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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 avril 2025.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI,
visant à réformer le mode d’élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (n° 451)
PAR M. Jean-Paul MATTEI
Député
——
SOMMAIRE
___
Pages
INTRODUCTION............................................ 5
Commentaire des articles de la proposition de loi
Article 4 Entrée en vigueur du nouveau scrutin
Réunion du mercredi 2 avril 2025 à 9 heures
Réunion du mercredi 2 avril 2025 à 14 heures 45
La loi du 31 décembre 1982 portant modification de certaines dispositions du code électoral relatives à l’élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille, dite « loi PLM », a modifié les modalités électorales dérogatoires qui prévalaient alors pour les élections municipales à Paris, Lyon et Marseille, qui sont les villes les plus peuplées de France, et sont à ce titre soumises à un scrutin d’exception justifié par leur population, de plus de 500 000 habitants.
Le scrutin y est, depuis les élections municipales de 1983, toujours organisé à l’échelle des secteurs, mais les électeurs votent dans leur secteur pour élire non plus leur conseil municipal, mais un conseil d’arrondissement, selon les mêmes modalités que dans toutes les autres grandes villes de France. Parmi les listes représentées au conseil d’arrondissement, certains de ces élus sont fléchés pour représenter ces arrondissements au Conseil de Paris ou aux conseils municipaux de Lyon et de Marseille, leur nombre étant déterminé par le poids géographique de chaque secteur.
Cette spécificité, qui devait permettre de rapprocher les élus de leurs électeurs en organisant l’élection à une échelle infra-communale, n’a pourtant pas rempli sa promesse démocratique. Au contraire, le scrutin électoral parisien, lyonnais et marseillais s’avère être un facteur de complexité supplémentaire pour les électeurs. Il fragilise l’assise électorale d’un maire dont les modalités d’élection sont peu intelligibles, et peut légitimement susciter des interrogations. Ainsi, au gré des scrutins, la participation citoyenne s’essouffle et les taux d’abstention sont, à Paris, Lyon et Marseille, particulièrement élevés.
La loi PLM a également contribué à nourrir des logiques politiques propres à ces trois villes, conduisant certains élus et candidats à favoriser certains territoires de la commune au détriment des autres, en fonction des dynamiques électorales qui leur sont favorables. Dans ces trois villes, la voix de chaque électeur n’a pas le même poids, en fonction de son arrondissement d’habitation : la voix d’un électeur de gauche dans le XVème arrondissement parisien ou d’un électeur de droite dans le XIème n’emporte aucune conséquence sur l’issue certaine du scrutin dans ces arrondissements.
Elle peut, dans des cas rares mais qui ne peuvent cependant pas être écartés, conduire à une anomalie démocratique selon laquelle un candidat minoritaire en voix pourrait néanmoins remporter la mairie, comme cela fut le cas en 1983 à Marseille.
Il apparaît aujourd’hui logique de rétablir un lien direct entre l’électeur et son maire et d’appliquer à Paris, Lyon et Marseille les principes électoraux qui prévalent partout ailleurs en France. C’est l’objet de cette proposition de loi, qui vise à instaurer un double scrutin municipal : les électeurs des trois plus grandes villes de France voteraient au scrutin de liste, d’une part pour élire leurs représentants au Conseil de Paris ou aux conseils municipaux de Lyon et de Marseille, comme dans toutes les grandes villes de 1 000 habitants. Ils éliraient également, d’autre part, leurs conseils d’arrondissement.
La proposition de loi permet ainsi de conserver la proximité locale qu’incarnent les arrondissements, tout en rendant le scrutin municipal plus juste. Elle s’accompagne d’une nécessaire réflexion sur la répartition des compétences entre les mairies d’arrondissement et l’échelon municipal, que le législateur devra poursuivre dans les mois à venir. Elle constitue, à n’en pas douter, une avancée démocratique pour Paris, Lyon et Marseille.
*
* *
Commentaire des articles de la proposition de loi
Adopté par la Commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 1er modifie les règles électorales applicables lors des élections municipales de Paris, Lyon et Marseille. Il instaure deux scrutins distincts et simultanés : le premier pour élire les membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille – pour lequel il fixe la prime majoritaire appliquée lors de ces élections à un taux dérogatoire de 25 % – et le second pour élire les conseils d’arrondissement de ces trois mêmes villes.
Dernières modifications législatives intervenues
La loi n° 82-1170 du 31 décembre 1982 portant modification de certaines dispositions du code électoral relatives à l’élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille a introduit des modalités électorales dérogatoires pour les scrutins municipaux de ces trois villes.
Position de la Commission
Outre un amendement rédactionnel de votre rapporteur, la Commission des Lois a adopté un amendement CL22 de M. Sylvain Maillard, sous-amendé par un amendement CL69 de votre rapporteur. Ces deux amendements apportent diverses corrections de nature correctionnelle au sein du code électoral.
Dans ces trois collectivités, les habitants n’élisent pas directement le conseil municipal, mais votent à une échelle plus locale, par secteur, pour élire leur conseil d’arrondissement. Chaque conseil envoie à son tour plusieurs de ses membres – en fonction de son poids démographique – qui deviennent conseillers de Paris ou conseillers municipaux. Ce sont eux qui, au sein du conseil, élisent in fine le maire de la commune, à l’instar de tous les autres conseils municipaux en France.
Avec la loi « PLM », les membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille continuent à être élus par secteur. Si, à Lyon comme à Paris, un secteur couvre un arrondissement – à l’exception du secteur de Paris centre – il en est différemment à Marseille, où chaque secteur comprend deux arrondissements.
L’article L. 261 du code électoral pose d’abord comme principe que « la commune forme une circonscription électorale unique ». Toutefois, la loi PLM y a confirmé l’exception pour les seules villes de Paris, Lyon et Marseille. Le second alinéa de ce même article dispose ainsi que « les membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille sont élus par secteur ».
Trois tableaux, annexés au code électoral et reproduits ci-après, déterminent le nombre de secteurs pour chaque ville, ainsi que le nombre de conseillers de Paris ou municipaux élus dans chacun de ces secteurs. Ces tableaux précisent le nombre de conseillers de Paris (163) et de conseillers municipaux à Lyon et Marseille (respectivement, 73 et 101), qui figure également au sein du code général des collectivités territoriales (CGCT) ([1]).
Tableau pour l’élection des membres du Conseil de Paris (annexe n° 2 du code électoral)
Désignation des secteurs |
Arrondissements constituant les secteurs |
Nombre de sièges |
1er secteur |
1er, 2e, 3e et 4e ([2]) |
8 |
5e secteur |
5e |
4 |
6e secteur |
6e |
3 |
7e secteur |
7e |
4 |
8e secteur |
8e |
3 |
9e secteur |
9e |
4 |
10e secteur |
10e |
7 |
11e secteur |
11e |
11 |
12e secteur |
12e |
10 |
13e secteur |
13e |
13 |
14e secteur |
14e |
10 |
15e secteur |
15e |
18 |
16e secteur |
16e |
13 |
17e secteur |
17e |
12 |
18e secteur |
18e |
15 |
19e secteur |
19e |
14 |
20e secteur |
20e |
14 |
Total |
163 |
Tableau pour l’élection des conseillers municipaux de Lyon (annexe n° 3 du code électoral)
Désignation des secteurs |
Arrondissements |
Nombre de sièges |
1er secteur |
1er |
4 |
2e secteur |
2e |
5 |
3e secteur |
3e |
12 |
4e secteur |
4e |
5 |
5e secteur |
5e |
8 |
6e secteur |
6e |
9 |
7e secteur |
7e |
9 |
8e secteur |
8e |
12 |
9e secteur |
9e |
9 |
Total |
73 |
Tableau pour l’élection des conseils municipaux de Marseille (annexe n° 4 du code électoral)
Désignation des secteurs |
Arrondissements constituant les secteurs |
Nombre de sièges |
1er secteur |
1er, 7e |
11 |
2e secteur |
2e, 3e |
8 |
3e secteur |
4e, 5e |
11 |
4e secteur |
6e, 8e |
15 |
5e secteur |
9e, 10e |
15 |
6e secteur |
11e, 12e |
13 |
7e secteur |
13e, 14e |
16 |
8e secteur |
15e, 16e |
12 |
Total |
101 |
La loi détermine par ailleurs un nombre plancher et plafond de conseillers d’arrondissement ([3]).
Le chapitre IV du titre V du code électoral, consacré aux dispositions particulières concernant Paris, Lyon et Marseille, décline les modalités d’organisation de ce scrutin par arrondissement. Ainsi, dans ces trois villes, les conseillers d’arrondissement sont élus en même temps que les membres du Conseil de Paris ou du conseil municipal ([4]) par un scrutin unique.
En conséquence, dans ces collectivités, le maire est élu au scrutin indirect, les électeurs parisiens, lyonnais et marseillais ne votant que pour élire leurs conseillers d’arrondissements, tandis que le reste de la France élit directement ses conseillers municipaux.
Récapitulatif du cas général et des règles particulières à PLM
Règle générale (communes de plus de 1 000 habitants) |
Les électeurs votent pour des listes composant leur conseil municipal |
Les conseillers municipaux élus votent pour le maire de la commune |
|
Règles particulières pour Paris, Lyon et Marseille |
Les électeurs votent pour des listes composant leur conseil d’arrondissement |
Parmi les conseillers d’arrondissement élus, certains sont désignés conseillers de Paris ou conseiller municipal et siégeront dans ces instances |
Lors de leur première réunion, les conseillers de Paris ou les conseillers municipaux de Lyon et Marseille votent pour le maire de la commune |
Ainsi qu’en dispose l’article L. 272 du code électoral, l’élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille, ainsi que celle des conseillers d’arrondissement, ont lieu dans les conditions prévues par le droit commun pour les villes de plus de 1 000 habitants, sous réserve des dispositions particulières prévues par la loi PLM.
Ainsi, les modalités de distribution des sièges à l’issue des premier et second tours de scrutin répondent aux règles générales, déterminées par l’article L. 262 du même code. Au premier tour de scrutin, la liste ayant obtenu la majorité absolue des suffrages obtient donc la majorité des sièges, le reste des sièges étant réparti entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne.
Les différents types de scrutin proportionnels
S’il existe de nombreuses modalités d’organisation d’une élection à la représentation proportionnelle, il est généralement recouru à quatre principales méthodes :
– la méthode du plus fort reste : dans un premier temps, les voix obtenues par chaque liste sont divisées par le nombre de voix nécessaires pour obtenir un siège (lequel est calculé en divisant le nombre total de suffrages valablement exprimés par le nombre de sièges en jeu, c’est-à-dire le « quotient électoral ») ce qui permet de déterminer le nombre de sièges obtenus par chaque liste. Les sièges restant sont ensuite répartis en fonction des voix non utilisées pour la première répartition, ce qui avantage les petits partis n’ayant pas obtenu suffisamment de voix pour atteindre le quotient électoral. Ce type de scrutin est notamment utilisé en Italie dans le cadre des élections européennes ;
– la méthode de la plus forte moyenne selon Hondt : les sièges sont répartis selon le quotient électoral de la même manière que dans le cadre de la méthode du plus fort reste, mais les sièges non attribués sont partagés entre les listes en divisant le nombre de suffrages obtenus par la liste par le nombre de sièges déjà acquis plus un. La liste ayant la plus forte moyenne obtient le siège supplémentaire. Ce type de scrutin, qui avantage plutôt les partis ayant réalisé les meilleurs scores, est utilisé dans le cadre des élections sénatoriales françaises dans les départements élisant plus de trois sénateurs et l’est également largement dans les autres pays européens ;
– le vote unique transférable : les électeurs votent en définissant un ordre de préférence entre les candidats en lice. Les sièges sont d’abord répartis entre les candidats ayant obtenu un vote de premier rang et ayant atteint un nombre de voix égal ou supérieur au quotient électoral plus un. Le dernier candidat est ensuite éliminé et ses voix, ainsi que les excédents de voix du candidat vainqueur, sont réattribuées aux candidats « de second rang » sur le bulletin de vote. Cette opération est renouvelée jusqu’à ce qu’un nouveau candidat atteigne un nombre de voix égal ou supérieur au quotient électoral plus un et jusqu’à ce que tous les sièges soient attribués. Ce type de scrutin proportionnel est utilisé en Irlande, dans des circonscriptions comprenant généralement entre 2 et 5 sièges ;
– le vote préférentiel : les électeurs votent pour un parti, mais ils peuvent également désigner, selon les pays et les scrutins, plusieurs candidats, soit d’une même liste, soit de listes différentes. Les sièges sont répartis en fonction des scores obtenus par les partis et en fonction des scores personnels des candidats. Ce type de scrutin est notamment utilisé dans le cadre des élections législatives en Norvège.
Si aucune liste n’atteint la majorité absolue au premier tour, la même règle s’applique au second tour, au bénéfice de la liste ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages. Dans tous les cas, les listes obtenant moins de 5 % des suffrages exprimés ne disposent d’aucun siège.
L’article L. 272-5 du code électoral précise, s’agissant de Paris, Lyon et Marseille, qu’« une fois effectuée l’attribution des sièges de membre du Conseil de Paris ou du conseil municipal en application des dispositions de l’article L. 262, les sièges de conseiller d’arrondissement sont répartis dans les mêmes conditions entre les listes. »
La loi PLM a confirmé des modalités de scrutin favorisant de fait certains arrondissements, au détriment de la commune dans son intégralité.
En effet, l’organisation du suffrage par arrondissement, et non à l’échelle de la ville, peut conduire à privilégier certains de ses arrondissements, en fonction des dynamiques électorales à l’œuvre dans ces arrondissements : si un arrondissement vote majoritairement pour un parti politique, ce parti peut ainsi être tenté de concentrer les moyens à sa disposition pour garantir son élection ou sa réélection dans ce territoire. À l’inverse, un arrondissement ne lui étant pas favorable pourrait être moins considéré par ce même parti politique. Il en est de même des arrondissements « trop » favorables aux candidats, où il ne paraît pas nécessaire de faire campagne. De fait, l’élection se concentre alors dans les arrondissements médians au détriment des autres.
Le mode de scrutin actuel peut conduire à distordre de manière considérable les équilibres politiques à l’échelle de la commune, en fonction des résultats obtenus dans les arrondissements. Ainsi, en 1983 à Paris, Jacques Chirac a certes remporté tous les arrondissements parisiens – et donc, de très nombreux conseillers d’arrondissement du fait de l’application de la prime majoritaire de 50 % au sein de ces conseils – mais alors que la droite parisienne avait obtenu 61,5 % des voix au premier tour et 51,6 % des voix au second à l’échelle de la ville, elle a décroché 140 sièges au Conseil de Paris, soit plus de 86 % des élus de cette assemblée.
Les défauts de ce scrutin dérogatoire ont été relevés tout au long des travaux menés par votre rapporteur. Le manque de lisibilité du scrutin a ainsi été déploré par M. Benoît Payan, maire de Marseille, que votre rapporteur a auditionné. M. Pierre Huguet, président du groupe Printemps Marseillais, a abondé dans le même sens. Ainsi, si « partout en France, le lien direct avec le maire se matérialise par un vote clair : un électeur ou une électrice correspond à une voix (…), ce principe fondamental est aujourd’hui contourné à Marseille, comme à Paris et à Lyon. » Dès lors, « faire en sorte que les Marseillaises et les Marseillais aient les mêmes conditions de vote que les autres communes pour élire leurs représentants [permettrait] permettrait de rendre plus claire l’élection municipale et de renforcer le lien, par le vote, entre le corps électoral et sa représentation à la mairie centrale. » ([5])
L’aspiration à une élection directe des conseillers municipaux est partagée par plusieurs élus consultés par votre rapporteur. Tout en manifestant auprès de votre rapporteur leurs réticences vis-à-vis de la présente proposition de loi, les co‑présidents du groupe Lyon en commun, MM. David Souvestre et Alexandre Chevalier, ont souligné être « favorables à l’élection au suffrage universel direct des élus du Conseil municipal, afin de renforcer leur légitimité démocratique » ([6]). Cette position est également partagée par les élus du groupe Progressistes et Républicains à Lyon et par M. Lionel Royer-Perreaut, ancien maire des 9ème et 10ème arrondissements de Marseille et président du groupe Ensemble pour les Marseillais, qui l’ont indiqué dans leurs contributions écrites.
Votre rapporteur relève cependant que le scrutin par arrondissement tel qu’il existe aujourd’hui a été salué par d’autres élus, qui y voient au contraire un moyen de créer et de renforcer les liens entre les élus locaux et les électeurs, et relèvent que l’échelon de proximité que représentent les arrondissements est apprécié par leurs habitants. Cette position était notamment défendue par les maires de Paris et de Lyon, Mme Anne Hidalgo et M. Grégory Doucet, au cours de leurs auditions. Ce dernier a notamment insisté sur le fait que les Lyonnais ont désormais l’habitude du scrutin par arrondissement et cette stabilité du mode de scrutin en assurerait, selon le maire, le bon déroulement et la meilleure visibilité.
La logique électorale de la loi PLM peut conduire à une situation où un maire est élu tout en recueillant moins de suffrages que son adversaire.
Si une telle situation est rare, elle n’est pas improbable : en 1983, à Marseille, le maire sortant, M. Gaston Defferre – au demeurant à l’initiative de la loi PLM – est réélu pour un sixième mandat tout en obtenant plusieurs milliers de voix de moins que son adversaire de droite, en cumulant les résultats du premier et second tours (179 098 voix contre 176 601 voix). Les élus auditionnés ont cependant écarté cette crainte pour l’avenir : la maire de Paris, Mme Anne Hidalgo, a notamment rappelé à votre rapporteur qu’un tel cas de figure n’est jamais arrivé ni à Paris ni à Lyon et que l’exception marseillaise de 1983, qui ne s’est plus reproduite, pouvait alors s’expliquer par un mauvais découpage des secteurs.
Par ailleurs, il est également possible d’être élu maire de Paris, Lyon ou Marseille sans être arrivé en tête du scrutin dans son propre arrondissement, pourvu que le candidat siège in fine au Conseil de Paris ou dans les conseils municipaux de Lyon et Marseille.
Comme l’a finalement relevé M. Eric Woerth, auteur du rapport « Décentralisation : Le temps de la confiance » remis le 30 mai 2024 au Président de la République, « ce mode d’élection pose un problème démocratique. Un maire peut être élu avec une minorité de voix, du fait de l’élection des conseillers municipaux par arrondissement avec une prime majoritaire de 50 %. (…) L’élection au suffrage universel direct du maire de ces trois villes renvoie ainsi à l’impératif de clarté des choix démocratiques. »
L’article premier de la proposition de loi instaure deux élections municipales simultanées : l’une pour les conseillers de Paris et les conseillers municipaux de Lyon et de Marseille, qui seraient élus au scrutin de liste à deux tours sur une circonscription unique, l’autre pour les conseillers d’arrondissement, qui seraient élus selon les mêmes modalités qu’aujourd’hui.
Les trois premiers alinéas de l’article premier suppriment le principe, inscrit à la seconde phrase de l’article L. 261 du code électoral, selon lequel l’élection des membres du Conseil de Paris et des membres des conseils municipaux de Lyon et de Marseille a lieu par secteur. Cette modification permet de facto l’élection du maire de ces communes selon les mêmes modalités que dans toutes les autres villes de plus de 1 000 habitants, c’est-à-dire par un scrutin de liste à l’échelle de la commune.
L’article maintient l’élection des conseils d’arrondissement selon les mêmes modalités qu’aujourd’hui. L’alinéa 2 dispose ainsi qu’outre l’élection des conseillers de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille au sein d’une circonscription unique, « des conseillers d’arrondissement sont également élus par secteur dans les mêmes conditions ».
