FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1073  de  M.   Gaymard Hervé ( Rassemblement pour la République - Savoie ) QOSD
Ministère interrogé :  emploi et solidarité
Ministère attributaire :  emploi et solidarité
Question publiée au JO le :  20/03/2000  page :  1691
Réponse publiée au JO le :  22/03/2000  page :  2314
Rubrique :  établissements de santé
Tête d'analyse :  hôpitaux
Analyse :  maintien. Bourg-Saint-Maurice et Moûtiers
Texte de la QUESTION : M. Hervé Gaymard souhaiterait attirer l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur la situation des hôpitaux de Tarentaise. S'agissant de la maternité de Moûtiers, la population, les personnels et les élus souhaitent qu'elle confirme son maintien, à la suite de la proposition qui a été faite localement de créer un deuxième poste de gynécologue, pour améliorer l'offre de soins dans les maternités de Moûtiers et de Bourg-Saint-Maurice. Le conseil d'administration du centre hospitalier de Moûtiers, réuni le 10 mars, a pris cette décision, sachant que les moyens de financement seront dégagés localement. S'agissant des hôpitaux de Bourg-Saint-Maurice et de Moûtiers, il souhaite voir confirmer l'ouverture d'un service de chirurgie sept jours sur sept, douze mois sur douze.
Texte de la REPONSE : Mme la présidente. M. Hervé Gaymard a présenté une question, n° 1073, ainsi rédigée:
«M. Hervé Gaymard souhaiterait attirer l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur la situation des hôpitaux de Tarentaise. S'agissant de la maternité de Moûtiers, la population, les personnels et les élus souhaitent qu'elle confirme son maintien, à la suite de la proposition qui a été faite localement de créer un deuxième poste de gynécologue, pour améliorer l'offre de soins dans les maternités de Moûtiers et de Bourg-Saint-Maurice. Le conseil d'administration du centre hospitalier de Moûtiers, réuni le 10 mars, a pris cette décision, sachant que les moyens de financement seront dégagés localement. S'agissant des hôpitaux de Bourg-Saint-Maurice et de Moûtiers, il souhaite voir confirmer l'ouverture d'un service de chirurgie sept jours sur sept, douze mois sur douze.»
La parole est à M. Hervé Gaymard, pour exposer sa question.
M. Hervé Gaymard. Madame la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, je voudrais attirer votre attention sur l'avenir, dans le cadre du deuxième schéma régional d'organisation des soins, des hôpitaux de Tarentaise, notamment de la maternité de Moûtiers et de la chirurgie à Moûtiers et à Bourg-Saint-Maurice.
D'abord un bref rappel de procédure.
Voici à peu près un an, le 7 mai, j'avais interrogé, lors d'une question orale sans débat, votre prédécesseur, M. Kouchner, sur les conditions d'élaboration du SROS de deuxième génération dans la région Rhône-Alpes. Notre région a en effet connu un très long interrègne entre le départ de M. Pélissier, le premier directeur de l'agence régionale d'hospitalisation, et l'arrivée de M. Ritter. Je craignais déjà, à l'époque, que des décisions mal préparées soient prises en plein été, suscitant incompréhension et colère. Or c'est exactement ce qui s'est produit puisque nous avons appris, à la fin du mois de juillet 1999, que le service de chirurgie de Bourg-Saint-Maurice et plus encore la maternité de Moûtiers étaient menacés.
M. Ritter, directeur de l'agence régionale, a effectué sa première visite à Moûtiers et à Bourg-Saint-Maurice, le 24 février 2000, il y a moins d'un mois, alors que le SROS avait été publié depuis quatre mois. Il a pu se rendre compte de visu que la situation n'était pas tout à fait celle qu'il croyait. Il a visité un hôpital flambant neuf - l'hôpital de Moûtiers a été reconstruit au début de la décennie - avec une maternité performante, un personnel motivé et des équipements modernes.
