L.AS pose un problème : on ne forme pas assez de médecins et les études de santé sont mal encadrées. Vous avez prétendument levé le numerus clausus, mais le nombre de professionnels qui sont chargés de former – praticiens hospitaliers, maîtres de conférences et professeurs – est passé de 7 811 en 1996 à 6 680. Augmentons le nombre de professeurs et de maîtres de conférences dans nos hôpitaux, ainsi que le nombre d’étudiants formés, et nous aurons des médecins. Payons correctement les externes : leurs revenus ne correspondent même pas à ceux d’un stage de master 2 – j’ai déposé un amendement à ce sujet. Par ailleurs, il faut mieux organiser les études au niveau de l’internat. Vous aurez alors des jeunes et vous serez mieux soignés par eux que par des médecins retraités de 75 ans – je suis désolé de le dire, mais c’est la réalité. (Protestations.)

M. le président Frédéric Valletoux. Je vous rappelle qu’un excellent texte, qui doit s’appeler la « loi Valletoux », a relevé à 75 ans l’âge auquel certains médecins peuvent exercer – et à 72 ans pour les infirmières.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Les Françaises et les Français ont voté sur ce sujet au mois de juillet. Le programme de ceux qui ont gagné les élections était assez clair : il parlait d’une régulation de l’installation des médecins, à l’image de ce que nous faisons pour les sages-femmes et les pharmaciennes et pharmaciens. Il ne s’agirait pas d’une régulation bureaucratique ou coercitive : on serait libre de s’installer partout où existe une sous‑dotation en professionnels de santé. Ce type de solution a déjà été adopté dans notre pays.

La question s’est jouée à rien dans l’hémicycle : c’est le RN qui vous a permis d’éviter la régulation de l’installation et donc de favoriser la propagation des déserts médicaux. Maintenant que cette solution a été écartée, vous faites la course au panier percé : on pourrait exonérer les revenus jusqu’à 38 000 euros. Et pourquoi pas 50 000 ou 1 million ?

La baisse des cotisations ne peut pas être la solution. D’abord, si vous voulez mieux payer les gens, il ne faut pas baisser leurs cotisations, mais augmenter leur rémunération. Ensuite, vous parlez de demandes formulées par trois personnes que vous connaissez. Je connais du monde, moi aussi, mais je trie un peu avant de faire des propositions. Enfin, combien coûtera cette baisse de cotisations ? Vous parlez sans cesse d’étude d’impact : travaillez un peu sur la question quand il s’agit de vos idées. Combien de lits d’hôpitaux, de postes de soignants ou de médicaments déremboursés cela représentera-t-il ? Dans le doute, notre réponse sera non.

Mme Josiane Corneloup (DR). Nous ne devons nous priver d’aucune possibilité de bénéficier davantage de temps médical. Je comprends la question de la formation des jeunes et celle de l’augmentation du numerus clausus, mais je ne vois pas en quoi il serait nuisible de faire appel à des médecins retraités qui voudraient travailler. Il est choquant d’entendre qu’il vaudrait beaucoup mieux être soigné par des médecins jeunes.

M. Michel Lauzzana (EPR). Nous avons effectivement besoin de toutes les mesures possibles pour faire face à la désertification médicale. Pourquoi pas une obligation d’installation dans dix, quinze ou trente ans, quand nous aurons suffisamment de médecins, mais aujourd’hui cela reviendrait à essayer de répartir la pénurie. C’est donc une fausse solution.

Nous sommes en train d’augmenter le nombre d’étudiants en médecine, mais un problème de compétences se pose : on ne peut pas demander à tout le monde de faire des formations. Tout ne se règle pas d’un claquement de doigts.

Face au mur de la désertification médicale, nous avons besoin d’une multiplicité de mesures. Aucune ne permettra, à elle seule, de résoudre tous les problèmes.

