FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1122  de  M.   Desallangre Jacques ( Radical, Citoyen et Vert - Aisne ) QG
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  11/02/1999  page :  1157
Réponse publiée au JO le :  11/02/1999  page :  1157
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Irak
Analyse :  embargo. attitude de la France
DEBAT : M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
M. Jacques Desallangre. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
La mission parlementaire en Irak a mesuré les conséquences dramatiques des frappes anglo-américaines et d'un embargo impitoyable.
La situation sanitaire et humanitaire est désastreuse, les rations alimentaires financées par l'Irak en dehors de toute aide humanitaire sont insuffisantes. La morbidité et la mortalité, particulièrement infantiles, ont été multipliées par huit.
Le potentiel économique et industriel détruit ne peut être reconstruit car l'interprétation hypocrite et abusive de la notion de double emploi empêche les importations nécessaires.
La misère intellectuelle de ce pays hypothèque sérieusement ses chances d'une reconstruction rapide. L'illettrisme est passé de 19 % à 40 %; l'environnement est gravement menacé; la société et l'économie irakienne sont totalement déstructurées.
Le peuple irakien est victime, car le pouvoir de ses dirigeants n'est pas affecté par l'intransigeance américaine. Au contraire, celle-ci renforce la cohésion autour d'eux mais elle peut, à terme, favoriser les thèses les plus radicales.
La politique américaine a conduit à une impasse. Après avoir utilisé la force, en infraction avec le droit international, les Etats-Unis cherchent encore aujourd'hui à renverser le régime en place, en aidant les opposants, y compris les plus extrémistes.
Monsieur le ministre, n'est-il pas souhaitable que la France marque son indépendance et le passage à une nouvelle politique de sortie de crise en jugeant sévèrement les frappes et l'ingérence américaine, en proposant le rétablissement des relations diplomatiques avec l'Irak, en décidant la levée de l'embargo, en réclamant que le droit international soit strictement respecté de part et d'autre, car la résolution du conflit ne pourra naître de l'humiliation continue ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. Monsieur de député, la France est particulièrement consciente de la situation dans toutes ses dimensions, tant humaine qu'humanitaire, qui touche le peuple irakien. Elle est aussi pleinement consciente des implications de cette affaire sur le plan de la sécurité régionale.
C'est pourquoi elle a présenté au mois de janvier au Conseil de sécurité un ensemble d'idées qui permettraient à la fois d'aller vraiment de l'avant en levant l'embargo, lequel a aujourd'hui démontré son inutilité et sa cruauté, et de mettre en place simultanément - on ne peut pas faire ceci sans faire cela - un système de contrôle de tout éventuel réarmement entraînant une menace pour les pays de la région, ainsi qu'un système de contrôle sur les revenus financiers qui découleraient de la levée de l'embargo.
Il s'agit d'un ensemble d'idées fortes, cohérentes, à partir desquelles la discussion est maintenant entamée à New York depuis quelques semaines. Trois comités d'évaluation ont été créés par le Conseil de sécurité pour déterminer exactement où en est l'affaire irakienne.
Depuis lors, il n'y a pas eu d'autre idée, d'autre proposition, ni d'autre plan que cette conception française de la sortie de la crise.
Cela dit, je souligne que c'est le Conseil de sécurité qui a mis en place les résolutions formant le cadre du traitement de cette affaire en 1991 et que seul celui-ci peut faire évoluer ce cadre ou même le changer. C'est donc au sein du Conseil qu'il faut agir, et c'est ce sur quoi nous nous concentrons. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)
RCV 11 REP_PUB Picardie O