Compte rendu

Commission
des affaires étrangères

 

 

– Examen, ouvert à la presse, et vote sur la proposition de résolution européenne appelant au renforcement du soutien à l’Ukraine (n° 940) (M. Laurent Mazaury, rapporteur)              2

 


Mercredi
19 février 2025

Séance de 11 heures

Compte rendu n° 38

session ordinaire 2024-2025

Présidence
de M. Bruno Fuchs,
Président


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La commission procède à l’examen, ouvert à la presse, et au vote sur la proposition de résolution européenne appelant au renforcement du soutien à l’Ukraine (n° 940).

La séance est ouverte à 10 h 50.

Présidence de M. Bruno Fuchs, président.

M. le président Bruno Fuchs. Chers collègues, le 24 février 2025 marquera le troisième anniversaire de l’offensive russe contre l’Ukraine. Les déclarations désobligeantes du président Trump, tenues cette nuit, à l’encontre des Ukrainiens et du président Zelensky, ainsi que les discussions en Arabie saoudite, qui excluent l’Ukraine et l’Europe, sont de nouveaux éléments qui doivent nous inciter à renforcer notre mobilisation pour l’Ukraine, le droit international, les libertés publiques et l’État de droit.

À l’approche de cette date, nous avons souhaité modifier l’agenda de notre commission pour permettre à notre collègue Laurent Mazaury de proposer au débat et au vote la proposition de résolution européenne n° 940, déposée le 6 février dernier et adoptée par la commission des affaires européennes la semaine dernière.

Durant ces trois années de conflit, qui ont bouleversé l’équilibre européen, dévasté des territoires et coûté d’innombrables vies, l’Ukraine a résisté avec courage et détermination à cette agression avec le soutien de l’Europe et de ses alliés.

Le président de la République a réuni à Paris, lundi dernier, une conférence avec les principaux dirigeants européens pour apporter une contribution majeure aux garanties de sécurité pour l’Ukraine. Une nouvelle conférence, élargie à d’autres pays, se tient aujourd’hui.

De son côté, Moscou ne montre aucun signe de désescalade, augmentant son budget de défense de 30 % cette année, ce qui représente un tiers des dépenses fédérales russes. Sa politique ne traduit pas de mouvement vers la paix mais une volonté d’affirmer sa position sur le terrain et d’imposer ses conditions à terme.

Dans ce contexte, notre soutien indéfectible à l’Ukraine est crucial. Il est essentiel d’affirmer que la paix ne peut être imposée et qu’aucun accord ne peut être négocié dans le dos des Ukrainiens et des Européens. Tout accord passé entre la Russie et les États-Unis n’engagera ni l’Ukraine ni l’Europe.

Cet après-midi, je recevrai une délégation du groupe d’amitié de la Verkhovna Rada, qui portera assurément le même message. Les membres du bureau de cette commission sont invités à se joindre à cette réunion.

La proposition de résolution européenne dont nous allons débattre vise à manifester notre vigilance et notre détermination face à un conflit qui n’a que trop duré mais qui ne peut cesser à n’importe quel prix. Si elle est adoptée, elle pourrait être inscrite à l’ordre du jour de notre Assemblée dès le mois de mars, envoyant ainsi un message clair : la France et ses partenaires européens demeurent engagés aux côtés du peuple ukrainien et refusent que l’avenir de ce pays soit décidé ailleurs et sans lui.

Treize amendements ont été déposés sur cette proposition. Je cède maintenant la parole à notre rapporteur, Laurent Mazaury.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je vous remercie pour votre soutien à l’Ukraine par votre présence et pour m’avoir permis de porter auprès de vous ce projet de résolution.

Le 24 février 2025 marquera le triste troisième anniversaire de l’agression brutale menée par la Russie contre l’Ukraine. Ces trois années de guerre ont engendré des souffrances indicibles pour la population ukrainienne et ont bouleversé l’équilibre européen et international.

Nous devons saluer le courage du peuple ukrainien, qui s’est montré extrêmement résilient. Alors que la Russie espérait une « opération spéciale » rapide, elle a eu en retour une guerre d’usure.

La population et l’armée ukrainiennes ont su résister, appuyées par un soutien diplomatique, économique et militaire d’ampleur des pays européens et des États-Unis. Au total, plus de 400 milliards de dollars d’aide ont été apportés à l’Ukraine. Cette aide, indispensable, lui a permis de disposer des moyens concrets pour résister et lui reste nécessaire aujourd’hui.

Cependant, concernant l’aide américaine, l’avenir est marqué par les incertitudes. Le 12 février dernier, Pete Hegseth, le nouveau secrétaire américain chargé de la défense, a déclaré que l’Europe devrait fournir l’écrasante part de l’aide apportée.

Sur le terrain, la situation reste très difficile. L’armée ukrainienne, bien qu’elle tienne le front, a déjà été très éprouvée, tout comme l’ensemble de la population. Le rapport d’information d’Éléonore Caroit et de Guillaume Garot sur l’enjeu alimentaire a démontré que la Russie a utilisé l’alimentation comme arme de guerre en Ukraine, au mépris du droit international. Aux privations alimentaires s’ajoutent des bombardements incessants d’une violence inouïe, des déplacements forcés – je rappelle que 4 millions de déplacés l’ont été en interne sur le territoire ukrainien –, le rapt et le déplacement vers le territoire russe de milliers d’enfants ukrainiens ainsi que les exactions de l’armée russe. Plus de 40 000 Ukrainiens ont perdu la vie et 300 000 ont été blessés. On estime que 30 à 50 % des Ukrainiens développeront des syndromes post-traumatiques.

À ces difficultés sur le terrain s’ajoute l’entrée en fonction récente, aux États-Unis, d’un président et d’une nouvelle administration qui engagent un dialogue bilatéral avec la Russie, par téléphone et maintenant physiquement, et qui disent rechercher une issue diplomatique rapide au conflit. Or, parler d’égal à égal avec la Russie serait déjà lui conférer la victoire.

Face à l’accélération unilatérale et tous azimuts de l’administration américaine sur le dossier ukrainien mais aussi face à un discours et une attitude hostile du vice-président J. D. Vance à Munich, les dirigeants européens se sont réunis lundi dernier à Paris, marquant l’urgence de la situation.

Il est évident que nous devons tous rester en alerte. Nous, Français et Européens, devons nous assurer que l’Ukraine se trouvera dans la position la plus favorable possible pour d’éventuelles négociations. Nous savons que la Russie cherchera à imposer ses conditions et que certains États pourraient être tentés d’accepter un compromis au détriment du droit et de la justice. C’est pourquoi nous devons renforcer, dès aujourd’hui, notre soutien à l’Ukraine, non seulement pour l’aider à tenir mais surtout pour lui permettre de négocier dans une position de force.

C’est dans cet esprit que s’inscrit la proposition de résolution européenne que nous examinons aujourd’hui. Son objectif est clair : réaffirmer notre engagement indéfectible envers l’Ukraine et faire en sorte que toute négociation repose sur les principes de souveraineté, de sécurité et de justice.

Concrètement, cette résolution appelle à un renforcement du soutien à l’Ukraine sous toutes ses formes : militaire, économique et technologique. Il s’agit d’accélérer la livraison de matériels de défense, notamment des systèmes de défense aérienne, indispensables à la protection des populations civiles, et de consolider l’aide financière et logistique pour assurer la résilience de l’économie ukrainienne et préparer sa reconstruction, voire reconstruire dès à présent.

Nous demandons également le maintien et le durcissement des sanctions contre la Russie pour empêcher toute tentative de contournement et priver Moscou des ressources nécessaires à la poursuite de son effort de guerre. L’Union européenne doit à la fois maintenir la pression et travailler en étroite coopération avec ses partenaires pour garantir l’application effective de ces sanctions.

Cette résolution exprime notre volonté de voir l’Ukraine rejoindre pleinement la famille européenne. L’Union européenne a déjà franchi une étape majeure en reconnaissant le statut de candidat à l’Ukraine. Il nous faut aller plus loin et tout mettre en œuvre pour que ce processus d’adhésion aboutisse, afin de garantir à l’Ukraine un avenir stable et sécurisé au sein de l’Europe. Il nous faudra, pour ce faire, aider le pays à surmonter ses propres démons et à s’aligner sur les règles européennes, notamment en matière de lutte contre la corruption.

De plus, nous devons renforcer notre défense et son industrie, en France et au niveau européen. Dans ce cadre, nous ne devons pas oublier le Royaume-Uni, dont les capacités militaires et nucléaires font un allié indispensable pour assurer la défense de notre continent.

Rappelons que, le 11 février 2025, le président Zelensky a lui-même affirmé que les garanties de sécurité sans l’Amérique ne sont pas de véritables garanties de sécurité. Il n’est plus acceptable que nous soyons dépendants des États-Unis ni que nos alliés n’aient pas confiance dans les capacités européennes à les protéger.

Mes chers collègues, nous devons être à la hauteur de l’Histoire. Relâcher notre soutien, c’est accepter de fragiliser l’Ukraine dans d’éventuelles négociations à venir. De même, accepter des compromis qui reviendraient à légitimer l’agression russe enverrait un signal dangereux pour l’avenir et pour tous les pays de notre continent.

La Russie ne s’arrêtera pas à l’Ukraine : elle a des velléités impérialistes en Europe centrale et orientale et se pense en guerre contre l’Occident, ce dont témoignent de nombreuses attaques hybrides. L’enjeu n’est donc pas seulement la survie de l’Ukraine mais aussi la préservation de la stabilité du continent européen dans son ensemble.

Enfin, l’enjeu est aussi le maintien de l’ordre international fondé sur des principes de souveraineté et d’intégrité territoriale.

Aujourd’hui, nous avons l’opportunité de réaffirmer notre engagement envers la liberté, la démocratie et le droit international. Je vous invite donc à voter en faveur de cette résolution pour l’Ukraine, pour l’Europe, pour la France, mais aussi pour nos valeurs.