Mme Joëlle Mélin (RN). Comme dans l’enseignement et beaucoup d’autres secteurs, on va chercher des anciens qui ont pris leur retraite. Pourquoi les jeunes refusent-ils de démarrer plus tôt leurs études ? Le Pass/L.AS pose de véritables problèmes. Pourquoi, alors que le numerus clausus aurait été supprimé, existe-t-il encore un numerus apertus ? Pourquoi 20 ou 25 %, si ce n’est plus, des étudiants ne finissent-ils pas leurs études ? Je ne parle pas seulement des futurs médecins, mais aussi des paramédicaux. Pourquoi, une fois sur le terrain, 20 à 25 % des médecins et des paramédicaux ne restent-ils pas en activité plus de cinq ans ? La situation à laquelle nous arrivons ainsi est tout à fait insupportable. Nous souffrons d’une pénurie de moyens, y compris humains, pour faire tourner le système de santé tout en restant dans l’excellence – la médecine low cost n’est pas une solution. Il est quand même un peu dommage, monsieur le président, que 1 100 places d’internat n’aient pas été pourvues cette année.

M. le président Frédéric Valletoux. Vous comprendrez que je ne peux pas vous répondre dans la situation où je me trouve, mais nous en reparlerons à la fin de cette réunion.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Nous sommes évidemment contre cet amendement qui nous coûterait extrêmement cher alors que d’autres solutions existent.

Si un collègue a déclaré qu’il valait mieux se faire soigner par des jeunes, je pense que c’était surtout parce que des médecins plus âgés méritent de partir enfin à la retraite et d’être remplacés par des plus jeunes. Quand on a travaillé toute sa vie, on a le droit de prendre sa retraite. Ne caricaturez pas ce qui a été dit.

Vous nous expliquez, monsieur Lauzzana, qu’une seule mesure ne suffira pas : c’est vrai. Nous pourrions réguler l’installation, mais vous avez voté contre. Nous pourrions augmenter le nombre de médecins formés en supprimant vraiment le numerus clausus, mais vous votez contre des mesures qui le permettraient. On forme aujourd’hui autant de médecins que dans les années 1970 alors que la France avait 15 millions d’habitants de moins. Quand le concours de médecine a été reformé, avec l’introduction des examens cliniques objectifs et structurés, nous avions dit que cela conduirait à une loterie et que nous perdrions beaucoup d’internes, mais vous n’avez rien voulu savoir. Nous avons donc perdu 1 600 internes. S’agissant des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), on pourrait faire sauter un numerus clausus qui empêche des médecins exerçant depuis des années en France de devenir de véritables médecins, respectés, mais vous le refusez.

La seule mesure qui vous intéresse, c’est de faire des cadeaux fiscaux aux médecins les plus âgés. On pourrait réguler l’installation, régulariser les médecins qui se donnent pour l’hôpital et réintroduire un vrai concours, qui ne dégoûte pas les médecins, mais vous dites non à chaque fois.

Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). S’agissant des aides aux médecins, nous avons déjà beaucoup donné, pour l’installation, pour l’accompagnement des maîtres de stages, à l’occasion du covid et pour les retraites. Ce que nous avons fait n’a jamais valu et ne vaudra sans doute jamais pour d’autres professionnels de santé. La question du manque de médecins est cruciale, c’est vrai, mais ceux qui souhaitent travailler peuvent le faire en bénéficiant des mêmes mesures que d’autres professions. Ne surajoutons pas des dispositifs.

M. le président Frédéric Valletoux. Je propose de revenir plus directement à l’amendement, en incitant les futurs orateurs à faire savoir clairement s’ils le soutiennent ou s’y opposent.

M. Yannick Monnet (GDR). Je serai très clair : je ne suis ni pour ni contre, bien au contraire. (Sourires.)

La mesure proposée ne me choque pas. Je n’oppose pas les dispositions que vous n’avez pas prises pendant sept ans, mais qui s’imposent pour former davantage de médecins, et la nécessité de dégager du temps médical.

J’ai en tête des exemples de médecins à la retraite qui assurent la coordination de centres municipaux – publics – de santé. Vu la situation, nous n’avons tout simplement pas le choix : si nous ne faisons pas appel aux « vieux médecins » – excusez-moi de parler ainsi, c’est pour aller vite –, il est certain que nous n’arriverons pas à soigner tout le monde.

La question qui se pose n’est pas tant celle des cotisations que celle du temps dédié à l’administratif – jusqu’à un tiers du total ! Les « vieux médecins » reviennent à la seule condition que leur charge administrative soit allégée. Cette évolution permettrait, plus généralement, de dégager de façon beaucoup plus efficace du temps médical.

