TEXTE ADOPTÉ n° 303
« Petite loi »
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
30 mai 2024
RÉsolution
L’Assemblée nationale a adopté la résolution dont la teneur suit :
Voir le numéro : 1942.
– 1 –
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 34‑1 de la Constitution,
Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,
Vu le projet de loi de finances pour 2024,
Vu les différents rapports publiés par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat depuis sa création en 1988,
Vu la recommandation sur la prise en compte de l’élévation du niveau de la mer publiée par l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en 2010,
Vu les principes économiques pour la réalisation d’une stratégie d’adaptation publiés par le Conseil économique pour le développement durable en 2010,
Vu l’étude de cadrage « Quels choix, pour s’adapter au changement climatique ? » publiée par l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en 2011,
Vu le guide d’accompagnement des territoires pour l’analyse de leur vulnérabilité socio‑économique au changement climatique publié par le Commissariat général au développement durable en février 2011,
Vu les rapports sur le déficit de l’adaptation au climat publiés chaque année par le Programme des Nations unies pour l’environnement depuis 2014,
Vu le rapport de la Commission globale pour l’adaptation de 2018,
Vu le livre blanc « Adaptation au changement climatique : vers un cadre d’action européen » publié par la Commission des communautés européennes en 2009 (COM[2009] 147 final),
Vu le plan national d’adaptation au changement climatique mis en place par la France en 2011,
Vu les ressources mises à disposition sur le site de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie afin d’assister les collectivités territoriales dans la réalisation de leurs plans climat‑énergie territoriaux,
Vu les travaux préparatoires à la COP28 qui s’est réunie à Dubaï à la fin de l’année 2023,
Considérant en premier lieu que s’adapter signifie changer notre approche vers davantage de planification à long terme, être capable d’anticiper sur la base de différents scénarios d’élévation du niveau de la mer, tout en restant flexible face aux éventuels changements environnementaux et sociétaux ; que cela suppose en conséquence de combiner et de planifier différentes solutions : protections dures et douces, adaptation basée sur les écosystèmes, solutions hybrides, accommodation, recomposition spatiale, dans le temps et l’espace ;
Considérant que les politiques d’adaptation peuvent être susceptibles d’aggraver les inégalités et qu’il est donc primordial de placer les enjeux de justice sociale au cœur de toute décision ;
Considérant que l’engagement significatif des communautés est en effet essentiel et implique de consacrer du temps et des ressources à leur consultation et à leur participation, en prêtant une attention particulière aux groupes qui ont été traditionnellement exclus de la prise de décision ;
Considérant qu’accroître la collecte de données d’observation nationales et locales est essentiel et que cela nécessite notamment de développer des programmes de recherche pluridisciplinaires et d’impliquer les détenteurs de connaissances locales et autochtones ;
Considérant que, dans le même temps, pour mieux informer la prise de décision, il est crucial de proposer des analyses de faisabilité et des méthodes de suivi d’impacts des solutions ;
Considérant que les villes côtières ne peuvent assumer seules le coût de l’adaptation et doivent compter sur un modèle de financement fondé sur la solidarité impliquant l’ensemble des acteurs impactés directement ou indirectement par le recul du trait de côte, y compris les territoires intérieurs et le secteur privé ;
Considérant que les populations des villes côtières et insulaires ont une connaissance fine de leur environnement et que leurs savoir‑faire locaux devraient être pris en compte dans la formulation des politiques publiques en matière d’adaptation aux changements climatiques ;
Considérant que, en parallèle, renforcer l’ingénierie financière locale et, à ce titre, encourager la coopération territoriale et soutenir les intermédiaires locaux, tels que les banques de développement locales, peut permettre aux villes d’accéder à des ressources supplémentaires tout en favorisant des stratégies intégrées à l’échelle des territoires ;
Considérant que la question de la relocalisation des réfugiés climatiques est désormais une réalité à laquelle le Gouvernement devrait s’atteler en urgence ;
Invite le Gouvernement, dans le cadre de la définition d’une politique publique globale sur les villes côtières et insulaires confrontées au changement climatique et à l’élévation du niveau de la mer, à mettre en œuvre les priorités d’action suivantes :
1° Planifier sur le long terme des réponses adaptées au contexte local, notamment en inscrivant le plan national d’adaptation au changement climatique dans un chapitre dédié dans la prochaine loi de programmation sur l’énergie et le climat, qui comprenne également une trajectoire pluriannuelle des finances publiques pour la transition écologique ;
2° Favoriser la transdisciplinarité dans la recherche et la formulation des politiques publiques visant l’adaptation aux changements climatiques ;
3° Préciser dans le code de l’environnement et dans le code de l’urbanisme la nécessité d’un volet « adaptation au changement climatique » dans les processus d’évaluation environnementale des projets, plans et programmes ainsi que dans les documents d’urbanisme, notamment en élaborant un guide méthodologique pour la prise en compte des enjeux d’adaptation ou de changement climatique ;
4° Placer les impératifs sociaux au cœur des politiques d’adaptation ;
5° Développer de nouvelles façons de produire et de partager des connaissances opérationnelles pour l’adaptation, en prenant en compte les savoirs des populations locales ;
6° S’appuyer sur les recherches existantes et prévoir de nouveaux travaux de recherche afin de consolider un socle de connaissances scientifiques permettant d’informer les politiques publiques ;
7° Construire un modèle financier solidaire et adapté aux villes côtières par la création d’un fond d’érosion côtière ;
8° Recueillir des données scientifiques et mener des simulations climatiques afin d’être en mesure d’élaborer des politiques publiques adaptées ;
9° Mettre en place une stratégie nationale sur les déplacements de populations victimes des effets des changements climatiques, dont la montée des eaux et la perte de biodiversité.
Délibéré en séance publique, à Paris, le 30 mai 2024.
La Présidente,
Signé : Yaël BRAUN‑PIVET