Compte rendu
Commission
des lois constitutionnelles,
de la législation
et de l’administration
générale de la République
– Examen des articles 13 à 19 et 42, délégués au fond par la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529) (M Philippe Gosselin, rapporteur pour avis) 2
– Examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au renforcement de la sûreté dans les transports (n° 134) (M. Guillaume Gouffier-Valente, rapporteur) 15
– Examen, en application de l’article 88 du Règlement, des amendements de la proposition de loi visant à intégrer la notion de consentement dans la définition pénale des infractions d’agression sexuelle et de viol
(n° 360) (Mme Sarah Legrain, rapporteure)............. 40
– Informations relatives à la commission................ 42
Mercredi
27 novembre 2024
Séance de 9 heures
Compte rendu n° 21
session ordinaire de 2024 - 2025
Présidence
de M. Florent Boudié, président
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La séance est ouverte à 9 heures.
Présidence de M. Florent Boudié, président.
La Commission examine les articles 13 à 19 et 42, délégués au fond par la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529) (M Philippe Gosselin, rapporteur pour avis).
M. le président Florent Boudié. Nous examinons les articles 13 à 19 et 42 du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (Ddadue) en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes. Ces articles nous ont été délégués au fond par la commission du développement durable. Dans cette procédure, l’examen a lieu devant la commission saisie pour avis, la commission au fond se contentant de reprendre notre position sur ces articles.
En l’espèce, les articles en question concernent majoritairement le régime des actions de groupe, sujet sur lequel notre ancienne collègue Laurence Vichnievsky avait mené avec Philippe Gosselin une mission d’information pour notre commission, qui avait débouché sur une proposition de loi transpartisane adoptée à l’unanimité en séance. Nous avons donc logiquement désigné Philippe Gosselin rapporteur pour avis.
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Ce projet de loi a un champ assez vaste, les Ddadue agrégeant toujours des dispositions de différentes finalités.
L’article 13 corrige la définition des partenariats d’innovation, qui sont une catégorie particulière de marchés publics, pour respecter les critères restrictifs fixés par le cadre européen. Ces marchés publics étant associés à des obligations allégées de mise en concurrence, il est nécessaire de ne pas les étendre au-delà de ce que permettent les directives de 2014. Il s’agit non pas d’une transposition mais d’une mise en conformité avec le droit européen.
L’article 42 transpose la directive du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié, laquelle a assoupli le régime de la « carte bleue européenne ». Ce titre de séjour, qui vise à attirer dans l’Union les travailleurs hautement qualifiés, propose un régime juridique attractif. Il importe en effet de se démarquer de la concurrence internationale pour satisfaire les besoins de nos entreprises en main d’œuvre technique et qualifiée. Nous avons été mis en demeure de procéder à cette transposition par l’Union européenne le 24 janvier 2024.
J’en arrive aux articles 14 à 19, qui transposent dans notre droit la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs. Laurence Vichnievsky et moi-même avions été nommés en 2019 rapporteurs d’une mission d’information sur le sujet, laquelle a publié son rapport en juin 2020.
L’action de groupe n’est pas la class action américaine, qui peut faire peur. Elle permet à un demandeur d’agir en justice, non pas pour son propre compte mais pour défendre les intérêts d’un groupe d’individus placés dans une situation similaire et subissant un dommage ayant pour cause un manquement de même nature aux obligations légales ou contractuelles d’un même défendeur. Elle a été introduite dans le droit français par la loi du 7 mars 2014 relative à la consommation, dite loi « Hamon ».
Le bilan est plutôt décevant : l’étude d’impact du présent projet de loi fait état de seulement trente-cinq actions engagées, dont aucune n’a permis l’indemnisation de consommateurs. Notre mission d’information, qui aboutissait déjà à ce constat en 2020, avait mis en évidence l’excessive complexité du régime juridique des actions de groupe, avec pas moins de sept fondements juridiques différents, chacun avec des règles de procédure et de fond particulières. Dans les recommandations de la mission figuraient la mise en place d’un cadre commun à toutes les actions de groupe ainsi qu’un élargissement de la qualité pour agir – à titre d’exemple, moins d’une vingtaine d’agréments en matière de consommation ont été délivrés – et du champ des préjudices indemnisables.
En décembre 2022, Laurence Vichnievsky et moi avions déposé une proposition de loi qui visait à instaurer une action de groupe universelle. Elle opérait un triple élargissement de l’action de groupe : concernant la qualité pour agir, l’application à tous les droits subjectifs et le préjudice indemnisable. Elle procédait également à la transposition de la directive européenne du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives, qui ouvre la possibilité aux organismes agréés dans un État membre de l’Union européenne d’intenter des actions transfrontières, autrement dit des actions de groupe dans d’autres États membres.
Cette proposition de loi relative au régime juridique des actions de groupe avait fait l’objet d’un avis du Conseil d’État, à la demande de la présidente de l’Assemblée nationale : autant vous dire qu’elle est juridiquement solide. Nous l’avions adoptée à l’unanimité en mars 2023, le Sénat l’avait examinée en janvier 2024, puis son parcours législatif s’était interrompu avec la dissolution. Or la directive devait être transposée au plus tard le 25 décembre 2022. La France a reçu une mise en demeure de transposer la directive et le risque est désormais important d’être l’objet d’une procédure en manquement et de sanctions financières.
Contraint par le temps, le Gouvernement utilise ce projet de loi Ddadue comme vecteur de transposition. Son architecture même démontre le manque de lisibilité de la procédure d’action de groupe puisqu’il faut modifier pas moins de deux lois – loi « Justice du XXIe siècle » et loi « Informatique et libertés » – et trois codes – code de justice administrative, code de la consommation et code de la santé publique – pour effectuer cette transposition.
Parmi les éléments notables peuvent être cités l’obligation pour les associations d’informer sur leurs actions de groupe en cours, l’absence de nécessité de présenter des cas individuels en cas d’action en cessation du manquement ou encore un contrôle des conflits d’intérêts par le juge dès l’introduction de l’action.
Les articles 14 à 19 intègrent dans notre droit national la possibilité pour les associations agréées dans d’autres États membres d’intenter des actions de groupe en France, et réciproquement. Ces actions de groupe transfrontières seront possibles dans le domaine de la consommation, des données personnelles et de la santé. Enfin, le projet de loi supprime l’obligation de mise en demeure préalable prévue à l’article 64 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle. C’est une belle avancée car cette mise en demeure ne servait qu’à ralentir la procédure.
Il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’une transposition a minima, sans aucune modification de nature à améliorer la lisibilité ou l’efficacité de l’action de groupe. D’autres pays européens ont pourtant des procédures plus ouvertes que la nôtre. Ainsi, le Royaume-Uni autorise le recours collectif dans tous les domaines. La Suède et le Portugal permettent aux associations ad hoc de recourir à ce dispositif, le Portugal ayant même inscrit l’action de groupe dans sa Constitution.
En conséquence, je vous proposerai un amendement de réécriture globale de l’article 14 afin de réintroduire les avancées de la proposition de loi relative au régime juridique des actions de groupe, proposition de loi adoptée à l’unanimité au printemps dernier. S’il est adopté, il servira de base à la discussion en séance.
En conclusion, si l’ambition de votre rapporteur va bien au-delà d’une transposition a minima, il ne souhaite pas pour autant procéder à une surtransposition. Le Ddadue nous donne l’occasion de renouer avec la volonté de l’Assemblée qui s’était exprimée de façon unanime en 2023. L’action de groupe à la française ne singera pas la class action à l’américaine : j’ai bien conscience des critiques adressées à cette dernière. Si mon amendement est adopté, nous aboutirons à un texte d’équilibre qui facilitera l’accès des citoyens au juge, sans excès mais avec détermination.
M. le président Florent Boudié. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Jordan Guitton (RN). Tout d’abord, je m’interroge sur les priorités de l’Assemblée nationale. Alors que celle-ci avait adopté l’année dernière un texte important sur l’action de groupe, elle a choisi de donner la priorité au projet de loi de transposition que nous examinons aujourd’hui, reléguant au second plan les travaux déjà engagés sur ce sujet alors qu’ils avaient fait consensus. C’est un manque de respect pour la représentation nationale.
Nous regrettons en outre que l’Union européenne nous impose de travailler dans l’urgence, en nous menaçant de sanctions en cas de retard ou de refus de transposition. Votre gouvernement agit plus rapidement pour conformer notre droit aux règles européennes qu’il ne le fait pour servir l’intérêt des Français. L’Assemblée nationale doit pouvoir examiner les textes visant à adapter le droit français au droit européen dans les meilleures conditions, avec le temps nécessaire et au minimum un projet de loi par domaine. De surcroît, il sera nécessaire d’étudier l’acceptation précise des directives européennes à l’Assemblée nationale et au Sénat – nous vous le rappellerons à chaque Ddadue.
Sur le fond, le présent texte porte sur un ensemble hétérogène de règles. Concernant l’action de groupe, nous voterons pour la réécriture générale proposée par le rapporteur car elle revient au texte voté l’année dernière, qui reflète le travail parlementaire plutôt qu’européen. S’agissant de l’article 42, nous nous opposerons aux amendements de l’extrême gauche, celle-ci cherchant comme d’habitude à assouplir le droit des étrangers.
Plus généralement, le Parlement français ne doit pas être la chambre d’enregistrement d’un droit européen supposément supérieur. Nous défendrons à chaque instant les intérêts des Français, et des Français seulement, en dépit des sanctions que Bruxelles pourrait prendre. Nos compatriotes ont envoyé un message clair lors des dernières élections européennes en plaçant la liste de Jordan Bardella à plus de 32 % et celle des pro-Union européenne à moins de 15 %. L’uniformisation voulue par l’Union, rejetée par les Français, revient à détruire la spécificité des nations et à fondre celles-ci dans un empire technocratique. Elle remet en cause non seulement la continuité historique des peuples mais aussi et surtout la souveraineté des États. Le marché unique ne sera jamais un État unique, et nous défendrons toujours une Europe des nations.
Le groupe Rassemblement national tient à rappeler le caractère antidémocratique des directives que l’on impose au Parlement français. L’obligation faite à l’Assemblée nationale et au Sénat de s’y conformer est une injure à notre souveraineté législative et à notre démocratie. Nous voterons donc contre et nous déterminerons notre vote sur les amendements en fonction de ce qui est proposé.
M. Ugo Bernalicis (LFI-NFP). Nous n’avons pas de commentaire particulier à faire sur l’article relatif aux marchés publics, même si nous estimons qu’une réflexion globale sur les règles qui les concernent au niveau européen serait nécessaire. On se plaint souvent de ne pas pouvoir lancer des marchés publics d’achat de produits locaux par exemple, l’Union européenne freinant quelque peu sur ce sujet. Mais ce n’est malheureusement pas l’objet de ce texte.
Concernant l’action de groupe, le texte adopté par l’Assemblée avait recueilli un large consensus. Toutefois, cela n’avait pas été une promenade de santé, le gouvernement s’étant fait le relais de groupes d’intérêts patronaux pour restreindre au maximum le périmètre du dispositif. Compte tenu du nombre d’actions enclenchées, il apparaît que ces précautions n’étaient pas nécessaires. Le véhicule législatif utilisé aujourd’hui procède, lui, à une adaptation a minima de notre droit. Or il nous semble nécessaire d’étendre l’action de groupe à tous les domaines car elle permet de soulever de véritables sujets d’intérêt général et, ainsi, de défendre l’État de droit – j’espère que nous sommes encore nombreux à y être attachés dans cette commission.
Quant au « passeport talent », il s’agit d’un dispositif permettant à des gens d’être accueillis dans des bonnes conditions. A priori, c’est positif, mais l’impression qui en ressort est tout de même qu’il y a les « bons étrangers », qui pourront en bénéficier, et les « mauvais étrangers » qu’il ne faut pas accueillir. Cette logique déplaît à notre groupe parlementaire, qui est pour l’accueil inconditionnel des personnes, avant l’examen de leurs compétences. Il n’y a qu’à voir combien il est compliqué d’accueillir des médecins étrangers ou d’essayer de faire reconnaître leurs diplômes, comme nous l’avons proposé dans un texte, pour comprendre qu’on en est loin. J’aimerais que le gouvernement fasse en sorte que tout se passe bien quand on accueille des gens.
Enfin, j’espère que l’Anef (administration numérique pour les étrangers en France) prévoira bien les bonnes cases à cocher pour le renouvellement du passeport. En ce moment, c’est la galère dans toutes les préfectures du pays pour des gens qui souhaitent renouveler leurs titres alors que leurs droits n’ont pas changé. Il est inacceptable de mettre des gens dans l’incertitude et dans la précarité alors qu’ils respectent le droit et se trouvent de façon régulière sur le territoire national.
Mme Marietta Karamanli (SOC). Les textes de transposition de dispositions européennes en droit national ont une forte dimension technique et sont décorrélés du contexte d’adoption de la directive initiale, ce qui rend leur objet plus difficile à cerner. De plus, l’étude d’impact de 800 pages ne facilite pas l’appréhension des diverses dimensions du projet.
L’article 14 ouvre la qualité pour agir, dans une action de groupe, à des entités publiques ou privées agréées. Il instaure la possibilité pour le juge de prononcer l’irrecevabilité d’une action de groupe lorsque le demandeur se trouve en situation de conflit d’intérêts, ou de rejeter de manière anticipée une action de groupe manifestement infondée. Il étend l’obligation d’information et de publicité des associations habilitées à intenter une action de groupe.
Toutefois, l’adaptation proposée par le gouvernement est faite a minima : la qualité pour agir reste limitée et n’est toujours pas ouverte aux associations qui ne se constitueraient pas pour les besoins d’une cause ; les préjudices antérieurs à l’action de groupe ne sont pas concernés ; l’action de groupe dans le domaine du travail reste subordonnée à une mise en demeure préalable.
Le rapporteur a déposé un amendement de réécriture fondé sur le texte voté à l’unanimité par notre assemblée le 8 mars 2023. Il propose une ouverture de la qualité pour agir aux associations régulièrement déclarées depuis au moins deux ans et aux associations ad hoc ; un élargissement du champ matériel de l’action de groupe ; la suppression de la mise en demeure comme préalable obligatoire dans certaines matières ; la création d’une sanction civile en cas de comportement dolosif. Il s’agit d’un progrès significatif. Le groupe des socialistes et apparentés soutient la volonté d’améliorer le texte et votera l’amendement du rapporteur.
M. Philippe Gosselin (DR). Au nom du groupe Droite républicaine, je souhaite mettre l’accent sur la continuité de l’action législative. Le rapport que nous avions commis, avec Laurence Vichnievsky, soulignait les lacunes de l’action de groupe à la française. Une proposition de loi visant à la rendre plus accessible avait été adoptée à l’unanimité et nous souhaitons désormais profiter du Ddadue pour achever ce travail parlementaire sous la XVIIe législature.
Même si la France a pris beaucoup de retard dans la transposition de la directive, on ne peut pas envisager une transposition sèche, car les régimes juridiques sont très différents, les conditions d’action très complexes et les domaines concernés très restreints. Il ne faut donc pas laisser passer l’occasion de traduire concrètement les dispositions que nous avions déjà adoptées à l’unanimité.
M. Ludovic Mendes (EPR). Les articles qui nous sont soumis concernent majoritairement les actions de groupe en droit de la consommation et portent sur plusieurs domaines, notamment le droit commun, le droit administratif, la protection des données et surtout le droit de la consommation.
L’article 14 modifie la procédure des actions de groupe devant le juge judiciaire en introduisant des règles communes : reconnaissance des entités agréées d’autres États membres, qui sont autorisées à agir en justice en France ; création d’un agrément transfrontière permettant aux entités françaises d’intenter des actions dans d’autres États membres ; possibilité pour le défendeur de contester la légitimité des entités à agir en cas de conflit d’intérêts, notamment si l’action est financée de manière suspecte ; suspension de la prescription pour les actions individuelles pendant la durée de l’action de groupe ; possibilité pour le juge de proposer une médiation.
L’article 15 applique la même logique aux actions de groupe devant le juge administratif. Les modifications sont globalement similaires mais l’agrément transfrontière n’est pas prévu dans ce cadre. L’article permet aux victimes d’obtenir réparation ou cessation d’un manquement de la part d’administrations publiques ou d’entités privées chargées d’une mission de service public.
