Compte rendu

Commission
des affaires sociales

 Audition, en application des dispositions de l’article L. 1451–1 du code de la santé publique, de M. Jacques‑Olivier Bay, dont le renouvellement aux fonctions de président du conseil d’administration de l’Agence de la biomédecine est envisagé              2

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Mercredi
5 février 2025

Séance de 11 heures

Compte rendu n° 44

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de
Mme Annie Vidal,
vice-présidente

 


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La réunion commence à onze heures.

(Présidence de Mme Annie Vidal, vice-présidente)

 

La commission auditionne, en application des dispositions de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique, M. JacquesOlivier Bay, dont le renouvellement aux fonctions de président du conseil d’administration de l’Agence de la biomédecine est envisagé.

 

Mme Annie Vidal, présidente. Par courrier en date du 21 novembre 2024, M. le Premier ministre a informé Mme la présidente de l’Assemblée nationale qu’il était envisagé de reconduire M. Jacques-Olivier Bay aux fonctions de président du conseil d’administration de l’Agence de la biomédecine (ABM).

Monsieur Bay, en application des dispositions de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique, il appartient à notre commission de vous entendre avant votre reconduction. Je rappelle que vous avez été nommé à ces fonctions le 31 juillet 2021 après avoir été auditionné par la commission le 20 juillet. L’article R. 1418-6 du code de la santé publique dispose que le président du conseil d’administration de l’Agence de la biomédecine est nommé pour une durée de trois ans, renouvelable une fois. La directrice générale de l’agence, Mme Marine Jeantet, a également été entendue par la commission le 11 janvier 2023, préalablement à sa prise de fonctions le 1er février 2023.

Créée par la loi de bioéthique de 2004, l’Agence de la biomédecine est un établissement public administratif sous tutelle du ministère de la santé. Elle assure des missions essentielles d’encadrement, d’accompagnement, de suivi et d’information dans les domaines du don d’organes, de moelle osseuse et de gamètes, mais aussi de l’assistance médicale à la procréation, du diagnostic prénatal, de la génétique médicale et de la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.

M. Jacques-Olivier Bay. Je suis très honoré d’être proposé par M. le Premier ministre pour un second mandat à la présidence du conseil d’administration de l’Agence de la biomédecine et de me présenter devant vous.

Âgé de 59 ans, je suis professeur des universités-praticien hospitalier (PU-PH) en oncologie, rattaché administrativement au centre hospitalier universitaire (CHU) de Clermont-Ferrand et à l’université Clermont-Auvergne.

Lors de l’audition du 20 juillet 2021, j’avais témoigné devant la commission de ma vocation précoce de médecin, sans aucune antériorité familiale. La cancérologie m’a particulièrement attiré, en raison de sa dimension multidisciplinaire et multi-organes, mais aussi de l’intérêt des projets scientifiques inhérents à la spécialité et des relations humaines susceptibles de s’y nouer.

Sur le plan médical, j’ai essentiellement développé des compétences en oncohématologie et en thérapie cellulaire. Ma formation scientifique, ponctuée par une thèse d’université conduite aux États-Unis et une habilitation à diriger des recherches, s’est toujours construite parallèlement à ma formation médicale, y compris lors de séjours à l’étranger, à Montréal puis à Los Angeles pour une période de trois ans.

Le système de soins américain ne correspondant pas à mes convictions, je suis rentré en France en 1995. Les modes de financement et l’inéquité face à la maladie m’ont en effet souvent heurté aux États-Unis, tandis que le système français se fonde sur des valeurs collectives que je m’attache à défendre.

À mon retour en France, j’ai occupé un poste de chef de clinique des universités-assistant des hôpitaux au centre de lutte contre le cancer Jean-Perrin, à Clermont-Ferrand. J’étais alors chargé des traitements intensifs et de la greffe de cellules souches hématopoïétiques. J’ai été nommé PU‑PH en 2006, avec la mission de développer le service de thérapie cellulaire et d’hématologie clinique adulte du CHU de Clermont-Ferrand. Ce service, qui disposait à l’origine de huit lits, en compte désormais quarante‑cinq, tandis que le nombre de praticiens est passé de trois à dix‑sept. En 2020, la création du service d’oncologie médicale est venue compléter l’organisation du CHU de Clermont-Ferrand en cancérologie. Par ailleurs, mes activités de recherche sont intégrées dans une équipe d’accueil qui devrait rejoindre prochainement une unité de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale.

Passionné par la thérapie cellulaire et la cancérologie, j’ai souhaité m’impliquer davantage dans ces domaines, en plus de mes activités cliniques et scientifiques. J’ai ainsi présidé la Société francophone de greffe de moelle et de thérapie cellulaire de 2016 à 2020. Je suis aussi membre de la Société française d’hématologie et du conseil scientifique de la Société française du cancer (SFC). J’ai également intégré le groupe « oncohématologie » de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et suis sollicité en tant qu’expert par la Haute Autorité de santé (HAS) et l’Institut national du cancer (Inca) notamment. Je suis enfin rédacteur en chef du Bulletin du cancer, revue officielle de la SFC, membre du bureau de la Fédération hospitalière de France dans la section cancer et assesseur auprès du doyen de la faculté de médecine.

