Texte de la QUESTION :
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Mme Nicole Feidt expose à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement que, très souvent, le vocabulaire utilisé dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire se rapproche dangereusement, par ses connotations politiques, des thèses maurasiennes développées en leur temps et ultérieurement par la révolution nationale. Elle lui demande s'il ne serait pas possible, aussi bien au niveau des mots employés que des idées développées, de s'éloigner de ces idées pernicieuses et d'adopter des mots et des thèses résolument modernes et adaptés à l'évolution de notre temps. Elle lui indique notamment que l'augmentation récente de la représentation politique dans les conseils régionaux d'un parti d'extrême droite, qui trop souvent s'appuie sur une idéologie d'exclusion héritière des thèses en question, renforce cette demande.
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Texte de la REPONSE :
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Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative au vocabulaire employé dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire. La politique d'aménagement du territoire n'a bien entendu, rien de commun avec le « monarchisme intégral » d'un Charles Maurras, défenseur nostalgique des libertés provinciales, ou le régionalisme autoritaire du régime de Vichy, éminemment répressif et meurtrier, qui se rejoignent tous deux dans une semblable haine des principes républicains. Ce n'est pas une simple question de vocabulaire. A mille lieux du passéisme, des incohérences et de la dangerosité des idéologies se réclamant d'une « nationalisme fermé », la politique d'aménagement et de développement du territoire doit accompagner les formidables mutations que connaît l'espace national, lequel est désormais inscrit dans l'Europe et ouvert aux dynamiques mondiales. Pour assurer la cohésion sociale, le développement durable et la dynamisation des territoires, le Gouvernement a décidé de relancer la politique d'aménagement du territoire, comme l'a acté le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire du 15 décembre 1997. Le CIADT a ainsi, tout particulièrement, défini les principes devant présider à la révision de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT) du février 1995 : la clarification des rôles assumés par l'Etat et les autres acteurs de l'aménagement du territoire, le souci de ménager le territoire et la mise en oeuvre d'une organisation des territoires en adéquation avec les réalités de la vie collective et du développement économique. Cette politique doit être ambitieuse et prendre en compte la mondialisation des échanges et l'intégration européenne afin de valoriser le capital social et économique de chaque territoire. A l'aube du XXIe siècle, le Gouvernement est convaincu de l'importance que revêt l'implication de tous les acteurs territoriaux dans la politique de l'aménagement du territoire. La nécessité d'articuler les politiques publiques d'aménagement du territoire aux dynamiques territoriales justifie le recours à certains mots et expressions empruntés à notre patrimoine et à nos traditions historiques. L'exemple des « pays » est, à cet égard, particulièrement symptomatique. Comme en témoigne l'origine latine du mot pagus, le pays renvoie à un niveau de découpage territorial, et parfois même à certains périmètres locaux, en vigueur dès l'Antiquité. Cette « trame indestructible » (expression de Jean-Marc Ohnet), identifiée par des noms propres avec une forte couleur locale, a ainsi été fréquemment invoquée au cours de notre histoire. De l'époque médiévale jusqu'au XXe siècle, l'unité naturelle et l'ancrage historique des pays ont alimenté, de façon récurrente, cette « redécouverte », assez inventive toutefois, d'un découpage territorial considéré comme ancestral. On pourrait citer ainsi de fameux géographes, comme Elisée Reclus ou encore Pierre Vidal de la Blache, au tournant du siècle. En 1995, la loi n'a pas seulement reconnu la notion de pays. Elle a surtout reconnu des espaces de projets tournés vers une conception dynamique et performante du développement territorial. Le pays doit être le cadre d'une approche profondément renouvelée de l'aménagement du territoire et doit favoriser les pratiques intercommunales, la participation et la concertation de l'ensemble des acteurs au service d'un projet de territoire. C'est dans cette perspective que le Gouvernement prépare aujourd'hui la résivion de la LOADT.
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