L’article 16 simplifie l’ouverture des actions de groupe en matière de protection des données personnelles en supprimant l’exigence d’un cas individuel pour engager une action en cessation. Toutefois, un cas individuel est toujours nécessaire pour demander réparation. L’article étend également la possibilité pour les entités agréées d’autres États membres d’agir en France.
L’article 17 est essentiel pour le droit de la consommation. Il transpose la directive en offrant la possibilité aux associations de consommateurs d’intenter des actions de groupe. Ce cadre offre des procédures adaptées pour réparer tous les types de préjudices, qu’ils soient patrimoniaux ou non. La possibilité d’une réparation intégrale est importante pour les consommateurs quand, dans d’autres domaines, les préjudices réparables sont limités. Cet article prévoit également des mesures contre les conflits d’intérêts, ainsi que la suspension de la prescription des actions individuelles pendant qu’une action de groupe est en cours.
L’article 18 introduit un agrément transfrontière similaire à celui de l’article 14 mais spécifique au droit de la consommation. Il permet aux entités françaises qualifiées de mener des actions de groupe dans d’autres États membres de l’Union européenne et réciproquement, tout en maintenant un mécanisme de contestation de la qualité d’agir des entités étrangères en cas de conflit d’intérêts.
L’article 19 s’applique aux actions de groupes liées aux produits de santé et transpose la directive en permettant d’appliquer les mêmes règles que dans les autres domaines, notamment celles relatives à l’agrément transfrontière, aux conflits d’intérêts et à la médiation.
L’article 42 transpose la directive visant à faciliter l’accès à la carte bleue européenne des travailleurs hautement qualifiés et à améliorer leur mobilité au sein de l’Union européenne. Il réduit de douze à six mois la durée de contrat de travail nécessaire pour obtenir cette carte en France. Certains travailleurs, dans les métiers de l’information et de la communication notamment, pourront obtenir cette carte sans diplôme universitaire, à condition de justifier de trois ans d’expérience professionnelle. L’article assouplit également la durée de validité de la carte : pour un contrat de moins de deux ans, celle-ci est valable pour la durée du contrat plus trois mois. La mobilité intra-européenne est simplifiée, puisqu’il sera requis un séjour de douze mois seulement dans un autre État membre pour bénéficier du titre en France. Des mesures sont également mises en place pour éviter les abus, notamment en cas de non-respect des obligations légales par l’employeur. Enfin, les membres de la famille du détenteur de la carte bleue européenne cumuleront désormais leurs séjours dans différents États membres pour obtenir un titre de séjour autonome. En résumé, cet article facilite l’accès à la mobilité des travailleurs qualifiés au sein de l’Union européenne, tout en renforçant le contrôle des conditions de travail et de résidence.
Nous comprenons la volonté de notre rapporteur pour avis de vouloir intégrer dans ce texte le résultat de ses travaux, mais nous nous demandons s’il s’agit du bon véhicule législatif – nous aurons le temps d’en discuter. En résumé, notre groupe soutiendra pleinement ce projet de loi qui améliore l’accès à la justice des consommateurs.
Mme Sandra Regol (EcoS). Sur l’adaptation de notre droit aux normes européennes en matière de commande publique, d’action de groupe et de droit des étrangers, force est de constater que le gouvernement a une vision assez peu ambitieuse.
Sur la commande publique, nous soutiendrons les collègues qui proposent à juste titre de renforcer les critères d’éligibilité au dispositif « Jeune entreprise innovante ». Il n’est pas acceptable, en effet, d’ouvrir droit à des exonérations fiscales et sociales sans contrepartie sociale et environnementale.
C’est surtout au sujet de l’action de groupe que je voudrais exprimer notre incompréhension. Depuis sa création en 2014 par la loi « Hamon », et en dépit de sa modernisation en 2016, ce dispositif n’a jamais pu se développer. Seules trente-deux actions ont été lancées, parmi lesquelles moins de 20 % ont eu une issue positive. Un travail parlementaire de qualité a été mené à l’initiative du rapporteur pour avis et de Laurence Vichnievsky pour renforcer les possibilités d’accès au juge et, par là, la solidité de notre État de droit. Nous avons même abouti l’an dernier à un vote unanime sur la proposition de loi issue de la mission d’information, qui était par ailleurs largement soutenue par la Défenseure des droits.
Or, de tout cela, le gouvernement n’a apparemment que faire, prétextant l’urgence qu’il y aurait à transposer. L’argument ne tient pas une seconde, car tout est prêt : il suffisait de reprendre ce que nous avions déjà voté. L’étude d’impact écarte cette option sans la justifier autrement que par une absence d’étude des effets potentiels de la proposition de loi. Le gouvernement n’est-il pas censé produire une telle analyse, en vertu de la loi organique du 15 avril 2009 ? L’argument ne manque pas de sel ! Mon groupe soutiendra donc l’amendement de réécriture proposé par notre rapporteur pour avis et s’opposera à tous les amendements destinés à restreindre le droit de former une action de groupe, notamment ceux soutenus par le groupe EPR.
Sur la question enfin du séjour des étrangers, le projet de transposition de la directive de 2021 est largement perfectible. Celle-ci, afin de faciliter le séjour des ressortissants des pays tiers occupant un emploi hautement qualifié, a assoupli les conditions de délivrance de la carte bleue européenne. Mais le texte qui nous est soumis ne respecte pas pleinement l’esprit de la directive et accorde à l’administration une trop grande latitude pour s’opposer à la délivrance ou au renouvellement de ce titre de séjour. Nous présenterons donc des amendements visant à encadrer le pouvoir d’appréciation de l’administration. Avec toutes ces réserves, nous entendons plutôt soutenir ce texte.
M. Philippe Latombe (Dem). Ce projet de loi visant à adapter notre droit national au droit de l’Union européenne est un classique, mais il ne va pas sans difficultés. Ce texte éminemment technique aborde trois principaux sujets. Le premier est la mise en conformité du champ d’application du partenariat d’innovation avec le droit de l’Union européenne. L’article 13 supprime la disposition qui confère le caractère innovant – et donc la qualité de partenariat d’innovation à laquelle sont associées des obligations de mise en concurrence allégées – aux travaux, fournitures et services proposés par les jeunes entreprises innovantes. Cette modification est salutaire, puisque la suppression du lien entre jeunes entreprises innovantes et solutions innovantes au sens du code de la commande publique rétablira une égalité de traitement entre les opérateurs économiques dans l’accès à certaines procédures et à certains types de marchés.
Le deuxième sujet est la mise en conformité avec la directive européenne établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié, que le régime de la carte bleue européenne avait assouplies s’agissant notamment des conditions d’admission et des facultés de mobilité au sein de l’Union européenne des travailleurs hautement qualifiés. Cette directive devait être transposée au plus tard le 18 novembre 2023 : il est heureux que nous nous y attelions enfin. L’accès facilité au marché du travail des travailleurs hautement qualifiés devrait permettre de mieux répondre aux besoins des entreprises, en particulier dans le secteur des nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Le troisième sujet est celui des actions de groupe. Nous avions voté de façon unanime en mars dernier la proposition de loi que vous défendiez, M. le rapporteur pour avis, aux côtés de Laurence Vichnievksy. Votre travail, rigoureux et méticuleux, était surtout novateur, donnant véritablement un sens à l’action de groupe. Dans le rapport de la mission d’information, vous dressiez déjà un bilan clair de la procédure instaurée en 2014 et qui, avec seulement une petite trentaine d’actions de groupe répertoriées, s’avérait décevante. Plus encore, ce rapport vous avait permis d’avancer des solutions ambitieuses. Vous l’avez traduit dans un texte clair et cohérent, issu d’une large concertation et formalisant les différentes préconisations de la mission. Il nous appartient de trouver les voies et moyens pour que le chemin tracé en mai dernier puisse être emprunté, dans le cadre de l’œuvre de transposition que nous devons opérer ce jour.
Votre texte, monsieur le rapporteur pour avis, semble susciter une certaine frilosité car il ne conserve quasiment aucune spécificité sectorielle et ouvre très largement le champ matériel et la qualité pour agir. Pour cette raison, il nous est proposé de nous en tenir à une transposition stricte. Si nous choisissons plutôt de poursuivre notre œuvre, nous devrons veiller à parvenir à un équilibre. À titre personnel, je soutiendrai la réécriture générale que vous proposez. Le travail est posé, validé par le Conseil d’État. Il fait l’objet d’un vote à l’unanimité dans l’hémicycle. Il est cohérent d’y donner une suite favorable.
M. David Guerin (HOR). Au cours des dernières années, le législateur européen a adopté des directives qui doivent aujourd’hui être transposées dans notre droit national. Le groupe Horizons & indépendants, attaché au projet européen et convaincu de la nécessité des dispositions proposées, votera en faveur des articles dont la commission des lois a été saisie au fond.
L’article 13 vise à mettre le droit de la commande publique française en conformité avec le droit européen dans le secteur de l’innovation. Le statut de « jeune entreprise innovante » permet depuis 2004 de soutenir l’effort d’innovation des entreprises en ouvrant droit à des exonérations d’impôt et de cotisations patronales. Il profite chaque année à des milliers de PME – elles étaient 4 500 en 2020 – engageant des dépenses de recherche et développement à hauteur de 15 % de leurs charges au moins. La mise en conformité du code de la commande publique avec le cadre européen en matière de partenariat d’innovation est nécessaire pour que ce dispositif soit conservé.
Les articles 14 à 19 visent à transposer la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs. L’action de groupe, introduite dans le droit français en 2014 grâce aux travaux européens, fait désormais partie intégrante des voies de recours collectives ouvertes aux citoyens. Initialement réservée aux associations de défense des consommateurs, elle est désormais ouverte aux litiges relatifs aux produits de santé ainsi qu’à ceux survenant en matière environnementale, en matière de protection des données personnelles et en matière de discriminations subies au travail. L’action de groupe a même atteint la sphère publique : la loi du 18 novembre 2016 l’a introduite dans le code de justice administrative afin de permettre à plusieurs personnes victimes d’un dommage causé par une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public, ayant manqué à ses obligations légales ou contractuelles, d’obtenir la cessation du manquement ou la réparation du dommage causé.
La transposition de la directive devait intervenir au plus tard le 25 décembre 2022. Compte tenu du dépassement du délai, le gouvernement a fait le choix de se limiter à une transposition stricte, n’incluant que les dispositions obligatoires. Sans exclure un renforcement ultérieur du cadre juridique des actions de groupe, le groupe Horizons & indépendants note que ces dispositions permettront déjà de l’améliorer, au travers notamment de la possibilité d’actions de groupe transfrontières. Au-delà du seul champ des actions de groupe, ces dispositions contribueront à renforcer le réflexe européen en matière de recours pour faire valoir les intérêts de l’ensemble des citoyens concernés des États membres.
L’article 42, qui vise à transposer les dispositions de la directive du 20 octobre 2021 dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, nous semble tout aussi important. Alors que la Commission européenne a estimé que la directive précédente n’avait pas atteint l’ensemble de ses objectifs, il nous semble primordial de modifier le droit positif pour que l’Union européenne et la France renforcent leur attractivité à l’égard des travailleurs hautement qualifiés. C’est précisément l’objet de cet article, qui nous permettra d’attirer et de retenir les ressortissants de pays tiers dotés de compétences de niveau élevé et d’accroître leur mobilité entre États membres.
M. Paul Molac (LIOT). Les textes d’adaptation au droit européen, qui sont toujours techniques et un peu fourre-tout, sont parfois porteurs de changements sensibles pour nos concitoyens. Comme beaucoup de mes collègues, je concentrerai mon propos sur l’action de groupe. Créée il y a dix ans pour permettre aux victimes de parler d’une seule voix mais aussi pour rééquilibrer le rapport de force entre consommateurs et entreprises, cette procédure a un bilan très modeste par rapport à son objectif ambitieux. Sur une trentaine d’actions lancées dans notre pays, six seulement ont prospéré. De nombreux consommateurs estiment que la loi de 2014 n’a pas eu les effets escomptés.
Notre rapporteur pour avis l’a très justement rappelé : le gouvernement a préféré transposer la directive sans tenir compte de la proposition de loi adoptée à l’unanimité par notre assemblée en mars 2023. Au-delà du manque de respect dont il témoigne à l’égard du travail parlementaire, il fait ainsi le choix d’une mesure moins ambitieuse et moins protectrice des droits des consommateurs. De plus, l’examen de ces dispositions dans le cadre d’un Ddadue ne permet pas d’avoir un véritable débat sur ce sujet de société, qui mérite mieux. Notre groupe estime que le droit actuel ne suffit pas et ne protège pas les consommateurs : nous soutiendrons donc l’amendement de rédaction globale de notre rapporteur pour avis, qui vise à reprendre le travail parlementaire.
Je suis particulièrement attaché à la création d’une sanction civile pour réprimer les fautes lucratives. Il est inconcevable qu’un professionnel puisse volontairement commettre un manquement dans le seul but d’en tirer des gains illicites sans craindre de pénalités financières. Je constate qu’en dépit des réserves de certains, notre rapporteur pour avis, que je remercie pour sa modération, n’a pas cédé et propose de réintroduire le dispositif qui avait été adopté par notre assemblée, avec une sanction pouvant aller jusqu’à 3 % du chiffre d’affaires annuel. Sous réserve de l’adoption de cet amendement, notre groupe sera favorable aux articles dont l’examen a été délégué à notre commission.
Mme Sophie Ricourt Vaginay (UDR). S’agissant de la transposition des directives européennes, je dirai simplement que nous prônons évidemment la simplification.
S’agissant des actions de groupe, nous considérons qu’elles peuvent avoir un intérêt en matière notamment de consommation ou de santé, mais que nous devons absolument nous prémunir des dérives. Elles ne doivent pas devenir un instrument de pression abusive contre les entreprises, au risque de fragiliser notre économie et nos emplois.
S’agissant de la carte bleue européenne, nous pensons que l’Europe doit attirer les talents pour rester compétitive dans un monde désormais globalisé. Toutefois, en simplifiant l’accès des travailleurs qualifiés de pays tiers à notre marché du travail, la carte bleue européenne soulève des interrogations légitimes.
D’abord, le renforcement de l’attractivité de l’Europe ne doit pas compromettre la maîtrise de l’immigration. En abaissant les seuils salariaux et en assouplissant les critères, nous risquons d’encourager des flux migratoires qui échappent à tout contrôle. La souveraineté de chaque État membre doit rester centrale en la matière.
Ensuite, nous devons protéger nos travailleurs : avant d’aller chercher les talents ailleurs, il est essentiel de donner la priorité à l’emploi et à la formation des citoyens européens. Il faut certes permettre une immigration qualifiée, mais uniquement pour répondre aux besoins réels des secteurs en tension comme la technologie ou la santé.
Enfin, n’oublions pas qu’en attirant des travailleurs qualifiés, nous risquons de priver leurs pays d’origines de leurs forces vives, aggravant les inégalités mondiales. Une politique responsable ne doit pas les vider de leurs talents au profit exclusif de l’Europe.
En résumé, nous soutenons une immigration qualifiée à condition qu’elle reste ciblée, contrôlée et équilibrée. Nous devons éviter les excès qui affaibliraient à la fois nos nations et les pays d’origine. La sécurité économique et sociale de l’Europe, comme celle de ses citoyens, doit primer.
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Il est vrai que les Ddadue sont souvent des textes fourre-tout et qu’il ne faut pas chercher de lien entre leurs différents articles. Les sujets traités n’en manquent pas pour autant d’intérêt. Celui d’aujourd’hui nous offre en outre l’occasion de remettre des dispositions importantes sur la table, celles concernant les actions de groupe.
Je vous remercie, chers collègues, d’avoir cité les travaux que j’ai menés sur ce sujet avec Laurence Vichnievksy, dont je tiens à rappeler l’engagement et dont je regrette l’absence aujourd’hui. J’insiste : la réécriture que je vous propose ce matin est issue de la proposition de loi votée à l’unanimité lors de la législature précédente, qui avait fait l’objet de travaux de fond et avait été soumise à l’avis du Conseil d’État. Elle s’appuyait sur le rapport de la mission d’information, fruit de très nombreuses auditions et de longues heures de travail et qui constituait en quelque sorte son étude d’impact. Merci d’être nombreux à vous ranger à ma proposition de réécriture qui vise à ouvrir de nouveaux droits au consommateur et à faciliter l’accès à la justice.
