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N° 1315

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 avril 2025.

PROPOSITION DE LOI

portant l’obligation d’affichage du montant de l’écocontribution sur une ligne séparée pour les factures de vente entre professionnels au sein de plusieurs filières à responsabilité élargie des producteurs,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Stéphane DELAUTRETTE, M. Philippe BOLO, M. Anthony BROSSE, M. Sylvain CARRIÈRE, Mme Constance DE PÉLICHY, M. Charles FOURNIER, M. Marcellin NADEAU, M. Antoine VERMOREL-MARQUES, Mme Anne-Cécile VIOLLAND, M. Pouria AMIRSHAHI, M. Fabrice BARUSSEAU, Mme Béatrice BELLAY, M. Karim BENBRAHIM, M. Nicolas BONNET, M. Mickaël BOULOUX, Mme Sophia CHIKIROU, M. Alain DAVID, M. Arthur DELAPORTE, M. Inaki ECHANIZ, M. Olivier FALORNI, M. Damien GIRARD, Mme Pascale GOT, M. Emmanuel GRÉGOIRE, Mme Ayda HADIZADEH, Mme Chantal JOURDAN, Mme Émeline K/BIDI, Mme Marietta KARAMANLI, M. Tristan LAHAIS, M. Jean LAUSSUCQ, Mme Sandrine LE FEUR, Mme Élise LEBOUCHER, M. Gérard LESEUL, Mme Estelle MERCIER, M. Jacques OBERTI, M. Hubert OTT, M. Jimmy PAHUN, M. Laurent PANIFOUS, Mme Christine PIRÈS BEAUNE, M. Dominique POTIER, Mme Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK, M. Davy RIMANE, Mme Véronique RIOTTON, Mme Claudia ROUAUX, Mme Sandrine RUNEL, Mme Isabelle SANTIAGO, Mme Mélanie THOMIN, M. Boris VALLAUD, M. Stéphane VIRY, M. Thierry SOTHER,

députés et députées.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France est sans aucun doute l’un des États européens les plus avancée dans la mise en place de la responsabilité élargie des producteurs (REP).

Mise en place progressivement depuis 1993, et étendue à 11 nouvelles filières par la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) de 2020, la vingtaine de filières REP actuellement déployées concernent des produits aussi variés que les pneumatiques, les matériaux de construction, les équipements électriques et électroniques, les éléments d’ameublement, les médicaments, ou les emballages.

Au sein de ces filières, régies par les articles L541‑10 et suivants du code de l’environnement, ce sont les producteurs, c’est‑à‑dire les personnes responsables de la mise sur le marché de ces produits, qui sont responsables de financer ou d’organiser la prévention ainsi que la gestion des déchets issus de la fin de vie de ces produits, en application du principe de pollueurpayeur.

Les producteurs choisissent généralement de s’organiser collectivement pour transférer leur obligation à des éco‑organismes (EO) à but non lucratif, agréés par les pouvoirs publics. Pour chacune des filières REP existantes, le dispositif est financé par une écocontribution intégrée au prix de vente du produit soumis à la REP, dont le montant est décidé par l’écoorganisme. Cette écocontribution finance l’ensemble des obligations des fabricants et distributeurs (prévention, collecte, tri, recyclage des déchets…). En demandant aux producteurs de financer la gestion de leurs déchets (via cette écocontribution), ceux‑ci ont intérêt à limiter leur production de déchets et à faciliter leur valorisation. Cette écocontribution peut également faire l’objet d’une éco‑modulation en fonction de critères environnementaux, notamment l’éco‑conception des produits.

Seulement, de nombreux éco‑organismes constatent aujourd’hui deux dysfonctionnements majeurs en matière de versement des écocontributions.

En premier lieu, les montants des écocontributions, intégrées dans le prix initial du produit, peuvent subir une inflation importante du fait de l’application de marges successives à chaque étape intermédiaire de vente entre la sortie de la production et la vente au consommateur final, si bien que cela participe à l’inflation des produits soumis à la REP.

