______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 février 2024.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE
ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE, en troisième lecture, sur la proposition de loi, modifiée par le Sénat, en deuxième lecture, visant à protéger le groupe Électricité de France d’un démembrement (n° 2115),
par MM. Philippe BRUN ET Sébastien Jumel
Députés
——
Voir les numéros :
Assemblée nationale : 1re lecture : 671, 808 et T.A. 78.
2e lecture : 1076, 1090 et T.A. 110.
Sénat : 1er lecture : 341, 464, 465 et T.A. 90 (2022-2023).
2e lecture : 579 (2022-2023), 247, 248 et T.A. 54 (2023-2024)
SOMMAIRE
___
Pages
I. Le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture
II. Le texte adopté par le Sénat en première lecture
III. Le Texte adopté par l’assemblée nationale en deuxième lecture
IV. LE TEXTE ADOPTé par le Sénat en deuxième lecture
V. LA position de LA COMMISSION en TROISième lecture
L’Assemblée nationale est saisie, en troisième lecture, de la proposition de loi visant à protéger le groupe Électricité de France d’un démembrement, le groupe Socialistes et apparentés (SOC) ayant décidé d’inscrire ce texte à l’ordre du jour de sa journée réservée du 29 février 2024.
Examinée en séance en première lecture par l’Assemblée nationale le 9 février 2023, dans le cadre de la journée réservée au même groupe, cette proposition de loi, qui comptait initialement quatre articles, a connu de sensibles modifications.
Tel qu’adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, le texte comportait six articles (articles 1er, 2, 3, 3 bis, 3 ter et 4).
Le 6 avril 2023, le Sénat a adopté un texte dont il a supprimé trois articles (articles 1er, 3 et 4) et modifié les trois autres.
En deuxième lecture, le 4 mai 2023, la proposition de loi ayant été inscrite à son ordre du jour dans le cadre de la journée réservée au groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR), l’Assemblée nationale a confirmé les suppressions d’articles et adopté un texte modifié pour les trois autres articles.
Le Sénat a examiné le texte en deuxième lecture le 24 janvier 2024.
La chambre haute ayant adopté conforme l’article 3 ter en deuxième lecture, il revient donc à l’Assemblée nationale de se prononcer en troisième lecture sur les seuls articles 2 et 3 bis.
I. Le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture
L’Assemblée a, tout d’abord, ajouté à la liste des missions du « groupe public unifié » EDF ([1]), figurant à l’article 2 de la proposition de loi, celle de commercialiser l’électricité.
L’Assemblée a ensuite permis, au même article 2, l’ouverture de 2 % du capital aux salariés de l’entreprise.
L’Assemblée a, en outre, à l’article 3 de la proposition de loi, remplacé la fixation du prix de l’action telle que proposée dans le texte initial par la création d’une commission d’experts chargée d’y procéder.
L’Assemblée a, par ailleurs, introduit dans le texte un nouvel article 3 bis relatif aux tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVE), qui en étend le bénéfice à deux nouvelles catégories parmi les consommateurs finals non-domestiques :
– les très petites entreprises (TPE), quelle que soit la puissance électrique souscrite ;
– pour l’année 2023, les petites et moyennes entreprises (PME) et entreprises de taille intermédiaire (ETI).
Enfin, l’Assemblée nationale a introduit un nouvel article 3 ter prévoyant la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement sur la gestion du service public de l’électricité à Mayotte.
II. Le texte adopté par le Sénat en première lecture
Le Sénat a profondément modifié l’économie du texte adopté par l’Assemblée nationale en supprimant toute référence à la nationalisation (suppression des articles 1er et 3 de la proposition de loi). Il s’est ainsi agi de s’inscrire dans la logique gouvernementale de l’offre publique d’achat simplifiée (OPAS), annoncée par la Première ministre le 6 juillet 2022 et formellement lancée au mois de novembre 2022.
À l’article 2, l’énumération des missions du groupe EDF a été supprimée au bénéfice d’une seule disposition relative à la détention publique de la société EDF, dont le seuil minimal a été fixé à 100 %.
Le Sénat a, par ailleurs, à l’article 3 bis, fortement réduit la portée de l’extension de l’éligibilité aux TRVE en la concentrant sur les consommateurs finals domestiques et les très petites entreprises (TPE) ou collectivités de taille équivalente. Pour ces catégories de consommateurs, la puissance souscrite, auparavant plafonnée à 36 kilovoltampères par le code de l’énergie, n’est plus un critère d’éligibilité aux TRVE.
Enfin, le Sénat a supprimé l’article 4 prévoyant un gage financier pour la perte de recettes et l’augmentation de charges pour l’État.
III. Le Texte adopté par l’assemblée nationale en deuxième lecture
L’Assemblée nationale, tout en maintenant les suppressions des articles 1er, 3 et 4 de la proposition de loi, a procédé à plusieurs modifications en commission et en séance visant à rétablir des dispositions qui figuraient dans le texte initial.
En premier lieu, la commission des finances a apporté deux modifications à l’article 2 de la proposition de loi, l’une pour renvoyer à un décret la détermination de la part de l’actionnariat salarié dans le capital d’EDF et l’autre pour rétablir la liste des missions assurées par le groupe EDF, tout en précisant expressément que cette liste est non exhaustive. Il s’agit ainsi de prévenir un démantèlement du groupe qui conduirait à ce que l’une de ces activités ne soit plus assurée ni par EDF, ni par l’une de ses filiales.
En deuxième lieu, l’Assemblée nationale a, en séance, complété ces modifications de l’article 2 en rendant obligatoire l’actionnariat salarié.
En troisième et dernier lieu, l’Assemblée nationale a adopté trois amendements à l’article 3 bis de la proposition de loi élargissant le périmètre d’éligibilité des TRVE. L’effet de la disposition a été étendu aux PME et aux collectivités territoriales de moins de 50 000 habitants, ainsi qu’aux organismes d’habitation à loyer modéré (HLM).
IV. LE TEXTE ADOPTé par le Sénat en deuxième lecture
Le Sénat, tout en adoptant l’article 3 ter relatif à Électricité de Mayotte sans modification, a procédé à plusieurs nouvelles modifications des deux autres articles de la proposition de loi encore en discussion.
Tout d’abord, en ce qui concerne l’article 2, le Sénat a, dans un souci de souplesse, substitué à l’inscription dans le code de l’énergie d’une série de missions une logique d’objectifs devant être déclinés dans un contrat décennal conclu par EDF avec l’État.
L’article 2 de la proposition de loi telle qu’adoptée par le Sénat prévoit aussi l’extension aux anciens salariés de la possibilité de détenir du capital d’EDF jusqu’alors réservée aux salariés.
En outre, le Sénat, plutôt que de conserver le renvoi de la fixation du seuil maximal de détention du capital par des salariés et anciens salariés à un décret, a préféré que ledit seuil maximal soit fixé dans la loi à 10 %.
Enfin, le Sénat a réécrit l’article 3 bis dans les termes du texte qu’il avait lui-même adopté en première lecture, tout en fixant au 1er février 2025 la date de son entrée en vigueur. Ainsi a-t-il recentré l’extension du périmètre de l’éligibilité aux TRVE aux consommateurs finals domestiques, aux TPE et collectivités de taille équivalente, sans que la puissance électrique souscrite puisse être un critère d’exclusion.
V. LA position de LA COMMISSION en TROISième lecture
Estimant que, quoique perfectible, le texte issu des travaux du Sénat en deuxième lecture était le fruit d’un compromis qui en préservait l’essentiel – soit, d’une part, la détention par l’État d’Électricité de France et l’incessibilité d’Enedis et, d’autre part, l’extension à l’ensemble des TPE et aux petites communes de l’éligibilité aux tarifs réglementés de vente d’électricité –, les rapporteurs ont proposé à la commission de rejeter l’ensemble des amendements déposés et de l’adopter conforme.
Suivant leur avis, la commission a adopté la proposition de loi sans modification.
La commission a procédé à l’examen des articles de la présente proposition de loi au cours de sa réunion du mercredi 14 février 2024.
M. le président Éric Coquerel. Nous examinons ce matin la proposition de loi inscrite par le groupe Socialistes et apparentés à l’ordre du jour de sa journée réservée, le jeudi 29 février prochain, qui vise à protéger le groupe Électricité de France (EDF) d’un démembrement ; les rapporteurs en sont MM. Philippe Brun et Sébastien Jumel.
Ce texte a été modifié par le Sénat en deuxième lecture ; il s’agit par conséquent d’une troisième lecture.
M. Sébastien Jumel, rapporteur. Merci, monsieur le président, de m’accueillir dans votre commission et merci à Philippe Brun de m’avoir reconnu une paternité conjointe sur ce texte et de m’avoir proposé d’en être corapporteur.
Pourquoi sommes-nous à nouveau réunis autour de cette proposition ? Pour une raison d’intérêt général : protéger EDF et garantir que cette entreprise de service public assure et maîtrise la production d’électricité de notre pays, et qu’elle participe à la transition énergétique que nous appelons de nos vœux. Et aussi pour protéger les Français, nos artisans, nos très petites entreprises (TPE) et nos petites communes de la spéculation du marché, notamment des augmentations indécentes des prix lors des renouvellements de contrat.
Nous sommes réunis parce que, d’une manière transpartisane – une approche qui nécessite parfois des compromis –, nous avons eu à cœur de protéger ce fleuron industriel. Le combat pour EDF, nous le menons depuis de nombreuses années, depuis les premiers traités européens. Nous le menons ici avec force depuis 2020, en nous opposant au projet Hercule et au démantèlement de l’entreprise, à la privatisation des barrages hydrauliques et à l’augmentation des prix de l’énergie, qui reste une question d’une profonde actualité.
