FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1086  de  M.   Suchod Michel ( Radical, Citoyen et Vert - Dordogne ) QOSD
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  08/05/2000  page :  2765
Réponse publiée au JO le :  10/05/2000  page :  3862
Rubrique :  TVA
Tête d'analyse :  taux
Analyse :  hôtellerie et restauration
Texte de la QUESTION : M. Michel Suchod attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) appliqué aux produits alimentaires vendus par les restaurants, les cafés-restaurants et les brasseries. Etant considérés comme des prestataires de service, ces établissments achètent des produits alimentaires à un taux de TVA de 5,5 % et les revendent, une fois transformés, à un taux de TVA de 19,6 %. Or, les produits alimentaires vendus par les établissements de restauration rapide sont assujettis à un taux de TVA de 5,5 %. L'écart entre ces deux taux est donc à l'origine d'une distorsion de concurrence très défavorable à la restauration sur place. Le maintien d'un double taux de TVA apparaît d'autant moins justifié qu'il se fonde sur le critère de la prestation de service et qu'il pénalise ainsi l'emploi dans un secteur qui compte un nombre important de salariés. D'autre part, sur le plan touristique, ce taux de TVA élevé a un impact très négatif en termes de compétitivité, puisque les taux de TVA italien et espagnol sont fixés respectivement à 10 et à 7 %. Il lui demande quelles mesures il entend prendre pour mettre un terme à cette distorsion de concurrence.
Texte de la REPONSE : Mme la présidente. M. Michel Suchod a présenté une question, n° 1086, ainsi rédigée:
«M. Michel Suchod attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) appliqué aux produits alimentaires vendus par les restaurants, les cafés-restaurants et les brasseries. Etant considérés comme des prestataires de service, ces établissements achètent des produits alimentaires à un taux de TVA de 5,5 % et les revendent, une fois transformés, à un taux de TVA de 19,6 %. Or, les produits alimentaires vendus par les établissements de restauration rapide sont assujettis à un taux de TVA de 5,5 %. L'écart entre ces deux taux est donc à l'origine d'une distorsion de concurrence très défavorable à la restauration sur place. Le maintien d'un double taux de TVA apparaît d'autant moins justifié qu'il se fonde sur le critère de la prestation de service et qu'il pénalise ainsi l'emploi dans un secteur qui compte un nombre important de salariés. D'autre part, sur le plan touristique, ce taux de TVA élevé a un impact très négatif en termes de compétitivité, puisque les taux de TVA italien et espagnol sont fixés respectivement à 10 et à 7 %. Il lui demande quelles mesures il entend prendre pour mettre un terme à cette distorsion de concurrence.»
La parole est à M. Michel Suchod, pour exposer sa question.
M. Michel Suchod. Madame la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, ma question porte sur le niveau de la taxe à la valeur ajoutée appliquée aux produits alimentaires vendus par les restaurants, les cafés-restaurants et les brasseries.
Ces établissements, considérés comme des prestataires de services, achètent les produits alimentaires à un taux de TVA de 5,5 % et les revendent, une fois transformés, à un taux de 19,6 %. Or les produits alimentaires vendus par les établissements de restauration rapide sont, eux, assujettis à un taux de TVA de 5,5 %. Cet écart entre les deux taux est à l'origine de très graves distorsions de concurrence, très défavorables à la restauration sur place.
Au moment où l'on parle du rôle que joue la «mal-bouffe» dans notre pays, il est clair que cette distorsion de TVA est très pénalisante pour la restauration de qualité, la restauration traditionnelle.
Le maintien d'un double taux de TVA apparaît d'autant moins justifié qu'il se fonde sur le critère de la prestation de service et qu'il pénalise ainsi l'emploi dans un secteur qui compte un grand nombre de salariés, évalué à 330 000.
J'ajoute, et c'est le parlementaire de la Dordogne qui parle, que, sur le plan touristique, l'effet est également extrêmement négatif en termes de compétitivité parce que les taux appliqués pour les mêmes produits en Italie et en Espagne sont respectivement de 10 % et de 7 %, nettement inférieurs donc, et favorisent le tourisme dans ces pays.
Il paraît donc indispensable de soutenir notre dynamisme national et international par un soutien à cette restauration sur place, et nous souhaiterions qu'un même taux de TVA soit appliqué, et plutôt le taux le plus bas, à ce type de restauration.