M. le président Bruno Fuchs. Je cède maintenant la parole aux orateurs des groupes politiques.

Mme Alexandra Masson (RN). La position du Rassemblement national a toujours été d’éviter l’escalade et donc une extension du conflit en Ukraine, afin de limiter les drames de la guerre en Europe. Nous fondons également nos positions sur la défense et le respect du droit international et nous voulons éviter tout acte qui nous ferait prendre part au conflit. Nous soutenons les actions diplomatiques en faveur de la paix car, en l’absence de ces actions, la loi du plus fort s’appliquera et annihilera la souveraineté des peuples, ainsi que l’espoir de justice internationale.

Face à ce constat, la proposition de résolution européenne appelant au renforcement du soutien à l’Ukraine que nous examinons ce jour comporte plusieurs points que nous n’approuvons pas.

Nous sommes opposés à tout élargissement de l’Union européenne et donc, de facto, contre le processus d’adhésion de l’Ukraine, a fortiori si ce processus est accéléré. L’Ukraine ne remplit pas actuellement les exigences économiques, politiques et institutionnelles requises et une telle intégration mettrait en péril la cohésion de l’Union européenne. Il est inconsidéré d’envisager une adhésion d’un pays qui est en guerre, ce qui ne ferait qu’entraîner l’Union dans une spirale d’instabilité et de conflits supplémentaires.

Nous ne sommes pas opposés aux sanctions contre la Russie mais nous dénonçons celles qui sont à double tranchant pour les Européens. La volonté d’interdire toute importation de combustibles fossiles russes ignore la réalité du marché et les conséquences désastreuses pour nos industries et nos ménages.

Si nous défendons fermement le droit international et son application, nous pensons que les mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale doivent s’exécuter une fois qu’un chef d’État visé n’est plus en position d’exercer son mandat.

Il est insensé de prendre des mesures diplomatiques ou géopolitiques, comme l’extension de toutes les garanties de sécurité avec l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et l’Union européenne vis-à-vis de l’Ukraine, ce qui impliquerait directement notre pays dans un conflit.

Enfin, l’annonce d’une négociation directe entre le président américain Donald Trump et le président russe Vladimir Poutine pour la fin de la guerre en Ukraine a pris de court notre gouvernement et l’Union européenne dans son ensemble. L’émissaire américain pour l’Ukraine a même indiqué, le 15 février, que l’Europe n’aurait pas sa place à la table des négociations de paix. L’Europe n’aura pesé ni avant le début du conflit en février 2022, ni durant les trois années de conflit, ni pour l’après-guerre.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Cette prise de position témoigne de votre vision politique sur la limitation de l’augmentation du nombre d’États membres de l’Union européenne. Dans le cas de l’Ukraine, notre optique est celle d’une étude de l’adhésion, dans le respect des conditions fixées par l’Union, ce qui implique un important travail à fournir de la part de l’Ukraine dans son propre pays sur les conditions qui pourraient lui permettre d’adhérer.

Ensuite, je tiens à souligner que notre objectif n’est pas l’escalade du conflit. Nous cherchons à donner les arguments nécessaires de force pour venir dans des négociations, où il est déjà difficile de s’inscrire. Nous voyons bien la volonté des présidents russe et américain d’exclure l’Europe et l’Ukraine de la table des négociations mais nous comptons bien y parvenir. L’idée est que l’Ukraine vienne avec des arguments qui permettent une négociation. Nous sommes malheureusement entrés, avec l’arrivée de Donald Trump et le maintien de Vladimir Poutine, dans une ère où seuls les forts peuvent s’exprimer dans une négociation.

Concernant les sanctions économiques et notre objectif de réduire le prix de certaines matières premières, notamment le gaz et le pétrole russes, pour affaiblir la capacité de guerre de la Russie, l’Ukraine elle-même considère qu’il est crucial d’exercer une pression sur les importations de gaz et de pétrole, tout en diminuant leurs tarifs, afin de réduire l’intérêt financier pour la Russie et, par conséquent, sa capacité de production d’armements. Nous ne proposons pas d’interdiction totale mais nous encourageons les États membres à ne pas contourner les sanctions et les différents points de blocage que nous avons pu mettre en place pour les approvisionnements. En France, nous avons réorienté nos approvisionnements et l’impact est presque nul sur les ménages. La problématique que vous soulevez est donc presque plus justifiée pour nos amis allemands, qui restent plus dépendants du gaz et du pétrole russes.

Enfin, il s’agit bien de garanties européennes et non de celles liées à une éventuelle adhésion de l’Ukraine à l’OTAN mais, même dans ce cadre, il faut noter que les conditions de sécurité ont été violées à de nombreuses reprises par la Russie.

M. Michel Castellani (LIOT). Notre groupe soutient cette proposition de résolution qui appelle au renforcement du soutien à l’Ukraine, à la veille du triste anniversaire de l’invasion de celle-ci par la Russie. Cette invasion a ramené l’Ukraine aux périodes les plus sombres de son histoire, alors que ce pays a tant souffert durant la période soviétique, avec la russification forcée et la répression de tout mouvement indépendantiste. Ce pays, indépendant depuis 1991, adhère aux valeurs démocratiques et humanistes.

Nous considérons que de nombreuses erreurs ont été commises et que le monde occidental n’a pas été à la hauteur lors de la guerre russo-géorgienne de 2008, de l’annexion de la Crimée en 2014 et du non-respect répété des accords de Minsk. Cependant, en 2022, l’Europe a pris toute sa part dans ce conflit en apportant un soutien militaire renforcé à l’Ukraine. Depuis trois ans, la résistance extraordinaire du peuple ukrainien a transformé cette opération militaire spéciale censée durer trois jours en une véritable guerre d’usure.

L’entrée en scène de Donald Trump dans le jeu politique rebat les cartes. Moscou et Washington effectuent un rapprochement. Nous vivons donc un moment d’urgence où l’Europe et ses alliés doivent former un front uni et solidaire et renforcer leur aide matérielle et financière à l’Ukraine, tout en permettant à ce pays d’accélérer son intégration européenne.

Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires s’associe donc pleinement à cette proposition de résolution ambitieuse et nécessaire. Nous pensons évidemment que les souffrances du peuple ukrainien doivent cesser.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je remercie mon collègue Michel Castellani pour son soutien et sa compréhension du projet.

M. Pieyre-Alexandre Anglade (EPR). Je tiens à vous remercier, au nom du groupe Ensemble pour la République, pour cette résolution qui arrive à point nommé. Au regard du contexte international qui évolue chaque jour, il est important que notre Assemblée prenne des positions claires sur la situation en Ukraine, qui concerne non seulement l’avenir de ce pays mais aussi la sécurité de toute l’Europe. Face aux velléités impérialistes de la Russie de Vladimir Poutine, nous devons réaffirmer sans équivoque que nous serons aux côtés de la résistance ukrainienne aussi longtemps que nécessaire.

Nous vivons l’un des moments les plus graves depuis 1945. Notre allié américain fait le choix de facturer le pilier transatlantique, élément essentiel de la sécurité et de la paix en Europe depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Cela s’est manifesté clairement à Munich et de manière encore plus brutale cette nuit avec les propos du président Trump, qui, dans un réquisitoire insensé, s’en est pris à l’Ukraine et à la légitimité du président Zelensky, reprenant presque mot pour mot la rhétorique de Vladimir Poutine en faisant de l’Ukraine l’agresseur.

Il faut rappeler sans ambiguïté que l’agresseur est la Russie de Vladimir Poutine, que l’Ukraine est l’agressée et que, depuis trois ans, Poutine mène une guerre totale, brutale et massive, dont les premières victimes sont les civils ukrainiens et les infrastructures civiles du pays. Ces actes constituent des crimes de guerre et Vladimir Poutine se comporte comme un criminel de guerre. Il faut le dire sans ambages pour contrer tout discours visant à inverser les valeurs et les responsabilités dans cette guerre. Rappelons que l’Ukraine n’est pas agressée pour ce qu’elle fait – car elle ne menace et n’agresse personne – mais pour ce qu’elle est, à savoir un pays libre, démocratique, qui a choisi de se tourner vers l’Europe. C’est la raison pour laquelle Vladimir Poutine l’agresse depuis trois ans, menaçant par là même la sécurité de toute l’Europe.

Face à ce défi quasi existentiel, nous devons agir de manière résolue. Il est impératif que les Européens se réveillent et que nous renforcions la défense et la sécurité de l’Europe.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. J’ajouterai un élément important : il convient de s’interroger sur la neutralité du président Trump dans son soutien à la Russie. Lui et ses proxys, qui sont parfois accompagnés de leurs enfants pour les apparences devant les caméras, sont-ils vraiment neutres ? N’ont-ils pas des intérêts personnels à tenir ce genre de propos ? Nous constatons aujourd’hui que le monde est dépendant de ce genre de personnes, qui ont pourtant été élues démocratiquement. Quand on vient nous donner des leçons, qui plus est de démocratie, je tiens à souligner que tout ceci serait impossible dans un pays tel que la France. Cela en dit long sur ceux qui nous donnent des leçons.

Je partage pleinement vos propos et vous remercie de votre soutien, monsieur Anglade.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Depuis trois ans, l’Europe s’est enfoncée dans l’engrenage de la guerre, avec des centaines de milliers de morts, une situation militaire enlisée et une escalade dangereuse pour notre sécurité face à une puissance nucléaire. Aujourd’hui, nous assistons à une humiliation pour l’Union européenne et la France, avec Trump et Poutine qui négocient seuls, excluant l’Europe. Ces négociations présentent un lourd danger pour l’Ukraine, qui se trouve en position de faiblesse. Poutine peut désormais compter sur un interlocuteur prêt à conclure un accord qui ne serait pas juste pour l’Ukraine.