Je tiens à insister sur le fait que j’ai toujours fait le choix, dès le début de ma carrière et notamment en tant que PU-PH, d’une profonde indépendance vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique, évitant ainsi tout conflit d’intérêts : je ne participe à aucune réunion visant à conseiller l’industrie pharmaceutique et ne suis investigateur principal d’aucun protocole à promotion industrielle. Mes travaux de recherche clinique et scientifique ont toujours été financés de façon académique, soit par des associations telles que l’ARC ou la Ligue contre le cancer, soit par l’État au travers de programmes hospitaliers de recherche clinique ou d’appels d’offres d’agences sanitaires.

L’Agence de la biomédecine est un établissement public administratif créé par la loi de bioéthique du 6 août 2004 dans le prolongement de l’Établissement français des greffes, institué par la loi de bioéthique de 1994, du registre France greffe de moelle et de diverses missions et commissions ministérielles successives.

Agence sanitaire sous tutelle du ministère du travail, de la santé, des solidarités et des familles, l’ABM remplit des missions opérationnelles et de promotion du don. En tant qu’opérateur public, elle ne fait pas la loi, mais l’applique dans un périmètre précis. Elle éclaire les pouvoirs publics par son expertise et dispose de compétences en matière de greffes d’organes, de tissus et de cellules. De nombreuses autres missions lui ont été confiées au fil du temps, notamment dans le domaine de la procréation, de l’embryologie et de la génétique humaines.

Les champs d’intervention de l’Agence de la biomédecine sont vastes et peuvent sembler disparates. Ils couvrent en réalité les activités médicales et de recherche utilisant des éléments du corps humain donnés à un tiers, à l’exception du sang : cela concerne les greffes d’organes, de tissus et de cellules souches hématopoïétiques à visée thérapeutique. Certains composants du corps humain considérés comme des médicaments, dont les cellules génétiquement modifiées de type TCR transgéniques (CAR‑T cells), dépendent en revanche de la HAS et de l’ANSM.

En tant qu’agence sanitaire, l’ABM peut réglementer les activités relatives aux prélèvements et à l’utilisation des cellules, tissus ou organes du corps humain, ainsi que les travaux scientifiques conduits sur ces éléments. Elle encadre, outre les aspects thérapeutiques développés sur cette base, les activités de prélèvement de tissus et de cellules, l’assistance médicale à la procréation (AMP) et le diagnostic prénatal (DPN) et préimplantatoire (DPI). Elle autorise par ailleurs les centres de DPI et les centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal, ainsi que la recherche sur les cellules embryonnaires et les embryons. Elle agrée les médecins, au regard notamment des examens génétiques et des DPI, gère des registres et assure le suivi des donneurs, en exerçant une vigilance et une biovigilance. Elle délivre des avis sur des bonnes pratiques et des autorisations, par exemple auprès des agences régionales de santé (ARS).

Les compétences de l’agence sont larges et reposent sur l’expertise médicale, scientifique, juridique et éthique de haut niveau de ses agents. L’ABM exerce ses capacités opérationnelles dans l’ensemble du territoire français ainsi qu’à l’étranger, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, notamment dans le domaine des greffes d’organes – elle gère la liste nationale des patients en attente de greffe et le registre national des refus permettant la régulation et la répartition des greffons – mais aussi des greffes de cellules souches hématopoïétiques allogéniques.

Diverses instances régissent le fonctionnement de l’ABM. Le conseil d’administration délibère sur les orientations générales, le programme d’investissement, le rapport annuel d’activité, le budget et les comptes de l’agence, ainsi que sur les subventions, les dons et les legs. La présidence de cette entité n’a pas de rôle exécutif, ce volet étant assuré par la direction générale de l’agence, occupée au début de mon mandat par Emmanuelle Cortot-Boucher et aujourd’hui par Marine Jeantet.

L’Agence de la biomédecine s’appuie par ailleurs sur un conseil d’orientation présidé par le généticien Stanislas Lyonnet. Cette instance, indispensable, traite souvent de questions éthiques. Elle réunit des parlementaires, des membres de juridictions suprêmes et d’associations, des représentants des sciences humaines et sociales et des professionnels de santé.

L’ABM dispose également d’un conseil médical et scientifique, dont la présidence est assurée par Philippe Menasché et la vice-présidence par Alexandra Benachi. Cette entité comporte deux collèges, l’un consacré à la greffe, l’autre à la procréation, à l’embryologie et à la génétique humaines. Elle réunit des experts et prodigue propositions et conseils à la direction générale.

L’Agence de la biomédecine compte deux directions générales adjointes, l’une chargée des ressources, avec des directions consacrées au système d’information, aux aspects juridiques et au volet financier, l’autre dédiée à la politique médicale et scientifique et composée de directions relatives respectivement aux prélèvements et greffes d’organes et de tissus, à la procréation, à l’embryologie et à la génétique humaines, et aux prélèvements et greffes de cellules souches hématopoïétiques. Le programme d’action de chaque sous-direction est sous-tendu par des plans ministériels spécifiques, validés le 15 mars 2022, et par un contrat d’objectifs et de performance (COP) signé avec l’État le 14 février 2023.

Enfin, l’ABM dispose de quatre services régionaux qui assurent des missions d’appui en proximité.

