Question N° :
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Question publiée au JO le :
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Réponse publiée au JO le :
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Texte de la REPONSE : |
La parole est a M. Henri Emmanuelli, pour exposer sa question. M. Henri Emmanuelli. Est-ce vous, monsieur le secretaire d'Etat a la recherche, qui allez me repondre ? M. Francois d'Aubert, secretaire d'Etat a la recherche. Oui. Mon departement ministeriel est lui aussi concerne. M. Henri Emmanuelli. Je le reconnais ! De toute facon, le Gouvernement a une responsabilite collective, comme chacun sait, dans la Constitution francaise. Le gouvernement francais, le 12 fevrier dernier, a interdit la culture du mais transgenique en France, ce dont je me felicite, alors que l'inscription au catalogue de varietes genetiquement modifiees avait recu l'aval du CTPS, le centre technique permanent des semences, ce dont je me felicite evidemment moins. Sur ce plan, la prudence semble l'emporter, mais les importations de ce mais restent autorisees, a la suite de votre demande aupres de l'Union europeenne. Je me permets en effet de vous rappeler que c'est a la demande du gouvernement francais, en 1995, que la Commission europeenne a examine ce dossier. Apres avoir essuye un refus au niveau du comite de reglementation, la Commission a saisi le conseil de l'environnement qui, le 25 juin 1996, a lui-meme emis un avis defavorable. Seule la France etait favorable. L'Allemagne et l'Espagne se sont abstenues et les douze autres pays etaient contre. La procedure etant ce qu'elle est, il appartenait alors a la Commission de se prononcer, ce qu'elle a fait en autorisant la culture du mais transgenique, conformement aux voeux du gouvernement francais. Resultat, nous sommes aujourd'hui dans une situation inextricable. Si les mesures que le Gouvernement a prises ont permis de resoudre le probleme de la consignation du corn-gluten americain, ce qui, a mon avis, n'etait pas l'essentiel, elles debouchent par ailleurs sur un veritable imbroglio car il est evident que l'on ne peut a la fois interdire la culture en France et autoriser les importations en provenance des Etats-Unis ou d'ailleurs. Ce serait un non-sens a tous points de vue. Ces mesures soulevent toute une serie de questions. Quelle mention devra figurer sur les etiquettes ? Dans ce domaine, aussi bien les consommateurs que les agriculteurs, vous l'imaginez, sont inquiets. Quel plan de controle sera prevu ? Les services du ministere sont-ils capables de deceler de maniere incontestable la presence d'organismes genetiquement modifies alors que la procedure d'analyse vient juste d'etre mise au point et n'a pas recu d'agrement ? Quel sera le sort reserve au mais americain, quand on sait que les cultures conventionnelles et modifiees ont ete melangees, ce qui rend a priori l'ensemble de la recolte suspecte de contenir des organismes genetiquement modifies ? A ce jour, enfin, et vous comprendrez que le president du conseil general des Landes soit particulierement attentif a ce probleme, comment pourra-t-on distinguer un animal nourri avec un aliment transgenique des autres animaux ? A quoi bon les labels de qualite et tous les efforts en ce sens, si le consommateur, in fine, ne sait pas avec quoi on a nourri la bete ? En effet, il semblerait que l'etiquetage s'arrete a l'aliment du betail. Ainsi, les producteurs de qualite qui voudront certifier que les animaux n'ont pas consomme de mais modifie devront supporter le cout resultant de cette certification, ce qui, vous le savez, n'est pas rien. Compte tenu de tous ces elements, il faut etre logique jusqu'au bout et interdire l'importation de mais genetiquement modifie. Un autre domaine pose question: c'est l'evaluation du risque environnemental. Vous n'avez pas autorise la culture cette annee et, une fois encore, j'approuve cette decision. Il faut donc mettre en oeuvre des maintenant un dispositif d'evaluation et sortir rapidement de l'imbroglio. Nous allons dans quelques