Malheureusement, pendant trois ans, l’Union européenne n’a rien fait pour entamer des négociations sur d’autres bases quand il était encore temps, s’arc-boutant sur l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN, qui représente un casus belli pour Moscou et a été refusée par Washington dès le mandat de Joe Biden. En affirmant que la Russie était au bord de l’effondrement économique et militaire, l’Union européenne s’est enfermée dans le déni des réalités, permettant à Poutine de gagner du temps pour négocier en position de force. L’annonce d’un seizième train de sanctions, alors que les quinze premiers n’ont pas dissuadé la Russie de poursuivre la guerre, résonne comme une balle à blanc.

Monsieur le rapporteur, il ne s’agit pas de refuser votre proposition de résolution dans son esprit mais de refuser la stratégie qu’elle porte. La raison est qu’elle nous enferme dans une logique du « toujours plus » : plus d’armes, plus de production et de soutien militaire – y compris américain – et plus d’intégration de l’Ukraine dans des structures qui ne feront qu’exacerber les tensions.

Depuis trois ans, La France insoumise, par la voix de Jean-Luc Mélenchon, demande la convocation d’une session extraordinaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Nous avons également appelé à la convocation d’une conférence de paix sous l’égide de l’Organisation des Nations unies (ONU).

Monsieur le rapporteur, cette proposition de résolution ne fait aucune place aux garanties mutuelles, qui sont pourtant des conditions sine qua non d’un accord durable.

Les réfugiés politiques russes opposés au régime poutinien nous le disent : la seule issue politique est d’abandonner les objectifs s’inscrivant dans une logique impérialiste, comme l’élargissement de l’OTAN ou de l’Union européenne, au profit d’objectifs démocratiques. C’est pourquoi nous appelons à un changement de stratégie et ne soutiendrons pas cette résolution. La France doit devenir une actrice de la paix en retrouvant une diplomatie indépendante, ce qui passe par la voie du multilatéralisme. Nous demandons la convocation d’une conférence de paix sous l’égide de l’ONU.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Nous avons effectivement subi une humiliation, de même que l’Ukraine. Néanmoins, je pense que c’est précisément parce que nous avons été trop faibles que nous avons été humiliés. Si nous avions été plus forts, nous ne l’aurions probablement pas été.

Je tiens à rappeler que le président Emmanuel Macron a été le dernier – et l’un des seuls – à essayer de maintenir le dialogue avec Vladimir Poutine. Il a été fortement critiqué pour cela par une grande partie de la communauté internationale qui ne comprenait pas qu’il continuait à parler pour éviter l’agression de la Russie contre l’Ukraine.

C’est parce que nous avons été trop faibles que nous devons aujourd’hui être beaucoup plus forts pour négocier. C’est tout l’enjeu. Je comprends qu’on puisse avoir une différence d’opinions sur ce point. Cependant, on ne négocie pas avec ces gens – cela vaut pour le président américain comme pour le président russe – en position de faiblesse.

Toute proportion gardée, c’est un peu l’esprit de Munich, quand on s’est dit que, après tout, on pouvait peut-être négocier avec Hitler. Si l’on avait agi plus tôt, on n’aurait probablement pas connu les mêmes événements de la seconde guerre mondiale. Nous n’en sommes pas là mais je pense que ce risque existe.

Je fais partie de ceux qui considèrent que la France, en raison de son histoire, est naturellement amenée à être partenaire des Russes, tout comme elle l’est des Américains, mais dans une position de non-alignement, conformément à la vision du général de Gaulle.

Mon idée est donc que nous donnions un maximum de moyens pour être en position de mettre fin à ce conflit car des vies sont en jeu. Bien que nous poursuivions ce même objectif, nos approches diffèrent. Je ne crois pas qu’une Ukraine neutre soit la bonne vision. En outre, l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN ne me semble pas être la solution. Je préconise plutôt une Ukraine qui commerce au sein de l’Europe, avec des règles européennes qui pourraient être révisées. Nous partageons tous l’idée que des problématiques sont à résoudre dans le fonctionnement de l’Union européenne. Je ne parle pas de l’Europe d’hier mais de celle de demain, qu’il faut refonder. Dans ce contexte, l’Ukraine a toute sa place, probablement de manière plus efficace qu’elle ne pourrait l’avoir au sein de l’OTAN. Il faut, en tout cas, partir au début sur les deux prétentions.

M. Stéphane Hablot (SOC). Nous sommes dans un contexte particulier où, malgré les difficultés et les corrections à apporter, nous devons rester unis derrière une France et une Europe solides.

Le 24 février marque le triste anniversaire de trois ans d’agression russe contre l’Ukraine, de combats, de souffrances, de résistance héroïque et d’un conflit dont le bilan humain est dramatique.

L’Ukraine est aujourd’hui un rempart essentiel face à l’impérialisme russe. Son combat est le nôtre, à savoir celui de la sécurité de l’Europe et du respect du droit international. Nous devons aller plus loin.

La perspective de discussions entre les Américains et les Russes, sans impliquer Kyiv ni les Européens, est profondément inquiétante. Il ne peut y avoir de décision sur l’Ukraine sans l’Ukraine ni de paix durable sans l’Europe.

Face à cela, l’Union européenne doit réagir avec force. Nous devons accélérer l’aide militaire, notamment en matière de défense aérienne, et accompagner l’Ukraine vers une adhésion rapide à l’Union européenne. Le groupe Socialistes et apparentés est donc favorable à ce projet de résolution.

Nous devons également renforcer les sanctions contre la Russie et lutter contre leur contournement car chaque manquement profite directement à l’effort de guerre de Moscou.

Ce conflit dépasse le cadre militaire et oppose deux visions du monde. Face aux régimes autoritaires qui soutiennent la Russie, comme la Corée du Nord, l’Iran et la Chine, l’Europe doit faire preuve de fermeté et d’unité.

Donald Trump s’attaque, pour des intérêts qui peuvent nous dépasser, à ceux qu’il considère comme les plus faibles. L’Europe ne doit pas être faible face à ce personnage et à sa conception de la politique. La loi du plus fort n’est pas notre philosophie. Au contraire, nous devons être forts pour défendre les autres, pas pour les écraser. C’est pourquoi l’Europe doit s’unir, être très forte et ouvrir ses portes à l’Ukraine.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je vous remercie pour votre soutien à l’Ukraine, et donc à l’Europe et à la France.

J’ajouterai que l’intérêt de la Russie est précisément de fracturer les États européens entre eux mais aussi les membres de notre Assemblée nationale. C’est pourquoi nous devons faire front commun. Les détails seront discutés lors des négociations mais l’unité est primordiale. C’est exactement l’inverse de ce qu’attend la Russie, qui espère nous voir désunis.

M. Nicolas Forissier (DR). Le groupe Droite républicaine votera évidemment cette proposition de résolution européenne.

Je rejoins les propos de Stéphane Hablot et Pieyre-Alexandre Anglade : c’est effectivement le bon moment. La France et l’Union européenne ne doivent pas céder face aux intimidations, y compris face aux déclarations de plus en plus incohérentes de M. Trump, qui lance des boules dans le jeu pour observer les réactions. Je ne suis pas certain qu’on peut prévoir ou analyser sa stratégie. Derrière tout cela, il y a peut-être d’autres jeux de billard à trois ou cinq bandes de sa part. Restons prudents mais c’est le moment pour le Parlement de réaffirmer la volonté de la France sur deux points essentiels.

Premièrement, nous devons réaffirmer le soutien à l’Ukraine dans le contexte d’une agression inacceptable au regard du droit international, de l’histoire de l’Union européenne et de l’intégrité de la nation ukrainienne, qui s’est affirmée de manière exemplaire dans ce conflit. C’est aussi pour cet exemple que nous devons être exemplaires dans notre soutien.

Deuxièmement, nous devons réaffirmer nos valeurs face à une déconstruction générale de l’ordre international, des relations multilatérales et du respect de l’intégrité des nations. Notre soutien – même s’il s’agit d’une expression et non d’une action – est une étape essentielle.

C’est donc effectivement le bon moment. J’ai entendu le terme « humiliation » mais je préfère parler de défi pour la France et l’Union européenne plutôt que d’humiliation, ce qui implique une approche négative. Alors que M. Trump lance ses boules dans tous les jeux de quilles de la planète, relevons le défi. Cette proposition de résolution européenne peut y contribuer symboliquement, c’est pourquoi nous soutiendrons ce texte.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Merci pour votre soutien. Il est crucial de comprendre que nous ne sommes pas face à des chefs d’État traditionnels. Tout le monde connaît l’histoire de Vladimir Poutine. Donald Trump, quant à lui, est un homme d’affaires. Ce matin, j’ai été stupéfait de lire que « les États-Unis réclament 500 milliards de dollars de dédommagement pour l’aide de 175 milliards versés depuis 2022 à l’Ukraine, payables en droits exclusifs à la perpétuité sur les ressources minérales et les infrastructures du pays ». C’est ahurissant !

Si des vies ont été perdues de part et d’autre pour lire ce genre de propositions, on comprend tout le rôle que la France et l’Europe ont à jouer en matière de valeurs et de soutien à des alliés. Comment imaginer, alors qu’un pays est victime d’une agression, que cela se termine autour d’une table avec une négociation « business » ? Si nous ne pouvons pas être unis sur ce point, sur quoi pourrions-nous l’être ?

Je me pince mais c’est une réalité. Vous avez donc entièrement raison.

Mme Dominique Voynet (EcoS). Nous sommes nombreux, ici, à faire partie de ces idiots qui ne savent pas que c’est Volodymyr Zelensky qui a lâchement agressé la noble Fédération de Russie et son pacifique président. Heureusement que Donald Trump va nous aider à prendre conscience de nos errements et à regarder la réalité en face...

Il n’y a bien sûr rien de drôle dans l’affirmation sans complexes de vérités alternatives désastreuses pour la démocratie.

L’humiliation pour l’Europe et la France, qui a reçu Trump à l’occasion de la réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris au prétexte d’abriter des discussions directes sur la guerre en Ukraine, est totale.