J’entends les inquiétudes de certains. Il ne s’agit pas de nuire à nos entreprises, mais de constater que les craintes, il y a dix ans, d’un emballement du système des actions de groupe ne se sont pas avérées. Loin de vouloir singer les class actions à l’américaine et tous leurs excès, nous proposons de desserrer le nœud qui entrave notre action de groupe et la rendre plus lisible. Il n’existe aujourd’hui pas moins de sept régimes différents ! Les associations agréées ont de grandes difficultés à lancer des actions, y compris pour des raisons de coût. Je crois par ailleurs les entreprises françaises plus vertueuses que certaines entreprises anglo-saxonnes ; sans doute notre conception européenne du droit continental nous met-elle à l’abri de certains excès. Je le répète : il ne s’agit pas d’abattre le monde économique, mais de faciliter l’accès des consommateurs, qui sont aussi citoyens, à la justice.
Chapitre II – Dispositions relatives au droit de la commande publique
Article 13 (art. L. 2172-3 du code de la commande publique) : Mise en conformité du champ d’application du partenariat d’innovation avec le droit de l’Union européenne
Amendement CL1 de M. Bérenger Cernon
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Cet amendement porte sur le champ d’intervention des jeunes entreprises innovantes, qui n’est pas l’objet de l’article 13 : je lui donne un avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 non modifié.
Chapitre III – Dispositions relatives au code de la consommation
Article 14 (articles 62, 63, 64, 64-1 [nouveau], 64-2 [nouveau], 65, 76-1 à 76-5 [nouveaux], 77 et 112 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le socle procédural commun de l’action de groupe, prévu dans la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle.
Amendement CL18 de M. Philippe Gosselin et sous-amendements CL67 de M. Bérenger Cernon et CL68 de Mme Sylvie Ferrer
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Voici le fameux amendement de réécriture qui, plutôt que la transposition a minima envisagée dans le projet de loi, vous propose une adaptation fondée sur nos travaux des années passées et visant à aller plus loin que le dispositif existant. Il ouvre ainsi la qualité pour agir aux associations régulièrement déclarées depuis au moins deux ans et aux associations ad hoc. Il élargit le champ matériel de l’action de groupe, aujourd’hui cantonnée à certains secteurs. Il supprime la mise en demeure, apparue inutile, comme préalable obligatoire à l’engagement de l’action de groupe dans certaines matières. Il crée une sanction civile à l’encontre des comportements dolosifs, sans qu’il s’agisse de dommages et intérêts en tant que tels. Surtout, il harmonise les régimes de l’action de groupe en limitant les exceptions, car la procédure est aujourd’hui illisible et méconnue. S’il était voté, cet amendement réécrirait entièrement l’article 14 et nécessiterait la suppression des articles 15 à 19.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Notre groupe soutient cet amendement de réécriture mais souhaite supprimer le délai de deux ans d’existence imposé aux associations pour pouvoir engager une action de groupe.
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Lors du débat que nous avons eu au sujet du délai, la durée de deux ans a fait consensus. Je vous propose donc de ne pas le mettre en cause, d’autant plus que les associations ad hoc auront aussi la qualité pour agir. Quant au nombre de personnes nécessaires pour créer une association ad hoc, qui est l’objet du sous-amendement CL68, il a également fait l’objet d’un consensus – partant de cent, nous étions arrivés à cinquante, alors que vous proposez vingt. Je vous suggère donc, pour conserver l’équilibre auquel nous étions arrivés, de retirer ces deux sous-amendements ; à défaut, avis défavorable.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Je les retire.
M. Jordan Guitton (RN). L’amendement de réécriture doit être adopté, car il reflète parfaitement le travail parlementaire réalisé lors de la législature précédente. Quant aux questions soulevées par les sous-amendements, auxquels notre groupe est défavorable, elles devront être traitées ultérieurement, une fois que les effets de la loi auront pu être mesurés.
M. Philippe Latombe (Dem). Notre groupe soutiendra également la réécriture proposée, issue d’un consensus. Les dispositions relatives aux actions de groupe touchent directement nos concitoyens. C’est vrai par exemple s’agissant des données personnelles, qui font l’objet d’atteintes de plus en plus nombreuses depuis quelques mois, ou encore des données de santé. Il serait délétère de ne pas répondre à la demande de nos concitoyens, d’autant plus que nous avons eu le temps, lors de la précédente législature, de mener un travail approfondi – lequel avait été validé par le Conseil d’État, ce qui est assez rare pour un travail d’initiative parlementaire. Il ne me semble pas souhaitable de revenir sur les équilibres auxquels nous étions parvenus, et je salue à cet égard le retrait des sous-amendements. Restons-en au travail de compromis qui avait été réalisé.
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Merci pour ces propos. Je le répète, les dispositions qui vous sont proposées sont le fruit d’un travail de longue haleine. Je suis convaincu que l’évaluation des politiques publiques, trop peu fréquente, est pourtant essentielle. C’est ce que nous avons fait, en commençant par l’évaluation de la loi « Hamon », à l’issue de laquelle nous avons fait le constat d’une insuffisance des dispositions existantes. Je salue l’esprit de responsabilité qui a présidé à nos travaux, dont témoigne aussi le retrait des deux sous-amendements.
Les sous-amendements sont retirés.
La commission adopte l’amendement de rédaction de l’article.
En conséquence, les amendements suivants tombent.
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 ainsi rédigé.
Article 15 (articles L. 77-10-3 à L. 77-10-8, L. 77-10-11, L. 77-10-16, L. 77-10-17, L. 10-77-18 à L. 77-10-25, L. 77-10-26 à L. 77-10-28 [nouveaux] du code de justice administrative) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le socle procédural commun de l’action de groupe devant le juge administratif dans le code de justice administrative.
Amendement de suppression CL19 de M. Philippe Gosselin
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. En cohérence avec l’adoption de l’amendement de réécriture que nous venons d’adopter, je propose de supprimer l’article 15.
La commission adopte l’amendement, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 15.
En conséquence, les amendements suivants tombent.
Article 16 (articles 37 et 125 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés) : Modification de la loi Informatique et libertés pour transposer la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives.
Amendement de suppression CL20 de M. Philippe Gosselin
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Toujours par cohérence avec l’adoption de l’amendement CL18, je propose de supprimer l’article 16.
La commission adopte l’amendement, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 16.
En conséquence, l’amendement suivant tombe.
Article 17 (articles L. 621-7, L. 623-1, L. 623-2, L. 623-2-1 [nouveau], L. 623-3, L. 623-3-1 à L. 623-3-3 [nouveaux], L. 623-7, L. 623-22, L. 623-23, L. 623-27, L. 623-31, L. 623-32, L. 623-33 à L. 624-3 [nouveaux] et L. 813-1 à L. 813-3 [nouveaux] du code de la consommation) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le code de la consommation.
Amendement de suppression CL21 de M. Philippe Gosselin
M. Philippe Gosselin, rapporteur. Même cause, même conséquence. Cela vaudra aussi pour les deux prochains articles.
La commission adopte l’amendement, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 17.
En conséquence, les amendements suivants tombent.
Article 18 (articles L. 621-7, L. 623-1, L. 623-2, L. 623-2-1 [nouveau], L. 623-3, L. 623-3-1 à L. 623-3-3 [nouveaux], L. 623-7, L. 623-22, L. 623-23, L. 623-27, L. 623-31, L. 623-32, L. 623-33 à L. 624-3 [nouveaux] et L. 813-1 à L. 813-3 [nouveaux] du code de la consommation) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le code de la consommation.
La commission adopte l’amendement de suppression CL22 de M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 18.
En conséquence, les amendements suivants tombent.
Article 19 (articles L. 1143-1 et L. 1143-2 du code de la santé publique) : Adaptation du code de la santé publique aux exigences de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives
La commission adopte l’amendement de suppression CL23 de M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 19.
En conséquence, l’amendement suivant tombe.
Article 42 (articles L. 411‑4, L. 421‑11, L. 421‑22, L. 441‑6, L. 442‑1, L. 442‑2 et L. 443‑1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) : Transposition de la directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié
Amendement CL16 de Mme Léa Balage El Mariky
M. Philippe Gosselin, rapporteur. Les conditions d’octroi des titres de séjour sont autant de motifs de non-renouvellement ou de retrait du titre si elles ne sont plus remplies.
En empêchant l’État de refuser le renouvellement d’un titre alors même qu’il serait avéré que l’entreprise de l’employeur a été créée ou opère principalement dans le but de faciliter l’entrée de ressortissants de pays tiers, cet amendement risque sérieusement d’encourager la fraude. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL17 de Mme Léa Balage El Mariky
Mme Sandra Regol (EcoS). Le texte prévoit que l’État peut refuser de délivrer une carte de séjour lorsque l’entreprise de l’employeur a été créée dans le but principal de faciliter l’entrée des ressortissants étrangers. Conformément à l’intention du législateur européen, notre amendement vise à encadrer ce pouvoir de refus.
M. Philippe Gosselin, rapporteur. Nous n’avons pas vocation à transposer jusqu’aux considérants des directives européennes : les articles des Ddadue sont déjà suffisamment précis et volumineux. Au reste, la mention de faute mineure que vous souhaitez ajouter me semble superflue. Enfin, dans chaque préfecture, il existe un référent attractivité, chargé de répondre aux sollicitations des entreprises et de « veiller au grain ». Essayons plutôt de renforcer ce dialogue, généralement très fructueux. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL11 de M. Matthias Renault
M. Philippe Gosselin, rapporteur. Avis défavorable. Vous trouverez dans le rapport plusieurs éléments répondant à vos arguments, mais je rappellerai néanmoins quelques chiffres : en 2023, 8 616 passeports talent-carte bleue européenne ont été accordés à des travailleurs hautement qualifiés – titulaires de doctorat, ingénieurs, médecins aussi, même si leur statut est un peu particulier. Ajoutés aux 4 031 titres accordés de droit au titre du regroupement familial, cela ne fait jamais qu’un total de 12 647 titres délivrés : on est loin d’un déferlement, contrairement à ce que l’on entend parfois.
Les entreprises sont très demandeuses de ce dispositif, notamment lorsqu’elles ont des besoins particuliers – je pourrai vous donner des exemples. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 42 non modifié.
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, ainsi modifiées.
La réunion est suspendue de dix heures quinze à dix heures trente.
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Puis, la Commission examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au renforcement de la sûreté dans les transports (n° 134) (M. Guillaume Gouffier-Valente, rapporteur).
M. le président Florent Boudié. Cette proposition de loi déposée par le sénateur Philippe Tabarot a été adoptée par le Sénat le 23 février 2024.
Nous en avions commencé l’examen en commission le 15 mai dernier, examinant environ la moitié des articles. Compte tenu de la dissolution, ces travaux sont devenus caducs et nous devons tout recommencer depuis le début. Le texte est inscrit en séance publique à compter du 10 décembre.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Ce texte renvoie à un devoir fondamental de l’État : assurer la sécurité de nos concitoyens et le bon fonctionnement des services publics de transport. Il concerne des lieux dans lesquels les enjeux sécuritaires sont très spécifiques : les transports en commun, notamment ferroviaires. Son examen, commencé au printemps, avait été interrompu par la dissolution. À l’époque, j’en étais le chef de file pour le groupe Renaissance et Clément Beaune le rapporteur – je tiens à saluer le travail qu’il avait engagé, et qui a servi de base à nos réflexions.
Afin d’échanger avec l’ensemble des acteurs concernés, j’ai mené dix-huit auditions, toutes ouvertes aux membres de la commission, qui m’ont permis d’entendre une soixantaine de personnes. J’ai également effectué trois déplacements – un dernier sera programmé dans les jours à venir, avant une visite du centre de coordination opérationnelle de sécurité (CCOS), probablement en début d’année prochaine.
Les enseignements de l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 – et je tiens à saluer la qualité du service de sûreté déployé lors de cet événement majeur – nous permettent de reprendre ce texte avec quelques réponses que nous n’avions pas au printemps dernier. Plus globalement, à l’heure de l’ouverture à la concurrence de nos réseaux ferrés, et en particulier du réseau de transports en commun d’Île-de-France, l’avenir de l’organisation et de la coordination de nos politiques de sûreté dans les transports est un enjeu majeur. En séance, je demanderai au Gouvernement de nous remettre un rapport sur ce sujet, qui fera peut-être l’objet de travaux complémentaires de notre commission – j’en ai notamment parlé avec Roger Vicot et Ian Boucard.
Depuis plusieurs années, les pouvoirs publics encouragent fortement l’utilisation des transports collectifs. Ces efforts commencent à porter leurs fruits, puisque leur fréquentation augmente chaque année. Toutefois, si les transports en commun sont devenus incontournables pour la mobilité de nombre de nos concitoyens, ils sont aussi profondément vulnérables. Carrefours d’échanges et d’activités variés, les gares sont des lieux publics particuliers, souvent confinés, qui rassemblent une très forte concentration de personnes : elles sont donc structurellement fragiles et particulièrement exposées aux incivilités, à la délinquance et au risque terroriste.
Du point de vue sécuritaire, les véhicules de transport eux-mêmes sont des espaces particuliers, exigus et clos, parfois déserts, au contraire très fréquentés aux heures de pointe. Dès lors, de nombreuses formes d’incivilité peuvent s’y développer – vols, agressions, atteintes sexistes et sexuelles –, contribuant à un sentiment d’insécurité. Les femmes, en particulier, peuvent s’y sentir menacées : en France, 87 % des usagères déclarent ainsi y avoir déjà été victimes de harcèlement sexiste, de harcèlement sexuel, d’agression sexuelle ou de viol.
La question de la sécurité dans les transports est donc déterminante, du point de vue tant des usagers que du bon fonctionnement de ce service public. D’après les données de l’observatoire des mobilités de l’Union des transports publics et ferroviaires (UTPF), en 2023, la sécurité était le premier critère de choix d’un mode de transport. En outre, ce « continuum d’incivilités » – pour reprendre les termes de Gilles Savary – est source d’incidents en tout genre sur nos réseaux et de nombreuses interruptions de service, qui perturbent fortement les trajets de nos concitoyens.
Permettez-moi d’abord de dresser un rapide état des lieux.
Je rappelle d’abord que, si les chiffres de la délinquance dans les transports sont en baisse, la gravité des incidents, elle, augmente, avec le développement de phénomènes comme les rixes. Le très fort sentiment d’insécurité associé aux transports en commun – il concernait 32 % des personnes interrogées par l’UTPF – est confirmé par les données de la réalité : pour la seule année 2023, on recense 90 889 victimes de vol sans violence, 6 416 victimes de vol avec violence, 7 620 victimes de coups et blessures volontaires, 2 407 victimes de violences sexuelles et 4 199 personnes dépositaires de l’autorité publiques victimes d’outrages et de violences. L’Île‑de‑France, qui concentre la moitié de ces actes, est particulièrement touchée.
Depuis plusieurs années, le législateur s’est donc pleinement saisi de cette question, avec l’adoption, en 2016, de la loi Savary-Le Roux, relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs. Le renforcement des effectifs des forces de l’ordre ces dernières années participe également à cette sécurisation. Ces actions commencent à porter leurs fruits : la baisse des chiffres de la délinquance dans les transports, amorcée en 2019, se poursuit, à l’exception notable et insupportable des violences sexistes et sexuelles. J’en profite pour saluer le travail de l’ensemble des agents des forces de sécurité intérieure.
La situation demeure malgré tout préoccupante : le nombre de victimes de violences sexuelles connaît une augmentation continue – + 4 % en 2023 par rapport à 2022, et + 18 % par rapport à 2018 – et le risque d’attentat terroriste dans les gares, les véhicules de transport ou leurs abords immédiats reste élevé. Les opérateurs ont également constaté le développement de comportements dangereux : selon la SNCF, l’introduction d’objets dangereux a triplé au cours des cinq dernières années. Les agents sont pris pour cible de plus en plus souvent : les atteintes physiques sur les agents de la RATP en mission de contrôle sur le réseau de surface ont augmenté de 8 % en 2023, et le chiffre est même de 37 % s’agissant des conducteurs de bus. Enfin, le sentiment d’insécurité se renforce : dans son rapport d’enquête relatif au vécu et ressenti en matière de sécurité, qui repose sur des éléments déclaratifs et non sur des dépôts de plainte, le service statistique ministériel de la sécurité intérieure chiffre la hausse à 10 % entre 2022 et 2023.
