Compte rendu
Commission de la défense nationale
et des forces armées
— Audition, ouverte à la presse, du général d’armée aérienne Jérôme Bellanger, chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace, sur le projet de loi de finances 2025.
Mercredi
16 octobre 2024
Séance de 16 heures
Compte rendu n° 8
session ordinaire de 2024-2025
Présidence
de M. Jean-Michel Jacques,
président
— 1 —
La séance est ouverte à seize heures une.
Mercredi 16 octobre 2024
M. le président Jean-Michel Jacques. Mes chers collègues, nous poursuivons notre cycle d’auditions consacré au projet de loi de finances pour 2025.
Mon général, nous sommes très honorés de vous auditionner pour la première fois en votre qualité de chef d’état-major de l’armée de l’air et de l’espace (Cemaae). Vous occupez cette fonction depuis le 16 septembre dernier.
Après une première partie de carrière opérationnelle de pilote de chasse, vous avez occupé plusieurs postes au sein de l’inspection de l’armée de l’air, puis commandé la base aérienne 113 à vocation nucléaire de Saint-Dizier. Après un passage à la base aérienne 701 de Salon-de-Provence, où vous avez été directeur général de l’École de l’Air, vous avez été nommé en 2020 chef de cabinet du chef d’état-major des armées (Cema), puis commandant des forces aériennes stratégiques (FAS) en 2021.
L’armée de l’air et de l’espace (AAE) est au cœur de plusieurs priorités de la loi du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense, dite LPM 2024 – 2030 : la modernisation de notre dissuasion nucléaire et de sa composante aéroportée, dont nous venons tout juste de fêter les 60 ans lors d’une très belle cérémonie ; le renforcement de la défense sol-air et de la lutte anti-drone (LAD), largement éprouvées cet été au cœur du dispositif de sécurité aérienne des jeux olympiques et paralympiques (JOP) Paris 2024 ; le développement de nos capacités spatiales, notamment de défense active ; la confirmation de la dynamique vers le tout-Rafale. Vous évoquerez certainement en détail la concrétisation de ces priorités au sein du projet de loi de finances pour 2025, s’agissant notamment du développement de nos capacités spatiales, dont vous avez fait un axe d’effort prioritaire.
Nous espérons avoir le plaisir de vous entendre évoquer l’engagement opérationnel des aviateurs, qui a été particulièrement intense cette année, de la mission Pégase 2024 aux JOP en passant par les déploiements en Nouvelle-Calédonie. Par-delà les sujets strictement capacitaires, notre commission est particulièrement attentive aux ressources humaines. Nous savons combien ces enjeux sont essentiels pour la pérennité de l’AAE. Nous sommes impatients de savoir de quelle façon vous relèverez ces défis.
M. le général Jérôme Bellanger, chef d’état-major de l’armée de l’air et de l’espace (CEMAAE). Mesdames, messieurs les députés de la commission de la défense nationale et des forces armées, je tiens à vous remercier de votre mobilisation le 28 septembre dernier à Istres, à l’occasion de la journée portes ouvertes de la base aérienne, et la semaine dernière à Saint-Dizier pour le soixantième anniversaire de la première prise d’alerte de la composante nucléaire aéroportée, le 8 octobre 1964.
Je me permets de rappeler que la traditionnelle présentation des capacités de l’AAE aura lieu à Évreux le 7 novembre prochain ; nous vous y attendons nombreux. Votre présence à nos côtés lors de ces occasions, n’en doutez pas, démontre l’intérêt que vous portez à l’AAE, ce à quoi les aviatrices et les aviateurs sont très sensibles.
J’évoquerai d’abord les engagements majeurs de l’AAE au cours des derniers mois, ce qui me permettra de mettre en lumière la cohérence de notre action et de vous éclairer au mieux pour l’examen de ce projet de loi de finances pour 2025.
L’AAE a eu un été particulièrement dense, voire hors norme, de la crise en Nouvelle-Calédonie aux JOP, de la sécurisation du flanc Est de l’Europe à la mission Pégase 2024. Elle a aussi eu un été douloureux : j’ai une pensée pour le commandant Mabire et le capitaine Laurens, nos deux pilotes de Rafale morts en mission d’entraînement au combat aérien le 14 août dernier. Cette perte nous rappelle que des hommes et des femmes s’entraînent quotidiennement aux missions les plus difficiles pour assurer aux armées françaises une capacité opérationnelle prête à faire face aux menaces d’un monde de plus en plus dangereux.
Sur le flanc Est de l’Europe, les affrontements se poursuivent, notamment sous forme d’attaques de missiles et de drones tactiques – l’arme aérienne occupe toujours une place centrale dans les combats. Nous poursuivons nos déploiements de chasseurs en Lituanie dans le cadre du dispositif Enhanced Air Policing (eAP).
Nous poursuivons nos missions régulières d’appréciation de situation, de réassurance et d’interopérabilité le long des frontières des pays alliés, au départ de métropole et depuis certaines bases alliées, dans le cadre de l’expérimentation du concept de mise en œuvre réactive de l’arme aérienne (MORANE). Il s’agit de déploiements d’avions avec l’empreinte logistique la plus légère possible, ce qui permet d’être très agile lors de déplacements entre bases aériennes. En outre, un système sol-air de moyenne portée terrestre (Samp-T) Mamba est déployé en Roumanie depuis le 15 mai 2022.
L’AAE contribue au soutien à l’Ukraine par le biais d’actions de formation et de cessions de matériels, notamment de Mirage 2000-5, dont la livraison a été annoncée par le ministre pour le premier semestre 2025.
Au Proche-Orient, si l’Irak semble être sur le point de réussir à contenir Daech sur son territoire, l’opération Chammal n’en est pas moins toujours active pour protéger les soldats français en poste sur nos emprises, avec ou sans nos alliés. En revanche, en Syrie, Daech demeure une menace résurgente. L’opération Chammal s’est adaptée aux mutations en portant une attention toute particulière aux partenariats militaires opérationnels (PMO), afin de poursuivre son appui aux forces irakiennes engagées sur le terrain dans la lutte contre Daech. La coopération bilatérale air est articulée autour de trois axes d’effort : accompagner le partenaire irakien dans la protection de son espace aérien ; développer ses compétences dans le domaine des opérations aériennes ; développer l’interopérabilité avec les moyens de l’AAE et la capacité à réaliser des opérations conjointes.
L’Afrique, notamment le Sahel, reste un point majeur d’attention. La seconde moitié de l’année 2023 a été marquée par le désengagement en bon ordre du Niger. L’action de l’AAE a été recentrée sur le PMO au profit du Tchad et des pays du Golfe de Guinée. Grâce à la réactivité et à la flexibilité d’emploi offertes par ces avions prépositionnés sur le théâtre, nous accompagnons la montée en puissance des armées de l’air locales.
S’agissant de la Nouvelle-Calédonie, ce que nous avons accompli cet été n’a sans doute pas encore été apprécié à sa juste mesure. Entre le début de l’alerte et le 1er juin 2024, nous avons réalisé 28 rotations depuis le hub des armées de la base aérienne 125 d’Istres. Nous avons projeté sous très court préavis, à 19 000 kilomètres, près de 2 000 personnes et 240 tonnes de fret, grâce à une mobilisation majeure de nos flottes de transport, et notamment des avions multi rôles de transport et de ravitaillement (MRTT) de la flotte de transport stratégique au prix de nombreux renoncements sur d’autres missions. Cette mission emblématique aurait été inimaginable il y a trois ans. Nous y sommes parvenus grâce à notre flotte qui sera mature à quinze MRTT, dont trois sont actuellement en rétrofit.