Les maîtres-mots guidant son action sont l’équité, la transparence, l’éthique, la solidarité, la neutralité, l’expertise et l’engagement collectif. L’agence a pour devise « Du don à la vie », que j’ai parfois plaisir à inverser en « De la vie au don », afin de mettre en lumière l’importance d’inciter chacun à être acteur de cet acte de générosité. Son étendard prend la forme d’un ruban vert, créé et adopté le 22 juin 2019 par le monde associatif pour valoriser l’engagement, témoigner de la gratitude aux donneurs d’organes et symboliser l’espoir des patients en attente de greffe. Ce ruban matérialise la relation profonde qui unit l’Agence de la biomédecine et les associations qui œuvrent en faveur du don d’organes et de tissus.

Quels furent les grands défis à relever au cours de mon mandat ?

Une partie fut consacrée à la réalisation des plans ministériels 2017-2022 et à l’élaboration des plans 2022-2026. L’année 2021 fut ainsi une période charnière marquant la fin de trois plans stratégiques, sur les résultats desquels il ne m’appartient pas de revenir.

L’Agence de la biomédecine a également, au cours de mon mandat, apporté son expertise aux différents travaux conduits en lien avec la loi relative à la bioéthique du 2 août 2021, qu’elle a été chargée d’appliquer au travers de nouvelles compétences. La première d’entre elles concerne la procréation. Le code de la santé publique a été modifié pour confier à l’ABM la tenue d’un registre de donneurs de gamètes et d’embryons, essentiel à l’exercice du droit d’accès aux origines. En effet, toute personne majeure issue d’un don de gamètes peut désormais, si elle en fait la demande, avoir accès à l’identité de la personne qui a permis sa conception. Les anciens donneurs ne sont pas concernés, mais pourront être contactés par une commission spécifique.

L’Agence de la biomédecine doit en outre suivre l’effectivité sur le terrain de l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes non mariées, ainsi que de la possibilité d’autoconserver ses gamètes dans un but non médical.

Elle exerce par ailleurs un rôle de vigilance vis-à-vis des projets de recherche sur les cellules souches pluripotentes induites et peut s’opposer à tout protocole susceptible de soulever des difficultés au regard de principes éthiques.

Les nouvelles compétences attribuées à l’ABM concernent également les greffes de cellules souches hématopoïétiques. Il appartient ainsi à l’agence d’assurer un suivi des donneurs et d’harmoniser, dans un souci d’équité, les dispositions relatives à la prise de décisions des majeurs protégés, en les mettant notamment en cohérence avec les articles du code civil.

C’est également sous mon mandat que l’Agence de la biomédecine a fait l’objet d’une enquête de la Cour des comptes assortie de remarques et recommandations présentées devant la commission des affaires sociales du Sénat par Mme Véronique Hamayon le 31 janvier 2024. Le rapport préconisait entre autres la création d’un registre national de gestion des gamètes et des embryons et appelait à un meilleur pilotage des banques de tissus, à la détermination d’un seuil d’activité pour certaines greffes d’organes et à l’accroissement du nombre de donneurs de cellules souches hématopoïétiques en assurant un typage génétique moins onéreux. La directrice générale de l’agence a répondu à ces observations lors de son audition par la même commission, le 14 février 2024.

L’ABM dispose d’un budget d’environ 97 millions d’euros en dépenses et en recettes, ces dernières correspondant à la dotation de l’assurance maladie et aux ressources propres de l’agence liées à l’action d’intermédiation du registre France greffe de moelle. Son effectif est de 262,6 équivalents temps plein sous plafond et hors plafonds associés : 79 % des agents sont contractuels, 15 % détachés et 6 % mis à disposition.

En 2023, 5 634 greffes d’organes et 1 200 greffes de cellules souches hématopoïétiques ont été réalisées à partir de donneurs non apparentés. Le fichier national de donneurs de cellules souches hématopoïétiques a enregistré 23 000 nouvelles inscriptions, portant le total à 385 000. Plus de 540 000 de nos concitoyens ont bénéficié d’un examen de génétique moléculaire. Quelque 350 enfants sont nés cette année-là après un diagnostic préimplantatoire et près de 27 000 à la suite d’un parcours d’assistance médicale à la procréation. On a dénombré 700 nouveaux donneurs de spermatozoïdes et recensé environ 940 donneuses d’ovocytes supplémentaires. Plus de 13 000 patients ont par ailleurs bénéficié d’une conservation médicale de leurs gamètes visant à prévenir une possible altération de leur fertilité ; ce point, très important, a été identifié par l’Inca comme l’un des objectifs prioritaires du plan décennal contre le cancer.

L’Agence de la biomédecine est connue et reconnue pour son efficacité, son sérieux et ses compétences, ainsi qu’en témoigne la visite dans ses locaux, le 22 juin 2023, de François Braun, alors ministre de la santé et de la prévention. Sa gestion financière est rigoureuse et son budget est à l’équilibre.

L’équipe de direction de l’ABM a un souci constant du bien-être au travail de ses collaborateurs et le dialogue social s’y déroule dans un climat constructif et apaisé. Les projets et missions de l’agence, développés en étroite relation avec les autorités de tutelle, sont exposés, explicités et déployés dans les directions concernées.

Je salue l’extraordinaire professionnalisme et les excellentes qualités humaines et relationnelles des agents de l’ABM, auxquels je souhaite rendre un hommage sincère, à la hauteur de leur enthousiasme et de leur dévouement.