Il faut rappeler que c’est Poutine – et non Zelensky – qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale. La Russie est l’unique agresseur et responsable de cette guerre. Aurions-nous déjà oublié les massacres de Boutcha et Borodyanka, qui pourraient constituer des crimes contre l’humanité, la mort de 13 000 êtres humains – dont 3 000 civils –, la déportation de 19 000 enfants d’Ukraine en Russie, l’utilisation de la torture, l’annexion illégale de parties du territoire souverain de l’Ukraine au mépris du droit international, les menaces nucléaires et l’attaque de centrales nucléaires sensibles ?

L’Europe a réagi en apportant un soutien sans précédent à l’Ukraine, atteignant 43,5 milliards d’euros au total. Toutefois, la nouvelle posture américaine expose douloureusement nos doutes et nos faiblesses, au-delà des discours qui sont toujours impeccables. Face au mépris du droit et à l’indifférence, voire à l’hostilité américaine, il nous faut réagir ou disparaître dans les poubelles de l’histoire.

Deux chantiers essentiels sont devant nous.

L’Ukraine doit absolument recevoir les garanties de sécurité nécessaires d’une souveraineté territoriale dans le futur et nous devons l’accompagner en ce sens. La France doit s’engager fermement dans un soutien militaire et logistique, de même que l’Europe doit augmenter son aide. Il faut également garantir à l’Ukraine une adhésion future à l’Union européenne et à l’OTAN, seules conditions de sa sécurité à long terme.

Alors que M. Macron décide de recevoir à l’Élysée une partie des dirigeants européens, c’est bien une réponse commune que nous devons apporter. Une dissuasion européenne doit être bâtie autour de tous les membres de l’Union et du Royaume-Uni. L’Union ne fera partie des négociations que si elle reste unie. Il faut aussi travailler à une désescalade nucléaire incluant des mesures de contrôle des armements et de prévention et convenir que les avoirs russes gelés doivent, dans leur entièreté, être consacrés à l’effort de guerre ukrainien.

En outre, nous devons surtout balayer devant notre porte car la France est devenue le premier importateur européen de gaz naturel liquéfié russe en 2025 et continue d’importer de l’uranium de retraitement russe, ce qui relativise les affirmations ronflantes de notre rapporteur. La réalité crue est que les sanctions ne touchent pas le secteur du nucléaire. Or, notre dépendance est manifeste dans ce domaine.

Comment penser l’après quand nous continuons, de fait, à financer l’agression russe ?

M. Laurent Mazaury, rapporteur. L’objectif de cette proposition de résolution est justement de renforcer notre vigilance et d’aller chasser partout les tendances naturelles à choisir des cheminements d’approvisionnement par facilité ou en raison de leurs bas tarifs, y compris au sein de nos propres instances. C’est notre rôle, en tant qu’Assemblée nationale, de surveiller ces pratiques. Concernant les filières d’approvisionnement en uranium, notamment enrichi, il existe d’autres solutions que nous savons développer et mettre en place. Si ces éléments étaient avérés, je suis certain qu’ils seraient très certainement corrigés.

Une des pratiques utilisées par la Russie, mais aussi par les États-Unis, particulièrement depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump et de ses amis qui contrôlent les réseaux sociaux, est la diffusion de fake news. Francis Bacon disait : « calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose ». Or, l’idée derrière la fake news est que répéter un mensonge le plus souvent possible et sur tous les supports en fera une vérité, ce qui n’est évidemment pas le cas.

Par ailleurs, M. Trump était présent à Notre-Dame en tant que représentant des États-Unis et non à titre personnel.

À une phrase près, je suis entièrement d’accord avec votre intervention et je vous remercie du soutien que vous apporterez à notre proposition.

M. Pierre Pribetich (SOC). Quelle sens de la synthèse !

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Si ce n’est à 100 %, c’est à 90 % que je vous rejoins.

Mme Maud Petit (Dem). Lundi prochain marquera le troisième anniversaire de la résistance de l’Ukraine face à une guerre d’agression qui ne cesse de ravager son territoire, d’endeuiller ses familles et de défier les principes mêmes du droit international. Cette guerre est le prolongement d’une politique d’expansion brutale engagée par la Russie dès 2014 avec l’annexion illégale de la Crimée et la déstabilisation du Donbass. C’est un affrontement qui se joue en mer, sur terre et dans le champ informationnel à travers une guerre hybride où les cyberattaques, la désinformation et les pressions énergétiques sont devenues des armes à part entière.

Depuis le premier jour, la France et l’Union européenne ont fait le choix d’un soutien inébranlable à l’Ukraine. Plus de 143 milliards d’euros ont été mobilisés sous forme d’aides militaires, financières et humanitaires. Des sanctions d’une ampleur inédite ont été imposées à la Russie et à ses soutiens.

Aujourd’hui, nous sommes à un tournant. Alors que l’Ukraine a plus que jamais besoin de notre engagement, l’élection de Donald Trump et la perspective d’un possible retrait américain, avec un deal injuste et court-termiste, font planer une ombre sur le soutien occidental. Pouvons-nous – nous, Européens – accepter que le sort de l’Ukraine soit décidé dans une négociation à huis clos entre Washington et Moscou, sans l’Ukraine – voire contre elle – et sans nous ?

Cette proposition de résolution européenne est un appel clair et ferme : l’Europe doit se donner les moyens d’être une actrice centrale de la sécurité sur son continent.

Nous devons renforcer notre soutien sur tous les fronts : militairement, en accélérant la formation des soldats ukrainiens; économiquement, en utilisant les actifs russes gelés pour la reconstruction ; diplomatiquement, en imposant la présence de l’Europe aux négociations ; stratégiquement, en consolidant les garanties de sécurité à l’Ukraine, au-delà de l’OTAN, pour prévenir toute agression sur notre continent.

Notre collègue Frédéric Petit, qui suit de très près la situation sur place, a rappelé que cette situation concerne non seulement le destin de l’Ukraine mais aussi la sécurité de toute l’Europe.

Lors du récent sommet à Paris, les chefs d’État ont posé de premières pierres mais des décisions fortes pour une Europe unie sont nécessaires. Nous voterons donc cette résolution avec détermination et lucidité. L’histoire retiendra si nous avons été à la hauteur de nos valeurs et de nos principes. Slava Ukraini !

M. le président Bruno Fuchs. Je précise que notre collègue Frédéric Petit représente actuellement la commission des affaires étrangères à l’occasion d’un déplacement en Ukraine, organisé avec de nombreux présidents et des délégations d’autres commissions des affaires étrangères européennes. Ils sont en ce moment même en route vers Kyiv.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Merci pour votre soutien à l’Ukraine, et donc à l’Europe et à la France.

Pour vous rassurer, nous avons, à l’occasion de la réunion de la commission des affaires européennes, adoptées un certain nombre d’amendements. Entre autres, nous avons repris un amendement relatif à la formation des personnels sur le sol ukrainien, de même que celui sur l’utilisation des actifs russes.

Enfin, il est important de souligner que seule l’Ukraine peut décider d’un cessez-le-feu. Sans accord entre les deux belligérants, personne ne pourra contraindre l’Ukraine à cesser ses opérations de défense. C’est pourquoi je ne vois pas comment on pourrait envisager des négociations sans la présence de l’Ukraine, de l’Europe et de la France à la table des discussions.

Mme Lætitia Saint-Paul (HOR). En soutenant cette proposition de résolution, nous réaffirmons notre attachement aux principes fondamentaux du droit international et à la défense de la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes.

L’invasion russe ne menace pas seulement l’Ukraine mais remet aussi en cause la stabilité et la sécurité de l’ensemble du continent européen. Face à cette menace, nous devons rester unis et fermes dans notre engagement en renforçant les capacités de défense de l’Ukraine et en accroissant notre autonomie stratégique.

La Russie s’est rendue coupable de crimes de guerre et de violations massives des droits humains, notamment par des attaques ciblées contre les civils et les infrastructures essentielles. Nous soutenons pleinement les initiatives visant à garantir que justice soit rendue et que les responsables de ces crimes répondent de leurs actes.

La Russie poursuit ses bombardements sur l’Ukraine et ne montre aucun signe de volonté de paix. Certains, à l’image de l’administration Trump, voudraient lui faire des concessions importantes. Nous pensons au contraire qu’il faut faire preuve de fermeté.

Nous devons d’abord tarir les ressources financières permettant à la Russie de poursuivre son effort de guerre. Nous appelons à un durcissement des sanctions et à une vigilance accrue contre leur contournement en renforçant les contrôles sur les flux commerciaux et financiers.

Ensuite, nous devons réaffirmer qu’aucun accord ne peut être signé sans la participation de l’Ukraine et de ses partenaires européens. Nous ne pourrions pas non plus accepter une issue qui ne donnerait pas suffisamment de garanties de sécurité à l’Ukraine.

C’est avec cette même fermeté que le groupe Horizons et indépendants votera en faveur de cette proposition de résolution européenne, convaincu de la nécessité impérieuse d’un soutien renforcé à l’Ukraine face à l’agression russe.

Pourquoi n’augmentons-nous pas la pression sur les rares accès à la mer restant à la Russie ?

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je vous remercie d’abord pour votre soutien à l’Ukraine.

Bien que je ne sois pas un expert en matière maritime, je note que votre question mérite d’être posée. Je ne sais pas s’il s’agit d’une problématique de stratégie ou de moyens. J’ai eu l’occasion de rédiger un avis budgétaire portant sur l’action de la marine en mer Rouge et d’avoir un contact très étroit avec une partie de l’état-major. C’est un point qu’il faudra vérifier. En effet, la question se pose mais il y a également la question des alliances pour franchir les différents détroits nécessaires. Je suis convaincu que, si nous en avons la capacité, nous – ou nos partenaires européens – devrons le faire.