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Les médecins retraités qui reviennent cumulent leur retraite et les revenus liés à la reprise d’une activité. Ils ont donc des niveaux de salaire extrêmement élevés. L’amendement vise à supprimer des cotisations sur les rémunérations perçues quand ces médecins reviennent aider, mais je ne vois pas au nom de quoi nous le ferions. Ce n’est pas cela qui créera un appel d’air : ils cumulent déjà retraite et emploi.

Je vous alerte sur le fait que de telles mesures, face à la difficulté dans laquelle se trouvent les services médicaux, peuvent certes avoir un intérêt dans certains cas, mais qu’elles ne sont pas sans danger. Ces médecins viennent ponctuellement, choisissent leurs horaires et n’assurent pas la continuité des soins, ce qui est d’ailleurs normal, parce que ce sont des retraités.

Je rejoins Hendrik Davi, qui ne voulait pas dire que les médecins âgés n’étaient pas compétents, mais qu’ils méritaient de prendre leur retraite et qu’il fallait investir davantage dans la jeunesse au lieu d’adopter des mesures insatisfaisantes, notamment pour la continuité des soins.

Mme Annie Vidal (EPR). Je suis très clairement pour l’amendement. Regardons la situation en face : nous avons des difficultés d’accès aux soins dans l’ensemble du territoire. Il faut adopter toutes les mesures qui vont dans le sens d’une facilitation.

Nous avons 11 000 étudiants en médecine en 2024 et leur nombre passera à 12 000 en 2025. Il y a cette année 1 675 médecins de plus, alors que les effectifs étaient en baisse depuis 2010. Les mesures qui ont été prises – nous n’avons pas rien fait depuis sept ans, contrairement à ce qu’on entend sans arrêt – commencent à produire une dynamique.

Je n’apprendrai rien à personne en disant qu’il faut dix ans pour former un médecin, quelles que soient les mesures prises. Ainsi, bien que nous ayons adopté des dispositions nouvelles en 2020 et 2021, nous ne pourrons pas bénéficier immédiatement de leurs effets.

Au-delà du soutien aux médecins retraités, nous avons pris des mesures pour des personnels paramédicaux qui ont aussi des compétences et peuvent améliorer l’accès aux soins.

Enfin, les propos âgistes me choquent au plus haut point : on peut avoir 65 ou 80 ans et être encore très compétent.

M. Philippe Juvin (DR). Lors de l’examen du PLFSS 2023, M. Thibault Bazin et moi-même avions été les premiers à déposer un amendement similaire, afin d’exempter de cotisations vieillesse les médecins libéraux souhaitant continuer à travailler pendant leur retraite – seuls ceux-ci sont concernés par cet amendement, et non les médecins salariés, madame Rousseau.

En effet, ces cotisations, que nous les obligeons à verser, ne leur ouvrent pas de droits. Les en exempter ne revient donc pas à leur offrir un cadeau. Notre amendement, après avoir été adopté en commission, a été repris dans la version du PLFSS sur laquelle le Gouvernement a engagé sa responsabilité. Toutefois, il a plafonné l’exonération à 80 000 euros de revenus, alors que le revenu médian des médecins retraités est de 90 000 euros, si bien que de nombre d’entre eux ont été exclus du champ de l’exemption. En outre, le Gouvernement a limité la durée de l’exemption à un an, et le décret d’application n’a été pris qu’au bout de six mois.

Nous ne prétendons pas obliger les médecins libéraux à travailler. De plus, la présente exemption ne coûterait rien à la collectivité, puisqu’il n’est pas question que les médecins concernés versent des cotisations vieillesse, car elles ne leur ouvrent pas de droits. Enfin, je rappelle qu’actuellement, un quart des psychiatres libéraux exercent dans le cadre du cumul emploi-retraite. Si nous ne favorisons pas le travail des médecins retraités libéraux, nous tuerons le système de santé.

M. Laurent Panifous (LIOT). Félicitons-nous que des médecins retraités acceptent de travailler et nous permettent d’être correctement soignés en cette période difficile.

Quant à ceux qui ne souhaitent pas travailler durant leur retraite, je doute que ce soit à cause des cotisations. Ils acceptent de verser celles-ci, dès lors que leur montant est raisonnable – c’est-à-dire n’atteint pas celui des cotisations des actifs.