La mise en œuvre de ces moyens a aussi été possible par l’expertise acquise durant les missions Pégase. L’édition 2024 de cette mission a été couronnée de succès. Dans la continuité des projections réalisées en 2022 et 2023, et réalisant le défi de mener deux projections de puissance aérienne vers l’Asie du Sud-Est en simultané, elle s’est achevée avec le retour de l’ensemble du dispositif en France le jeudi 15 août, à l’issue d’une mission d’envergure de 90 000 km en 50 jours
En huit semaines de déploiement, la mission Pégase s’est posée dans treize pays. Elle s’est pleinement inscrite dans le soutien de la stratégie française en Indopacifique, tout en présentant un fort aspect européen, grâce à deux déploiements conjoints, l’un avec les pays partenaires du système de combat aérien du futur (SCAF), l’Allemagne et l’Espagne, sur la route Ouest, l’autre avec l’Angleterre sur la route Est, tous deux à destination de l’Australie.
Nous avons réalisé trois exercices majeurs sur trois continents différents pour renforcer la préparation opérationnelle à la haute intensité, avec nos partenaires et aussi pour réaliser notre entraînement organique. Enfin, une dimension de diplomatie aérienne qui a été supérieure à celle de la précédente, tant se poser dans treize pays lors d’escales valorisées offre la possibilité d’échanger et de faire du signalement stratégique.
Lors des JOP, l’AAE était chargée de la protection dans la troisième dimension de toute la séquence, de la cérémonie d’ouverture, le 26 juillet, à la parade des athlètes, le 14 septembre, soit cinquante-trois jours de vigilance de tous les instants. À cet effet, le socle de posture permanente de sûreté aérienne (PPS-A) a été renforcé et complété par des dispositifs particuliers de sûreté aérienne (DPSA) à en Île-de-France et à Marseille. Les vecteurs engagés ont réalisé 350 missions totalisant quatre-vingt-dix interceptions, soit autant que les décollages d’avions de chasse sur alerte au cours de l’année 2023.
Au sol, les capacités de détection et d’action renforcées – Samp-T Mamba ; missiles sol-air Crotale NG ; missile sol-air de courte portée (Mistral) ; radar espagnol ; missile d’interception, de combat et d’autodéfense (Mica VL) – ont été employés en opération pour la première fois. Quant à la gestion des zones interdites de survol en Île-de-France, elle a été possible grâce à une structure créée à cet effet, le Centre de coordination civilo-militaire des opérations aériennes (C3MOA). Cette structure au caractère interministériel affirmé a permis de mener une lutte anti-drones (LAD) efficace et de grande envergure, préparée notamment par les exercices Coubertin LAD 1 et Coubertin LAD 2 et par le retour d’expérience (Retex) de la Coupe du monde de rugby en 2023. Dans le cadre de la contribution de l’AAE à la sécurisation des JOP, 3 000 aviateurs ont été mobilisés.
Ces opérations démontrent l’engagement quotidien de l’AAE et la nécessité pour elle de bénéficier d’une cohérence budgétaire, qui est un prérequis pour disposer d’une cohérence capacitaire et opérationnelle.
À ce sujet, j’aborderai trois axes majeurs du budget de l’AAE au sein du projet de loi de finances pour 2025 : la valorisation du capital humain, qui est le cœur de l’AAE et au centre de mes préoccupations ; l’activité organique de l’AAE, qui lui permet de réaliser les missions qui lui sont confiées ; la programmation capacitaire, qui permet de renforcer notre crédibilité opérationnelle en tant que puissance aérospatiale.
Mon premier point d’attention, dans la lignée de la préservation de notre cœur de souveraineté, est de m’assurer que le projet de loi de finances pour 2025 place au centre de l’attention les aviateurs et leurs familles, pour être en mesure de recruter, de former et de conserver ceux dont l’AAE a besoin. Le durcissement de l’environnement opérationnel et la complexité accrue de la conflictualité ainsi que les évolutions sociales et sociétales imposent la mise en œuvre d’une politique de ressources humaines garantissant en permanence la mise à disposition des unités de personnels motivés, bien formés et compétents.
La structure des ressources humaines de notre armée est fragile. Il est donc nécessaire de rééquilibrer le modèle, alors même que la LPM 2024 – 2030 prévoit une augmentation de notre effectif de 724 aviateurs. Fragile en volume, elle l’est aussi en raison des difficultés de fidélisation rencontrées au cours des dernières années, qui ont entraîné une déflation significative du nombre d’aviateurs dans nos rangs, laquelle complique à son tour la satisfaction des contrats opérationnels, alors même que la LPM 2024 – 2030 prend acte de nouveaux besoins capacitaires, notamment dans les domaines de l’espace et du cyber.
S’agissant des sous-officiers, dont la classe compte environ 23 000 personnes et qui sont l’épine dorsale de notre effectif, une nouvelle politique de parcours a été créée, ne laissant aucun domaine de côté. Elle offre notamment un cadencement de contrat repensé, des formations en alternance et un nouveau parcours pour les brevets supérieurs de spécialisation. 2025 sera l’année de l’analyse des effets sur les ressources humaines de ce plan et de son éventuelle adaptation.
S’agissant des officiers, dont la classe compte 6 700 personnes, ils assument de fortes sujétions, notamment en matière de mobilité et de sollicitation opérationnelle, ce à quoi nous devons impérativement veiller à apporter de justes compensations. Les générations actuelles sont particulièrement attentives à la conciliation de la vie privée et de la vie professionnelle. Par ailleurs, nos chaînes de métiers sont de plus en plus techniques, ce qui induit un besoin croissant d’officiers très spécialisés, auxquels il faut proposer un parcours attractif hors de la chaîne classique de commandement.
S’agissant des militaires techniciens de l’air (MTA), l’objectif est de les inciter à gravir l’escalier social, ce qui constitue pour nous un véritable défi en matière de formation.
Pour valoriser le capital humain dont elle dispose, l’AAE doit mettre en œuvre une politique agile, moderne, simplifiée, adaptée aux attentes de la nouvelle génération, bien plus individualisée, bien comprise et acceptée. Telles sont les conditions de sa réussite. Je veille à inscrire mon action dans plusieurs lignes de gestion : le recrutement, la formation, les parcours professionnels et la reconversion. La chaîne de recrutement s’est formidablement bien adaptée et transformée. Notre visibilité s’est accrue grâce à des campagnes publicitaires, au site internet devenir-aviateur.fr, à des centres d’information et de recrutement des forces armées en ligne (e-Cirfa) et à une forte présence sur les réseaux sociaux.
Le recrutement est la garantie de la soutenabilité de notre modèle. Il faut rétablir la cohérence de la rotation des personnels pour éviter une surchauffe de l’outil de formation et de trop nombreux départs sitôt la formation achevée.
La formation est un processus stratégique. Elle est très fortement sollicitée. Nous cherchons donc à l’adapter au juste besoin, afin de gagner du temps tout en continuant à bien former.
