FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 10339  de  M.   Degauchy Lucien ( Rassemblement pour la République - Oise ) QE
Ministère interrogé :  culture et communication, porte-parole du gouvernement
Ministère attributaire :  culture et communication, porte-parole du gouvernement
Question publiée au JO le :  16/02/1998  page :  772
Réponse publiée au JO le :  23/03/1998  page :  1636
Rubrique :  archives et bibliothèques
Tête d'analyse :  prêts de livres
Analyse :  gratuité. directive européenne
Texte de la QUESTION : M. Lucien Degauchy attire l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur la nécessité de faire bénéficier les bibliothèques publiques de la dérogation à l'institution « d'un droit de prêt », comme le prévoit la directive européenne 92-100/CEE du 19 novembre 1992. En effet, cette directive européenne qui vise globalement la protection des droits d'auteurs prévoit que « les Etats membres peuvent exempter certains établissements du paiement de ce droit ». La France n'a pas appliqué ce droit de prêt aux bibliothèques publiques, dans la mesure où le centre national du livre, créé en 1946, aide les auteurs et les éditeurs depuis 1976. Par ailleurs, en France, la loi du 11 mars 1957 protège le droit d'auteur par rapport à l'éditeur et à la diffusion de ses oeuvres. L'adoption de la dérogation prévue à l'article 5 de la directive européenne, pour les documents imprimés, prêtés ou consultés sur place dans les bibliothèques publiques permettrait de maintenir ce régime. Les bibliothèques seraient en effet fragilisées par l'application d'un droit de prêt qui viendrait grever leur budget d'achats de livres. Les bibliothèques départementales et municipales en France connaissent un développement très récent, et toutes les communes ne bénéficient pas encore d'un service de lecture et de documentation. Les collectivités territoriales prennent majoritairement à leur charge les frais de fonctionnement des bibliothèques, en achats de documents et personnel permanent. L'institution d'un « droit de prêt », outre la complexité du calcul des recettes sur les prêts d'ouvrages et les lourdeurs de redistribution aux auteurs concernés, pèserait évidemment sur les finances locales. Il est faux d'affirmer que les bibliothèques font du tort aux auteurs et aux éditeurs. Les emprunts de livres ne nuisent pas à l'achat en librairie, comme le montre l'enquête de 1995 faite par l'Observatoire de l'économie du livre, à la demande de la direction du livre et de la lecture. Au contraire, les acquisitions de plus en plus importantes effectuées par les bibliothèques publiques permettent l'édition d'ouvrages même difficiles et coûteux, et assurent la conservation de livres rares, qu'un lecteur ne trouvera plus chez son libraire. En 1995, les bibliothèques municipales ont ainsi dépensé 466 millions de francs en achats de livres, et les bibliothèques départementales 114 millions de francs. Dans nombre de petites communes qui constituent le réseau des bibliothèques départementales de prêt, il n'y a souvent aucune librairie, la bibliothèque locale et le bibliobus y assurent seuls la présence de livres. C'est pourquoi, il lui demande de faire appliquer la dérogation du « Droit de prêt » instituée par la directive européenne 92-100/CEE du 19 novembre 1992.
Texte de la REPONSE : La directive européenne du 19 novembre 1992 a reconnu le droit exclusif pour un auteur, un artiste-interprète, un producteur de phonogramme, ou un producteur d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, d'autoriser ou d'interdire le prêt de son oeuvre et de percevoir le cas échéant une rémunération au titre de cette utilisation, le prêt n'englobant pas au sens de ce texte la mise à disposition de documents à des fins de consultation sur place. Sous la forme du droit de destination qui permet aux ayants droit de céder autant de droits qu'il y a de modes d'utilisation d'un support d'information, le droit français de la propriété intellectuelle s'est avéré être sur ce point d'ores et déjà en pleine conformité avec la directive européenne. Si l'existence et la légitimité du droit de prêt ne sont pas contestables sur le plan juridique, il n'en est pas moins vrai que la question de son application par l'ensemble des organismes de prêt, et particulièrement les bibliothèques publiques, est demeurée entière. Quoi qu'il en soit l'application du droit de prêt ne saurait en aucun cas, dans l'esprit du Gouvernement, freiner l'essor de la lecture publique, constamment encouragée par l'Etat, ni faire obstacle à l'action que mènent les bibliothèques pour un égal accès de tous au livre. Ce souci doit d'autant plus prévaloir que les études menées par le ministère chargé de la culture, en association avec les organismes représentatifs des auteurs, des éditeurs, des librairies et des bibliothécaires, n'ont pas fait apparaître que l'emprunt en bibliothèque concurrence ou décourage de manière significative l'achat de livres en librairie. Attentif aux souhaits des ayants droit et aux préoccupations des libraires comme aux enjeux de lecture publique portés par les élus et les professionnels des bibliothèques, le Gouvernement a choisi de conditionner l'examen des modalités d'application du droit de prêt à un consensus entre les uns et les autres. En vue de favoriser ce consensus et de permettre une étude sereine et approfondie de la question du droit de prêt en bibliothèque, le ministère de la culture et de la communication vient de confier à M. Jean-Marie Borzeix une mission de réflexion et de concertation, dont les conclusions devraient être connues d'ici à la fin du premier semestre.
RPR 11 REP_PUB Picardie O