À mon sens, pour inciter davantage de médecins retraités à reprendre un exercice, il est en revanche crucial de simplifier leurs démarches. Ils doivent consacrer leurs heures d’activité aux soins et non à l’administration. Une telle réforme ne devrait pas être si compliquée à mener.

M. le rapporteur général. Monsieur Clouet, madame Rousseau, j’entends que l’exonération proposée aurait un coût, mais ce n’est pas la question.

Les déserts médicaux représentent quasiment 87 % du territoire national. Dans certains d’entre eux, aucun soin ne serait possible sans des médecins cumulant emploi et retraite. Certains nous reprocheront de faire deux poids deux mesures, mais nos décisions, comme celles d’un médecin, reposent sur une évaluation des bénéfices et des risques et, en l’occurrence, le bénéfice de la mesure est supérieur à ses risques pour nos comptes.

Oui, madame Dubré-Chirat, madame Vidal, la majorité présidentielle a beaucoup fait pour améliorer l’offre médicale, mais peut-être n’a-t-elle pas fait l’essentiel. Il fallait clairement abroger le numerus clausus bien plus tôt, sous le mandat de M. Sarkozy ou de M. Hollande. Quant à savoir si son remplacement par le numerus apertus sous le mandat de M. Macron est une abrogation, nous ne serons pas d’accord.

Pour en juger, attendons la publication du rapport d’évaluation des études médicales que prépare le Sénat et la reprise des travaux d’évaluation de la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé commencés sous la précédente législature. Pour accroître le temps médical, il faut en tout cas reprendre en main notre outil de formation. Actuellement, les cursus regroupent, outre les étudiants français suivant un cursus traditionnel, ceux qui reviennent en France dans le cadre du programme Erasmus et les Padhue. Ces publics pourraient être mieux ciblés.

Il nous faut enfin accroître l’attractivité du cumul emploi-retraite pour les médecins. M. Monnet l’a indiqué, ceux-ci fuient la paperasserie. Ils souhaitent en outre des exonérations.

Je suis toutefois défavorable au présent amendement, car l’exonération qu’il prévoit concerne toutes les cotisations, alors que par souci d’équité, elle ne devrait porter que sur les cotisations vieillesse ; en outre, elle est plafonnée, ce que les médecins ne souhaitent pas. Enfin, dans sa rédaction actuelle, l’amendement a le double défaut de ne pas concerner les médecins libéraux et de ne s’appliquer qu’aux remplaçants. Nous devons aller plus loin.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement AS87 de Mme Océane Godard

Mme Océane Godard (SOC). Nous proposons d’assujettir les revenus financiers des sociétés financières et non financières à une contribution d’assurance vieillesse au même taux que les cotisations patronales et salariales du secteur privé.

Le gouvernement Borne avait argué que le déficit du système de retraites était anticipé à 13,5 milliards d’euros en 2030 pour imposer par 49.3 le report de deux ans de l’âge de la retraite, malgré le rejet de la quasi-totalité des Françaises et des Français.

Or la piste de financement présentée ici rapporterait près de deux fois plus que cette réforme. Des solutions alternatives permettant une meilleure redistribution sont possibles.

M. le rapporteur général. Les revenus financiers sont déjà imposés à 30 % au titre du prélèvement forfaitaire unique (PFU) – plus précisément à 12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu et à 17,2 % au titre des prélèvements sociaux. En outre, un amendement du groupe Dem au PLF 2025 a été adopté, afin de porter le taux du PFU à 33 %, dont 15,8 % au titre de l’impôt sur le revenu. Je ne vois pas l’intérêt de créer un prélèvement supplémentaire sur cette base fiscale.

Avis défavorable.

M. Thomas Ménagé (RN). Nous ne pourrons pas poursuivre les débats s’ils continuent de donner lieu à la diffusion, sur les réseaux sociaux, de mensonges grossiers, de fake news, de la part de M. Boyard et d’autres députés de gauche et d’extrême gauche.