Notre outil se transforme. Dans le cadre du projet SmartSchool, nous procédons à une digitalisation et à une modernisation profonde des outils de formation. Nous mutualisons des programmes avec d’autres organismes de formation tels que l’École nationale de l’aviation civile (ENAC), l’Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace (ISAE) – Supaéro et, en matière de formation aux métiers des ressources humaines, avec l’université de Tours. Par ailleurs, nous entamons le déploiement de formations en alternance dans le domaine de la cybersécurité et pour les mécaniciens d’avion, et recourons largement à l’apprentissage dans le cadre de l’école d’enseignement technique de l’armée de l’air et de l’espace (EETAAE) de Saintes.
Le modèle des ressources humaines de l’AAE repose également sur notre capacité à construire des parcours qualifiants permettant aux aviateurs de progresser et de se former tout au long de leurs carrières. Il comporte de nombreuses mesures concrètes : le déploiement de nouveaux parcours au profit des sous-officiers et des MTA ; la modernisation de la politique de la mobilité, au sein de laquelle le nouveau système des paliers destiné aux sous-officiers offre de la visibilité aux personnels ; l’amélioration de la prise en compte de la reconversion afin de gérer les flux de départ, notamment grâce à des conventions conclues sur le même modèle qu’avec Air France permettant de juguler le départ des personnels navigants ; l’amélioration du dialogue entre l’administration et l’aviateur grâce à un site dédié ; le déploiement d’outils numériques modernes et efficaces dans le cadre du projet DRHAAE 4.0. Cette attention portée à la gestion de notre personnel permet de le fidéliser. Il s’agit de conserver les compétences et les expertises, et de rentabiliser la formation de haut niveau que l’AAE dispense à ses aviateurs.
Par ailleurs, avec un taux de personnel militaire féminin de 24,8 %, l’AAE se féminise davantage chaque année. Au demeurant, la politique de mixité de l’AAE est une vraie ligne de force de notre modèle.
Il faut conforter les mesures du plan Fidélisation 360, qui concrétise une ambition du ministre, face à un secteur aéronautique privé particulièrement dynamique et volontiers prédateur des savoir-faire de notre personnel. À ce sujet, l’évolution de la grille indiciaire des sous-officiers en 2024 et de celle des officiers en 2025 est particulièrement attendue par le personnel.
Assurer le bien-être de nos aviateurs suppose aussi de prendre soin de nos infrastructures et de notre réseau de bases aériennes, dont le parc d’hébergement est vétuste. Dans ces conditions, l’AAE a réparti le budget alloué en tenant principalement compte de l’amélioration des conditions d’hébergement, en priorisant les écoles et les ayants droit que sont les MTA, d’une part, et, d’autre part, de l’accompagnement des évolutions en matière de ressources humaines induites par la réorganisation de certaines emprises, dont la mise à niveau capacitaire de la base aérienne d’Orange pour l’accueil d’une escadre de Rafale et la réinstallation du commandement des Forces aériennes stratégiques (FAS) à la base aérienne de Taverny sont des exemples typiques.
S’agissant des réserves, nous avons élaboré un plan pluriannuel dénommé Cap réserve Air 2030, qui permettra à terme d’atteindre un effectif de près de 12 000 réservistes opérationnels formés, entraînés et mobilisables en complément individuel ou au sein d’unités élémentaires de réserve (UER), lesquelles seront déployées sur les bases aériennes de métropole et d’outre-mer ou rassemblées au sein d’une base aérienne de réserve armée de 450 réservistes.
En matière de doctrine d’emploi, notre réserve s’articule autour d’une réserve de combat directement employable au sein des unités opérationnelles, d’une réserve territoriale chargée de la protection des emprises de l’AAE ou du territoire national et d’une réserve d’expertise employée dans des métiers de niche, notamment dans les domaines des ressources humaines, du cyber et de l’espace.
Par ailleurs, je porte une attention toute particulière aux liens établis avec la jeunesse, notamment dans le cadre des escadrilles air jeunesse (EAJ), que vous avez pu rencontrer à la base aérienne d’Istres. Je tiens à en poursuivre le développement compte tenu du succès qu’elles rencontrent auprès de nos jeunes concitoyens.
J’en viens à l’activité organique de l’AAE, qui lui permet de réaliser les missions qui lui sont confiées. Le projet de loi de finances pour 2025 doit permettre de compter sur des ressources conformes à la trajectoire prévue par la LPM 2024 – 2030, pour s’assurer que les aviateurs continuent à remplir les missions essentielles que sont la mise en œuvre de la dissuasion nucléaire aéroportée, la protection de l’espace aérien souverain et des opérations d’intervention aériennes et spatiales.
Le montant global des ressources allouées au budget opérationnel de programme (BOP) Air est conforme à la trajectoire prévue par la LPM 2024 – 2030. Il est de 3,54 milliards en crédits de paiement et de 3,33 milliards en autorisations d’engagement. Après l’effort significatif en matière de crédits consacrés à la préparation des forces en 2024, le projet de loi de finances pour 2025 permet de maintenir un plateau d’activité des flottes de chasseurs, d’avions de transport et d’hélicoptères de 2025 à 2027.
Il permet aussi d’assurer le maintien en condition opérationnelle (MCO) de matériels en très grande majorité aéronautiques, à hauteur de 66 % du BOP Air, soit 2,2 milliards, donc de soutenir l’activité et la disponibilité des équipements de l’AAE. Il permet notamment d’acheter des stocks de pièces détachées pour assurer le soutien de notre avion radar E-3F Awacs jusqu’à son retrait du service, rendu nécessaire par le début de retrait du service des flottes américaines et de l’Otan, d’étendre le périmètre du soutien des matériels liés au système de commandement et de conduite des opérations aérospatiales (SCCOA) et d’améliorer le soutien de la flotte d’A400M.
Par ailleurs, l’AAE doit assurer une activité au profit de nos outre-mer. L’AAE est présente sur dix sites hors de la métropole, dont cinq dans nos outre-mer et cinq à l’étranger. Compte tenu des élongations, seule la puissance aérienne autorise un accès rapide à de nombreuses parties du globe afin d’assurer la protection des intérêts français et l’évacuation de nos ressortissants, à laquelle nous avons récemment procédé au Soudan et au Niger, et il y a trois ans en Afghanistan.
L’action par les airs offre la réactivité nécessaire pour assurer la continuité de l’État dans des situations exceptionnelles, telles que celle qui prévaut actuellement en Nouvelle-Calédonie. L’ambition de l’AAE est de renforcer sa présence outre-mer, en complétant ses forces prépositionnées par des escales plus régulières et de plus en plus longues d’A400M, coordonnées avec les commandants supérieurs (COMSUP), en vue de procéder à terme à un détachement permanent.
L’emploi de drones aériens et d’avions de surveillance légers pour surveiller des espaces étendus, marquer notre présence et orienter les interventions, en s’inspirant de l’emploi de drones Reaper dans le cadre de la mission de surveillance, est à l’étude, conformément aux orientations de la LPM 2024 – 2030. Par ailleurs, nous développerons davantage le concept Morane qui, dès les phases de compétition et de contestation, répond aux besoins des armées en multipliant les opportunités de communication stratégique pour démontrer si nécessaire notre détermination à nos adversaires et à nos compétiteurs.
J’en viens à la programmation capacitaire, qui permet de renforcer notre crédibilité opérationnelle en tant que puissance aérospatiale. Le projet de loi de finances pour 2025 rend soutenable, pour la période 2025 – 2027, l’agrégat budgétaire des programmes à effet majeur (PEM), tout en intégrant de nouvelles priorités dont l’intelligence artificielle, ainsi que des besoins essentiels.