M. Pierre Forgues et M. François Goulard. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Monsieur le député, M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, est actuellement en négociation avec les différentes organisations pour parler d'épargne salariale et m'a demandé de bien vouloir l'excuser et de vous donner ses arguments sur le fond, ainsi qu'à vos collègues qui poseront d'autres questions.
Il faut d'abord rappeler que les règles de TVA applicables au secteur de la restauration sont fondées sur la distinction entre les ventes à emporter, qui sont considérées comme des livraisons de produits alimentaires, auxquelles s'applique le taux réduit de 5,5 %, et les ventes à consommer sur place, qui représentent une prestation de restauration, et sont donc soumises au taux normal de 19,6 %. La restauration rapide est également soumise au taux de 19,6 % pour les ventes à consommer sur place.
Par ailleurs, ces règles sont conformes aux dispositions de la sixième directive européenne sur la TVA et notamment à ses articles 5 & 1 et 6 & 1 - que tout le monde connaît presque par coeur - qui prévoient qu'une opération est, soit une livraison de biens, soit une prestation de services, mais ne peut pas être qualifiée d'opération mixte, et à son annexe H qui ne permet pas à la France d'appliquer un taux de TVA autre que le taux normal à la restauration traditionnelle.
La sixième directive n'a, sur ce point, pas été modifiée par la directive relative aux services à forte intensité de main-d'oeuvre dès lors que la restauration ne figure pas sur la fameuse liste de ces services arrêtée le 8 octobre 1999 alors que la France avait proposé qu'elle y figure.
Les établissements de restauration rapide sont, quelle que soit leur spécialité - hamburger, pizza, viennoiserie, sandwich... -, soumis à ces règles. Ainsi, lorsqu'ils réalisent des ventes à consommer sur place et des ventes à emporter, ils sont obligés de ventiler ces opérations pour les soumettre au taux de TVA qui leur est respectivement applicable et être en mesure d'apporter la preuve de la réalité du montant des ventes à emporter et de justifier de façon probante la ventilation ainsi opérée.
Ces règles claires, mais difficiles à appliquer, doivent être respectées par les différents professionnels concernés - et, de ce point de vue, des contrôles nombreux ont permis de remettre quelques pendules à l'heure -, afin de ne pas créer de distorsions de concurrence entre les différentes formes de restauration. Nous y veillerons, et le ministre lui-même s'est engagé à ce que des enquêtes précises et fines soient menées dans ce sens.
Enfin, le Gouvernement est particulièrement attentif à la situation de la restauration française qui concourt à faire de notre pays la première destination touristique: le chiffre d'affaires du secteur de la restauration s'y est accru de plus de 7 % en 1999. A cet égard, vos arguments concernant les pays européens paraissent extrêmement importants.
Le coût d'une telle mesure n'est pas négligeable: il se monte à 25 milliards de francs. Pour qu'elle soit possible, comme nous le demandons tous, il faudrait remettre en cause d'autres dépenses.
Une question a peut-être compliqué ces débats: certains professionnels traditionnels font de la vente à emporter et souhaitent bénéficier d'une TVA particulière pour les produits régionaux. Ainsi, les charcutiers traiteurs parviennent à faire de la restauration rapide à emporter de qualité et souhaiteraient encore asseoir leurs activités avant que la TVA «ne s'écroule» pour tous.
D'autre part, il faudrait parler des marges de la restauration. Je ne suis pas convaincue, en effet, que le but soit de faire baisser les prix. La restauration française a au contraire besoin de reconstituer ses marges pour pouvoir rester performante.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Suchod.
M. Michel Suchod. Madame la secrétaire d'Etat, je partage votre analyse sur la nécessité de reconstituer les marges de la restauration. Toutefois, les contrôles que vous évoquiez sont insuffisants: certains professionnels de la «malbouffe» détournent en effet les règles et qualifient de vente à emporter des plats qui, en réalité, sont le plus souvent consommés sur place.
Nous savons que la baisse substantielle de la TVA sur les travaux effectués à domicile, que nous avons obtenue avec l'aide du Gouvernement, a joué un rôle dans la relance de notre économie. Il est vrai que la mesure concernant la restauration coûterait 25 milliards, mais elle pourrait être modulée.
Je remercie, en tout cas, Mme la secrétaire d'Etat et M. le ministre des finances de continuer de demander à Bruxelles la révision de la liste des services à forte intensité de main-d'oeuvre afin que la TVA sur la restauration puisse enfin être abaissée.
RCV 11 REP_PUB Aquitaine O