M. Vincent Trébuchet (UDR). Hier, en Arabie saoudite, s’est joué l’avenir du plus grand conflit que l’Europe ait connu depuis 1945. Pourtant, alors que les Européens sont engagés depuis trois ans dans ce conflit, nous avons été exclus de ces négociations. Cette marginalisation est un signal alarmant : une bascule géostratégique s’opère à nos dépens, faisant de nos nations des nains géopolitiques. Il est impératif que l’Europe retrouve sa place au cœur des discussions de paix.

Monsieur le rapporteur, nous partageons votre attachement au soutien de l’Ukraine mais nous ne pouvons souscrire à l’ensemble de vos conclusions.

L’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne, que vous appelez de vos vœux, est pour nous une ligne rouge. Elle le serait d’autant plus pour nos concitoyens, notamment nos agriculteurs, qui en paieraient le prix fort. Une telle adhésion représenterait un coût net de 19 milliards d’euros par an pour le budget européen, un fardeau qui reposerait en grande partie sur les épaules des contribuables français. Sur le plan agricole, les conséquences seraient considérables. Si l’Ukraine récupérait l’ensemble de son territoire, elle représenterait à elle seule un cinquième des terres agricoles de l’Union et deviendrait la première bénéficiaire de la politique agricole commune (PAC), devant la France, avec plus de 10 milliards d’euros annuels.

M. Nicolas Forissier (DR). Cela ne veut rien dire...

M. Vincent Trébuchet (UDR). Une seconde ligne rouge est franchie avec l’alinéa 67 de cette proposition de résolution, qui préconise une extension immédiate des garanties de sécurité occidentales à l’Ukraine. Une telle décision nous engagerait par capillarité dans ce conflit et risquerait d’entraîner une escalade tout en augmentant encore la pression sur nos budgets de défense. Aujourd’hui, face aux 2 300 kilomètres de frontières entre l’Ukraine et la Russie et aux 600 000 à 700 000 soldats russes déployés, un engagement militaire européen crédible nécessiterait au moins 150 000 soldats. Est-ce ce que nous souhaitons ?

À l’inverse, les perspectives d’une résolution politique, seule garantie d’une paix durable, nous semblent devoir être davantage encouragées. C’est cela qu’encourage le groupe Union des Droites pour la République, et non une extension ruineuse d’un conflit qui a causé près de 300 000 morts et qui pèse déjà très lourdement sur nos finances depuis 2022.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je tiens à réaffirmer que, concernant l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne, notre proposition vise à nous inscrire dans un processus dans le respect de nos règles et dans l’établissement d’un certain nombre d’éléments, qui ne sont pas du tout stabilisés actuellement. Il s’agit donc bien d’une déclaration d’intention qui doit nous amener vers les conditions d’adhésion, certainement pas au détriment des agriculteurs français ou au déséquilibre des règles de la PAC. Cela nécessite davantage d’Europe mais aussi que cette dernière soit une Europe des États, plutôt qu’une Europe fédérale. Nous avons tous un travail à accomplir concernant le fonctionnement européen mais je ne peux pas l’intégrer dans la proposition de résolution européenne, comme vous le comprendrez.

Un élément essentiel dans cette situation, habituellement réservé au discours nucléaire mais dont je souhaite qu’il soit compris pour les forces conventionnelles, est celui de la dissuasion. L’objectif principal du dispositif est de dissuader une éventuelle future agression de la Russie. Peut-être que, dans vingt ans, cette question ne se posera plus. Je souhaite qu’il y ait un réveil des forces démocratiques en Russie ou, du moins, une autre forme de gestion du pays, pour que le peuple décide à nouveau. L’idée est de renforcer les défenses de l’Europe pour créer un mur mais surtout pour dissuader. Le terme « escalade » n’est pas adapté car notre idée est d’éviter la guerre en la préparant. L’objectif est de ne pas utiliser nos armes mais de dissuader ceux qui, en face, pensent qu’ils pourraient faire de l’Europe un territoire neutre.

Si nous n’avons pas connu de guerre depuis la fin de la seconde guerre mondiale, c’est grâce à la création de l’Europe et au parapluie américain. Face au retrait de ce dernier, nous devons trouver une solution. Nous pouvons construire une Europe plus forte, plus démocratique, qui serait davantage une Europe des pays. Nous pouvons également construire une Europe de la défense, pour dire : « Vous ne pouvez pas nous attaquer. Au contraire, commerçons ensemble. ». Cette vision n’est pas incluse dans cette proposition de résolution, elle est à bâtir. Ce sera un processus long et difficile, nécessitant de persuader les autres mais nous ne pouvons pas y renoncer. Seuls, nous n’y arriverons pas. Les conditions de collaboration industrielle et politique restent à construire et probablement à corriger par rapport à la situation actuelle. Je pense que nous pouvons nous accorder sur ces points.

Je ne peux pas anticiper un mauvais fonctionnement futur pour refuser de donner à l’Ukraine les moyens de mettre fin à ce conflit dans le respect du droit international et de nos valeurs.

Mme Christine Engrand (NI). Depuis deux ans, la guerre en Ukraine s’enlise, avec un bilan humain dramatique et une escalade militaire inquiétante. Plus de 31 000 soldats ukrainiens sont tombés. Des centaines de milliers de combattants russes ont été tués ou blessés. Des milliers de civils sont morts sous les bombardements.

Malgré cela, aucune issue diplomatique stable ne se profile et l’Europe continue d’envoyer des milliards d’euros sans réel débat sur l’efficacité et les conséquences de cette stratégie. Sur la scène diplomatique, la France et l’Europe semblent marginalisées, tandis que Washington et Moscou discutent à Riyad. Nous découvrons les avancées diplomatiques dans les journaux. L’Europe se prétend unie mais elle n’a ni autonomie stratégique ni capacité à peser sur les décisions.

Nous devons cesser cette fuite en avant. Nous devons bien sûr soutenir l’Ukraine mais, dans votre résolution tardive, nous nous exposons à une escalade qui risque aujourd’hui d’être sous-estimée et pourrait mener à un conflit généralisé. Dans cette résolution, avons-nous les moyens de lutter efficacement et rapidement pour mettre fin à ce conflit ?

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Nous risquons de tourner en rond sur l’idée que ce n’est pas parce que nous ne l’avons pas fait jusqu’à présent qu’il ne faut pas le faire maintenant. Je rappelle que la France, à travers son président de la République, a fait partie de ceux qui ont tenté jusqu’au dernier moment de maintenir les canaux de communication pour dissuader le président Poutine de poursuivre cette guerre d’invasion contre l’Ukraine. C’est aussi une raison qui explique pourquoi le reste a mis plus de temps à se bâtir.

Disposer de sanctions ou d’éléments de dissuasion efficaces est difficile à vingt-sept pays. Cela l’est encore plus à vingt-huit pays en comptant les États-Unis, dont nous savons qu’ils sont, d’un point de vue démocratique, dans une forme d’instabilité permanente, avec un président élu pour quatre ans et des midterms tous les deux ans. Il est plus facile de dialoguer avec la France dans une situation de quinquennat.

En effet, nous avons probablement été lents à l’allumage mais ce n’est pas parce que nous avons pris du temps qu’il ne faut pas frapper un grand coup pour aller à la table des négociations pour porter les conditions ukrainiennes. Je ne dis pas que nous allons faire la guerre à la Russie. Je dis qu’il faut dissuader la Russie de continuer, voire un jour de nous faire la guerre. Quand je dis « nous », je pense d’abord aux États baltes, à la Roumanie, à la Pologne et aux pays de la zone des Balkans où des déstabilisations sont possibles. C’est pourquoi, lorsque nous commerçons, même en matière d’armement, avec par exemple la Serbie, je considère cela comme un élément positif, comme l’a dit le ministre des armées hier. En effet, quand on commerce avec quelqu’un, même en matière d’armement, il est plus difficile ensuite que celui-ci vous agresse.

Notre défi est de nous donner les moyens et de considérer que la stratégie du renforcement des moyens de défense est consubstantielle à l’existence même et au maintien de notre République. Je n’ai jamais connu la guerre et je ne veux pas que mes enfants la connaissent. Pour cela, je veux tout faire pour l’éviter mais je ne veux pas agir avec l’esprit de Munich, car on sait que cela ne fonctionne pas face à des loups prêts à sacrifier leur propre population.

*

Article unique

M. le président Bruno Fuchs. Nous allons à présent examiner le texte de la proposition de résolution européenne et discuter des treize amendements qui ont été déposés.

Amendement n° AE7 de M. Laurent Mazaury

M. Laurent Mazaury, rapporteur. La situation dont nous traitons évolue. J’imagine que, jusqu’au jour où – si vous votez en faveur de l’adoption de cette proposition de résolution – nous viendrons la présenter dans l’hémicycle, d’autres évolutions auront lieu, que j’intégrerai certainement au discours qui accompagnera cette présentation. J’ai souhaité intégrer l’entretien téléphonique bilatéral du 12 février 2025 entre le président américain et le président russe dans les différents éléments des considérants. Cet ajout me semblait très important, étant donné l’évolution de la situation depuis la dernière présentation en commission des affaires européennes.

M. Arnaud Le Gall (LFI-NFP). Nous ne pouvons que soutenir cet amendement, qui prend acte de la nécessité de s’adapter à la nouvelle donne stratégique, introduite avec la brutalité à laquelle on pouvait s’attendre.

Je tiens à souligner que nous sommes tous d’accord sur la nécessité de tout remettre à plat et de prendre acte de cette nouvelle donne mais nous ne pouvons pas dire que nous n’avons pas été prévenus. Nous savions depuis longtemps que Trump n’a pas l’intention de continuer à soutenir l’Ukraine. Or, ces trois dernières années, quiconque suggérait que la France devait se positionner comme puissance de médiation, afin de tenter d’ouvrir des processus de négociation avant qu’il ne soit trop tard et que Poutine puisse négocier en position de force, se faisait traiter de « poutinien ».