Dans le cadre de tous ces combats communs, mon collègue corapporteur et moi-même avons pris nos responsabilités pour présenter un texte qui fasse consensus.
Être rapporteur de cette proposition de loi, ce n’est pas rien pour un député communiste, en raison des luttes actuelles mais aussi de l’héritage que nos prédécesseurs, comme Frédéric Joliot-Curie et Marcel Paul, nous ont légué. Ma famille politique a contribué à construire un service public unifié pour assurer la souveraineté énergétique de la nation, grâce à la recherche appliquée et au nucléaire mais aussi à un statut particulier, les industries électriques et gazières (IEG), que vous avez démantelé. Il est crucial de le rappeler : si l’énergie a échappé au marché pendant des décennies, c’est grâce à ces combats politiques qui ont fait consensus à des moments décisifs, y compris dans le sang et les larmes de la Libération.
L’électricité a toutes les caractéristiques d’un bien commun : elle est difficilement stockable ; il est impossible de ne pas en consommer ; elle est indispensable à la satisfaction de nombre de besoins ; sa production et sa consommation ont des conséquences pour l’ensemble des usagers et en terme de souveraineté du pays. Nous avons besoin d’un outil public pour toutes ces raisons, mais aussi et surtout parce que le marché ne marche pas, qu’il est incapable de répondre aux enjeux de décarbonation de la production d’énergie. Illustration la plus criante de ces carences : le marché européen de l’énergie, qui repose sur la logique du merit order – ou préséance économique – et tend à rendre plus rentables les productions polluantes en période de crise comme nous venons de le vivre. D’ailleurs, en dépit de sa récente réforme, le marché européen de l’énergie restera un instrument peu efficace pour protéger les usagers contre la volatilité des prix.
Je déplore, comme nombre de collègues dans cette enceinte, la fausse nationalisation opérée par l’État, qui n’est pas à la hauteur. Et si nous proposons certaines mesures de correction aujourd’hui, nous devons reconnaître que de nombreux manquements vont demeurer, qu’il s’agisse de l’absence de loi de programmation énergétique, de l’augmentation arbitraire des tarifs réglementés de vente de l’électricité, de la suppression de ceux sur le gaz, sans dispositif de protection pour les usagers, ou encore du découpage de la loi de souveraineté énergétique, qui rend difficile une approche globale et stratégique.
Bref, nous sommes habitués, depuis 2017, aux revirements et aux errements de la majorité en matière de politique énergétique et nous devons constater que nous ne disposons toujours pas d’un cap clair. Même si elle ne peut pas traiter de tous les enjeux, nous pensons que cette proposition de loi peut apporter de premiers éléments de réponse. Il s’agit d’une proposition de loi modeste, humble, qui repose sur le plus petit dénominateur commun. Elle ne va pas aussi loin que le voudrait une partie de l’hémicycle : elle est un compromis et, à ce titre, elle a vocation à être provisoire. Il nous faudra aller plus loin lorsque nous serons aux responsabilités – mais c’est une autre histoire.
S’agissant de la tarification, cette proposition de loi se borne à respecter le droit européen, tout en élargissant – c’est un signal important – les tarifs réglementés de vente de l’électricité à l’ensemble des TPE et des petites communes.
Concernant le développement d’un outil industriel unifié capable de répondre aux enjeux, le texte ne fait pas le bilan des deux ou trois décennies de libéralisation européenne du marché de l’énergie, mais il affirme que seul le Parlement est souverain – et ce n’est pas rien – pour déterminer l’avenir de notre entreprise nationale. Il protège également Enedis de toute velléité de privatisation.
Philippe Brun, tous les groupes qui ont contribué à élaborer ce texte – y compris Les Républicains, faisant vibrer leur fibre gaulliste – et moi-même défendons ce compromis, seule voie possible pour aboutir à un vote conforme. Cela au grand dam de la majorité, qui continue sa politique d’obstruction, comme l’illustrent les amendements déposés.
M. Philippe Brun, rapporteur. Nous en sommes, finalement, à un cinquième examen de ce texte, qui a été adopté deux fois par l’Assemblée nationale, avec des rapporteurs communiste et socialiste, et deux fois par le Sénat, avec des rapporteurs Les Républicains. Par quatre fois, l’Assemblée nationale et le Sénat ont fait part de leur volonté, d’une part, de refuser le démembrement d’EDF, et d’autre part de rétablir les tarifs réglementés de vente de l’électricité pour les petites entreprises. Il s’agit donc d’un texte de compromis.
À l’article 2, la liste des activités d’EDF, qui avait été inscrite dans la première version de l’Assemblée nationale pour empêcher son démembrement, a disparu. Elle a été remplacée par un contrat décennal liant l’État et l’entreprise, transmis au Parlement, ce qui permettra à ce dernier de débattre chaque année de la stratégie d’EDF. L’instauration d’un dispositif d’actionnariat salarié, grâce à l’amendement du sénateur centriste Michel Canévet complété par ceux des sénateurs socialistes Victorin Lurel et Franck Montaugé, permettra d’ouvrir jusqu’à 10 % du capital de l’entreprise et de faire entrer des actionnaires salariés au conseil d’administration. Enfin, nous protégeons Enedis, gestionnaire du réseau de distribution d’électricité, en rendant incessible la participation d’EDF à son capital.
Pour ce qui est des tarifs réglementés, nous nous inscrivons dans la droite ligne de la directive du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité, en limitant leur rétablissement aux entreprises de moins de dix salariés dont le chiffre d’affaires n’excède pas 2 millions d’euros. Nous supprimons en outre la condition de puissance souscrite – celle-ci doit actuellement être inférieure à 36 kilovoltampères. Ces dispositions sont cohérentes avec les déclarations du Gouvernement – même s’il a changé d’avis, puisqu’il leur était plutôt opposé en première lecture – et nous proposons que ce rétablissement soit effectif le 1er février 2025.
Pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, nous donnerons des avis défavorables à tous les amendements proposés, afin d’obtenir un vote conforme et de mettre un terme à cette navette parlementaire qui, pour reprendre les mots de Paul Éluard, a le dur désir de durer.
M. le président Éric Coquerel. Le rapporteur général ayant accepté de ne pas prendre la parole, nous n’aurons pas d’interventions de discussion générale et nous passons directement à l’examen des articles restant en discussion et des amendements à ces articles.
Dans sa version initiale, cet article de la proposition de loi avait deux objets principaux :
– l’organisation du groupe public unifié Électricité de France (EDF), dont les missions étaient énumérées ;
– la détention publique intégrale et l’incessibilité du capital de la société anonyme EDF.
La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à compléter l’énumération des activités du groupe EDF par la mention de la commercialisation de l’électricité.
En séance, l’Assemblée, contre l’avis du Gouvernement et de la commission, a adopté un amendement de M. Alexandre Sabatou (RN) ouvrant la possibilité d’une détention du capital d’EDF par ses salariés jusqu’à 2 %.
La commission des finances du Sénat, sur proposition de son rapporteur, M. Gérard Longuet (LR), a réécrit l’article pour :
– rétablir le statut de société anonyme d’EDF, en lui adjoignant, par un sous-amendement de M. Victorin Lurel (SER), le qualificatif d’« intérêt national », et la mention du seuil de détention publique d’EDF, tout en portant celui-ci à 100 %. La qualification de « groupe public unifié » et la mention de l’incessibilité du capital d’EDF dans le code de l’énergie ont été supprimées ;
– préciser les conditions selon lesquelles se déroulerait la rétrocession d’actions aux salariés et anciens salariés d’EDF qui détenaient des actions à la date de l’offre publique d’achat simplifiée (OPAS) : à la date du 1er janvier 2024 et à un prix maximal de 12 euros par action, dans une proportion minimale de 1,50 % du capital.
En séance, le rapporteur s’en étant remis à la sagesse de ses collègues, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement dont l’objet était de revenir sur celles des modifications intervenues en commission qui étaient relatives à l’actionnariat salarié et de rétablir la rédaction de l’Assemblée nationale, tout en précisant que la faculté de détention du capital dans la limite de 2 %, par les salariés était étendue aux anciens salariés, afin d’éviter que ceux-ci ne soient contraints à vendre leurs titres lors de leur départ de l’entreprise. Au cours des débats, le Gouvernement a rappelé que la réouverture du capital d’EDF à des actionnaires minoritaires n’était cependant pas envisagée à court terme.
La commission a, tout d’abord, contre l’avis des rapporteurs, adopté un amendement de M. Pascal Lecamp (DEM) qui, supprimant la mention d’un seuil maximal de 2 % de détention du capital par les salariés et anciens salariés, renvoie la fixation du niveau dudit seuil à un décret.
La commission a, ensuite, adopté un amendement des rapporteurs destiné à rétablir la liste, cette fois explicitement non-limitative, des missions devant être assurées par EDF ou par ses filiales, en raison de leur caractère stratégique pour le service public de l’électricité, dans le but d’éviter que ces activités soient totalement privatisées, la mention de l’exercice de ces activités conformément au code de l’énergie étant par ailleurs supprimée.
En séance, l’Assemblée a adopté un amendement de M. Philippe Brun, rapporteur, dont l’objet était de rendre obligatoire l’actionnariat salarié. Ainsi modifié, le texte adopté par l’Assemblée nationale prévoit les conditions d’une opération de cession du capital aux salariés. En outre, cet amendement réintroduit dans le texte la disposition supprimée en commission selon laquelle « l’entreprise “Électricité de France” exerce ses activités conformément aux dispositions du présent code ».