Il est important d’avoir ce contexte en tête à l’heure d’examiner cette proposition de loi du sénateur Philippe Tabarot, dont je salue l’engagement – nous l’avons auditionné lundi après-midi. Adoptée en février 2024 par le Sénat, elle avait été largement enrichie en commission, à l’initiative de sa rapporteure Nadine Bellurot, puis en séance publique. Mais elle peut encore être améliorée et je vous proposerai plusieurs ajustements.
Cette proposition de loi, qui porte des mesures concrètes et pragmatiques pour améliorer la situation de la sécurité dans nos transports publics, s’articule autour de trois volets.
Le chapitre Ier, l’un des plus importants, contient des mesures d’ordre régalien pour clarifier et renforcer le continuum de sécurité. Les articles 1er à 3 visent à renforcer les pouvoirs des agents de la sûreté ferroviaire, regroupés au sein de la Suge (surveillance générale) pour la SNCF et du groupe de protection et de sécurité des réseaux (GPSR) pour la RATP. Je ne souhaite pas atténuer ces dispositions, et encore moins y renoncer, mais je vous proposerai, s’agissant de l’article premier, un amendement pour rendre le dispositif des saisies plus opérationnel et respectueux de nos libertés publiques et du droit de propriété, et porterai un œil bienveillant sur les autres amendements allant dans ce sens.
Le chapitre II inclut l’entrée d’Île‑de‑France Mobilités (IDFM) au CCOS de la préfecture de police de Paris. J’y suis tout à fait favorable, même si je vous proposerai de revoir la rédaction du dispositif. Je proposerai que le périmètre des missions d’IDFM reste inchangé mais, comme l’a souligné sa présidente, Valérie Pécresse, que j’ai pu entendre lundi dernier, il est surprenant qu’IDFM soit absent d’un centre de commandement qu’elle a pourtant largement contribué à financer.
Le chapitre III constitue une avancée dans l’utilisation des outils numériques – voire de l’intelligence artificielle – pour assurer la sécurité dans les transports en commun. Si les dispositions proposées font l’objet de garanties solides pour les libertés fondamentales, ce qui est évidemment indispensable, elles ne me semblent pas toutes nécessaires dans un texte législatif. Suite à mes échanges avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), je vous proposerai de supprimer les articles 9 et 10, dont les mesures relèvent de la « surlégislation » ou du domaine réglementaire.
Certaines dispositions restent très attendues de nos agents, comme la pérennisation de l’expérimentation du port de caméras-piétons pour les agents de contrôle, qui a pris fin le 30 septembre, le lancement d’une expérimentation similaire pour les conducteurs – c’est l’objet de l’article 8 bis – ou encore celle sur la captation sonore autour de l’habitacle des conducteurs de bus – c’est l’objet de l’article 11, qui fera sans aucun doute l’objet d’un débat intense, bien légitime. Plusieurs amendements tendent à le supprimer, mais j’essaierai de vous convaincre de son importance, notamment au regard des difficultés rencontrées par les conducteurs. Un tel dispositif est d’ailleurs déjà utilisé par plusieurs opérateurs. Il n’en restera pas moins nécessaire de veiller à bien l’encadrer juridiquement.
Volet pénal du texte, le chapitre IV constitue la réponse aux incivilités et fraudes dans les transports en commun. C’est sans doute celui sur lequel je vous proposerai les modifications les plus importantes, afin de restreindre le périmètre du délit d’incivilité d’habitude prévu à l’article 12, de supprimer la peine complémentaire d’interdiction de paraître dans les transports en commun prévue à l’article 13, difficile à appliquer, et de rendre plus lisible l’article 14 qui réprime l’abandon de bagages, intentionnel ou non. Par cohérence avec la suppression que je vous propose à l’article 13, je vous inviterai également à supprimer l’article 16.
J’insiste enfin sur l’article 19, qui vise à fiabiliser en temps réel les adresses des contrevenants, parachevant l’application de la loi Savary-Le Roux. Le taux de recouvrement des amendes est en effet très faible, alors même que la seule fraude représente une perte financière estimée entre 600 et 800 millions d’euros par an dans l’ensemble du territoire – soit, peu ou prou, le montant de l’effort budgétaire demandé à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025.
Un dernier mot sur le fond : contrairement à une idée préconçue, cette proposition de loi n’est pas centrée uniquement sur l’Île-de-France, même si celle-ci concentre des enjeux de sécurisation spécifiques au regard de sa démographie et de son réseau de transport sans équivalents. Je me suis ainsi rendu à Lille, et je suis tout prêt à me déplacer à nouveau en province.
Reste que ce texte ne sera pas le grand soir de la sûreté dans les transports en commun : nous ne pourrons pas faire l’économie, dans les mois et les années qui viennent, d’une réflexion beaucoup plus large sur nos attentes à l’égard de cette mission de service public, son organisation et sa coordination dans l’ensemble du territoire.
À l’issue de ces travaux, je suis profondément convaincu de la nécessité de légiférer sur ce sujet : nous le devons à nos concitoyens, qui attendent, à raison, des services de transports publics plus fiables et plus sûrs, mais aussi à l’ensemble des agents qui les font vivre et fonctionner au quotidien.
M. le président Florent Boudié. Nous en venons aux orateurs des groupes.
M. Pascal Jenft (RN). Depuis plus de dix ans, notre pays est confronté à une expansion de la violence et vit sous la menace terroriste. L’ultraviolence devient presque banale, et les transports publics sont un des premiers théâtres de cet ensauvagement. Pour la seule année 2023, 124 570 personnes y ont ainsi été victimes de vol ou de violence.
Cette proposition de loi avait été rédigée pour combler les lacunes sécuritaires des transports et anticiper des événements comme les Jeux olympiques et paralympiques de Paris, qui suscitaient l’inquiétude des dirigeants et des riverains. Le fait qu’aucun attentat n’ait été déploré et que le nombre d’agressions ait été moins lourd qu’attendu est notamment dû à la forte mobilisation des forces de l’ordre et des agents de sûreté.
Bien que les Jeux olympiques et paralympiques de Paris n’aient pas été source d’une explosion de la délinquance, ce texte conserve tout son intérêt : il est impératif de rendre durablement la tranquillité aux usagers des transports.
L’héritage des Jeux olympiques est clair : la présence des forces de l’ordre et des agents de sûreté est une des clés de voûte de la sécurité. Si le groupe Rassemblement national accueille donc favorablement cette proposition de loi, qui propose un début de réponse à l’escalade de la violence dans les transports en commun, il estime que certaines de ses dispositions ne sont ni nécessaires, ni souhaitables. En effet, il s’agit à certains égards d’un texte d’affichage. On peut traquer le vapoteur, le mendiant et l’accordéoniste amateur mais, si ces infractions nuisent au confort et à la quiétude des passagers, elles ne sont pas des violences. La délictualisation de ces incivilités pourrait contrevenir au principe de proportionnalité. Par ailleurs, des amendes existent déjà, mais qui sont faiblement recouvrées. Ajouter une peine d’emprisonnement de six mois serait vain, puisque, même appliquée, elle serait aménagée. Mieux vaut punir réellement les incivilités en garantissant l’application effective des lois en vigueur.
D’autre part, nous sommes défavorables à certains articles qui nous semblent porter atteinte au droit de propriété et à la vie privée, sans pour autant garantir la prévention ou la diminution des crimes et délits dans les transports publics – je pense notamment à la confiscation des objets non interdits ou à la généralisation des enregistrements sonores dans les transports. Pour garantir l’efficacité de ce texte, il faut viser juste, ne pas s’égarer et ne pas faire de zèle : les Français attendent avant tout la neutralisation et la sanction des agresseurs sexuels, des individus violents et des pickpockets, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs. Les véhicules de transport en commun et leurs abords doivent redevenir des espaces de libre circulation sécurisés.
À l’exception de quelques mesures, cette proposition de loi prévoit des dispositions opportunes et pertinentes pour commencer à répondre concrètement aux problèmes de sécurité dans les transports, et mérite d’être améliorée. Mais nous insistons sur le fait que ce n’est qu’un début : l’insécurité des transports étant, par nature, multifactorielle, le renforcement des pouvoirs des agents de sûreté ne suffira pas à endiguer le problème. Les textes en vigueur doivent être rigoureusement appliqués par le corps judiciaire, qu’il s’agisse de recouvrer une amende, de prononcer des peines de prison ou d’expulser des étrangers délinquants.
M. Vincent Caure (EPR). Le groupe EPR se réjouit de pouvoir enfin, et malgré les rebondissements de ces derniers mois, reprendre l’examen de la proposition de loi du sénateur Tabarot, tant attendue – d’autant qu’avec l’organisation réussie des Jeux olympiques et paralympiques de Paris cet été, nous avons désormais un peu de recul.
La sûreté dans les transports est un enjeu majeur dans notre société. D’abord, parce qu’ils recouvrent à la fois des lieux ouverts d’une grande diversité et des véhicules confinés, les deux également nombreux et faciles d’accès. Ensuite, parce que l’évolution du tissu urbain et des pratiques individuelles a poussé nos concitoyens à recourir de plus en plus aux transports en commun. Au cours des dernières décennies, ces points névralgiques ont ainsi été le théâtre d’attaques, notamment terroristes, en France comme en Europe.
Garantir la sécurité dans les transports, c’est offrir à chacun d’entre nous la possibilité de voyager librement et sans crainte. C’est aussi répondre au mieux aux incivilités et à la délinquance du quotidien. C’est dans cette perspective que le législateur a investi ce domaine, il y a bientôt dix ans : la loi Savary-Le Roux, complétée depuis par d’autres textes, comme la loi d’orientation des mobilités, a ainsi marqué une étape importante. Au regard des évolutions de la menace, il nous revient désormais de compléter ces textes. Cette proposition de loi est donc très attendue, tant par les acteurs du transport, que notre rapporteur a pris soin d’auditionner, que par nos concitoyens.
Nous devons respecter le nécessaire équilibre entre, d’une part, l’extension raisonnée et raisonnable des mesures offertes aux autorités organisatrices de la mobilité et à l’ensemble des agents du continuum de sécurité pour agir efficacement au quotidien, et d’autre part les garanties apportées aux libertés individuelles et collectives. Pour les femmes en particulier, le sentiment d’insécurité peut constituer un frein important à l’utilisation des transports en commun : face aux vols, coups et blessures volontaires ou outrages et violences contre les personnes dépositaires de l’autorité publique – qui ont diminué grâce au travail quotidien des agents de la Suge et du GPSR, dont je salue l’engagement et le professionnalisme sans faille – les violences sexuelles sont désormais les seules en augmentation – + 4% en 2023 par rapport à 2022, et + 18 % par rapport à 2018. Pour aider les agents de la Suge et du GPSR dans leurs missions, nous souhaitons donc renforcer leurs prérogatives, en leur permettant par exemple, dans un cadre bien défini, de réaliser des palpations sans décision préfectorale préalable dès lors que des éléments objectifs laissent à penser qu’une personne pourrait détenir des objets susceptibles de présenter un risque pour la sécurité.
Le groupe EPR salue le travail du rapporteur, engagé de longue date sur ce texte, et soutiendra les modifications qu’il propose. Dans la même volonté d’amélioration du texte, nous avons déposé plusieurs amendements visant notamment à permettre aux agents d’intervenir sur la voie publique ou à percevoir le montant des amendes après avoir constaté certains délits, comme la pénétration dans une zone interdite au public ou dans les espaces affectés à la conduite des trains. Pour des motifs évidents qui tiennent à la situation des personnes concernées, notre groupe tient aussi à supprimer la mendicité de la liste des infractions pouvant constituer un délit d’incivilité d’habitude prévues par le texte. Enfin, nous avons déposé deux amendements tendant à supprimer les articles 13 et 16, dont les dispositions risquent de se révéler inopérantes.
Souscrivant à la fois aux constats dressés par le rapporteur et aux solutions proposées, le groupe EPR soutiendra ce texte et, pour les Français et l’ensemble des usagers des transports, espère qu’il sera adopté.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Contrairement à ce qu’indique son titre, ce texte vise la sécurité, et non la sûreté, qui est la protection des citoyens vis-à-vis des institutions et des pouvoirs publics en général. C’est dommage, car dans le monde de surveillance généralisée que vous construisez brique après brique, nous aurions bien aimé aborder la sûreté !
Ce nouveau texte sécuritaire prévoit, entre autres mesures répressives, l’élargissement des compétences des agents et du pouvoir de surveillance, ainsi que le retour de la vidéosurveillance algorithmique avant même la fin de l’expérimentation décidée dans la loi relative aux Jeux olympiques, en mars 2025. C’est un comble : nous ne croyons même pas en nos propres décisions !
Vous voulez aggraver la répression pénale, y compris pour ceux qui se trompent de place dans le train, créer un délit d’incivilité d’habitude… Ce serait risible si ce n’était aussi grave. Vous voulez surveiller toujours plus, contraindre jusqu’aux moindres faits et gestes.
La lutte contre le terrorisme et les agressions, y compris sexistes et sexuelles, n’est qu’un prétexte pour créer de nouveaux délits. En quoi l’interdiction d’introduire un animal dans un wagon y contribuera-t-elle ? En quoi un alourdissement des sanctions prévues pour les mictions ou l’ivresse publique manifeste dans les transports réduira-t-il la fréquence de ces atteintes à la tranquillité publique et renforcera-t-il la sécurité ?
La création d’une peine complémentaire d’interdiction de paraître est particulièrement grave, car elle ne pourra être appliquée qu’en recourant à la reconnaissance faciale – nous ne croyons pas à la sécurisation des fichiers que vous proposez.
Le texte reprend la notion de « continuum de sécurité », qui n’est que l’autre nom d’une appropriation par l’État des moyens des autres, y compris en matière de sécurité. Vous pourrez en parler aux maires, qui y sont confrontés en permanence.
Si nous voulons apaiser les problèmes dans les transports, il vaudrait mieux accroître la présence d’agents chargés de la conciliation, améliorer l’accessibilité, revoir les tarifs, voire envisager la gratuité. Nous nous opposerons à ce texte article par article.
M. Roger Vicot (SOC). En février, vous arguiez que ce texte était indispensable à la sécurité des transports pendant les Jeux olympiques (JO). Dissolution oblige, nous ne l’avons pas voté et l’événement s’est bien déroulé. Voilà qui relativise le caractère d’absolue nécessité que vous conférez aux présentes dispositions.
L’intitulé du texte ne peut que séduire : qui s’opposerait à une sécurité accrue dans les transports ? Nous la souhaitons, comme nous souhaitons une meilleure coordination des forces de sécurité dans ce secteur, notamment la Suge et le GPSR.
Mais le diable se cache dans les détails. Par exemple, vous nous demandez d’accorder à des agents de la Suge ou du GPSR le droit de procéder à des palpations « si des éléments objectifs laissent à penser qu’une personne pourrait détenir des objets susceptibles de présenter un risque pour la sécurité des personnes ou des biens ». Vous proposez donc d’accorder les mêmes pouvoirs aux agents de la Suge, qui sont formés en quatre mois, qu’aux membres de la police nationale, dont la formation dure un an.
De même, le texte autorise à retirer les objets qui, « par leur nature, leur quantité ou l’insuffisance de leur emballage, peuvent être dangereux, gêner ou incommoder les voyageurs ». Mais qu’est-ce qu’un emballage insuffisant ? Et un objet incommodant ? Le risque d’un usage arbitraire de ces dispositions est trop grand.
D’autres éléments nous inquiètent, comme le manque d’encadrement du recours à l’intelligence artificielle. Nous en avons déjà longuement parlé pendant l’examen du projet de Lopmi (loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur) il y a deux ans, puis au moment du projet de loi relatif aux JO, l’an dernier. Le recours à cette technologie n’est pas une simple question technique : il implique un choix de société. Nous avons les moyens techniques de basculer dans une société de surveillance – la Chine continentale en offre un exemple caricatural. Charge à nous de les contrôler.