Le troisième alinéa, qui complète l’article L. 271 du code électoral, précise que ces deux élections (à l’échelle du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille d’un côté, et des conseils d’arrondissement de ces trois villes l’autre) ont lieu en même temps « par deux scrutins distincts ».
En outre, les alinéas 7 à 9 réécrivent l’article L. 272-3, qui pose pour principe que les listes de candidats doivent comprendre autant de noms qu’il y a de sièges à pourvoir, afin de décliner cette obligation, déjà inscrite dans le code électoral, aux deux scrutins simultanés prévus par la proposition de loi.
Dans sa nouvelle rédaction, l’article L. 272-3 modifié par la proposition de loi dispose par ailleurs qu’un candidat peut à la fois, dans sa ville, candidater au Conseil de Paris ou au conseil municipal de Lyon ou de Marseille, et au conseil d’arrondissement (alinéa 9).
Les alinéas 4 et 5 introduisent un nouvel article L. 272-4-1 au sein du code électoral. Celui-ci prévoit, pour la seule élection municipale – et donc pas pour les scrutins d’arrondissement – une dérogation à la prime majoritaire de 50 % des sièges pour la liste ayant obtenu une majorité absolue au premier tour ou le plus grand nombre de voix au second.
Ainsi, pour l’élection du Conseil de Paris ou du conseil municipal de Lyon et de Marseille, cette prime majoritaire est égale « au quart du nombre de sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, à l’entier supérieur », soit une prime majoritaire fixée à 25 %.
Le montant de cette prime a fait l’objet de nombreuses discussions au cours des auditions menées par votre rapporteur. Il en ressort qu’elle est motivée par un souci d’améliorer la représentation des oppositions au sein de ces conseils, et d’éviter un phénomène d’écrasement majoritaire de la liste parvenue en tête, dont votre rapporteur déplore qu’il existe néanmoins pour toutes les autres grandes villes de France.
Enfin, et par cohérence, le dernier alinéa supprime les articles L. 275-5 et L. 275-6 du code électoral, qui prévoient les modalités de répartition des sièges aux conseils d’arrondissement et de remplacement des conseillers de Paris ou des conseillers municipaux.
Les dispositions prévues par cet article – et, plus largement, le reste de la proposition de loi qui les décline – n’ont pas fait l’objet, comme nous l’avons souligné précédemment, d’un consensus parmi l’ensemble des personnes que votre rapporteur a sollicitées, certains élus y étant opposés, à l’instar de la maire de Paris, Mme Anne Hidalgo, et du maire de Lyon, M. Grégory Doucet, et de plusieurs élus d’arrondissement, toutes tendances politiques confondues. Toutefois, votre rapporteur relève également que de nombreux autres élus ont souligné leurs aspirations à l’instauration d’une élection directe des conseillers municipaux des trois plus grandes villes françaises que porte cet article.
La Commission des Lois a adopté cet article, qu’elle a seulement corrigé par un amendement CL22 de M. Sylvain Maillard, sous-amendé par un amendement CL69 de votre rapporteur, tous deux de nature rédactionnelle.
L’amendement CL22 procède en effet à plusieurs corrections techniques au sein de diverses dispositions du code électoral, rendues nécessaires par l’adoption du présent article. Cet amendement procède, à titre principal, à :
– la suppression du renvoi à l’article L. 272-6 du code électoral, abrogé par la présente proposition de loi, opéré à l’article L. 46-1 du même code ;
– une clarification de l’article L. 225 du code électoral, pour préciser que Lyon et Marseille dérogent également au droit commun fixé à l’article L. 2121-2 du CGCT pour le nombre de conseillers d’arrondissement. Le nombre des conseillers de Paris est en effet fixé par l’article L. 2512-3 du CGCT et le nombre des conseillers municipaux de Lyon et Marseille est fixé par l’article L. 2513-2 du même code ;
– enfin, cet amendement exclut explicitement, à l’article L. 272-3 du code électoral, la possibilité pour un candidat de porter sa candidature au conseil municipal de Lyon ou Marseille ou au Conseil de Paris et au conseil d’un arrondissement d’une autre de ces communes.
Le sous-amendement CL69 de votre rapporteur complète ces dispositions. Il modifie l’article L. 52-3 du code électoral, qui fixe les règles applicables aux bulletins de vote, pour permettre que figurent, sur les bulletins pour l’élection aux conseils d’arrondissement, le cas échéant, le nom et la photographie du candidat tête de liste pour l’élection au Conseil de Paris ou aux conseils municipaux de Lyon et Marseille.
En outre, la Commission a également adopté un amendement rédactionnel CL38 de votre rapporteur.
*
* *
Introduit par la Commission
Résumé du dispositif et effets principaux
Dans sa rédaction actuelle, la proposition de loi ne prévoit pas les modalités de désignation des conseillers métropolitains élus à Paris et à Marseille ([7]). La Commission des Lois a adopté un amendement CL67 de votre rapporteur afin de permettre leur élection à partir des listes déposées pour l’élection des membres du Conseil de Paris ou du conseil municipal de Marseille, comme cela est le cas dans l'ensemble des autres grandes villes de France.
Cet amendement modifie dans ce sens plusieurs dispositions du titre V du livre Ier du code électoral relatif à l’élection des conseillers communautaires.
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* *
Adopté par la Commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
Tirant les conséquences attendues de l’adoption de l’article 1er, l’article 2 supprime l’actuelle répartition du nombre de conseillers de Paris et de conseillers municipaux de Lyon et Marseille par secteur, qui figure aux tableaux nos 2, 3 et 4 annexés au code électoral. Il réécrit ces tableaux afin qu’ils précisent désormais le nombre de sièges à attribuer dans chacun des conseils d’arrondissement de ces trois villes.
Dernières modifications législatives intervenues
Les articles 21 et 22 de la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain ont modifié la répartition des arrondissements au sein des secteurs électoraux de la ville de Paris, de manière à regrouper les quatre premiers arrondissements dans un même secteur.
Position de la Commission
Outre un amendement rédactionnel de votre rapporteur, la Commission a adopté un amendement CL23 de Mme Sandrine Runel rétablissant le tableau n° 3 dans sa version d’origine – car indiquant le nombre de sièges de conseillers municipaux attribués à chaque secteur électoral – tout en procédant à un réajustement de cette répartition entre les différents secteurs.
Ainsi qu’en dispose l’article 2 de la loi du 31 décembre 1982 relative à l’organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon ([8]), les communes de Paris, Marseille et Lyon sont respectivement divisées en vingt, seize et neuf arrondissements municipaux ([9]).
Les articles L. 2511-5 à L. 2511-7 présentent trois tableaux relatifs au ressort territorial des conseils d’arrondissement des trois villes. À Lyon et à Paris ([10]), chaque secteur correspond à un arrondissement. À Marseille, chaque secteur comprend deux arrondissements.
Le ressort territorial des conseils d’arrondissement de Marseille (article L. 2211-6 du CGCT)
Désignation des secteurs |
Arrondissements |
1er secteur |
1er et 7ème |
2ème secteur |
2ème et 3ème |
3ème secteur |
4ème et 5ème |
4ème secteur |
6ème et 8ème |
5ème secteur |
9ème et 10ème |
6ème secteur |
11ème et 12ème |
7ème secteur |
13ème et 14ème |
8ème secteur |
15ème et 16ème |
Les tableaux 2, 3 et 4, introduits par la loi PLM et annexés au code électoral, déterminent, pour chaque ville, le nombre de sièges de conseillers de Paris ou de conseillers municipaux attribuables pour chacun de ces secteurs.
S’agissant du nombre de conseillers d’arrondissement, le code général des collectivités territoriales précise, à son article L. 2511-8, que ce nombre est « le double de celui des conseillers municipaux ou conseillers de Paris, sans toutefois pouvoir être inférieur à dix ni supérieur à quarante ».
Répartition des sièges au Conseil de Paris et dans les conseils d’arrondissement
Désignation des secteurs |
Arrondissements constituant les secteurs |
Nombre de sièges au Conseil de Paris |
Nombre de sièges au conseil d’arrondissement |
1er secteur |
1er, 2e, 3e et 4e ([11]) |
8 |
16 |
5e secteur |
5e |
4 |
10 |
6e secteur |
6e |
3 |
10 |
7e secteur |
7e |
4 |
10 |
8e secteur |
8e |
3 |
10 |
9e secteur |
9e |
4 |
10 |
10e secteur |
10e |
7 |
14 |
11e secteur |
11e |
11 |
22 |
12e secteur |
12e |
10 |
20 |
13e secteur |
13e |
13 |
26 |
14e secteur |
14e |
10 |
20 |
15e secteur |
15e |
18 |
36 |
16e secteur |
16e |
13 |
26 |
17e secteur |
17e |
12 |
24 |
18e secteur |
18e |
15 |
30 |
19e secteur |
19e |
14 |
28 |
20e secteur |
20e |
14 |
28 |
Total |
163 |
340 |
RÉPARTITION DES SIÈGES AU CONSEIL municipal de Lyon ET DANS LES CONSEILS D’ARRONDISSEMENT
Désignation des secteurs |
Arrondissements |
Nombre de sièges au conseil municipal |
Nombre de sièges au conseil d’arrondissement |
1er secteur |
1er |
4 |
10 |
2e secteur |
2e |
5 |
10 |
3e secteur |
3e |
12 |
24 |
4e secteur |
4e |
5 |
10 |
5e secteur |
5e |
8 |
16 |
6e secteur |
6e |
9 |
18 |
7e secteur |
7e |
9 |
18 |
8e secteur |
8e |
12 |
24 |
9e secteur |
9e |
9 |
18 |
Total |
73 |
148 |
RÉPARTITION DES SIÈGES AU CONSEIL municipal de Marseille ET DANS LES CONSEILS D’ARRONDISSEMENT
Désignation des secteurs |
Arrondissements constituant les secteurs |
Nombre de sièges au conseil municipal |
Nombre de sièges au conseil d’arrondissement |
1er secteur |
1er, 7e |
11 |
22 |
2e secteur |
2e, 3e |
8 |
16 |
3e secteur |
4e, 5e |
11 |
22 |
4e secteur |
6e, 8e |
15 |
30 |
5e secteur |
9e, 10e |
15 |
30 |
6e secteur |
11e, 12e |
13 |
26 |
7e secteur |
13e, 14e |
16 |
32 |
8e secteur |
15e, 16e |
12 |
24 |
Total |
101 |
202 |
L’article 2 modifie les tableaux nos 2, 3 et 4 du code électoral, afin qu’ils n’indiquent plus le nombre de sièges de conseillers de Paris ou de conseillers municipaux par arrondissement, mais pour qu’ils précisent désormais le nombre de sièges à attribuer dans chacun des conseils d’arrondissement, déclinant ainsi au sein du code électoral la règle inscrite à l’article L. 2511-8 du CGCT.
Nombre de sièges de conseillers d’arrondissEment par secteur à Paris
Désignation des secteurs |
Arrondissements constituant les secteurs |
Nombre de sièges de conseiller d’arrondissement |
1er secteur |
1er, 2e, 3e et 4e |
24 |
5e secteur |
5e |
14 |
6e secteur |
6e |
13 |
7e secteur |
7e |
14 |
8e secteur |
8e |
13 |
9e secteur |
9e |
14 |
10e secteur |
10e |
21 |
11e secteur |
11e |
33 |
12e secteur |
12e |
30 |
13e secteur |
13e |
39 |
14e secteur |
14e |
30 |
15e secteur |
15e |
54 |
16e secteur |
16e |
39 |
17e secteur |
17e |
36 |
18e secteur |
18e |
45 |
19e secteur |
19e |
42 |
20e secteur |
20e |
42 |
Total |
503 |
Nombre de sièges de conseillers d’arrondissement par secteur à Lyon
Désignation des secteurs |
Arrondissements |
Nombre de sièges de conseiller d’arrondissement |
1er secteur |
1er |
14 |
2e secteur |
2e |
15 |
3e secteur |
3e |
36 |
4e secteur |
4e |
15 |
5e secteur |
5e |
24 |
6e secteur |
6e |
27 |
7e secteur |
7e |
27 |
8e secteur |
8e |
36 |
9e secteur |
9e |
27 |
Total |
221 |
Nombre de sièges de conseillers d’arrondissement par secteur à Marseille
Désignation des secteurs |
Arrondissements constituant les secteurs |
Nombre de sièges de conseiller d’arrondissement |
1er secteur |
1er, 7e |
33 |
2e secteur |
2e, 3e |
24 |
3e secteur |
4e, 5e |
33 |
4e secteur |
6e, 8e |
45 |
5e secteur |
9e, 10e |
45 |
6e secteur |
11e, 12e |
39 |
7e secteur |
13e, 14e |
48 |
8e secteur |
15e, 16e |
36 |
Total |
303 |
La Commission a adopté un amendement CL23 de Mme Sandrine Brunel rétablissant l’annexe 4 du code électoral dans sa version actuelle (c'est-à-dire, faisant figurer non pas une répartition du nombre de conseillers d'arrondissement par secteurs comme en dispose l'article 2 de la proposition de loi, mais une répartition du nombre de conseillers municipaux au sein des neuf secteurs électoraux lyonnais), tout en actualisant la répartition des sièges du conseil municipal de Lyon entre les secteurs.
RÉPARTITION DES SIÈGES AU CONSEIL municipal de Lyon figurant à l’amendement CL23
Désignation des secteurs |
Arrondissements |
Nombre de sièges au conseil municipal |
1er secteur |
1er |
4 |
2e secteur |
2e |
4 |
3e secteur |
3e |
15 |
4e secteur |
4e |
5 |
5e secteur |
5e |
7 |
6e secteur |
6e |
7 |
7e secteur |
7e |
12 |
8e secteur |
8e |
12 |
9e secteur |
9e |
7 |
Total |
73 |
Ainsi, la rédaction de l’article 2 tel qu’amendé par la Commission fait désormais figurer, au sein du code électoral, deux tableaux indiquant le nombre de conseillers d’arrondissement par secteur (à Paris et à Marseille) et ce troisième tableau, réécrit par l’amendement CL23, rétablissant une répartition des conseillers municipaux par secteur pour la seule ville de Lyon. Cette rédaction semble donc susceptible de créer une confusion à la lecture de ces annexes du code électoral. Surtout, votre rapporteur constate que l’adoption de cet amendement – pour lequel il avait émis un avis défavorable – est incompatible avec l’article 1er, qui supprime la répartition des conseillers municipaux par secteur pour instaurer une liste unique à l’échelle de Paris, Lyon et Marseille.
En outre, la Commission a également adopté un amendement rédactionnel CL42 de votre rapporteur.
*
* *
Adopté par la Commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
Le maire d’arrondissement ou de secteur n’étant plus, sous l’empire de l’article 1er de la proposition de loi, obligatoirement représenté au Conseil de Paris ou aux conseils municipaux de Lyon et de Marseille, l’article 3 introduit une nouvelle disposition au sein du code général des collectivités territoriales lui permettant d’assister au Conseil de Paris ou aux conseils municipaux de Lyon et de Marseille, d’être entendu, à sa demande, sur les affaires relatives à son arrondissement ou son secteur, et de disposer de la faculté d’être remplacé à cette fin par un membre du conseil d’arrondissement ou de secteur. Ce même article procède également à plusieurs mesures de coordination rendues nécessaires par l’adoption de l’article 1er.
Position de la Commission
La Commission a adopté deux amendements rédactionnels de votre rapporteur.
Bien qu’ils n’aient ni personnalité morale ni budget propre, les conseils d’arrondissement ou de secteur disposent de prérogatives, essentiellement consultatives, définies par le code général des collectivités territoriales ([12]).
Les mairies d’arrondissement ou de secteur interviennent sur des sujets locaux propres à l’arrondissement ou au secteur, comme la gestion des équipements de proximité (écoles, équipements sportifs, espaces verts), l’attribution de subventions aux associations de quartier ou encore l’affectation d’une partie des logements sociaux. Elles émettent également des avis sur les projets d’urbanisme ou d’aménagement avant leur adoption par le conseil municipal ou le Conseil de Paris.
Exemples de prérogatives exercées par les conseils d’arrondissement ou de secteur
Prérogative |
Article du CGCT |
Précisions |
Transmission de questions écrites au maire de la commune |
2511-12 |
Le conseil d’arrondissement ou de secteur peut adresser des questions écrites au maire de la commune sur toute affaire intéressant l’arrondissement. Celui-ci dispose alors de 45 jours pour y répondre, sans quoi la question est inscrite de droit à l’ordre du jour de la séance du conseil municipal ou de Paris suivant. |
Demande d’organisation d’un débat au Conseil de Paris ou au conseil municipal |
2511-12 |
Le conseil d’arrondissement ou de secteur peut solliciter auprès du Conseil de Paris ou du conseil municipal un débat sur toute affaire intéressant l’arrondissement. |
Adoption de vœux par le conseil d’arrondissement |
2511-12 |
Le conseil d’arrondissement ou de secteur peut émettre des vœux sur tous les objets intéressant l’arrondissement. |
Saisine pour avis et consultation préalable obligatoire du conseil d’arrondissement |
2511-13, 2511-14, 2511-15 |
Le conseil municipal ou de Paris saisit pour avis le conseil d’arrondissement ou de secteur des rapports de présentation ou des projets de délibération concernant son arrondissement. Il doit également consulter le conseil d’arrondissement ou de secteur en amont du versement de toute subvention qu’il prévoit d’attribuer aux associations exerçant dans l’arrondissement ou au profit de ses habitants. Cette obligation de consultation s’étend à plusieurs délibérations, notamment celles relatives à l’établissement, la révision ou la modification du plan local d’urbanisme portant, en tout ou partie, sur le ressort territorial de l’arrondissement, ou à celles concernant un projet d’opération d’aménagement. |
Installation et gestion des équipements de proximité |
2211-16, 2211-17 |
Le conseil d’arrondissement ou de secteur délibère sur l’implantation et le programme d’aménagement des équipements de proximité à vocation éducative, sociale, culturelle, sportive et d’information de la vie locale. La réalisation des équipements est néanmoins subordonnée à une décision du conseil municipal ou de Paris, tandis que la gestion de ces équipements relève ensuite de l’arrondissement ou du secteur, qui assume certaines dépenses de fonctionnement et d’investissement. La commune peut également déléguer à l’arrondissement ou au secteur la gestion d’un équipement ou d’un service communal. |
Les maires des conseils d’arrondissement ou de secteur disposent en outre de compétences propres.
En particulier, l’article L. 2511-26 du CGCT octroie aux maires d’arrondissement ou de secteur ainsi qu’à leurs adjoints le statut d’officier d’état civil au sein de l’arrondissement ou du secteur. Ils sont chargés des attributions du maire de la commune ou du maire de Paris en matière d’état civil et du respect de l’obligation de scolarité au sein de l’arrondissement ou du secteur. Le maire de Paris, Lyon ou Marseille peut par ailleurs déléguer aux maires d’arrondissement ou de secteur ses attributions en matière d’élections, à l’exception de l’inscription sur les listes électorales et de la radiation de ces listes.
Le maire d’arrondissement ou de secteur émet un avis sur toute autorisation d’utilisation du sol ou permission de voirie sur le domaine public dans l’arrondissement ou le secteur délivré par le maire de la commune ou le maire de Paris. De la même manière, il émet un avis sur toute autorisation d’étalage ou de terrasse, sur tout projet d’acquisition ou d’aliénation d’immeubles ou de droits mobiliers réalisés dans l’arrondissement ou le secteur par la commune, sur tout changement d’affectation d’un immeuble communal, et sur les projets de transformation d’immeubles en bureaux ou en locaux d’habitation.