À l’initiative de sa rapporteure, Mme Christine Lavarde (LR), la commission des finances du Sénat a adopté un amendement ayant pour objet :
– de substituer à la liste des missions du groupe la mention d’un contrat décennal conclu par l’entreprise avec l’État, qui « détermine notamment les objectifs assignés à l’entreprise en matière de trajectoire financière, d’investissements, de décarbonation de la production d’électricité, de maîtrise des prix pour les ménages et pour les entreprises, ainsi que d’adaptation des capacités de production à l’évolution de la demande d’électricité », le rapport d’activité annuel de l’entreprise devant lui permettre de rendre compte de la mise en œuvre du contrat et être adressé au Parlement et à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) ;
– l’extension aux anciens salariés de la possibilité de détenir du capital d’EDF ;
– la suppression des conditions de l’opération d’ouverture du capital aux salariés ;
– l’inscription dans le code de l’énergie de la détention à 100 % de la société ENEDIS, gestionnaire des réseaux publics de distribution ([2]).
En séance, le Sénat a apporté deux modifications à l’article.
Les amendements identiques de M. Victorin Lurel (SER) et de M. Christian Bilhac (RDSE) rétablissent le dispositif adopté en deuxième lecture par l’Assemblée nationale, qui prévoit une opération à destination des salariés et anciens salariés d’EDF portant au minimum sur 2 % du capital de l’entreprise, pour un prix du titre inférieur à 12 euros, un rabais étant consenti aux salariés et ancien salariés si les titres acquis ne peuvent être cédés avant l’expiration d’une période de cinq ans.
L’amendement de M. Michel Canévet substitue au renvoi fait au pouvoir réglementaire du soin de fixer le seuil maximal de détention du capital par les salariés et anciens salariés une fixation dudit seuil maximal à 10 % du capital social.
La commission a adopté cet article sans modification.
*
* *
Amendements de suppression CF4 de M. Mathieu Lefèvre et CF25 de M. Emmanuel Lacresse
M. Mathieu Lefèvre (RE). Messieurs les rapporteurs, nous sommes en pleine navette parlementaire, procédure tout à fait formalisée, et nous devons pouvoir continuer à discuter. Cette proposition de loi que vous présentez comme un texte de compromis n’a surtout plus rien à voir avec ce qu’elle était à l’origine. De la nationalisation d’EDF dont il était question au départ, on est passé à l’incessibilité, ce qui va considérablement rigidifier toute évolution future du groupe alors même que les risques de démembrement ont été totalement écartés par le Gouvernement au cours des derniers mois. Il convient donc de supprimer cet article qui, par ailleurs, est susceptible, me semble-t-il, de mettre EDF en difficulté le jour où l’on voudra céder 5 ou 10 % du groupe : pensez-vous sincèrement que le cours des actions restera aussi élevé s’il faut repasser par la loi pour se défaire de cette rigidité ? Cette proposition de loi n’a plus grand-chose à voir avec son objet initial et cet article est objectivement totalement infondé.
M. Emmanuel Lacresse (RE). Il faut en effet recourir aux poètes surréalistes pour tenter de saisir les perspectives de cette proposition de loi éloignée de la réalité, qui change sans cesse d’aspect tout en restant fondée sur l’idée qu’EDF serait menacée.
En réalité, le Gouvernement et la majorité ont réussi deux opérations au début de l’année 2023. Tout d’abord, l’entreprise a été consolidée – en dépit de son endettement considérable – et son capital est désormais public à 100 %. C’est fait et cette loi n’y changera rien. Ensuite, le marché, les fournisseurs privés et les alliances géopolitiques nouées par la France et l’Europe ont permis de revenir à des niveaux de prix de l’électricité proches de ceux d’avant la crise. Nous avons redonné à EDF des possibilités d’investissement qui permettront de faire face aux défis du nucléaire et à ceux des énergies renouvelables – nous en reparlerons à la moitié de l’année, lorsque nous discuterons de nos perspectives budgétaires.
EDF n’est pas seulement une entreprise nationale, c’est aussi le premier groupe énergéticien au monde. C’est une réussite à laquelle cette proposition de loi ne pourra rien enlever.
M. Philippe Brun, rapporteur. Vous ne voulez pas de ce texte consensuel, dont l’examen a débuté il y a plus d’un an et qui a été adopté deux fois par chacune des assemblées. Votre exposé sommaire me semble paradoxal, puisque cet article 2 serait à la fois superfétatoire et source de rigidité, mais, s’il est source de rigidité, c’est bien qu’il offre une garantie, dont il serait imprudent de se priver. C’est au moins la garantie qu’un éventuel projet d’ouverture du capital d’EDF donnerait lieu au débat parlementaire qui s’impose. Les dispositions du texte n’entravent en rien l’évolution future du groupe, mais elles permettent que celles-ci soient discutées par le Parlement. Celui-ci ne peut pas rester éternellement étranger à ce qui se passe au sein d’EDF.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous ne pouvez pas nous dire que nous avons voté ce texte plusieurs fois : il n’y a pas un seul mot du texte qui nous est aujourd’hui proposé qui ait figuré dans la version initiale !
C’est la loi caméléon. Vous avez d’abord dit qu’il fallait nationaliser EDF. Comme cette mesure avait déjà été annoncée par le Gouvernement, il était clair depuis le début que la proposition de loi ne servait à rien. Elle porte à présent sur les tarifs réglementés de vente d’électricité : cela aurait pu nous intéresser mais, les prix de l’électricité ayant fortement baissé, elle est aujourd’hui pratiquement sans effet.
Vous nous dites qu’elle fait consensus, mais ce n’est pas vrai : l’article 2 prévoit que les salariés puissent devenir actionnaires mais la rapporteure du Sénat, membre du groupe Les Républicains, s’est fermement opposée à cette mesure.
Vous voulez éviter le débat de fond en expliquant que le texte est consensuel, que tout a déjà été voté et qu’il faudrait passer à autre chose. Je suis désolé, nous aurons cette discussion, car elle est importante.
La stratégie de notre majorité est extrêmement claire en matière d’énergie nucléaire et d’énergies renouvelables. C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité nationaliser EDF ; c’était notre initiative et vous vous y êtes d’ailleurs opposés.
Mme Véronique Louwagie (LR). Ce texte que les députés et les sénateurs Les Républicains ont toujours soutenu fait l’objet d’un travail de coconstruction entre les deux chambres et entre les députés d’opposition. Il a effectivement beaucoup évolué au fil de la navette, tout en conservant son objectif, qui est de préserver EDF d’un démembrement. Monsieur le rapporteur général, parler d’une loi caméléon n’est guère valorisant pour le travail du Parlement. Nous avons travaillé, et nous avons abouti à un texte consensuel.
Je rappelle que nous payons aujourd’hui chèrement des choix hasardeux en matière de politique énergétique, notamment l’abandon du projet Astrid, la fermeture de la centrale de Fessenheim et la fixation d’un prix de rachat aberrant qui affaiblit EDF.
Il est donc important, aujourd’hui, de prendre des mesures pour ne pas voir resurgir demain le spectre d’un démantèlement. La détention de l’entreprise à 100 % est souhaitable et nous devons sécuriser la production d’électricité, dans le cadre de la logique d’un marché.
Nous voterons contre cet amendement de suppression grâce auquel la majorité veut, à nouveau, déconstruire le texte. Si l’objectif de nationalisation d’EDF était abandonné, cette proposition de loi permettrait de se préserver contre le risque de démantèlement de l’entreprise tout en étendant le bénéfice des tarifs réglementés de vente d’électricité à l’ensemble des petites communes et des TPE, sans considération de puissance de leur compteur électrique. Par conséquent, nous soutenons le texte en l’état, sans modification. Nous voterons donc contre l’ensemble des amendements de suppression.
M. Alexandre Sabatou (RN). Chers collègues de la majorité, votre discours est contradictoire. Nous n’avons pas à nous inquiéter, rien ne va changer, mais vous défendez des amendements de suppression au motif qu’il ne faudrait pas rigidifier les évolutions ultérieures du groupe ? C’est donc que vous souhaitez des changements !
Je rappelle que le projet Hercule n’est pas sorti de nulle part : c’est vous qui l’avez préparé. Vous nous faites croire que ce projet n’existe plus mais vous spoliez les actionnaires d’EDF pour qu’ils ne soient pas présents lors des assemblées générales, afin de pouvoir élaborer votre plan en catimini.
Vous nous expliquez qu’il n’y aura pas de nouveau plan Hercule mais si, demain, la Commission européenne vous demande de le mettre en œuvre, vous le ferez. Comme d’habitude, vous ne vous y opposerez pas.
Nous voterons donc ce texte sur lequel il y a eu consensus, sans vous, à l’Assemblée nationale et au Sénat.
M. Charles de Courson (LIOT). Simple réflexion juridique, la seule chose qui reste dans l’article 2, c’est l’idée d’un contrat sur dix ans. Est-ce que cela relève de la loi ? On peut en discuter. Disons tout de même que l’État n’a pas besoin d’une loi pour faire un contrat avec une entreprise publique.
Il en va de même pour l’objectif initial du texte, qui était d’empêcher le démantèlement d’EDF – sauf que l’État est désormais actionnaire à 100 %. On peut toujours voter ce texte, certes.
C’était une remarque en passant sur l’inutilité de certaines lois.
M. Mathieu Lefèvre (RE). D’abord, si l’on parvient à un consensus sans la majorité, on ne l’appelle pas forcément un consensus.