Parmi ceux-ci, nous avons notamment ciblé la défense sol-air, qu’il faut transformer en défense sol-air intégrée c’est-à-dire multicouche dont la lutte anti-drone avec un C2 propre, la guerre électronique – notamment la capacité de suppression des défenses aériennes ennemies (SEAD) – et la connectivité – le développement de la simulation massive en réseau (SMR) permettra des entraînements tactiques, en complément de nos simulateurs historiques offrant un entraînement plus technique, en vue d’un déploiement opérationnel en 2025 pour les données non classifiées.
S’agissant du programme 146 Équipement des forces, l’année 2024 a permis un indispensable effort sur les munitions, qui a donné lieu à un recomplètement de systèmes de croisière conventionnels autonomes à longue portée (Scalp), d’armements air-sol modulaires (AASM) et de missiles Aster, à des commandes supplémentaires et à une remotorisation du missile d’interception, de combat et d’autodéfense (Mica) NG, et au lancement des travaux sur l’artillerie anti-aérienne. Cet effort a également permis de tenir compte d’objets prioritaires pour l’AAE, tels que le développement – essentiel – du standard F5 du Rafale, du drone de combat, de la réfection des infrastructures aéronautiques, notamment dans les outre-mer, de la production avancée de pods Talios ainsi que de kits Medevac et la sécurisation de la partie relative aux infrastructures du programme d’avion de transport école du futur visant à remplacer le Xingu.
En 2025, des décisions capacitaires importantes resteront à prendre sur le recomplètement du parc de chasseurs, la feuille de route de l’aviation de transport et le choix du successeur de l’E-3F Awacs. Au sein du projet de loi de finances pour 2025, l’AAE a identifié trois enjeux capacitaires principaux.
Le premier est la poursuite du passage progressif au tout Rafale, qui se concrétisera par la livraison de quatorze Rafale en 2025 et par la montée en puissance de l’escadron Rafale sur la base aérienne 115 d’Orange-Caritat.
Le deuxième est le renouvellement de la flotte d’hélicoptères de manœuvre grâce à la livraison de cinq H-225 Caracal sur les huit commandés en 2020, lors de la crise du covid, dans le cadre du plan de soutien à l’aéronautique. Deux d’entre eux ont été livrés en 2024. Ces appareils seront stationnés outre-mer en priorité pour relever les hélicoptères Puma vieillissants.
Le troisième est la modernisation de l’aviation de transport tactique et stratégique grâce à la livraison d’un A400M, à une reconversion en MRTT supplémentaire et à l’acquisition d’un Falcon 900 et d’un avion léger de surveillance et de reconnaissance (ALSR). Au début de l’année 2025, Ariane 6 mettra en orbite le troisième satellite de la composante spatiale optique (CSO-3), qui améliorera les capacités des armées dans les domaines de la connaissance, de l’analyse et de l’anticipation. À la fin de l’année 2025, le bâtiment définitif du commandement de l’espace (CDE) sera livré à Toulouse. Par ailleurs, les travaux sur la LAD seront poursuivis.
Ainsi, des choix déterminants s’imposeront dans tous les agrégats budgétaires. Ils impacteront directement le futur format de l’AAE. Nous resterons vigilants à ce sujet. Le projet de loi de finances pour 2025 comporte des avancées concrètes pour notre armée. Nous prenons la mesure de l’effort financier consenti en faveur de la défense. Soyez assurés que je veillerai à l’usage en toute occurrence de chaque euro au profit d’une capacité opérationnelle répondant aux menaces de notre environnement.
J’en viens plus particulièrement à l’espace, qui mérite toute notre attention. La LPM 2024 – 2030 consolide les moyens ambitieux alloués par la LPM 2019 – 2025. Elle prévoit une enveloppe de 6 milliards, dont 700 millions dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, pour relever les défis de la stratégie spatiale de défense, faire face à l’extension de la conflictualité dans ce domaine et garantir notre autonomie stratégique.
J’ai trois points d’attention. Le premier est d’être en mesure de mener des opérations spatiales militaires. La protection des intérêts nationaux dans l’espace incombe aux armées. Dans ce cadre le CDE planifie et conduit des opérations spatiales militaires, notamment l’appui spatial aux opérations militaires, la compréhension du milieu, qui est assez singulier, et l’action dans l’espace.
La stratégie spatiale de défense française (SSD), publiée en 2019, inscrit l’action dans l’espace dans la notion de défense active, qui comprend toutes les mesures passives et actives pour conserver, en toutes circonstances, la liberté d’accès vers, dans et depuis l’espace. L’un des objectifs du CDE est donc de se doter rapidement de satellites patrouilleurs-guetteurs en orbite géostationnaire capables de défendre nos capacités spatiales stratégiques.
L’enjeu est de lancer au plus vite notre démonstrateur de satellite patrouilleur afin que les opérateurs militaires développent des savoir-faire essentiels à la mise en œuvre de ces moyens de défense active avant l’arrivée à l’horizon 2030 d’une première capacité réellement opérationnelle.
Mon deuxième point d’attention est de nourrir une ambition capacitaire à la hauteur du statut de la France. La LPM 2024 – 2030 permet de consolider non seulement l’appui spatial aux opérations grâce aux capacités d’observation, d’écoute et de télécommunication, mais aussi de mettre en place une structure de commandement capable de planifier et de conduire les actions vers, dans et depuis l’espace, de renforcer nos moyens de surveillance de l’espace et de contractualiser des services commerciaux complémentaires concourant à la supériorité opérationnelle. Cette approche est au cœur du programme « Action et résilience spatiale » (Ares), qui repose sur un triptyque : surveillance et connaissance de l’espace ; outil de commandement et de contrôle ; action dans l’espace.
L’effort financier permettra plus particulièrement de renforcer ces trois piliers, mis en œuvre au sein du futur bâtiment du CDE, qui sera livré à la fin de l’année 2025. Il permettra également de poursuivre le renouvellement des capacités spatiales militaires. En matière d’action depuis l’espace, il s’agit de CSO-3 et, à partir de 2030, d’IRIS, du programme de capacité électromagnétique spatiale (CELESTE) qui succédera au programme CERES, et de la préparation de Syracuse V à la fin de la période couverte par la LPM 2024 – 2030.
S’agissant du renforcement de l’action vers l’espace, nous prendrons livraison du radar Aurore, qui est le successeur du radar GRAVES. Ce radar de nouvelle génération permettra une situation spatiale autonome et précise. Le développement et l’expérimentation d’aveuglement de satellites depuis le sol permettront d’en faire la démonstration avant la fin de la décennie. S’agissant de notre action dans l’espace, elle bénéficie du programme d’yeux en orbite pour un démonstrateur agile (YODA), précurseur du programme EGIDE, complété par le programme TOUTATIS de démonstrateurs innovants injectés en orbite basse dès 2026.
Mon troisième point d’attention est de développer le recours aux services spatiaux qui, en complément de nos moyens patrimoniaux, contribuent à la supériorité opérationnelle dans tous les domaines – surveillance de l’espace ; observation ; écoute ; communication – et constituent à ce titre un vrai pivot au sein de la LPM 2024 – 2030. Depuis plusieurs années, le CDE commande des services spatiaux à plusieurs sociétés telles que ArianeGroup, Safran Data Systems et Airbus Defence and Space et Exotrail.
