FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1042  de  M.   Goasguen Claude ( Démocratie libérale et indépendants - Paris ) QOSD
Ministère interrogé :  éducation nationale, recherche et technologie
Ministère attributaire :  éducation nationale, recherche et technologie
Question publiée au JO le :  13/03/2000  page :  1526
Réponse publiée au JO le :  15/03/2000  page :  1846
Rubrique :  enseignement secondaire : personnel
Tête d'analyse :  enseignants
Analyse :  remplacement
Texte de la QUESTION : Depuis la rentrée 1999, de nombreux parents d'élèves se plaignent des défaillances de remplacement d'enseignants. Dans les écoles, les collèges et les lycées de l'académie de Paris, les enseignants absents ne sont pas souvent remplacés. Cela pose des problèmes aux parents, qui le manifestent désormais collectivement, et handicape les élèves ainsi retardés dans leurs études. M. Claude Goasguen demande à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie pourquoi le remplacement des enseignants absents n'est pas systématique alors qu'il avait pourtant assuré le contraire dans ses déclarations sur la rentrée, dite du « zéro défaut ». Il lui demande comment il entend remédier à cette situation intolérable qui porte atteinte au service public. Par ailleurs, il souhaite qu'il lui communique les chiffres précis, par académie, des absences remplacées et non remplacées depuis la rentrée 1999 ainsi que ceux pour 1998.
Texte de la REPONSE : Mme la présidente. M. Claude Goasguen a présenté une question, n° 1042, ainsi rédigée:
«Depuis la rentrée 1999, de nombreux parents d'élèves se plaignent des défaillances de remplacement d'enseignants. Dans les écoles, les collèges et les lycées de l'académie de Paris, les enseignants absents ne sont pas souvent remplacés. Cela pose des problèmes aux parents, qui le manifestent désormais collectivement, et handicape les élèves ainsi retardés dans leurs études. M. Claude Goasguen demande à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie pourquoi le remplacement des enseignants absents n'est pas systématique alors qu'il avait pourtant assuré le contraire dans ses déclarations sur la rentrée, dite du «zéro défaut». Il lui demande comment il entend remédier à cette situation intolérable qui porte atteinte au service public. Par ailleurs, il souhaite qu'il lui communique les chiffres précis, par académie, des absences remplacées et non remplacées depuis la rentrée 1999 ainsi que ceux pour 1998.»
La parole est à M. Claude Goasguen, pour exposer sa question.
M. Claude Goasguen. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, lorsque j'ai décidé de poser cette question, je pensais que seules quelques écoles de mon arrondissement étaient concernées par le problème du remplacement et que les manifestations de parents d'élèves, qui étaient sporadiques, à l'école La Fontaine, à l'école Charnovitz ou dans d'autres, étaient dues à la spécificité de mon arrondissement. Avec quelque malignité, j'imaginais que l'académie de Paris n'avait pas servi comme elle aurait dû le faire les intérêts des groupes scolaires de mon arrondissement.
Malheureusement, et heureusement, je me suis aperçu que le problème du remplacement des enseignants était généralisé dans l'ensemble de l'académie de Paris, et même, hélas !, dans l'ensemble des académies de France puisque, désormais, c'est une partie intégrante des revendications que l'on voit poindre dans les diverses manifestations dont les origines sont multiples. Celle-ci, en tout cas, est très nette: pourquoi y a-t-il autant d'enseignants absents ?
Nous en sommes d'autant plus étonnés que, parmi vos engagements de rentrée, que nous avons suivis avec intérêt, il y avait la fin de ce genre de dysfonctionnement dans l'éducation nationale. Il n'y en a jamais eu autant ! Et jamais nous n'avons eu autant le sentiment, comme un grand nombre de parents d'élèves, que le service public n'était plus assuré comme il convenait.
Vous savez à quel point, pour des raisons personnelles mais aussi collectives, je suis attaché à la bonne qualité du service public, dont je viens. Ne voyez donc pas là une attitude politicienne de ma part. Il s'agit véritablement d'un grave problème, que se posent de nombeux parents d'élève, et notamment dans l'académie de Paris.