Je puis également témoigner de la richesse et de l’interactivité des conseils d’administration que j’ai eu l’honneur de présider, avec des échanges toujours empreints de confiance, de respect, de rigueur, d’honnêteté et d’une profonde humanité, faisant ainsi écho aux missions de l’agence.

J’insiste sur le fait que l’Agence de la biomédecine agit toujours dans le strict respect des lois de bioéthique et des principes fondamentaux d’équité, d’éthique, de sécurité et de solidarité. Elle fonde en outre son action sur le triptyque qui est au cœur de la dernière loi de bioéthique : dignité, liberté, solidarité.

Les actions à mener au cours du prochain mandat s’annoncent nombreuses et les enjeux à la hauteur de l’importance des missions de l’agence. Les trois grands plans stratégiques ministériels élaborés pour la période 2022-2026 et adoptés le 15 mars 2022 serviront de guides. Le premier concerne les prélèvements et greffes d’organes et de tissus, le deuxième la procréation, l’embryologie et la génétique humaines, le troisième les prélèvements et greffes de cellules souches hématopoïétiques. Chacun fera l’objet d’un suivi spécifique, par un comité dédié.

En matière de prélèvements et de greffes d’organes, le plan prévoit le déploiement de mesures innovantes visant à renforcer la professionnalisation des coordinations hospitalières, à développer le prélèvement multisources et à réviser les modalités de financement pour les rendre plus incitatives. Figurent également au nombre des objectifs la création d’indicateurs de performance et la désignation d’un référent greffe auprès des agences régionales de santé, afin de promouvoir la décentralisation de ce type d’activité. Ces mesures doivent contribuer à la réduction du taux d’opposition au prélèvement d’organes et du nombre de patients en attente de greffe. Elles ont également pour objet de favoriser l’élaboration de schémas régionaux de santé autour de la greffe d’organes, de former, d’informer et de développer de nouvelles greffes de tissus, dont celles des îlots de Langerhans.

Le plan ministériel relatif à la procréation, à l’embryologie et à la génétique humaines a pour principaux objectifs de réduire les délais d’accès aux parcours de soin, de rendre opérationnel le registre permettant l’accès aux origines dans le cadre de l’AMP avec tiers donneur, de tendre à l’autosuffisance nationale en matière de dons de gamètes et d’adapter les nouvelles technologies aux pratiques quotidiennes. Afin d’anticiper la destruction des anciens stocks de gamètes à compter du 31 mars 2025, l’ABM souhaite par ailleurs promouvoir, conformément à l’une des recommandations de la Cour des comptes, la mutualisation des stocks entre centres donneurs par la création d’un système d’information interopérable.

Le plan relatif aux greffes de cellules souches hématopoïétiques vise à garantir l’accès à toutes les sources de greffons, à améliorer les conditions de prélèvement et le suivi des donneurs, à maintenir la qualité et l’exhaustivité des registres et à renforcer la biovigilance. Cela s’accompagne d’un objectif quantitatif annuel de 20 000 nouvelles inscriptions de donneurs de moins de 36 ans sur le registre France greffe de moelle, en veillant à la masculinisation et à la diversification des profils des antigènes d’histocompatibilité, dits HLA. Conformément à la recommandation de la Cour des comptes, une réflexion est engagée au sein de l’agence sur les typages HLA, leur précision, leur coût, mais aussi les modalités permettant une adéquation entre quantité et qualité des donneurs inscrits sur le registre.

Les grandes orientations de l’Agence de la biomédecine pour la période 2022-2026 sont formalisées dans un COP articulé autour de deux axes : l’un médical et scientifique, l’autre transversal, composé de sept objectifs stratégiques.

Parmi les volets prioritaires considérés comme fragiles, l’agence a choisi d’engager une réflexion sur les modalités d’augmentation du nombre de personnes inscrites au fichier des donneurs non apparentés de cellules souches hématopoïétiques, tout en veillant au maintien de la qualité du dispositif. Cela passe entre autres par une hausse du budget de communication, le développement d’actions visant à inciter les donneurs de sang à devenir donneurs de cellules souches hématopoïétiques et une coopération accrue avec les associations de patients. La régionalisation du plan de greffe de cellules souches hématopoïétiques, caractérisée par une intense collaboration avec les ARS, devrait également permettre le développement de plans d’action au plus près des préoccupations territoriales.

L’Agence de la biomédecine se mobilise par ailleurs pour que le prélèvement et la greffe d’organes restent une priorité nationale : elle œuvre à la généralisation de la greffe de rein avec donneurs vivants, promeut le prélèvement d’organes de type Maastricht 3, veille au renforcement des gouvernances hospitalières au profit des patients en attente de greffe, travaille à la refonte du logiciel Cristal et lance des campagnes de presse incitatives au don d’organes, autour du slogan « Tous donneurs, tous receveurs ». En matière de don de gamètes, l’ABM déploie un plan d’action visant à réduire les délais d’attente, grâce notamment à la mutualisation des stocks.

Elle porte en outre une attention particulière aux analyses génétiques, qui s’apparentent de plus en plus à du soin courant. Des réflexions sont en cours, notamment au sein du conseil d’orientation. L’agence a également exprimé le souhait de participer au pilotage et à l’animation du plan national Maladies rares et s’implique fortement dans la promotion de la recherche médicale et scientifique pour les activités relevant de sa compétence : elle soutient des projets de recherche, mène ses propres études et favorise les relations entre les équipes de recherche.