Nous sommes maintenant comme des lapins pris dans les phares d’une voiture. Lors du sommet de l’Élysée, certains interlocuteurs importants n’ont pas été invités et personne n’est d’accord sur la marche à suivre. Cela se termine par un seizième train de sanctions, comme si les quinze premiers avaient été d’une grande efficacité. J’entends encore de M. Le Maire affirmant, en 2022, que la Russie, son économie et son armée allaient s’effondrer. On est dans la méthode Coué. Je n’ai pas de solution toute faite mais réalisons qu’il faut changer de route.

L’amendement n° AE7 est adopté.

Amendement n° AE10 de M. Laurent Mazaury

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Nous suivons ici la même logique de mise à jour des considérants et intégrons, après l’alinéa 35, un alinéa qui intègre les paroles de Kaja Kallas, le 13 février 2025, précisant que rien ne pourra fonctionner sans l’Ukraine et l’Union européenne.

L’amendement n° AE10 est adopté.

Amendement n° AE2 de Mme Sophia Chikirou

Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 53, qui appelle à l’adhésion accélérée de l’Ukraine à l’Union européenne. Soyons clairs, nous ne cherchons pas à fermer la porte à une future adhésion de l’Ukraine mais simplement à rappeler que celle-ci doit suivre les procédures habituelles et répondre aux critères stricts d’adhésion de l’Union européenne.

Le groupe La France insoumise n’est pas favorable à un élargissement de l’Union européenne tant que nous n’avons pas les capacités d’effectuer une harmonisation fiscale et sociale. Nous savons qu’une adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne mettrait davantage en danger notre agriculture et nos agriculteurs en France.

Je souhaite également réagir à vos réponses, monsieur le rapporteur. Certes, Poutine est un danger et la Russie menace la stabilité et la sécurité en Europe mais c’est surtout Trump qui vient bouleverser le jeu et oblige l’Union européenne à changer de braquet. Vous proposez de poursuivre la même stratégie malgré l’irruption de l’éléphant dans la pièce qu’est Trump. C’est aussi pour cette raison que nous ne sommes pas d’accord avec votre proposition de résolution car nous estimons qu’il faut changer de stratégie.

Mme Alexandra Masson (RN). Nous sommes favorables à cette suppression de l’alinéa 53. L’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne va à l’encontre des intérêts des États membres et ne respecte pas les critères fondamentaux d’adhésion définis par les traités européens. L’Ukraine ne remplit pas actuellement les exigences économiques, politiques et institutionnelles. Une telle intégration mettrait en péril la cohésion de l’Union. Nous voyons cela comme un pied dans la porte car nous savons que beaucoup souhaitent l’entrée de l’Ukraine dans l’Union européenne, ce à quoi nous sommes totalement défavorables.

M. Pieyre-Alexandre Anglade (EPR). Nous nous opposerons à cet amendement. Je souhaite rappeler que le processus d’intégration à l’Union européenne est long et extrêmement exigeant. Historiquement, le délai entre le dépôt de candidature d’un État et son intégration effective à l’Union européenne peut s’étendre sur des décennies. Par exemple, la Hongrie et la Pologne ont déposé leur candidature en 1994 et sont entrées dans l’Union en 2004. La Roumanie et la Bulgarie ont déposé leur candidature en 1995 et sont devenues membres en 2007. Nous sommes engagés dans un processus avec l’Ukraine qui prendra beaucoup de temps. Au moment où les Américains sont en train de lâcher l’Ukraine, si nous venions à remettre en question la perspective européenne de ce pays, ce serait un abandon des Ukrainiens au moment où ils ont besoin d’une solidarité européenne car ils sont attaqués précisément parce qu’ils font le choix de l’Europe. Nous avons donc une exigence de solidarité.

M. Nicolas Forissier (DR). Nous sommes évidemment opposés à cet amendement. Tout d’abord, quand on parle d’adhésion accélérée, il faut relativiser le terme « accéléré » car le processus reste extrêmement long et les conditions demeurent drastiques, y compris en matière agricole. Quand on dit accéléré, cela signifie simplement qu’on accélère un peu la procédure au départ mais le processus global reste long.

Ensuite, alors qu’une possible adhésion fait partie des arguments dont nous disposons pour soutenir l’Ukraine et pour obliger la Russie à prendre conscience qu’elle ne peut pas aller jusqu’au bout de ses rêves les plus fous, ce serait un très mauvais signal donné, sur le plan international, concernant la parole européenne. Nous devons au contraire maintenir la perspective d’une possible adhésion à l’Union européenne.

Notre collègue Sophia Chikirou a évoqué un changement de stratégie : que signifie changer de stratégie ? Est-ce se coucher ? Est-ce accepter de reconnaître que M. Poutine n’aurait finalement pas tort ? Je ne comprends pas cette position.

M. Pierre Pribetich (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés reste favorable à cette perspective d’adhésion à l’Union européenne. Je rappelle néanmoins qu’avant de clore les trente-quatre chapitres, un temps relativement long s’écoulera, même dans le cadre d’un processus accéléré. Je rappellerai aussi que le processus d’adhésion a démarré pour la Turquie en 1963. Parfois, c’est bien plus long qu’on ne le pense. En tout cas, cette perspective est un geste politique de soutien envers les Ukrainiens. Nous voterons donc contre cet amendement.

M. Jean-Louis Roumégas (EcoS). Pour avoir participé à une mission d’information pour la commission des affaires européennes en Moldavie et en Ukraine il y a quelques années, je voudrais simplement souligner que l’aspiration à l’Europe est une aspiration des peuples ukrainien, moldave ou géorgien et pas simplement un jeu géostratégique. Il serait malvenu que nous ne répondions pas favorablement à cette aspiration, même s’il faut la mettre en perspective. Nous voterons donc contre cet amendement.

Mme Laetitia Saint-Paul (HOR). Le groupe Horizon votera contre cet amendement. Il ne faut pas oublier que, historiquement, l’élargissement de nombreux pays, notamment la Pologne, a débuté par une adhésion à l’OTAN avant celle à l’Union européenne. Nous en subissons aujourd’hui certaines conséquences. Le processus d’adhésion à l’Union européenne en premier lieu est une démarche qu’il faut soutenir. Au regard des récentes déclarations de Donald Trump, accusant Volodymyr Zelensky d’être responsable de la guerre en Ukraine, je crois vraiment qu’il ne faut pas reculer sur ce sujet.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Changer de stratégie implique de choisir la voie du multilatéralisme et de favoriser, par exemple, la demande d’une conférence sous l’égide de l’OSCE ou une sollicitation de l’ONU pour éviter un tête-à-tête Poutine-Trump. En outre, nous pouvons changer de stratégie concernant la position sur l’OTAN, disant que nous semblons aller vers un accord sur la non-adhésion de l’Ukraine. Trump le dit, la Russie le demande et nous étions contre. En revanche, l’adhésion à l’Union européenne ne suscite pas d’opposition. Le ministre des affaires étrangères russe a d’ailleurs déclaré hier soir que l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne relevait de sa souveraineté. Changer de stratégie signifie également être capable de s’adapter à l’accélération du temps de la négociation. Votre proposition de résolution devra nécessairement évoluer au fil des heures et des jours. Si nous arrivons en séance le 10 mars, elle sera peut-être totalement obsolète.

L’amendement n° AE2 est rejeté.

Amendement n° AE5 de Mme Sophia Chikirou

M. Arnaud Le Gall (LFI-NFP). Cet amendement vise à rappeler que l’enfermement dans la notion d’Europe de la défense, de fait sous l’égide de l’OTAN, est l’une des raisons du problème. Nous n’avançons pas et il n’y a pas de cohérence stratégique ou de vision commune des intérêts à un niveau suffisamment opérationnel pour créer des avancées.

Il n’y a pas de volonté commune d’acheter des matériels européens. Effrayée par les déclarations de Trump, le premier réflexe d’Ursula von der Leyen a été d’annoncer l’achat de davantage de matériels militaires américains, au moment même où Trump réclame une rente de 5 % de notre richesse nationale pour des acquisitions de matériels de défense. La France est bien seule lorsqu’elle demande que le fonds européen de défense soit prioritairement consacré à des investissements européens.

Plutôt que de croire en une illusion à court terme, et alors que nous avons besoin de solutions à très court terme, nous proposons de relancer davantage de relations bilatérales, trilatérales et quadrilatérales. C’est ainsi que, quand la Commission européenne ne s’en occupait pas, l’Europe a pu avancer sur le spatial et l’aéronautique, avec des succès éclatants. Depuis, tout a été désossé.

M. Pieyre-Alexandre Anglade (EPR). Nous nous opposerons à cet amendement car nous considérons que la question ukrainienne est existentielle pour la sécurité de l’Europe. Suivre la logique proposée ici, à savoir une forme de désengagement militaire des Européens, ne favoriserait pas la paix ou la résolution du conflit mais créerait les conditions de l’écrasement de l’Ukraine par la Russie de Vladimir Poutine. Au moment où les velléités impérialistes de la Russie n’ont jamais été aussi fortes – car nous savons tous que Vladimir Poutine ne s’arrêtera pas à l’Ukraine –, où notre allié américain tourne le dos, veut un deal avec Poutine et menace d’abandonner l’Ukraine – et donc la sécurité de l’Europe –, notre réaction ne devrait pas être de sortir d’un processus de renforcement de la défense européenne mais au contraire de la consolider à travers des programmes communs et une volonté d’augmenter nos budgets collectivement. Cet amendement est dangereux et fait, au fond, le relais des positions de la Russie de Vladimir Poutine.

M. Stéphane Hablot (SOC). L’Histoire a montré que, si nous voulons la paix, il faut savoir préparer la guerre. Cela ne signifie pas que nous voulons la guerre mais nous avons besoin d’être renforcés et de ne pas nous agenouiller.

M. Pierre Pribetich (SOC). La conférence de Munich sur la sécurité, qui s’est tenue le dimanche 16 février, rebat l’ensemble des cartes de notre défense propre et de la sécurité de notre territoire. Je ne vois pas comment l’on peut affirmer que l’Europe de la défense est un leurre. Elle est maintenant une nécessité que nous devons mettre sur la table.