Enfin, l’attribution des logements sociaux relevant de la commune de Lyon ou Marseille ou de la ville de Paris et situés dans l’arrondissement ou le secteur dépend pour moitié de la commune, pour moitié du maire d’arrondissement ou de secteur ([13]). Cette répartition peut néanmoins être affectée par des relogements prioritaires décidés par la municipalité, après avis du conseil d’arrondissement.
L’article 3 complète les dispositions du CGCT relatives aux prérogatives des conseils d’arrondissements et de leurs maires, en y insérant un nouvel article L. 2511-26-1. Afin de renforcer les synergies entre ces élus et la représentation communale, cette nouvelle disposition permet au maire d’arrondissement ou de secteur d’assister au Conseil de Paris ou au conseil municipal, même s’il n’en est pas membre, et d’être entendu à sa demande – ou d’être représenté par l’un de ses adjoints ou par tout membre du conseil d’arrondissement – sur les affaires de sa commune.
L’adoption de cette disposition paraît en effet nécessaire dans l’hypothèse où le maire d’arrondissement ou de secteur ne serait pas conseiller de Paris ou conseiller municipal de Lyon ou de Marseille, l’introduction d’un scrutin distinct rendant ce scénario envisageable. Votre rapporteur observe néanmoins qu’en pratique, la constitution d’une liste municipale nécessitant de rassembler largement les personnalités des différents arrondissements, les maires de ces arrondissements devraient continuer de siéger au Conseil de Paris ou aux conseils municipaux de Lyon et de Marseille.
L’article procède en outre à plusieurs modifications de coordination rédactionnelle, liées à l’adoption de l’article 1er de la proposition de loi.
Ainsi, il modifie l’article L. 2511-8 du CGCT afin d’y préciser que chaque conseil d’arrondissement ou de secteur est désormais composé des conseillers d’arrondissement élus dans l’arrondissement ou le groupe d’arrondissements, alors que cette composition compte aussi, dans la rédaction actuelle de l’article, les élus au Conseil de Paris ou aux conseils municipaux de Lyon et de Marseille.
En cohérence, l’article 3 modifie également l’article L. 2511-8 du CGCT afin d’y inscrire que le maire d’arrondissement ou de secteur choisit ses adjoints parmi les seuls conseillers d’arrondissement. Il modifie également l’article L. 2511-28 du CGCT relatif aux modalités de représentation du maire d’arrondissement ou de secteur pour y prévoir que le maire ne peut être représenté que par l’un de ses adjoints ou par tout membre du conseil d’arrondissement ou de secteur.
La Commission a adopté deux amendements rédactionnels CL43 et CL44 de votre rapporteur.
*
* *
Adopté par la Commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 4 prévoit l’entrée en vigueur des dispositions de la proposition de loi à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux, c’est-à-dire à l’occasion des prochaines élections municipales organisées en mars 2026.
Lors de ses auditions, votre rapporteur a constaté que la date d’application de ce texte avait fait l’objet de discussions, certains élus regrettant un calendrier particulièrement resserré pour son adoption. Il lui a néanmoins été assuré, à la fois par les services auditionnés que par les professeurs de droit qu’il a entendus, qu’une entrée en vigueur des dispositions de ce texte dix mois avant le scrutin ne poserait aucune difficulté juridique. Ce délai permettrait aux services de prendre l’ensemble des dispositions réglementaires et techniques rendues nécessaires pour adapter le mode de scrutin.
Position de la Commission
La Commission a adopté un amendement rédactionnel CL45 de votre rapporteur.
*
* *
Adopté par la Commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 5 comporte une demande de rapport évaluant la possibilité de transférer des compétences exercées par la mairie centrale vers les mairies d’arrondissement ou de secteur dans les villes de Paris, Lyon et Marseille. Ce rapport serait remis par le Gouvernement au Parlement dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi.
Position de la Commission
La Commission a adopté deux amendements rédactionnels CL46 et CL47 de votre rapporteur.
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* *
Introduit par la Commission
Résumé du dispositif et effets principaux
La Commission a adopté un amendement CL32 de M. Jean Lassucq portant création d’une instance de coordination entre la ville de Paris et les maires d'arrondissement, intitulée « conférence des maires », permettant de débattre de tous sujets d’intérêt municipal.
Présidée par le maire de Paris, cette instance, qui comprend tous les maires d’arrondissement, se réunit au moins une fois par an, à l’initiative du maire de Paris ou à la demande de la moitié des maires d’arrondissement, sur un ordre du jour déterminé.
Lors de sa première réunion du mercredi 2 avril 2025, la Commission examine la proposition de loi visant à réformer le mode d'élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (n° 451) (M. Jean- Paul Mattei, rapporteur).
Réunion du mercredi 2 avril 2025 à 9 heures
Lien vidéo : https://assnat.fr/aBSpCv
M. le président Florent Boudié. Cette proposition de loi a été déposée par Sylvain Maillard et plusieurs de ses collègues le 15 octobre 2024. Nous aurions dû l’examiner le 12 mars dernier, mais la perspective d’un examen en séance publique la semaine suivante était illusoire, sachant que la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic était à l’ordre du jour. J’ai donc préféré décaler le calendrier et laisser davantage de temps au rapporteur pour travailler et avoir des échanges avec vous tous. Cela nous a également permis d’obtenir du ministre François-Noël Buffet les projections que nous avions demandées sur les modèles proposés : le mode de scrutin dit guyanais et le mode de scrutin issu de la proposition initiale. C’est la première fois qu’un gouvernement accepte de communiquer des projections électorales en amont d’une discussion sur la réforme d’un mode de scrutin. Je m’en réjouis, car il est indispensable que nous connaissions les effets possibles des modifications que nous nous apprêtons à examiner.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Le texte soumis à votre examen répond à une exigence démocratique fondamentale : la clarté du suffrage universel dans les trois plus grandes villes de notre pays. Le rayonnement de ces trois collectivités n’est pas seulement local : les maires de Paris, Lyon et Marseille sont aussi des personnalités nationales de premier plan – les Jeux olympiques et paralympiques l’ont démontré pour la capitale. Le texte présente donc un intérêt pour la nation tout entière ; c’est, en tout cas, la vision de l’élu que je suis, bien que ma circonscription se trouve loin de Paris, Lyon et Marseille – ce qui fait peut-être de moi un bon candidat au poste de rapporteur.
Depuis l’adoption de la loi du 31 décembre 1982 relative à l’organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale, dite loi PLM, le mode de scrutin municipal de ces trois villes a toujours suscité des débats nourris. Les Parisiens, les Lyonnais et les Marseillais n’élisent pas directement leurs conseillers municipaux centraux, contrairement aux habitants des autres communes de France. Ils votent par secteur ou par arrondissement afin de désigner des conseillers d’arrondissement dont certains siégeront au conseil municipal ou au conseil de Paris. Ce sont eux qui, à leur tour, éliront le maire de la commune.
Ce mode de scrutin peut conduire à des résultats, rares mais pas impossibles, contraires à l’expression majoritaire des suffrages. C’est ainsi qu’un maire a été élu à Marseille en 1983 avec une minorité de voix. Plus largement, le scrutin dit PLM, s’il était initialement conçu pour rapprocher les élus des citoyens à l’échelle des arrondissements, montre ses limites après plus de quarante ans de pratique : complexité pour les électeurs, distorsions de représentativité, affaiblissement du lien entre les citoyens et leur maire.
Forte de ces constats, la proposition de loi vise à restaurer la lisibilité et la transparence du choix démocratique dans ces trois villes.
La réforme proposée repose sur un principe simple : appliquer à Paris, Lyon et Marseille le même mode de scrutin qu’à l’ensemble des communes françaises de plus de 1 000 habitants – ce seuil pouvant être modifié par la proposition de loi que nous venons d’examiner. Concrètement, les électeurs éliraient directement leur conseil municipal ; parallèlement, l’élection des conseils d’arrondissement, garants de la proximité locale et auxquels les habitants de ces grandes villes sont légitimement attachés, serait maintenue.
Cette réforme vise trois objectifs dont je sais qu’ils sont largement partagés. Il s’agit d’abord de rétablir un lien direct entre l’électeur et son maire. En instaurant un scrutin de liste unique à l’échelle communale, la proposition de loi garantit que le maire sera élu de manière claire, sans l’intermédiation complexe que constituent les arrondissements – je pense à l’élection municipale de Marseille en 2020, lors de laquelle l’identité du maire n’a été connue qu’après une longue journée de débats entre les différents groupes du conseil municipal, sans aucune certitude de part et d’autre.
Il s’agit ensuite d’améliorer la représentativité à Paris, Lyon et Marseille. La proposition de loi prévoit une prime majoritaire de 25 %, et non de 50 % comme dans les villes de plus de 1 000 habitants. Nous débattrons de cette évolution, qui me semble susceptible d’assurer une stabilité institutionnelle sans dénaturer la diversité politique des conseils municipaux. Elle renforcerait la majorité municipale sans écraser les oppositions.
Il s’agit, enfin, de préserver la proximité locale. La réforme maintient les conseils d’arrondissement, dont l’utilité est reconnue, tout en envisageant de faire évoluer leurs compétences. Un rapport sera remis au Parlement pour évaluer les conditions d’un transfert progressif de certaines prérogatives aux mairies d’arrondissement. Cela répond à une demande des élus locaux, et il me paraît sain et utile que nous ouvrions ce débat.
Vous l’aurez compris, cette proposition de loi ne bouleverse pas les équilibres territoriaux : elle les clarifie. Elle ne remet pas en cause la gouvernance locale mais la rend plus lisible. Elle redonne à l’élection municipale son sens premier : permettre à chaque citoyen d’exprimer un choix clair pour l’avenir de sa ville et respecter le principe simple, démocratique et fondamental selon lequel un électeur égale une voix.
Depuis ma désignation comme rapporteur, j’ai souhaité mener une large consultation afin de coconstruire ce texte et de le faire évoluer. Je remercie les maires de Paris, de Lyon et de Marseille, les présidents des trois métropoles, les services du ministère de l’intérieur, l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) et les professeurs de droit que j’ai auditionnés pour leur précieux concours. Mes remerciements vont aussi aux représentants des groupes politiques de ces villes, dont j’ai sollicité les contributions écrites. Ce travail de concertation a conduit à décaler nos débats, initialement prévus le 12 mars. Il en ressort qu’une rédaction alternative peut être envisagée sans remettre en cause les objectifs que j’ai énoncés. Nous débattrons de la version initiale proposée par les auteurs du texte, mais j’ai aussi souhaité vous consulter sur un autre dispositif inspiré du scrutin régional ; c’est l’objet de l’amendement de réécriture de l’article 1er que je vous soumettrai, et que j’ai eu l’occasion de présenter à certains d’entre vous lors de nos échanges préparatoires transpartisans. Cette rédaction alternative est accompagnée de projections fondées sur les résultats des dernières élections municipales. Ces illustrations me semblent particulièrement importantes : elles traduisent un effort de transparence indispensable en matière de droit électoral. Je tiens à remercier les services du gouvernement qui nous les ont transmises.
S’agissant du calendrier, dont il a souvent été question entre nous, je tiens à préciser que les dispositions de la proposition de loi font l’objet d’un débat depuis de long mois avec les municipalités concernées ; j’ai repris ce débat à mon compte en tant que rapporteur, mais il n’a rien de nouveau. Les services m’ont assuré que l’adoption du texte dix mois avant les prochaines élections municipales ne poserait aucune difficulté et leur laisserait le temps de décliner l’ensemble des dispositions réglementaires et techniques. Rappelons que la précédente loi PLM avait été adoptée trois mois avant le scrutin municipal – nous tâcherons de ne pas nous inscrire dans la même temporalité.
En résumé, cette proposition de loi s’inscrit dans une démarche de modernisation de la démocratie locale. Il ne s’agit ni d’une réforme partisane, ni d’un bouleversement institutionnel, mais bien d’un ajustement nécessaire pour garantir l’égalité de tous devant le suffrage universel. Elle contribuera à renforcer la démocratie municipale et à redonner aux habitants de Paris, de Lyon et de Marseille un pouvoir de décision pleinement conforme aux principes républicains.
M. le président Florent Boudié. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Franck Allisio (RN). Nous discutons enfin de la réforme du mode de scrutin des trois grandes villes de France et de l’élection des maires de près de 4 millions de Français. Depuis 1982, ces villes sont soumises à un mode de scrutin exorbitant du droit commun qui a rapidement démontré sa dangerosité : dès 1983, il a réussi à faire « élire » à Marseille un maire pourtant battu dans les urnes, Gaston Defferre, à la faveur d’un mode de scrutin que ce dernier avait lui-même conçu sur mesure en tant que ministre de l’intérieur, au détriment du candidat Jean-Claude Gaudin.
Fort de ce douloureux précédent et fidèle à ses principes – respecter le vote des citoyens et défendre l’intérêt des Français –, le groupe Rassemblement national est favorable à une réforme qui rende le scrutin plus démocratique, plus transparent, plus clair, moins sujet aux fraudes et aux manipulations – Marseille étant la capitale de la fraude électorale. Nous abordons ce débat dans un esprit constructif mais vigilant, car de nombreux points restent à préciser : l’organisation du scrutin, la présence éventuelle d’urnes doubles et l’élection des conseillers métropolitains à Marseille et Paris. Ayons à l’esprit que 90 % des Marseillais, des Parisiens et des Lyonnais attendent cette réforme ; soyons vigilants, mais soyons à la hauteur.
M. Sylvain Maillard (EPR). Je tiens également à remercier le rapporteur pour l’ensemble de son travail. Cette proposition de loi, que j’ai déposée avec plusieurs de mes collègues du groupe Ensemble pour la République, a fait l’objet de nombreux commentaires, parfois erronés. Son examen est donc l’occasion de rétablir certaines vérités, à commencer par les raisons qui nous ont conduits à la déposer.
Le fait est que, quel que soit le parti politique aux responsabilités, les villes de Paris, de Lyon et de Marseille paraissent coupées en deux. La raison en est que les mairies centrales choisissent de privilégier significativement les arrondissements qui leur ont permis de gagner, que ce soit en matière de financement des associations, de calendrier ou d’exécution des travaux publics ou encore de projets d’urbanisme.
Or cette division politique a une cause principale : le mode de scrutin d’exception qui prévaut dans ces trois villes. C’est ce même mode de scrutin qui fait que, selon que vous soyez électeur dans le 16e ou dans le 20e arrondissement de Paris, votre voix comptera plus ou moins. Ceci explique d’ailleurs que le taux de participation aux élections municipales des Parisiens, des Lyonnais et des Marseillais soit significativement inférieur à celui des autres villes de France, ceux-ci ayant le sentiment récurrent et légitime que leur vote ne sert à rien. C’est également ce même mode de scrutin qui rend possible l’élection aux fonctions de maire d’un candidat pourtant minoritaire en nombre de voix à l’élection municipale, comme cela s’est produit à Marseille dès 1983.
Nous aimons critiquer le système des swings states américain, alors que nous appliquons exactement le même système à Paris, à Lyon et à Marseille. La réalité, c’est que ce régime d’exception n’a pas plus de justification qu’il n’en avait il y a quarante ans, lorsqu’il a été institué par Gaston Deferre.
Il est donc temps de mettre fin à cette anomalie démocratique, pour qu’un électeur parisien, lyonnais ou marseillais soit égal à une voix.
Avec David Amiel, nous avons consulté pendant plusieurs mois l’ensemble des élus locaux, toutes couleurs politiques confondues, y compris ceux qui étaient indirectement concernés, depuis les conseillers d’arrondissement jusqu’aux conseillers métropolitains ou régionaux. Ces nombreux échanges ont nourri la réforme du mode de scrutin, qui vise à rapprocher ces trois villes du droit commun, appliqué à l’ensemble des autres communes de France.
Ce texte institue donc deux scrutins distincts, l’un pour élire les membres des conseils d’arrondissement qui représentent une strate d’élus de proximité à laquelle les habitants sont attachés, l’autre au niveau de la ville, afin de rendre le scrutin plus lisible et transparent, à l’image des autres villes françaises.
Certains points de la réforme, tels que la prime majoritaire, le fléchage des conseillers métropolitains pour Paris et Marseille ou encore la place des maires d’arrondissement au sein des conseils municipaux, auront bien sûr vocation à faire l’objet de discussions de la part de la représentation nationale. Toutefois, cette réforme doit garder pour boussole d’offrir une meilleure lisibilité et une plus grande transparence aux électeurs.
C’est pourquoi notre groupe reste attaché au système proposé dans la version initiale de la proposition de loi. Ce texte est attendu par une immense majorité des habitants de Paris, de Lyon et de Marseille, qui représentent 10 % du corps électoral national. Je ne peux donc que vous inviter à le soutenir, car il est temps que chaque voix compte.
M. Gabriel Amard (LFI-NFP). Le contexte dans lequel s’inscrit la proposition de loi est regrettable. Si l’objectif de rendre le scrutin municipal plus démocratique est légitime, nous ne pouvons pas ignorer que cette initiative découle d’une commande politique de l’actuelle ministre de la culture au président de la République, motivée par des intérêts purement stratégiques.
Pire encore, elle a été amenée sans la moindre concertation ni avec les municipalités – vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur – ni, notez la nuance, avec les conseils municipaux concernés.
C’est vrai, une anomalie existe dans le mode d’élection des conseils municipaux. En effet, un citoyen égal une voix, c’est le fondement même de la démocratie. Pourtant, à Paris, à Lyon et à Marseille, une exception perdure : la loi de 1982, dite loi PLM, qui instaure une dérogation au mode de scrutin de droit commun pour les trois plus grandes villes de France, a éloigné les citoyennes et les citoyens de la prise de décision municipale. Ainsi, lors des élections municipales, les électeurs et les électrices votent pour des candidats dans leur arrondissement, dont certains siégeront au conseil de la ville et éliront, dans un second temps, de manière indirecte, le maire.
Ce mode spécifique d’élection crée une opacité susceptible d’entraîner la défiance des citoyens, alors que, selon le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), 45 % des Français ressentent de la méfiance vis-à-vis de la politique et 52 % d’entre eux considèrent qu’il n’y a pas de quoi être fiers de notre système démocratique. Il y a donc un réel enjeu à rendre ces élections plus compréhensibles et plus directes.
Face à ce constat alarmant, nous devons tout mettre en œuvre pour restaurer la confiance des citoyens dans la démocratie locale. Cela passe non seulement par une meilleure compréhension du scrutin municipal mais aussi par l’instauration de véritables outils de participation populaire, afin que les citoyens pèsent réellement sur les décisions qui les concernent. C’est pourquoi nous proposons de confier aux communes la faculté d’organiser des débats citoyens, d’instaurer un référendum d’initiative citoyenne local, avec la possibilité de révoquer un élu, de suggérer l’inscription de sujets ou de mesures à l’ordre du jour d’une assemblée ou encore d’abroger une loi ou une disposition.
Nous devons également garantir aux communes des moyens d’action. Or, ces dernières années, elles ont été les grandes perdantes des politiques d’austérité. En 2025, leur budget a été amputé de plus de 7 milliards d’euros, ce qui affecte en premier lieu la planification écologique et les services publics, qui sont pourtant indispensables pour maintenir le lien social dans chaque bassin de vie.
Nous refusons cette logique de décentralisation rampante et défendons la libre administration des collectivités locales, ainsi que leur autonomie financière, qui sont essentielles pour une démocratie locale vivante et efficace.
