Question N° :
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Question publiée au JO le :
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Réponse publiée au JO le :
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Analyse : |
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Texte de la REPONSE : |
«M. Roland Blum attire l'attention de M. le ministre délégué chargé des affaires européennes sur les conséquences catastrophiques pour les importateurs européens, les producteurs communautaires et ACP (Antilles, Caraïbes, Pacifique), de la proposition actuelle de la Commission européenne relative à la réforme de l'organisation du marché commun de la banane. En fondant sa proposition sur une compatibilité totale avec le GATT, la commision contrevient aux principes constitutifs de l'OMCB mise en place en 1993. Ce faisant, elle transfère aux multinationales américaines la quasi-totalité de l'approvisionnement européen en bananes au détriment des importateurs européens et renforce le poids prédominant des productions d'Amérique centrale et latine au détriment des producteurs ACP, le tout se traduisant par un affaiblissement des productions communautaires qui seront marginalisées et dont le soutien budgétaire sera alourdi. Il souhaite connaître la position que le Gouvernement entend adopter sur ce dossier au sein de la commission européenne.» La parole est à M. Roland Blum, pour exposer sa question. M. Roland Blum. Monsieur le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ma question, qui s'adresse à M. le ministre chargé des affaires européennes, concerne la proposition de réforme engagée par la Commission européenne sur l'organisation du marché commun de la banane. Cette proposition, si elle a l'avantage d'être totalement compatible avec le GATT, contrevient aux principes constitutifs de l'OMCB puisqu'elle transfère aux sociétés multinationales américaines la quasi-totalité de l'approvisionnement européen en bananes au détriment des importateurs européens et renforce le poids prédominant des productions d'Amérique centrale et latine au détriment des producteurs ACP, le tout se traduisant par un affaiblissement des productions communautaires qui seront marginalisées et dont le soutien budgétaire sera alourdi. Il est important d'insister sur le fait que la réforme envisagée ne doit pas contrevenir aux principes fondamentaux qui ont présidé à la mise en place de ce marché et qui sont les suivants: assurer l'écoulement en Europe à des prix suffisamment rémunérateurs des productions communautaires, ce qui s'est traduit par la mise en place d'un système contingentaire qu'il faudra maintenir au moins durant une période transitoire de dix ans; satisfaire les engagements pris au sein de la convention de Lomé vis-à-vis des pays ACP traditionnels et, à cet égard, il faudra obtenir une dérogation à l'article 13 du GATT, de manière à restituer le contingent ACP qui constitue la seule protection véritablement efficace; redistribuer des licences d'importation de bananes d'Amérique centrale aux importateurs européens qui, pour des raisons historiques ou réglementaires, n'étaient pas en mesure, avant juillet 1993, d'importer en provenance de ces pays. A un moment où se sont accumulés les contentieux entre l'Union européenne et les Etats-unis, il ne s'agit pas de faire seulement du juridisme mais de réaffirmer clairement les choix politiques en proposant à l'OMC les dérogations nécessaires quant à l'utilisation des références historiques après 1993, la définition actuelle de l'importateur effectif et la reconstitution du contingent ACP. A défaut, les importateurs européens et les producteurs communautaires et ACP se trouveront dans une situation catastrophique. Je souhaiterais donc connaître la position du Gouvernement sur les principes de réforme ci-dessus évoqués et sa volonté de les défendre au sein de la Commission européenne de l'OMC. Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer. M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer. Monsieur le député, vous connaissez la cascade de contentieux qui opposent les pays de l'Union européenne aux Etats-Unis et à certains pays producteurs d'Amérique du Sud et d'Amérique centrale. Ces contentieux sont portés devant l'organisation mondiale du commerce et ont donné lieu à un certain nombre de décisions. L'Union européenne doit s'efforcer de se mettre en conformité avec ces décisions mais cela ne doit pas se faire au prix d'une remise en cause de l'organisation commune du marché qui a été instituée en 1992, et qui vise à protéger nos producteurs communautaires et les producteurs des pays ACP. Derrière ces contentieux, en effet, se profilent les grandes compagnies bananières dont les méthodes économiques ne respectent ni les droits sociaux ni l'environnement. C'est à une véritable exploitation des travailleurs de ces pays mais aussi