Question N° :
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Réponse publiée au JO le :
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DEBAT : |
M. Yves Cochet. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur. Le 15 janvier dernier, un jeune, Stéphane Coulibaly, a été tué par un autre jeune en gare de Bouffémont, dans le Val-d'Oise. Ce crime pourrait être considéré comme une manifestation supplémentaire de la violence urbaine et de l'insécurité. Mais il a suscité deux réactions: le Gouvernement, sous l'égide du Premier ministre, a réuni un conseil de sécurité intérieure, qui a pris les mesures que nous connaissons; de leur côté, et pour la première fois, des jeunes du Val-d'Oise et du nord des quartiers de Paris se sont réunis et, après avoir discuté et beaucoup réfléchi pendant plus d'un mois, ont publié la semaine dernière un manifeste. M. Bartolone, ministre délégué à la ville, ici présent, a participé avec eux, également la semaine dernière, à une discussion sur une radio. Je considère, monsieur le ministre de l'intérieur, que ce manifeste est l'un des textes les plus lucides et les plus républicains touchant au domaine de l'insécurité et de la vie en commun. Je citerai quelques-uns des dix points de ce manifeste pour bien montrer que les questions sont posées fortement, dans un langage très direct. Premier point: «Ca ne peut plus durer comme ça !» («C'est vrai !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Quatrième point: «Rendre la justice, ce devait être merveilleux !» Cinquième point: «Pas de pouvoir aux crapules !» Sixième point: «Les «mecs» qui portent des armes ne sont pas des hommes.» Autant je peux penser, et nous en serons tous d'accord, qu'il était de la responsabilité du Gouvernement de proposer, d'en haut, des mesures contre l'insécurité urbaine, autant je suis persuadé que nous sommes en présence, avec le manifeste, d'un mouvement qui vient «d'en bas». Il faut absolument que nous tous - car il s'adresse à nous tous, parlementaires, élus, Gouvernement - y répondions positivement. Ma question sera double, monsieur le ministre: comment analysez-vous ce manifeste et ce mouvement ? Comment comptez-vous répondre concrètement aux demandes d'états généraux demandés par les jeunes dans tous les départements ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste.) M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur. M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur Cochet, j'ai lu avec attention le texte de l'appel que vous avez cité. Je considère qu'il rejoint tout à fait l'idée qui a été proclamée ici même à de nombreuses reprises, et selon laquelle la sûreté est un droit pour tous et l'insécurité une forme particulièrement blessante d'injustice et d'inégalité sociale. Ce texte est réellement parfait. Je citerai à mon tour quelques phrases: «Circuler sans avoir peur, le droit d'étudier sans crainte: on n'a rien de tout ça ! La première des injustices, c'est ça !»; «L'insécurité, on est les premiers à la subir»,... M. Laurent Dominati. Bravo ! M. le ministre de l'intérieur. ... et ainsi de suite. Je pense que cette prise de conscience est très positive. M. François Vannson. Des actes ! M. le ministre de l'intérieur. Elle rejoint, et c'est peut-être un point sur lequel je me distinguerai un peu de vous, la prise de conscience et l'organisation de nombreux jeunes sur l'ensemble du territoire national sous la forme d'associations, qu'il faut encourager. Pour ma part, je donne des directives aux préfets... M. Thierry Mariani. Encore ? M. le ministre de l'intérieur. ... pour que, s'ils sont saisis de telles demandes, ils n'hésitent pas à y accéder et à organiser des tables rondes ou des états généraux. (Exclamations sur les bancs groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) M. Charles Cova. Des aides plutôt que du blabla ! M. le ministre de l'intérieur. Mesdames, messieurs les députés, j'ai donné, dès le mois de janvier, des directives pour que soient créées dans chaque département des commissions départementales d'accès à la citoyenneté (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste) parce que ces jeunes se trouvent effectivement frappés par des inégalités, des handicaps spécifiques, des discriminations qui ne sont malheureusement que trop réelles. Il est important que les préfets prennent eux-mêmes la tête d'une réflexion et d'une action pour que le droit de ces jeunes à l'embauche, à l'égalité devant le logement, les loisirs, leur soit mieux reconnu. Cela ne passe pas seulement par des états généraux, mais aussi par des politiques visant, par exemple, à faire en sorte que le recrutement soit à l'image de la population, dans la police comme dans d'autres institutions publiques et dans les entreprises, publiques ou privées. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.) Nous devons prendre ce problème à bras-le-corps, d'autant qu'il existe deux millions de jeunes dont l'un des parents au moins est étranger, et mener une politique active, dont tous les ministères sont d'ailleurs partie prenante. Mme la garde des sceaux a en effet envoyé une circulaire aux procureurs («Ah !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)... M. Yves Nicolin. Formidable ! M. le ministre de l'intérieur. ... et Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité vient de signer un accord-cadre avec l'ANPE et le FAS. Nous allons donc aller au-devant de ces jeunes dont vous avez justement parlé, monsieur le député, et qui se sont exprimés avec une grande clarté dans ce très beau texte qui mérite d'être connu. Pour ma part, je n'ai jamais confondu ces jeunes avec quelques délinquants multirécidivistes et rien ne m'horripile davantage que de voir assimiler ces derniers aux jeunes dans leur ensemble. Cela n'a rien à voir. Il est temps de le marquer, d'aller à la rencontre de leurs préoccupations, surtout quand elles sont aussi légitimes que celles exprimées ici. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.) |