Nous considérons que la proposition de loi constitue une avancée démocratique. Elle permet d’aligner, au moins partiellement, les villes de Paris, de Lyon et de Marseille sur le mode de scrutin en vigueur dans les autres communes françaises, avec un scrutin proportionnel à deux tours. De plus, l’abaissement de la prime majoritaire, qui passerait de 50 % à 25 %, constitue un premier pas vers une meilleure représentativité du vote, qu’il conviendrait d’étendre à l’ensemble des communes.
En cohérence avec nos convictions et notre attachement au suffrage universel, au respect de la pluralité des opinions grâce à la proportionnelle, et à la démocratie, le groupe La France insoumise votera en faveur de la proposition de loi. Il continuera néanmoins à œuvrer pour une réforme plus ambitieuse, qui place les citoyens au cœur des décisions politiques.
M. Stéphane Delautrette (SOC). La proposition de loi concerne un sujet majeur, celui du mode de scrutin applicable à l’élection municipale pour 3,5 millions de nos concitoyens qui habitent Paris, Lyon ou Marseille.
Disons-le d’emblée, sur la forme, rien ne va dans le texte proposé par M. Maillard. Il repose en effet sur une fiction selon laquelle les habitants de ces communes seraient les seuls à ne pas pouvoir élire directement leur maire, au point que la légitimité même du résultat des derniers scrutins municipaux pourrait susciter des interrogations. Pourtant, nul en France n’élit directement son maire. Quant aux résultats des municipales à Paris, à Lyon et à Marseille, sur vingt-quatre élections intervenues depuis la loi PLM de 1982, une seule a vu un candidat obtenir un nombre de sièges supérieur, alors qu’il était minoritaire en nombre de voix. C’était à Marseille, en 1983, et c’était le résultat d’un découpage partisan des secteurs, qui fut modifié dès 1987.
Pour ramener ces communes dans le droit commun, M. Maillard nous propose donc, en toute cohérence, d’instaurer une prime majoritaire dérogatoire, octroyant le quart plutôt que la moitié des sièges à la liste arrivée en tête. Alors que nous regrettons tous l’insuffisance d’évaluation préalable des textes que nous examinons, M. Maillard a même poussé son entêtement jusqu’à refuser que le Conseil d’État émette un avis sur sa proposition de loi – une première sous la Ve République. Rien ne devait venir briser la réalité parallèle dans laquelle il s’était enferré !
Conscient de la situation, le premier ministre a fait appel à l’esprit de sainte Rita, avocate des causes impossibles, en la personne de notre rapporteur Jean-Paul Mattei. J’en profite pour saluer la sagesse que ce dernier a eue de demander le report de nos travaux et sa volonté de trouver une voie permettant de recentrer le débat sur le fond et de répondre aux véritables enjeux. Je crains néanmoins que les projections réalisées par le ministère de l’intérieur, tenant compte de la nomenclature des partis plutôt que du périmètre des coalitions municipales, n’apportent guère d’éclairage, si ce n’est pour démontrer, au vu des transferts de sièges effectués entre la droite et le centre, que vous avez manifestement des comptes à régler avec une partie du bloc central.
Cet aspect de forme étant rappelé, faut-il nécessairement écarter toute évolution du mode de scrutin dans ces communes ? Nous ne le croyons pas. Paris, Lyon et Marseille ont connu des évolutions institutionnelles majeures et divergentes depuis quarante ans, tant sur les compétences de la commune-centre que sur celles des arrondissements ou de leurs métropoles, très différentes. Il est probable qu’un régime spécifique et adapté à chacune d’entre elles, voire ouvert à de nouvelles communes – telles que Toulouse qui s’apprête à dépasser Lyon en population – serait plus pertinent.
Nous concentrerons donc notre débat sur les amendements du rapporteur, qui innove même en proposant, comme pour l’élection des conseillers métropolitains de Paris et de Marseille, des rédactions orthogonales nous permettant d’arbitrer démocratiquement entre ces solutions.
Le groupe Socialistes et apparentés n’écarte pas l’idée que, pour l’un ou l’autre de ces territoires, la solution proposée puisse lui convenir, le rapporteur ayant pris soin, contrairement à M. Maillard, d’auditionner les maires concernés en amont de ses propositions. C’est pourquoi les députés de notre groupe se détermineront en fonction des apports du texte pour leurs territoires. En revanche, ils proposeront que la prime majoritaire applicable demeure celle du droit commun.
M. Olivier Marleix (DR). Permettez-moi, pour commencer, de rendre hommage au rapporteur Jean-Paul Mattei qui a déployé des trésors d’imagination, depuis quelques semaines, pour présenter un projet qui ressemble à quelque chose, tant nous en étions loin dans la version initiale présentée par M. Maillard.
Je voudrais également revenir sur la méthode, particulièrement cavalière, qui consiste à modifier les règles des scrutins de Paris, de Lyon et de Marseille à moins d’un an des élections municipales, ce qui est contraire à toute tradition républicaine. Je ne peux m’empêcher non plus de remarquer que ce texte a comme premier signataire quelqu’un qui n’a pas été capable de se faire élire conseiller de Paris la dernière fois. Nous avons donc le sentiment que ce texte est un plaidoyer pro domo, un peu pathétique : « S’il vous plaît, changez les règles du jeu, que je puisse enfin être élu conseiller de Paris ! À votre bon cœur, mes chers collègues ! »
D’ailleurs, l’auteur de ce texte n’a pas souhaité le soumettre au Conseil d’État, tant il est vrai qu’il soulève des questions surprenantes sur un tas de sujets – nous y reviendrons au fur et à mesure de l’examen des amendements.
Notre très sympathique et estimé collègue rapporteur vient de déposer ce matin encore, en dernière minute, des amendements de réécriture. On nous explique que 90 % des Parisiens sont favorables à cette réforme, sauf que personne ne sait exactement de quelle réforme il s’agit ! C’est formidable ce qu’on peut faire dire aux sondages. Tout cela est ubuesque et indigne d’une démocratie.
Venons-en au fond. Je me suis beaucoup investi, il y a un an, sur la loi immigration. Je me souviens de la crise qu’avait suscitée au sein de la majorité le vote de ce texte par les députés du Rassemblement national. La réalité que tout le monde doit comprendre, c’est que les auteurs de la présente proposition de loi n’ont de chance de la faire adopter qu’au terme d’un accord avec le Rassemblement national et La France insoumise, sur le niveau de la prime majoritaire. Voilà les deux partenaires que le groupe Ensemble pour la République a trouvés pour soutenir son texte ! C’est donc, comme disait le général de Gaulle, une petite tambouille sur un petit réchaud.
Ce texte a pour objectif d’aligner le mode de scrutin pratiqué à Paris, à Lyon et à Marseille sur le droit commun, qui prévoit une prime majoritaire de 50 % – c’est le cas actuellement à Paris, dans les arrondissements, comme partout en France. Or vous inventez un système dérogatoire pour ces trois villes, dans lesquelles la prime majoritaire serait abaissée à 25 %. Expliquez-moi pourquoi vous voulez déroger à ce point du droit commun, alors même que vous prétendez vous y aligner ! Cette disposition est, en réalité, la traduction de l’accord honteux que vous avez conclu avec des gens que vous prétendez combattre. Il s’agit d’une rupture d’égalité, qui me semble fragiliser terriblement le texte. C’est d’ailleurs pourquoi vous n’avez pas souhaité le soumettre au Conseil d’État.
Je n’entrerai pas dans le détail, mais il y a tout de même des points extravagants. À Lyon, les électeurs se retrouveront face à trois urnes : l’une pour élire les membres des conseils d’arrondissement, l’autre pour les conseillers municipaux et la troisième pour la métropole. Bonjour l’intelligibilité du scrutin, si nos compatriotes parviennent à s’y retrouver !
Pour conclure, permettez-moi d’ajouter que j’en ai marre d’entendre des arguments fallacieux, notamment celui selon lequel un Parisien égal une voix ; ce slogan est totalement faux, puisqu’actuellement un Parisien n’est pas égal à une voix et vous le savez très bien. En effet, si vous avez voté pour la liste arrivée en tête, qui se voit alors attribuer la prime majoritaire, votre voix vaut davantage que celle des électeurs ayant voté pour les perdants. Il en est ainsi partout en France et vous n’y changerez rien tant qu’il y aura un système de prime majoritaire. Il s’agit donc d’un slogan à deux balles, totalement racoleur et trompeur.
M. le président Florent Boudié. Permettez-moi de rectifier une erreur de votre part, même si je sais qu’elle n’était pas malveillante : l’amendement du rapporteur n’a pas été déposé en dernière minute ce matin, mais hier matin.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Plusieurs principes ont sous-tendu l’écriture de la proposition de loi. Le premier, c’est la précipitation, à la fois dans la rédaction du texte, dans son inscription à l’ordre du jour et dans la tenue de nos débats. Il en résulte que le texte que nous nous apprêtons à examiner est moins intelligible et que la réforme envisagée sera complexe à déployer pour les mairies concernées et les services de l’État.
Le deuxième principe, c’est un opportunisme électoral : il s’agit d’une proposition de loi écrite par des Parisiens pour les Parisiens – et c’est une Parisienne qui le dit. D’ailleurs, les projections qui nous seront présentées tout à l’heure confirmeront l’opportunisme électoral qui a sous-tendu l’écriture de ce texte.
Le troisième principe, c’est l’incohérence. Vous voulez renforcer la démocratie, mais vous ne voulez pas, monsieur Maillard, recourir à la sagesse du Conseil d’État, qui garantit pourtant l’État de droit, donc la démocratie. On ne renforce pas la démocratie dans les collectivités territoriales en réduisant les moyens qui leur sont alloués ni en supprimant des corps intermédiaires, comme le prévoit le projet de loi de simplification de la vie économique qui vient d’être examiné en commission spéciale.
Toutefois, les écologistes restent ouverts à une réflexion sur les compétences des métropoles de Paris et de Marseille, qui pourrait d’ailleurs être étendue à la ville de Toulouse, devenue la troisième de France. Ils souhaitent également mener une réflexion sur les compétences de cet échelon de proximité que sont les arrondissements et les secteurs, ainsi que sur la prime majoritaire qui pourrait tendre à 25 % – nous y sommes favorables –, sous réserve qu’elle s’applique à l’ensemble des collectivités territoriales.
Si nous pouvons rendre hommage au rapporteur Mattei qui s’est efforcé de trouver une voie de passage en améliorant le texte grâce à de nombreux amendements de réécriture et en réunissant tous les représentants des groupes et les parlementaires des territoires concernés, il n’en reste pas moins que cette proposition de loi n’applique pas le droit commun puisqu’elle propose d’instaurer une prime majoritaire de 25 %, alors qu’elle est de 50 % dans les autres collectivités territoriales. Il y a même un amendement qui vise à créer une prime majoritaire différenciée en fonction des arrondissements et de la liste municipale – cela devient illisible, vous en conviendrez, et il est préférable d’écarter ce projet de liste sectorisée.
Il s’agit aussi d’un texte écrit main dans la main avec le Rassemblement national, au terme d’un accord – je ne jette pas la pierre sur le rapporteur, qui a tout fait pour auditionner l’ensemble des mairies et des élus concernés pour trouver une voie de passage. Néanmoins, le deuxième principe qui sous-tend la proposition de loi, à savoir l’opportunisme électoral, est partagé autour de cette table.
M. Éric Martineau (Dem). La loi du 31 décembre 1982 a introduit un nouveau mode d’élection spécifique pour Paris, Lyon et Marseille. Avant cette date, ces trois villes étaient administrées selon un modèle municipal classique, avec un conseil municipal unique. Elles se distinguaient néanmoins par l’existence de mairies d’arrondissement, dont les maires étaient nommés et dépourvus de réels pouvoirs exécutifs. Leur rôle se limitait à des fonctions protocolaires et administratives de proximité, sans autonomie politique ni budgétaire. La réforme de 1982 a introduit une organisation municipale à deux niveaux, visant à équilibrer proximité de l’action publique et cohérence de la gouvernance locale, avec un conseil municipal central – Conseil de Paris, conseil municipal de Lyon et de Marseille – et des conseils d’arrondissement ou de secteur. Les électeurs votent dans leur secteur, pour élire non plus leur conseil municipal mais un conseil d’arrondissement ou de secteur. Chaque conseil élit ensuite, parmi ses membres, ceux qui siégeront aussi au conseil municipal, le nombre de conseillers d’arrondissement ou de secteur y accédant étant proportionnel au nombre d’habitants de l’arrondissement. En conséquence, dans ces collectivités, le maire est élu au scrutin indirect, les électeurs ne votant que pour élire leurs conseillers d’arrondissement tandis que le reste de la France élit directement ses conseillers municipaux.
Ce mode d’élection est contesté en raison de ses effets sur la démocratie représentative. Un candidat peut devenir maire sans obtenir la majorité des suffrages exprimés au niveau global de la commune, du fait de l’élection des conseillers municipaux par arrondissement et de la prime majoritaire fixée à 50 %. Le système instauré par la loi PLM de 1982, justifié par un besoin de renforcement de la proximité de l’administration municipale avec ses habitants, a engendré une complexité et fragilisé la légitimité des exécutifs municipaux. Il est donc légitime de réfléchir à une réforme du mode de scrutin à Paris, à Lyon et à Marseille.
Je tiens à saluer le travail et l’engagement du rapporteur Jean-Paul Mattei, qui a su écouter et mener les concertations nécessaires afin de trouver une écriture qui convienne au plus grand nombre et de garantir une élection plus représentative et davantage compréhensible pour les citoyens.
La proposition de loi entend ainsi remédier aux distorsions électorales et rétablir un principe fondamental : une élection municipale dans laquelle chaque voix compte de manière équivalente, sans que la territorialité prime sur le vote populaire. Elle soulève des questions sur le meilleur mode de scrutin à appliquer dans ces trois villes, en fonction également des spécificités administratives de chacune.
La commission des lois sera amenée à examiner plusieurs propositions en ce sens et nous serons vigilants à défendre le dispositif le plus respectueux de la démocratie représentative. Cette réforme s’inscrit pleinement dans les principes démocratiques que défend le groupe Les Démocrates, engagé en faveur d’une démocratie locale plus juste, plus transparente et plus représentative. C’est aussi la raison pour laquelle nous soutenons la fixation de la prime majoritaire à un niveau proche de ce qui est prévu pour les élections professionnelles régionales. Fidèle à son attachement à des institutions claires et équilibrées, notre groupe soutient toute évolution susceptible de garantir une meilleure lisibilité du scrutin, une représentation plus fidèle des citoyens et un renforcement du lien démocratique entre électeurs et élus. En rétablissant ces fondamentaux, cette réforme permet d’aligner les élections municipales à Paris, à Lyon et à Marseille sur les principes électoraux appliqués dans l’ensemble des communes françaises.
Au groupe Les Démocrates, nous sommes ouverts au débat et à la réflexion.
M. Jean Moulliere (HOR). Depuis la loi du 31 décembre 1982, dite loi PLM, il existe à Paris, à Lyon et à Marseille un mode de scrutin spécifique pour les élections municipales. Dans ces villes, le vote aux élections municipales permet d’élire à la fois des conseillers municipaux, qui siègent au conseil municipal et au conseil d’arrondissement, ainsi que des conseillers d’arrondissement ou de secteur. La loi PLM se justifiait – et se justifie encore largement – compte tenu du nombre élevé d’habitants dans ces villes. Elle vise à rapprocher les élus de leurs électeurs et les électeurs de leurs élus, en créant un échelon intermédiaire, mieux à même de traiter les enjeux très locaux.
Depuis les années 1980, des critiques ont vu le jour sur ce mode de scrutin, dont celle de permettre l’élection d’un maire qui n’a pas obtenu la majorité des suffrages à l’échelle de la commune. C’est dans ce contexte que la proposition de loi vise à réformer le mode d’élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille.
La position du groupe Horizons°&°indépendants est claire : nous soutenons le principe selon lequel une femme, un homme égal une voix – même si j’ai bien compris qu’il s’agissait, pour M. Marleix, d’un slogan à deux balles.
Nous avons toutefois des réserves vis-à-vis de ce texte. D’une part, si son objectif est louable, notre groupe estime qu’il intervient dans un calendrier trop contraint. En effet, les élections municipales auront lieu dans moins d’un an, en mars 2026, et la campagne démarrera quant à elle dans quelques mois seulement. Cette proposition de loi intervient donc trop tard pour permettre un examen approfondi, à même de traiter l’ensemble des aspects. Notre groupe pense notamment à la répartition des compétences entre la mairie centrale et les mairies d’arrondissement ou de secteur, qui n’est pas abordée dans ce texte, alors qu’elle en constitue le pendant complémentaire.
Par ailleurs, si le Conseil constitutionnel a rejeté, dans une décision du 21 février 2008, l’existence d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République qui interdit de modifier le mode de scrutin un an avant l’élection, notre groupe relève que la stabilité du droit électoral est un standard démocratique auquel il convient de ne pas déroger afin de ne pas aggraver la crise de confiance de nos concitoyens envers les élus.
D’autre part, seule une forme de consensus sur une réforme permettant des progrès démocratiques évidents aurait pu légitimer une telle réforme à moins d’un an des élections. Or force est de constater que les différentes forces politiques en présence ont des avis divergents, y compris en interne, si ce n’est une opposition de principe, sur les modalités de révision du droit électoral dans ces villes.
Dans ce contexte, le groupe Horizons°&°indépendants estime que les conditions d’une révision de la loi PLM ne sont pas réunies pour permettre un examen serein. En conséquence, nous nous abstiendrons. Néanmoins, nous sommes prêts à travailler sur des principes et des valeurs afin de permettre des progrès démocratiques dans les villes de Paris, de Lyon et de Marseille, à une autre échéance.
Mme Martine Froger (LIOT). Nous débattons d’une réforme électorale aux conséquences majeures pour les trois plus grandes villes de France, Paris, Lyon et Marseille. Présentée au Parlement à quelques mois seulement des élections municipales de mars 2026, cette réforme soulève de nombreuses interrogations, quant à son opportunité mais aussi et surtout quant à la précipitation dont elle fait l’objet.
Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires regrette les conditions dans lesquelles cette proposition de loi est examinée : inscription précipitée à l’ordre du jour, absence d’étude d’impact, absence de consultation des élus locaux concernés ou des habitants avant le dépôt du texte, refus de saisir le Conseil d’État. Comment justifier une telle modification du cadre électoral sans une étude d’impact approfondie ? Comment accepter qu’une réforme aussi structurante pour notre démocratie locale soit menée sans concertation ? Changer les règles du jeu si peu de temps avant une échéance électorale majeure, c’est prendre le risque de fragiliser la confiance des citoyens et d’introduire des incertitudes lourdes pour les futurs scrutins.
Pour aboutir, une telle réforme devrait être consensuelle, comme l’ont affirmé publiquement plusieurs ministres, la présidente de l’Assemblée nationale, le président du Sénat et les différents groupes politiques, sans oublier les élus locaux concernés.
Notre groupe comprend la volonté d’aligner le régime électoral de Paris, de Lyon et de Marseille sur le droit commun. Toutefois, cela doit se faire dans les règles. En ce sens, il est bon de rappeler que si la loi dite PLM de 1982 avait prévu un régime électoral particulier, c’était avant tout pour renforcer les liens entre les élus locaux et les citoyens dans les grandes villes. Ne perdons pas cet objectif de vue.
À ce stade, notre groupe émet trois réserves principales. Premièrement, nous ne sommes pas favorables à l’abaissement de la prime majoritaire de 50 % à 25 % pour ces trois villes. Cette disposition est surprenante puisqu’elle déroge au droit commun, alors même que la réforme est présentée comme devant mettre fin aux exceptions. De plus, cet abaissement, qui s’appliquerait sans qu’aucune étude d’impact n’ait été diligentée, serait source d’instabilité politique et de nature à complexifier certains votes, tels que le vote du budget municipal.