Parmi les dispositions inquiétantes, signalons en outre l'interdiction de paraître dans les transports publics et le durcissement des sanctions pour oubli de bagage, qui atteignent un niveau terrible.
M. Ian Boucard (DR). Cette proposition de loi de M. Tabarot, que je salue pour la qualité de son travail, a été adoptée en février 2024 au Sénat. Elle vise à renforcer les prérogatives des agents de sûreté interne de la SNCF et de la RATP, à améliorer la coopération dans le continuum de sécurité et à mettre à jour l’arsenal pénal. Elle répond aux attaques qui avaient touché les gares françaises en 2023, en étoffant les outils de prévention et de sanction des atteintes à la sûreté.
Les gares et les réseaux de transports publics sont des lieux vulnérables parce qu’ouverts, et de nouvelles menaces se développent. Ce texte vise à pallier les insuffisances du droit en vigueur, grâce à des mesures techniques, légales et organisationnelles. Il permettra en outre de lutter contre la fraude dans les transports publics.
Nos concitoyens se préoccupent de l’insécurité, dont le niveau est alarmant : en 2023, plus de 111 000 victimes de vols et de violences ont été recensées dans les transports en commun, dont près de 7 620 agressions physiques et 2 407 agressions à caractère sexuel. Cette proposition de loi apportera une réponse pragmatique et nécessaire à la demande croissante de protection des usagers.
Enfin, il nous faut utiliser les technologies disponibles au service de la sécurité de nos concitoyens. Nous défendrons une approche équilibrée et proportionnelle concernant la restriction des droits.
Nous voterons pour ce texte, qui est le fruit d’une large concertation avec les acteurs de terrain. Il représente un compromis qui doit transcender les clivages partisans et rassembler tous les élus soucieux de la sécurité des Français. Nous tenons à doter les agents de moyens nécessaires pour assurer la protection de tous les usagers, sans pour autant obérer leurs libertés fondamentales.
Mme Sandra Regol (EcoS). Les transports en commun soulèvent des enjeux multiples – économiques, de cohésion des territoires et écologiques. Ils doivent bénéficier des moyens nécessaires à leur fonctionnement et à la sécurité de leurs usagers. Mais le présent texte ne traite pas de ces aspects.
La demande de sécurité des usagers et des personnels des transports est légitime, mais ce texte fera empirer la situation, car l’obsession sécuritaire n’a rien à voir avec l’amélioration de la sécurité. Les sénateurs ont voulu montrer les muscles, mais le résultat est approximatif : une partie du texte est inapplicable, l’autre est déjà appliquée. Cette shadockisation de notre travail confine au ridicule.
En février, vous nous pressiez d’adopter ce texte, sans quoi la sécurité des Jeux ne serait pas garantie. Ils se sont bien déroulés sans lui, mais il n’empêche que vous nous demandez à nouveau de l’adopter en urgence.
Nous nous battrons sur l’article 1er, dont une part des dispositions ne sont que de l’affichage, puisqu’elles sont déjà applicables sur décision préfectorale – et l’ont d’ailleurs déjà été.
Nous nous battrons aussi, comme l’an dernier, pour la suppression des articles 9 et 10, mais avec cette fois le soutien du rapporteur – preuve que la discussion permet d’avancer.
La création d’une peine d’interdiction d’accès aux transports en commun vous permet encore une fois de montrer les muscles, mais sans aucune réflexion pratique : la SNCF et la RATP ne pourront évidemment pas déployer un agent de sécurité tous les mètres pour la faire respecter ! Elle sera donc inapplicable – sauf à ce que vous projetiez un recours généralisé à l’intelligence artificielle et à la reconnaissance faciale ? Le Conseil constitutionnel a déjà encadré le recours à ces technologies. Malgré cela, le Sénat, qui en est friand, continue d’essayer de les imposer, progressivement, par toutes les voies possibles. Ce n’est pas sérieux !
Ce texte est un grand fourre-tout dogmatique d’obsessions diverses, peu applicables et au fort penchant techno-solutionniste. Comment condamner à la même peine l’atteinte à la vie d’autrui et le vapotage ? Le Parlement ne peut pas faire cela. Et pourquoi cet acharnement systématique sur les plus faibles, ceux qui vivent dans la rue, qui mendient ? Cela n’ennoblit pas notre assemblée.
Outre les amendements de suppression déposés par nos collègues, nous défendrons des amendements de repli, car l’esprit du droit et de l’égalité manque cruellement dans ce texte. S’il reste en l’état, c’est-à-dire dangereux et approximatif, nous aurons le devoir de le rejeter.
M. Philippe Latombe (Dem). Il nous faut appréhender le problème de l’insécurité dans les transports, qui va des vols avec ou sans violence jusqu’aux risques terroristes, en passant par les agressions physiques et sexuelles. En 2023, le nombre de victimes de vols et de violences dans les transports en commun a baissé pour la première fois depuis 2016, s’établissant à 118 400, mais ce chiffre reste inacceptable. Le sentiment d’insécurité ne peut plus être un frein à l’usage des transports en commun par nos concitoyens.
Par nature, les transports en commun sont difficiles à sécuriser. S’y ajoutent des comportements de plus en plus dangereux des contrevenants. Or le cadre juridique en vigueur pour l’intervention des agents de sûreté dans les transports est trop contraignant pour y faire face.
Les agents de la Suge et du GPSR, dont je salue l’implication au quotidien, sont assermentés. Ils bénéficient d’une formation exigeante, initiale et continue. Nous devons promouvoir et renforcer le continuum de sécurité où ils s’inscrivent, si nous voulons répondre de manière adaptée et efficace à la délinquance et à la menace terroriste.
Cette proposition de loi nous permettra d’aider ces agents dans leur travail, en comblant les lacunes de la législation pénale, et d’assurer la bonne coopération entre les différents acteurs de la sécurité.
Nous renforcerons en outre les moyens juridiques, administratifs et opérationnels des agents de sûreté, en étendant leurs prérogatives en matière de palpation et de saisie, en leur octroyant le droit de poursuite pour les infractions commises dans les emprises et en leur donnant la possibilité d’interdire aux individus qui troublent l’ordre public ou refusent de se soumettre à l’inspection de leurs bagages d’entrer en gare.
Nous saluons le travail du sénateur Philippe Tabarot ainsi que celui des rapporteurs de l’Assemblée nationale, Clément Beaune puis Guillaume Gouffier Valente. Toutefois, nous émettons quelques réserves sur certains articles, car il faut garantir la sécurité juridique du texte et sa constitutionnalité. Nous proposerons ainsi de supprimer les articles 9 et 10, qui concernent le recours à la vidéosurveillance algorithmique, parce qu’il nous semble préférable d’attendre le retour d’expérience des Jeux olympiques avant d’envisager de pérenniser son usage dans un cadre suffisamment protecteur des libertés individuelles.
Nous proposerons également de supprimer certaines dispositions pénales peu opérationnelles ou juridiquement faibles, telles que la peine complémentaire d’interdiction de paraître dans les transports, le délit d’oubli de bagages ou encore la communication automatique aux opérateurs de transport public routier de la perte du permis de conduire d’un conducteur.
Sous réserve de ces modifications, nous soutiendrons cette proposition de loi.
M. Jean Moulliere (HOR). Notre groupe souscrit pleinement à l’objectif de cette proposition de loi sénatoriale : renforcer la sécurité des usagers des transports publics face aux incivilités, aux actes de malveillance et aux menaces terroristes. La sécurité des passagers doit être garantie dans les transports en commun, dont l’usage est voué à augmenter dans les prochaines années.
Bien que le nombre de vols ou de violence dans les transports en commun enregistrés par les services de police et de gendarmerie ait diminué en 2023 de 11 %, les chiffres demeurent inquiétants. En 2023, 118 400 personnes, pour majorité des femmes, ont été victimes de tels actes dans les transports en commun. Nous saluons le travail quotidien des agents des entreprises de transport, qui subissent eux aussi l’agressivité accrue de certains usagers.
Cette proposition de loi s’inscrit dans la continuité des mesures prises depuis 2017, à travers notamment la loi d’orientation des mobilités, la loi pour une sécurité globale préservant les libertés ou la loi relative aux Jeux olympiques et paralympiques. Ces textes ont permis, entre autres, la généralisation des arrêts à la demande pour les bus nocturnes et l’expérimentation du port de caméras individuelles par les agents assermentés des entreprises de transport. Ces mesures semblent avoir porté leurs fruits, au vu de la baisse engagée du nombre de vols et de violences dans les transports en commun.
Nous estimons indispensable d’élargir les prérogatives des forces de sécurité intérieure intervenant dans les transports, en particulier celles des agents de la sûreté ferroviaire et du GPSR, en assouplissant les conditions dans lesquelles ils peuvent procéder à des palpations de sécurité ou en leur permettant d’intervenir aux abords immédiats des gares et stations, sous certaines conditions.
Il est tout aussi important de placer la technologie au service de la sûreté dans les transports. Le rôle dissuasif et la force probante des caméras-piétons ne sont plus à démontrer. Leur pérennisation pour les contrôleurs nous paraît donc pertinente. Enfin, nous soutenons la création de nouveaux délits pour améliorer la réponse pénale aux actes commis dans les transports. La délinquance évolue ; notre arsenal législatif doit s’adapter.
Pour améliorer ce texte, nous avons déposé plusieurs amendements. Ainsi, l’article 1er ouvre aux agents la faculté de retirer à leur propriétaire certains objets « qui peuvent être dangereux, gêner ou incommoder les voyageurs ». Afin de clarifier le dispositif et de le rendre plus robuste, nous proposerons de restreindre cette faculté aux objets « dangereux pour les voyageurs ». Par ailleurs, « retirer » un objet étant une notion floue et attentatoire au droit de propriété, nous proposerons que les agents puissent simplement le « conserver ».
À l’article 12, notre groupe propose également de retirer le fait de mendier de la liste des infractions pouvant constituer le délit d’incivilité d’habitude, pour des motifs évidents tenant à la situation des personnes concernées.
Nous voterons en faveur de cette proposition de loi.
M. Paul Molac (LIOT). L’insécurité dans les transports en commun est un irritant du quotidien pour de nombreux concitoyens. Plus de 100 000 usagers sont victimes chaque année de violences, d’agressions ou de vols. Le sentiment d’insécurité dans les transports en commun ne cesse de progresser ; il a touché à un moment ou un autre 97 % des jeunes femmes.
Nous devons toujours chercher l’équilibre entre sécurité et liberté. Or, sur ce point, le texte doit être amélioré. Nous nous opposons à l’article 1er, qui permettrait le recours aux palpations et la saisie d’objet sans autorisation par des agents de sécurité de la SNCF ou de la RATP. Pour rappel, au Sénat, même le président de la commission des lois et la rapporteure, pourtant membres du groupe Les Républicains, s’y étaient opposés. Ces mesures sont inconstitutionnelles à plusieurs titres. Elles violent le droit à la vie privée et portent atteinte à la liberté d’aller et de venir et aux prérogatives exclusives de l’autorité judiciaire.
L’article 8 pérennise l’usage des caméras-piétons par les agents de contrôle. Même si ces caméras peuvent être utiles lors des enquêtes, nous refusons le recours à l’intelligence artificielle et la surveillance généralisée.
Face au caractère récurrent de certaines infractions et aux multirécidivistes, nous saluons le renforcement de la réponse pénale dans les transports en commun. Le délit d’incivilité d’habitude qui est créé peut se montrer adapté aux récidives. Toutefois, les conditions pour le constituer – notamment commettre dix infractions distinctes – en font une usine à gaz.
Ce texte comporte son lot de hausses de peine d’affichage. La délictualisation de l’oubli volontaire d’un bagage est clairement excessive. Si l’objectif est de responsabiliser les passagers, il vaut mieux renforcer les contrôles de l'étiquetage par la SNCF, qui restent très rares.
Nous nous opposons fermement à une autre peine d’affichage, le délit de mendicité dans les transports en commun. Cette mesure serait inacceptable. La réponse à la précarité ne peut être la répression.
À ce stade, notre groupe réserve donc sa position sur le présent texte pour la séance. Nous espérons que le débat en commission permettra de le purger de ses dispositions inconstitutionnelles et d’assurer un meilleur équilibre entre sécurité et respect des libertés publiques.
Mme Elsa Faucillon (GDR). Le présent texte s’inscrit dans la lignée de la loi Savary-Le Roux de 2016 et de la loi « sécurité globale » de 2021. Il poursuit ainsi le désengagement progressif de l’État en matière de sécurité publique.
La notion de continuum de sécurité, développée dans le Livre blanc de la sécurité intérieure en 2020, acte en effet le dessaisissement de la souveraineté étatique par elle-même. La grande diversité des objectifs de la proposition de loi – prévention du risque terroriste, lutte contre les incivilités et la fraude, approfondissement de la coordination entre les différents types d’agents – crée la confusion.
Appelée de ses vœux par le gouvernement, cette réforme est présentée dans le cadre d’une proposition de loi du groupe Les Républicains du Sénat cosignée par des sénateurs de droite et du centre. Plutôt qu’une coconstruction, elle illustre le confusionnisme de la majorité, comme la récente proposition de loi visant à restaurer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents.
Puisque c’est une proposition de loi, nous ne disposons ni d'étude d’impact, ni d’avis du Conseil d’État, et elle ne s’appuie sur aucune évaluation précise des mesures existantes. Par ailleurs, le recours à la procédure accélérée, justifié en début d’année par l’échéance des Jeux olympiques, apparaît désormais dénué de motif.
En outre, selon les chiffres du ministère de l’intérieur, le nombre de victimes de vols ou de violences dans les transports en commun a diminué en 2023. Si la sûreté des systèmes de transport collectif est stratégique, le renforcement des missions de sécurité de la SNCF et de la RATP, la création de nouvelles infractions pénales et le recours accru aux moyens technologiques remet en question l’équilibre entre les exigences de sécurité, de sûreté et de respect des libertés.
Rappelons que la loi dote déjà la Suge et le GPSR de compétences particulières, leur accordant une place spécifique par rapport aux autres agents privés au sein du continuum de sécurité. L’extension de leurs prérogatives et les nouveaux moyens mis à leur disposition dans ce texte inquiètent sur l’équilibre entre l’impératif de sécurité et la garantie des droits et libertés.
Le recours prévu aux nouvelles technologies pour étendre la surveillance semble disproportionné. De plus, le renforcement de l’arsenal pénal avec la création de nouveaux délits nous semble inutile et inefficace. En particulier, le délit d’incivilité d’habitude serait très vaste et serait sanctionné trop lourdement. La délictualisation de l’oubli par négligence de bagages dans les transports en commun et l’établissement d’une peine complémentaire d’interdiction de paraître ne nous semble ni adaptés ni réalistes au niveau humain, financier et logistique.
Enfin, cette réforme omet la question de la dégradation du service public des transports, particulièrement en Île-de-France. Celle-ci est pourtant centrale dans une réelle réflexion sur la sécurité, tandis que la logique sécuritaire nous éloigne de la sûreté de nos concitoyens.
Depuis plusieurs années, les politiques de réduction du personnel, sur fond de privatisation rampante de la SNCF et de la RATP, fragilisent et menacent tant le service public des transports que les usagers. Retards et suppressions de trains et de bus, allongement du temps d’attente, promiscuité dans des trains bondés : tout cela accroît la tension et la violence, comme le savent ceux qui prennent les transports. Les usagers vivent une galère quotidienne inacceptable. Nous voterons contre ce texte.
Mme Brigitte Barèges (UDR). Les transports, qu’ils soient publics ou privés, sont essentiels à la vie de la société. Ils permettent à chacun de travailler, d’étudier, de tisser des liens sociaux. Or ils sont confrontés à des menaces croissantes – agressions, vandalisme, cyberattaques et parfois même actes de terrorisme. Ces dangers fragilisent nos infrastructures et suscitent des inquiétudes légitimes parmi les usagers.