J'ai écrit à l'inspecteur d'académie, dont les compétences ne sont pas en cause. Et je dois dire que la réponse qu'il m'a adressée le 25 février dernier m'a quelque peu surpris. Il me dit qu'il a mobilisé plusieurs dizaines de remplaçants, que, pour le moment, 650 emplois supplémentaires dans l'académie de Paris ont été utilisés à 100 %, qu'il a eu l'autorisation de recruter 120 jeunes stagiaires, qui, eux aussi, sont appelés à remplacer des postes vacants. Alors, étant donné ce nombre, tout de même assez considérable, de 770 enseignants en plus, comment se fait-il, monsieur le ministre, que les problèmes de remplacement ne soient toujours pas réglés ?
Ma question est donc double: d'abord, s'agit-il d'une situation exceptionnelle, que le malaise qui traverse l'éducation nationale pourrait justifier ? Ensuite, n'est-ce pas aussi, peut-être, un problème de structure ? En particulier, je voudrais bien savoir exactement comment fonctionnent les nouveaux services de ressources humaines que vous avez mis en place, et s'ils sont, avec les distinctions qui sont faites par circonscription, véritablement opérationnels.
Ce que je souhaite, monsieur le ministre, c'est que, devant les difficultés qui sont les vôtres - et qui ont été celles de vos prédécesseurs je ne me fais aucune illusion: il ne s'agit pas là, encore une fois, d'une question politique - vous puissiez redresser la situation le plus rapidement possible. Ce sujet est sensible. Il faut voir les parents d'élèves lorsqu'ils amènent leurs enfants au petit matin, et qu'à onze heures on leur téléphone en disant qu'il n'est pas possible de les garder dans la journée. Il faut que vous amélioriez la qualité du service public, c'est essentiel, notamment dans les écoles primaires et pré-élémentaires. Je voudrais, de ce point de vue, connaître votre position et éventuellement les moyens que vous comptez mettre à la disposition de l'académie de Paris dans les semaines et dans les mois qui viennent.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, vous savez que ce sujet me préoccupe depuis que je suis ministre de l'éducation nationale. J'ai dit un certain nombre de choses sur ce sujet, dont je ne retire rien, et je me suis attaqué à ce problème. Est-ce que nous avons obtenu des résultats ? La réponse est oui. Est-ce que nous avons obtenu des résultats pleinement satisfaisants ? La réponse est non.
Nous avons mis en oeuvre un suivi systématique des heures d'absence, et, pour le secondaire, une prise en compte des besoins de remplacement intégrés dans les besoins des académies. Nous souhaitons que tous les remplacements de courte durée soient gérés directement par les établissements. Vous le savez, cela va à l'encontre de certaines habitudes et je ne ne peux pas dire que, sur ce point, mes instructions aient connu un franc succès.
Concernant l'académie de Paris, je voudrais vous donner des chiffres, pour vous montrer que la situation, même si elle n'est pas encore pleinement satisfaisante, s'est améliorée. Dans le premier degré, le pourcentage des postes consacrés au remplacement des maîtres absents est de 7,9 %, ce qui est conforme à la moyenne nationale. Le nombre de jours d'absence non remplacée est inférieur à 10 % du nombre total de journées d'absence.
En 1998-1999, sur les 100 753 journées d'absence - le chiffre est quand même intéressant -, 92 462 ont été effectivement remplacées. Depuis la rentrée 1999, il y a eu 55 139 journées d'absence et 50 575 ont donné lieu à un remplacement. Compte tenu de la forte attente des parents d'élèves, le recteur d'académie a prévu d'améliorer le remplacement, notamment en augmentant le contingent d'emplois.
Je pense qu'il y a aussi des habitudes qui ont été prises. Par exemple, et c'est vrai même pour les postes vacants, on éprouve encore le besoin de demander l'autorisation à l'administration centrale. Et les remplacements se font encore à partir du rectorat. Je vous le dis tout de suite: la gestion des ressources humaines n'est pas encore entrée dans le cadre de la déconcentration, c'est la gestion des bassins qui se fera.
J'espère améliorer ce système, et à cet égard, je vous livre ma conviction profonde: tant que l'éducation nationale ne sera pas gérée au plus près du terrain et au plus près des besoins des usagers, elle connaîtra des dysfonctionnements structurels, qui tiennent simplement aux délais de transmission.