mois aborder la saison 1997. On ne peut rester dans la situation ou nous sommes. Il faut sortir de cette situation bloquee que le gouvernement francais a tout de meme largement contribue a creer en prenant l'initiative, en 1995, de demander l'autorisation de culture. Mme le president. La parole est a M. le secretaire d'Etat a la recherche. M. Francois d'Aubert, secretaire d'Etat a la recherche. Monsieur Emmanuelli, le ministre de l'agriculture, Philippe Vasseur, m'a demande de repondre en son nom a vos interrogations, mais je le ferai egalement en tant que secretaire d'Etat a la recherche. La societe Ciba-Geigy a demande en novembre 1994 aux autorites francaises d'examiner une demande d'autorisation de mise sur le marche d'une variete de mais genetiquement modifie pour resister a une chenille, la pyrale. Cette demande a ete transmise en mars 1995 pour examen aux autres Etats membres et a la Commission. Apres une procedure complexe, la Commission a approuve le 18 decembre dernier la mise sur le marche de ce mais. La situation n'est pas aussi inextricable que vous l'imaginez. En effet, il convient de distinguer la mise sur le marche des produits importes provenant de ces cultures, destines a l'alimentation animale et la mise sur le marche des semences pour culture a grande echelle sur le territoire francais. En ce qui concerne la mise sur le marche de produits pour l'alimentation animale, les conclusions des expertises scientifiques, tant francaises qu'europeenne, sont claires: ce mais genetiquement modifie ne presente pas de risque pour la sante animale, et a fortiori pour la sante humaine. M. Henri Emmanuelli. Pourquoi l'interdit-on, alors ? M. le secretaire d'Etat a la recherche. Pour autant, les utilisateurs doivent disposer de toutes les informations necessaires, et la position du ministre de l'agriculture a ete tres ferme depuis le debut: la mise sur le marche ne pouvait etre envisagee que si elle s'accompagnait d'une information precise, sous forme d'etiquetage des produits. La France a anticipe l'application du reglement «nouveaux aliments» qui entrera prochainement en application. Elle est le premier pays a mettre en place cet etiquetage, qui concerne a la fois les produits destines a l'alimentation animale et, bien entendu, ceux destines a l'alimentation humaine. Un texte est en preparation pour organiser le controle de ces mentions avec a la fois des normes et des systemes de detection. Je me rejouis a ce propos que l'INRA ait mis au point un instrument qui permettra de faire le tri, dans des tonnages de mais, de soja ou d'autres produits, entre les grains de mais genetiquement modifie et les autres. Le consommateur aura donc le choix d'acheter ou non des produits contenant des organismes genetiquement modifies. En ce qui concerne la commercialisation de semences pour leur mise en culture sur notre territoire, le Gouvernement a considere que l'information des utilisateurs et la protection de l'environnement l'emportaient sur toute consideration economique, tout en ayant en tete l'idee qu'il fallait naturellement continuer les recherches dans ce domaine. C'est pourquoi il a decide la semaine derniere de surseoir a la signature de l'arrete autorisant la mise en culture de ce mais, afin de completer notre information sur l'impact potentiel de ces cultures sur l'environnement et l'agriculture, avec, comme vous semblez le souhaiter, une evaluation precise du risque sur l'environnement, et en particulier du risque lie a la dispersion de certains pollens. L'appreciation exacte de cet impact sera fournie notamment par l'experimentation et par le bilan de ces cultures, pratiquees sur plusieurs dizaines de milliers d'hectares a l'etranger, quelques hectares en France, ainsi que par la poursuite d'expertises complementaires. Vous voyez, monsieur le depute, que les preoccupations de sante publique et de protection de l'environnement sont au coeur des decisions du Gouvernement dans ce domaine extremement difficile. Mme le president. La parole est a M. Henri Emmanuelli. M. Henri