FICHE QUESTION
10ème législature
Question N° : 1442  de  M.   Gantier Gilbert ( Union pour la démocratie française et du Centre - Paris ) QOSD
Ministère interrogé :  Service du Premier Ministre
Ministère attributaire :  Service du Premier Ministre
Question publiée au JO le :  19/03/1997  page :  2019
Réponse publiée au JO le :  26/03/1997  page :  2225
Rubrique :  Heure legale
Tête d'analyse :  Heure d'ete et heure d'hiver
Analyse :  Suppression
Texte de la QUESTION : M. Gilbert Gantier expose a M. le Premier ministre qu'il a appris sans surprise le refus par le conseil europeen des transports d'acceder a la demande de la France visant a adopter desormais pour la fixation du temps en Europe une heure legale constante quelles que soient les saisons. S'il n'est guere contestable en effet que le changement biannuel de l'heure officielle presente quelques inconvenients pratiques chaque fois qu'il survient, il n'en demeure pas moins que ceux-ci sont largement compenses, dans les pays eloignes de l'equateur, et ou en consequence la duree de l'ensoleillement quotidien varie sensiblement selon les saisons, par l'adaptation que ce changement d'heure legale permet d'apporter aux activites humaines en fonction de la duree effective du jour. Cela est si vrai qu'adopte pour la premiere fois en France en 1916, dans le souci alors de concourir a l'effort de guerre, le systeme dite de « l'heure d'ete » s'est peu a peu generalise tant dans l'hemisphere nord que dans l'hemisphere sud et qu'il semble vain aujourd'hui de vouloir l'abolir. Il n'en demeure pas moins qu'a cet egard la France se trouve dans une situation particuliere depuis le 28 mars 1976, date a laquelle, pour des raisons d'economie d'energie, elle a adopte non pas « l'heure d'ete » mais la « double heure d'ete ». En effet, la France presque entierement situee dans le fuseau horaire Z, dit de Greenwich, adopte neanmoins en hiver l'heure du fuseau horaire A, situe plus a l'Est, c'est-a-dire l'heure dite « de l'Europe centrale », et en ete celle du fuseau B, situe encore plus a l'Est, c'est-a-dire l'heure dite « de l'Europe orientale ». Il en resulte en realite a « l'heure d'ete » alors que nous sommes au creux de l'hiver, et que nous fetons le 14 juillet a l'heure du fuseau de Moscou. Cette situation, qui a pu presenter un reel interet economique lorsque l'energie utilisee en France etait presque entierement d'origine fossile et que l'Europe se trouvait privee d'une grande partie de ses importations petrolieres en raison des evenements du Moyen-Orient, n'a plus aujourd'hui de justification notamment parce que plus des trois quarts de l'energie electrique consommee dans notre pays est d'origine nucleaire. De graves inconvenients sociaux et medicaux resultent au contraire de ce trop important declage horaire maintenu artificiellement en France par rapport a l'heure solaire. C'est ainsi qu'en hiver le soleil se leve tres tard sur notre pays, en particulier dans sa partie Ouest ou il apparait pres d'une heure apres s'etre leve sur Strasbourg : les petits Bretons qui vont a l'ecole doivent donc, des le mois de novembre, se lever en pleine nuit pour aller a l'ecole et attendre leur bus de ramassage scolaire bien avant les premiers rayons du jour. En ete se sont au contraire les soirees qui sont interminables : il est difficile d'envoyer les enfants se coucher alors que le soleil est encore haut dans le ciel ; les malades hospitalises qui recoivent leur repas du soir avant 18 heures peinent a trouver le sommeil alors que la nuit ne survient guere avant 22 heures, etc. Tout en regrettant que la decision du conseil europeen des transports soit intervenue trop tardivement pour la prendre en compte des la presente annee, il lui demande s'il ne conviendrait pas, compte tenu des inconvenients de notre regime horaire actuel, de revenir progressivement a l'heure solaire en hiver et a l'heure solaire majoree d'une heure l'ete comme le font, par exemple, nos voisins britanniques.
Texte de la REPONSE : M. le president. M. Gilbert Gantier a presente une question no 1442.
La parole est a M. Gilbert Gantier, pour exposer sa question.
M. Gilbert Gantier. Madame le secretaire d'Etat aux transports, malgre votre talent, vous n'avez pas reussi a persuader vos collegues ministres des transports europeens a adopter une heure legale constante, proposition presentee par la France a la suite de l'excellent rapport de notre collegue Francois-Michel Gonnot a ce sujet. Pour ma part, je n'en suis pas surpris.
Ayant voyage dans de nombreux pays des deux hemispheres, je considere que l'adoption d'une heure d'ete dans les pays eloignes de l'equateur constitue un progres. Il faut en effet y tenir compte des differences de longueur entre les journees d'ete et les journees d'hiver.
Mais, si j'ai pose cette question, c'est parce que je milite depuis quelques annees pour le retour a l'heure solaire en hiver et pour que, en ete, nous adoptions l'heure GMT plus un, ce qui correspond le mieux, me semble-t-il, aux besoins de nos compatriotes.