La montée en puissance du CDE se poursuit. L’enjeu est d’accélérer la mise en œuvre de la SSD, s’agissant notamment de l’action dans l’espace, en développant les capacités qui nous permettront d’améliorer notre réactivité opérationnelle vers l’espace.
M. le président Jean-Michel Jacques. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Frank Giletti (RN). Le groupe Rassemblement national adresse ses pensées les plus sincères aux familles des pilotes qui nous ont tragiquement quittés cet été, le capitaine Sébastien Mabire et le lieutenant Mathis Laurens ainsi que Didier Berger, pilote cuersois vivant dans ma circonscription, décédé aux commandes de son appareil lors d’un show aérien au Lavandou. Soyez assuré, mon général, de notre plein et entier soutien.
Ma question porte sur l’écosystème de l’aviation de chasse au sein de l’AAE. Comme je l’ai indiqué, pour le regretter, dans mon dernier rapport pour avis, le format de notre flotte d’aviation de chasse est préoccupant. La LPM 2024 – 2030 a fixé à 137 le nombre de Rafale dont disposera l’AAE à l’horizon 2030, soit quarante-huit avions de moins que la cible de 185 Rafale fixée par la LPM 2019 – 2025. Le manque d’ambition de cette nouvelle cible est regrettable, d’autant que les flottes stratégique et conventionnelle de Rafale sont de facto mutualisées dans le cadre d’un empilement des contrats opérationnels.
La réduction de la cible Rafale aura nécessairement des conséquences délétères sur les indicateurs d’activité opérationnelle, qui sont légèrement inférieures aux cibles, et surtout sur la disponibilité des matériels, qui sont sursollicités dans un contexte où les engagements opérationnels de nos aviateurs se multiplient – posture de dissuasion ; posture permanente de sûreté aérienne (PPSA) ; missions de service public ; formation de nos partenaires africains ; crise en mer Rouge ; déploiement sur le flanc oriental de l’Europe.
Le 6 juin dernier, le Président de la République annonçait pourtant la cession de plusieurs Mirage 2000-5 aux forces armées ukrainiennes (FAU), amputant d’autant les stocks de l’AAE. En août, nous avons eu la tristesse d’apprendre la collision en vol de deux de nos Rafale. À court terme, ces prochaines cessions, ainsi que le modèle de soutien complet aux FAU qui leur est associé, paupériseront encore davantage le format pourtant taillé au plus juste de notre aviation de chasse. Par ailleurs, elles provoqueront un report d’activité sur la flotte de Rafale et accéléreront de fait, sous toute réserve, le retrait du service opérationnel du Mirage 2000-5.
En tenant compte de tous ces éléments, quelles garanties l’AAE a-t-elle reçu au sujet du recomplètement des aéronefs cédés et des équipements de mission afférents ? Quel est l’avenir des Mirage 2000-5 encore en service dans la flotte de chasse française ? Leur MCO pourra-t-il être correctement assuré ? Est-il possible d’anticiper certaines commandes de la cinquième tranche de Rafale pour limiter la réduction temporaire du format de notre aviation de chasse ?
M. le général Jérôme Bellanger. Notre aviation de chasse doit fournir au chef des armées la capacité de frapper n’importe quel adversaire, n’importe où et n’importe quand. Cela signifie, pour nous, agir sous très court préavis tout en maintenant la réversibilité et en assurant la gradation des effets, du signalement stratégique à la frappe nucléaire.
Nous avons besoin, pour assurer nos contrats opérationnels, de l’activité de 185 avions de chasse. En cas de crise majeure, compte tenu du contexte qui prévaut à l’heure actuelle, nous pourrons assurer nos contrats opérationnels, qu’il s’agisse de missions permanentes telles que la dissuasion et la PPSA ou de missions entrant dans le cadre d’une hypothèse d’engagement majeur (HEM).
Le format actuel comporte des Rafale, des Mirage 2000-5 et des Mirage 2000-D, dont la LPM 2024 – 2030 prévoit la rénovation. Les Mirage sont d’excellents appareils, qui exécutent parfaitement les missions qui leur sont confiées. Tout ne repose pas sur le Rafale.
Pour compenser l’attrition des matériels et les cessions sans renoncer à la cible de 185 avions de chasse, nous augmenterons notre activité en adaptant le MCO, en lien avec la direction de la maintenance aéronautique (DMAé) ce qui nécessitera la commande de pièces supplémentaires, et nous chercherons à accélérer les livraisons de Rafale de la cinquième tranche.
S’agissant du recomplètement, la montée en puissance se poursuivra en 2025 grâce à la livraison de quatorze Rafale en vue d’armer la cinquième escadre. Ils seront au standard F4, qui est un incrément capacitaire posant les premiers jalons du combat collaboratif – connectivité ; engagement ; survivabilité grâce au cyber ; disponibilité améliorée grâce une maintenance prédictive assurée par un nouveau calculateur.
Le standard F5 est attendu à l’horizon 2035. Il sera adapté au futur missile nucléaire ASN4G. Pour être opérationnel en 2035, ce nouveau standard devra être introduit en 2033. Il permettra de mieux pénétrer les défenses adverses, tâche qui sera facilitée par l’association d’un drone de combat.
M. Sébastien Saint-Pasteur (SOC). Mon général, vous avez beaucoup parlé des femmes et des hommes. Ils sont essentiels. Nos pensées vont à celles et ceux morts pour la France dont vous avez cité le nom.
Je souhaite vous interroger sur la robotisation du combat aérien, sa modernisation et l’adaptation de nos moyens d’intervention aux besoins actuels.
Face à l’évolution de la menace, l’emploi des drones doit s’intégrer dans le concept d’opérations multimilieux et multichamps (M2MC), souvent difficile dans l’environnement parfois appelé 4D et souvent hostile. Cette interopérabilité, voire cette interdépendance vise à optimiser les synergies entre les plateformes de renseignement, de surveillance et de reconnaissance, les plateformes effectrices aériennes, navales et terrestres ainsi que les munitions et autres charges utiles.
Cela n’est pas sans conséquence sur la doctrine tactique du commandement et du contrôle pour la mise en œuvre des drones, sur l’évolution des fonctions de chef de patrouille, de commandement de mission et de gestion du combat aérien, ainsi qu’à l’échelle interarmées. Dans ce monde fortement en mouvement, la robotisation des armées est tactiquement centrale. Sommes-nous au niveau des besoins et des changements en cours ? Si les moyens ont été fortement rehaussés l’année dernière pour rattraper le retard pris par la France, le coup de booster semble malheureusement insuffisant.
Par-delà la question des moyens se pose celle du choix. La guerre en Ukraine démontre la montée en puissance d’une guerre asymétrique dans laquelle les drones low cost jouent un rôle croissant. L’Europe investit dans des systèmes avancés tels que le Reaper, le Predator et le Scaf, qui sont nécessaires et essentiels. Toutefois, les conflits actuels suggèrent que la quantité et l’accessibilité des drones sont devenues des critères essentiels. Pouvez-vous partager votre regard sur la façon dont notre pays se positionne dans ces guerres de plus en plus asymétriques ?
M. le général Jérôme Bellanger. La seconde question s’inscrit dans le débat entre masse et technologie. Nous avons tiré de nombreuses leçons de la guerre en Ukraine, caractérisée par une utilisation à outrance des drones et une densification des attaques. Les munitions téléopérées (MTO) permettent d’aller « au-delà de la colline » et surtout de s’attaquer aux défenses adverses.