Emmanuelli. Monsieur le ministre, je ne cherche pas a polemiquer sur ce sujet. Je veux bien comprendre, a la limite, qu'on ne pense plus aujourd'hui ce que l'on pouvait penser voici deux ans. Cela fait partie du cours normal des choses. Mais, lorsque vous affirmez que tout va bien, alors la, non ! Je vous dis: «Cela ne va pas du tout !» D'un cote, on pretend qu'il faut interdire la culture du mais genetiquement modifie parce qu'elle risque d'avoir des consequences dangereuses sur l'environnement - et c'est bien parce qu'on estime qu'il peut y avoir danger, ou en tout cas des effets non maitrises, qu'on prend des precautions - et, d'un autre cote, on va autoriser l'importation, en affirmant que ce n'est pas grave dans la mesure ou le consommateur sera prevenu. A cet egard, je vous ai interroge sur un point precis, mais je n'ai pas obtenu de reponse. L'etiquetage prevu s'arretee au stade de l'alimentation du betail. Il n'est pas prevu d'etiquetage mentionnant que tel animal mis en vente a, ou non, ingere des organismes genetiques modifies. M. le secretaire d'Etat a la recherche. Et la tracabilite ? M. Henri Emmanuelli. La tracabilite s'arrete au stade de l'aliment du betail. Il ne peut en aller de la sorte. Sinon, ce sont les fabricants eux-memes qui vont devoir l'indiquer. Mais quel sera le protocole de controle ? De quelles garanties disposera le consommateur ? Par consequent, meme si l'on vous suivait dans votre raisonnement, la procedure d'etiquetage ne serait pas complete. J'insiste sur ce probleme, qui concerne tout particulierement la production de volailles ayant un label, la production de volailles grasses. Le consommateur a le droit de savoir ce qu'a mange la bete qu'il achete. Vous ne pouvez pas vous arreter au niveau de l'alimentation du betail. Meme si l'on vous suit sur le theme selon lequel la consommation n'est pas dangereuse pour le betail, il faut bien reconnaitre que l'etiquetage n'est pas satisfaisant. J'ajoute qu'on ne peut demeurer dans une situation ou ce type de culture serait interdit en France tandis que l'importation de mais transgenique americain serait autorisee. C'est un non-sens economique, et meme un non-sens tout court. Cela revient a dire: «Apres tout, s'il doit y avoir des effets nefastes sur l'environnement aux Etats-Unis, c'est leur affaire et cela ne nous empechera pas de leur acheter du mais !» C'est un peu court comme raisonnement. Il faut sortir de cet imbroglio. Je demande instamment qu'on interdise l'importation de mais transgenique americain tant qu'on n'en aura pas autorise la culture en France. Et, avant d'autoriser cette culture, il faudra s'entourer de toutes les precautions necessaires, car, si certains chercheurs declarent qu'il n'y a pas de dangers, d'autres avouent qu'ils n'en savent rien et d'autres estiment qu'il y en a peut-etre. Dans ce genre d'affaires, le doute suffit. Il importe donc de s'abstenir, d'autant que la production de mais est plutot en excedent. Alors, a quoi joue-t-on ? Faut-il prendre des risques pour quelques points de rentabilite ou pour des questions de distorsions economiques ? L'affaire n'est pas aussi simple que vous le pretendez. Il n'y pas, d'un cote, les semences et, de l'autre, l'alimentation animale. Ou le mais transgenique est bon, ou il ne l'est pas, auquel cas il faut en interdire l'importation. Je n'insisterai pas sur l'importation de mais americain apres l'elargissement de la CEE a deux reprises et sur le probleme des quotas qui nous ont ete imposes. Mme le president. Monsieur Emmanuelli, veuillez conclure ! M. Henri Emmanuelli. Je conclus, madame le president. C'est, monsieur le secretaire d'Etat, un sujet tres sensible, que nous ne pouvons laisser sans solution. J'ai rencontre hier soir le president de l'association generale des producteurs de mais. Pour lui aussi, la situation actuelle constitue - il nous l'a dit - un non-sens: nous ne pouvons pas cultiver de mais transgenique en France, mais les Americains peuvent nous en vendre ! Vous ne ferez admettre cela a personne ! Mme Veronique Neiertz. C'est vrai ! |