Les enjeux internationaux sont bien évidemment pris en considération, avec la mise en place d’actions bilatérales avec des instances d’autres pays et une promotion de l’expertise française, en matière par exemple d’harmonisation de pratiques et standards au niveau de la Communauté européenne. L’agence s’attache également à valoriser son action auprès d’entités comme l’Organisation mondiale de la santé, en offrant notamment un accès privilégié à des données de santé de qualité.

Un système d’information fiable est indispensable à la bonne réalisation des missions de l’agence. En 2019, un audit du logiciel Cristal utilisé dans la gestion de l’activité de prélèvement et de greffe d’organes et de tissus avait mis en lumière des failles techniques et de sécurité, auxquelles une refonte totale du système, initiée en 2022, doit pallier d’ici 2025.

À la faveur d’une dotation exceptionnelle attribuée en 2020, l’application Syrenad concernant les donneurs et receveurs de cellules souches hématopoïétiques a également été améliorée et la nouvelle version déployée en 2024.

Enfin, la loi de bioéthique du 2 août 2021 a conduit à la mise en place, le 1er septembre 2022, du registre des donneurs de gamètes et d’embryons. D’autres développements sont attendus afin que le système d’information s’étende au registre national de refus de prélèvement d’organes et de tissus.

L’Agence de la biomédecine a également pour mission de promouvoir le don et maintenir la confiance du public envers les professionnels. Un agenda médiatique précis permet chaque année de communiquer sur les dons d’organes, de tissus, de gamètes et de cellules souches hématopoïétiques, afin d’agir sur les intentions et les comportements en fédérant autant que possible professionnels de santé et associations d’usagers. La démocratie sanitaire s’exprime au sein de l’ABM par une large place accordée au monde associatif, aux usagers et aux citoyens.

À l’heure où l’influence des réseaux sociaux va croissant, l’agence communique également pour protéger sa réputation, en établissant avec le public des relations de confiance et de transparence. Elle s’attache en outre à promouvoir son implication dans la recherche scientifique et médicale et à valoriser sa production scientifique.

Il convient enfin de souligner l’importance que revêtent pour l’ABM les enjeux relatifs à la transition écologique. Au-delà de mesures incitatives à la mobilité douce, l’agence entame ainsi une réorganisation de ses locaux, avec un transfert des bureaux dans le bâtiment partiellement occupé par la HAS. Le déménagement s’effectuera dans le respect des attentes et des souhaits des agents et permettra d’adapter le fonctionnement quotidien aux évolutions des modalités de travail, des coûts énergétiques et d’une indispensable logique écologique.

Je souhaite pour conclure insister sur l’importance d’une part de renforcer la démocratie sanitaire en maintenant une démarche volontariste d’accueil de nouvelles associations au cœur des groupes de travail et des comités de suivi, d’autre part d’aller au bout du manifeste emblématique de l’agence « Du don à la vie ». Dans un monde fluctuant, une réflexion doit s’instaurer en lien avec les sciences sociales. Des actions seront menées prochainement en ce sens, avec par exemple un soutien apporté à des projets scientifiques mixtes et l’organisation des Rencontres de la biomédecine, dont la première édition s’est tenue les 11 et 12 octobre 2023 et qui doivent, tous les deux ans, favoriser les échanges sur des sujets au cœur des enjeux éthiques, scientifiques et sociétaux de la médecine de demain.

J’espère vous avoir convaincus de ma motivation à poursuivre mes fonctions à la présidence du conseil d’administration de l’Agence de la biomédecine. Soyez assurés que mes convictions, mon indépendance, mon respect des institutions, mes connaissances et mon expérience seront toujours mis au service du rayonnement de l’agence. Je poursuivrai mon action dans le respect de la signature institutionnelle « Du don à la vie », visant à transformer un acte altruiste de générosité en étincelle de vie pour autrui, à la charnière de la générosité publique, du don de soi et de l’excellence clinique, au service des patients.

M. Thierry Frappé, référent de la commission pour l’Agence de la biomédecine. Le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus constituent des enjeux majeurs de santé publique. Chaque jour, deux à trois patients en attente de greffe décèdent faute d’organes. Malgré les efforts déployés au cours des dernières années, les résultats restent en-deçà des besoins. Dans ma région des Hauts-de-France, le taux de greffe a baissé de 4,11 % en 2024 et le taux d’opposition au prélèvement s’établit à près de 44 % en moyenne, avec des pics à 50 % à Lille ou Roubaix.

Dans son récent rapport, la Cour des comptes a formulé des recommandations visant à améliorer un système marqué par des insuffisances structurelles appelant la conduite de réformes.

Les objectifs fixés par les plans interministériels successifs, notamment le plan Greffe 2017-2021, n’ont pas été atteints. La crise sanitaire a probablement aggravé la situation mais ne suffit pas à expliquer cette contre-performance. L’activité de greffe était en effet déjà en baisse avant la pandémie, notamment pour ce qui concerne le rein, organe le plus greffé. Cette situation traduit probablement un manque de dynamisme dans la stratégie de développement des greffes, ainsi qu’une faiblesse dans l’anticipation des besoins.