M. Nicolas Forissier (DR). Pour les mêmes raisons, nous ne pouvons pas voter cet amendement. Nous y sommes totalement opposés. Il faut poursuivre cet effort. Ce serait un très mauvais signal, même si nous pouvons discuter ultérieurement de la mise en œuvre et de la poursuite des choses. Dans la situation actuelle, il ne faut pas envoyer des signaux qui nous affaiblissent.

M. Arnaud Le Gall (LFI-NFP). Je ne reviendrai pas sur des accusations minables. Toute critique envers la stratégie qui nous a menés aux résultats que nous connaissons est vue comme une reprise des arguments de Poutine. Or, nous voulons que l’Europe se renforce militairement et nous voulons son autonomie stratégique. Ce n’est certainement pas dans le cadre actuel de l’Europe de la défense, incapable d’aboutir à quoi que ce soit depuis des décennies, que cela se réalisera. Ce n’est pas par hasard que les gaullistes, qui savaient très bien ce qu’était ce projet, n’en voulaient pas.

Nous proposons de relancer des coopérations bilatérales, trilatérales et quadrilatérales sérieuses en matière d’industrie de l’armement européenne, plutôt que de cotiser aux 5 % réclamés par les Américains en leur achetant leurs matériels. Vous n’obtiendrez rien d’autre de la part de la majorité de nos partenaires dans le cadre de l’Europe de la défense.

Je n’ai pas de problème avec le fait qu’on ne soit pas d’accord mais ne caricaturez pas nos arguments en prétendant que nous voulons dépouiller l’Europe de sa défense, alors que c’est tout le contraire. Et si j’étais désagréable, je dirais que vous vous nourrissez de mots.

M. Nicolas Forissier (DR). Je n’ai nullement le sentiment de me nourrir de mots. Je suis d’accord sur la nécessité absolue de renforcer l’Europe de la défense. Nous débattions hier soir dans l’hémicycle sur la ratification du traité de défense entre la France et l’Espagne, qui s’inscrit précisément dans cette démarche, et nous pourrions multiplier les exemples. L’Europe de la défense a considérablement progressé. Il ne faut pas nous parler du général de Gaulle car cela remonte un peu trop loin. Je maintiens que cet amendement intervient à un moment inopportun pour relancer ce débat. Ce serait un très mauvais signal envoyé au profit de M. Poutine et de ses velléités.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement. En réalité, tout le monde s’accorde sur la nécessité de refonder l’Europe de la défense. Je partage un point avec vous : les réussites d’Ariane ont d’abord été le fruit de volontés bilatérales, voire unilatérales. Mais ce n’est pas le moment de remettre en cause l’Europe de la défense en tant que telle. Par contre, nous devons la refonder. Nous continuons par exemple à travailler sur des consolidations de nos accords de défense avec les Britanniques, indépendamment de l’Union européenne. Nous ne refonderons pas la défense européenne dans le cadre de cette proposition de résolution, néanmoins nous pouvons mener un débat sur sa refondation en partant de noyaux essentiels que la France ne soldera pas, comme l’industrie de défense où elle excelle et où elle a encore des perspectives de progression, notamment dans le domaine du quantique.

Comme l’a souligné le ministre des armées, l’argent européen et celui des contribuables français ne doivent pas servir à acheter du matériel américain, dans la mesure du possible. Nous savons qu’il est actuellement difficile de s’en extraire totalement, notamment pour certains éléments constitutifs de l’armement fondamental. Cependant, nous devons travailler à nous en affranchir à l’avenir. Certains partenaires ne sont pas prêts à faire ce choix aujourd’hui mais notre rôle politique et diplomatique est de les convaincre de le faire demain.

M. Arnaud Le Gall (LFI-NFP). Avec des partenaires qui ne veulent pas le faire !

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Demain peut-être ; nous ne pouvons pas renoncer aujourd’hui et nous extraire de ce que nous ferons demain de l’Europe et de nos partenariats.

L’amendement n° AE5 est rejeté.

Amendement n° AE6 de Mme Sophia Chikirou

Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 55, appelant à poursuivre la formation de soldats ukrainiens directement en Ukraine, ce qui implique l’envoi de soldats français. Certes, il ne s’agit pas d’envoyer les soldats français sur le front, ce que le président Macron a exclu. Cependant, à un moment où il faut parler de paix et la planifier, il est crucial de ne pas entraîner la France dans un affrontement face à la Russie, d’autant plus que cela va à l’encontre de notre doctrine historique de dissuasion nucléaire. Je vous rappelle que la France et la Russie sont deux puissances nucléaires et que notre doctrine vise précisément à éviter tout affrontement physique. Cet amendement vise à ne pas favoriser les conditions de la provocation et à ne pas mettre la France en première ligne au moment où la paix se discute.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement de suppression. Je tiens à rappeler que l’alinéa en cause ne figurait pas initialement dans ma proposition de résolution ; il a résulté d’un amendement de M. Frédéric Petit adopté par la commission des affaires européennes.

Sur le fond, je rappelle qu’il ne s’agit en aucun cas de mettre des militaires français face aux Russes mais de poursuivre la formation des militaires ukrainiens à l’utilisation des matériels vendus par les Français. Effectuer de la formation sur notre territoire s’avère très complexe, comme nous l’avons constaté avec la livraison des Mirage 2000.

Nous procédons de la même manière dans de nombreuses régions du monde : lorsque nous vendons du matériel, nos militaires interviennent en renfort pour la formation dans les autres pays. Cela ne constitue pas une agression pour la Russie, puisque nous considérons l’Ukraine comme un territoire souverain. Je réaffirme donc qu’il n’est absolument pas question d’envoyer des militaires français au front face aux soldats russes mais bien d’intervenir dans un État souverain pour assurer la formation de ses personnels militaires.

M. Pieyre-Alexandre Anglade (EPR). Nous nous opposerons également à cet amendement. J’entends notre collègue Chikirou dire qu’au nom de la paix, il ne faudrait pas permettre la formation des soldats ukrainiens. Ne pas permettre la formation des soldats ukrainiens ne favorisera certainement pas la paix. Au contraire, cela créerait les conditions de l’effondrement de l’Ukraine et donc de sa soumission à la Russie. Je crois plutôt qu’il faut continuer de former les soldats ukrainiens, poursuivre les livraisons d’armes à l’Ukraine et renforcer la défense européenne, ainsi que les budgets de défense européens, afin de permettre à l’Ukraine de résister et, par là même, d’assurer la sécurité de l’Europe.

Comme l’a justement souligné hier le ministre de l’Europe et des affaires étrangères lors des questions au gouvernement, l’Ukraine est la sentinelle de la sécurité de l’Europe. Pour que cette sentinelle puisse continuer à défendre la sécurité des Européens, nous devons l’aider à se renforcer.

L’amendement n° AE6 est rejeté.

Amendement n° AE11 de Mme Alexandra Masson

Mme Alexandra Masson (RN). Nous demandons par cet amendement la suppression du mot « énergie » après « financière ». Si la fermeté diplomatique est nécessaire, ces sanctions n’ont pas toujours prouvé leur efficacité. Il est essentiel qu’elles n’affaiblissent pas nos propres économies car ce n’est vraiment pas le but.

Je voudrais revenir sur vos propos concernant la diminution du prix du gaz. Depuis l’arrêt du transit du gaz russe, le 31 janvier 2024, nous constatons une accélération de l’épuisement des réserves européennes de gaz et une forte hausse des prix. Mardi dernier, le cours du gaz européen atteignait son plus haut niveau depuis deux ans, avec 59,39 euros le mégawatt. Je pourrais faire la même observation pour l’électricité.

Aujourd’hui, nous ne sommes donc absolument pas convaincus par vos arguments. Nous avons déposé cet amendement car tout cela a un impact très fort sur l’énergie et ce sont évidemment les pays européens qui vont en souffrir, plus particulièrement la France.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement pour les raisons que j’ai déjà exposées précédemment.

Concernant l’aspect tarifaire, je ne souhaite pas entrer dans un débat technique sur les amortissements et le fait que les acquisitions de volumes préalables permettent d’avoir des tampons d’amortissement sur les tarifications à un instant « t ». Toutefois, nous constatons, sur le premier trimestre 2025, une baisse du prix du mètre cube de gaz pour les utilisateurs finaux. Nous verrons comment cela évolue dans les six mois à venir.

Je tiens à rappeler que les sanctions énergétiques que je propose sont dirigées contre la Russie et pas contre les États membres.

Par ailleurs, les éléments qui nous ont été rapportés d’un point de vue stratégique montrent que le plafonnement des prix et la baisse des volumes exportés vers l’Europe auront un impact sur la capacité de la Russie à se réarmer et à produire des armes.

L’objectif est de parvenir à une paix dans l’intérêt de l’Ukraine. Toutes ces mesures sont donc prévues jusqu’à l’arrêt des hostilités.

M. Pieyre-Alexandre Anglade (EPR). Nous nous opposerons à cet amendement. Il est crucial de tout mettre en œuvre pour tarir l’effort de guerre russe, qui repose essentiellement sur les ressources énergétiques et d’hydrocarbures de la Fédération de Russie, qu’elle a largement utilisées pour financer son effort de guerre depuis maintenant trois ans, trouvant des moyens de contourner les sanctions appliquées jusqu’à présent. Le nouveau train de sanctions prévu par les Européens la semaine prochaine est donc absolument indispensable, notamment les sanctions visant la flotte fantôme russe qui permet aujourd’hui à Vladimir Poutine de poursuivre son effort de guerre.

Mme Dominique Voynet (EcoS). Nous nous opposerons également à cet amendement, tout en soulignant qu’au-delà des sanctions engagées envers le pouvoir russe, nous devons être cohérents et nous atteler à réduire notre propre dépendance à l’égard du gaz naturel russe et à l’égard de l’uranium de retraitement, dont nous sommes de fervents importateurs.