Ceux-ci prétendent que l’examen du PLFSS offrait à la représentation nationale une occasion unique d’abroger la réforme des retraites, mais que nous, députés du Rassemblement National, l’en avons empêché. En réalité, nous avons simplement empêché la folie de la taxe permanente, l’enfer fiscal de la gauche, que le présent amendement illustre d’ailleurs. J’invite nos concitoyens à vérifier : les amendements déposés par la gauche après l’article 3 n’avaient pas véritablement pour objet l’abrogation de la réforme des retraites.

Nous rejoignons toutefois la gauche sur la nécessité d’organiser une conférence sociale de financement regroupant l’ensemble des partenaires sociaux, pour trouver de nouvelles sources de financement. Malgré les excédents récents du système de retraites, son déficit risque d’être durable, selon les estimations du Conseil d’orientation des retraites, et de nouvelles sources de financement doivent être trouvées.

Toutefois, contrairement à la gauche, nous ne prétendons pas décider à la place des partenaires sociaux. Il faut respecter le dialogue social !

Notre système de retraites ne repose déjà plus intégralement sur la répartition. Il est financé pour une part non négligeable par des taxes affectées et des impôts. Le Rassemblement National entend utiliser différents leviers pour le sauver, dont la natalité, – qui n’est pas un gros mot, même si le fait de faire des enfants vous choque, chers collègues de gauche – et le taux d’emploi.

Plutôt que de taxer davantage et de tuer notre économie, réfléchissons à l’âge d’entrée sur le marché du travail, ramenons vers l’emploi les populations qui en sont les plus éloignées et accroissons la productivité en finançant les services de recherche et développement.

M. Jérôme Guedj (SOC). Monsieur Ménagé, ma grand-mère utilisait l’adage « qui se sent morveux se mouche » – autrement dit, ceux qui dénoncent de la manière la plus tonitruante sont souvent ceux qui se savent fautifs. De fait, vous avez raté le coche : la dernière réforme des retraites a été adoptée dans la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 ; par parallélisme, ce PLFSS était l’occasion de l’abroger.

Pour notre part, nous proposons des ressources permettant d’équilibrer la branche vieillesse, ce qui nous donne la légitimité pour revenir sur cet impôt sur la vie.

Quant à vous, en guise de solution, vous évoquez simplement la natalité, ce qui est cocasse : quand bien même 150 000 enfants naîtraient demain – je le souhaite, moi aussi, car la croissance démographique est souhaitable –, cela ne résorberait pas le déficit, prévu à 3,5 milliards d’euros en 2025 et à 6 milliards en 2026.

Pour notre part, nous sommes conséquents et proposons ici, à travers une trentaine d’amendements, des pistes pour dégager 12 à 13 milliards d’euros de recettes, afin de financer la sécurité sociale, notamment la branche vieillesse. Vous nous reprochez de trop taxer, comme Gabrial Attal le faisait lors de l’examen du précédent PLFSS. Oui, nous revendiquons un financement plus juste de la sécurité sociale. Pour votre part, tant que vous refuserez l’obstacle, votre proposition d’abrogation de la réforme des retraites ne sera pas crédible.

M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Monsieur Ménagé, l’injonction à la natalité du Rassemblement National est insupportable. Laissez tranquilles les femmes, qui peuvent choisir par elles-mêmes.

Vous nous demandez de respecter les partenaires sociaux et les organisations syndicales. Je vous rappelle que Mme Le Pen a reproché aux syndicats de défendre non pas les travailleurs, mais « une idéologie d’extrême gauche » à travers les grèves – voilà qui plaira à ceux de nos concitoyens qui se sont mobilisés contre la réforme des retraites. Elle a accusé les syndicats, particulièrement la CGT de « prendre en otage » la France avec des grèves répétées, dans une métaphore terrible pour ceux qui connaissent la réalité d’une prise d’otage, et de « se moquer des conséquences économiques et des difficultés pour les travailleurs, les PME et les commerçants ». Elle considère en outre que la CGT et d’autres syndicats « refusent systématiquement toute réforme et bloquent le pays dès qu’il est question de changer un modèle qui ne fonctionne plus ». Le Rassemblement National voue donc aux partenaires sociaux et au dialogue social un amour à géométrie variable.

