Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Claude Bois attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le délai à l'expiration duquel les véhicules laissés en fourrière sont livrés à la destruction. En effet, en application des dispositions des quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 25-3 du code de la route, est réputé abandonné et livré à la destruction tout véhicule laissé en fourrière à l'expiration d'un délai de dix jours à compter de la mise en demeure faite au propriétaire d'avoir à le retirer et qu'un expert, désigné par l'administration aura estimé d'une valeur marchande inférieure à un montant fixé par arrêté interministériel (3 000 francs) et déclaré hors d'état de circuler dans des conditions normales de sécurité. La destruction du bien d'autrui dans un laps de temps aussi réduit qui ne laisse guère de possibilités au propriétaire de faire valoir ses droits, de s'expliquer et de se justifier, peut être considérée abusive dans un Etat de droit, et en ce cas précis. Il lui demande en conséquence s'il envisage d'augmenter le délai de dix jours fixé par l'article L. 25-3 du code de la route de manière à garantir tous les droits des propriétaires de véhicules transportés à la fourrière et à leur permettre d'engager toutes actions qu'ils estimeraient nécessaires pour les faire valoir en tant que de besoin.
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Texte de la REPONSE :
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Le ministre de l'intérieur partage les préoccupations exprimées par l'honorable parlementaire quant à la protection des droits des propriétaires de véhicules mis en fourrière ; l'une des principales orientations de la réforme de la réglementation des fourrières opérés par le décret n° 96-476 du 23 mai 1996 fait précisément bénéficier les intéressés de meilleures garanties, dans le cadre de la loi n° 70-1301 du 31 décembre 1970. C'est le législateur qui a fixé de manière différenciée les délais à l'expiration desquels les véhicules laissés en fourrière sont réputés abandonnés par leurs propriétaires : de quarante-cinq jours en règle générale, ce délai, par application de l'article L. 25-3 du code de la route, est réduit à dix jours en ce qui concerne les véhicules mis en fourrière qu'un expert en automobile a estimés d'une valeur marchande inférieure à 5 000 francs et qu'il a déclarés hors d'état de circuler dans des conditions normales de sécurité. Ce choix est le résultat d'un compromis entre la sauvegarde des intérêts du propriétaire et de l'intérêt public, compte tenu de l'état du véhicule. D'après les informations qui parviennent au ministère de l'intérieur, les véhicules mis en fourrière et classés comme véhicules à détruire sont des véhicules usagés que leurs propriétaires préfèrent abandonner sur la voie publique plutôt que de les remettre eux-mêmes à une entreprise de démolition : de tels véhicules sont donc enlevés en fourrière pour stationnement abusif. Certains de ces propriétaires, ultérieurement, manifestent clairement leur volonté d'abandon. En outre, il arrive assez fréquemment que les propriétaires de tels véhicules se révèlent inconnus, introuvables ou insolvables. Or, leur remise à une entreprise de démolition, même lorsqu'elle est effectuée à titre onéreux, ne permet pas toujours de couvrir l'intégralité des frais de fourrière engagés : la différence est alors supportée financièrement par l'autorité dont relève la fourrière. Pour limiter autant que possible le montant des frais de fourrière, et donc celui de la garantie financière apportée par la collectivité, pour éviter aussi l'encombrement excessif des installations de fourrière, il est préférable que la garde en fourrière de ces véhicules dure le moins longtemps possible. Il n'est donc pas envisagé actuellement d'augmenter le délai de dix jours précité. Il existe, en revanche, une forte volonté de réduire les risques d'éventuels abus que peut comporter la décision de classer un véhicule mis en fourrière comme véhicule à détruire à brève échéance. La décision de classement du véhicule est prise par l'autorité dont relève la fourrière (maire, président d'organisme de coopération intercommunale, président du conseil général, président du conseil exécutif de Corse, préfet du département), après avis d'un expert en automobile. Il faut ici faire observer que le nouvel article R. 290-1 du code de la route offre aux propriétaires des véhicules mis en fourrière la possibilité d'obtenir la restitution de leur véhicule, sans classement de celui-ci, lorsqu'ils le réclament dans le délai de trois jours suivant la mise en fourrière. En application de la législation et de la réglementation en vigueur, les propriétaires des véhicules mis en fourrière disposent de garanties non négligeables pour la protection de leur bien dans des délais prescrits : ils sont en particulier informés clairement de leurs droits, de leurs obligations et de leurs possibilités de recours, avant que leurs véhicules ne soient effectivement livrés à la destruction. Tout d'abord, la mise en fourrière doit être notifiée au propriétaire du véhicule et, le cas échéant, au créancier gagiste, dans le délai maximum de cinq jours ouvrables suivant cette mesure, par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception. Ce courrier est envoyé à l'adresse relevée sur le procès-verbal de l'infraction si le propriétaire ou le conducteur était présent au moment de l'enlèvement en fourrière, ou sinon à l'adresse indiquée au fichier des immatriculations. Cette notification doit comporter notamment les mentions obligatoires suivantes : 1/ Elle met en demeure ce propriétaire de retirer son véhicule de fourrière et lui précise le délai de ce retrait. 2/ Elle lui indique l'autorité qui a prescrit la mise en fourrière, la fourrière désignée et l'autorité dont relève cette fourrière. 3/ Elle précise quelle autorité est qualifiée pour donner mainlevée de la mise en fourrière. 4/ Elle l'informe de la décision de classement de son véhicule. 5/ Elle l'avertit que son absence de réponse dans les délais impartis vaudra abandon de son véhicule et qu'il sera, le cas échéant, livré à la destruction. 6/ Elle énonce les voies de recours. Il appartient à l'autorité dont relève la fourrière de constater que le délai au terme duquel un véhicule peut être réputé comme abandonné en fourrière est écoulé ; ce délai est calculé à partir de la notification adressée au propriétaire : il commence à courir un jour franc après la date de notification ; si le propriétaire ne peut être identifié, ce délai court du jour où cette impossibilité a été constatée. C'est également l'autorité dont relève la fourrière qui délivre au responsable de l'entreprise chargée de la destruction du véhicule un bon d'enlèvement de ce véhicule ; de plus, aucun véhicule à détruire ne peut être remis à une entreprise de démolition sans que la mainlevée de mise en fourrière, prononcée par un officier de police judiciaire, ne l'ait été à cette fin. Dûment informés, les propriétaires intéressés sont mieux en mesure d'exercer d'éventuels recours : ils ont ainsi la faculté de constester auprès du procureur de la République du lieu de l'infraction la décision de mise en fourrière ; ce magistrat confirme cette décision ou ordonne sa mainlevée dans un délai maximum de cinq jours ouvrables. En cas de désaccord sur l'état de ce véhicule ou sur la décision de classement, le propriétaire de ce véhicule peut aussi faire procéder à une contre-expertise. Bien entendu, ces possibilités ne font pas obstacle à l'exercice d'éventuels recours contentieux devant les juridictions compétentes. Enfin, dans le cadre de la réforme de la réglementation des fourrières, des instructions ont été données aux préfets de département pour qu'ils veillent régulièrement au respect des procédures, à leur aboutissement et aux délais.
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