FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 11488  de  Mme   Aubert Marie-Hélène ( Radical, Citoyen et Vert - Eure-et-Loir ) QE
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  intérieur
Question publiée au JO le :  16/03/1998  page :  1449
Réponse publiée au JO le :  04/05/1998  page :  2543
Rubrique :  drogue
Tête d'analyse :  cannabis
Analyse :  provocation aux délits. répression
Texte de la QUESTION : Mme Marie-Hélène Aubert souhaiterait connaître la position de M. le ministre de l'intérieur sur l'article L. 630 du code de la santé publique qui prohibe la présentation sous un jour favorable des délits liés au cannabis, et la provocation à commettre ces infractions. Nos commissariats regorgent de rapports établissant l'interpellation de dizaines de citoyens ayant arboré, distribué ou apposé un vêtement, un tract ou un autocollant représentant une feuille de chanvre, ou mentionnant seulement le mot « cannabis ». Une telle pratique trahit la répression systématique de toute tentative de désapprobation citoyenne de la loi du 31 décembre 1970. Cette lecture de l'article L. 630 ne semble pas conforme à l'attachement de la France à la liberté d'expression et se trouve au surplus illicite au regard du principe d'interprétation stricte de la loi pénale. Elle souhaiterait donc qu'il lui confirme que l'emploi du mot « cannabis » n'est pas interdit, fût-ce sur un vêtement ; que la représentation de la feuille de chanvre n'est pas un délit, dès lors qu'elle ne s'accompagne d'aucun message appelant explicitement à user, produire, vendre, acheter ou importer du cannabis ; que l'article L. 630 n'a pas pour objet de prohiber la critique de la législation applicable aux stupéfiants, et que cette critique, dès lors qu'elle ne se traduit pas par un prosélytisme actif, reste à la portée de tout citoyen.
Texte de la REPONSE : Le code de la santé publique prévoit dans son article L. 630 que « le fait de provoquer au délit prévu par l'article L. 628 (usage de stupéfiants) du présent code, ou à l'une des infractions prévues par les articles 222-34 à 222-39 du code pénal (trafic de stupéfiants), alors même que cette provocation n'a pas été suivie d'effet, ou de présenter ces infractions sous un jour favorable, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 F d'amende. Est puni des mêmes peines le fait de provoquer, même lorsque cette provocation n'est pas suivie d'effet, à l'usage de substances présentées comme ayant les effets de substances ou plantes classées comme stupéfiants ». Le nombre de personnes à l'encontre desquelles a été établie en 1997 une procédure d'incitation à l'usage de stupéfiants au titre de l'article L. 630 du code de la santé publique représente moins de 1 % des quelque 90 000 interpellations effectuées dans la même année sur le territoire national pour infractions à la législation sur les stupéfiants. L'interprétation de l'alinéa 1 de l'article L. 630 visant la provocation aux délits des articles L. 628 du code de la santé publique et 222-34 à 222-39 du code pénal relève des juridictions pénales françaises qui, jusqu'à présent, n'ont jamais poursuivi une personne pour représentation d'un produit stupéfiant sans incitation notoire (exemple : arrêt de la 4e chambre de la cour d'appel de Paris du 7 mai 1979 à propos du parfum Opium de la société Lanvin Charles). En revanche, dès 1974, en confirmant l'application de l'article L. 630 à un vendeur de cartes postales représentant une seringue avec la mention en gros caractères «LSD J'aime », la Cour de cassation a insisté sur la prise en compte du caractère incitatif flagrant des faits reprochés. L'absence de poursuites engagées devant les tribunaux en pareil cas apporte, par ailleurs, une réponse à l'interrogation manifestée quant à une application de l'article L. 630 à ceux qui désapprouvent la législation française actuelle en matière de consommation de stupéfiants, sans toutefois faire preuve de prosélytisme à cet égard.
RCV 11 REP_PUB Centre O