à une exploitation des sols et des milieux naturels qu'elles se livrent pour produire des bananes qui sont évidemment moins chères que celles des producteurs communautaires, et en particulier des producteurs antillais. La France a eu à plusieurs reprises l'occasion de rappeler sa position, tant par la voix du Gouvernement que par celle de M. le président de la République, que j'accompagnais aux Antilles. Je l'ai expliquée moi-même il y a quelques jours au commissaire européen chargé des questions relatives à l'agriculture, M. Fischler. Nous tenons à maintenir, d'une part, un système contingentaire, c'est-à-dire un système qui permet d'éviter que le marché soit inondé par des productions, ce qui contribuerait à la baisse des cours, ce que nous avons d'ailleurs vu en 1999 puisque les bananes étaient vendues sur les ports européens à des prix défiant toute concurrence, ne permettant pas de rémunérer les producteurs, et, d'autre part, un régime d'aides compensatoires. Le régime d'aides compensatoires permet de prendre en compte la production locale et d'offrir des garanties sociales aux producteurs locaux. Quand on sait qu'aux Antilles, la banane fait vivre directement ou indirectement 30 000 personnes, on se rend compte que c'est un enjeu décisif en terme social, mais aussi par rapport au paysage et à l'environnement. J'ai ainsi expliqué à M. Fischler que c'était le modèle social et environnemental européen qui était en cause à travers ces discussions. La France, je vous rassure, ne cédera pas sur ce point, et nous ne passerons pas à un système uniquement tarifaire dont on voit bien les conséquences, qui seraient un écroulement des productions locales. Vous avez évoqué la possibilité de passer éventuellement à un système tarifaire dans dix ans. Cela ne peut pas être automatique. Il faudra procéder à une évaluation pour voir s'il y a lieu de passer d'un système contingentaire à un système tarifaire. Nous souhaitons aussi une réforme de l'OMC pour que le fait déclencheur de l'aide compensatoire, qui s'élève aujourd'hui à 1,92 francs par kilo de bananes, ne soit plus la commercialisation mais les expéditions. Il est nécessaire d'engager une réforme du système de paiement parce que l'aide compensatoire est versée en fin de campagne, d'où les problèmes de trésorerie pour nos producteurs. Nous souhaitons un système plus efficace d'aide en cas de catastrophes naturelles, dont sont souvent victimes les bananeraies des Antilles. Nous souhaitons, enfin, une régionalisation de l'aide. J'en ai déjà discuté avec les producteurs espagnols. Les Canaries produisent beaucoup de bananes mais elles sont consommées à 90 % sur le marché espagnol, donc sur un marché en quelque sorte captif, tandis que les bananes antillaises sont rendues sur l'ensemble du marché européen. On ne peut donc pas avoir un système d'aide unique pour les producteurs communautaires, qu'ils soient portugais, grecs, espagnols ou français, comme c'est le cas actuellement. En ce qui concerne les licences dans le cadre des contingents, le Gouvernement entend privilégier la méthode des références historiques pour tenir compte des antériorités, afin de ne pas déstabiliser le marché des producteurs actuels. Voilà, monsieur le député, pour faire écho à vos préoccupations. Je vous rappelle que nous avons eu ici, au mois de juin 1999, un débat sur une question posée par un député des Antilles. La détermination du Gouvernement français, du Président de la République - si je peux m'exprimer en son nom, mais il l'a dit très ouvertement aux Antilles - et de la représentation nationale me paraît tout entière acquise à la défense de nos producteurs, parce qu'il est indispensable de ne pas céder aux vertiges de la libre concurrence dans ce domaine. Mme la présidente. La parole est à M. Roland Blum. M. Roland Blum. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre réponse très complète. Néanmoins, pouvez-vous préciser les engagements pris au sein de la convention de Lomé vis-à-vis des ACP traditionnels ? Par ailleurs, le Gouvernement est-il décidé à se battre pour obtenir une dérogation à l'article 13 du GATT de manière à reconstituer le contingent ACP qui est la seule protection véritablement efficace ? Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat. M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer. Effectivement, le contingent ACP, qui doit faire 875 000 tonnes, est un enjeu important. On se rend bien compte que la stratégie des grandes compagnies bananières américaines est de s'implanter, notamment en Côte-d'Ivoire, pour essayer de capter les productions nationales et les intégrer dans leur propre marché en récupérant les contingents. Nous devons donc protéger les producteurs des pays ACP et être vigilants face à cette tentative d'instaurer un oligopole sur le marché de la banane menée par trois grandes compagnies internationales. |