Il apparaît en outre que les inégalités d’accès aux soins se répercutent sur l’accès aux greffes. Certaines régions se trouvent ainsi nettement défavorisées, tant en matière de délai d’attente que de nombre de greffes réalisées. Les territoires d’outre-mer sont particulièrement touchés, avec des taux d’accès à la greffe inférieurs à ceux de la métropole. Les patients issus de milieux socio-économiques défavorisés ou souffrant de comorbidité sont par ailleurs moins souvent inscrits sur la liste nationale d’attente que les autres. Ces disparités géographiques et sociales sont inacceptables et invitent à une refonte des critères d’attribution des greffons.

L’Agence de la biomédecine pilote l’organisation des greffes en France et dispose pour ce faire de moyens conséquents, de l’ordre de 14,5 millions d’euros par an, ainsi que d’une direction dédiée regroupant près d’un tiers de ses effectifs. Elle devrait donc être en mesure de mieux coordonner l’ensemble du dispositif et de remédier aux dysfonctionnements constatés.

Le suivi des coordinations hospitalières de prélèvement et de greffe est insuffisant et les outils d’évaluations ne permettent pas toujours de détecter efficacement les équipes en difficulté. Des disparités importantes subsistent, tant en matière de qualité que d’efficacité des greffes.

Le taux d’opposition au prélèvement d’organes, qui demeure supérieur à 36 %, voire à 40 % dans certaines régions, constitue un écueil majeur. Le phénomène ayant probablement pour origine une mauvaise information du public sur les enjeux du don d’organes, il semble nécessaire de renforcer les campagnes de communication et de sensibiliser davantage les professionnels de santé, qui jouent un rôle clé dans l’accompagnement des familles au moment du prélèvement.

Enfin, la régulation de l’accès aux greffes et la surveillance des activités hospitalières doivent être améliorées. L’attribution des greffons repose en effet sur des algorithmes de priorisation qui, malgré leur sophistication, ne prennent pas toujours en compte certains critères cliniques ou territoriaux. De plus, les agences régionales de santé utilisent peu leur pouvoir de suspension ou de retrait d’autorisation d’activité en cas de dysfonctionnement grave. Un encadrement plus rigoureux et une meilleure supervision sont donc souhaitables.

Au vu de ces constats, il apparaît nécessaire d’agir pour optimiser le système de prélèvement et de greffe d’organes et de tissus en France. Nous ne pouvons nous satisfaire d’un dispositif laissant de nombreux patients sans solution, alors que des réformes sont possibles. Comment garantir un pilotage plus efficace de la chaîne du don et de la greffe ?

M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Théo Bernhardt (RN). Par rapport à ses voisins européens, la France connaît apparemment un retard en matière de dépistage néonatal, ce qui soulève des questions quant à l’efficacité des protocoles en vigueur. Est-il envisageable selon vous d’élargir le champ de ces dépistages afin de couvrir un plus grand nombre de pathologies dès les premiers jours de vie ?

La législation française interdit par ailleurs les tests génétiques commerciaux grand public, afin de protéger des données susceptibles d’avoir des répercussions importantes non seulement pour les personnes testées mais aussi pour leur famille proche. Ces tests peuvent en effet révéler des informations personnelles sensibles, telles que des prédispositions à des maladies génétiques. La réglementation en vigueur vous paraît-elle suffisante au vu des risques de divulgation et de réutilisation non consentie de ces données ? Percevez-vous la nécessité d’une protection plus robuste, afin d’éviter tout abus potentiel dans un contexte où un nombre croissant de nos compatriotes recourent à des tests génétiques en ligne, commercialisés par des entreprises privées étrangères ?

Les embryons ne devant pas être détruits en France, comment comptez-vous gérer leur stockage, ainsi que celui des gamètes ?

Je souhaiterais enfin connaître vos attentes dans la perspective de la prochaine révision de la loi de bioéthique. Quels sont selon vous les sujets à traiter en priorité ? Quels modifications ou ajouts jugeriez-vous nécessaires, concernant notamment les missions de l’Agence de la biomédecine ?

M. Jean-François Rousset (EPR). L’Agence de la biomédecine joue un rôle essentiel dans le domaine des greffes d’organes, de tissus et de cellules issus du corps humain. Grâce au développement d’algorithmes facilitant l’attribution des greffons et au perfectionnement des outils de suivi des équipes hospitalières, elle participe pleinement à l’efficacité des pratiques dans ce domaine. La recherche médicale réalise en outre d’importants progrès, notamment dans le champ des techniques de greffe.

Les résultats obtenus en matière de prélèvements et de greffes d’organes et de tissus restent pourtant perfectibles et des inégalités d’accès subsistent. On observe un fléchissement des transplantations et une augmentation du nombre de patients en attente de greffe. Sur la période 2017-2021, seules 5 276 greffes ont ainsi été pratiquées alors que l’objectif était de 7 800, tous donneurs confondus. Dans ce contexte, quels sont les leviers d’action mobilisables par l’Agence de la biomédecine pour améliorer la coordination des prélèvements et des greffes ?

Depuis la loi de bioéthique de 2021, qui a consacré l’élargissement de la possibilité d’accès à l’assistance médicale à la procréation, l’agence s’est vue confier de nouvelles missions. Or l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules a conduit à une forte augmentation des demandes, si bien que le secteur est désormais en tension. Les délais d’attente pour bénéficier d’un don de sperme se sont allongés de 20 % entre 2021 et 2022, la demande ayant progressé dans le même temps de 88,3 %. Comment l’agence envisage-t-elle de contribuer à l’amélioration du dispositif ?

