Question N° :
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Question publiée au JO le :
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Réponse publiée au JO le :
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Analyse : |
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Texte de la REPONSE : |
La parole est a M. Alfred Muller, pour exposer sa question. M. Alfred Muller. Monsieur le secretaire d'Etat a la recherche, la presse s'est fait l'echo recemment de l'emoi qui s'est developpe durant ce premier semestre dans les laboratoires du CNRS a la suite de la manipulation informatique qui a permis, en janvier dernier, de transferer, sans concertation, sur le compte de la direction generale, les credits 1995 non consommes, et economises patiemment, dans les differents laboratoires pour de futurs projets. Cette mesure autoritaire qui, d'une certaine maniere, a penalise les departements ayant planifie leurs investissements sur le moyen ou le long terme par rapport aux laboratoires plus depensiers - ce qui semble assez incoherent au regard du bon emploi des finances publiques - a mis en evidence pour le moins un manque de dialogue entre la direction du CNRS et les laboratoires de terrain. Vous avez deja ete interroge sur ce sujet alors qu'un important mouvement revendicatif national des chercheurs se developpait a partir de ces inquietudes. Mais vous comprendrez que je ne puisse me satisfaire d'une reponse qui ne faisait que constater et soutenir le fait accompli. D'autant plus qu'aujourd'hui rien n'est venu mettre un terme a la crise de confiance entre les differents responsables de laboratoires, chercheurs et employes du CNRS, et le ministere. Certains craignent meme que cette decision de fait soit l'indication d'une volonte de ne plus faire de la recherche publique fondamentale une priorite dans notre pays. Je comprends ces interrogations puisque, sur ce sujet, vous nous renvoyez aux priorites que sont pour le Gouvernement les politiques spatiale et nucleaire, qui sont les symboles forts, avant tout, d'une politique de recherche appliquee et justifieraient presque les inquietudes exprimees sur l'avenir de la recherche fondamentale dans notre pays. Dans ce contexte, je souhaiterais donc, monsieur le secretaire d'Etat, que vous nous indiquiez les raisons reelles qui ont fonde ce transfert de fonds decide au debut de l'annee, sans que les differents acteurs de la recherche, sur le terrain, dans les differents laboratoires, aient ete consultes. Enfin, je vous saurais gre de nous indiquer quels sont les projets du Gouvernement concernant l'avenir de la recherche fondamentale dans notre pays et du Centre national de recherche scientifique, lequel, a Strasbourg comme ailleurs, est un outil performant unique au monde dont il convient non seulement de sauvegarder les ambitions mais aussi de developper les moyens materiels et humains. M. le president. La parole est a M. le secretaire d'Etat a la recherche. M. Francois d'Aubert, secretaire d'Etat a la recherche. Monsieur le depute, n'opposez pas artificiellement recherche appliquee et recherche fondamentale ! Chacun sait qu'il s'agit la d'une meme chaine avec a un bout la recherche fondamentale et a l'autre, la recherche appliquee, entre lesquelles jouent des solidarites. Expliquez-moi donc comment on pourrait lancer des fusees, fabriquer des satellites, avoir des centrales nucleaires ou faire de la simulation nucleaire s'il n'y avait pas de recherche fondamentale ? Posez-vous d'abord la question avant de la poser au Gouvernement ! En ce qui concerne la situation financiere du CNRS, je voudrais tout d'abord souligner a quel point elle etait degradee, pour ne pas dire catastrophique. Il faut ecouter tous les sons de cloche, monsieur le depute, pas seulement quelques minorites mecontentes. Dans le souci demagogique d'afficher des taux de progression flatteurs, nos predecesseurs socialistes ont fait des promesses financieres irrealistes, qu'ils n'ont pas tenues. De 1991 a 1993, les gouvernements ont certes tenu des discours sur l'importance de la recherche, mais ils ont berne les chercheurs en leur signant des autorisations d'engagement de depenses qu'il n'etait pas possible de couvrir en credits frais. C'est un peu comme les cheques en bois ! C'est ainsi que l'ecart entre les credits frais et les autorisations de programme accordees par les precedentes directions generales de l'organisme a pu atteindre un milliard de francs fin 1994. Sur l'ensemble du budget civil de la recherche, cet ecart cumule entre les autorisations de programme et les credits de paiement s'elevait a neuf milliards de francs ! Ce qui explique que, maintenant, nous devions «ramer» pour rattraper le retard ! Les laboratoires n'ont jamais, durant ces annees, ete reellement informes de l'ecart grandissant entre les autorisations de programme et les credits de paiement. On ne peut donc pas les incriminer. Ils n'ont cependant pas utilise entierement les droits a engager les depenses dont ils disposaient et les ont stockes. Suivant les conclusions du rapport de l'inspection generale des finances - dont on ne peut contester l'objectivite -, deux axes d'assainissement de la situation financiere du CNRS ont ete engages. Un rattrapage en credits de paiement de 527 millions de francs a ete effectue par le gouvernement actuel, dans le collectif de l'ete 1995 et la loi de finances initiale de 1996. De plus, il a ete decide d'annuler 200 millions de francs d'autorisations de programme anciennes, parfois tres anciennes non utilisees, qu'il n'est ni necessaire ni justifie de couvrir en credits de paiement. C'est pour identifier ces autorisations de programme