Deuxièmement, alors que vous évoquez un objectif de simplification du processus électoral, la création de deux scrutins pourrait au contraire être source de difficultés. En définitive, nous avons l’impression d’une réforme très parisienne, qui ne tient pas compte des spécificités des deux autres villes concernées. Ainsi, à Lyon, où existe déjà un double scrutin, les habitants se retrouveraient confrontés à trois bulletins le jour du vote. Cette situation entraînerait des problèmes d’organisation, difficiles à résoudre en moins d’un an.
Enfin, notre groupe ne comprend pas le choix qui a été fait de dissocier la réforme électorale de celle des compétences dans ces trois communes. En l’état, le texte se contente de renvoyer à un rapport pour repenser les compétences des maires d’arrondissement, ce qui n’est pas à la hauteur des enjeux. La réforme électorale proposée pourrait conduire à un conseil municipal encore plus centralisé, au détriment des conseils d’arrondissement ou de secteur.
Dans la mesure où ce texte présente de multiples failles, alors même qu’il entend modifier le mode de scrutin moins d’un an avant son premier tour, le groupe LIOT, dans sa grande majorité, ne le soutiendra pas.
M. Stéphane Peu (GDR). Cette proposition de loi sent très fort la tambouille politicienne et les petits arrangements entre amis : elle a été élaborée après des accords souvent inavouables, mais connus. Elle est d’emblée discréditée aux yeux du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et risque de contribuer au discrédit de la vie politique française, que nous devrions à l’inverse combattre.
Il est tout à fait envisageable de modifier ces modes de scrutin, mais dans des délais raisonnables et en recherchant patiemment des consensus – ce qui prend du temps. Il n’en est rien avec ce texte.
Notre première objection porte sur les délais. La majorité des députés favorables à ce texte ont voté en 2019 une loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral, qui interdit de modifier un mode de scrutin moins d’un an avant une élection ; ces collègues envisagent donc de s’asseoir sur une loi qu’ils ont eux-mêmes votée. Certes, ce que fait une loi, une autre peut le défaire, mais celle-ci visait à garantir la bonne conduite de la vie démocratique.
Ensuite, ce texte avait pour but initial de renforcer, dans les grandes villes, la proximité des élus, notamment par le biais des conseils d’arrondissement ou de secteur. Or, avec cette rédaction – et les amendements n’y changeront rien –, certains arrondissements pourraient ne pas être représentés au conseil municipal, quand d’autres y seraient surreprésentés. La proximité des élus, qui n’est déjà pas facile à garantir dans les grandes villes et qui garantit la bonne santé démocratique, serait fortement remise en question.
Enfin, nous regrettons le refus des auteurs de ce texte de solliciter l’avis du Conseil d’État. Même amendée, cette proposition de loi restera inconstitutionnelle sur bien des aspects.
En tout état de cause, il ne nous semble pas sérieux d’examiner une loi aussi bancale, au-dessus de laquelle plane l’opprobre de la magouille.
Mme Brigitte Barèges (UDR). Différents aspects du mode actuel de scrutin font l’objet de critiques : permettre l’élection d’un maire alors qu’il n’a pas obtenu la majorité des suffrages à l’échelle de la commune ; favoriser les candidats gagnants – même de justesse – dans un secteur ou un arrondissement très peuplé et défavoriser ceux qui l’emportent largement dans des secteurs moins peuplés ; permettre à un candidat d’être élu maire d’une ville sans avoir remporté l’élection dans son propre secteur. Plus généralement, ce mode de scrutin est accusé de donner plus de poids à certains électeurs en fonction des secteurs.
Cette proposition de loi, certes imparfaite, présente au moins l’intérêt de renforcer la démocratie locale en simplifiant le processus électoral et en clarifiant les responsabilités dans ces trois grandes villes, tout en évaluant la possibilité d’un transfert de compétences vers les mairies d’arrondissement.
Il nous semble normal que le mode de scrutin soit identique dans toutes les villes de France. Aussi, il serait logique de fixer la prime majoritaire à 50 %, comme dans les autres villes, ce qui présente en outre l’intérêt de faciliter la gestion durant les six années du mandat.
A priori, le groupe UDR votera cette proposition de loi, bien que certaines de ses modalités ne soient pas encore arrêtées.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Je n’ai pas l’impression d’avoir été instrumentalisé pour promouvoir des magouilles. Ce texte cherche à renforcer la transparence des scrutins municipaux en se posant les bonnes questions : les conseillers municipaux des grandes villes ne devraient-ils pas être élus de la même manière que dans toutes les villes de plus de 1 000 habitants ? L’enjeu des représentants des communes dans les métropoles mérite également d’être débattu.
Aucune des propositions de loi examinées aujourd’hui ne concerne directement le maire rural que je suis mais je remarque que, lors de l’examen de la première, pourtant moins systémique, la question des délais a suscité moins de crispations. Nous nous sommes efforcés d’apporter des réponses aux problèmes identifiés, en nous assurant de la capacité des ministères à retranscrire les dispositions de ce texte par voie réglementaire.
À trop vouloir légiférer en fonction du calendrier électoral, nous ne sommes plus capables d’avoir une vision prospective et de légiférer pour le long terme. L’argument de la proximité de la prochaine élection ne doit pas nous influencer, parce que, en définitive, ce n’est jamais le bon moment pour légiférer sur ce sujet ! Rappelons-nous qu’en 1982, la première loi consacrée aux scrutins municipaux de Paris, de Lyon et de Marseille avait été adoptée trois mois avant les élections – cela avait dû provoquer des crispations à l’époque.
En tout état de cause, il me semble important de légiférer à ce sujet et je n’apprécie guère les termes de « magouilles » et d’« arrangements » qui ont été employés. Nos débats doivent être apaisés et respectueux.
M. le président Florent Boudié. Le gouvernement, à ma demande, a communiqué des simulations des modes de scrutin proposés dans ce texte. Elles apportent à nos discussions un éclairage technique et une transparence politique, ce qui est le gage de débats sincères menés dans un climat de confiance.
Article 1er : (art. L. 261, L. 271, L. 272-4-1 [nouveau], L. 272-3, L. 272-5 et L. 272-6 du code électoral) Instauration de deux scrutins distincts lors des élections municipales de Paris, Lyon et Marseille
Amendements de suppression CL4 de Mme Léa Balage El Mariky, CL15 de M. Olivier Marleix, CL52 de M. Emmanuel Grégoire et CL 53 de Mme Sandrine Runel
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Nous souhaitons surseoir à l’adoption de cette proposition de réforme, qui est mal engagée. Le groupe Écologiste et social n’est pas opposé au principe d’une réforme des scrutins dans ces trois villes, mais une réflexion préalable est nécessaire au sujet des compétences des mairies d’arrondissement et de secteur, et des compétences des conseillers métropolitains dont le mode d’élection serait modifié. D’ici aux prochaines élections, nous ne disposons pas du temps nécessaire à cette réflexion.
M. Olivier Marleix (DR). Je regrette que les simulations annoncées ne fassent pas l’objet d’une projection en séance, pour que nous puissions les commenter. Elles sont très intéressantes en ce qu’elles concrétisent les propositions. Ainsi, le scénario type « régional guyanais » permettrait aux listes centristes d’emporter vingt sièges supplémentaires au conseil de Paris, alors que les listes de droite en perdraient vingt-cinq ; à Lyon, le même scénario donnerait cinq sièges de plus aux centristes et cinq de moins aux listes de droite. Le scénario proposé dans la proposition de loi de Sylvain Maillard – celui du ministère de l’intérieur – fait passer les listes centristes de 7 % à 19 % à Paris, de 16 % à 23 % à Lyon, et de 1 % à 6 % à Marseille. On voit à qui profiterait le crime !
Le terme de proximité n’a pas été prononcé, ce qui est surprenant puisque le scrutin PLM n’a pas été inventé par hasard : il visait à mieux prendre en considération l’envergure démographique de ces villes. Ainsi, le nombre d’habitants du 15e arrondissement de Paris est comparable à celui de Bordeaux.
Faire en sorte que les habitants des arrondissements très peuplés puissent être représentés dans la composition du conseil de Paris et des autres grandes villes n’est pas anodin. Certes, la proximité n’est pas le trait le plus caractéristique des familles politiques qui sont à l’initiative de ce texte, mais régresser sur cet aspect est tout à fait regrettable. En outre, il est malencontreux de légiférer onze mois avant les prochaines élections municipales.
M. le président Florent Boudié. J’avais en effet indiqué que nous pourrions projeter les documents, que vous avez tous reçus hier matin. Nous ne le pouvons pas, mais ils vous seront remis en mains propres incessamment.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Cette proposition de loi est un scandale, parce qu’elle repose sur de nombreux mensonges – nous en ferons la démonstration.
Je salue les efforts du rapporteur qui, tel Stakhanov ou Sisyphe, a tenté de résoudre une équation insoluble, puisqu’il ne peut y avoir de bonne réponse à une mauvaise intention.
Ce texte est d’abord un mensonge juridique : en dehors de nos murs, vous prétendez tendre vers le droit commun, alors que votre proposition est une usine à gaz dérogatoire assortie de fragilités constitutionnelles évidentes et d’impensés innombrables. La spéléologie électorale a été jusqu’à proposer que nos trois plus grandes villes s’inspirent du mode de scrutin guyanais ! Cela montre l’amateurisme et le caractère spécieux de l’approche proposée.
Ce texte est ensuite un mensonge démocratique. « Un électeur, une voix », quel beau slogan ! Mais votre raisonnement est fallacieux, dans la mesure où seul un scrutin à la proportionnelle intégrale dans une circonscription unique permettrait de le respecter. Tous les maux que vous reprochez au mode de scrutin actuel sont bien plus aigus dans les modes de scrutin des élections législatives, des élections des intercommunalités, des conseils régionaux et départementaux.
Nous reviendrons méthodiquement sur l’amateurisme de cette proposition de loi et la tromperie démocratique qu’elle représente.
Mme Sandrine Runel (SOC). Je partage l’opinion de M. Emmanuel Grégoire concernant les mensonges, tromperies et petits arrangements entre amis visant à remporter l’une des trois villes, qui ont accompagné l’élaboration de ce texte.
Trois réunions en visioconférence avec les maires concernés ne suffisent pas pour parler de concertation ou de coconstruction. Un approfondissement est nécessaire avec les élus concernés, mais aussi avec les groupes politiques qui siègent au conseil de Paris et aux conseils municipaux de Lyon et de Marseille.
Compte tenu des erreurs manifestes que comportent les simulations fournies par le gouvernement, il ne me semble pas utile d’y prêter trop d’attention. Pour ma part, je ne me baserais pas dessus pour lancer une campagne électorale à Lyon !
À Lyon, deux scrutins se tiennent déjà le même jour, puisque la métropole de Lyon est élue au scrutin direct et universel. Ajouter un troisième scrutin me semble impossible, sans compter que son coût est estimé à 100 000 euros. Chers collègues macronistes, ne trouvez-vous pas que la dissolution a déjà coûté assez cher pour ne pas ajouter des dépenses publiques inutiles ?
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Je ne suis pas choqué que nous adoptions ce texte à moins d’un an des prochaines élections municipales, parce que la question que nous devons nous poser est la suivante : le mode de scrutin actuel est-il entièrement satisfaisant ? Le conseil de Paris et les conseils municipaux ne présentent-ils pas un problème de représentation ? Tout le monde s’accorde sur ce point, même ceux qui y siègent.
Ce texte prévoit deux scrutins : un pour les arrondissements – ou secteurs – et un pour la liste centrale. Des conseillers et des maires d’arrondissement, garants d’une certaine proximité, seront élus. À Paris, notamment, les maires d’arrondissement bénéficient de nombreuses délégations de pouvoir.
J’entends vos remarques sur Lyon, dont l’organisation est particulière ; trois scrutins devront être organisés lors de la même journée. Le rapport Woerth préconise de maintenir la tenue de deux scrutins le même jour et de décaler l’élection relative à la métropole, qui relève déjà d’un régime dérogatoire.
Avis défavorable à ces amendements de suppression, parce que je souhaite que nous débattions, notamment de mon amendement de réécriture. Monsieur Grégoire, vous avez évoqué le modèle guyanais. Ce modèle est une solution de compromis, qui tient compte de toutes les discussions que j’ai pu mener ; il me semble être le bon chemin, alors que je n’avais pas d’avis arrêté au départ.
M. Patrick Hetzel (DR). Plusieurs d’entre nous ont déposé des amendements de suppression en raison du calendrier : nous sommes à moins de onze mois des prochaines échéances. De plus, les derniers amendements ont été déposés hier et rendus accessibles ce matin seulement, alors qu’ils ont un impact considérable.
Le Parlement s’est battu pour avoir la possibilité de recourir à l’expertise du Conseil d’État, dont la consultation n’est cependant pas obligatoire pour une proposition de loi. Je suis très surpris que ses initiateurs aient tout mis en œuvre pour qu’il ne soit pas consulté, contrairement au souhait de la présidente de l’Assemblée.
En tant que président de la commission des lois, vous êtes garant du niveau d’expertise des députés qui la composent. Pourquoi la commission n’a-t-elle pas insisté pour disposer de l’avis du Conseil d’État, qui aurait apporté un éclairage utile ?
M. le président Florent Boudié. Jeudi dernier, j’ai précisément demandé au ministre François-Noël Buffet les éléments évoqués par Olivier Marleix, que je vous ai transmis. Je considère m’être acquitté de mon rôle d’organisation de nos travaux et d’éclairage de nos débats, en dépit de la célérité qu’exige l’examen de ce texte.
Quant aux amendements du rapporteur, ils ont été déposés hier à 10 heures et étaient visibles dès 18 heures.
M. Laurent Lhardit (SOC). Nous en convenons tous, ce texte est améliorable. Son objectif est avant tout de faire revenir Paris, Lyon et Marseille dans le régime général des élections municipales qui prévaut dans les autres communes.
Dans un récent sondage, 88 % des Marseillais se disaient favorables au retour à l’élection directe de leurs conseillers municipaux, à travers une liste unique comportant autant de candidats que de sièges à pourvoir pour composer le conseil municipal. Ce retour au régime général, qui doit encore être amélioré dans le texte actuel, permet d’assurer à la commune de disposer d’une majorité municipale stable, comme partout en France, en donnant à la liste arrivée en tête une prime majoritaire de 50 %. Nous défendrons, par voie d’amendement, d’autres améliorations, notamment la mise à disposition d’un bulletin unique.
Nous avons l’occasion d’élaborer un texte utile et attendu par les habitants des villes concernées ; c’est pourquoi je suis défavorable à ces amendements de suppression.
M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Adopter ces amendements de suppression nous empêcherait de débattre et d’améliorer ce texte. Par ailleurs, je suis surpris par certains de vos arguments : nous venons de voter une loi concernant 70 % des communes, mais pour ces trois villes, le délai deviendrait trop court pour légiférer ? Le mépris de certains pour les communes rurales est inacceptable.
Par ailleurs, je constate que les députés ayant déposé ces amendements de suppression sont issus des partis dirigeant les villes concernées ou de partis craignant de perdre les quelques élus qui leur restent. Les plus prompts à dénoncer les magouilles devraient balayer devant leur porte et agir selon des principes plutôt qu’en fonction d’objectifs électoraux de court terme.
Nous sommes favorables à la proportionnelle et à la prime à 25 % partout et tout le temps et nous soutenons cette proposition de loi.
Enfin, si M. Olivier Marleix est si attaché à la proximité des élus, il sera donc favorable à une réforme du Sénat et à la suppression du suffrage indirect, qui permettront de rapprocher les sénateurs de leurs électeurs.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). C’est précisément au nom des principes qu’il faut arrêter cette réforme de la loi PLM, parce qu’elle va un peu trop vite. Nous ne savons pas à quel point notre état de droit est solide, alors même qu’il subit des assauts répétés ; nous ne savons pas à quel point nos règles électorales sont robustes et capables de résister à des magouilles ou à des ingérences étrangères.
J’invite celles et ceux qui souhaitent renforcer l’état de droit et la démocratie à prendre le temps d’élaborer une démarche populaire et véritablement participative, afin d’identifier les modalités de cette nécessaire réforme.
Pour aboutir à un consensus visant à renforcer les collectivités territoriales et la démocratie locale, il est nécessaire de réviser les compétences des métropoles et d’appliquer à l’ensemble des communes la proportionnalité et la prime majoritaire à 25 %.
M. Sylvain Maillard (EPR). David Amiel et moi travaillons à l’élaboration de ce texte depuis deux ans. Nous avons invité les maires de ces trois villes et les présidents des métropoles ; malheureusement, certains ont décidé de ne pas venir.
Un travail législatif sur les compétences des mairies d’arrondissement est nécessaire, mais il doit faire l’objet d’un autre texte. Il ne faut pas plus d’un objet par texte et celui que nous examinons est consacré au mode de scrutin.
Dans ces trois grandes villes, il nous semble important de garantir la représentation de l’entièreté des habitants de la ville, et donc des candidats minoritaires. C’est pourquoi nous préconisons une prime de 25 % plutôt que 50 %, qui constitue un écrasement de la représentativité des oppositions. Toutefois, nous conservons la prime de 50 % pour les arrondissements, au sein desquels les élus ne sont pas professionnels et occupent un emploi parallèlement. J’ai moi-même été adjoint au maire d’arrondissement, ce qui représente de très nombreuses tâches. Les conseillers de Paris disposent de plus de temps et d’une administration solide.
J’ai décidé de ne pas solliciter le Conseil d’État, parce que ce texte ne prévoit pas d’atteinte aux libertés publiques. En tant que législateurs, il nous appartient de choisir le mode de scrutin dans ces trois villes, en débattant des différentes propositions. Enfin, le Conseil constitutionnel sera saisi à l’issue de l’examen de ce texte.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Monsieur Lachaud, vous dites que ceux qui refusent la réforme sont ceux qui sont au pouvoir dans ces villes. Non seulement ces sous-entendus sont inélégants, mais cela signifie que ceux qui souhaitent cette réforme – La France insoumise, le Rassemblement national et la Macronie – trahissent leurs intentions de procéder à des tripatouillages, compte tenu de l’incongruité du calendrier proposé et de l’immaturité de ce débat.
Pourquoi n’avons-nous pas procédé à des discussions préalables avec vous, monsieur Maillard, autour d’un texte finalisé ? Des mois ont été nécessaires pour obtenir un texte rédigé, et tout cela pour découvrir un amendement de réécriture déposé très tard hier soir ! Il n’a été possible de discuter des principes qui sous-tendent ce changement de mode de scrutin ni avec les collectivités concernées ni avec les habitants.
La légitimité du législateur à s’interroger sur les modes de scrutin n’est pas en cause : il s’agit précisément de sa mission, fixée par la Constitution ! Pour y réfléchir, des conditions démocratiques sont nécessaires et il convient de faire les choses dans l’ordre : d’abord la réflexion sur les compétences, puis l’évolution éventuelle du mode de scrutin qui en découle. En tout état de cause, il n’est pas judicieux de légiférer dans la précipitation et pour des motivations strictement électorales.
M. le président Florent Boudié. L’amendement de réécriture du rapporteur n’a pas été mis à disposition tardivement, à moins que 18 heures vous semble un horaire tardif.
Mme Blandine Brocard (Dem). Dès qu’il est question de réformer un mode de scrutin, nous devons agir à pas feutrés et avec une grande prudence, tant les conséquences pour nos concitoyens peuvent être graves.
Par ailleurs, je regrette qu’il ne soit pas du tout question du fait métropolitain, qui ne peut être décorrélé de ce texte. La métropole lyonnaise faisant l’objet d’un scrutin direct, l’adoption de ce texte porterait à trois le nombre d’urnes présentes le même jour ; cela me semble très complexe. De plus, décaler ce scrutin accentuerait l’abstention.