Le groupe Ensemble pour la République accueillera favorablement le renouvellement de votre mandat à la présidence du conseil d’administration de l’ABM.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Je salue tout d’abord votre choix d’exercer vos activités en toute indépendance vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique. La démarche mérite d’être soulignée.

L’augmentation du taux d’opposition au prélèvement d’organes constitue une source de préoccupation, ce d’autant que les besoins ne cessent de croître. L’année 2024 a-t-elle été exceptionnelle de ce point de vue ou est-elle représentative d’une tendance à la hausse lourde et durable, rendant plus que jamais nécessaire le déploiement d’une activité pédagogique de sensibilisation à cette problématique ?

Ma seconde observation concerne l’AMP et plus précisément deux formes d’exclusion qui nous semblent totalement iniques. La première touche les personnes trans ayant conservé des capacités gestationnelles, mais que leur changement d’état civil peut priver d’un accès à la procréation médicalement assistée. On observe ainsi un hiatus entre la possibilité effective de l’individu de donner la vie et l’identité sociale qui lui est imposée. Quelle est votre position à l’égard de cette discrimination ? Souhaitez-vous l’ouverture de l’AMP à toute personne en capacité de procréer ?

Les personnes racisées subissent quant à elles une double peine. Ainsi, alors qu’une femme blanche attend en moyenne deux ans pour bénéficier d’un don d’ovocytes, la durée d’attente pour une femme noire est d’environ huit ans. Comment envisagez-vous de répondre à cette difficulté ? De nombreuses associations espèrent par exemple des campagnes d’information plus ciblées.

M. Thibault Bazin (DR). Les missions confiées à l’Agence de la biomédecine sont essentielles et contribuent au respect de principes bioéthiques largement menacés de par le monde. Observez-vous des dérives, en matière notamment de marchandisation d’éléments du corps humain ?

Notre système de soins doit devenir plus efficient, au bénéfice des patients. Quelles synergies avec d’autres agences sanitaires ayant des missions connexes à celles de l’ABM vous semblerait-il pertinent de développer ou renforcer ? Je pense par exemple à l’ANSM ou à la HAS. Un effort budgétaire de 5 % a été demandé par l’exécutif aux différentes agences. Comment envisagez-vous la situation au regard de cette attente ?

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Ma première question concerne les transports d’organes en vue de greffe, pointés comme source potentielle de délais, voire de dysfonctionnements. Avez-vous travaillé sur le sujet ?

Il semblerait par ailleurs que les dons de gamètes diminuent, notamment depuis la pandémie. L’ABM a-t-elle mené des campagnes ciblées pour tenter d’y remédier ?

Je souhaite enfin aborder la question des discriminations observées tant au niveau des donneurs que des receveurs de gamètes. Des critiques sont régulièrement adressées aux centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains quant à leur trop grande part d’interprétation des règles fixées par la loi de bioéthique, qui conduirait à priver des receveurs potentiels de la possibilité d’accéder au don. Il leur est par exemple reproché de toujours chercher à faire en sorte que l’enfant issu d’un don de gamètes ait une ressemblance avec ses futurs parents ; or cela ne figure pas dans la loi. Quelle est votre doctrine en la matière ? Avez-vous conduit une réflexion sur la possibilité de faire évoluer la situation afin que les personnes asiadescendantes et afrodescendantes puissent avoir un meilleur accès aux gamètes et être sensibilisées au don ?

M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Vous avez rappelé le rôle central de l’Agence de la biomédecine dans l’exécution de politiques publiques sensibles, mêlant enjeux scientifiques, éthiques, démographiques et de santé publique.

Le récent rapport de la Cour des comptes a mis en évidence des défis à relever, en matière notamment de gestion des stocks de gamètes et d’organes, mais aussi des dysfonctionnements. Ainsi, l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules a conduit à un allongement considérable des listes et des délais d’attente. Entre 2021 et 2022, les demandes d’AMP formulées par des femmes ont quadruplé. Dans son rapport, la Cour des comptes alerte sur un possible effet contreproductif de ces mesures, avec un recours accru aux solutions étrangères. Comment comptez-vous répondre à cette tension sur les stocks de gamètes et garantir à tous les publics concernés un accès équitable à l’AMP dans l’ensemble des territoires ? Le système d’information interopérable entre les centres, censé offrir une gestion en temps réel des ressources et des besoins, a-t-il été consolidé ?

La Cour des comptes relève en outre un manque de communication sur les dons de gamètes, d’organes et de tissus. Elle estime que l’agence gagnerait à agir davantage en direction des professionnels de santé, qui travaillent au contact direct des donneurs potentiels et de leurs familles. Quelles mesures concrètes entendez-vous prendre dans ce domaine ?

Enfin, la Cour des comptes recommande de fixer des seuils d’autorisation d’activité de greffe pour les organes comme le cœur et les poumons, pour lesquels le volume d’activité peut avoir un impact avéré sur la qualité des transplantations. Partagez-vous cette analyse ?

Sachez que le groupe Les Démocrates est favorable à votre reconduction à la présidence du conseil d’administration de l’Agence de la biomédecine.