En second lieu, l’absence de visibilité de l’écocontribution sur les factures de vente rend plus difficile la caractérisation de la fraude pour les metteurs en marché qui ne respecteraient pas leur obligation de financement de la filière REP. Or, au vu des besoins de financement des filières REP, il est impératif de limiter ces fraudes à l’écocontribution car elles pénalisent principalement les industriels qui respectent la règlementation et les éco‑organismes qui financent la gestion de la fin de vie des produits.

Une écocontribution affichée sur les factures entre professionnels permettrait également une meilleure identification par les éco‑organismes (au titre de leurs obligations légales) et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) (dans le cadre d’enquêtes en cours) des metteurs sur le marché s’affranchissant des obligations de déclaration et de contribution. C’est particulièrement vrai pour de nouveaux acteurs noneuropéens vendant massivement et directement en France via quelques sites de vente en ligne aux pratiques répréhensibles sur de multiples points, au premier rang desquelles les écocontributions.

Le rapport d’évaluation de la loi AGEC, déposé le mercredi 29 mai 2024 par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, préconisait déjà dans sa proposition n° 62 « d’introduire dans la loi la visibilité du montant de l’écocontribution sur les factures des produits vendus entre professionnels soumis aux filières REP ».

Par ailleurs, des systèmes de visibilité du coût de l’écocontribution existent déjà pour certaines filières. Ainsi, pour les filières des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) ainsi que celle de l’ameublement, une telle disposition s’applique même jusqu’à la facture transmise au consommateur final. Dans la filière « ameublement », le principe de non‑réfaction de l’écocontribution, et sa visibilité sur les factures, existe également dans le cadre d’une disposition mise en place par la loi AGEC, mais valable uniquement jusqu’au 1er janvier 2026.

C’est pourquoi, l’article 1er de la proposition loi prévoit, pour la filière REP des éléments d’ameublement, de pérenniser l’obligation d’affichage de l’écocontribution sur les étiquettes de prix, visibles par le consommateur final audelà du 1er janvier 2026. Cette mesure, demandée par l’ensemble des acteurs de la filière, permettrait d’assurer la comptabilisation séparée de l’écocontribution tout en faisant mieux comprendre au consommateur le coût réel de la fin de vie des produits de cette filière.

Pour répondre aux difficultés posées cumulativement par la fraude à l’écocontribution et l’inflation de son montant, l’article 2 entend, pour les filières visées (ameublement, bâtiment, textiles, jouets, articles de sport, pneumatiques, bricolage, jardin, navires de plaisance), la mise en place d’une « visible fee » c’estàdire d’une ligne séparée, sur les factures entre professionnels, du montant de l’écocontribution de celui du prix du produit, et d’autre part, interdire toute réfaction sur le montant de l’écocontribution comme les prises de marge.

 


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proposition de loi

Article 1er

Au début du premier alinéa de l’article L. 541‑10‑21 du code de l’environnement, les mots : « jusqu’au 1er janvier 2026, » sont supprimés.

Article 2

L’article L. 541‑10‑23 du code de l’environnement est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – Chaque producteur soumis à une filière à responsabilité élargie du producteur mentionnée aux 4° à 6°, 10° à 14°, et 16° à 18° de l’article L. 541‑10‑1 porte à la connaissance de ses acheteurs le montant de la contribution financière qu’il supporte pour la gestion des déchets, conformément aux dispositions de l’article L. 541‑10‑2.

« Ce montant fait l’objet d’une mention sur les factures de vente entre professionnels.

« Ce montant ne peut faire l’objet d’aucune négociation commerciale, d’aucune réfaction ni d’aucune majoration, entre les acheteurs et revendeurs successifs, et jusqu’au consommateur final.

« Un décret en conseil d’État établi sur la base du présent article peut élargir l’opposabilité des dispositions du présent article aux filières mentionnées à l’article L. 541‑10‑1 du même code qui en feraient expressément la demande.

« 2° Les dispositions du présent article entrent en vigueur au plus tard le 31 janvier 2026. »