C’est la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite Maptam, qui a institué la métropole de Lyon. Depuis lors, des problèmes de représentation ont émergé : les maires des cinquante-huit communes qui la constituent n’y sont plus représentés ; pire, une commune peut être représentée à la métropole de Lyon par un opposant au maire.
M. Franck Allisio (RN). Le système actuel n’est plus tenable. Il nous faut en trouver un qui soit représentatif et équilibré, en permettant de dégager une majorité pour gérer la ville sans écraser l’opposition. Évidemment, il n’est pas question de mettre hors-jeu les mairies de secteur et les mairies d’arrondissement. Par souci de cohérence, nous souhaiterions que la prime majoritaire de 25 % s’applique à toutes les élections municipales et même aux législatives. Actuellement, dans une triangulaire, celui qui fait 45 % au second tour obtient 80 % des sièges, quand celui qui fait 40 % en obtient 10 %. Il n’y a pas plus injuste. Je note d’ailleurs que le dernier maire LR de Marseille était favorable à la présente réforme. Nous, nous sommes cohérents, ce qui n’est pas le cas de tout le monde.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Il n’est pas question de réformer l’exercice des compétences dans ce texte qui vise à faire élire les conseillers municipaux des grandes villes au suffrage universel direct. L’article 5 fait seulement mention d’un rapport destiné à évaluer les modalités d’un transfert accru de compétences de la mairie centrale vers les mairies d’arrondissement. Soit dit en passant, ces dernières années, nous avons modifié des règles de compétences en cours de mandat – cela a été le cas à Paris. Je suis d’accord avec vous : la répartition des compétences n’est pas toujours identifiable. Le sujet de la personnalité morale des arrondissements et des secteurs pose aussi un certain nombre de questions. Mais ce n’est pas l’objet de la proposition de loi.
Les projections ont choqué certains, qui parlent de tripatouillage. Peut-être y a-t-il eu des dysfonctionnements lors des scrutins précédents, mais nous n’allons pas refaire l’histoire. Le texte n’a pas vocation à révolutionner la gestion de nos collectivités. Je note d’ailleurs que, pour les petites communes, cela a l’air de poser moins de problèmes.
La commission rejette les amendements.
Amendements CL27 de M. Olivier Marleix, CL6 de Mme Léa Balage El Mariky, CL65 de M. Jean-Paul Mattei et sous-amendement CL71 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)
M. Olivier Marleix (DR). Monsieur le rapporteur, vous prétendez vouloir vous aligner sur le droit commun. Pourquoi ne pas retenir dans ce cas la prime majoritaire à 50 % au lieu d’en inventer une à 25 %, qui fait courir le risque d’une censure constitutionnelle ? Je ne vois qu’une seule explication : elle était la condition posée par le Rassemblement national dans son accord avec M. Maillard. Vous savez jouer les vierges effarouchées quand le RN vote certains textes ; en revanche, pour gagner des élections, vous ne reculez pas devant d’étranges innovations.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Nous souhaitons trouver un chemin pour améliorer la représentation des habitants et renforcer la cohérence de l’action publique. Or, avec cette proposition de loi, le lien entre les arrondissements et les conseils municipaux sera rompu puisqu’un maire d’arrondissement ne pourra pas siéger au conseil municipal ni faire entendre ses besoins. On ne peut pas rompre ce lien organique sans s’interroger sur les conséquences en matière de compétences. En tant que conseillère du merveilleux 18e arrondissement, je sais à quel point le fait d’avoir eu au conseil de Paris des élus impliqués dans leur territoire nous a notamment permis d’instaurer la municipalisation de la restauration scolaire.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Mon amendement de réécriture est le fruit de nombreux échanges et d’un travail mené avec les services. Il prévoit deux scrutins distincts, l’un pour l’élection des conseillers municipaux à l’échelle de la commune et l’autre pour les conseils d’arrondissement. Le jour du vote, l’électeur disposerait ainsi de deux bulletins. Sur le premier figurerait la liste des candidats au conseil de Paris ou des candidats aux conseils municipaux de Marseille et de Lyon. Ces listes seraient divisées en secteurs, correspondant aux différents secteurs d’élection des conseils d’arrondissement, de la même façon que les listes pour les élections régionales sont divisées en autant de départements qu’en compte la région.
L’attribution des sièges s’effectuerait ensuite en deux étapes : attribution d’une prime de 25 % des sièges à la liste arrivée en tête – ces sièges pourvus au titre de la prime majoritaire sont répartis entre chaque secteur en fonction de leur population respective, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne ; puis attribution des sièges restants entre chaque liste ayant obtenu au moins 5 % des voix à l’échelle de la commune, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne. Ce mode de scrutin permet de mieux prendre en compte les résultats de l’élection municipale au sein des secteurs dans la répartition globale des sièges.
Sur le deuxième bulletin de l’électeur figurerait la liste des candidats au conseil d’arrondissement. L’élection au conseil d’arrondissement se fait selon les règles de droit commun applicables aux communes de plus de 1 000 habitants, avec une prime majoritaire de 50 % à laquelle nous ne touchons pas. Ce mode de scrutin permet de renforcer la lisibilité du vote à l’échelle de la commune et de mieux prendre en compte la diversité des suffrages exprimés dans les arrondissements ou dans les secteurs. Il garantit une meilleure représentation des équilibres locaux, tout en assurant un lien clair entre l’électeur et le futur maire. Il est prévu de procéder, six mois avant le scrutin, à un ajustement à la marge en fonction de la population recensée dans chaque arrondissement ou secteur.
M. Stéphane Delautrette (SOC). Les projections sont biaisées, puisqu’elles globalisent l’ensemble des composantes de la gauche, sans tenir compte des accords ou des oppositions à l’œuvre dans les trois villes.
Mon sous-amendement vise à rétablir la prime majoritaire de 50 %. Vous souhaitez appliquer le droit commun ; appliquez-le jusqu’au bout.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Monsieur Delautrette, nous avons déjà évoqué l’effet d’écrasement qu’elle pouvait avoir. Elle permet d’assurer une majorité solide à la liste arrivée en tête, mais à quel prix ? Alors que notre groupe a toujours défendu la pluralité et la représentation de toutes les nuances politiques, il me semble pertinent de profiter de ce véhicule législatif pour apporter un correctif démocratique au scrutin de ces trois grandes villes, qui ont une spécificité. Il est en effet important que l’opposition puisse y être représentée et disposer d’élus et de collaborateurs au service du pluralisme. Il ne s’agit pas de modifier cette prime pour toutes les élections. Avis défavorable.
Quant aux deux autres amendements, dans la mesure où les réécritures globales qu’ils proposent conduisent à supprimer les dispositions de l’article 1er, vous comprendrez que je n’y suis pas favorable.
Monsieur Marleix, les maires sont évidemment associés à nos travaux. Je les ai rencontrés, dont certains plusieurs fois. Le texte ira ensuite au Sénat. La réflexion va se poursuivre.
M. Olivier Marleix (DR). Nous serons favorables au sous-amendement de M. Delautrette. Monsieur le rapporteur, j’admire la créativité dont vous faites preuve pour trouver des solutions aux problèmes de M. Maillard. Mais, avec une prime majoritaire à 50 % pour les arrondissements et à 25 % pour le conseil municipal, votre créativité va un peu loin ! Vous prétendez qu’une prime à 50 % écrase trop la représentation de certaines formations politiques – en réalité, vos alliées de circonstance pour faire voter le texte. C’est pourtant ainsi partout en France ! Vous voulez adopter le droit commun ; en ce cas, fixez la prime majoritaire à 50 % ! Il y a un principe d’égalité devant le suffrage. On ne va pas inventer un mode de scrutin différent pour chaque ville. Aujourd’hui, ce sera pour Lyon, demain pour Toulouse. Vous rendez-vous compte du cirque que vous mettez dans notre droit électoral ? C’est totalement incompréhensible.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Monsieur le rapporteur, vous avez dit que les trois grandes villes avaient une spécificité. Pourquoi alors ne faudrait-il pas une spécificité dans la loi électorale ?
La prime majoritaire a en effet plutôt tendance à écraser les oppositions, et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle les écologistes sont favorables à une prime majoritaire à 25 % pour toutes les collectivités territoriales. Selon votre logique, dans les arrondissements, les oppositions peuvent donc être écrasées ! Votre dispositif apportera plus de complexité que de lisibilité et ne permettra pas de renouer le lien organique indispensable entre les arrondissements et les conseils municipaux.
Mme Céline Hervieu (SOC). En tant que conseillère de Paris, je suis opposée à la proposition de loi. En quoi va-t-elle améliorer la lisibilité du scrutin ? Pensez-vous sincèrement, monsieur le rapporteur, que, lorsque des électeurs parisiens prennent un bulletin « Céline Hervieu soutenue par Anne Hidalgo », ils ignorent pour quel candidat à la mairie ils votent ? Les Parisiens ont parfaitement compris leur scrutin municipal, il ne faut pas les prendre pour des perdreaux de l’année. Ce qui est plus compliqué à saisir, y compris pour les élus locaux, c’est la répartition des compétences.
Quant à rétablir le lien avec le maire, croyez-vous qu’il soit distendu entre Anne Hidalgo et les Parisiens ? Au contraire, la proximité est grande et les Parisiens ne se gênent pas pour donner leur avis sur la politique municipale. Le lien n’est pas distendu parce que le conseil de Paris est représenté dans les arrondissements, où nous sommes les relais de la mairie de Paris.
Au fond, ces débats laissent penser que nous aurions été élus sur un malentendu et que le résultat des élections ne serait peut-être pas légitime.
Mme Danièle Obono (LFI-NFP). Nous sommes défavorables à l’amendement du rapporteur, qui nous semble incohérent. En réalité, la prime majoritaire à 50 % n’écrase pas tant les formations que l’expression démocratique. Entendre la droite s’horrifier d’une manipulation dans une réforme électorale, quand on sait à quel point elle ne s’est pas gênée lorsqu’elle était au pouvoir pour redécouper des circonscriptions à sa botte, c’est quand même fort de café !
De la même façon, vous vous faites les défenseurs de la proximité, vous qui avez fait passer par 49.3 un budget qui saigne les collectivités territoriales. Parler de proximité, sans donner de moyens, c’est de la posture.
Enfin, j’appelle tous les collègues qui pensent qu’il faudrait remettre à plat les règles institutionnelles et avoir un vrai débat de fond à signer notre pétition en ligne sur le site de l’Assemblée nationale pour la convocation d’une assemblée constituante.
M. David Amiel (EPR). Monsieur Marleix, la première des spécificités expliquant la prime à 25 %, c’est l’existence des arrondissements à Paris, à Lyon et à Marseille. Elle permet leur juste représentation au conseil municipal. Aussi, je suis un peu surpris que vous qui vous dites tellement attaché à la proximité ne la défendiez pas. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si de très nombreux élus d’arrondissement de la majorité comme de l’opposition la réclament.
La proposition de loi permet bien évidemment aux maires d’arrondissement de siéger au conseil municipal. Je constate d’ailleurs que le cadre actuel ne le garantit pas en revanche, puisque le maire de Paris centre ne siège pas, par exemple, au conseil municipal.
L’amendement CL65 porte sur les deux éléments fondamentaux de la proposition de loi : la possibilité d’élire à la fois son conseil d’arrondissement et son conseil municipal et celle d’avoir une circonscription unique garantissant que la voix d’un Parisien, d’un Lyonnais, d’un Marseillais, quel que soit le quartier, l’arrondissement ou le secteur où il vote, pèse de la même manière dans la constitution du conseil municipal. Ce n’est pas un slogan mais un élément démocratique essentiel, le premier même à prendre en compte dans un mode de scrutin.
Néanmoins, dans la mesure où cet amendement vient complexifier le système, nous y sommes défavorables.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Je vous proposais une piste médiane raisonnable. Le scrutin régional est parfaitement lisible.
Par ailleurs, je n’ai jamais voulu dire que la maire de Paris n’était pas proche de ses électeurs. Ce n’est pas du tout la question.
Enfin, monsieur Amiel, la prime à 25 % est juridiquement sécurisée, puisque je ne fais que reprendre ce qui existe pour le scrutin régional.
La commission rejette successivement les amendements CL27 et CL6 ainsi que le sous-amendement CL71 et l’amendement CL65.
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Lors de sa seconde réunion du mercredi 2 avril 2025, la Commission poursuit l’examen de la proposition de loi visant à réformer le mode d'élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (n° 451) (M. Jean-Paul Mattei, rapporteur).
Réunion du mercredi 2 avril 2025 à 14 heures 45
Lien vidéo : https://assnat.fr/bqWVZE
Article 1er (suite) (art. L. 261, L. 271, L. 272-4-1 [nouveau], L. 272-3, L. 272-5 et L. 272-6 du code électoral) Instauration de deux scrutins distincts lors des élections municipales de Paris, Lyon et Marseille
Amendement CL22 de M. Sylvain Maillard et sous-amendement CL69 de M. Jean-Paul Mattei, amendement CL41 de M. Jean-Paul Mattei (discussion commune)
M. Sylvain Maillard (EPR). L’amendement CL22, rédactionnel, vise à clarifier l’article 1er.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Le sous-amendement CL69 tend à modifier l’article L. 52-3 du code électoral, qui fixe les règles applicables aux bulletins de vote, afin que puissent figurer sur les bulletins de l’élection du conseil d’arrondissement le nom et la photographie du candidat tête de liste pour l’élection du conseil de Paris ou du conseil municipal de Lyon ou de Marseille.
La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.
En conséquence, l’amendement CL41 tombe, de même que les amendements CL54 de Mme Sandrine Runel, CL55 de Mme Céline Hervieu, CL37 de M. Jean-Paul Mattei, CL50 et CL51 de M. Cyrille Isaac-Sibille, CL39 et CL40 de M. Jean-Paul Mattei.
Amendement CL24 de Mme Blandine Brocard
Mme Blandine Brocard (Dem). À Lyon, l’entrée en vigueur de ce texte impliquerait d’organiser trois scrutins le même jour : en quoi cela participerait-il à atteindre les objectifs de simplification et de clarification que vous affichez ? La perception des compétences et des responsabilités en sera diluée, ce qui va à l’encontre de notre intention de renforcer les liens entre les élus et les électeurs. Vous voulez aussi améliorer la lisibilité mais Toulouse, qui a plus d’habitants que Lyon, n’a pas d’arrondissements : ne faudrait-il pas en créer à Toulouse ou supprimer ceux de Lyon ? Le présent amendement est donc de réflexion.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Vous avez raison, si cette proposition de loi était adoptée, trois scrutins seraient organisés à Lyon le même jour. Le rapport Woerth relatif à la décentralisation propose des solutions : puisque la métropole de Lyon est juridiquement un département, on peut décorréler les deux élections. À mon sens, il faut réserver à cette dernière un traitement particulier. Nous devons poursuivre la réflexion. Je vous propose de retirer votre amendement.
Mme Blandine Brocard (Dem). Afin de poursuivre la réflexion, je le maintiens.
Mme Sandrine Runel (SOC). Laisser Lyon dans le périmètre de cette proposition de loi, c’était en méconnaître les spécificités – personne ne découvre aujourd’hui qu’il y aura trois scrutins. Nous sommes tout à fait d’accord pour traiter son cas à part : c’est l’objet des amendements de Blandine Brocard et des miens. Nous avons fêté les dix ans de la métropole, que Gérard Collomb avait pris soin de bien définir : il s’agit d’une collectivité locale à part entière, avec les compétences d’un département. Pour améliorer la lisibilité et prendre en considération la démocratie locale, il faut supprimer la référence à Lyon dans l’article 1er.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Je voudrais sous-amender l’amendement pour supprimer également les mentions de Paris et de Marseille !
Un travail reste à mener pour prendre en considération toutes les implications d’une réforme du mode d’élection. Trois scrutins posent non seulement un problème de lisibilité, mais aussi d’organisation. Les services en particulier éprouvent déjà des difficultés, notamment pour trouver des assesseurs et des scrutateurs. Il faut encore cheminer pour aboutir à un texte qui convienne au plus grand nombre.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). L’exemple de Lyon révèle un grave impensé : l’organisation des futurs scrutins. À Paris, on passerait de 902 à 1 804 bureaux de vote, soit 3 608 assesseurs. Les trois formations qui s’entendent pour changer le mode d’élection fournissent peut-être 1 % d’entre eux. Vous protestez, mais c’est vrai et on peut le vérifier : on a la liste nominative.
Autre impensé : il faudra inscrire 163 noms sur les bulletins. Comment organiserez-vous la propagande électorale, en particulier l’affichage ? Dans votre précipitation, vous avez omis d’innombrables questions d’organisation.
M. Gabriel Amard (LFI-NFP). Il ne faut pas exciper du statut de la métropole de Lyon, à la fois intercommunalité et département, pour dénaturer le sens d’un texte qui vise à renforcer la démocratie à Paris, à Lyon et à Marseille, alors que la métropole n’entre pas dans son périmètre. Si un problème particulier se pose à Lyon, il faut le traiter en tant que tel dans le cadre de la préparation des élections départementales, et non désarticuler le projet en raison d’une exception qui ne devrait pas exister.
M. Laurent Lhardit (SOC). Il faudrait adopter un bulletin unique sur lequel figurerait, d’une part, la liste municipale, et, de l’autre, la liste d’arrondissement : il n’y aurait plus besoin que d’une seule urne et d’un seul bureau de vote – le problème de la troisième urne à Lyon serait également résolu.
Mme Blandine Brocard (Dem). Monsieur Amard, la métropole de Lyon n’est pas une intercommunalité – d’où les trois scrutins. On ne peut pas non plus mettre la question de côté pour se concentrer sur le texte : dans la pratique, s’il est voté, les électeurs lyonnais devront voter trois fois le même jour.
Mme Olivia Grégoire (EPR). Nous fournissons notre quota d’assesseurs, monsieur Grégoire ; certains arrondissements de Paris n’ont pas d’élus socialistes, les élections s’y passent bien, avec des assesseurs issus d’autres formations politiques. Par ailleurs, si Lyon est capable d’organiser des élections avec deux scrutins et deux urnes, je ne vois pas pourquoi Paris ne pourrait en faire autant. Enfin, je trouve dommage d’affirmer que pour des raisons de forme – sous prétexte qu’il faudrait inscrire plus de noms sur les bulletins et adapter la propagande électorale –, il faut s’asseoir sur le droit des Parisiens, des Lyonnais et des Marseillais d’élire leurs représentants selon des règles limpides, comme le font les autres citoyens de ce pays.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Le statut de Lyon est très spécifique. Le bulletin unique pourrait constituer une solution ; le rapport Woerth l’a écarté pour préserver la lisibilité du scrutin, mais je ne veux négliger aucune piste. Ce rapport suggère de réaliser le scrutin métropolitain deux ou trois mois après l’élection des conseillers municipaux ; si l’on considère la métropole comme un département, on peut attendre 2028 pour renouveler ses conseillers – mais ce serait un peu sportif, si je puis m’exprimer en ces termes. La réflexion n’est pas aboutie mais, en adoptant le présent amendement, nous préempterions le débat. Continuons à cheminer pendant la navette, avec le souci permanent de favoriser la lisibilité et la simplicité.
Puisque vous préférez maintenir l’amendement, j’émets un avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL38 de M. Jean-Paul Mattei, rapporteur.
