FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1421  de  Mme   Fraysse Jacqueline ( Communiste - Hauts-de-Seine ) QG
Ministère interrogé :  santé et action sociale
Ministère attributaire :  santé et action sociale
Question publiée au JO le :  10/06/1999  page :  5607
Réponse publiée au JO le :  10/06/1999  page :  5607
Rubrique :  consommation
Tête d'analyse :  sécurité alimentaire
Analyse :  produits alimentaires
DEBAT : M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le secrétaire d'Etat à la santé, je n'aurai pas, comme la droite, le souci de polémiquer sur les fax pour éviter de parler de la politique ultralibérale qui est, en réalité, à l'origine des problèmes graves que nous devons traiter aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Après les scandales du sang et des hormones de croissance contaminés (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), ceux de la vache folle et de la viande aux hormones sans parler du maïs génétiquement modifié, l'affaire des poulets, des oeufs, du lait et des produits laitiers contenant de la dioxine confirme qu'il s'agit non pas de simples accidents de parcours, d'erreurs regrettables ou de malheureux concours de circonstance, mais bien d'un problème réel, posé à notre société, de contrôle et de protection de la santé face aux appétits financiers d'un ultralibéralisme sans limites. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Il n'est pas question de contribuer à développer une quelconque psychose qui d'ailleurs ne réglerait rien, au contraire, mesdames, messieurs de la droite. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Comprenons cependant que chacun se demande légitimement ce qu'il mange et fait manger à ses enfants ; qui joue avec notre santé traitée comme une carte mineure sur l'échiquier d'un gigantesque Monopoly des grands groupes de l'industrie agroalimentaire et de la distribution ; qui contrôle quoi puisque cela continue et se répète ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.
Mme Jacqueline Fraysse. Plus que jamais, face à l'avancée des connaissances, se pose à notre société la question de la transparence dans l'accès à l'information, l'élaboration et la prise de décision qui ne peuvent plus rester au secret dans les mains de quelques techniciens experts soumis à la pression des marchés.
Il est urgent que s'installe un véritable contrôle démocratique...
M. Yves Nicolin. Vous ne savez pas ce qu'est la démocratie !
Mme Jacqueline Fraysse... par les salariés et leurs représentants syndicaux dans les entreprises, par les citoyens et leurs élus. C'est aussi l'un des enjeux que nous devrions nous fixer dans le cadre de la construction européenne.
Monsieur le ministre, quelles dispositions envisagez-vous de prendre...
M. Yves Nicolin. Aucune !
Mme Jacqueline Fraysse. ... et de mettre en chantier aux plans national, européen et international, pour faire prévaloir la santé publique sur les intérêts financiers, comme cela commence à se réaliser dans d'autres domaines, tel celui du sport avec Marie-George Buffet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur divers bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Madame la député, la première des exigences, vous l'avez dit, c'est la transparence et, pour qu'il y ait transparence, il faut qu'il y ait information. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Vous avez cité quelques-unes des crises qui sont intervenues et vous avez demandé ce que nous comptions faire aux plans français, européen et international.
D'abord, je conviens avec vous que la production telle qu'elle est organisée et la nourriture industrielle telle qu'elle est proposée entraînent, s'il n'y a pas de contrôle, des risques pour la santé publique. Or, les contrôles ne sont pas évidents, ne sont pas permanents et ne sont pas codifiés, en particulier au plan européen.
Aujourd'hui, madame la député, nous mettons en place le comité national de sécurité sanitaire, que vous avez voté à l'unanimité, je vous le rappelle, (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), qui comprend trois agences : l'agence de sécurité des médicaments, l'institut de veille sanitaire et la nouvelle agence de sécurité alimentaire.
M. Richard Cazenave. Vous croyez que ça sert à quelque chose ?
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Il manquera une agence santé-environnement. J'espère qu'elle verra le jour.
M. Jean Auclair. Demandez-le à Cohn-Bendit !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Il a été reconnu par la Commission de Bruxelles qui, pourtant n'a pas été tendre, on vous l'a rappelé, que notre système de sécurité sanitaire, même s'il restait insuffisant, était de loin le plus performant des pays de l'Union. Et on l'a vu dans cette crise.
M. Pierre-Christophe Baguet. Cocorico !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Il a été reconnu également que l'information n'était pas parvenue assez vite à la Commission. Vous avez rappelé que, le 3 mai, un fax aurait pu être transmis, et ne l'a pas été, et nous le regrettons maintenant.
M. Pierre Lellouche. Si le Gouvernement faisait son travail, il l'aurait été !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Sachez que la Commission elle-même n'a pas été informée. Vous le savez, monsieur Lellouche.
M. Pierre Lellouche. Ce n'est pas à la Commission mais à vous de faire les contrôles !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Il faut mettre en place - c'est ma réponse sur le plan européen - une agence européenne de la sécurité alimentaire. J'en ai proposé la création hier.
Jean Glavany et moi-même avons également estimé que les farines animales, celles destinées aux herbivores comme les autres, monsieur Angot, puisqu'elles ne sont pas contrôlables, et en tout cas pas assez contrôlées, devront sans doute être interdites. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Arnaud Lepercq. C'est une bêtise !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Je sais que cela pose un certain nombre de problèmes techniques qu'il nous faut aborder clairement. On a parlé aujourd'hui des boues. Il y en a bien d'autres.
M. Arnaud Lepercq. Il faut réfléchir et se renseigner avant d'agir !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Je vous répondrai enfin sur le plan international. La commission de sécurité sanitaire européenne, dont j'espère la création, aura à s'occuper de bien d'autres problèmes encore : l'utilisation d'hormones dans des élevages américains, l'utilisation d'antibiotiques dans des élevages européens, la question des organismes génétiquement modifiés. Sur toutes ces questions, nous devons faire un effort.
Je terminerai, madame, en vous disant ceci : sur le plan sanitaire, la crise de la dioxine nous a conduits à prendre des mesures de précaution parfois excessives mais c'est la règle.
C'est parce que nous n'avons pas su prendre des mesures de prévention que nous avons été obligés de prendre des mesures de précaution qui pénalisent un certain nombre de personnes travaillant dans cette filière. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Sur le plan sanitaire, en l'état actuel de nos connaissances - et, les premiers en Europe, nous avons réussi à réunir vendredi dernier les meilleurs experts de notre pays à l'agence de sécurité alimentaire -, il n'y a pas de danger pour la santé publique. En tout cas, l'exposition maximum à la dioxine telle qu'elle aurait pu intervenir par la consommation de poulets ou de produits laitiers n'entraînerait pas, dans l'état actuel des connaissances, je le répète - cela peut évidemment changer -, de danger pour la santé des individus, même pour ceux qui ont consommé ces poulets.
Pour que ce soit dangereux, il faut - c'est une expression malheureuse - des expositions répétées et prolongées. Nous souhaitons bien entendu qu'il n'en ait pas été ainsi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Arnaud Lepercq. Qui mange du poulet à tous les repas ?
COM 11 REP_PUB Ile-de-France O