Deuxièmement, messieurs les rapporteurs, lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative, il me semble bien que seule la majorité a adopté les crédits qui ont permis de nationaliser EDF. Tous les autres partis politiques s’y sont opposés.
Enfin, l’agilité est nécessaire. J’aimerais que vous me donniez, monsieur Brun, un seul exemple de grand énergéticien européen dont la loi prévoit l’incessibilité du capital. À part EDF peut-être si cette proposition de loi est adoptée, quelle autre entreprise fait l’objet d’une telle disposition ?
M. Maxime Laisney (LFI-NUPES). Les membres de la majorité relative répètent depuis ce matin la fable que récite Bruno Le Maire depuis plusieurs mois sur la prétendue nationalisation d’EDF. Étant membre de la commission des affaires économiques, j’ai eu plusieurs fois l’occasion d’auditionner le président-directeur général d’EDF : il se plaît à rappeler qu’il dirige une société anonyme, qu’il fait ce qu’il veut et qu’il va continuer à vendre de l’électricité sur le marché international. D’ailleurs, la négociation qu’il a tenue avec le Gouvernement n’a pas vraiment donné gain de cause à l’intérêt général ni aux Français, qui verront leur facture d’électricité continuer d’augmenter.
Le statut d’EDF est une vraie question, et il mérite d’être consolidé.
M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Nous allons évidemment voter contre ces amendements de suppression, pour une raison simple : cet article rend incessible la participation de l’État dans EDF… sauf si le Parlement donne son accord ! Il faut cesser de prétendre qu’il ne sera pas possible de s’ouvrir par exemple à d’autres acteurs publics, comme la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui dispose de moyens pour investir dans l’énergie. Le Parlement sera souverain et l’incessibilité n’est pas gravée dans le marbre. L’article 2 permet de mettre un terme à ce qui a été fait pendant des années, à cette politique catastrophique du Gouvernement qui aurait même pu aboutir au démantèlement d’EDF.
D’autre part, j’entends que les tarifs réglementés de vente d’électricité ne changent rien. Mais les consommateurs vont subir prochainement une nouvelle hausse du prix de l’électricité, de 10 %, ce qui portera à 44 % l’augmentation totale depuis deux ans : il est peut-être temps de trouver une solution ! Grâce à ce texte, les TPE et les petites collectivités pourront profiter des TRVE, mais nos concitoyens ont eux aussi besoin d’un minimum de visibilité. Ils doivent pouvoir bénéficier de tarifs qui ne soient pas trop éloignés du coût de production. Peut-être ces mesures permettront-elles aussi, à terme, de remettre en cause ce marché européen de l’énergie, qui nous fait tant de mal.
M. Mickaël Bouloux (SOC). Nous voterons contre ces amendements de suppression, parce que nous souhaitons rester des remparts contre la vente à la découpe du patrimoine des Français.
M. Sébastien Jumel, rapporteur. D’abord, si cette loi est inopérante, pourquoi déployer autant d’énergie à la combattre ? Ensuite, monsieur le rapporteur général, on prend plus facilement les mauvaises habitudes que les bonnes : vous avez tellement pris celle que les textes de loi soient élaborés dans le secret des cabinets ministériels et enregistrés par le Parlement sans modification, sauf à la marge, que lorsque ce dernier enrichit un texte, cela vous donne de l’urticaire ! Je trouve sain, en démocratie, que l’Assemblée nationale et le Sénat puissent modifier et améliorer la loi, même lorsqu’ils arrivent à un consensus plus mou que ce que j’aurais souhaité.
Enfin, M. Lefèvre nous demande de citer une entreprise pour laquelle l’incessibilité des actifs de l’État est prévue par la loi ? La SNCF ! C’est gravé dans le marbre de la loi qui régit son statut. Si le législateur l’a fait, c’est qu’il a considéré qu’il s’agissait d’une question tellement stratégique qu’elle supposait un débat devant le Parlement.
La commission rejette les amendements de suppression.
Amendement CF28 de M. Emmanuel Lacresse
M. Emmanuel Lacresse (RE). Cet amendement a pour objet de supprimer l’alinéa 2, car le caractère d’intérêt national d’EDF n’est pas une mention indispensable. EDF est aujourd’hui le premier groupe fournisseur d’énergie au monde ; il n’est pas spécifiquement français et n’opère pas dans un cadre de non-concurrence – ce qui fait une grande différence avec la SNCF, sur la quasi-totalité de ses activités. On nous a expliqué que l’objet de cette proposition de loi était de lutter contre le démantèlement d’EDF. Pourtant, toutes les discussions, notamment au Sénat, ont visé à supprimer les précisions qui y figuraient au départ, portant sur le champ et les activités du groupe : il n’était évidemment pas possible de les définir, tant elles sont multiples et importantes. Au vu du niveau d’endettement d’EDF, il est important que le groupe puisse trouver des ressources – il n’est pas question de cessions – et lever des fonds, pour ne pas compter uniquement sur ceux de l’État.
M. Philippe Brun, rapporteur. Avis défavorable, pour les raisons précédemment exposées.
M. Patrick Hetzel (LR). Nous sommes bien sûr contre cet amendement de suppression. Nous pensons que ce texte sur EDF a toute sa place et sommes un peu étonnés par la manière dont procède la majorité relative.
Je rappelle par ailleurs à M. Lefèvre que, contrairement à ce qu’il affirme, le groupe Les Républicains s’est abstenu sur le vote de la loi de finances rectificative. Il convient d’être précis quand on tient ce genre de propos.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’en appelle à ceux qui veulent faire d’EDF une entreprise internationale forte et puissante. Contrairement à ce que j’entends depuis un quart d’heure, le Gouvernement a décidé de nationaliser EDF et l’a fait. Le capital d’EDF est aujourd’hui intégralement entre les mains de l’État : c’est ce qu’on appelle une nationalisation !
Cependant, l’entreprise peut, à l’avenir, avoir besoin de se renforcer. Vous avez évoqué la CDC : elle pourrait, en effet, intervenir pour accélérer le développement international d’EDF ou le déploiement de son parc nucléaire. Pourquoi inscrire dans la loi quelque chose qui l’empêcherait de le faire ? Cela n’a pas de sens. Faisons confiance au management d’EDF.
N’oublions pas non plus que, cette loi prétendument consensuelle, EDF n’en veut pas !
La commission rejette l’amendement CF28.
Amendement CF27 de M. Emmanuel Lacresse
M. Emmanuel Lacresse (RE). Effectivement, ce texte évolue à chaque retour à l’Assemblée. Cette fois, c’est la notion de contrat qui a fait son apparition, ce qui est très inhabituel. En effet, comme pour toute entreprise publique, les questions qui concernent EDF sont d’ordinaire essentiellement réglées par la loi de finances, qui traite des orientations de notre politique énergétique. Or le texte soumis à notre examen instaure un dialogue singulier qui aurait lieu entre le management d’EDF et l’État, avec un rapport d’activité seulement « adressé » au Parlement. Pour les parlementaires, l’idée même et ses modalités sont inacceptables.
M. Philippe Brun, rapporteur. Avis défavorable.
M. Mathieu Lefèvre (RE). Je suis un peu surpris par le silence dans lequel se murent les rapporteurs. M. le rapporteur général a posé une question très importante, il serait bon d’avoir une réponse sur le fond. Pour une montée au capital de la Caisse des dépôts et consignations, comment fait-on ? Pour une cession ou acquisition de filiales à l’étranger, comment fait-on ? Pardon, il nous faut des réponses, il s’agit quand même d’EDF !
La commission rejette l’amendement CF27.
Amendement CF29 de M. Emmanuel Lacresse
M. Emmanuel Lacresse (RE). Avec cet amendement, il s’agit de faire en sorte que le management et la communauté d’EDF puissent être en mesure de se fixer des objectifs sans être entravés. On nous a dit qu’il ne fallait pas démembrer le groupe, qu’il fallait qu’il s’exprime et se développe. Or c’est tout le contraire qui est proposé, en recourant notamment à une forme de planification. L’un des deux rapporteurs exprimait tout à l’heure sa nostalgie pour un modèle administré, protégé de la concurrence et pratiquant des tarifs fixés arbitrairement par des chefs de bureau dans les ministères, mais là n’est évidemment pas l’avenir d’un groupe international ! Ce sont le management et les salariés du groupe qui dessinent cet avenir, en particulier par l’investissement dans les énergies renouvelables et le nucléaire.
M. le président Éric Coquerel. La planification en matière d’énergie, cela a du bon...
M. Philippe Brun, rapporteur. Avis défavorable.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je trouve, moi aussi, le comportement des rapporteurs un peu spécial. Soit le sujet est important et on en discute, soit il ne l’est pas et on arrête tout.
À vous entendre, on a l’impression que le Parlement n’exerce aucun contrôle sur la politique énergétique d’EDF. C’est faux ! Le président-directeur général et les cadres de l’entreprise sont auditionnés au moins trois ou quatre fois par an par la commission des affaires économiques, et parfois par notre commission. Le travail des rapporteurs spéciaux nous donne aussi un éclairage particulier sur certains sujets, sans oublier toutes les discussions que nous menons quant à la politique énergétique.
Je m’adresse aux Républicains, qui souhaitent débureaucratiser notre pays : avec cette proposition de loi, ils rajoutent une sorte de contractualisation dont on ne sait pas bien le contenu ni ce qu’elle va apporter de plus que la surveillance que le Parlement exerce déjà. Je suis défavorable à cette contractualisation, qui n’apporte que des contraintes supplémentaires à EDF alors que c’est d’agilité que le groupe a besoin pour se développer sur ses marchés.
La commission rejette l’amendement CF29.