Amendements identiques CL5 de Mme Léa Balage El Mariky, CL18 de M. Olivier Marleix et CL20 de M. Stéphane Delautrette
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). L’amendement CL5 vise à supprimer les alinéas 4 et 5, qui prévoient pour Paris, Lyon et Marseille une prime majoritaire spécifique. Cette proposition est cohérente avec l’objectif de faire entrer ces villes dans le droit commun.
M. Olivier Marleix (DR). Vous prétendez aligner le mode d’élection du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille sur celui des autres villes françaises ; le seuil de 25 % ne rime à rien : conservons celui de 50 %.
M. Stéphane Delautrette (SOC). L’amendement identique CL20 vise à supprimer les alinéas 4 et 5 pour maintenir la prime majoritaire de droit commun.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Avis défavorable. Nous en avons débattu ce matin : le seuil de 25 % est plus raisonnable. C’est une exception, comme le sont les arrondissements ; elle permettra de mieux équilibrer les forces en présence.
M. Patrick Hetzel (DR). C’est contradictoire : vous répétez que le texte tend à aligner le mode d’élection dans les villes sur le droit commun, lequel prévoit précisément d’attribuer 50 % des sièges à la liste majoritaire. On peut même s’interroger sur la constitutionnalité de cette disposition – l’avis du Conseil d’État eût été utile. En effet, aucune spécificité locale ne justifie de s’écarter du principe d’égalité en la matière. Comment expliquez-vous cette dérogation ?
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. La loi relative à Paris, Lyon et Marseille, dite PLM, déroge déjà au droit commun – toutes les villes n’ont pas de conseil d’arrondissement. Une première avancée est possible en modifiant le mode d’élection dans les grandes villes concernées ; c’est une modification importante mais nécessaire. En abaissant le seuil à 25 %, on crée un amortisseur.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL28 de M. Olivier Marleix
M. Olivier Marleix (DR). Bien qu’essentielle, la question des comptes de campagne n’est pas abordée – l’avis du Conseil d’État était peut-être nécessaire. Deux campagnes différentes seront organisées. À Paris par exemple, on pourra trouver une liste « Sylvain Maillard pour Paris », avec les noms de ses candidats au conseil de Paris, et des listes d’arrondissement investies par Sylvain Maillard. Mais d’autres listes pourront aussi se réclamer du maillardisme, voire afficher le portrait de Sylvain Maillard : à qui imputer leurs frais de campagne, qui profiteront à la dynamique collective ? Cet angle mort du texte révèle à quel point il a été bricolé – à onze mois des élections, ce n’est pas sérieux.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Quand on a l’habitude des comptes de campagne, on s’aperçoit qu’il est tout à fait possible, techniquement, de retomber sur ses pieds. Les comptes n’en seront pas beaucoup plus complexes ; il suffira de les préparer, et d’affecter les dépenses. À Paris, Lyon et Marseille, plusieurs comptes coexistent déjà. L’instauration d’une liste centrale imposera peut-être des changements, mais ne nous bloquons pas avec des problèmes administratifs qu’avec un peu de bonne volonté, on résoudra.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Voilà encore un impensé considérable ! On peut évidemment trouver des solutions mais, les délais imposés étant très courts, il y aura des erreurs partout.
La question des comptes de campagne soulève celle de la recevabilité du texte. Son entrée en vigueur conduira chaque candidat à mener deux campagnes : le coût sera doublé, ce qui est incompatible avec l’article 40 de la Constitution.
Par ailleurs, il faut prendre en considération le risque de contentieux électoral. À Paris, dix-huit campagnes seront organisées – une pour chaque conseil d’arrondissement et une pour le conseil de Paris. Si une des listes en centrale fait l’objet d’un contentieux, par exemple un rejet des comptes de campagne, quelles seront les conséquences sur les élections d’arrondissement ? L’incertitude juridique sera immense. Comment affecter les comptes, sachant par exemple qu’un meeting pour la liste en centrale nourrit les campagnes d’arrondissement ? Des solutions sont possibles, certes, mais le Conseil constitutionnel ne manquera pas de soulever des réserves à ce sujet.
M. le président Florent Boudié. S’agissant de l’article 40, vous avez saisi le président Coquerel, qui vous a répondu.
M. Laurent Lhardit (SOC). L’une des grandes vertus du bulletin unique est de donner corps aux nouvelles modalités de scrutin. Avec un compte de campagne unique, on ne se demandera plus si une manifestation doit être imputée sur le compte de la liste centrale ou sur celui des listes de secteur.
M. Olivier Marleix (DR). La gestion des comptes de campagne n’est pas un simple problème administratif : si nous ne réglons pas cette question, le texte risque d’être censuré pour incompétence négative du législateur. En l’état du droit, il n’existe qu’une liste, composée de 503 noms, et une seule campagne ; avec ce texte, ce ne sera plus le cas. C’est un motif d’inconstitutionnalité.
Sylvain Maillard nous a assuré qu’il avait fait travailler les meilleurs spécialistes sur ce texte : puisqu’ils n’ont pas été capables de régler cette question, il vous revient, monsieur le rapporteur, de trouver des solutions d’ici à l’examen en séance publique. Pour ma part, je proposais d’affecter les dépenses par tirage au sort.
M. Sylvain Maillard (EPR). Décidément, M. Marleix s’acharne contre moi… Oui, l’objectif du texte est de modifier le mode de scrutin, et cela a évidemment des conséquences sur la gestion des comptes de campagne. Aujourd’hui, une partie des charges de la campagne centrale est déjà imputée sur les comptes de campagne d’arrondissement : nous allons travailler à un mécanisme pour identifier précisément ce qui relève de l’un ou l’autre et répartir la charge.
Effectivement, ça change les habitudes – et c’est pour cela que nous siégeons, ne vous en déplaise. Mais, comme d’habitude, nous resterons chacun dans notre rôle : vous voterez contre, nous voterons pour.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Il faut absolument assurer l’égalité devant le scrutin. Or la gestion des comptes de campagnes est un impensé du texte, qui occasionnera des difficultés pour les candidats et, en cas de recours, des annulations d’élection en cascade. Nous devons collectivement, d’ici à l’examen en séance publique, trouver une solution qui prenne en considération la spécificité du mode de scrutin que nous sommes en train d’introduire.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Monsieur Grégoire, aujourd’hui, l’annulation des comptes de campagne d’un arrondissement entraîne déjà, mécaniquement, des conséquences sur la campagne centrale.
Monsieur Marleix, nous n’avons effectivement pas approfondi cette question, mais je m’engage à l’étudier d’ici à l’examen en séance publique, afin que le texte soit solide sur le plan juridique. Reste que je ne puis accepter l’idée d’un tirage au sort : nous allons essayer de trouver une solution plus rationnelle.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Monsieur le rapporteur, sur le plan juridique, les dix-sept scrutins à Paris sont totalement indépendants les uns des autres, et seule l’annulation d’une dépense mutualisée avec la campagne centrale est susceptible d’entraîner le rejet d’une partie des comptes de campagnes d’arrondissement, au prorata de la contribution financière apportée au budget global. Le dispositif proposé par Sylvain Maillard ne peut donc pas fonctionner, et il risque de générer du contentieux électoral croisé.
En outre, à moins de doubler les plafonds de campagne, vous allez en réalité introduire un nouveau régime d’exception, qui sera un motif d’inconstitutionnalité supplémentaire : à Paris, les candidats auront droit à deux fois moins de dépenses de campagne, puisqu’ils devront financer à la fois la campagne centrale et les campagnes d’arrondissement avec le même montant.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL11 de Mme Léa Balage El Mariky
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). L’organisation de deux scrutins distincts pourrait conduire, à Lyon, à augmenter le nombre d’élus, ce qui entraînerait des charges exceptionnelles non prévues par la collectivité. Cet amendement vise donc à plafonner le nombre total d’élus – conseillers d’arrondissement et conseillers municipaux – à 223.
Par ailleurs, la répartition des élus n’est plus représentative de la réalité démographique des arrondissements. C’est un souci – j’y reviendrai avec d’autres amendements.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Le texte n’augmente pas le nombre d’élus au sein des conseils d’arrondissements et des conseils municipaux – je vous renvoie au tableau qui figure à l’article 2 : pour Lyon, le nombre de conseillers d’arrondissement est fixé à 221. Votre demande étant satisfaite, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). On m’a toujours dit : « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ». Je maintiens mon amendement.
Mme Sandrine Runel (SOC). Je rebondis sur le sujet des comptes de campagne. Je rappelle que les scrutins d’arrondissement sont indépendants, avec des comptes de campagne distincts. D’ailleurs, rien n’oblige les candidats à déposer une liste dans tous les arrondissements.
La réforme que vous proposez pourrait conduire à une multiplication du nombre d’élus : par exemple, à Lyon, les 73 conseillers municipaux pourraient venir s’ajouter aux 221 conseillers d’arrondissement s’ils n’étaient pas également saisis d’un mandat local. Cela entraînerait un surcoût financier très important. En outre, les conseillers municipaux pourraient être totalement déconnectés des arrondissements.
La réflexion sur ce texte n’est pas aboutie, et il aurait été préférable de prendre le temps de réfléchir aux réalités locales. Nous soutiendrons cet amendement.
M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). J’ai un peu de mal avec l’idée de limiter le nombre d’élus, d’autant que cela ne ferait qu’inciter au cumul.
Mme Sandrine Runel (SOC). C’est interdit !
M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Vous souhaitez que les conseillers municipaux soient aussi conseillers d’arrondissement : c’est bien la définition d’un cumul des mandats. À nos yeux, c’est un problème : chaque liste doit être libre de choisir si elle fait cumuler ses élus.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 1er modifié.
Après l’article 1er
Amendement CL34 de Mme Blandine Brocard
Mme Blandine Brocard (Dem). Je suis persuadée que la situation actuelle à Lyon brouille la compréhension du système électoral et complique l’identification des responsabilités incombant aux différences instances. Au lieu de rapprocher les citoyens des institutions locales, elle contribue à accroître encore leur défiance à l’égard du processus démocratique.
Fixée en 1982 et inchangée depuis, la représentativité des conseils d’arrondissements de Lyon ne correspond plus à la démographie actuelle. Certains arrondissements sont ainsi sous-représentés, d’autres sur-représentés. Le 9e arrondissement, qui compte 53 000 habitants, compte ainsi neuf conseillers municipaux, quand le 3e, fort de 101 000 habitants, soit presque le double, n’en a que douze – au lieu de dix-huit si la répartition était proportionnelle à la démographie.
Afin de simplifier le processus électoral lyonnais et de le rendre plus cohérent, cet amendement tend à supprimer les conseils d’arrondissement de Lyon. Cela permettrait aux électeurs de ne participer qu’à deux scrutins au lieu de trois, et de clarifier le paysage institutionnel local sans nuire à la représentativité démocratique – j’y suis très attachée.
Pour renforcer les compétences et le pouvoir de décision des arrondissements, le maire pourra désigner des adjoints délégués à chaque arrondissement, qui disposeront de délégations élargies recouvrant toutes les compétences actuelles des maires d’arrondissement. À Toulouse, qui compte aujourd’hui plus d’habitants que Lyon, ces adjoints délégués aux quartiers portent d’ailleurs officieusement le titre de « maire de quartier ».
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Amendement CL67 de M. Jean-Paul Mattei et sous-amendement CL73 de M. Laurent Lhardit, amendements CL26 de M. Franck Allisio, CL66 de M. Jean-Paul Mattei et CL49 de M. Gabriel Amard (discussion commune)
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. S’agissant de la désignation des conseillers métropolitains, deux options s’offraient à nous : si mon amendement de réécriture de l’article 1er avait été adopté, il aurait été opportun de choisir les conseillers métropolitains parmi les conseillers d’arrondissement – d’où mon amendement CL66. Mais puisque ce n’est pas le cas, il me semble préférable d’aligner le système sur le droit commun, et de flécher des conseillers municipaux pour siéger à la métropole. C’est l’objet de l’amendement CL67.
M. Laurent Lhardit (SOC). À Marseille, le nombre de conseillers métropolitains – ils sont 102 – excède le nombre de conseillers municipaux. Il faut donc préciser les conditions de désignation des conseillers supplémentaires et les modalités de leur remplacement en cas de vacance. C’est l’objet de ce sous-amendement de coordination juridique.
M. Franck Allisio (RN). Afin d’assurer la cohérence de la réforme et pour éviter un risque d’inconstitutionnalité, mon amendement tend à préciser que l’élection des conseillers communautaires est liée à celle des conseillers municipaux et non à celle des conseillers d’arrondissement ou de secteur.
M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Notre amendement va dans le même sens que celui du rapporteur : si le CL67 était adopté, nous serions satisfaits.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. N’y voyez pas de coquetterie, mais je vous demande de retirer vos amendements au profit du mien.
Quant au sous-amendement, je vous demande également de bien vouloir le retirer : je n’ai pas encore trouvé de solution pour répondre à cette spécificité marseillaise, mais nous y travaillerons d’ici à l’examen en séance publique.
M. Laurent Lhardit (SOC). Je préfère le maintenir.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Si j’en comprends la logique, ces amendements m’inquiètent : que va-t-il advenir des élus d’arrondissement, de la considération qu’on leur porte, de leur rôle, de leurs compétences, si le lien avec la métropole est rompu ? C’est encore un angle mort du texte.
Les conseillers d’arrondissement sont des élus de terrain, qui travaillent en parallèle de leur engagement. Ils sont en première ligne pour répondre aux questions des citoyens, des collectifs, des associations et, à ce titre, il est important qu’ils aient accès à la métropole pour y défendre des sujets locaux ou des demandes de financement. C’est un de leurs rôles actuellement, et il serait vraiment dommage de les priver de cet espace de dialogue avec l’ensemble des instances en lien avec leur territoire.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). À ma connaissance, jamais une proposition de loi n’a été à l’origine d’un changement du mode de scrutin, et ce n’est pas un hasard : c’est un sujet éminemment technique.
Si on instaure un scrutin spécifique pour le conseil de Paris, la logique veut que les conseillers métropolitains soient issus de ces élus. Mais l’élection des conseillers de Paris répond à des règles très particulières, prévues par le code général des collectivités territoriales (CGCT). La liste additionnelle, qui figure sur le même bulletin que celle des conseillers d’arrondissement, doit ainsi respecter la règle dite des trois cinquièmes, afin de garantir une représentation équilibrée entre la majorité et l’opposition. Associée au système de compensation par arrondissement, elle permet – sans le rendre obligatoire –, le fléchage vers la métropole de conseillers d’arrondissement qui ne seraient pas conseillers de Paris, afin d’y assurer la représentation des deux niveaux de gouvernance. La réforme que vous proposez remet en cause ce système historique sans l’articuler avec les dispositions du CGCT.
L’amendement du rapporteur ne règle pas toutes les questions légistiques en suspens. Par exemple, les élus de la métropole seront-ils nécessairement les premiers de la liste, ou dépendront-ils d’un ordonnancement précisé sur le bulletin de vote, comme le requiert le CGCT ? Imaginez : sur le bulletin de vote figureront, outre les noms des 163 conseillers de Paris, les candidats fléchés pour la métropole. Tout cela commence à être, sinon indémêlable, du moins très compliqué, et il est totalement irresponsable d’espérer faire aboutir une telle réforme dans les délais impartis. Si le texte venait à être promulgué, nous découvririons sûrement un grand nombre d’impraticabilités. Ce serait très préjudiciable pour la démocratie.
Les amendements CL 66 et CL49 sont retirés.
Successivement, la commission rejette le sous-amendement CL73 et adopte l’amendement CL67.
En conséquence, l’amendement CL26 tombe.
Article 2 : Répartition des sièges dans chaque conseil d’arrondissement
Amendements de suppression CL7 de Mme Léa Balage El Mariky, CL14 de M. Olivier Marleix, CL57 de Mme Céline Hervieu et CL58 de Mme Sandrine Runel
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Le texte ne tire pas toutes les conséquences de l’instauration d’un double scrutin. Nous proposons donc de supprimer cet article.
M. Patrick Hetzel (DR). L’article 2 méconnaît le principe d’égalité des citoyens devant le suffrage, ce qui fait peser sur le texte un fort risque d’inconstitutionnalité. De toute évidence, il aurait mérité une expertise spécifique. Peut-être M. le rapporteur pourra-t-il nous apporter un éclairage plus précis d’ici à l’examen en séance publique. En attendant, nous proposons de supprimer l’article.
Mme Céline Hervieu (SOC). Je m’associe à ces alertes. Les élus au conseil de Paris sont rattachés à un arrondissement : il ne s’agit pas, comme j’ai pu l’entendre, d’un cumul de mandats, mais seulement d’une continuité logique pour assurer la bonne application des politiques publiques.
Le texte que vous proposez contrevient au principe de libre administration des communes. Les arrondissements ne sont pas des communes de plein exercice, mais ils gèrent des équipements municipaux et prennent des décisions qui engagent directement la responsabilité juridique de la ville : les arrondissements doivent donc être représentés au conseil de Paris, ne serait-ce que pour assurer une cohérence d’ensemble. Or, si les deux scrutins sont dissociés, certains arrondissements pourraient agir en toute autonomie, sans aucun lien avec le conseil de Paris. C’est un problème important pour la conduite des politiques publiques.
De la forme comme du fond, rien ne va dans ce texte – ni sa temporalité, déjà dénoncée, ni ses principes, susceptibles d’être jugés inconstitutionnels.
Vous êtes quelqu’un d’intelligent, monsieur Maillard : pourquoi ne pas essayer de convaincre les Parisiens avec vos idées plutôt que de chercher à tripatouiller les règles du scrutin pour espérer obtenir plus d’élus ? Si ce n’est pas une magouille, c’est, à tout le moins, une manœuvre – et, en matière électorale, elle ne peut être que basse.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. L’adoption de ces amendements de suppression priverait le texte de toute substance. L’avis est donc défavorable. Vous avez le droit de ne pas être d’accord et de proposer des solutions alternatives ; en revanche, dire que la proposition de loi est une magouille a tendance à m’agacer. Nous ne procédons à aucun tripatouillage, nous réfléchissons, ce qui n’a rien d’anormal. Ce matin, la commission a adopté un texte qui concerne de très nombreuses communes ; or les grandes villes comme Lyon et Paris n’ont pas à être mises à part. Nous légiférons, tel est notre office, rien n’est anormal là-dedans. Si vous faisiez adopter un autre texte, je ne qualifierais pas votre démarche de manœuvrière. Nous tentons, sans employer le terme vexatoire de transparence, de rendre le mode de désignation des conseils municipaux de Paris, Lyon et Marseille plus logique.
M. Patrick Hetzel (DR). Vous êtes très sensible à la relation de confiance entre les électeurs et notre système démocratique, mais la question clé réside dans la suppression du continuum entre les conseillers d’arrondissement et ceux de Paris, laquelle creusera un fossé entre eux. Le texte va à l’inverse de vos louables intentions.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Certains conseillers d’arrondissement seront également conseillers de Paris et, dans la pratique, les élus se parleront. La maire de Paris m’a confirmé que les conseillers échangeaient entre eux. La réforme ne provoquera selon moi aucune coupure. Mon expérience d’élu d’une intercommunalité m’a montré que les gens discutaient entre eux. Le texte ne revient pas sur l’existence des maires d’arrondissement. Vous imaginez qu’une catastrophe va advenir : restez calmes, cette proposition de loi n’est pas une révolution et les rapports entre les élus ne seront pas chamboulés.
Mme Céline Hervieu (SOC). Dans certains arrondissements d’opposition à la majorité au conseil de Paris comme le 7e ou le 16e, le groupe socialiste ne compte aucun conseiller et il éprouve les pires difficultés à défendre sa vision pour ces arrondissements au sein du conseil de Paris, car ce sont les représentants de ces arrondissements qui prévalent. Quand le lien est perdu, la situation devient délicate. Les gens se parlent en effet, mais vous savez bien que cela compte beaucoup moins que la présence d’élus. Un arrondissement sans conseiller de Paris se trouvera totalement isolé : un tel système ne peut fonctionner.
