Texte de la QUESTION :
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M. Bernard Carayon appelle l'attention de M. le ministre du budget sur l'article 666 du code general des impots, dont la redaction initiale remonte a la loi du 22 frimaire an VII et qui dispose que « les droits d'enregistrement... sont assis sur les valeurs ». L'administration fiscale, approuvee sur ce point par la Cour de cassation, a interprete ce texte en ce sens que la « valeur » a prendre en consideration pour l'assiette des droits d'enregistrement est la valeur venale theorique du bien immobilier transfere, dans des conditions optimales de realisation pour le vendeur, et par la voie d'extension pour le donateur. Il en resulte, dans la pratique, que l'administration dans l'enregistrement, informee par le depot d'un acte de mutation immobiliere pratiquee en dessous du cours moyen au jour ou elle est realisee, redresse systematiquement l'evaluation du bien cede pour l'assiette des droits a percevoir sans chercher a prouver qu'il y a eu en l'occurrence une minoration volontaire de l'estimation declaree, et sans meme insinuer qu'il y ait eu, en cas de mutation de titre onereux, la moindre dissimulation de prix. L'administration fiscale soutient simplement alors qu'une mutation realisee effectivement en catastrophe par un cedant ayant un urgent besoin de tresorerie, dans des conditions parfaitement sinceres, ne lui est pas opposable car elle ne doit pas - elle - supporter une moins-value de rentree fiscale du fait de la perte theorique subie par le cedant lors de la cession d'un element de son patrimoine. Une telle disposition aboutit a percevoir un impot sur une moins-value d'actif realise par un particulier et est donc fondamentalement inique. Le fait que le redevable des droits d'enregistrement soit en principe le cessionnaire ne change rien a cette situation, car les parties a la mutation sont solidaires du paiement de l'impot vis-a-vis de l'administration fiscale. Les recours ouverts aux contribuables contre la perception d'un complement d'imposition, dans le cas evoque, ne leur offrent au surplus aucune possibilite de contredire utilement l'estimation de l'administration fiscale. En effet, par une disposition tres archaique et exorbitante du droit commun, les reclamations en matiere de droit d'enregistrement sont portees devant le tribunal de grande instance qui statue en premier et dernier ressort sans possibilite d'appel, et par ailleurs et surtout le tribunal, quand il est saisi, applique, sous le controle de la Cour de cassation, la doctrine administrative selon laquelle la valeur de reference a prendre en compte est la valeur venale theorique et non le montant effectif de la transaction. Il lui demande s'il n'estime pas qu'en cette periode de recession economique, affectant particulierement le marche immobilier, la perception d'un impot sur une valeur artificiellement calculee est injustifiee.
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Texte de la REPONSE :
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L'article L. 17 du livre des procedures fiscales reconnait expressement a l'administration la possibilite de rectifier le prix ou l'evaluation d'un bien ayant servi de base a la perception d'une imposition lorsque ce prix ou cette evaluation est inferieur a la valeur venale reelle des biens transmis ou designes dans les actes ou declarations. Cette valeur qui s'entend du prix normal qui pourrait en etre obtenu par le jeu de l'offre et de la demande dans un marche reel compte tenu de l'etat dans lequel se trouve l'immeuble avant la mutation et des clauses de l'acte de vente constitue, en effet, l'assiette de l'impot (CGI, art. 666). L'application de ces regles permet de prendre en compte les evolutions du marche tout en ne faisant pas supporter au budget de l'Etat ou a celui des collectivites territoriales au profit desquelles la taxe departementale de publicite fonciere et les taxes additionnelles communale et regionale sont percues, les effets des moins-values de recettes qui resulteraient de la stipulation d'un prix de vente inferieur a la valeur du marche. Par ailleurs, dans le cadre de la procedure contradictoire qui institue un dialogue entre les contribuables et l'administration, ces derniers disposent de toutes les garanties souhaitables pour contester la fixation de l'assiette de l'impot. En effet, ils ont la faculte, apres reception de la notification de redressements, de presenter leurs observations ; si le litige subsiste, ils peuvent demander l'avis de la commission departementale de conciliation, instance paritaire presidee par un magistrat de l'ordre judicaire. Si le desaccord persiste, les interesses peuvent adresser une reclamation au directeur des services fiscaux competent, et, en cas de rejet de celle-ci, saisir le tribunal de grande instance en vue de faire ordonner l'expertise du bien litigieux. Ces precisions sont de nature a repondre aux preoccupations exprimees par l'honorable parlementaire.
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