Au creux de l'hiver, notre heure est GMT plus un. De ce fait, par exemple, surtout pour ceux de nos compatriotes qui vivent a l'ouest du pays et pour lesquels le soleil se leve encore plus tard, les enfants se levent, prennent leur car de ramassage scolaire et arrivent a l'ecole en pleine nuit encore. Il serait preferable, pour ces populations, d'adopter l'heure solaire, celle de nos ancetres.
En revanche, en ete, malgre les inconvenients, que je ne conteste pas, du changement d'heure biannuel, la vie sociale moderne profite, je crois, de l'allongement d'une heure de la journee, quand la duree de l'ensoleillement le permet.
Des lors, et puisque les ministres des transports de l'Europe ont refuse d'adopter l'heure unique toute l'annee, ne conviendrait-il pas de revenir, en hiver, a l'heure solaire et, en ete, a GMT plus un ? En ete, nous vivons actuellement a GMT plus deux, c'est-a-dire a l'heure de Varsovie ! C'est une heure qui n'est pas la notre et qui presente de tres nombreux inconvenients.
M. le president. La parole est a Mme le secretaire d'Etat aux transports.
Mme Anne-Marie Idrac, secretaire d'Etat aux transports. Monsieur le depute, vous avez rappele les discussions que nous avons eues - et que nous avons toujours, d'ailleurs - avec les instances communautaires pour savoir si la France pouvait avoir une heure distincte de l'heure europeenne. Un travail important avait ete fait a ce sujet par M. le president Gonnot auquel je veux rendre hommage. Ces discussions se poursuivent car nous sommes dans un processus de codecision et le Parlement europeen, qui avait d'ailleurs pris des amendements allant dans le sens que nous souhaitions, est a nouveau saisi de cette affaire.
Quand bien meme les quatorze autres pays membres adopteraient une directive allant dans le sens contraire, j'ai obtenu, a la demande du Premier ministre, Alain Juppe, que la question puisse etre posee de nouveau, non plus sous le seul aspect technicien des transports, mais sous un angle plus large, c'est-a-dire en tenant compte a la fois de la qualite de la vie et des problemes d'environnement, d'agriculture et de securite routiere, bref d'elements plus societaux et humains.
Quoi qu'il en soit, vous evoquez aujourd'hui, monsieur le depute, la question du choix du fuseau horaire dans lequel la France et plusieurs autres pays de l'Europe continentale se trouvent.
Quel que soit le fuseau, vous conviendrez, monsieur le depute, qu'entre Strasbourg et la pointe du Raz, dans le Finistere, il existe - et il existera toujours - un decalage sensible avec l'heure du meridien de Paris. C'est une donnee de la geographie contre laquelle nous ne pouvons rien et qui, au reste, confere a notre pays une partie de son charme.
Vous trouvez que les inconvenients sont sensiblement aggraves en ete ou l'heure officielle se trouve en avance de deux heures sur l'heure solaire et vous demandez, dans ces conditions, si la France ne pourrait pas pratiquer les memes horaires que la Grande-Bretagne, c'est-a-dire l'heure solaire en hiver, avancee d'une heure en ete.
Il est vrai que la France est souveraine dans le choix de son fuseau horaire de rattachement. Il se trouve que les pays continentaux tels que le Benelux, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne ont choisi le meme fuseau.
En raison de l'intensite des relations existant entre la France et ces pays, il semble - mais on peut en discuter - que l'inconvenient est moindre de rester dans le meme fuseau horaire qu'eux. Le changement dans le sens que vous souhaitez, monsieur le depute, n'aurait d'interet que dans les relations de la France avec la Grande-Bretagne, l'Irlande et le Portugal, ce dernier pays ayant recemment change de fuseau horaire. Cette question merite effectivement d'etre debattue. On en voit bien la dimension internationale, meme si elle n'a rien de juridique.
Quoi qu'il en soit, meme si la discussion reste ouverte, il va de soi que les ecoliers bretons et les ecoliers alsaciens resteront a cet egard dans une situation differente !
M. le president. La parole est a M. Gilbert Gantier.
M. Gilbert Gantier. Je vous remercie de votre reponse, madame le secretaire d'Etat. Je vous precise que si nous avons une heure commune avec nos voisins, c'est un peu parce que nous qui les y avons pousses. Il faudrait tout de meme tenir compte de notre situation et ne pas oublier qu'outre la latitude la longitude est a prendre en consideration. C'est ce qu'on fait aux Etats-Unis, ou il y a une heure de decalage entre New York et Chicago, et dans ce grand pays qu'est la Russie, ou l'on n'a evidemment pas la meme heure a Moscou qu'a Vladivostok !
Pour le Portugal aussi, situe tres a l'ouest de l'Europe, une avance de deux heures en ete est prejudiciable.
Nos amis portugais, espagnols, italiens ont accede a notre demande d'avancer de deux heures en ete, car elle se justifiait au moment de la crise petroliere consecutive a la guerre du Moyen-Orient par la necessite de faire des economies d'energie. Mais desormais notre energie, notamment electrique, est a 75 ou 80 % nucleaire. Elle est donc constante et l'on ne peut plus realiser d'economies sur ce chapitre. Par consequent, l'argument qui avait prevalu a l'epoque ne vaut plus. C'est la raison pour laquelle, madame le secretaire d'Etat, je continue a plaider pour l'heure GMT en hiver, et GMT plus un en ete.
UDF 10 REP_PUB Ile-de-France O