La commission rejette les amendements.
L’amendement CL68 de M. Jean-Paul Mattei, rapporteur, est retiré.
Amendement CL56 de M. Emmanuel Grégoire
Mme Céline Hervieu (SOC). Il porte sur le tableau n° 4 que le texte veut annexer au code électoral : celui-ci n’intègre aucunement les évolutions démographiques des trois communes. Il faut abandonner cette proposition de loi, élaborée à la va-vite sur un coin de table à un an de l’élection, et lancer une concertation. Il y a des questions pertinentes à étudier, notamment celle de l’articulation entre le mode de scrutin et les compétences. Il est possible de redonner de la force et de la respiration aux conseils d’arrondissement et d’améliorer la représentativité et la lisibilité. Deux maires des trois communes concernées sont totalement opposés au texte, de même que des maires d’arrondissement, de gauche comme de droite. Posez-vous donc les bonnes questions.
Élaborons trois textes différents, car chaque commune est spécifique, notamment sur le plan démographique. En outre, les organisations territoriales n’ont rien en commun. Travaillons ensemble, avec les élus locaux. La proposition de loi ne respecte ni les institutions, ni les élus locaux, ni les maires d’arrondissement, ni les conseillers de Paris, de Lyon et de Marseille.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. L’amendement vise à écarter Lyon et Paris de la réforme : l’avis est défavorable.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Je ne suis pas non plus favorable à l’amendement. Il nous faut conduire une réflexion globale sur l’ensemble des modes de scrutin locaux. Monsieur le rapporteur, je vous remercie de chercher à élaborer un texte équilibré et juste, qui puisse être adopté. Néanmoins, à l’heure où la démocratie est attaquée, vous allez trop vite en voulant changer les règles électorales si peu de temps avant une élection et vous présentez un texte très pauvre sur les compétences des élus, l’organisation de la propagande électorale et le financement des campagnes.
M. Bastien Lachaud (LFI-NFP). Le rapporteur fait un travail remarquable : il tient compte des remarques et il s’engage à trouver des solutions consensuelles en vue de l’examen en séance publique. Je propose que nous nous en tenions à la parole du rapporteur, que personne n’a remise en question, et que nous cessions d’entendre ad nauseam les mêmes arguments, lesquels s’appliqueraient curieusement pour Paris, Lyon et Marseille mais pas pour 70 % des communes du pays. Une telle position n’est pas à la hauteur de l’enjeu !
M. Hervé Saulignac (SOC). Je ne suis ni parisien, ni lyonnais, ni marseillais et nos débats m’effarent. Tout d’abord, c’est la première fois que je vois les députés de La France insoumise suivre la majorité sur tous les sujets, ce qui ne manque pas de susciter quelques interrogations.
Dans ma commune, le conseil municipal est une tribu, dirigée par un chef de tribu respecté. Si ses décisions sont bonnes, on le remercie, si elles sont mauvaises, il est à portée de baffe et on le change. Vos villes sont devenues tellement grandes que vous ne connaissez plus le mode d’emploi de l’exercice intelligible de la démocratie. La teneur de nos échanges et le flou entourant l’avenir du texte ne sont pas de nature à éclairer les Parisiens, les Lyonnais et les Marseillais.
La sagesse serait de suspendre ce chantier si important et de le reprendre plus tard avec plus de sérieux, car le texte actuel aggravera la situation.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. J’ai été maire pendant seize ans et je n’ai jamais eu l’impression d’être un chef de tribu. J’animais une équipe, j’écoutais les autres et j’étais souvent étreint par le doute.
La discussion sur l’amélioration du mode de scrutin ne date pas d’aujourd’hui, elle a presque commencé en 1982 ou 1983 : ce n’est apparemment jamais le moment d’agir ! La proposition de loi ne modifie pas l’ensemble du système, elle ne touche même pas à la répartition des compétences. Le dernier rapport, celui d’Éric Woerth, a avancé des idées, mais l’histoire n’est pas terminée. Une architecture reposant sur une liste élue au suffrage universel et des conseillers désignés selon le même mode que partout ailleurs dans le pays ne me semble pas constituer un déni de démocratie. Vous pouvez vous opposer au texte, mais de nombreux citoyens des villes concernées sont favorables à l’évolution à laquelle il procède, même s’ils ne sont peut-être pas entrés dans ses aspects techniques. Il y a certes peut-être des problèmes dans ce domaine, relatifs notamment aux comptes de campagne, mais la proposition de loi n’a pas la prétention de régler les questions de compétences.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL42 de M. Jean-Paul Mattei, rapporteur.
Amendements CL35 de Mme Blandine Brocard, CL23 de Mme Sandrine Runel et CL63 de Mme Léa Balage El Mariky (discussion commune)
Mme Blandine Brocard (Dem). Plus nos débats avancent, plus je suis convaincue de la pertinence de mes propositions.
Mme Sandrine Runel (SOC). L’amendement CL23 est le plus consensuel de tous, car il vise à rééquilibrer la répartition des conseillers municipaux lyonnais par arrondissement, sans en modifier le nombre total de soixante-treize, sur le fondement des évolutions démographiques. L’objectif est d’aboutir à une représentation plus juste des Lyonnais.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Mon amendement complète celui de ma collègue Runel. La ventilation des conseillers d’arrondissement et municipaux n’a pas changé à Lyon depuis plusieurs années malgré les évolutions démographiques ; aussi je propose de modifier la répartition des conseillers d’arrondissement lyonnais.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Madame Runel, votre amendement vise à rééquilibrer la ventilation des conseillers municipaux lyonnais : comme le sujet est extérieur au cœur du texte, je vous demande de retirer l’amendement même s’il pourrait être retravaillé d’ici à l’examen en séance.
L’avis est défavorable sur les trois amendements.
Successivement, la commission rejette l’amendement CL35 et adopte l’amendement CL23.
En conséquence, l’amendement CL63 tombe.
La commission adopte l’article 2 modifié.
Article 3 : (art. L. 2511-8, L. 2511-25, L. 2511-26-1 [nouveau] et L. 2511-28 du code général des collectivités territoriales) Participation du maire d’arrondissement ou de secteur au Conseil de Paris ou aux conseils municipaux et diverses mesures de coordination
Amendements de suppression CL9 de Mme Léa Balage El Mariky, CL17 de M. Olivier Marleix, CL59 de M. Emmanuel Grégoire et CL60 de Mme Sandrine Runel
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). J’ai déjà évoqué l’ensemble des arguments qui motivent mon souhait de supprimer l’article 3. Sans prise en compte de l’ensemble des conséquences de la modification des modes de scrutin, la démocratie locale reculera.
Monsieur le rapporteur, vous avez indiqué que la proposition de loi n’avait pas vocation à traiter tous les sujets liés à la démocratie locale à Paris, Marseille et Lyon. Néanmoins, elle ne les ignore pas car les modes de scrutin affectent directement la gouvernance de ces communes. Si nous éludons cet aspect nous nous exposons à des conséquences, certaines minimes mais d’autres lourdes, que nous n’aurons pas anticipées. Prenons le temps de regarder dans le détail l’ensemble des répercussions d’une modification aussi rapide des modes de scrutin.
M. Patrick Hetzel (DR). Le changement du mode de scrutin a une incidence sur la gouvernance. Le pouvoir des conseils et des maires d’arrondissement va diminuer et la prise de décision va s’éloigner du terrain alors que nous souhaitons renforcer la démocratie de proximité. Votre texte est un leurre démocratique ; voilà pourquoi nous alertons la commission sur ses effets.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). C’est la première fois dans l’histoire que sera appliqué à une collectivité à statut particulier le principe d’un double vote, avec une double urne, pour désigner une double assemblée délibérante. Cette situation créera d’importants conflits de légitimité. Le Conseil constitutionnel devra se pencher sur le sujet car des questions ne manqueront pas de se poser : quelle est la bonne urne ? Quelle est l’instance qui prendra les décisions ?
Selon le code général des collectivités territoriales, le maire d’arrondissement n’a, mis à part l’état civil, aucune compétence juridique propre car le conseil de Paris peut revenir sur chacune de ses décisions. La légitimité et l’autorité des maires d’arrondissement sont exclusivement politiques : elles reposent sur le fait que l’élection du maire de Paris procède de la leur. L’évolution que vous proposez ne revient ni plus ni moins qu’à tuer les arrondissements. D’ailleurs, dans les débats sur le mode de scrutin qui ont animé la presse ces dernières années, certains demandaient à pousser la logique de la réforme jusqu’à son terme et à supprimer les arrondissements pour faire entrer Paris dans le droit commun et ne conserver que les spécificités qui découlent de ce que la capitale est à la fois une ville et un département – Lyon et Marseille possèdent également certaines particularités.
La proposition de loi met à mort les arrondissements et crée un immense conflit de légitimité.
Mme Sandrine Runel (SOC). C’est exactement le même amendement : il me semble possible que la commission l’adopte.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. L’article 3 complète les deux articles précédents ; aussi je suis évidemment défavorable à l’adoption des amendements tendant à le supprimer. Nous savons que la proposition de loi sera soumise à l’examen du Conseil constitutionnel, qui nous renseignera sur la présence d’éventuelles anomalies juridiques.
Mme Céline Hervieu (SOC). Pourquoi avez-vous commencé par le mode de scrutin et non par les compétences ? Je pense connaître la réponse : les trois formations politiques qui soutiennent le changement du mode de scrutin n’exercent pas de responsabilités à Paris, Lyon et Marseille et elles aspirent, ce qui est légitime, à en avoir. Voilà pourquoi nous parlons de magouille : votre vision est purement électoraliste. Chacun a fait ses calculs pour déterminer la modification du mode de scrutin servant au mieux ses intérêts électoraux.
Il faut entendre les arguments techniques et pertinents de mon collègue Emmanuel Grégoire : notre démarche n’est pas électoraliste puisque nous ignorons les impacts de la réforme. Il est possible que celle-ci soit favorable à la gauche socialiste à Paris. Nos arguments ont trait au fond du texte et à la méthode choisie ; ils ne sont pas guidés par l’ambition électoraliste contrairement à ceux des représentants macronistes dans notre commission. Il importe que les électeurs parisiens le sachent.
M. Patrick Hetzel (DR). Comme l’a dit notre collègue Emmanuel Grégoire, le conflit de légitimité sera inévitable entre les conseils d’arrondissement et le conseil municipal central.
Les élus continueront à dialoguer, dites-vous, mais votre expérience de l’intercommunalité aurait dû vous enseigner qu’il est important que les communes soient représentées dans les réunions de l’exécutif des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Quand des communes ne siègent plus à l’échelon intercommunal, elles ont l’impression de ne plus être entendues. Cette situation crée des tensions. Donc la question du conflit de légitimité est tout sauf annexe.
M. David Amiel (EPR). Je suis étonné d’entendre nos collègues socialistes nous expliquer que cette réforme est antidémocratique et indigne pour Paris, mais qu’elle est nécessaire et urgente pour Marseille. Je m’interroge sur les arrière-pensées motivant une telle différence de position, alors que la même loi PLM, de 1982, s’applique. Ces villes étant toutes trois divisées en arrondissements, chacun tirera ses propres conclusions des calculs du parti socialiste qui le conduisent à vouloir maintenir le cadre actuel à Paris et le changer impérativement à Marseille. De notre côté, nous faisons preuve de cohérence : la loi PLM doit être réformée selon le principe suivant : chaque Parisien, chaque Lyonnais et chaque Marseillais doit compter pour une voix, sans aucune différenciation qui serait guidée par des calculs électoraux.
La commission rejette les amendements.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL43 et CL44 de M. Jean-Paul Mattei, rapporteur.
La commission adopte l’article 3 modifié.
Après l’article 3
Amendement CL21 de M. Laurent Lhardit
M. Laurent Lhardit (SOC). Cet amendement vise à préciser que les conseillers métropolitains sont élus à partir des listes des conseillers municipaux. En cas de liste incomplète ou de vacance, le conseil municipal désigne les conseillers métropolitains supplémentaires parmi les conseillers d’arrondissement.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Nous avons eu un débat comparable lors de l’examen de votre sous-amendement CL73, qui promouvait un dispositif identique. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Article 4 : Entrée en vigueur du nouveau scrutin
Amendement de suppression CL10 de Mme Léa Balage El Mariky
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Les députés du groupe Ensemble pour la République sont plus présents pour l’examen de ce texte qu’ils ne l’étaient pour celui de la proposition de loi de leur président, Gabriel Attal.
J’ai essayé de mettre en lumière l’ensemble des conséquences du changement des modes de scrutin alors que ses promoteurs veulent que nous examinions ce texte le plus rapidement possible. Je souhaite supprimer l’article 4 comme je souhaitais supprimer les trois précédents.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Si l’article 4 est supprimé, la loi s’appliquera à partir de sa publication. Il est donc presque superfétatoire, mais autant le conserver car il indique explicitement que le nouveau système entrera en vigueur dès les prochaines élections municipales. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL45 de M. Jean-Paul Mattei, rapporteur.
La commission adopte l’article 4 modifié.
Article 5 : Remise d’un rapport d’évaluation des modalités d’un transfert de compétences de la mairie centrale vers les mairies d’arrondissement ou de secteur de Paris, Lyon et Marseille
Amendement de suppression CL16 de M. Olivier Marleix
M. Patrick Hetzel (DR). L’article 5 témoigne de la volonté d’organiser une concertation transpartisane sur le mode d’élection et les compétences du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille : il est un aveu qu’une évolution du scrutin dans un délai aussi bref poserait problème et qu’elle serait antidémocratique. Sinon, pourquoi prévoir cette concertation ex post ? En bon législateur, nous devrions l’organiser ex ante.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL46 et CL47 de M. Jean-Paul Mattei, rapporteur.
Amendement CL36 de Mme Blandine Brocard
Mme Blandine Brocard (Dem). L’objectif initial de cette PPL – simplifier le mode de scrutin et lui apporter de la clarté – n’est pas rempli.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
La commission adopte l’article 5 modifié.
Après l’article 5
Amendement CL32 de M. Jean Laussucq
M. Jean Laussucq (EPR). La maire de Paris a l’habitude de réunir les maires d’arrondissement pour évoquer des sujets de son choix, selon un ordre du jour déterminé. Nous proposons d’inscrire un tel dispositif dans la loi sous la forme d’une conférence des maires. Celle-ci pourrait être dupliquée à Lyon et Marseille si les élus le souhaitent.
M. Jean-Paul Mattei, rapporteur. Il ne me semble pas utile d’inscrire dans la loi l’existence de cette instance, d’autant plus que l’article 3 prévoit que les maires d’arrondissement puissent être entendus au conseil de Paris. À défaut du retrait de l’amendement, avis défavorable.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Le comité des arrondissements réunit déjà de façon informelle les maires d’arrondissement autour de la maire de Paris. Même si l’usage est bien établi, il ne me semble pas absurde de l’inscrire dans la loi. Je soutiens donc cet amendement.
M. Antoine Léaument (LFI-NFP). Il a été question de conflit de légitimité ; j’aimerais quant à moi que l’on parle de conflit d’intérêts. L’article 81-1-1 du règlement dispose que les députés doivent se déporter dans le cas où ils risquent de se retrouver dans une telle situation. Il me semble que certains des collègues ayant participé à notre débat sont directement concernés par les élections municipales et qu’il serait préférable qu’ils se déportent pour l’examen du texte en séance ; l’un d’entre eux a même déjà un site internet de campagne.
Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Si l’on suit ce raisonnement, l’initiative de notre collègue Sylvain Maillard est également entachée par un conflit d’intérêts – quand bien même il n’a pas encore annoncé sa candidature sur une liste.
Mme Sandrine Runel (SOC). Si un législateur ne doit avoir aucun intérêt dans le texte examiné, nous ne pourrons plus débattre de la proportionnelle ni des élections en général ! Il reste du temps avant les municipales : la remarque de notre collègue n’est pas fondée.
La commission adopte l’amendement.
La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.
En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi visant à réformer le mode d'élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (n° 451) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.
Mme Anne Hidalgo, maire de Paris
M. Patrick Bloche, premier adjoint
M. Benoît Payan, maire de Marseille
M. Grégory Doucet, maire de Lyon
M. Mathieu Hanotin, maire de Saint-Denis, président de l’Alliance des territoires
M. Patrick Ollier, président
M. Philippe Castanet, directeur général des services, préfet
Mme Martine Vassal, présidente
M. Bruno Bernard, président du conseil de la métropole de Lyon
M. Alex Gadre, chef du bureau des élections politiques
M. Alexandre Schulz, adjoint au chef du bureau des élections politiques
Mme Isabelle Dorliat-Pouzet, sous-directrice des compétences et des institutions locales de la DGCL
M. Lionel Lagarde, adjoint à la sous-directrice des compétences et des institutions locales de la DGCL
M. Benoît Chapuis, adjoint au chef du bureau des structures territoriales de la DGCL
M. Gilles Campmas, attaché au bureau des structures territoriales de la DGCL
M. Thomas Melget, chargé de mission au bureau des structures territoriales de la DGCL
M. Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’Université de Lille
M. Yves Sintomer, professeur de science politique à l’Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis
Contributions écrites
Associations d’élus locaux
Groupes politiques du Conseil de Paris
Groupes politiques du conseil municipal de Marseille
Groupes politiques du conseil municipal de Lyon
([1]) À l’article L. 2512-3 du CGCT s’agissant du Conseil de Paris et à l’article L. 2513-1 pour Lyon et Marseille.
([2]) Les quatre premiers arrondissements de Paris ont été regroupés en un arrondissement unique, Paris Centre, depuis les élections municipales de 2020.
([3]) L’article L. 2511-8 du CGCT précise que le nombre de conseillers d’arrondissement « est le double de celui des conseillers municipaux ou conseillers de Paris, sans toutefois pouvoir être inférieur à dix ni supérieur à quarante. »
([4]) Article L. 271 du code électoral.
([5]) Contribution écrite de M. Pierre Huguet aux travaux de votre rapporteur.
([6]) Contribution écrite de MM. David Souvestre et Alexandre Chevalier aux travaux de votre rapporteur.
([7]) À Lyon, le code électoral dispose que les conseillers métropolitains sont élus au cours d’un scrutin consacré à cette élection, en même temps que les élections municipales (articles L. 224-1 et suivants). Les électeurs lyonnais votent donc déjà deux fois : pour élire leurs conseillers d’arrondissement dans le cadre des élections municipales et pour élire leurs conseillers métropolitains.
([8]) Loi n° 82-1169 du 31 décembre 1982 relative à l'organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale. Cette disposition est désormais codifiée à l’article L. 2511-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT).
([9]) Ainsi qu’en dispose le même article, les limites de ces arrondissements ne peuvent être modifiées que par décret en Conseil d’État, pris après avis conforme du conseil municipal ou du Conseil de Paris.
([10]) Ce principe souffre d’une exception à Paris. Depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain, le premier secteur est en effet composé des quatre premiers arrondissements parisiens.
([11]) Les quatre premiers arrondissements de Paris ont été regroupés en un arrondissement unique, Paris Centre, depuis les élections municipales de 2020.
([12]) Le premier alinéa de l’article L. 2511-2 du CGCT dispose ainsi : « Les affaires de la Ville de Paris sont réglées par le Conseil de Paris et celles des communes de Marseille et Lyon par un conseil municipal. Pour certaines attributions limitativement définies au présent chapitre, les affaires de ces trois collectivités territoriales sont réglées par des conseils d'arrondissement. »
([13]) Article 2511-20 du CGCT.