FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 12508  de  M.   Mamère Noël ( Radical, Citoyen et Vert - Gironde ) QE
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  30/03/1998  page :  1728
Réponse publiée au JO le :  25/01/1999  page :  448
Rubrique :  assurances
Tête d'analyse :  contrats
Analyse :  tarification en fonction de la carte génétique de l'assuré. légalité
Texte de la QUESTION : M. Noël Mamère attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les risques discriminatoires liés à la carte génétique des personnes. Le 1er janvier 1999 verra la fin du moratoire que s'est donné la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) pour instaurer ou non la possibilité de tarifer les contrats en fonction de la carte génétique des personnes. Il y a quelques mois, l'UNESCO adoptait une déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme, exposant notamment que « nul ne doit faire l'objet de discriminations fondées sur ses caractéristiques génétiques, qui auraient pour objet ou pour effet de porter atteinte à ses droits et à ses libertés fondamentales et à la reconnaissance de sa dignité ». L'organisation internationale recommandait en conséquence la mise en oeuvre de législations nationales permettant de protéger les populations contre toutes sélections ou exclusions sur des critères génétiques. Aujourd'hui, en France, dans le domaine de la protection sociale complémentaire, les usagers n'ont pas de loi de portée générale les garantissant contre ces techniques sélectives. En conséquence, il demande si le Gouvernement envisage, dans le cadre de la révision des lois bioéthiques, d'interdire aux compagnies d'assurances des pratiques discriminatoires à partir du capital génétique de chacun.
Texte de la REPONSE : La loi du 29 juillet 1994 relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal a introduit dans le code de la santé publique un titre spécifique consacré à la médecine prédictive, l'identification génétique et la recherche génétique. Ces dispositions ont été complétées par une loi ultérieure du 28 mai 1996. Mais, dès 1994, le législateur avait pris conscience des risques que pouvait constituer pour les droits de la personne l'utilisation systématique et sans encadrement des tests génétiques. Seules les finalités médicales, scientifiques ou judiciaires avaient paru légitimes pour l'utilisation de ces tests qui révèlent non seulement le patrimoine génétique de la personne mais également de sa descendance. Compte tenu des enjeux pour les droits de la personne et les dérives discriminatoires envisageables, il était apparu indispensable au législateur de sanctionner pénalement tout détournement de finalité. Ainsi, en application de l'article L. 145-18 du code de la santé publique, l'utilisation des résultats des tests génétiques par un assureur pour évaluer le montant de ses primes n'appartient pas aux finalités légitimes déterminées par le législateur. Ces dispositions sont actuellement soumises à évaluation comme l'ensemble de la loi du 29 juillet 1994. Elles nécessiteront sans doute une relecture tant au regard du droit des assurances et notamment de l'obligation de bonne foi à la charge de l'assuré qu'au regard des dispositions du code pénal sur le principe de non-discrimination et de ses exceptions notamment en faveur des assureurs. Toutefois, concernant la médecine prédictive et l'utilisation des tests génétiques comme révélateurs de maladies futures ou de risques de maladie future, de récents instruments juridiques internationaux impliquent désormais d'interdire et de sanctionner toute discrimination à l'encontre d'une personne à raison de son patrimoine génétique. Il s'agit de la Déclaration universelle de l'Unesco sur le génome humain et de la Convention européenne sur les droits de l'homme et la biomédecine, textes que la France a signés et que, pour la seconde, elle devrait bientôt ratifier. En application de ce principe de non-discrimination, il apparaît difficile que notre dispositif juridique autorise à l'avenir l'utilisation de tests génétiques prédictifs en dehors du domaine de la santé ou de la recherche, toute utilisation dans le cadre de l'assurance ou de l'emploi, par exemple, étant susceptible d'être sanctionnée comme discriminatoire.
RCV 11 REP_PUB Aquitaine O