Il est donc impératif de renforcer la sécurité dans les transports, à travers des mesures concrètes plutôt que des mesures d’affichage. C’est notre seule réserve sur ce projet de loi. Il nous faut des dispositifs de surveillance intelligents, la présence renforcée d’agents formés et le déploiement de technologies numériques avancées pour détecter et prévenir les risques. Ces outils sont indispensables pour protéger les usagers et garantir leur sérénité dans leurs déplacements.
Cependant certains, notamment à gauche, ne cessent de critiquer ces efforts en invoquant une prétendue atteinte aux libertés individuelles. Ces critiques sont infondées lorsque les moyens numériques sont déployés de manière responsable et éthique. En anonymisant les données collectées, en les sécurisant par des systèmes de cryptage, en limitant leur usage aux seules questions de sécurité, il est possible d’assurer la sécurité tout en respectant pleinement les droits fondamentaux de chacun, comme cela a été le cas durant les Jeux olympiques.
En réalité, en sécurisant les transports, nous ne limitons pas les libertés, nous les garantissons. La liberté de mouvement n’est rien si elle est entravée par la peur et l’insécurité. En renforçant la sécurité, nous répondons à une demande légitime de nos concitoyens, des femmes notamment. Les critiques idéologiques ignorent à ce titre les réalités du terrain.
En unissant innovation technologique, présence humaine et gouvernance éthique, nous pouvons bâtir des transports sûrs, respectueux et adaptés à notre époque, pour faire face aux défis d'aujourd'hui, sans compromis sur la sécurité ni sur la liberté. Nous voterons donc pour ce texte essentiel qui, j’en suis certaine, permettra de multiplier le nombre d’usagers de la SNCF. Nous devons assurer que chacun puisse voyager sereinement en France, comme c’est le cas dans de nombreux autres pays du monde.
M. Sacha Houlié (NI). Ce texte de Philippe Tabarot répond à une sollicitation du président-directeur général de la RATP, M. Castex, pour enrichir les moyens dont disposent les agents de la Suge et de la RATP. Si une partie des dispositions se justifie, l’autre est plus discutable.
D’abord, les Jeux olympiques étant passés, l’examen de cette proposition de loi ne requiert pas une procédure accélérée. Surtout, il aurait été justifié d’attendre les résultats de l’évaluation de la vidéosurveillance algorithmique, dont la publication est prévue pour le 31 mars 2025. Il serait en effet préférable de réfléchir à des dispositions globales en la matière, plutôt que de séparer celles qui concernent les transports en commun.
Certaines dispositions reposent sur de bonnes idées, mais sont très mal rédigées. Au Sénat, la rapporteure du texte, Nadine Bellurot, et le président de la commission des lois François-Noël Buffet ont défendu une rédaction alternative de l’article 1er bien meilleure que celle finalement retenue, afin d’encadrer l’extension des prérogatives des agents en matière de fouille et de palpation. En l’état, le Conseil constitutionnel risque de censurer cette disposition, comme il l’a fait pour une disposition similaire du code des douanes en 2022.
Octroyer aux agents de sûreté un droit de poursuite en dehors de leur emprise, ou encore celui d’interdire l’accès aux gares, me semble malvenu. Et les agents d’Île-de-France Mobilités n’ont rien à faire dans le centre de coordination opérationnel de la sécurité.
En revanche, la pérennisation de l’usage des caméras individuelles qui équipent déjà tous les gendarmes et les policiers, y compris municipaux, est une bonne idée. C’était même le cœur du texte initial.
Enfin, certaines dispositions excessives méritent d’être supprimées, notamment concernant le traitement des données sensibles et le délit d’incivilité d’habitude.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Monsieur Jenft, ne dramatisons pas le nombre d’actes de violence dans les transports en commun. Il est élevé, insupportable pour les victimes, mais il diminue depuis plusieurs années, comme l’a rappelé le préfet de police Laurent Nuñez à plusieurs occasions.
Nous observons toutefois une aggravation générale des faits, une augmentation du nombre de violences sexistes et sexuelles, une hausse de la détention d’objets dangereux et d’armes – notamment des couteaux et des machettes – ainsi que le développement des rixes dans les transports en commun.
M. Tabarot propose à l’article 1er des dispositions permettant d’adapter le droit à ces violences et de donner les bons outils aux agents du GPSR et de la Suge. Ces derniers doivent pouvoir procéder à des palpations de sécurité sans accord préfectoral préalable, dès lors que des éléments objectifs le justifient. Il faut également leur permettre de saisir le plus vite possible les objets dangereux, par exemple un marteau fabriqué maison ou un pic à glace – un individu a été appréhendé récemment avec toute une collection de ces outils, qu’il distribuait à ses amis pour leurs méfaits dans les transports en commun.
Nous répondrons à la hausse des incivilités grâce à la création du délit d’incivilité d’habitude, à l’article 12. Comme certains d’entre vous, je juge toutefois disproportionné d’y inclure le vapotage, la mendicité et l’oubli d’étiquetage des bagages. En revanche, il faut rappeler que l’abandon de bagages, visé à l’article 14, cause de fortes perturbations des transports publics – en Île-de-France, elles sont équivalentes à la fermeture annuelle pendant un mois de la ligne la plus longue du métro parisien, la 8.
Monsieur Caure, je salue la volonté que traduisent vos amendements de mettre au point des dispositions opérantes mais dont la rédaction respecte notre Constitution, notamment le droit de propriété et les libertés publiques.
Madame Martin, nous avons un certain nombre de désaccords, mais cela n’empêchera pas un échange, je l’espère, en dépit de votre intervention offensive, voire agressive par moments.
La sûreté recouvre la tranquillité et la sécurité des usagers et des agents de contrôle, et elle correspond aussi au bon fonctionnement des services publics. Je trouve que vous minimisez certains agissements néfastes qui les perturbent grandement – des incivilités commises par des personnes qui ne font pas attention aux autres ou qui veulent dégrader l’ambiance.
Je proposerai, par mes amendements, de supprimer l’article 4, ainsi que les articles 9 et 10, même si, s’agissant de ces deux derniers articles, nous avons peut-être des optiques différentes. Je tiens à ces outils, que certains veulent interdire, mais je pense qu’il n’y a pas lieu de légiférer. Comme l’ont dit MM. Houlié et Latombe, nous ferions mieux de traiter ces questions dans un texte général touchant aux nouvelles technologies numériques, notamment la vidéo augmentée, l’intelligence artificielle et les technologies liées aux données, plutôt que dans un texte consacré aux transports. Comme le rapporteur du texte lors de la précédente législature, Clément Beaune, je propose par ailleurs de supprimer l’article 13, qui n’est pas opérant. Ne laissez pas entendre que l’ancienne majorité le soutient.
Monsieur Boucard, merci pour votre soutien au texte. Je connais votre engagement dans ce domaine. Comme je vous l’ai dit hier, nous pourrons poursuivre l’échange d’ici à la séance sur plusieurs de vos amendements jugés irrecevables. Je pense notamment à celui portant sur l’expérimentation de caméras-piétons pour les agents de sécurité privée, qui mériterait d’autant plus d’être discuté que nous allons lancer une expérimentation pour les conducteurs, ainsi qu’à votre amendement concernant le criblage. Je pensais que celui-ci avait été généralisé dans la loi relative aux JO, mais ce n’est pas le cas. Nous pourrons voir avec le Gouvernement comment exercer un contrôle sur les agents de sécurité intérimaires et les sous-traitants recrutés par les opérateurs.
Madame Regol, nous aurons l’occasion de revenir en détail sur les amendements que vous avez déposés. Ils peuvent contribuer à améliorer la rédaction du texte ou même permettre de trouver des points de consensus.
Je ne sais pas si les sénateurs ont voulu montrer les muscles : il ne faut pas verser dans la caricature. Je note, en revanche, de fortes divergences entre les travaux de la commission des lois du Sénat et ceux en séance publique. Je me suis largement appuyé sur ce qu’ont fait la rapporteure du texte au Sénat et son premier signataire, Philippe Tabarot. Des questionnements ont vu le jour au Sénat : l’article 10, par exemple, a été supprimé en commission. L’article 1er a été largement réécrit, puis sa nouvelle rédaction contestée en séance. Nous allons poursuivre le travail d’amélioration du texte.
Je ne reviens pas sur la question de l’urgence du texte, sinon pour souligner qu’il dépasse largement le cadre des Jeux olympiques et paralympiques et qu’il va s’inscrire aujourd’hui dans des débats nouveaux, notamment à propos de l’impact de l’ouverture à la concurrence sur le système de sûreté et de l’héritage des JO.
Vous avez pointé du doigt, sous la forme d’une critique, le fait que certaines dispositions du texte s’appliquent déjà, sans base légale. Vous faisiez sans doute référence à l’article 11, relatif à la captation sonore : certains opérateurs disposent déjà de systèmes d’alarmes discrètes. J’espère que nos échanges pourront aboutir, car ce serait une erreur de supprimer un outil qui rassure et protège nos conducteurs. Ils y sont habitués : s’il est supprimé, ce ne sera pas sans conséquences sur le climat social, alors que les agents sont de plus en plus confrontés à des violences.
Durant les Jeux olympiques, IDFM était intégrée au CCOS. Nous aurons aussi besoin qu’elle le soit dans le cadre de l’ouverture à la concurrence afin d’assurer une bonne organisation de la sûreté en Île-de-France. D’autres dispositifs sont attendus, comme celui des caméras-piétons dont disposaient les agents de contrôle, qui a bien fonctionné mais a disparu à la fin de son expérimentation.
Je vous proposerai de supprimer certains alinéas de l’article 12, et je serai également vigilant sur les dispositions inscrites à l’article 2, ainsi qu’au sujet des personnes sans domicile fixe.
Monsieur Latombe, je redis l’attention particulière que je porte au respect des libertés publiques et à la nécessité d’adopter des dispositions ayant un caractère opérant. Je pense que nous avons la même lecture des articles 9 et 10 : il vaudrait mieux débattre de ces mesures dans un texte global, plutôt que d’une façon un peu cavalière dans cette proposition de loi. Je pense notamment au recours, prévu à l’article 9, à des vidéos augmentées dans le cadre de réquisitions judiciaires. Néanmoins, cela n’empêche pas les opérateurs, ni les collectivités, d’utiliser ces outils. Nous aurons sans doute un débat plus vif au sujet des articles 11, 12 et 14.
Monsieur Moulliere, je vous ai déjà en partie répondu. Merci pour votre proposition de rédaction concernant l’article 1er. J’ai une petite divergence avec vous à propos des personnes qui devront garder les objets saisis, mais nous devons effectivement aller vers leur conservation, pour sécuriser le droit de propriété évoqué par plusieurs groupes. Il faudra par ailleurs se limiter aux objets dangereux – les objets encombrants sont difficiles à définir.
Je remercie M. Molac pour ses propos constructifs. S’agissant de l’article 8, l’expérimentation des caméras-piétons par les contrôleurs a fait l’objet de retours très positifs : la tension baisse quand les agents déclenchent leur caméra – ils préviennent quand ils le font. En ce qui concerne le délit d’incivilité, je vous proposerai de revenir à la rédaction initiale de l’article 12, qui visait le fait de commettre cinq fois la même infraction, au lieu de dix infractions différentes.
La question des bagages abandonnés ne doit pas être minimisée. Ce phénomène prend de l’ampleur : du côté de la RATP, le nombre de colis abandonnés est passé de 624 en 2019 à 2 269 en 2023, soit une multiplication par 3,6 en seulement quatre ans ; s’agissant de la SNCF, le nombre d’objets délaissés conduisant à la mise en œuvre de la procédure Vigipirate est passé de 7 681 en 2019 à 11 460 en 2023, soit une augmentation de 50 % en quatre ans. À chaque fois que des objets, valises ou colis, sont abandonnés, les brigades cynotechniques sont déployées, puis les brigades de déminage, ce qui entraîne des heures de blocage dont pâtissent l’ensemble des usagers des services publics.
Madame Faucillon, vous avez évoqué un désengagement de l’État en matière de sécurité. Je vous ferai tout de même remarquer que les effectifs ont fortement augmenté au cours des dernières années, au GPSR, à la Suge et au sein de l’unité de police francilienne chargée des transports, dont les effectifs sont passés de 1 100 à 1 300 agents et qui fait un travail complémentaire de celui du GPSR en Île-de-France. Vous pensiez peut-être, derrière votre remarque, à l’évolution de notre politique de sûreté en matière de transports ferroviaires dans les années à venir. C’est effectivement une question qui se pose, je l’ai dit dans mon propos introductif. Nous devrons y travailler.
Pour ce qui est du recours à la procédure d’urgence, je pense vous avoir répondu. Dès le mois de mai, Clément Beaune estimait que ce texte était certes important pour les JO, mais qu’il allait largement au-delà puisqu’il avait pour objectif d’améliorer la sûreté dans les transports en s’adaptant aux nouvelles incivilités ou violences que nous observons, en améliorant la sécurité et les conditions de travail des agents et en luttant aussi bien contre les incivilités d’habitude visées à l’article 12 que contre l’abandon de bagages et la fraude. À cet égard, je rappelle que le taux de recouvrement des amendes forfaitaires est inférieur à 10 % en moyenne, et proche de 5 % en Île-de-France. C’est pourquoi l’article 19 tend à améliorer la mise en œuvre de la loi Savary-Le Roux.
Vous avez évoqué une baisse de la qualité de service en Île-de-France. Je suis attaché comme vous, en tant que Francilien, à l’idée que nos services doivent fonctionner le mieux possible, mais il faut aussi reconnaître que tout un nouveau réseau ouvrira prochainement et que les renouvellements de rames sont assez importants.
Je pointe une contradiction dans vos propos : vous avez souligné les difficultés du quotidien, notamment les incivilités. Or ces dernières justifient, à mon avis, les articles 12 et 14. Je mesure bien, en tant qu’usager, toutes les difficultés qui pourrissent la vie de nos concitoyens – elles se comptent en heures de blocage du service.
S’agissant des métropoles provinciales, la question qui se pose est celle de la modernisation et du renforcement des réseaux ferrés. C’est dans cette perspective que nous avons adopté, il y a un peu plus d’un an, une loi visant à développer les services express régionaux métropolitains. Ce texte permet à des métropoles de travailler sur leurs réseaux en suivant le modèle du Grand Paris Express afin de répondre aux besoins en matière de transport public.
Madame Barèges, je vous remercie de votre soutien à la proposition de loi.
Monsieur Houlié, s’agissant de l’utilité du texte, je crois qu’il ne faut pas banaliser la seconde partie, qu’on présente trop souvent comme une sorte de voiture-balai ou de fourre-tout. Elle vise tout de même à lutter contre des actes d’incivilité qui perturbent au quotidien les services, les bloquent pendant de longs moments et font perdre des recettes assez importantes aux opérateurs. La perte de chiffre d’affaires due à la fraude est évaluée, je l’ai dit, à 700 à 800 millions d’euros par an, soit l’équivalent de l’effort budgétaire demandé cette année du côté du ministère des transports pour les infrastructures.
Pour le reste, nous avons déjà parlé du calendrier. Je propose de supprimer les articles 9 et 10 et je vous rejoins sur la nécessité d’un texte post-JO englobant l’ensemble des secteurs et des technologies au lieu de les réglementer à coups de petites propositions de loi. Vous avez dit, par ailleurs, que le texte comportait beaucoup de bonnes idées mais était mal rédigé. J’ai moi-même déposé près de soixante-dix amendements. Une grande partie d’entre eux est rédactionnelle, mais je propose aussi de réécrire presque entièrement les articles centraux du texte, pour conforter leur opérabilité et le respect de notre droit.
Chapitre Ier - Renforcer les pouvoirs des agents des services internes de sécurité des opérateurs de transport
Article 1er (art. L. 613‑2 du code de la sécurité intérieure, art. L. 2251‑9 et L. 2251‑10 [nouveau] du code des transports) : Facilitation des palpations de sécurité et nouvelle faculté de saisie d’objets pour les agents de sûreté de la SNCF et de la RATP
Amendements de suppression CL35 de M. Roger Vicot, CL60 de Mme Elsa Faucillon et CL107 de M. Thomas Portes
M. Roger Vicot (SOC). Cet article étendrait fortement les possibilités de procéder à des palpations, dans des conditions qui nous paraissent extrêmement floues. C’est pourquoi nous demandons tout simplement sa suppression.