Amendement CF37 de M. David Amiel
M. David Amiel (RE). Cet amendement vise à intégrer la dimension sociale du rôle d’EDF, notamment comme employeur, dans le contrat passé avec l’État. D’abord, il serait paradoxal que les questions sociales soient uniquement abordées par le biais de l’actionnariat salarié, sans que soient prises en compte d’autres questions comme les salaires, la formation ou les conditions de travail. Ensuite, cette dimension sociale est centrale pour attirer vers les métiers de l’énergie des travailleurs dont nous aurons besoin dans les années à venir. Elle doit donc faire intégralement partie du projet industriel discuté entre l’État et EDF.
M. Philippe Brun, rapporteur. Je constate que ce contrat n’est finalement pas si mauvais que cela, puisque vous proposez d’en élargir le champ.
Nous donnons un avis défavorable à cet amendement parce que, comme nous vous l’avons déjà dit lors des débats précédents, prétendre que fixer le statut d’EDF dans la loi ferait d’elle une entreprise administrée n’a aucun sens. Dire que cela obère sa capacité d’investir n’en a pas davantage. Comparer le groupe aux autres énergéticiens mondiaux, qui sont des acteurs privés, n’en a pas non plus. Difficile de répondre, lorsqu’il y a un sophisme par mot ! Dans ces conditions, nous faisons gagner du temps à tout le monde en ne développant pas nos avis sur les amendements – tout en appréciant que celui-ci reconnaisse implicitement l’importance de ce contrat décennal.
M. Alexandre Sabatou (RN). Chers collègues, essayez de vous mettre d’accord. Vous ne pouvez pas commencer par expliquer qu’il faut tout supprimer pour ensuite proposer d’ajouter de nouveaux éléments au contrat. Vous nous reprochez en permanence de faire des lois bavardes en y ajoutant, par nos amendements, des dispositions inutiles. C’est exactement ce que vous faites aujourd’hui ; ça suffit.
La commission rejette l’amendement CF37.
Amendements CF12 de M. Mathieu Lefèvre et CF39 de M. David Amiel (discussion commune)
M. Mathieu Lefèvre (RE). Je reconnais volontiers que ces amendements ont pour objet de démontrer l’absurdité de ces articles. Vous oubliez, par exemple, dans la liste des missions d’EDF, le développement des énergies renouvelables. Est-ce que cet oubli est cohérent avec l’objet social et économique d’EDF ? Je ne crois pas.
Par ailleurs, messieurs les rapporteurs, vous n’avez pas répondu à deux questions fondamentales. Comment EDF va-t-elle faire pour céder des participations dans des filiales dans le but d’optimiser son capital si, demain, il faut passer par la loi ? Et comment va-t-elle faire pour projeter son capital ? Ce sont des opérations qu’EDF fait chaque année : faudra-t-il changer la loi à chaque fois – alors que vous avez déposé cette proposition de loi il y a maintenant plusieurs mois ?
Pouvez-vous à tout le moins répondre à ces questions ? Si l’on n’est pas capable d’adopter une approche agile en matière de cession de capital, on pénalise lourdement l’entreprise. Dans le fond, vous souhaitez qu’il n’y ait plus une seule cession de capital ; cela va nuire à l’investissement.
M. David Amiel (RE). J’ajoute que si le contrat entre l’État et EDF devait servir à quelque chose, ce serait précisément pour planifier notre politique énergétique. Il serait donc paradoxal que ce contrat soit une coquille vide et ne fixe pas d’objectifs en matière de politique énergétique. C’est particulièrement le cas pour ce qui est de l’électricité d’origine renouvelable, dont nous aurons grand besoin à l’avenir. Il faut absolument éviter de prendre de nouveaux retards en la matière.
M. Sébastien Jumel, rapporteur. Je crois que vous avez du mal à comprendre une chose assez simple, que la commission d’enquête sur la souveraineté énergétique de la France présidée par Raphaël Schellenberger a permis de consolider : la politique énergétique de la France est tellement déterminante pour notre souveraineté, et la politique d’EDF est tellement consubstantielle à cette souveraineté, que seul le Parlement est souverain pour en déterminer les orientations stratégiques. Nous assumons ce parti pris, comme nous assumons le fait que des cessions de filiale soient bloquées si le Parlement n’a pas été consulté. C’est une réponse très claire.
M. Charles de Courson (LIOT). Rien n’empêche EDF de filialiser tout ou partie de ses activités. L’entreprise a d’ailleurs beaucoup de filiales. Seule la cession majoritaire pose problème au regard du droit français, pas les cessions minoritaires.
Deuxièmement, ces amendements tendent à ajouter la mention du développement des énergies renouvelables. Or ces dernières ne sont pas uniquement électriques. Est-ce à dire que M. Lefèvre trouverait astucieux qu’EDF se diversifie dans le gaz renouvelable, en investissant, par exemple, dans des méthaniseurs ? Car s’il est adopté, cet amendement ouvre cette possibilité.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Nous sommes en train d’essayer de réinventer des règles de gouvernance pour une société anonyme détenue à 100 % par l’État français. Pourtant, il y a des seuils de 70 % qui permettent d’éviter les dérives. Nous mettons en place des contraintes incroyablement lourdes alors que nous disposons déjà de tous les critères de garantie et de contrôle. Bref, on se fait plaisir en faisant mousser des points qui sont déjà inscrits dans le droit. J’avoue que je ne comprends pas. Nous avons toutes les garanties et nous nous amusons à faire croire que non. Tout ce que nous allons réussir à faire, c’est ralentir et bloquer les choses. Cela me gêne.
La commission rejette successivement les amendements CF12 et CF39.
Amendement CF38 de M. David Amiel
M. David Amiel (RE). Cet amendement vise justement à tirer certains enseignements de la commission d’enquête qui vient d’être évoquée présidée par Raphaël Schellenberger et dont le rapporteur était notre collègue Antoine Armand. EDF a trop souffert, depuis trente ans, des à-coups répétés de la politique nucléaire. Il me paraît donc important que la loi prévoie explicitement que le contrat entre l’État et EDF vise à renforcer les capacités de production d’énergie nucléaire. S’il ne fixe pas d’orientation en la matière, il ne sera guère utile. Le rapporteur vient de souligner que le Parlement était souverain quant à ces orientations : cet amendement va dans le même sens.
M. Philippe Brun, rapporteur. Je voudrais quand même rappeler quel est exactement le dispositif que nous sommes en train d’examiner, notamment pour répondre à Jean-Paul Mattei, car j’ai l’impression que les uns et les autres parlent de choses qui ne figurent pas dans cette proposition de loi.
L’article 2 prévoit qu’il y a un contrat entre l’État et EDF, ce qui me semble normal pour fixer des objectifs d’entreprise. Ce type de contrat existe d’ailleurs pour la SNCF et pour toutes les entreprises publiques – c’est écrit dans la loi, ce n’est pas réglementaire. On applique finalement le droit de la SNCF à EDF, ce qui paraît plutôt logique.
Ensuite, l’article fait entrer les salariés au capital. Je rappelle que cette mesure est issue d’un amendement d’un sénateur membre du MODEM. Il serait souhaitable que les membres du Mouvement démocrate accordent leurs violons, y compris d’ailleurs avec leur président et leurs ministres.
Enfin, il ne s’agit d’empêcher ni des filialisations, ni des cessions, ni des rotations d’actif ; il s’agit de protéger Enedis. Nous sommes opposés au projet Hercule, qui visait à filialiser les activités de réseau et à les privatiser. Nous pensons que les réseaux, qui sont des monopoles naturels, doivent demeurer dans le giron public et dans le groupe EDF. Ce sont des entreprises à péage extrêmement rentables et nous préférons que les résultats d’Enedis et de RTE (Réseau de transport d’électricité) soient intégrés à ceux d’EDF, pour financer la transition énergétique et la production décarbonée d’électricité, plutôt que de servir à la rémunération du livret A de la Caisse des dépôts ou à la rémunération d’actionnaires de fonds d’investissement étrangers. C’est le sens de cet article 2, qui laisse toute latitude au président d’EDF pour procéder à l’ensemble des opérations qu’il souhaite.
Monsieur le rapporteur général, le groupe EDF n’a pas exprimé de position sur ce texte ; plus exactement, sa position est neutre. Lors de son audition par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, le président-directeur général du groupe a expliqué que celui-ci n’avait pas d’avis sur cette loi et qu’il exerçait ses activités dans le cadre des lois et règlements. Vous ne pouvez donc pas dire qu’EDF est contre ce texte. Quant à l’intersyndicale du groupe, elle y est plutôt très favorable.
Mme Émilie Bonnivard (LR). Nous voterons contre cet amendement, car nous souhaitons que le texte soit adopté conforme. Et puis, s’agissant de la souveraineté, entendre nos collègues de la majorité parler du nucléaire est assez drôle.
Les questions que l’on doit se poser aujourd’hui – et je rejoins le rapporteur Jumel sur ce point – sont simples : est-ce que les relations entre l’État, EDF et l’Union européenne ont permis d’obtenir des résultats ? Le prix de l’électricité est-il plus intéressant aujourd’hui pour les consommateurs ? Les investissements ont-ils été à la hauteur ? Évidemment non, c’est un échec total. La politique énergétique engagée depuis douze ans ne fonctionne pas. Il est temps de reprendre la main, de mener une vraie politique de l’énergie et de réaliser les investissements considérables qui sont nécessaires. Ces amendements ne font que noyer le poisson.