anciennes et permettre une gestion transparente sur des bases assainies que la direction generale actuelle du CNRS a procede a une remise a plat des credits stockes dans les laboratoires. Cette operation - qui n'a rien d'un hold-up de je ne sais quelle nuit des longs couteaux ! - a ete annoncee de longue date par le directeur general du CNRS - journal interne du CNRS, reunions de directeurs de laboratoires, conseil d'administration de novembre dernier. Ce n'etait donc pas une surprise mais une mesure indispensable. Pour des raisons pratiques liees a la structure informatique de la gestion du CNRS, la direction generale n'avait pas d'autre solution que d'operer une remontee complete de l'ensemble des autorisations de programme presentes dans les laboratoires, accompagnee d'une nouvelle delegation d'autorisations de programme, c'est-a-dire d'un retour. Celle-ci a donne lieu a des discussions approfondies entre le direction generale et les directeurs de laboratoire, en faisant egalement intervenir les directeurs de departement. Dans ce processus, les regles suivantes ont ete respectees: Les ressources propres des laboratoires ont ete integralement maintenues et font maintenant l'objet d'une comptabilite separee; Les credits necessaires aux engagements du CNRS - en particulier les contrats de plan et les delocalisations - ont ete delegues; Les credits sur programmes correspondant a des operations plurianuelles ont ete renotifies aux laboratoires. Dans cette affaire, la preoccupation constante du ministere et de la direction du CNRS, avec laquelle nous sommes entierement solidaires, a ete de privilegier le fonctionnement courant des laboratoires - ce que tout le monde souhaite. Le bilan final de cette operation verite est que les moyens des laboratoires, hors actions sur programmes qui sont, eux, en augmentation de 36 p. 100, progressant globalement de 0,4 p. 100 entre 1995 et 1996. Les deux tiers des unites du CNRS ont une dotation de moyens de base de 1996 superieure de 90 p. 100 a celle de 1995. A cela viendront s'ajouter les dotations en credits de programmes non encore notifiees. J'ajouterai que, dans tous ces calculs, on prend en compte le fonctionnement des laboratoires en omettant a chaque fois - le ministere ne l'omet pas, lui - de signaler que l'Etat prend en charge les salaires des chercheurs qui representent actuellement plus de 85 p. 100 de la subvention donnee par l'Etat au CNRS. Pour la quasi-totalite des laboratoires, les responsables ont gere de facon sage et precautionneuse les fonds qui etaient mis a leur disposition. Ce ne sont donc pas les directeurs de laboratoire qui sont a l'origine de la crise financiere actuelle du CNRS. Je tiens a leur rendre hommage, dans la situation delicate actuelle, pour leur sens des responsabilites et du bien commun. Je ne me permettrai pas de parler de crise de confiance entre le CNRS, les laboratoires et le ministere. Nous souhaitons, au contraire, fonctionner sur de bonnes bases, en particulier sur des bases de confiance. En ce qui concerne l'atout decisif que represente notre appareil national de recherche publique - organismes et universites - je voudrais donner quelques axes qui doivent determiner les options difficiles que le contexte budgetaire nous impose. Mais auparavant, je voudrais dire que la France est et restera le premier pays au monde pour son effort de recherche publique, puisque nous y consacrons 0,9 p. 100 de notre produit interieur brut, ce qui est le record mondial. Quels sont nos objectifs ? D'abord achever l'effort d'assinissement financier entrepris - rattrapages progresssifs en credits de paiement, ultimes ajustements en DO, en particulier credits de personnel du CNRS. Privilegier les moyens de fonctionnement des laboratoires - ce qui doit nous amener a une rigueur particuliere sur les frais de structure des organismes notamment de leurs administrations centrales. Privilegier la jouvence dans les laboratoires en assurant un recrutement suffisant de jeunes chercheurs qui sont la condition de la vitalite et du dynamisme de nos equipes de recherche. Pour cela, un effort tout particulier doit etre engage pour inciter a la mobilite des chercheurs les plus anciens. Avoir le courage de faire des choix, traduisant une veritable politique scientifique. Sur les axes strategiques de recherche, identifier des enveloppes de credits incitatifs. Enfin, developper dans les organismes une politique volontariste de developpement des ressources propres, chaque fois que c'est possible. Cet accroissement des ressources propres est avant tout, pour les equipes de recherche, une invitation a se mettre encore plus a l'ecoute de la demande sociale et a nouer des liens mutuellement fructueux, comme cela se fait dans tous les pays modernes, avec le monde industriel. Il y en a deja, mais pas suffisamment. Il ne s'agit pas d'introduire une distinction tout a fait obsolete, voire une priorite, entre recherche fondamentale et recherche appliquee. Comme le disait Pasteur, dont nous avons celebre le centenaire de la mort l'an dernier, il n'y a pas de sciences appliquees, mais des applications de la science. Dans le continuum de recherche qui s'etend de la recherche fondamentale aux applications technologiques, il est indispensable de soutenir une recherche fondamentale de qualite, que ce soit dans les organismes ou a l'universite. C'est pourquoi le CNRS et la recherche universitaire ne seront en aucune facon sacrifies a des objectifs de recherche finalisee. Cependant, il est du devoir de tous les acteurs de la recherche de mieux valoriser notre formidable potentiel scientifique en faveur de la competitivite nationale et europeenne. |