FICHE QUESTION
10ème législature
Question N° : 16171  de  M.   Carpentier René ( Communiste - Nord ) QE
Ministère interrogé :  enseignement supérieur et recherche
Ministère attributaire :  industrie, postes et télécommunications et commerce extérieur
Question publiée au JO le :  04/07/1994  page :  3354
Réponse publiée au JO le :  03/10/1994  page :  4911
Rubrique :  Propriete intellectuelle
Tête d'analyse :  Protection
Analyse :  Inventeurs salaries ou independants
Texte de la QUESTION : M. Rene Carpentier attire l'attention de M. le ministre de l'enseignement superieur et de la recherche sur les difficultes de l'inventeur-salarie pour faire valoir sa reconnaissance, sa valeur, donc ses droits. Il en va de meme pour l'inventeur independant s'adressant a un industriel, a compter du moment ou l'invention a ete mise au point et ou l'industriel n'a plus besoin de lui. Pour l'inventeur-salarie, aucune instruction de calcul de juste prix n'est donnee. Aucune instruction concernant les conditions de remuneration supplementaire ne sont prevues par les textes. Les industriels en arrivent a demander le remboursement du juste prix. Il existe un vide juridique. Pour l'inventeur independant, rien ne lui assure de la validite du brevet et l'industriel lui demande le remboursement des sommes versees en cas d'annulation du titre de propriete. Il lui demande s'il n'estime pas juste pour les inventeurs salaries : 1/ d'introduire dans la loi francaise des instructions de calcul de juste prix aujourd'hui inexistantes ; 2/ de definir les conditions de remuneration supplementaires et imposer ces instructions aux partenaires sociaux ; 3/ d'introduire la regle du premier inventeur ce qui eviterait aux inventeurs-salaries de se faire spolier leurs inventions par leur hierarchie et les inciterait a participer du mieux possible a la vie de l'entreprise et aux inventeurs independants porteurs de projets de se voir doubles par les industriels auxquels ils s'adressent.
Texte de la REPONSE : L'honorable parlementaire souleve diverses questions relatives, d'une part, aux inventeurs salaries et, d'autre part, aux relations entre les inventeurs independants et les industriels qui acquierent leurs brevets. Sur la remuneration des inventions de salaries, la diversite des situations en presence, notamment en matiere d'evaluation de l'utilite industrielle et commerciale de l'invention pour l'entreprise, rend difficile l'etablissement d'instructions precises quant au calcul tant de la remuneration supplementaire que du juste prix. La tache serait d'autant plus delicate que l'appreciation du juste prix doit etre faite, aux termes de la jurisprudence, a la date de l'attribution de l'invention a l'employeur, c'est-a-dire a un moment ou les conditions d'exploitation de l'invention ne sont pas connues. Cela est d'ailleurs parfois avantageux pour le salarie, l'evaluation ne pouvant pas etre remise en cause a la lumiere d'eventuels aleas survenant ulterieurement. La jurisprudence a en effet juge que l'employeur ne peut s'abriter derriere l'eventuelle nullite du brevet decouverte a posteriori pour echapper au versement du juste prix des lors qu'il a exerce son droit d'option (cour d'appel de Paris, 17 aout 1989). La situation est differente pour l'inventeur independant qui a cede son brevet a une entreprise, le contrat s'averant sans objet lorsque le brevet est annule. Le cedant a toutefois la possibilite de se premunir contre le risque d'une demande de remboursement du prix de cession en introduisant dans le contrat, ce qui est frequent, une clause selon laquelle il ne garantit que l'existence du titre et non sa validite. Le contrat peut egalement stipuler l'achat aux risques et perils du cessionnaire. Quant a la fixation du montant de la remuneration supplementaire pour les inventions qui entrent dans le cadre de la mission du salarie, la volonte du legislateur a ete de promouvoir les accords entre partenaires sociaux et de fait la majorite des conventions collectives contiennent des dispositions a cet effet. En cas de litige sur le montant du juste prix ou de la remuneration supplementaire, l'inventeur a d'ailleurs la faculte de saisir la Commission nationale des inventions de salaries qui fera aux parties une proposition de conciliation. A titre indicatif, les montants du juste prix evalues par la commission ont ete de 50 000 a 700 000 francs et ceux de la remuneration supplementaire sont en moyenne de deux a trois mois de salaire. L'honorable parlementaire evoque enfin l'instauration de la regle du premier inventeur qui eviterait les risques de spoliation. Or la regle du premier deposant est desormais quasi universelle. C'est en particulier celle de la convention de Munich sur le brevet europeen, dont la France est l'un des Etats signataires, et celle de nos principaux partenaires economiques, a l'exception isolee des Etats-Unis. Il n'apparait donc pas possible d'y renoncer. Cela n'est d'ailleurs pas necessaire pour que soit evite le risque evoque. En effet, plusieurs dispositions permettent tant a l'inventeur independant qu'a l'inventeur salarie de conserver la preuve de la date de son invention. Ils peuvent les uns et les autres deposer a l'Institut national de la propriete industrielle une enveloppe Soleau pour un cout modique, actuellement 55 francs. Ce depot, qui ne confere pas au deposant un droit exclusif sur son contenu, lui donne toutefois une date certaine. L'inventeur salarie peut, quant a lui, faire transmettre sa declaration a l'employeur par l'intermediaire de l'Institut national de la propriete industrielle grace a une enveloppe speciale. Cette procedure et celle de l'enveloppe Soleau permettent ainsi de disposer d'un moyen de preuve determinant au cas ou devrait etre engagee une action en reconnaissance de la qualite d'inventeur ou une action en revendication de propriete. La protection des droits des veritables inventeurs ainsi amenagee ne presente pas moins de garanties que la regle au premier inventeur qui comporte, au contraire, de nombreux inconvenients.
COM 10 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O