En matière de drones, nous avons pris du retard mais nous le rattrapons. Pour plusieurs raisons, nous nous sommes lancés dans la conception d’un drone volant à moyenne altitude et de longue endurance (MALE), en collaboration avec les Allemands. Même s’il a pris du retard, ce programme devrait tenir toutes ses promesses s’agissant du haut du spectre couvert par des engins assez volumineux, sans nous empêcher de nous intéresser au bas du spectre, couvert par des engins de plus petite taille susceptibles de servir au renseignement d’origine électromagnétique (ROEM) et au renseignement d’origine image (ROIM).
S’agissant des drones de petite taille, nous ne sommes pas en retard. C’est un domaine que nous avons exploré, en accélérant la modernisation en tenant compte de ce qui se passe en Ukraine, qui la rend indispensable. Cette gamme va du drone tactique à des drones plus évolués de type Shahed, utilisés dans le conflit en Ukraine.
La robotisation du combat aérien est inévitable. Ce qui se passe en Ukraine constitue un bon démonstrateur.
Mme Corinne Vignon (EPR). Tandis que les tensions internationales s’intensifient, l’utilisation de l’espace est devenue un marqueur de souveraineté civile, militaire, technologique et économique de toutes nos sociétés. La multiplication des projets et des objets en orbite, la montée en puissance d’acteurs privés soutenant ces projets, les confrontations diplomatiques et militaires sur la militarisation de l’espace et la prolifération des débris sont autant de sujets centraux.
Prenant acte du caractère stratégique de l’espace pour notre nation, le Président de la République et le gouvernement précédent ont agi. La SSD évoque les menaces et les risques nouveaux pouvant bouleverser la liberté d’accès ou d’action dans l’espace et garantit l’appui spatial de nos forces armées. La LPM 2024 – 2030 a renforcé les moyens consacrés à l’espace à hauteur de 6 milliards.
Cette enveloppe permet une vision renouvelée du modèle industriel spatial français, une volonté de tirer avantage des opportunités offertes par le New space et une réflexion impliquant des relations modernisées entre le ministère des armées et le Centre national d’études spatiales (Cnes), par le biais du CDE créé à l’occasion. Basé à Toulouse, dans ma circonscription, le CDE accueillera près de 500 personnels en 2025. Il incarnera la nouvelle ambition et la montée en puissance de l’expertise spatiale militaire.
Afin d’accompagner cette dynamique, le projet de loi de finances pour 2025 consacre plus de 700 millions à l’espace, afin de gagner en autonomie stratégique en matière d’appréciation de situation, de décision et de conduite des opérations. Les crédits de la sous-action 12 Activités spatiales augmentent de 57 %.
Ma question porte sur le secteur satellitaire français. Le changement de paradigme du secteur, qui réduit le marché des satellites géostationnaires au profit des constellations de satellites et des satellites reconfigurables, est un tournant de l’histoire du secteur spatial, qui ouvrira d’immenses opportunités pour inventer les technologies du futur. Quelle est votre vision du virage que doivent prendre les satellitiers tricolores ?
M. le général Jérôme Bellanger. Nous sommes à un tournant, qu’il faut bien négocier pour faire un New space à la française. Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas capitaliser sur ce que nous avons réussi à construire dans les années 1960 et 1970, au contraire. Les deux sont complémentaires.
Les lancements spatiaux connaissent un véritable embouteillage. Il faut se donner les moyens de compléter les lancements d’Ariane 6 et d’aider les start-up qui font des satellites de très petite taille ou de moyenne taille. Leur apport, pour des raisons de résilience et d’efficacité, est indispensable pour réaliser des constellations de satellites.
Nous n’agissons pas seuls dans l’espace, qui est un domaine où les partenariats sont indispensables. Outre les partenariats européens, nous avons besoin de notre allié américain pour compléter notre action et dialoguer. Nous menons avec eux des opérations et des exercices très utiles au CDE.
Nous sommes ravis de nous installer à Toulouse, où je me suis rendu le lendemain de ma prise de fonctions. Les travaux avancent à marche forcée. L’écosystème spatial autour de Toulouse sera bénéfique pour l’AAE.
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Ma question porte sur le spatial de défense. L’ouverture de 138 millions de crédits pour la maîtrise de l’espace est bienvenue, mais insuffisante compte tenu de la compétition internationale, du sur-déploiement des capacités américaines et chinoises et des nouvelles vulnérabilités et conflictualités. S’agissant du trafic orbital, les projets et les financements de mégaconstellations s’accumulent.
Le cas de Starlink est bien connu. Ce système représente 87 % du tonnage mondial satellisé au premier semestre 2024 et 70 % des satellites en orbite. Il comporte 6 403 unités opérationnelles. Le lanceur hyperlourd Starship, qui vient d’achever son cinquième vol, annonce une capacité d’emport de 100 tonnes en orbite basse, soit 1,5 fois plus qu’Ariane 6. Il pourrait saturer l’espace d’usages divers et variés. Par le biais de Starfield, qui est la version militaire de Starlink, SpaceX impose ses services à l’armée de l’air ou aux renseignements.
Face à cette astro-capitalisme militarisé, la France et l’Europe sont à la remorque. La montée en gamme du CDE est une première réponse, l’allocation de crédits au commandement des opérations spatiales militaires également, mais la France tâtonne. C’est pourquoi nous aimerions en savoir davantage.
Premièrement, s’agissant des lanceurs, Ariane 6 vous semble-t-elle suffire en matière capacitaire ? Les micro-lanceurs, réputés plus légers et flexibles d’usage, font-ils partie des options crédibles à développer encore ?
Deuxièmement, quels moyens seront alloués sur le long terme au développement de nos capacités orbitales ? Des études de l’orbite basse ont été lancées en 2019. Où en est le programme IRIS, que vous avez annoncé pour 2030 ?
Troisièmement, quels moyens sont alloués à la surveillance du trafic orbital ? Cette compétence est externalisée à des start-up. Avons-nous intérêt à l’internaliser ?
Par ailleurs, j’ai une question de doctrine plus fondamentale, laquelle justifie les engagements capacitaires à moyen et à long terme. Comment la France peut-elle en même temps ne pas fléchir dans la défense proactive du Traité de l’espace garanti par l’ONU exigeant que les usages de l’espace soient pacifiques et participer à la surenchère des dépenses dans les complexes militaro-industriels parmi les puissances aérospatiales ? Certes, l’horizon de la démilitarisation est abstrait et minoritaire ; pour notre groupe, il est autrement plus soutenable pour les activités spatiales civiles et militaires.
M. le général Jérôme Bellanger. S’agissant des lanceurs, il y a un véritable embouteillage pour accéder à l’espace. Or le CDE, comme d’autres, a besoin de s’exercer, ce qui suppose de disposer de satellites patrouilleurs-guetteurs. C’est un vrai problème, que nous espérons résoudre grâce à la mise en service d’Ariane 6.
Toutefois, nous ne sommes pas en retard. Le radar GRAVES, bientôt remplacé par le radar AURORE, offre une situation spatiale autonome, qui nous permet même de voir certaines choses que nos partenaires européens ne voient pas. Dans tous ces domaines, nous nous inscrivons dans la SSD publiée en 2019.
S’agissant de la doctrine spatiale, nous nous en tenons à une défense active excluant tout état d’esprit offensif. Nous ne développons pas de missiles destinés à détruire certains satellites, comme le font entre autres les Russes. Nous poursuivons nos études des technologies de brouillage et du laser à énergie dirigée.