Lorsque j’ai été élue, dans une circonscription qui compte des barrages hydrauliques très importants, j’ai reçu des concurrents norvégiens d’EDF. Je leur ai demandé s’ils accepteraient qu’EDF puisse venir exploiter leurs propres barrages : ce serait impossible. EDF ne peut pas exploiter de barrages à l’étranger, mais des concurrents d’autres pays peuvent venir le faire en France. C’est contre ce genre de situation que nous nous mobilisons, pour préserver un patrimoine national de la plus haute importance, que ce soit en matière d’investissement, d’exploitation ou de propriété, cela pour assurer la souveraineté de notre pays.
M. Pascal Lecamp (Dem). Monsieur Jumel, nous ne faisons pas de l’obstruction, nous avons des convictions. Lorsqu’on n’est pas d’accord, on dépose des amendements pour participer au débat démocratique.
Votre proposition de loi a au moins le mérite d’avoir lancé un débat utile au moment où sévissait une grave crise énergétique, du fait notamment de la guerre en Ukraine et de l’arrêt de seize de nos réacteurs nucléaires. Dans ce contexte, le Gouvernement a immédiatement voulu prendre le contrôle d’EDF pour en faire, demain, un outil agile et réactif, sur un marché européen de l’énergie très concurrentiel. Le texte, lui, rigidifie l’ensemble à tous les étages – actionnariat salarié, vente d’Enedis, délais, capacité de réaction… – alors que ce marché a besoin de rapidité de réaction. Faisons confiance aux gestionnaires d’EDF pour que le groupe, comme toute entreprise dans un environnement concurrentiel, puisse réagir quand il le faut.
Pour notre part, nous sommes favorables à l’actionnariat salarié, mais à condition qu’il soit décidé par le gestionnaire de l’entreprise.
La commission rejette l’amendement CF3.
Amendement CF35 de M. Mathieu Lefèvre
M. Mathieu Lefèvre (RE). Vous assignez à EDF des objectifs de maîtrise des prix pour les ménages et les entreprises, en oubliant les indépendants. Cet amendement vise à corriger cet oubli.
Je voudrais revenir sur l’ambiguïté de certaines positions. M. le rapporteur Jumel, qui est un homme honnête, ne souhaite aucune cession d’actifs d’EDF. Les Républicains, qui sont plutôt des libéraux, disent quant à eux qu’il sera possible de changer la loi pour opérer des cessions. Monsieur Brun, c’est aussi ça, un sophisme : dire tout et son contraire à un même auditoire.
M. Philippe Brun, rapporteur. Avis défavorable, pour les raisons précédemment évoquées.
La commission rejette l’amendement CF35.
Amendement CF3 de M. Mathieu Lefèvre
M. Mathieu Lefèvre (RE). Je remarque que vous n’avez pas répondu sur les indépendants, qui semblent vous intéresser assez peu.
Vous ne pourrez pas refuser l’amendement CF3, messieurs les rapporteurs, qui criez en permanence au déni de démocratie en déplorant que le Parlement ne soit jamais consulté – alors même que vous êtes, monsieur Brun, rapporteur spécial des crédits du compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État. Je vous propose donc que le rapport d’activité prévu dans le contrat entre l’État et EDF puisse faire l’objet d’un débat devant le Parlement.
J’attends vos arguments pour vous y opposer, si vous en avez.
M. Sébastien Jumel, rapporteur. Avis défavorable, puisque cet amendement est déjà satisfait. Le PDG d’EDF doit rendre compte au Parlement, à chaque fois que celui-ci le souhaite, de la politique qu’il mène au sein de cette entreprise publique.
M. le président Éric Coquerel. Et je rappelle que l’on n’a pas besoin de cela pour qu’une commission puisse se saisir d’un tel débat.
Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Je voudrais faire remarquer aux membres de la majorité, de la précédente et de celle qui précédait encore celle-ci, que lorsqu’ils ont décidé l’abandon de certains projets ou la fermeture de centrales nucléaires, ils n’ont ni produit de rapport, ni informé le Parlement. Ces décisions ont été prises de façon très autoritaire.
J’apprécie que l’on veuille instaurer un contrôle du Parlement sur tous les sujets, mais il fallait le faire bien avant cette proposition de loi !
Mme Nadia Hai (RE). Vous ne pouvez pas nous demander de procéder à une nationalisation aussi importante que celle d’EDF tout en balayant d’un revers de main la demande d’un débat chaque année au Parlement. Bien sûr que l’on peut convoquer une audition devant la commission des finances, mais il s’agit d’une question stratégique qui intéresse tous les membres de l’Assemblée !
Je soutiens l’amendement de M. Lefèvre, qui ne coûte rien. Il ne s’agit que d’un rapport qui peut faire l’objet d’un débat devant les commissions compétentes, celles chargées des affaires économiques et du développement durable, voire devant l’ensemble des députés.
Vos arguments, monsieur Jumel, ne sont pas de nature à nous convaincre et j’invite les commissaires aux finances à voter cet amendement.
La commission rejette l’amendement CF3.
Amendements identiques CF6 de M. Mathieu Lefèvre, CF15 de M. Pascal Lecamp et CF18 de M. Emmanuel Lacresse
M. Pascal Lecamp (Dem). Au sein du groupe Démocrate, nous sommes fondamentalement pour l’actionnariat salarié. Le texte, tel qu’il est présenté, est cependant très contraignant. Il s’agit de donner aux salariés d’EDF un minimum de 2 % des actions, dans les quatre mois qui suivront la promulgation de la loi. Or je rappelle que, lors du rachat par l’État de l’intégralité des actions d’EDF, il y a six mois, la part des actions détenues par les salariés n’était que de 1,32 %. Après ce qui est arrivé à certains salariés, nous n’arriverons jamais à ce seuil de 2 %, en quatre mois. Oui, donc, à l’actionnariat salarié, mais au moment et dans les proportions que l’entreprise décidera.
M. Emmanuel Lacresse (RE). En acquérant 100 % du capital d’EDF, le Gouvernement voulait, face à la masse obligataire de la dette de l’entreprise à Londres et à Luxembourg, consolider le groupe afin qu’il puisse relancer des investissements dans le nucléaire. Vous proposez de faire immédiatement l’inverse, en donnant raison aux salariés qui ont ouvert un contentieux qui a considérablement ralenti et fragilisé le groupe.
Les dispositions relatives à l’actionnariat salarié sont particulièrement mal adaptées, notamment s’agissant du volume des actions. Et EDF n’aurait aucune possibilité de discuter des modalités de l’ouverture.
On nous parle sans cesse de la centrale de Fessenheim, mais jamais de Hinkley Point et de la façon dont cette majorité défend, depuis des années, la stabilité d’EDF, par un choix qui n’est absolument pas consensuel au sein des groupes qui soutiennent, ensemble, cette proposition de loi.
M. Philippe Brun, rapporteur. Si nous rendons obligatoire cette opération d’actionnariat salarié, c’est parce qu’il y a un historique, que je me permets de vous rappeler.
Les actionnaires salariés d’EDF ont acquis leurs titres à 25 euros en 2005, et à 66 euros en 2007. Après l’opération de retrait obligatoire, ils ont dû céder ces titres au prix de 12 euros, au cours de la pire année opérationnelle d’EDF – les résultats trimestriels qui seront annoncés dans quelques jours seront bien meilleurs. Bref, ils ont perdu les économies qu’ils avaient placées pour financer les études de leurs enfants, préparer leur retraite ou simplement constituer une épargne, et ce à cause de cette offre publique d’achat. D’une certaine manière, nous rétablissons la justice.
Pourquoi les seuils de 2 % et de 10 % ? Le premier, mis en œuvre immédiatement pour un prix de souscription de 12 euros, permettra de rétablir les salariés actionnaires dans leurs droits et de leur faire récupérer leurs économies. Quant aux 10 %, il s’agit du chiffre de la loi Pacte, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, qui fixe un objectif de 10 % d’actionnariat salarié pour les entreprises publiques. Il est ainsi écrit, à l’article 31-2 de l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, qu’en cas de cession au secteur privé d’une participation de l’État au capital d’une société dont il détient plus de 10 %, ce dernier a l’obligation de rétrocéder 10 % aux salariés. Si, lorsque l’État privatise, il est obligé de donner 10 % aux salariés, il est logique qu’il réserve également une part à l’actionnariat salarié lorsqu’il nationalise.
Nous nous inscrivons, avec cette proposition de loi, dans l’esprit de la loi Pacte et de la politique de l’État actionnaire. C’est en conformité avec ces objectifs que nous vous proposons ce dispositif.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est là exactement ce qu’il ne faut pas faire. Dans un article 2 déjà faible, cette partie portant sur l’actionnariat est particulièrement malvenue.
Si notre majorité a voulu nationaliser EDF, en acquérant 100 % de son capital, c’est afin de pouvoir prendre des décisions très rapidement, en évitant les contraintes et les délais liés à la présence d’actionnaires minoritaires. Un seul actionnaire supplémentaire, fût-il un salarié de l’entreprise, peut être à l’origine d’un défaut d’agilité pour EDF. Sommes-nous ici pour renforcer EDF face à la concurrence et développer notre politique énergétique, ou bien pour l’affaiblir ? Parce que c’est bien à un affaiblissement d’EDF qu’aboutit cet article très contraignant.
Et combien vaut l’action d’une entreprise qui n’est pas cotée ? C’est un nid colossal de contentieux juridiques. Il n’y a pas de marché : un salarié actionnaire qui ne peut pas vendre son action n’est pas un actionnaire !
Par ailleurs, chacun de nous déplore que la loi soit bavarde. Est-ce à la loi de fixer le pourcentage de l’actionnariat et le montant de l’action ? De définir des contraintes qui seront peut-être obsolètes dans quelques mois, du fait des fluctuations du prix de l’énergie ou des choix stratégiques annoncés par EDF ? Cela n’a aucun sens.