M. Jacques-Olivier Bay. Les difficultés relatives aux greffes d’organes et de tissus constituent un réel sujet de préoccupation : plus de vingt et un patients sont inscrits chaque jour sur la liste d’attente, alors que seules quinze à seize greffes sont réalisables. Force est de constater que la crise sanitaire a conduit à une désorganisation complète des hôpitaux, qui a induit une chute importante de l’activité de greffe. La reprise s’effectue très progressivement et il est évident qu’un effort supplémentaire de communication doit être entrepris pour convaincre nos concitoyens de l’importance vitale du don d’organes. Le taux d’opposition demeure en effet très important, de l’ordre de 36 %, alors que 80 % des personnes interrogées dans les enquêtes se déclarent favorables au don d’organes après leur mort. Il faut essayer de dénouer ce paradoxe et tenter de convaincre nos concitoyens de la nécessité, le moment venu, de passer de l’intention à l’acte de don.

La qualité du soin est également un enjeu majeur. Or les équipes qui effectuent chaque année de nombreuses transplantations font assurément mieux que celles pour lesquelles cette pratique reste marginale. Je suis donc, à titre personnel, favorable à l’établissement de seuils. La fixation de tels critères ne relève toutefois pas de la compétence de l’Agence de la biomédecine, qui peut néanmoins jouer un rôle de conseil en ce sens auprès des agences régionales de santé. Cela fait écho à l’objectif de décentralisation de la politique de greffe d’organes et de tissus au niveau des ARS, visant à gommer les inégalités territoriales, à fluidifier les prélèvements et le transport des greffons et à s’assurer que tout organe prélevé puisse être greffé n’importe où en France dans d’excellentes conditions.

Le développement de nouveaux métiers constitue également un levier. Je pense notamment aux infirmiers en pratique avancée, qui disposeront de compétences élargies à l’interface de l’exercice infirmier et médical.

Il importe également d’améliorer l’accès aux blocs opératoires pour les activités de prélèvement et de greffe d’organes. Or cela suppose de disposer des équipes nécessaires et d’une organisation qui fait parfois défaut.

L’accent est mis en outre sur la formation et le développement du logiciel Cristal, essentiel pour effectuer le lien entre donneurs et receveurs.

La logique du multidon, consistant à prélever le plus possible d’organes sur un même donneur, constitue un autre axe d’amélioration potentiel.

L’élargissement de la possibilité d’accès à l’AMP a indéniablement créé un appel d’air important, que personne n’avait anticipé. Cela signifie que la loi était nécessaire et répond à une attente. Il convient désormais de garantir l’effectivité du recours à l’assistance médicale à la procréation tel que prévu par la loi. Face à l’allongement des délais constatés en Île‑de‑France, trois nouveaux centres d’AMP ont par exemple été créés.

Vous évoquiez l’existence de discriminations en matière d’accès à l’AMP. L’Agence de la biomédecine est très attachée à la diversité, mais ne fait qu’appliquer les lois. Soyez assurés qu’elle jouera pleinement son rôle de conseil lors de la prochaine révision de la loi de bioéthique, si son avis est sollicité.

L’agence entend enfin s’impliquer dans le plan Génomique, afin d’améliorer l’accessibilité des analyses génétiques à vocation médicale.

Le développement des tests génétiques commercialisés par des sociétés privées répond malheureusement à la loi du marché. Dans ce contexte, il est important de légiférer afin de doter l’Agence de la biomédecine des moyens lui permettant de lutter contre de telles dérives.

Mme Annie Vidal, présidente. Nous vous remercions, monsieur Bay, pour la qualité de vos réponses.

 

 

 

La réunion s’achève à onze heures cinquante-cinq.


Présences en réunion

Présents.  M. Joël Aviragnet, M. Thibault Bazin, Mme Béatrice Bellay, Mme Anaïs Belouassa-Cherifi, M. Christophe Bentz, Mme Anne Bergantz, M. Théo Bernhardt, Mme Sylvie Bonnet, M. Elie Califer, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, Mme Nathalie Colin-Oesterlé, Mme Josiane Corneloup, Mme Sandra Delannoy, M. Arthur Delaporte, Mme Sylvie Dezarnaud, M. Fabien Di Filippo, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Fanny Dombre Coste, M. Gaëtan Dussausaye, Mme Karen Erodi, M. Olivier Falorni, M. Olivier Fayssat, M. Guillaume Florquin, M. Thierry Frappé, Mme Océane Godard, Mme Justine Gruet, M. Jérôme Guedj, Mme Zahia Hamdane, M. Michel Lauzzana, M. Didier Le Gac, Mme Christine Le Nabour, Mme Élise Leboucher, Mme Brigitte Liso, Mme Christine Loir, Mme Joëlle Mélin, M. Thomas Ménagé, Mme Joséphine Missoffe, M. Yannick Monnet, M. Serge Muller, M. Jean-Philippe Nilor, M. Laurent Panifous, Mme Sophie Panonacle, M. Sébastien Peytavie, Mme Marie Pochon, Mme Angélique Ranc, Mme Anne-Sophie Ronceret, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, Mme Sandrine Runel, M. Arnaud Simion, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, M. Stéphane Viry

Excusés.  Mme Anchya Bamana, Mme Karine Lebon, M. Benjamin Lucas-Lundy, Mme Hanane Mansouri, M. Jean-Hugues Ratenon, M. Frédéric Valletoux

Assistait également à la réunion.  M. Christophe Naegelen