Mme Elsa Faucillon (GDR). Lorsque je parle de dessaisissement de l’État, le rapporteur me répond que des moyens supplémentaires ont été alloués à la sécurité. La question est de savoir qui reçoit les compétences, les prérogatives et les formations, et comment cela est encadré – tout ne se résume pas au budget. On assiste très clairement, et je m’appuie sur le Livre blanc de la sécurité intérieure pour le dire, à un dessaisissement de celles et ceux qui sont censés exercer des prérogatives en la matière, dans un flou qui est, je crois, organisé. Il est tout de même question de palpations de sécurité, ce qui n’est pas rien : la Constitution et certains principes tels que le droit à l’intégrité physique sont en jeu. Nous ne pouvons pas légiférer ainsi dans le flou.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Cet article, qui étend les prérogatives des agents de la Suge et du GPSR, fait partie des dispositions qui incarnent le mieux les dérives du texte. La Défenseure des droits avait alerté en 2024 sur un certain nombre de pratiques, y compris au sein de la police où les palpations de sécurité sont pourtant encadrées et font l’objet de formations. Or ce qui est prévu dans cet article est une extension des possibilités actuelles, sans autorisation préfectorale et dans un cadre très flou.
Vous avez évoqué le sentiment d’insécurité dans les transports. Au cours des huit dernières années, 12,6 % des effectifs ont été supprimés à la SNCF, soit 20 000 emplois. Si vous voulez parler de la sécurité, remettez des agents dans les gares pour assurer une présence humaine. Mais, bien sûr, il n’en est pas question dans ce texte.
Selon une étude du CNRS publiée il y a quelques semaines, vous avez quatre ou cinq fois plus de probabilités de subir une palpation quand vous êtes noir ou arabe. Derrière ce type d’article se logent des délits de contrôle au faciès.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Cet article clef de la proposition de loi accorde aux agents de la Suge et du GPSR deux nouvelles prérogatives : d’une part, la possibilité de procéder à des palpations de sécurité sans accord préfectoral préalable si des éléments laissent penser qu’une personne pourrait détenir des objets susceptibles de présenter un risque pour la sécurité des personnes et des biens ; d’autre part, la possibilité de saisir des objets dangereux, dans des conditions un peu trop larges et un cadre qui me paraît améliorable, j’y reviendrai. Ces dispositions doivent, en tout cas, faciliter le travail d’agents déjà confrontés à une réalité qui les conduit à recourir à certaines pratiques sans base légale.
L’octroi de ces nouvelles prérogatives est essentiel face à l’explosion de l’introduction d’objets dangereux dans les réseaux de transport public – je ne reviens pas sur les chiffres que j’ai évoqués tout à l’heure. Les attaques ayant pour point de départ la détention d’un objet dangereux se multiplient : je pense aux attaques au couteau à la gare du Nord en janvier 2023 – avec un couteau « fabriqué maison » –, à la gare de Lyon en février 2024, à la gare de Mulhouse en mars 2024, à Chelles en juillet dernier, à Chambéry il y a un mois et j’en passe. Une évolution est nécessaire compte tenu du caractère insatisfaisant du cadre juridique actuel.
Si des arrêtés préfectoraux autorisant des palpations de sécurité sont pris d’une façon relativement constante et régulière en Île-de-France, grâce à une bonne coordination avec le préfet de police, ce n’est pas le cas partout en France. Pourtant, aucun territoire n’est à l’abri du risque terroriste : une gare de province au sujet de laquelle le préfet n’a pas constaté de « circonstances particulières liées à l’existence de menaces graves pour la sécurité publique » peut très bien faire l’objet d’une attaque. Il faut donc que les agents de sûreté puissent procéder spontanément à des palpations de sécurité en cas de danger imminent.
S’agissant de la saisie d’objets, le cadre juridique n’est plus adapté aux nouveaux comportements dangereux. J’ai pu le mesurer la semaine dernière lors d’un déplacement. Si un agent de la Suge ou du GPSR repère un objet dangereux pouvant constituer une arme, il doit appeler un officier de police judiciaire, lequel ne viendra pas forcément. Dans ce cas, on demande à la personne de sortir du véhicule ou de l’emprise et on la laisse continuer son chemin avec un objet dangereux, ce qui ne me semble pas acceptable.
Il est vrai que je vous proposerai d’adopter plusieurs amendements, mais ces dispositions font déjà l’objet de garanties juridiques solides. Ainsi, les palpations et les saisies ne pourront s’effectuer sans le consentement de l’individu concerné. Par ailleurs, les agents de la Suge et du GPSR sont assermentés et agréés et ils reçoivent, contrairement à ce que j’ai pu entendre, une formation exigeante – je l’ai constaté sur place, tant pour la SNCF que pour la RATP. La formation, encadrée par un arrêté, se déroule en quinze semaines, ce qui représente des centaines d’heures. Ces agents sont mieux formés que ceux des forces de sécurité intérieure aux interventions dans les milieux de transport, c’est-à-dire confinés, et à certaines actions comme le tir. Les agents du GPSR et de la Suge passent plus de temps en formation initiale et continue et tirent, concrètement, plus de balles que les forces de sécurité intérieure.
Pour l’ensemble de ces raisons, j’émets un avis défavorable à ces amendements de suppression : nous apporterons ensuite, je l’espère, quelques améliorations à cet article 1er.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Cela pose un problème de méthode : c’est sur la rédaction actuelle que nous travaillons, pas sur vos éventuelles modifications.
Puisque vous êtes dans une sorte de fuite en avant, pourquoi ne pas faire de ces agents des OPJ (officiers de police judiciaire) ? Cela simplifierait tout. Car si l’on a considéré, dans un cadre français qui reste en principe protecteur des libertés publiques – c’est un peu moins vrai dans les faits depuis que vous êtes là – qu’il fallait faire appel à un OPJ pour une saisie, c’est sans doute qu’il y a une raison bien précise.
Sur le plan de l’opérationnalité, il faudra des agents pour faire tout cela, il faudra de la présence humaine. Il sera donc nécessaire d’embaucher et de former. Nous ne disons absolument pas que les agents de la Suge, par exemple, n’ont pas de formation, mais qu’ils ne sont pas formés à ces gestes. Or il faudra qu’ils le soient : le moindre geste, le moindre objet relevant de la sécurité, comme un bâton de défense télescopique, demande une formation. Grâce à quels moyens et sur quel temps, nous ne le savons pas.
Ce texte étant absolument vague, nous savons en revanche très bien qui sera contrôlé, palpé, et à qui on aura tendance à retirer des objets : ce sera une forme de contrôle au faciès, comme on en connaît déjà.
M. Ian Boucard (DR). Ce qui vient d’être dit est une présomption de culpabilité à l’égard des agents de sécurité de la SNCF et de la RATP, qui voudraient par nature, à en croire Mme Martin, pratiquer des discriminations raciales. Je m’oppose fortement à une telle idée.
J’aimerais savoir ce que proposent ceux qui défendent ces amendements de suppression. Allons-nous faire comme si les gares et les transports en commun n’étaient pas des lieux de fixation de la délinquance ? Ils le sont et ils l’ont toujours été, dans les villes – à Paris, à Bordeaux ou partout en France – et même dans les communes périurbaines. Permettez-moi de rappeler quelques chiffres : un tiers des vols sont commis dans les transports en commun ou à moins de 750 mètres d’une gare ; 20 % des violences sexuelles et des coups et blessures ont lieu dans un train ou dans un rayon de 750 mètres autour d’une gare.
La question est de savoir comment faire pour assurer la sécurité de celles et ceux qui prennent les transports en commun, que nous souhaitons tous développer, qu’il s’agisse du métro, du RER ou des trains, notamment du quotidien. Car si l’on dit aux gens qu’ils y seront beaucoup moins en sécurité que dans leur voiture, nous n’y arriverons pas. C’est cela, l’objet de ce texte. Je souscrirai ensuite pleinement aux propositions du rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Madame Martin, les agents du GPSR et de la Suge sont déjà formés aux palpations de sécurité et aux saisies. C’est le cadre juridique de leur intervention que nous allons modifier pour faciliter leur travail et celui des forces de sécurité intérieure. Ces agents sont également formés à la compréhension de ce cadre juridique d’intervention et à la lutte contre les discriminations.
Chers collègues, les déplacements que j’ai effectués sur les lieux de formation du GPSR et de la Suge étaient ouverts à tous. Ces services pourront vous accueillir si vous souhaitez aller constater sur place la qualité et l’exigence des formations qui sont délivrées.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL110 de M. Thomas Portes et amendements identiques CL178 de M. Paul Molac et CL228 de M. Sacha Houlié (discussion commune)
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Notre collègue Boucard parle de présomption de culpabilité, mais ce que nous disons repose sur des études menées par la Défenseure des droits, notamment au sein des forces de police. On voit statistiquement que les personnes ayant une couleur de peau différente, c’est-à-dire qui sont noires ou arabes, sont beaucoup plus contrôlées que les personnes de couleur blanche.
Nous avons auditionné les syndicats de la SNCF lundi matin : plusieurs organisations ont souligné que le volume d’heures de formation des agents de la Suge baissait de manière mécanique en raison d’un manque de moyens humains. Les agents doivent aller sur le terrain même si leur formation n’a pas duré le nombre d’heures prévu.
Nous proposons, compte tenu de l’impact des palpations de sécurité et du cadre discrétionnaire prévu à l’article 1er, que les agents de la Suge et du GPSR bénéficient au moins d’une formation à la non-discrimination.
M. Paul Molac (LIOT). Dans sa rédaction actuelle, l’article 1er permet aux agents de sécurité de procéder à des palpations sans autorisation préfectorale, ainsi qu’à des saisies-confiscations d’objets. De telles dispositions sont contraires à la Constitution à plusieurs titres. Ce risque élevé d’inconstitutionnalité avait d’ailleurs poussé la commission des lois du Sénat à réécrire intégralement l’article, qui a été rétabli dans sa rédaction initiale en séance. Notre amendement propose de revenir à la version alternative, plus raisonnable, qui était proposée par la rapporteure du Sénat. Il s’agit simplement d’assouplir le cadre de l’autorisation préfectorale dans la région Île-de-France en confiant la compétence au préfet de police.
M. Sacha Houlié (NI). La rapporteure du texte au Sénat a pointé deux difficultés. La première est l’absence de toute autorisation préfectorale de procéder à des fouilles ou à des palpations. Je rappelle que le Conseil constitutionnel a estimé en 2022 que le cadre prévu pour les fouilles réalisées par les agents des douanes était trop imprécis. Nous pensons que le présent texte serait aussi sévèrement jugé – et je ne parlerai pas du fait qu’il est interdit de déléguer des compétences à des agents qui ne relèvent pas d’une autorité publique. En revanche, j’insiste sur un autre point, déjà évoqué : les fouilles et surtout les confiscations d’objets doivent être l’apanage des officiers de police judiciaire. Or il n’en existe pas chez les agents auxquels vous voulez confier de nouvelles prérogatives. C’est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer la faculté de procéder à des fouilles.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Monsieur Portes, je pense vous avoir répondu au sujet de la formation : elle existe déjà.
Monsieur Molac, monsieur Houlié, vous voulez rétablir la rédaction adoptée par la commission des lois du Sénat. En ce qui concerne les palpations, la rapporteure du Sénat avait trouvé une solution pour l’Île-de-France, mais il faut couvrir l’ensemble du territoire national. Je pense que nous y arriverons. Pour ce qui est des saisies, je vous rejoins : la rédaction initiale n’est pas acceptable, car elle ferait courir trop de risques juridiques. La remise en question du droit de propriété, notamment, est beaucoup trop forte. J’ai déposé un amendement à ce sujet.
Le dispositif que je vous proposerai d’adopter concerne uniquement les objets dangereux, que l’on découvre de plus en plus fréquemment, et non les armes. Il peut s’agir, par exemple, de petits marteaux de fabrication artisanale ou de récipients contenant des liquides dangereux. Les agents pourront procéder à une saisie-conservation, pour une durée de quarante-huit heures, avec remise à un officier de police judiciaire. Si la personne n’accepte pas de remettre l’objet, on restera dans le cadre actuel, à savoir une reconduction en dehors du véhicule ou de l’emprise.
Pour ces différentes raisons, demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CL76 de M. Guillaume Gouffier Valente
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. L'article L. 2251-1 du code des transports confie aux agents du GPSR et de la Suge la mission de veiller à la sécurité des personnes et des biens ainsi qu’au bon fonctionnement du service, et de protéger les agents de l'entreprise ainsi que son patrimoine. Le législateur a précisé récemment que la prévention des violences et des atteintes à caractère sexiste dans les transports publics était un axe prioritaire de leur action.
Par cet amendement, je propose d’inclure également dans leurs missions la prévention des atteintes à l'ordre public et la lutte contre le terrorisme. Cet ajout est symbolique et incontestable, compte tenu de l'exposition aux menaces des gares et des transports publics.
M. Roger Vicot (SOC). Nous voterons pour cet amendement. Il ne mange pas de pain, et il a le mérite de préciser le rôle des agents concernés. J’appelle cependant votre attention sur le fait que la formation suivie par ceux de la Suge ne dure que quatre mois, ce qui est très court au regard de leurs nouvelles missions, qui sont quasi identiques à celles de la police nationale.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL167 de Mme Élisa Martin
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il s’agit de supprimer l’autorisation donnée aux agents des services de sécurité de la SNCF et de la RATP de procéder à des palpations. Sous couvert du continuum de sécurité, le gouvernement transfère à des opérateurs privés des compétences et des charges qui relèvent de l’État.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. L’adoption de votre amendement aurait pour conséquence de retirer aux agents de la Suge et du GPSR toute possibilité de procéder non seulement à des palpations, mais aussi à des inspections visuelles et à des fouilles. Ainsi ces derniers auraient-ils moins de prérogatives que les agents de sécurité privée, pourtant moins bien formés.
La commission rejette l’amendement.
Amendements CL50 de M. Roger Vicot et CL111 de M. Thomas Portes (discussion commune)
M. Roger Vicot (SOC). Nous proposons qu’avant de pouvoir exercer les prérogatives prévues à l’article 1er, les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP soient tenus de valider une formation spécifique visant à éviter toute atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, la durée et le contenu de cette formation étant précisés par décret.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). L’arrêté du 28 septembre 2016 relatif à la formation des agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP prévoit deux séances annuelles de formation aux techniques d’intervention, parmi lesquelles les palpations de sécurité. Il convient donc à tout le moins de renforcer la formation de ces agents.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable. Ces amendements me paraissent en effet satisfaits, au moins en partie.
Les agents de la Suge et du GPSR sont soumis à un code de déontologie et formés à son respect. L’article R. 2251-4 du code des transports précise notamment que « l'agent s'acquitte de sa mission dans le respect de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de la Constitution et des principes constitutionnels, des conventions internationales, des lois et des règlements ». Quant à l’article R. 2251-5, il énonce que « l'agent demeure impartial et s'interdit toute forme de discrimination ». Par ailleurs, le cahier des charges de la formation, qui est fixé par arrêté pour la SNCF et la RATP, impose qu’un module soit directement consacré à la déontologie.
J’ai pu moi-même constater la qualité de cette formation en me rendant à l’université de la sûreté de la Suge, à Ermont-Eaubonne, ainsi qu’à la maison de la RATP, à Paris. J’ai d’ailleurs le sentiment que leurs agents sont mieux formés que les forces de sécurité intérieure à l’intervention dans les transports.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Heureusement qu’ils sont formés à intervenir dans des milieux confinés, c’est précisément leur mission !
Peut-être ne nous comprenons-nous pas. Nous nous réjouissons que ces agents reçoivent une formation à la déontologie eu égard aux pouvoirs qui leur sont confiés, mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Ce que nous disons, c’est qu’il est indispensable qu’ils soient formés aux gestes techniques professionnels. Ni vous ni moi nous ne savons procéder à une palpation de sécurité : il faut, pour cela, avoir suivi une formation spécifique, qui n’a rien à voir avec la déontologie. Et je pense que les polices municipales et les élus qui les pilotent sont les plus rigoureux en la matière.