Vous êtes des imposteurs sur les questions sociales. Dans un réflexe cynique et tacticien, vous tentez d’embrasser les combats des autres, quand vous considérez qu’ils sont majoritaires dans l’opinion. Mais vous peinez à évoquer le financement de vos réformes, vous contentant de reprendre les vieux discours néolibéraux sur le matraquage fiscal et d’enjoindre les femmes à procréer. Foutez la paix aux organisations syndicales, aux femmes et aux questions sociales, puisque manifestement vous n’y connaissez rien !

M. Gaëtan Dussausaye (RN). Nous voulons relancer la natalité, car la naissance de nombreux petits Français ferait le plus grand bien au pays – eh oui, pour nous, c’est d’abord une question nationale, même si cela vous dérange.

Nous n’avons aucune leçon à recevoir de vous en matière de dialogue social et de respect de la diversité d’opinions. Oui, vous avez plus de points communs avec la CGT, notamment, que le Rassemblement National. Comme elle, vous avez appelé à deux reprises à voter pour M. Macron à l’élection présidentielle. Vous avez ainsi instauré la politique que nous subissons depuis sept ans et la réforme des retraites profondément injuste que rejette la majorité des Français. Avec le soutien de la Macronie, vous avez fait élire Mme Borne, qui a fait passer cette réforme et M. Darmanin, que vous insultez pourtant sur tous les plateaux télé. Soyez plus courageux pendant les campagnes électorales. Pour notre part, nous pouvons encore nous regarder dans un miroir.

M. Christophe Bentz (RN). À gauche, vous proposez de gager l’abrogation de la réforme des retraites sur une augmentation des cotisations. Pour notre part, nous privilégions une taxe sur les surprofits et les produits financiers, ce qui devrait vous plaire. Nous y reviendrons ce mercredi en commission et jeudi 31 octobre en séance publique. De fait, nous proposerons lors de notre journée de niche le seul débat de fond sur l’abrogation de cette réforme injuste.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements AS1576 de M. Yannick Neuder, AS1493 de M. Jean-François Rousset, AS188 de M. Philippe Juvin, AS1494 de M. Jean-François Rousset et AS187 de M. Philippe Juvin (discussion commune)

M. le rapporteur général. Nous proposons que les médecins retraités qui reprennent une activité soient exonérés de cotisations sociales de manière pérenne et non plafonnée. Une version transitoire de cette exonération avait été adoptée dans la PLFSS 2023. Elle a fait ses preuves, mais le dispositif a pris fin le 1er janvier 2024.

Le cumul emploi-retraite créateur de droits instauré lors de la dernière réforme des retraites et une avancée indéniable pour la plupart de nos concitoyens. Il apparaît toutefois peu adapté aux médecins retraités, car pour eux, l’enjeu n’est pas de constituer des droits supplémentaires à la retraite, mais d’exercer leur activité sans avoir à verser de cotisations vieillesse sur les revenus qu’ils en tirent.

L’exonération proposée vise les médecins qui sont éligibles au cumul emploi-retraite intégral, car ils ont liquidé une retraite à taux plein. Le code de la sécurité sociale précisera que l’activité dont les revenus seront exonérés ne leur permettra pas de créer de nouveaux droits à la retraite.

Face à la crise de la démographie médicale, nous activerons ainsi tous les leviers pour accroître la présence des médecins dans les territoires.

M. Jean-François Rousset (EPR). Les médecins retraités qui continuent à exercer doivent être exonérés de cotisation vieillesse de façon pérenne et sans plafond de revenus.

De nombreux médecins risquent de cesser leur activité au cours des trois prochaines années, à cause de la charge de travail, du manque de reconnaissance et de la paperasserie. Or nous avons besoin qu’ils exercent de nouveaux métiers – qu’ils créent et gèrent des communautés professionnelles territoriales de santé et qu’ils exercent le rôle de régulateurs, notamment au sein des services d’accès aux soins. Nous devons donc faciliter leurs conditions d’exercice.

M. Philippe Juvin (DR). Mes deux amendements prévoient une exonération pérenne ; seul l’amendement AS187 supprime les limites de revenus.

Actuellement, 10 % des médecins libéraux exercent leur activité dans le cadre du cumul emploi-retraite. C’est même 25 % dans certaines spécialités, comme la psychiatrie. Si ces professionnels ne travaillaient pas, le système de santé ne fonctionnerait pas.

