Texte de la QUESTION :
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M. Didier Mathus appelle l'attention de M. le ministre de la culture et de la francophonie sur les inquietudes que souleve au sein de l'association des bibliothecaires francais la directive europeenne du 19 octobre 1992 instituant un droit sur les prets en bibliotheque destine a remunerer les auteurs. Si l'association des bibliothecaires francais reconnait le juste droit a remuneration des auteurs pour leur oeuvre, elle craint que le systeme prevu par la directive europeenne ne mette en cause les efforts entrepris par les bibliotheques pour promouvoir la lecture publique et s'ouvrir a des publics dits « faibles lecteurs », notamment issus de milieux socioculturellement defavorises. En effet, quel que soit le mode de perception du droit sur les prets (directement paye par l'emprunteur ou forfaitairement pris en charge par les collectivites locales), ce prelevement diminuera de fait les moyens financiers des bibliotheques. Or la directive du 19 octobre 1992 prevoit que « les Etats membres peuvent deroger au droit exclusif prevu a l'article 1er, pour le pret public, a condition que les auteurs au moins obtiennent une remuneration au titre de ce pret. Ils ont la faculte de fixer cette remuneration en tenant compte de leurs objectifs de promotion culturelle ». Il lui demande quelle est la position de son ministere par rapport a cette question importante pour l'avenir de nos bibliotheques et s'il compte accorder la derogation prevue a l'article 5 de la directive europeenne.
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Texte de la REPONSE :
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Adoptee le 19 novembre 1992, la directive europeenne relative au droit de location et de pret et a certains droits voisins du droit d'auteur dans le domaine de la propriete intellectuelle pose le principe du droit exclusif d'autoriser et d'interdire la location et le pret des oeuvres protegees au benefice des auteurs, des artistes interpretes et des producteurs de phonogrammes, ainsi que des producteurs d'oeuvres cinematographiques et audiovisuelles. Ainsi qu'il est indique dans l'expose des motifs de la directive, son objectif est double : supprimer les entraves aux echanges ainsi que les distorsions de concurrence au sein du marche unique en harmonisant les legislations ; assurer une protection aux titulaires de droits d'auteurs face a l'intensification des modes d'utilisation des oeuvres et a l'evolution de leur mode de diffusion, avec notamment le developpement des activites immaterielles. Le code de la propriete intellectuelle reconnait juridiquement aux auteurs le droit de ceder separement autant de droits de reproduction qu'il y a de modes d'utilisation d'un support, droit generalement denomme droit de destination. Cette disposition etant commune a toutes les oeuvres protegees, la loi francaise prevoit donc bien un droit de pret, meme si ce droit n'est pas toujours revendique par les createurs ou leus ayants droit. Notre regime juridique est donc deja a la hauteur des exigences communautaires et il n'y a pas lieu de prevoir une transposition. Quant aux eventuelles modalites de mise en oeuvre de ce droit de pret, notamment dans le domaine du livre, la reflexion est engagee par le ministere avec les representants des ayants droit, en liaison avec les autres departements ministeriels concernes. Le gouvernement est conscient que le developpement du livre et de la lecture repose sur un equilibre fragile entre une necessaire protection des auteurs et de leurs ayants droit, un reseau de librairies de qualite et un reseau de bibliotheques conservant tous les moyens d'offrir des fonds riches, varies et facilement accessibles, notamment aux publics les plus defavorises. En tout etat de cause, un droit de pret ne saurait etre mis en oeuvre sans une large concertation prealable avec tous les professionnels. L'etude actuellement en cours, a laquelle l'association des bibliothecaires francais est associee, comme l'ensemble de l'interprofession, sur la place des bibliotheques dans l'economie du livre et plus particulierement sur l'articulation entre les achats et les emprunts de livres, permettra d'etayer la reflexion generale. Quoi qu'il en soit, le gouvernement veillera a ce qu'aucune mesure a venir n'ait pour consequence de compromettre l'essor de la lecture publique dans notre pays, qui constitue pour lui une priorite.
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