Texte de la QUESTION :
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M. Daniel Mandon attire l'attention de M. le ministre des affaires etrangeres sur le projet d'institution d'une cour criminelle internationale permanente qui permettrait de traduire en justice tous les responsables des violations des droits de l'homme. Il lui rappelle qu'un comite preparatoire aux Nations Unies a acheve ses travaux en aout 1996 mais n'a pu aboutir a la redaction d'un texte de synthese. La France a largement contribue a l'idee d'une juridiction penale internationale, rendue necessaire au regard des nombreux massacres perpetres dans le monde. Car, si les tribunaux internationaux ont deja eu a connaitre de tels crimes, il ne s'agissait jusqu'ici que de tribunaux ad hoc institues pour une circonstance particuliere, comme le tribunal de Nuremberg, le tribunal penal international pour l'ex-Yougoslavie ou le tribunal international pour le Rwanda. Cette cour criminelle internationale donnerait naissance a un mecanisme visant a faire respecter le droit penal international, tout en permettant de rompre le cycle de l'impunite et de prevenir de nouvelles violations. Il lui demande en consequence de bien vouloir lui preciser la position de la France sur cette question et les propositions qu'elle entend developper avec ses partenaires.
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Texte de la REPONSE :
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Ainsi que le souligne l'honorable parlementaire, un comite preparatoire place sous l'egide des Nations Unies a ete charge d'elaborer le projet de statut d'une cour criminelle internationale de nature permanente. Ses travaux ont debute en 1996, sous la presidence de M. Adrian Bos (Pays-Bas) et se poursuivront en 1997, en vue de la conference diplomatique qui devrait se tenir en 1998. Le rapport presente a l'Assemblee generale lors de sa 51e session rassemble les propositions emanant de toutes les delegations. Sur la base de cette compilation, le comite preparatoire entamera, en fevrier prochain, la phase la plus active de son mandat, consistant a elaborer un langage de synthese. La France contribue activement aux travaux du comite preparatoire conformement a sa vocation de defense des droits de l'homme dans le monde avec pour ambition la creation d'une juridiction efficace, credible, universelle. Elle a formule a cette fin de nombreuses propositions. En qualite de membre permanent du conseil de securite, la France souhaite veiller a garantir la contribution d'une future cour au maintien de la paix internationale : il convient a cet effet de bien inserer le futur dispositif dans le cadre des Nations Unies, et d'ecarter toute tentative visant a le transformer en nouvelle tribune politique. La stricte definition de la competence materielle de la cour, limitee aux crimes d'une gravite particuliere (crimes contre l'humanite, genocide, crimes d'agression, violations graves des lois et coutumes de guerre, violations graves des conventions de Geneve...), ainsi que le principe d'un consentement au cas par cas des Etats devraient eviter une telle derive. Le role du conseil de securite doit par ailleurs etre evoque dans le statut meme : ainsi le comportement des Etats qui se soustrairaient a leur obligation de cooperation avec la cour serait porte a l'attention du conseil. Pays de droit romano-germanique, nous faisons valoir par ailleurs les apports specifiques de cette tradition juridique pour la mission de la future cour ; des elements detailles relatifs a la procedure (revision, appel, modalites de jugement par contumace, role d'une chambre d'instruction, exclusion de la possibilite du plea bargaining) ainsi qu'aux droits des victimes doivent etre inscrits dans le statut. L'experience recente des deux tribunaux ad hoc sur l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, crees dans l'urgence sur la base d'un statut general, demontre en effet a contrario la necessite d'ere precis et complet sur les modalites de fonctionnement de la future cour. Juridictions de nature temporaire, a competence limitee, les deux cours ad hoc ont pu s'adapter, quoique de maniere souvent acrobatique, face a l'imprecision de leur statut. L'institution d'une cour criminelle internationale de nature permanente est une entreprise plus ambitieuse encore et ne peut laisser place a l'improvisation. Enfin, la France s'efforce d'eviter que certaines regions du monde ne s'estiment exclues du processus de negociation par le rythme extremement volontariste que souhaite lui imposer le petit groupe des democraties occidentales. Seule la participation de tous les pays a des negociations menees dans la transparence pourra conduire a la mise en place d'une juridiction veritablement universelle.
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