Jusqu’à présent, notre position manque de cohérence. Vous avez souligné qu’il fallait trouver des fournitures de substitution et j’insiste sur la nécessité de passer à l’acte au lieu de nous contenter de discours.

L’amendement n° AE11 est rejeté.

Amendement n° AE8 de M. Laurent Mazaury

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Cet amendement répond à une préoccupation, exprimée par le groupe Socialistes et apparentés en commission des affaires européennes, qui avait conduit à la suppression de l’alinéa 54 de l’ancienne version de la proposition de résolution. Je vous propose un alinéa 58 permettant de rassurer sur le fait qu’il s’agit de mesures temporaires, ne remettant en cause aucun des objectifs de la transition énergétique, qui se poursuit par ailleurs.

J’en profite pour informer Mme Voynet que des tractations sont – sauf erreur de ma part – en cours avec le Kazakhstan pour obtenir des fournitures de matériaux fissiles, sans passer par les différentes filières d’approvisionnement auxquelles vous avez fait référence. J’espère que ces tractations pourront aboutir dans des conditions écologiques favorables.

L’amendement n° AE8 est rejeté.

Amendement n° AE12 de Mme Alexandra Masson

Mme Alexandra Masson (RN). Nous demandons ici la suppression de l’alinéa 59 afin de supprimer la disposition mettant gravement en danger l’indépendance énergétique de l’Europe. La volonté d’interdire toute importation de combustibles fossiles russes ignore la réalité du marché et des conséquences désastreuses pour nos industries et nos ménages. Même si nous ne sommes pas d’accord sur les chiffres, les deux dernières années ont malgré tout prouvé que cela avait été extrêmement compliqué. Nous en reparlerons certainement dans les mois à venir.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Pour les motifs précédents, je suis également défavorable à cet amendement. Je rappelle qu’en France, la majorité de nos approvisionnements ont été réorientés. Cependant, c’est encore une fois plus problématique pour nos amis allemands.

L’amendement n° AE12 est rejeté.

Amendement n° AE9 de M. Laurent Mazaury

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Cet amendement est relatif à une modification de l’alinéa 61, à la suite d’une intervention en commission des affaires européennes souhaitant que nous précisions que la reconstruction devait concerner les secteurs du transport et du déminage. J’ai souhaité ajouter le terme « notamment », de façon à ce que ce ne soit pas limitatif à ces seuls secteurs pour ce qui touche à la phase de reconstruction. Cela pourrait ainsi recouvrir aussi la construction, l’agriculture et tous les secteurs possibles.

L’amendement n° AE9 est adopté.

Amendement n° AE13 de Mme Alexandra Masson

Mme Alexandra Masson (RN). Nous demandons par cet amendement la suppression de l’alinéa 67. Cette extension des garanties de sécurité risquerait d’engager directement la France et ses partenaires européens dans un conflit armé. Dans sa rédaction imprécise, cet alinéa appelle à l’extension des garanties de l’article 5 du traité de Washington sur l’OTAN à un pays qui n’en fait pas partie et à l’extension de l’article 42 du traité sur l’Union européenne. Cette mesure nous impliquerait immédiatement dans une escalade militaire dangereuse. De plus, étendre les garanties de sécurité, élément majeur de notre alliance, sans les devoirs qui incombent aux membres, n’est absolument pas cohérent.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Cet alinéa ne vise pas du tout à l’application des articles 5 et 42 des traités que vous avez mentionnés. Au contraire, il exprime que les garanties de sécurité doivent intervenir indépendamment de tout ce qui pourrait toucher de près ou de loin à l’OTAN.

Il est possible que je propose, lorsque nous serons en séance, une clarification encore plus explicite de cet alinéa pour répondre aux différentes critiques qui ont été énoncées à propos de sa rédaction, afin de lever toute ambiguïté sur ce point.

M. Pieyre-Alexandre Anglade (EPR). Nous nous opposerons à cet amendement qui, à mon sens, met gravement en danger notre sécurité et celle du continent européen. Il faut affirmer clairement que nous voulons une paix solide et durable avec des garanties de sécurité fortes et crédibles pour la sécurité de l’Europe et de l’Ukraine. Nous avons donc besoin d’étendre ces garanties de sécurité à l’Ukraine parce qu’il en va de notre propre sécurité.

Conclure une paix sans nous assurer des garanties de sécurité suffisantes serait créer les conditions pour que, demain, Vladimir Poutine redémarre sa guerre vis-à-vis de l’Ukraine, peut-être vers les États baltes et vers d’autres pays européens. Cela déstabiliserait profondément la sécurité du continent et donc celle de la France.

L’amendement n° AE13 est rejeté.

Amendement n° AE3 de Mme Sophia Chikirou

Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Les alinéas 66 et 67 demandent l’extension des garanties de sécurité occidentales à l’Ukraine en envisageant de nouveaux accords hors de l’adhésion formelle de l’Ukraine à l’OTAN. Cet amendement propose de rédiger autrement l’alinéa 67 en précisant que ces garanties ne s’inscrivent pas dans une logique d’expansion de l’OTAN mais plutôt dans une démarche de désescalade et de sécurité collective, dans le respect du droit international et des principes de souveraineté des États.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Ma réponse est la même que précédemment. Je travaillerai à une réécriture pour intégrer à la fois les garanties de sécurité et régler également définitivement ces ambiguïtés. Nous aurons la possibilité de la voter dans l’hémicycle si nous adoptons le texte aujourd’hui.

L’amendement n° AE3 est rejeté.

Amendement n° AE4 de Mme Sophia Chikirou

Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Cet amendement vise à insérer un nouvel alinéa pour inviter le gouvernement et ses partenaires européens à prendre l’initiative de l’organisation, sous l’égide de l’ONU, d’une conférence internationale pour la paix.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. Je pense que cette idée se heurte à une problématique de temporalité. À ce stade, il ne me semble pas souhaitable de le faire. Ce sera le moment lorsque nous aurons commencé à nous asseoir à la table des négociations pour une paix acceptée par l’Ukraine.

M. Jean-Louis Roumégas (EcoS). Contrairement à l’avis du rapporteur, il n’y a pas de raison de ne pas inscrire ce principe dans le corps du texte. Nous nous posons depuis le début en défenseurs du droit international : c’est une proposition qui va de soi pour nous et nous la voterons.

Mme Maud Petit (Dem). À titre personnel, je trouve que ce n’est pas une mauvaise idée d’y réfléchir. Je pense que je peux voter cet amendement.

M. Pieyre-Alexandre Anglade (EPR). Nous nous opposerons à cet amendement. Nous estimons que c’est à l’Ukraine de déterminer le moment opportun pour entamer des négociations de paix ou pour convoquer, le cas échéant, une initiative visant à trouver les voies et les moyens d’établir une paix durable, avec les garanties de sécurité nécessaires. Seuls les Ukrainiens, en tant que victimes de l’agression dans ce conflit, sont légitimes pour décider du moment propice à la paix.

M. Stéphane Hablot (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés est favorable à cet amendement.

L’amendement n° AE4 est adopté.

M. le président Bruno Fuchs. Nous allons maintenant passer au vote de la proposition de résolution européenne. Je rappelle que, si ce texte est adopté en commission, il sera débattu en séance publique ou réputé définitivement adopté si aucune demande d’inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale n’est exprimée lors de la conférence des présidents.

Avant de procéder au vote, je cède la parole au rapporteur qui souhaite ajouter un élément.

M. Laurent Mazaury, rapporteur. J’ai bien noté que l’amendement AE4 a été adopté. Je souhaite simplement soulever une observation concernant sa formulation : je ne suis en effet pas certain que l’expression « invite le gouvernement français » soit appropriée. Il sera peut-être nécessaire de la revoir en séance publique.

M. le président Bruno Fuchs. L’amendement ayant été adopté, la formulation pourra être débattue en séance si cela est nécessaire. Je mets à présent aux voix le texte de la proposition de résolution européenne ainsi amendé.

La commission adopte l’ensemble de la proposition de résolution européenne modifiée.

M. le président Bruno Fuchs. Je remercie le rapporteur et l’ensemble des collègues ayant participé à ce débat.

 

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La séance est levée à 12 h 25.

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Membres présents ou excusés

Présents.  M. Pieyre-Alexandre Anglade, M. Guillaume Bigot, M. Jorys Bovet, M. Jérôme Buisson, M. Sébastien Chenu, Mme Sophia Chikirou, M. Alain David, Mme Dieynaba Diop, Mme Christine Engrand, M. Nicolas Forissier, M. Moerani Frébault, M. Bruno Fuchs, M. Michel Guiniot, M. Stéphane Hablot, M. Michel Herbillon, Mme Sylvie Josserand, Mme Brigitte Klinkert, M. Arnaud Le Gall, Mme Constance Le Grip, M. Jean-Paul Lecoq, Mme Alexandra Masson, M. Laurent Mazaury, Mme Maud Petit, M. Kévin Pfeffer, M. Jean-François Portarrieu, M. Pierre Pribetich, M. Stéphane Rambaud, M. Franck Riester, M. Davy Rimane, M. Jean-Louis Roumégas, Mme Laetitia Saint-Paul, Mme Sabrina Sebaihi, M. Vincent Trébuchet, Mme Dominique Voynet, M. Lionel Vuibert

Excusés.  Mme Clémentine Autain, Mme Eléonore Caroit, M. Olivier Faure, M. Marc Fesneau, M. Perceval Gaillard, M. Alexis Jolly, Mme Amélia Lakrafi, Mme Marine Le Pen, Mme Mathilde Panot, M. Frédéric Petit, Mme Laurence Robert-Dehault, Mme Marie‑Ange Rousselot, Mme Michèle Tabarot, Mme Liliana Tanguy, M. Laurent Wauquiez, Mme Estelle Youssouffa

Assistaient également à la réunion.  M. Belkhir Belhaddad, M. Michel Castellani