Il est fondamental d'écouter, de voir, de consulter. C'est pourquoi j'ai regretté, comme beaucoup d'élus, que le nouveau directeur de l'ARH ne vienne sur place qu'après la publication du SROS alors même que celui-ci entraînait des conséquences dramatiques pour la maternité de Moûtiers. Par une périphrase habile, la maternité est transformée en centre périnatal et sa fermeture est programmée pour le 1er janvier 2001, au motif que le nombre d'accouchements a décru et n'est pas suffisant.
Deux observations, l'une géographique, l'autre démographique.
Nous sommes dans un pays de montagne, les distances sont longues et les conditions de circulation difficiles. Le dossier constitué par le comité de défense de la maternité de l'hôpital de Moûtiers, présidé par Mme Suzanne Botta, contient des lettres très précises des services de secours, des ambulanciers, des pompiers qui montrent que la durée du parcours pour se rendre à la maternité l'hiver, et même parfois l'été quand il y a beaucoup de trafic, est souvent supérieure à quarante-cinq minutes. C'est le cas quand on habite Pralognan-la-Vanoise, Champagny-en-Vanoise, Saint-Martin-de-Belleville, les Ménuires, Val-Thorens.
S'agissant de la démographie, nous n'acceptons pas certains des arguments avancés par l'agence régionale. Les communes desservies par l'hôpital de Moûtiers regroupaient 29 982 habitants en 1990 et 31 080 habitants en 1999.
La région est dynamique: si on applique à cette population le taux moyen de la natalité française, le nombre de naissances est d'environ 550 par an. La démographie savoyarde dans cette partie du département est assez jeune du fait de l'industrie touristique importante, et le nombre de naissances est très largement supérieur au seuil de 300 requis pour justifier l'existence d'une maternité.
Certes, la maternité de Moûtiers a connu, depuis quelques années, une baisse régulière du nombre des accouchements, mais cela est dû à l'insuffisance de l'offre de soins. En effet, seuls deux gynécologues obstétriciens exercent pour une zone de 50 000 habitants environ, Moûtiers et Bourg-Saint-Maurice. Cette insuffisance de l'offre de soins a entraîné une fuite des parturientes et donc une diminution du nombre d'accouchements à la maternité de Moûtiers.
Sur les questions hospitalières et sur les questions de santé publique, vous êtes bien placée pour le savoir, madame la secrétaire d'Etat, les deux écueils à éviter sont la technocratie et la démagogie. La technocratie consiste à appliquer des règles uniformes éditées par des bureaux parisiens ou lyonnais, la démagogie consiste à ne pas vouloir regarder les choses en face.
Nous avons essayé localement d'apporter une réponse constructive. Ainsi, le conseil d'administration de l'hôpital de Moûtiers a décidé, le 10 mars dernier, de demander, pour améliorer l'offre de soins, la création d'un deuxième poste de gynécologue-obstétricien, qui serait commun aux deux maternités de Moûtiers et de Bourg-Saint-Maurice. Une partie du financement de ce nouveau poste serait supportée par des ressources locales, notamment les syndicats intercommunaux concernés, pour un montant sans doute compris entre 300 000 et 400 000 francs, le reste provenant de l'Etat, ce qui est envisageable au regard des rallonges budgétaires récemment décidées.
Cette solution est d'autant plus indispensable, madame la secrétaire d'Etat, que si, par malheur, la maternité de Moûtiers fermait dans les mois qui viennent, on ne sait pas où l'on mettrait les parturientes. La maternité d'Albertville, vers laquelle le directeur de l'agence régionale croyait pouvoir diriger les femmes qui accouchent actuellement à Moûtiers, ne peut accueillir ces parturientes si des travaux ne sont pas entrepris.
J'ai donc, madame la secrétaire d'Etat, trois questions précises à vous poser.
Premièrement, pouvez-vous annoncer que vous ne fermerez pas la maternité de Moûtiers le 1er janvier 2001 ?