Or actuellement, ils sont les seuls, parmi nos concitoyens, à verser des cotisations de retraite qui n’ouvrent pas de droits. C’est absurde. Plutôt que de leur permettre d’ouvrir des droits nouveaux, nous proposons qu’ils cessent de verser ces cotisations.

Nous n’obligeons personne à travailler. Quant au coût de l’exonération, il faut le rapporter à celui qu’aurait la cessation d’activité de ces médecins. Qui soignerait alors les Français ?

M. le rapporteur général. Monsieur Juvin, contrairement aux vôtres, mon amendement vise à intégrer l’exonération des cotisations vieillesse dans le code de la sécurité sociale. Cette codification garantira sa pérennité.

Monsieur Rousset, vous proposez que les médecins bénéficient à la fois d’une exonération de cotisations vieillesse et de la création de nouveaux droits à la retraite dans le cadre du cumul emploi-retraite. Ce n’est pas ce qu’ils demandent. Par ailleurs, votre amendement est entaché d’une erreur de référence.

Avis défavorable.

M. Yannick Monnet (GDR). J’aurais pu voter en faveur de ces exonérations, si vous aviez voté en faveur de l’amendement AS87 de Mme Godard. Pour que chacun ait accès aux soins, nous avons besoin à la fois des médecins retraités et de recettes nouvelles pour la sécurité sociale. Il n’est pas question de choisir entre les deux, si nous voulons mieux soigner nos concitoyens. Affirmer le contraire, comme le fait l’extrême droite, relève de la pensée magique. Je m’abstiendrai donc.

M. Thibault Bazin (DR). Monsieur le rapporteur général, nous soutiendrons votre amendement, qui semble le plus complet. Les autres amendements pourront être remaniés. Je fais confiance à votre élégance pour que nous défendions un message commun dans l’hémicycle.

En permettant aux médecins de prodiguer des soins, nous évitons des hospitalisations et de surcharger les urgences. Nous favorisons également la prévention et les diagnostics précoces. Outre les avantages pour la santé des patients, cela permettra des économies.

Alors que nous manquons de médecins en première ligne, certains médecins retraités sont prêts à travailler sans compter leurs heures. Cette exonération sera efficace à très court terme.

M. Hendrik Davi (EcoS). Je comprends que vous fassiez appel aux médecins retraités dans certaines zones rurales, mais cette exonération ne constitue pas une solution durable.

Vous faites comme si les retraites étaient financées par des fonds de pension, comme si chacun finançait sa propre retraite, alors que les cotisations ouvrent des droits collectivement. Il n’est pas anormal que des médecins rémunérés pour leur activité continuent à cotiser pour l’ensemble des retraités et permettent à ceux qui exercent des métiers pénibles de partir plus tôt à la retraite.

En outre, puisque les médecins cumulant emploi et retraite représentent 10 % des médecins en exercice, le manque à gagner lié à l’exonération ne serait pas anodin. Je m’y oppose donc.

Si vous souhaitez davantage de personnel médical, pour éviter de surcharger les urgences, suivez la logique jusqu’au bout, en augmentant les dépenses de santé et en refusant les attaques contre l’AME. Eh oui, en restreignant le panier de l’AME, vous retardez les soins ! (Protestations.)

M. le rapporteur général. Monsieur Davi, les déserts médicaux ne sont pas cantonnés au monde rural. Les villes et les métropoles aussi bénéficient des médecins cumulant emploi et retraite. L’exonération concernera donc l’ensemble du territoire.

L’AME est un sujet politique avant d’être un sujet médical. Face à un patient, aucun personnel médical ou paramédical n’a pour premier réflexe de demander des papiers d’identité. Personne n’a envisagé de retirer du panier de soins de l’AME la vaccination, ou le traitement des infections contagieuses – et même des infections dentaires, car nous savons que certaines caries peuvent causer de graves pathologies cardiaques, notamment des endocardites infectieuses.

Même si le sujet vous semble porteur pour les vidéos que vous tirerez de nos échanges, revenons au débat : comment rendre attractif l’exercice de la médecine pour des médecins qui pourraient profiter de leur retraite chez eux, comment empêcher que le retour au travail ne leur coûte ?