Je rappelle enfin qu’il existe déjà de nombreux outils d’intéressement des salariés au sein d’EDF : inutile d’en rajouter un.
M. Alexandre Sabatou (RN). Chers collègues, soyez honnêtes : cet achat d’actions, vous ne l’envisagez pas « le cas échéant », mais jamais. Écrivez-le !
Chers amis du MODEM, je m’étonne de votre position. À moins d’être naïfs, il est hypocrite d’arguer que le rachat des parts sociales s’est achevé il y a moins de neuf mois, en juin 2023. En effet, nous avons déjà étudié cette proposition de loi au mois de mars 2023 : vous auriez pu surseoir au rachat le temps qu’elle soit discutée ! Si, au Rassemblement national, nous avions proposé un amendement sur ce sujet – et je remercie les collègues de la majorité qui avaient alors quitté l’hémicycle afin que nous puissions l’insérer dans la loi –, c’est que les actionnaires d’EDF ont été spoliés, ainsi que l’a dit M. Brun. En 2005, l’action EDF valait 25 euros, et 66 en 2007 ; et l’État arrive quand EDF fait ses plus mauvais résultats, pour racheter les actions à 12 euros ? Ce n’est pas normal. Nous, nous ne prenons pas les Français pour des vaches à lait.
La commission rejette les amendements identiques CF6, CF15 et CF18.
Amendements identiques CF7 de M. Mathieu Lefèvre et CF17 de M. Pascal Lecamp, amendement CF19 de M. Emmanuel Lacresse (discussion commune)
M. Mathieu Lefèvre (RE). Il s’agit encore d’éviter que la loi ne rigidifie les choses. Libre à M. Brun de faire référence à la loi Pacte, mais pourquoi fixer un maximum de 10 % ? Si l’on voulait, demain, aller jusqu’à 12 %, faudrait-il repasser par vous, monsieur le rapporteur ?
M. Pascal Lecamp (Dem). Nous sommes très favorables à l’actionnariat salarié dans la limite de 10 %. Sans aller jusqu’à donner toute liberté à l’entreprise, comme nous le proposions par notre amendement CF15, nous souhaitons au moins qu’un décret puisse fixer le calendrier et le volume de la cession de capital aux salariés.
M. Emmanuel Lacresse (RE). Comme cela a été dit, nous ferions courir un risque financier considérable aux salariés qui investiraient toute leur épargne dans des actions EDF. D’abord, en effet, comme on le voit chez toutes les grandes entreprises françaises qui ont fait considérablement monter la part de leurs salariés dans le capital, comme Total, Axa ou Accor, il faut une période très longue pour y parvenir. Surtout, il n’y a pas de diversification, à moins de recourir aux instruments financiers déjà évoqués : on préfère aujourd’hui avoir recours à des instruments de diversification, des plans d’entreprise généralement gérés de manière paritaire, plutôt que d’en passer par une distribution d’une partie du capital. Enfin, l’endettement du groupe EDF et la nécessité dans laquelle il se trouve d’investir massivement, avec le soutien de l’État, imposent une période de rééquilibrage. La durée de cette période, tout comme la part du capital à laquelle les salariés, s’ils le souhaitent, pourront avoir accès, doivent évidemment être laissées à la main du Gouvernement. D’où notre proposition de passer par un décret.
M. Philippe Brun, rapporteur. Si nous voulons fixer dans la loi un plafond de 10 %, c’est que l’article 34 de la Constitution nous y oblige : « La loi fixe [...] les règles concernant [...] les nationalisations d’entreprises et les transferts de propriété d’entreprises du secteur public au secteur privé ». On ne peut pas céder ce qui relève de la propriété publique, pour des montants si importants, par un simple décret, ni par la décision du président-directeur général d’EDF ! S’agissant d’une entreprise entièrement publique, il est normal que cela relève de la loi. Avis défavorable.
Mme Véronique Louwagie (LR). Sur la forme tout d’abord, cette succession d’amendements a pour seul objectif d’empêcher l’adoption conforme du texte. Or nous en sommes à la troisième lecture, avec une rédaction équilibrée.
Sur le fond, monsieur le rapporteur général, en évoquant les difficultés de valorisation liées au caractère non coté de l’entreprise, vous mettez à mal tous les dispositifs d’épargne salariale que j’essaie, pour ma part, de promouvoir dans les petites et moyennes entreprises. Je le regrette, car ces dispositifs, qui participent du partage de la valeur ajoutée et de la négociation dans l’entreprise, vont dans le bon sens.
La commission rejette successivement les amendements identiques CF7 et CF17 et l’amendement CF19.
Suivant l’avis de M. le rapporteur Philippe Brun, la commission rejette les amendements identiques CF8 de M. Mathieu Lefèvre et CF20 de M. Emmanuel Lacresse.
Amendements identiques CF9 de M. Mathieu Lefèvre, CF16 de M. Pascal Lecamp, CF21 de M. Emmanuel Lacresse, CF36 de M. Christophe Plassard et CF40 de M. David Amiel ; amendements identiques CF10 de M. Mathieu Lefèvre et CF22 de M. Emmanuel Lacresse ; amendement CF23 de M. Emmanuel Lacresse (discussion commune)
M. Emmanuel Lacresse (RE). Ne passons pas trop vite sur ces amendements, car c’est de la propriété d’Enedis qu’il s’agit. La rédaction actuelle du texte est un symbole de rigidité. L’exemple de RTE, une filiale d’EDF partagée avec la Caisse des dépôts et consignations, nous montre pourtant qu’il existe d’autres solutions. Les trois amendements que nous vous proposons ont pour objet d’explorer ces différentes possibilités : propriété de l’État, de la Caisse des dépôts et consignations ou d’autres entreprises du secteur public.
Nous voulons souligner enfin la spécificité d’Enedis, qui n’est jamais que l’exploitant des concessions du courant faible, lesquelles ont toujours appartenu aux communes, et non pas à EDF.
M. Philippe Brun, rapporteur. Nous ne sommes pas favorables à ce que les dividendes de l’activité de réseau, qui sont importants, aillent à la rémunération du livret A et à la Caisse des dépôts et consignations. Chaque euro collecté dans le domaine de l’énergie doit servir la transition énergétique. Le résultat d’Enedis doit donc nourrir le résultat d’EDF et d’aucun autre investisseur, public ou privé. Il faut protéger Enedis : 100 % de son capital doit appartenir à EDF. Avis défavorable.
M. Emmanuel Lacresse (RE). Il y a certes une rémunération éventuelle de la Caisse des dépôts, mais uniquement dans le cadre du fonds de propriété des entreprises constitué il y a déjà quinze ans. La Caisse des dépôts y est actionnaire de La Poste ainsi que d’assurances. Ce fonds n’est pas relié au livret A, qui reste dédié au seul logement social.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est tout de même incroyable : il faudrait protéger Enedis d’actionnaires tels que l’État, la Caisse des dépôts ou d’autres opérateurs publics ? À vous croire, Enedis courrait un grave danger si l’État venait à intervenir directement dans son actionnariat ! Pourquoi apporter de la rigidité dans le développement de cet acteur essentiel de notre souveraineté énergétique ?
Autre point de désaccord : selon vous, il ne faudrait surtout pas que les profits dégagés par Enedis puissent être captés par l’État ou par la Caisse des dépôts et consignations. Mais c’est tout l’inverse ! Enedis a un besoin massif de capitaux. Tous les députés ici présents savent qu’il y a des demandes, par exemple pour des champs photovoltaïques, qui ne sont pas satisfaites faute de moyens de la part d’Enedis. Il faut se donner la possibilité de développer Enedis. Il faut qu’EDF puisse décider elle-même de l’opportunité, à un moment donné, d’ouvrir à l’État – mon Dieu ! – ou à un opérateur public – quelle horreur ! – le capital d’Enedis.
La commission rejette successivement les amendements identiques CF9, CF16, CF21, CF36 et CF40, les amendements identiques CF10 et CF22 et l’amendement CF23.
Elle adopte l’article 2 non modifié.
*
* *
Issu d’un amendement du rapporteur, sous-amendé par M. Sébastien Rome et Mme Alma Dufour (LFI-NUPES), l’article 3 bis, introduit lors de l’examen du texte en commission en première lecture à l’Assemblée nationale, étend le bénéfice des tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVE) à deux nouvelles catégories de bénéficiaires parmi les consommateurs finals non-domestiques :
– les très petites entreprises (TPE), quelle que soit leur puissance électrique ;
– pour l’année 2023, les petites et moyennes entreprises (PME) et entreprises de taille intermédiaire (ETI).
En séance, l’Assemblée a adopté un amendement de M. Sébastien Rome pour préciser que, par dérogation au dispositif du « bouclier tarifaire » prévu à l’article 181 de la loi de finances pour 2023 ([3]), les pertes de recettes collectées pour les fournisseurs proposant ces tarifs ne font pas l’objet d’une compensation par l’État au titre des charges de service public.
La commission des finances du Sénat a restreint le périmètre des consommateurs finals concernés par la mesure, en le concentrant sur les TPE.
Pour ce faire, adoptant un amendement de son rapporteur, M. Gérard Longuet (LR), elle a substitué à celle de l’article L. 337-8 du code de l’énergie prévue par le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale en première lecture, une modification de l’article L. 337-7 du même code, consistant en la suppression de la condition d’une limite de puissance souscrite, de telle sorte que les TPE souscrivant une puissance supérieure à 36 kilovoltampères, dont le nombre est difficile à estimer, ne soient plus exclues du bénéfice des TRVE.