Deuxièmement, acceptez-vous la proposition de créer un deuxième poste de gynécologue-obstétricien, avec un financement local important, gage de notre volonté de faire avancer les choses ?
Troisièment, confirmez-vous que les services de chirurgie et d'urgence des deux sites de Bourg-Saint-Maurice et de Moûtiers continueront de fonctionner 365 jours par an, 24 heures sur 24, comme c'est le cas actuellement ? Ce bassin d'emploi et de vie compte 50 000 habitants permanents, auxquels il faut ajouter les 350 000 lits touristiques remplis la moitié de l'année dans les stations de sports d'hiver.
Telles sont, madame la secrétaire d'Etat, les questions précises que je voulais vous poser avant de vous transmettre le dossier préparé par Mme Botta, présidente du comité de défense.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le député, j'apprécie les gages de bonne volonté que vous témoignez dans votre intervention mais je me limiterai à une réponse courte pour ne pas perturber l'organisation de la séance.
Il est vrai que le SROS de Rhône-Alpes a été adopté sans que le directeur se soit rendu sur site. Il venait de prendre ses responsabilités ou ne les avait pas encore prises - n'étant pas à l'époque en charge de ce ministère, je ne suis pas très au courant du calendrier. Il fallait que les schémas soient adoptés dans l'ensemble des régions. Cela dit, la concertation est de mise et la discussion doit se dérouler dans la transparence. En tout état de cause, il appartient au directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation de proposer, s'il juge le SROS particulièrement inadapté, des modifications qui lui paraîtraient justifiées, en concertation avec tous les acteurs concernés.
Sur le secteur de la Tarentaise, il a été acté qu'un pôle de proximité renforcé serait créé grâce à la mise en place d'un syndicat interhospitalier associant les établissements publics de santé d'Albertville, Moûtiers et Bourg-Saint-Maurice pour répondre aux besoins de santé de ce bassin de vie et tenir compte des moyens existants et de la capacité de mobilisation des personnels. Les hôpitaux considérés occupent une place importante dans le dispositif de soins de la vallée de la Tarentaise compte tenu des contraintes et des impératifs d'accessibilité qui caractérisent cette zone.
Sans qu'il soit question de remettre en cause l'existence de ces pôles de proximité, des réorganisations sont souhaitables pour garantir la qualité des soins et la sécurité de la pratique professionnelle. Vous connaissez la difficulté des praticiens à s'engager durablement dans un établissement éloigné. Les contraintes d'aménagement de leur pratique sont trop importantes. Ayant choisi de maintenir la liberté d'implantation et de privilégier la concertation, nous n'avons pas d'outil pour contraindre des praticiens à rester dans un établissement s'ils considèrent que les astreintes professionnelles sont incompatibles avec leurs choix professionnels ou leurs choix de vie.
L'activité d'obstétrique sera partagée entre les trois hôpitaux: Albertville, avec une maternité et une unité de néonatalogie, Bourg-Saint-Maurice, avec une maternité, et Moûtiers, avec un centre périnatal. Et si celui-ci comprend bien tous les services de préparation à la naissance et de suivi de la naissance, on n'y pratique pas les accouchements car il est difficile de maintenir les équipes suffisantes d'obstétriciens et d'anesthésistes pour garantir la plus grande sécurité aux patientes.
L'analyse des flux de patients montre que, dans la zone d'attraction de l'hôpital de Moûtiers, la moitié des parturientes choisissent d'être prises en charge à l'hôpital d'Albertville. Cette situation, selon vous, serait due à l'insuffisance de l'offre de soins. Elle est aussi la conséquence de la difficulté d'exercer cette discipline médicale dans un lieu reculé, avec, par moments, une population moins importante.
J'examinerai avec attention le dossier que vous souhaitez me remettre mais sachez que nous avons la volonté de prendre en compte tous les critères et pas simplement un seul.