Mme Josy Poueyto (Dem). Le groupe Les Démocrates sera attentif aux crédits alloués aux armées. Nous serons particulièrement vigilants, lorsqu’il s’agira de voter le budget, pour qu’ils ne redeviennent pas la variable d’ajustement qu’ils étaient auparavant.
Dans le contexte géostratégique dégradé que nous connaissons, notre responsabilité collective est d’assurer la trajectoire budgétaire en vue de transformer nos armées, de répondre à l’évolution des menaces et de faire face au réarmement du monde. Cette évolution des menaces concerne à plus d’un titre à l’armée de l’air, laquelle a su s’adapter, au fil de ses quatre-vingt-dix ans d’histoire, jusqu’à devenir, en 2019, l’armée de l’air et de l’espace.
Lanceurs, satellites, constellations, massification de l’usage des drones, déni d’accès de plus en plus sophistiqué et performant : le ciel, la très haute altitude (THA) et l’espace extra-atmosphérique présentent de nouveaux enjeux. Nous sommes en train d’entrer dans ce nouveau monde.
C’est pourquoi la LPM 2024 – 2030 a fait le choix de conforter et de moderniser la dissuasion, clé de voûte de notre défense. Ce saut générationnel représentera en 2025 500 millions de crédits supplémentaires, non sans rappeler la place des FAS. Dans ce même budget 2025, nous lancerons le programme du porte-avions de nouvelle génération (PANG).
Par-delà les équipements et matériels identifiés dans le projet de loi de finances, je me demande toujours si le format de nos flottes est adapté aux défis. Je m’interroge sur la disponibilité des aéronefs ainsi que sur le niveau d’activité et de préparation opérationnelle. Pouvez-vous présenter votre analyse en la matière ?
Par ailleurs, j’aimerais savoir si vous disposez d’éléments sur le recrutement et sur la fidélisation des personnels, sans lesquels rien ne serait possible, ainsi que sur les violences sexuelles et sexistes (VSS) dans l’AAE.
M. le général Jérôme Bellanger. S’agissant du format de l’AAE et de la disponibilité des matériels, nous disposons de matériels extraordinaires, grâce à une base industrielle et technologique de défense (BITD) très particulière, dont peu de pays ont l’équivalent, et qui nous permet de mettre en œuvre des matériels efficaces et résilients avec une très bonne disponibilité. Le Rafale est un avion de chasse très mature dont la performance en opérations n’est plus à prouver et que nous exportons. Disposer de tels matériels nous permet de jouer sur leur disponibilité pour compenser le fait que le format de l’AAE est temporairement un peu en deçà du seuil nécessaire à la réalisation de nos heures de vol.
Nos personnels sont très bien formés et entraînés. Je viens de quitter le commandement des FAS. J’invite chacun d’entre vous à assister à une opération Poker pour prendre conscience que nous n’avons jamais cessé de nous entraîner à la haute intensité. C’est parce que nous menons une opération Poker quatre fois par an que nous sommes capables de mener un raid à longue distance tel que l’opération Hamilton qui a consisté à frapper en Syrie en 2018.
La modernisation de nos capacités s’inscrit dans la classique alliance du glaive et du bouclier. Elle permettra de conserver la capacité de pénétrer les défenses adverses, grâce à l’évolution du standard du Rafale, de F4 actuellement à F5 en 2035. Il ne s’agit pas de faire plaisir à Dassault Aviation, mais de conserver la capacité de pénétrer les défenses ennemies.
En matière de recrutement et de fidélisation, nous avons assisté pendant plusieurs années à une hémorragie de personnel, qu’il était structurellement difficile de fidéliser. Grâce notamment à la nouvelle politique de rémunération des militaires, à l’individualisation des parcours et au développement de la formation continue, la fidélisation des personnels porte ses fruits et l’hémorragie est jugulée. En 2024, nous devrions atteindre les objectifs de notre schéma d’emplois, notamment en recrutant 3 540 aviateurs.
S’agissant des VSS, le sujet est traité au plus haut niveau dans le cadre d’un comité de pilotage. Au sein de l’AAE, nous l’avons très tôt pris au sérieux. Nous nous attachons, après avoir connu plusieurs types de situations, à accompagner la victime dans la durée et à sanctionner l‘agresseur après avoir pris les mesures de précautions qui s’imposent dès le début. Pour maintenir durablement cet état d’esprit, nous formons de plus en plus les personnels à l’accompagnement des victimes.
M. Matthieu Bloch (UDR). Le groupe UDR s’associe à la peine des familles et des collègues des aviateurs qui ont disparu cette année, nous rappelant que, même en exercice, nos pilotes risquent leur vie. Nous leur devons une reconnaissance éternelle.
Les Rafale de dernière génération ont été prévus pour fonctionner en soutien avec des drones. Comme Frank Giletti, je suis préoccupé par la pente décroissante du nombre d’aéronefs disponibles à l’avenir. La modernisation des Rafale de dernière génération et leur accompagnement par des drones permettent-ils de diminuer le nombre d’aéronefs ?
Par ailleurs, quel est le calendrier du déploiement du Rafale sur la base aérienne 116 de Luxeuil-les-Bains ? Ce déploiement comportera-t-il une composante nucléaire, comme ce fut jadis le cas ?
M. le général Jérôme Bellanger. S’agissant de l’accompagnement de drone, celui-ci est complémentaire du vecteur piloté pour faciliter la pénétration des lignes ennemies. Le Rafale F5 accompagné d’un drone pénétrera mieux les défenses ennemies, ce qui ne veut pas dire qu’il ne les pénétrera pas si le drone n’est pas là. Le drone est un moyen déporté connecté au Rafale qui lui permet de mener encore mieux sa mission et de réaliser pleinement son potentiel.
La base de Luxeuil-les-Bains accueillera deux escadrons de Rafale. Il est trop tôt pour dire s’il s’agira de Rafale emportant l’arme nucléaire. La décision sera prise au plus haut niveau de l’État.
M. le président Jean-Michel Jacques. Nous en venons aux interventions des autres députés.
M. Romain Tonussi (RN). La fidélisation des pilotes de chasse est un enjeu majeur pour l’AAE, confrontée à des départs vers l’aviation civile faute d’être en capacité de leur permettre de réaliser suffisamment d’heures de vol, ce pour quoi ils se sont initialement engagés. En outre, l’Otan fixe un objectif minimal de 180 heures de vol par an. On ne peut que constater que le projet de loi de finances pour 2025 maintient le doute sur cette donnée, qui n’est pas accessible à tous les parlementaires, ce qui entrave l’exercice de leur fonction de contrôle.
Par ailleurs, la diminution de la flotte d’avions de chasse a nécessairement un impact sur le nombre d’heures de vol, donc sur la motivation de nos pilotes. La LPM 2024 – 2030 prévoit d’atteindre l’objectif de 180 heures de vol d’ici 2030. Les moyens alloués par le projet de loi de finances pour 2025 sont-ils suffisants pour faire face à cette hausse d’activité ?
M. le général Jérôme Bellanger. Très sincèrement, nous parvenons à maintenir notre activité, qui dépend des machines sur lesquelles nous volons. S’agissant du Rafale, qui est un avion polyvalent, il faut atteindre environ 160 heures d’entraînement organique et réaliser de soixante heures de simulation. Et il est important de conserver cette répartition 1/3 de simulation et 2/3 de vol pour conserver le sens de l’air et appréhender l’ensemble des missions confiées à un pilote de Rafale. Tels sont les chiffres que la LPM 2024 – 2030 prévoit d’atteindre ; nous sommes au rendez-vous.