En séance, le Sénat a tout d’abord rejeté l’article 3 bis, avant de l’adopter dans la rédaction proposée par la commission à la suite d’une seconde délibération demandée par le groupe socialiste, écologiste et républicain (SER).
La commission des finances de l’Assemblée nationale n’a pas modifié le texte de l’article 3 bis issu des travaux, en première lecture, du Sénat.
En séance, ont toutefois été adoptés, contre l’avis de la commission et du Gouvernement, trois amendements, dont l’objet était d’étendre le périmètre d’éligibilité des TRVE aux PME ([4]), aux collectivités territoriales de moins de 50 000 habitants ([5]) et aux organismes d’habitation à loyer modéré (HLM) ([6]).
Par l’adoption d’un amendement de sa rapporteure, Mme Christine Lavarde (LR), la commission des finances du Sénat a rétabli la rédaction issue des travaux du Sénat en première lecture, tout en précisant que cette extension de l’éligibilité aux TRVE recentrée sur les consommateurs finals domestiques, les TPE et les collectivités de taille équivalente, sans considération de la puissance du compteur, entrerait en vigueur le 1er février 2025, afin, aux termes de l’exposé des motifs de l’amendement, « de tenir compte du délai incompressible relatif à la procédure de détermination des nouveaux tarifs par la Commission de régulation de l’énergie ». La date retenue serait effectivement « l’échéance la plus proche qui soit envisageable pour mettre en œuvre cette disposition ».
En séance, le Sénat a adopté l’article ainsi modifié.
La commission a adopté cet article sans modification.
*
* *
Amendements de suppression CF14 de M. Jean-René Cazeneuve et CF26 de M. Emmanuel Lacresse
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Au risque de déplaire, je fais remarquer que la NUPES et le Rassemblement national votent ensemble, une fois de plus, alors que leurs visions de la stratégie énergétique nationale sont à l’opposé. Cela me fait sourire.
Le grand problème, c’est qu’il n’y a pas un mot dans ce texte dont vous dites qu’il a été voté deux fois qui ait figuré dans le texte initial. Cela pose un problème constitutionnel, en particulier s’agissant des tarifs réglementés de vente de l’électricité. Il s’agit clairement d’un cavalier législatif, au titre de l’article 45 de la Constitution, et d’une nouvelle charge pour l’État, au sens de l’article 40 de la Constitution.
Dans sa rédaction actuelle, cet article est cependant bien plus raisonnable que les différentes versions qui en avaient été votées ici, et je salue à cet égard le travail des sénateurs.
Je retire mon amendement, mais je tiens à redire que ce texte ne respecte pas notre Constitution.
M. Emmanuel Lacresse (RE). Avant de retirer également mon amendement, je voudrais souligner toute la difficulté qu’il y a à vouloir faire de l’économie réglementée comme on la pratiquait dans les années 70 et 80. Quand le texte a été rédigé, on pouvait discuter du niveau des prix de l’électricité. Aujourd’hui, grâce à l’action du Gouvernement et des fournisseurs comme au cadre du marché, ces prix sont redescendus à leur niveau d’avant la crise. Il n’est plus nécessaire d’avoir cette discussion d’une autre époque.
Les amendements de suppression sont retirés.
Amendement CF1 de M. Nicolas Ray
M. Nicolas Ray (LR). Cet amendement, adopté par l’Assemblée nationale en séance publique, vise à étendre les TRVE aux collectivités comptant jusqu’à 50 000 habitants. Il est à l’heure actuelle réservé aux communes ayant moins de dix employés et dont les recettes annuelles sont inférieures à 2 millions d’euros. Cela correspond à la définition des TPE, appliquée d’une manière que je trouve surprenante aux collectivités. Cette définition exclut 21 500 communes et crée une inégalité d’accès aux services publics, puisque toutes les communes exclues des TRVE éprouvent de grandes difficultés à les assurer.
On me rétorquera que cet amendement n’est pas conforme au droit européen. C’est d’abord l’occasion pour le Gouvernement de demander une dérogation, justifiée par le nombre important de ces communes en France – et ce maillage communal fait notre fierté. Ensuite, le droit européen est en train d’évoluer. Le règlement européen du 6 octobre 2022 sur une intervention d’urgence pour faire face aux prix élevés de l’énergie a élargi le dispositif de fixation des prix de l’électricité aux PME. C’est une occasion pour réintroduire un peu de justice dans l’accès au TRVE, en particulier pour nos concitoyens de la ruralité.
M. Philippe Brun, rapporteur. J’approuve votre amendement sur le fond, raison pour laquelle nous l’avions voté en deuxième lecture à l’Assemblée nationale. Les sénateurs, en particulier les sénateurs LR, ont toutefois décidé de ne pas le maintenir. L’adopter à nouveau anéantirait tous nos efforts pour obtenir des réductions tarifaires pour nos boulangers, nos artisans, nos commerçants. C’est pourquoi je vous propose, afin que nous puissions obtenir un vote conforme, de retirer votre amendement.
Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). C’est en effet l’occasion de rappeler que les sénateurs LR, majoritaires, ont voulu empêcher l’extension des TRVE aux PME, aux collectivités, aux bailleurs sociaux. Nous suivons M. le rapporteur Brun dans sa volonté de ne pas faire échouer l’adoption du texte, mais nous regrettons profondément la situation. Le droit européen doit s’interpréter avec souplesse, comme l’a fait le Gouvernement lui-même en promettant d’étendre les TRVE aux TPE, alors que rien ne le permet dans le droit européen. D’autres promesses contraires au droit européen ont été faites. La France, premier exportateur net d’électricité en Europe, est parfaitement en mesure d’imposer les réductions tarifaires souhaitables pour les Français, les collectivités, les petites entreprises et les logements sociaux.
M. Mathieu Lefèvre (RE). J’aimerais comprendre ce qui motive l’avis défavorable du rapporteur à un amendement auquel il est en réalité favorable, tout comme Mme Dufour.
M. le président Éric Coquerel Vous le savez très bien : la navette se poursuivrait si le texte n’était pas voté conforme.
M. Mathieu Lefèvre (RE). Dans le cadre de nos institutions, une nouvelle lecture vous donne le droit d’amender le texte. M. Brun renvoie tout cela à plus tard, mais quand, si c’est si important pour vous ? La politique, c’est sérieux. On ne peut pas être favorable à une disposition et voter contre celle-ci.
M. Nicolas Ray (LR). Je reste profondément attaché à cet amendement, mais j’entends vos arguments sur l’avenir du texte et je le retire. Il n’empêche qu’il faudra y revenir dans les meilleurs délais.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je reprends l’amendement.
M. le président Éric Coquerel Je note, monsieur le rapporteur général, que vous reprenez un amendement pourtant contraire, selon votre analyse, à l’article 40 de la Constitution. Je ne partage pas cette analyse, mais je tenais à souligner la contradiction.
La commission rejette l’amendement CF1.
Amendement CF30 de M. Emmanuel Lacresse
M. Emmanuel Lacresse (RE). Que l’on s’oppose ou non à l’extension de l’éligibilité aux TRVE, il est incontestable qu’il s’accompagne d’une compensation versée à EDF. Si les tarifs sont moins élevés que le cours du marché, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, il faut prévoir une notification à la Commission européenne.
Suivant l’avis de M. le rapporteur Philippe Brun, la commission rejette l’amendement.
Amendements CF32 de M. Emmanuel Lacresse, CF5 de M. Mathieu Lefèvre, CF41 de M. David Amiel et CF33 de M. Mathieu Lefèvre (discussion commune)
M. Emmanuel Lacresse (RE). Il s’agit simplement de repousser l’entrée en vigueur de l’article, qui ne se justifie pas au regard des conditions de marché actuelles puisque nous avons réussi à faire baisser les cours de l’énergie.
M. Mathieu Lefèvre (RE). Si l’on croit à cette disposition, il faut qu’elle entre en vigueur le plus tôt possible. Ne souriez pas, monsieur Jumel, il faut être cohérent ! Nous vous proposons donc qu’elle entre en vigueur dès la promulgation de la loi, que vous souhaitez manifestement rapide.
M. Philippe Brun, rapporteur. Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). Vous connaissez tous Ferdinand Lop, l’humoriste de l’entre-deux-guerres : il était pour tout ce qui était contre, et contre tout ce qui était pour. Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende.
La commission rejette successivement les amendements CF32, CF5, CF41 et CF33.
La commission adopte l’article 3 bis non modifié.
*
* *
L’amendement CF11 de M. Mathieu Lefèvre est retiré.
La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi non modifiée.
*
* *
([1]) Les missions figurant dans le texte initial sont la production, le transport, la distribution, l’importation et l’exportation d’électricité ; le développement, la construction, l’exploitation et la maintenance des sources d’énergie hydraulique, nucléaire, renouvelable et thermique ; la prestation de services énergétiques.
([2]) L’exposé sommaire de l’amendement explique que « cette disposition permet de décliner au plan législatif une obligation constitutionnelle, prévue à l’alinéa 9 du préambule de la Constitution de 1946, en vertu duquel “tout bien, toute entreprise, dont l’exploitation a ou acquiert les caractères d’un service public national ou d’un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité” ». Ainsi, « le capital d’Enedis ne saurait par conséquent être ouvert à des capitaux privés ».
([3]) Loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
([4]) Amendement n° 6 de M. Michel Sala (LFI-NUPES).
([5]) Amendement n° 10 de M. Nicolas Ray (LR).
([6]) Amendement n° 8 de M. William Martinet (LFI-NUPES).