M. Claude Goasguen. Très juste !
M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Je m'y emploie, comme vous le savez. J'ai largement entamé la déconcentration. Mais il faut aller plus loin. Un service public d'éducation doit d'abord être au service du public. Et pour cela, il ne peut qu'être géré de manière moderne, c'est-à-dire au plus près du terrain. Et je vous le dis en toute franchise: si nous avons fait un progrès en matière de jours d'absence, nous n'avons pas encore résolu le problème.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Goasguen.
M. Claude Goasguen. Monsieur le ministre, vos dispositions sont les nôtres, car nous avons bien compris que c'était au plus près du terrain que pouvaient être réglés ces problèmes. Mais je souhaiterais qu'elles ne soient pas seulement l'objet de discours à l'Assemblée nationale, mais que vous diffusiez des circulaires le plus rapidement possible - car l'émotion est forte - pour rendre la déconcentration effective. La déconcentration est un beau thème de discours mais il faut l'appliquer, même si c'est beaucoup plus difficile, j'en suis conscient, que d'en parler. J'ajoute que les parents d'élèves s'irritent désormais - et je dirais presque que c'est quelque chose de positif - de voir le service public perdre de sa qualité et demandent instamment cette déconcentration.
Enfin, monsieur le ministre, la complexité de son évolution ne permettra pas que notre système éducatif continue encore longtemps à relever de l'obscur domaine réglementaire. Les manifestations des parents d'élèves sont le témoignage d'une époque nouvelle qui s'ouvre. L'éducation nationale est désormais un objet incessant de débats et je souhaiterais à cet égard, monsieur le ministre, qu'un jour ait enfin lieu à l'Assemblée nationale une discussion qui aille au-delà de la lecture fastidieuse du Bulletin officiel. Un vrai débat national s'impose.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. J'ai toujours été ouvert à un tel débat.
En attendant, je poursuis un certain nombre de réformes. Et je n'ai pas l'intention de m'arrêter, y compris en matière de déconcentration. Les décisions doivent être prises au plus près du terrain et l'éducation nationale doit associer l'ensemble du pays à sa politique.
C'est pourquoi, la semaine prochaine, se réunira pour la première fois la commission consultative de la carte scolaire, qui comprendra: le rapporteur spécial de l'Assemblée nationale, celui du Sénat, un représentant des maires, un représentant des conseils régionaux, un représentant des conseils généraux, les parents d'élèves, les syndicats d'enseignants et l'administration pour mettre à plat ce problème. Cette commission sera certainement amenée à discuter du problème des remplacements et des moyens à mettre en oeuvre pour le régler. Elle réfléchira aussi aux raisons pour lesquelles la situation s'est progressivement aggravée.
J'hérite en la matière d'une situation qui s'est extraordinairement complexifiée, de sorte qu'il est devenu très difficile de réformer. Par exemple - et sans vouloir, moi non plus, faire de politique politicienne -, pourquoi a-t-il fallu que le gouvernement précédent décide que, pour prendre sur les listes complémentaires d'instituteurs, l'autorisation de Bercy était nécessaire ? Le résultat, c'est que dans le Languedoc-Roussillon, où il y avait quarante postes vacants, ils n'ont pas été remplacés pendant trois semaines. Il a fallu annuler cette disposition ultracentralisatrice.
On voit dont que les rémanences, les adhérences de la centralisation existent partout. Nous essayons de les faire tomber. Vous me dites que je me contente de discours, mais reconnaissez, monsieur le député, que j'ai fait la déconcentration du mouvement, et que dorénavant, pour être nommé de Roubaix à Tourcoing, on ne passe pas par Paris. C'est déjà un progrès. Je n'ai pas dit que c'était le fin du fin, mais c'est déjà quelque chose.
Il faut donc avancer. Je partage complètement avec vous l'idée qu'un service public moderne doit être géré de manière moderne, c'est-à-dire de manière déconcentrée. C'est ce que nous essayons de faire. Peut-être trouvez-vous que nous ne sommes pas allés assez vite, mais j'aurais tendance à dire que, si mes prédécesseurs avaient fait les trois quarts du chemin, je n'aurais plus qu'un quart de chemin à faire.
DL 11 REP_PUB Ile-de-France O