Par ailleurs, la réduction de la flotte des Rafale n’induit pas nécessairement une diminution du nombre d’heures de vol. En mettant à profit le MCO pour augmenter l’activité, quitte à les user plus rapidement, il est possible de le maintenir. C’est ainsi que nous parviendrons, à court terme seulement, à nous entraîner, l’objectif d’un format à 185 avions Rafales étant maintenu.
Mme Murielle Lepvraud (LFI-NFP). Thales Alenia Space a annoncé la suppression de 1 300 postes dans le secteur spatial, dont 1 124 en France sur les sites stratégiques de Toulouse, Cannes et Brest, où quatre-vingts postes sont concernés. Cette décision a été prise alors même que le groupe affiche des résultats financiers exceptionnels, avec plus de 2 milliards de bénéfices, et que le marché spatial connaît une forte croissance en 2024.
Ce matin, nous avons appris qu’Airbus a l’intention de supprimer jusqu’à 2 500 postes de sa branche Défense et espace. Compte tenu de l’importance cruciale des satellites pour nos télécommunications sécurisées, pour la surveillance des espaces aériens et pour la coordination des opérations militaires, cette réduction d’effectifs pourrait impacter les capacités opérationnelles et technologiques de la France, notamment en matière de défense et de soutien des troupes sur le terrain.
Que pensez-vous de ces suppressions de postes et de leurs conséquences en matière de perte de souveraineté nationale, de compétence et d’expérience pour notre secteur spatial ? Estimez-vous que les efforts de l’État sont suffisants pour respecter nos objectifs stratégiques dans le domaine spatial ?
M. le général Jérôme Bellanger. Il m’est difficile de répondre à ces questions. L’objet de mon audition est le projet de loi de finances pour 2025, non les suppressions de postes chez Airbus ou Thales. Il ne m’appartient pas de commenter de telles décisions.
S’agissant des moyens alloués par l’État à l’AAE, appliquer la SSD n’empêche certes pas d’être confronté à des problèmes en matière de lancement et, de rencontrer peut-être demain de problèmes sur les satellites et les constellations. Ces problèmes sont pris en compte. Le projet de loi de finances pour 2025 nous permet de rester à un bon niveau et de développer une stratégie spatiale souveraine.
Mme Catherine Rimbert (RN). Un amendement à la LPM 2024 – 2030 dispose que, dans les années 2030, le Rafale porté au standard F5 pourrait être accompagné d’un drone issu du démonstrateur Neuron. Toutefois, au sein du projet de loi de finances pour 2025, le financement du couple Rafale/Neuron, qui est crucial pour le développement de nos capacités de combat aérien, suscite de nombreuses interrogations. L’intégration et la mise en activité du couple Rafale/drone de combat sont un enjeu stratégique pour les années à venir. Quelles sont les priorités budgétaires pour en assurer le développement ?
Par ailleurs, le budget 2025 permet-il de garantir que les objectifs de capacité opérationnelle fixés pour 2030, notamment en matière de connectivité, de furtivité et de mise en réseau des systèmes, seront atteints ?
M. le général Jérôme Bellanger. Le développement, annoncé par le ministre, d’un Rafale F5 accompagné d’un drone et emportant le missile ASN4G dispose de financements.
Il faut bien comprendre qu’il s’agit d’une véritable rupture technologique. Le Rafale F5 sera un autre avion, même s’il est développé à mi-vie. Quant au missile ASN4G, il représente une rupture comparable au passage, dans l’armement nucléaire, de la bombe à gravitation au missile de croisière. Nous passons du missile de croisière au missile hypervéloce, à la fois hypersonique et doté de capacités de manœuvrabilité, ce qui constitue une véritable rupture technologique.
S’agissant du développement du standard F5 et de l’ASN4G, nous sommes sur le trait prévu. S’agissant du drone d’accompagnement, qui est une nouveauté, il facilitera la pénétration du Rafale F5 grâce à une connectivité accrue avec le Rafale et avec d’autres entités.
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Général, la notion de puissance aérospatiale ne me semble pas aller de soi du point de vue de la clarté terminologique. Elle va contre l’institutionnalisation de la scission entre l’air et l’espace, rappelée par l’intitulé de la fonction que vous occupez. Elle va aussi contre le développement, à l’étranger, de forces spatiales sur le modèle de la Space force américaine. Pouvez-vous nous fournir des éclaircissements sur ce point ? Au demeurant, la puissance spatiale, en France, est d’abord économique. Le secteur spatial est massivement placé sous la tutelle de Bercy, investissements compris.
S’agissant des plans sociaux annoncés par Thales Alenia Space et Airbus Defence and Space, ils mettent en danger la BITD, sur laquelle vous devez compter pour engager vos capacités. La question de notre collègue Lepvraud n’était donc pas sans lien avec ces dernières. La fragilisation de cette industrie n’est pas une bonne nouvelle.
M. le général Jérôme Bellanger. La puissance aérospatiale fait débat. J’aurais dû, pour être exact, parler de puissance militaire aérospatiale. Mon objectif est de renforcer le statut de puissance militaire aérospatiale de l’AAE. Si je lie l’aérien et le spatial, c’est parce qu’ils sont séparés, de vingt à cent kilomètres d’altitude, par la très haute altitude (THA). Cette zone vierge, c’est le Far West. Elle a été mise en lumière lorsque les Américains ont abattu, avec un missile air-air tiré par un F-22, un ballon chinois qui y circulait.
Dans cette zone, il faut absolument investir. D’une part, elle est duale. Elle permettra de déployer des systèmes résilients en matière de communications, de connexion à internet et de surveillance à des fins civiles et militaires. D’autre part, la nature ayant horreur du vide, si nous n’y allons pas, d’autres iront à notre place. Il est hors de question de laisser des ballons chinois se positionner au-dessus de nos têtes et nous observer. Nous devrons donc développer des moyens de neutralisation capables d’atteindre la THA.
Nous explorons les possibilités. Des entreprises développent des prototypes, tels que l’avion solaire Zephyr d’Airbus et le Stratobus de Thales Alenia Space. Leurs travaux sont très intéressants. Nous sommes avec eux pour les aider à obtenir enfin des capacités dans la THA.
M. le président Jean-Michel Jacques. Mon général, au nom des membres de la commission, je vous remercie de vos réponses.
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La séance est levée à dix-sept heures quinze.
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Membres présents ou excusés
Présents. - M. Matthieu Bloch, M. Alexandre Dufosset, Mme Sophie Errante, M. Frank Giletti, M. Jean-Michel Jacques, M. Pascal Jenft, Mme Nadine Lechon, Mme Murielle Lepvraud, Mme Josy Poueyto, Mme Catherine Rimbert, M. Aurélien Rousseau, M. Arnaud Saint-Martin, M. Thierry Sother, M. Thierry Tesson, M. Romain Tonussi
Excusés. - M. Manuel Bompard, M. Bernard Chaix, Mme Cyrielle Chatelain, M. Thomas Gassilloud, Mme Anne Genetet, M. Damien Girard, Mme Catherine Hervieu, M. Bastien Lachaud, Mme Natalia Pouzyreff, Mme Mereana Reid Arbelot, M. Mikaele Seo, M. Boris Vallaud
Assistait également à la réunion. - Mme Corinne Vignon