L'activité de la maternité de Moûtiers n'excède pas 200 accouchements par an. Le schéma régional d'organisation sanitaire a donc prévu le regroupement de l'activité obstétricale sur le site d'Albertville et la création d'un centre périnatal à l'hôpital de Moûtiers. On peut rediscuter mais 200 accouchements, je ne pense pas que soit un niveau d'activité suffisant pour assurer à la fois qualité et sécurité.
La proposition qui est faite de créer un deuxième poste de gynécologue commun aux maternités des établissements de la Haute Tarentaise suppose le maintien de la maternité de Moûtiers et n'apparaît donc pas justifiée.
Si un poste supplémentaire devait être créé, et je n'y suis pas hostile, il serait sûrement préférable de l'affecter au syndicat inter-hospitalier pour renforcer les pôles d'Albertville et de Bourg-Saint-Maurice, qui doivent constituer les points d'ancrage du réseau de périnatalité de la Tarentaise, et pour assurer une meilleure organisation et un allégement des contraintes des professionnels.
En ce qui concerne l'organisation de la chirurgie, plusieurs orientations sont possibles.
Compte tenu des difficultés éprouvées par les établissements de la Haute Tarentaise à pourvoir les postes de médecins de manière stable et durable, l'agence régionale de l'hospitalisation de Rhône-Alpes avait initialement proposé que l'activité de l'hôpital de Bourg-Saint-Maurice soit transférée en basse saison sur le site de Moûtiers, afin de rapprocher l'activité de la population. Il appartient aux trois établissements de la Tarentaise de se déterminer sur les nouvelles organisations suceptibles d'être mises en place dans cette discipline dans le cadre du projet médical commun qu'ils sont tenus d'élaborer.
La mise en oeuvre de la nouvelle organisation doit se faire rapidement car plus les décisions tardent, plus on assiste à une évasion des praticiens et donc à une moindre attractivité des postes pour d'autres. La discussion est toujours possible mais il est temps de passer à une phase décisionnelle pour rendre opérationnelle l'organisation obstétrique sur ces trois sites hospitaliers.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gaymard, pour une intervention très courte.
M. Hervé Gaymard. Inutile de vous dire, madame la secrétaire d'Etat, que votre réponse ne nous satisfait pas.
Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. J'imagine !
M. Hervé Gaymard. Nous avions déjà demandé - c'était, il est vrai, avant que vous n'arriviez à votre poste - qu'une rencontre soit organisée au ministère des affaires sociales avec les élus et les professionnels concernés. Pour l'instant, aucune date n'a été fixée mais puisque vous nous proposez de poursuivre cet échange, je saisis la balle au bond et je vous confirme que nous serions très heureux de vous rencontrer, le comité de défense, les élus, les professionnels et les organisations syndicales, pour faire valoir nos arguments.
Première observation: la zone concernée ne subit ni une baisse démographique ni un ralentissement économique. Elle a un potentiel et les équipes courageuses qui travaillent dans ces hôpitaux savent ce que travailler veut dire car ils connaissent des taux de remplissage très élevés.
Deuxième observation: la configuration géographique impose le maintien des trois sites. Nous souhaitons que la proposition constructive faite par le conseil d'administration soit acceptée par la tutelle que vous représentez pour garder dans cette vallée le service public de santé dont nous avons besoin.
Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Avec les moyens dont nous disposons !
M. Hervé Gaymard. Je vous rappelle, madame la secrétaire d'Etat, que dans ce secteur, qui regroupe 110 000 habitants, la seule offre médicale et hospitalière, c'est le service public de santé. Ce n'est pas le cas partout en France. Cela explique notre attachement et notre lutte pour le maintien de ce service public de santé sur tous les sites, notamment pour la maternité de Moûtiers.
Mme la présidente. Mes chers collègues, je souhaiterais que les intervenants respectent leur temps de parole, car nous prenons du retard.
RPR 11 REP_PUB Rhône-Alpes O