Les médecins ne veulent pas ouvrir de droits supplémentaires. Ils veulent simplement bénéficier d’une juste rémunération, sans cotisations supplémentaires. Messieurs Rousset et Juvin, je vous invite à retirer vos amendements. Nous pourrons cosigner un amendement pour la séance publique.

M. Philippe Vigier (Dem). Monsieur le rapporteur général, nous soutiendrons votre amendement.

Les médecins ne bénéficient d’une retraite à taux plein qu’à 67 ans. Rendez-vous compte ! Dans ma circonscription, un territoire rural, cinq médecins qui ont dépassé cet âge continuent ainsi de prodiguer des soins. Nous pouvons les remercier chaque jour d’accepter.

Les amendements AS188 et AS187 sont retirés.

La commission adopte l’amendement AS1576.

En conséquence, les amendements AS1493 et AS1494 tombent.

 

Amendement AS1029 de M. Gaëtan Dussausaye

M. Gaëtan Dussausaye (RN). Jusqu’ici nous avons peu évoqué l’objectif de garantir un égal accès à la santé à tous les Français et sur tout le territoire. Une étude de 2024 indiquait que 25 millions de nos compatriotes vivent dans un territoire où l’offre de soins est insuffisante ; pour presque 2 millions d’entre eux, c’est même le cas pour l’offre de soins en médecine générale. Dans les territoires les plus ruraux, ils sont parfois séparés de la pharmacie de la plus proche par vingt ou vingt-cinq minutes de voiture.

Parmi les médecins, 120 000 sont en activité et 80 000 à la retraite, dont 63 000 ont moins de 75 ans. Avant même la création, avec le soutien du Rassemblement National, de l’exonération de cotisations de retraite dans la LFSS 2023, 8 000 médecins cumulaient déjà emploi et retraite, parce qu’ils sont passionnés par leur métier et préoccupés par la dégradation de l’accès à la santé.

Nous demandons un rapport sur l’impact financier qu’a eu cette exonération – messieurs Davi et Clouet, cela permettra de répondre à vos préoccupations – et sur ses modalités. Nous devons nous assurer que l’exonération envisagée n’alourdira pas davantage la charge administrative de ceux qui nous soignent.

M. le rapporteur général. Votre demande est satisfaite par l’adoption de mon amendement. Il permettra aux médecins retraités qui le souhaitent de pratiquer à nouveau leur métier, car c’était l’obligation de verser des cotisations vieillesse qui posait problème, plutôt que le fait que celles-ci ne leur ouvrent pas de droits.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 

La réunion s’achève à vingt heures.


Présences en réunion

Présents. Mme Ségolène Amiot, M. Thibault Bazin, Mme Béatrice Bellay, Mme Anaïs Belouassa-Cherifi, M. Christophe Bentz, M. Théo Bernhardt, M. Louis Boyard, M. Elie Califer, M. Hadrien Clouet, Mme Nathalie Colin-Oesterlé, Mme Josiane Corneloup, M. Hendrik Davi, M. Fabien Di Filippo, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Gaëtan Dussausaye, Mme Karen Erodi, M. Olivier Fayssat, M. Guillaume Florquin, M. Thierry Frappé, M. François Gernigon, Mme Océane Godard, M. Jean-Carles Grelier, M. Jérôme Guedj, Mme Zahia Hamdane, M. Michel Lauzzana, M. Didier Le Gac, Mme Christine Le Nabour, Mme Nicole Le Peih, Mme Élise Leboucher, Mme Katiana Levavasseur, M. Benjamin Lucas-Lundy, Mme Hanane Mansouri, M. Damien Maudet, Mme Joëlle Mélin, M. Thomas Ménagé, M. Yannick Monnet, M. Yannick Neuder, M. Laurent Panifous, M. Sébastien Peytavie, Mme Stéphanie Rist, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, Mme Sandrine Runel, M. Arnaud Simion, M. Frédéric Valletoux, M. Paul Vannier, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier

Excusés. Mme Anchya Bamana, Mme Karine Lebon

Assistaient également à la réunion. M. Mickaël Bouloux, Mme Sandra Delannoy, M. Alexandre Dufosset, M. Philippe Juvin, M. Frédéric Maillot