M. Roger Vicot (SOC). Si la déontologie suffisait à éviter tout abus, cela se saurait. Un décret encadre la formation des agents, soit. Mais allons plus loin : inscrivons dans la loi l’absolue nécessité d’une « formation spécifique visant à éviter toute atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ».
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. J’entends votre remarque, monsieur Vicot. Je vous propose de retirer votre amendement afin que nous en rediscutions d’ici à la séance publique.
L’amendement CL50 est retiré.
La commission rejette l’amendement CL111.
Amendement CL190 de M. Julien Rancoule
M. Julien Rancoule (RN). Dès lors que la SNCF fait également appel à des sociétés de sécurité privée, il paraît logique de permettre à l’ensemble des agents de sécurité intervenant dans les infrastructures de transport de procéder à une inspection visuelle des sacs, voire à une palpation de sécurité, sachant que cette dernière doit être justifiée par « des éléments objectifs [laissant] à penser qu’une personne pourrait détenir des objets susceptibles de présenter un risque pour la sécurité des personnes ou des biens ».
Le 3 février dernier, c’est un agent de sécurité d’une société privée, au demeurant dépourvu de tout équipement de protection, qui a interpellé, avec bravoure, un assaillant armé d’un couteau qui avait fait trois blessés. Les agents de sécurité sont formés et professionnalisés ; ils ont une carte professionnelle et leurs antécédents judiciaires sont vérifiés de façon parfois très rigoureuse. On peut donc leur faire confiance.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Les parcours de formation des agents de sécurité privée sont trop divers pour qu’ils se voient confier les mêmes compétences que celles des agents de sécurité de la RATP et de la SNCF. Si la formation des agents employés par les sociétés qui travaillent pour Keolis ou Transdev n’est pas très éloignée de celle que suivent les agents du GPSR ou de la Suge, celle des agents de la brigade Île-de-France Mobilités, par exemple, ne dure que 35 heures.
Au demeurant, votre amendement est en partie satisfait par l'article L. 613-2 du code de la sécurité intérieure, qui autorise déjà les agents de sécurité privée chargés de missions de surveillance à réaliser des inspections visuelles, des fouilles et des palpations. Quant au dispositif de saisie des objets dangereux, je m'apprête à en proposer la réécriture. Je vous suggère donc de retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.
M. Julien Rancoule (RN). Pour obtenir son certificat de qualification professionnelle, tout agent de sécurité doit avoir suivi une formation d’au moins 140 heures. Parmi les gestes techniques auxquels ils sont formés figure la palpation. Personne ne s’étonne que des agents de sécurité procèdent à des palpations à l’entrée de concert ou d’événements sportifs ; personne ne devrait donc être choqué que cela soit également possible lorsqu’une personne est fortement suspectée de porter un objet dangereux.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. La formation des agents du GPSR et de la Suge dure quinze semaines, soit près de 300 heures.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL77 de M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur.
Amendements identiques CL31 de M. Yoann Gillet et CL99 de M. Pascal Jenft
M. Yoann Gillet (RN). Les chiffres de 2023 sont accablants : plus de 118 000 personnes ont été victimes de vols et de violences dans les transports en commun et 12 000 individus ont été mis en cause pour ces actes. Telle est la triste réalité : l’insécurité règne bel et bien dans les transports et les faits tragiques tels que l’attaque au couteau à la gare de Lyon en février dernier ou la mort d’un jeune dans le métro de Lyon en 2020 en sont l’illustration. Au reste, près d’un Français sur deux éprouve un sentiment d’insécurité en montant dans un train ou un métro.
Face à ce fléau, les agents de sûreté doivent voir leurs pouvoirs renforcés. C’est pourquoi je vous propose d’assouplir les conditions dans lesquelles ils peuvent procéder à des palpations de sécurité. Cette mesure de bon sens est nécessaire face à l’urgence de la situation.
Mais soyons clairs : pour mettre fin à cette spirale infernale et instaurer l’ordre, nous avons surtout besoin d’une réforme structurelle et de mesures concrètes telles que l’instauration de peines planchers, l’expulsion des délinquants étrangers et la fin de l’excuse de minorité.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable. Vous proposez de supprimer le mot « graves » de l’intitulé de l’arrêté que peut prendre le préfet. En conséquence, l’adoption de votre amendement ne permettrait pas d’assouplir les conditions dans lesquelles les agents de la Suge et du GPSR pourront procéder à des palpations de sécurité.
M. Antoine Léaument (LFI-NFP). Notre collègue du Rassemblement national indique qu’en 2023, 118 000 personnes ont été victimes de vols et de violences dans les transports en commun. Mais, selon Infostat, cela représente une diminution de 11 % par rapport à 2022. Si l’on retient une base 100 pour 2016, on est passé en dessous. Les chiffres des violences dans les transports en commun sont les plus bas jamais enregistrés dans notre pays.
Par ailleurs, parmi ces 118 000 faits de vols et de violences, on dénombre 90 952 cas de vol sans violence. Les vols violents diminuent de 21 %, les coups et blessures volontaires de 1 %, les outrages et violences contre dépositaires de l’autorité publique de 10 % et les escroqueries et fraudes aux moyens de paiement de 20 %. En revanche, et il faut absolument lutter contre ce fléau, les violences sexuelles sont en hausse de 3 %.
Nos collègues du Rassemblement national ont manifestement la volonté de tronquer les chiffres pour donner le sentiment que l’on assisterait à un ensauvagement de la société. Mais le seul ensauvagement que nous constatons est celui du mensonge concernant les chiffres.
M. Yoann Gillet (RN). Monsieur Léaument, vous feriez bien de prendre un peu plus souvent les transports en commun ou de parler davantage avec les Français. Si vous niez l’ensauvagement de la société, c’est que vous êtes un député totalement déconnecté de ce que vivent nos concitoyens. Ceux-ci ont peur, lorsqu’ils prennent les transports en commun, d’être agressés ou volés. Encore heureux que la majorité des infractions commises dans les transports en commun soient des vols et non des agressions ! Quoi qu’il en soit, les unes comme les autres sont encore trop nombreux.
Parlez donc avec des jeunes filles qui se font harceler et siffler à longueur de temps dans les transports en commun, ou avec les personnes âgées qui s’y font voler leur sac. Si vous viviez la vraie vie des Français, vous sauriez combien il est nécessaire de renforcer notre législation.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL22 de Mme Sandra Regol
Mme Sandra Regol (EcoS). Par cet amendement, qui s’inspire de propositions présentées par Raphaël Gérard sous la précédente législature, nous proposons qu’il soit tenu compte de l’identité de genre des personnes contrôlées lors des palpations.
J’ajoute qu’il est pénible de recevoir sans cesse des leçons sur ce que seraient la vraie vie, les vraies personnes ou la vraie façon de faire de la politique. Monsieur le président, il serait peut-être de bon ton de faire cesser ces affirmations péremptoires et déplacées.
M. le président Florent Boudié. Si vous remettez en cause ma façon de présider nos débats, dites-le moi clairement. Je veille à ce que nos discussions se déroulent dans la sérénité, laquelle, me semble-t-il, fait parfois défaut sur divers bancs.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis favorable. Merci d’avoir rappelé les travaux de Raphaël Gérard sur ces questions.
M. Antoine Léaument (LFI-NFP). Je souhaiterais poursuivre le débat qui a été amorcé sur la vérité.
M. le président Florent Boudié. Je vous rappelle que nous discutons de l’amendement CL22.
M. Antoine Léaument (LFI-NFP). Je soutiens pleinement cet amendement.
J’ai rappelé des faits – en me fondant, qui plus est, sur les chiffres du ministère de l’intérieur, sans m’arrêter aux désaccords politiques que j’ai avec MM. Darmanin et Retailleau. Débattons de ces faits plutôt que d’affirmations fallacieuses.
Par ailleurs, je sais, pour prendre les transports en commun, que l’un des problèmes que rencontrent les habitants de ma circonscription de l’Essonne, c’est leur irrégularité, laquelle crée précisément de l’insécurité, notamment dans l’accès au travail !
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques CL2 de Mme Sandra Regol et CL51 de M. Roger Vicot
Mme Sandra Regol (EcoS). L’article 1er autorise les palpations en cas de suspicion de détention d’un objet susceptible de présenter un risque pour la sécurité des biens. L’atteinte aux biens justifie-t-elle une palpation au même titre que l’atteinte à la sécurité des personnes ? Il y a là, pour les agents qui devront appliquer le texte comme pour les personnes susceptibles d’être soumises à ces palpations, un flou très dangereux qui risque également de compliquer la tâche des magistrats en cas de contentieux. Bref : à vouloir surlégiférer, on fait n’importe quoi et on favorise les dysfonctionnements.
M. Roger Vicot (SOC). Si l’on étend les possibilités de procéder à une palpation aux situations dans lesquelles la sécurité des biens est en jeu, on élargit en effet considérablement le champ d’application de la mesure.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Avis défavorable. La sécurité des biens est intimement liée à la sécurité des personnes, et la mission de prévention des agents de la Suge et du GPSR s'applique aux personnes et aux biens.
Mme Élisa Martin (LFI-NFP). On a du mal à concevoir les situations concrètes qui imposeraient de procéder à une palpation pour assurer la protection des biens. Ce qui est certain, c’est que le flou de la rédaction crée une insécurité juridique propice aux abus de pouvoir – je ne mets en rien en cause les agents, mais le cadre légal qui nous est proposé.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL78 de M. Guillaume Gouffier Valente et sous-amendement CL238 de Mme Sandra Regol
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Cet amendement rédactionnel a pour objet de préciser que la palpation spontanée est réalisée par une personne du même sexe que celle qui la subit.
Mme Sandra Regol (EcoS). Dans la lignée de l’amendement CL22 que nous venons d’adopter, le sous-amendement CL238 tend à remplacer le mot « sexe » par le mot « genre ».
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Favorable, par coordination. Peut-être faudra-t-il toiletter la rédaction : nous le vérifierons d’ici à la séance publique.
La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.
Amendements identiques CL4 de Mme Sandra Regol, CL52 de M. Roger Vicot et CL100 de M. Pascal Jenft
Mme Sandra Regol (EcoS). Il s’agit de supprimer les alinéas 6 à 9 de l’article 1er, qui autorisent les agents de sécurité de la SNCF et de la RATP à retirer des objets autres que des armes susceptibles d’être dangereux ou de gêner ou incommoder des voyageurs. En l’absence de tout critère objectif, il s’agit d’un véritable fourre-tout et l’on voit mal comment agents puis magistrats pourraient appliquer ces dispositions. Surtout, elles s’éloignent des finalités de l’article, censé protéger les personnes et les biens, puisqu’il y va en l’espèce du confort des usagers.
M. Roger Vicot (SOC). La marge d’interprétation de ce qu’est un emballage insuffisant ou un produit susceptible d’incommoder des voyageurs est si grande qu’elle est propice à l’arbitraire. Dans le métro, une paire de skis est incommodante pour les autres voyageurs, faut-il pour autant la saisir ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Le dispositif issu de l'examen du texte au Sénat présente en effet quelques difficultés juridiques. Je vous demanderai néanmoins de retirer vos amendements, car nous allons examiner dans un instant un amendement par lequel je propose de réécrire ces dispositions.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, les amendements CL237 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL229 de M. Jean Moulliere, CL5 de Mme Sandra Regol, CL101 de M. Pascal Jenft, CL6 de Mme Sandra Regol et CL53 de M. Roger Vicot tombent.
Amendement CL210 de M. Vincent Caure
M. Vincent Caure (EPR). Par cet amendement de cohérence, nous proposons que des délits tels que la dégradation de voies ferrées, par exemple, éligibles à la procédure de l’amende forfaitaire délictuelle lorsqu’ils sont constatés par des agents de police, puissent être également constatés, selon la même procédure, par les agents de sûreté de la RATP et de la SNCF. Le but est de rendre le dispositif plus immédiat et plus dissuasif.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. Je partage entièrement votre point de vue et cet amendement me semble tout à fait pertinent du point de vue politique. Néanmoins, cette extension des pouvoirs des agents de la Suge et du GPSR pourrait soulever des problèmes d’ordre constitutionnel qu’il nous faudra examiner d’ici à la séance publique.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL7 de Mme Sandra Regol
Mme Sandra Regol (EcoS). Nous proposons que soit expérimentée pendant quelques mois la remise d’un récépissé à l’issue des inspections visuelles, fouilles et palpations de sécurité réalisées par les agents de la Sûreté ferroviaire et du GPSR. Il s’agit de fluidifier ces contrôles et d’évaluer le dispositif dans le cadre de la lutte contre les contrôles abusifs et discriminatoires.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur. L’expérimentation durerait tout de même un an et demi. La mesure que vous proposez est intéressante, mais son champ est trop large puisqu’elle couvre l’ensemble des opérations du GPSR et de la Suge. Peut-être pourrait-elle être limitée aux nouvelles prérogatives de leurs agents – dont certaines figuraient du reste aux alinéas qui viennent d’être supprimés – qui, à la différence des forces de sécurité intérieure, ont affaire à des usagers et à des clients.
Je vous propose donc de retirer l’amendement afin que nous en rediscutions d’ici à la séance publique.
Mme Sandra Regol (EcoS). Dès lors que M. le rapporteur s’engage à soutenir cette expérimentation dans le cadre d’une réécriture, j’accepte de retirer l’amendement.
Il est vrai que les missions des agents de sûreté sont différentes de celles de la police, mais ces agents croisent souvent les mêmes personnes dans les transports en commun ou les gares. C’est pourquoi il est important que soient documentés d’éventuels contrôles multiples et répétés.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 1er modifié.
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Enfin, la Commission examine en application de l’article 88 du Règlement, les amendements de la proposition de loi visant à intégrer la notion de consentement dans la définition pénale des infractions d’agression sexuelle et de viol (n° 360) (Mme Sarah Legrain, rapporteure).
Tous les amendements qui n’ont pas été examinés lors de la réunion tenue en application de l’article 86 du Règlement ont été repoussés.
La séance est levée à douze heures cinquante.
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Informations relatives à la Commission
La Commission a désigné Mme Laure Miller, M. Antoine Villedieu et M. Bastien Lachaud, rapporteurs en vue du débat thématique de contrôle en séance publique du 14 janvier 2025 sur le thème : « L’évaluation de la loi confortant le respect des principes de la République ».
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Pouria Amirshahi, Mme Brigitte Barèges, Mme Aurore Bergé, M. Ugo Bernalicis, Mme Sophie Blanc, Mme Émilie Bonnivard, Mme Pascale Bordes, M. Ian Boucard, M. Florent Boudié, Mme Blandine Brocard, Mme Colette Capdevielle, Mme Gabrielle Cathala, M. Vincent Caure, M. Paul Christophle, M. Jean-François Coulomme, Mme Edwige Diaz, M. Emmanuel Duplessy, Mme Elsa Faucillon, Mme Agnès Firmin Le Bodo, M. Jonathan Gery, M. Yoann Gillet, M. Philippe Gosselin, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Monique Griseti, M. David Guerin, M. Jordan Guitton, M. Sébastien Huyghe, M. Jérémie Iordanoff, Mme Eliane Kremer, M. Bastien Lachaud, M. Philippe Latombe, M. Antoine Léaument, M. Roland Lescure, Mme Pauline Levasseur, Mme Delphine Lingemann, M. Aurélien Lopez-Liguori, Mme Marie-France Lorho, M. Olivier Marleix, M. Ludovic Mendes, Mme Laure Miller, M. Paul Molac, M. Jean Moulliere, Mme Danièle Obono, M. Éric Pauget, M. Marc Pena, M. Thomas Portes, M. Julien Rancoule, Mme Sandra Regol, Mme Sophie Ricourt Vaginay, Mme Claudia Rouaux, Mme Béatrice Roullaud, M. Jean-François Rousset, M. Hervé Saulignac, M. Philippe Schreck, Mme Andrée Taurinya, M. Michaël Taverne, M. Jean Terlier, Mme Céline Thiébault-Martinez, M. Roger Vicot, M. Jean-Luc Warsmann, Mme Caroline Yadan
Excusés. - M. Moerani Frébault, Mme Émeline K/Bidi, Mme Naïma Moutchou, Mme Valérie Rossi
Assistaient également à la réunion. - M. Sacha Houlié, M. Pascal Jenft, Mme Marietta Karamanli