Texte de la QUESTION :
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M. Georges Mesmin appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice, sur les bureaux communs d'huissiers, constitues pour rationaliser le travail des huissiers au niveau depatemental. Leur existence pose en effet plusieurs questions : 1/ en vertu de l'article 33 du decret du 29 fevrier 1956, leur ouverture est soumise a une autorisation prealable du ministere de la justice. Or, il apparait que seuls deux bureaux en France sont a ce jour autorises ; 2/ ces bureaux sont inscrits au registre du commerce et declarent, comme celui de Paris, la signification des actes comme etant l'objet de leurs activites. Une structure commerciale, dont les bureaux ne sont d'ailleurs pas accessibles au justiciable, delivre donc des actes qu'en vertu de la loi seuls les huissiers sont habilites a delivrer ; 3/ ces bureaux emploient des clercs, ce qui pose le probleme suivant : la qualite de clerc autorise a signifier des actes est, entre autres, soumise a son rattachement officiel a une etude d'huissiers. Or, dans le cadre des bureaux communs, ces clercs ne sont pas rattaches a une etude, ce qui, dans une certaine mesure, peut constituer une usurpation de fonction publique severement punie par les articles 433-12 et 433-13 du code penal ; 4/ lorsque les clercs de ces bureaux communs signifient des actes, ce sont les bureaux communs les delivrant qui devraient etre mentionnes sur l'acte, or c'est systematiquement l'etude qui est censee avoir procede a la signification qui apparait. Cette pratique est absolument contraire a la loi et peut meme s'analyser comme un faux, reprime par le code penal ; 5/ enfin, tres concretement, si ces bureaux existent, c'est qu'en vertu de l'article 14 du tarif des huissiers, ces derniers sont autorises a elever le montant de leurs honoraires si l'acte est delivre rapidement. Mais, c'est un detournement du sens de cet article dans la mesure ou l'huissier ne se deplace pas lui-meme, ni meme un salarie de son etude. Par consequent, considerant que cette situation est inacceptable dans la mesure ou des officiers publics ou ministeriels, auxiliaires de justice, accomplissent une partie de leur travail dans la plus totale irregularite ainsi que dans l'illegalite la plus constante, il lui demande : 1/ pourquoi l'autorisation du ministere de la justice a-t-elle ete refusee aux bureaux communs qui l'ont sollicitee ; 2/ pourquoi, si le refus d'autoriser etait motive, le ministere a-t-il tolere le fonctionnement irregulier et illegal desdits bureaux communs ; 3/ quelles mesures il envisage de prendre pour que les huissiers de justice, qui delivrent les assignations et executent les decisions des tribunaux au nom du peuple francais, respectent la loi et les dispositions legales.
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Texte de la REPONSE :
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Les textes generaux applicables aux professions liberales ainsi que la reglementation propre au statut des huissiers de justice offrent a ces derniers plusieurs instruments de rationalisation de leur activite, dont l'utilisation n'est pas soumise a un regime juridique unique. En premier lieu, les articles 31 et 33 du decret no 56-222 du 29 fevrier 1956 offrent a ces professionnels la possibilite de constituer un groupement ayant pour but de faciliter l'execution de leur travail materiel et de reduire leurs frais d'exploitation. Cette faculte suppose que les interesses soient en residence dans une meme commune et que soit obtenue prealablement une autorisation delivree par le garde des sceaux. En second lieu, l'article 36 de la loi no 66-879 du 29 novembre 1966 permet aux huissiers de justice de constituer entre eux des societes civiles de moyens, qui ont pour objet exclusif de faciliter a chacun de leurs membres l'exercice de son activite. Cette deuxieme possibilite n'est subordonnee a aucune condition particuliere d'agrement. Il en va de meme, notamment, des societes civiles de moyens qui ont adopte le statut de societes cooperatives, comme les y autorise l'article 37 de la loi precitee. En consequence et sous reserve de l'appreciation souveraine des juridictions, seule pourrait etre entachee d'irregularite, eu egard aux articles susvises du decret du 29 fevrier 1956, la creation de bureaux communs d'huissiers de justice effectivement soumis a ces dispositions et n'ayant pas obtenu l'agrement du garde des sceaux. La diversite de formes juridiques que revetent de telles structures et la pluralite des regimes qui leur sont applicables conduisent actuellement la Chancellerie a reexaminer au cas par cas la situation des bureaux communs d'huissiers de justice existant en region parisienne ou dans les grandes villes de province. S'agissant de la regularite du role que peuvent jouer les bureaux communs en matiere de signification d'actes, il convient d'apporter les precisions suivantes : la signification des actes d'huissier de justice grace a la centralisation effectuee par un bureau commun peut etre consideree comme un mode d'organisation destine a faciliter et a accelerer, dans un meme ressort territorial, les demarches des huissiers de justice competents ainsi que celles des clercs assermentes qui peuvent les suppleer. Le role ainsi joue par le bureau commun n'est pas en lui-meme de nature a priver l'huissier de justice instrumentaire de la responsabilite qui lui incombe notamment quant a la regularite des diligences effectuees. En tout etat de cause, les actes d'huissier de justice doivent porter mention de l'identite de l'officier public et ministeriel competent. En ce qui concerne le role respectif des huissiers de justice et des clercs assermentes, la chancellerie entend exercer un controle rigoureux sur la compatibilite du fonctionnement actuel des differents bureaux communs avec les dispositions de la loi du 27 decembre 1923. Il y a lieu enfin d'observer que le role joue, le cas echeant, par le bureau commun ne parait pas pouvoir donner lieu a une application de l'article 14-1 du decret no 67-18 du 5 janvier 1967, lequel permet, pour des activites non visees par ce texte tarifaire, la remuneration de l'huissier de justice sur la base d'une convention d'honoraires fixee entre les parties et soumise en tant que de besoin au controle du juge taxateur.
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